B. L'ENVIRONNEMENT INTERNATIONAL

1. L'OMC

La Conférence ministérielle qui s'est tenue à Seattle du 30 novembre au 3 décembre 1999 devait permettre de définir le calendrier et le contenu du prochain cycle de négociations multilatérales, axé prioritairement sur l'agriculture et les services.

Cette Conférence ministérielle s'est arrêtée sur un constat d'échec en raison de la persistance de divergences sur les futures négociations, aggravées par les surenchères des Etats-Unis, dont la campagne électorale pour l'élection présidentielle commençait.

Le projet de déclaration ministérielle du 3 décembre 1999 était tout à fait inacceptable en matière agricole. Il proposait, en effet, de supprimer la reconnaissance du statut spécifique de l'agriculture au regard de l'application des règles de l'OMC. En outre, il refusait de prendre réellement en compte les préoccupations d'ordre social et environnemental dans les négociations agricoles. Enfin, il appréhendait de manière trop restrictive les soutiens à l'exportation qu'il conviendrait de supprimer.

Après l'échec de la conférence ministérielle de Seattle, les 135 Etats membres de l'OMC ont décidé le 7 février 2000, que les négociations sur la libéralisation de ces secteurs allaient reprendre en dehors du cadre d'un nouveau round. Les négociations agricoles se déroulent donc, depuis le 20 mars, au sein de sessions spéciales du Comité pour l'agriculture de l'OMC.

Au cours de la première session spéciale de l'année, au mois de mars 2000, les Etats-membres se sont accordés sur un calendrier pour les douze mois suivants. Ils ne sont en revanche pas parvenus à s'entendre sur la désignation d'un président pour le comité spécial sur l'agriculture, en raison de divergences trop fortes entre l'Union européenne et le groupe de Cairns.

A l'occasion de la session spéciale des 29 et 30 juin 2000, ont été présentées des prises de position émanant des grands pays ou groupes de pays exportateurs.

Confortés par la position du groupe de Cairns, les Etats-Unis se sont ainsi prononcés en faveur d'une réduction globale et sans exception des tarifs, ainsi que d'une élimination complète des subventions à l'exportation.

L'Union européenne a, pour sa part, présenté :

- une contribution sur le soutien interne qui légitime le maintien des mesures internes de soutien à la réduction de la production (aides dites de la boîte bleue) ;

- une contribution sur les produits de qualité, qui plaide pour la création d'un régime d'appellations traditionnelles et géographiques protégées dans le cadre de l'OMC ;

- une prise de position sur le bien-être animal.

Lors de la session spéciale des 28 et 29 septembre 2000, l'Union européenne a présenté une nouvelle position dans laquelle elle accepte le principe d'une nouvelle réduction des subventions à l'exportation, sous réserve que toutes les formes de soutien à l'exportation des produits agricoles et alimentaires soient visées, y compris :

- les crédits à l'exportation ;

- l'utilisation de l'alimentaire par les pays donateurs comme un moyen d'écouler les surplus pesant sur les prix ;

- ou encore la pratique des entreprises commerciales d'Etat - entreprises contrôlant une part importante des exportations de produits tels que le blé dans un pays, et qui bénéficient de privilèges exclusifs.

Par ailleurs, le Conseil agricole de l'Union européenne a débattu, le 23 octobre 2000, de la position des Quinze à l'égard de la " proposition globale de négociation " qui sera examinée lors de la prochaine session spéciale de l'OMC, fin novembre. La position établie par les ministres de l'agriculture de l'Union européenne rappelle les exigences de ses contributions écrites et souligne l'enjeu d'une adhésion de l'opinion publique aux futures négociations, ce qui implique que des préoccupations telles que la sûreté alimentaire ou le bien-être animal soient prises en considération.

Votre rapporteur pour avis réitère le souhait, exprimé dans son précédent avis, que l'Union européenne, notamment à l'occasion de la présidence française, défende lors de ces négociations, le modèle agricole européen et la PAC.

Dans un rapport sur la politique commerciale de l'Union européenne, publié le 14 juillet dernier, l'OMC a de nouveau critiqué la politique agricole européenne fondée sur d'importantes aides au secteur agricole communautaire, ainsi que sur des obstacles à l'entrée de produits des pays tiers. Les prélèvements à l'importation en 1999 auraient été de 17,3 % pour les produits agricoles, contre seulement 4,2 % pour les produits industriels.

2. Les rapports de l'Union européenne et des Etats-Unis

a) Les différends commerciaux

L'Union européenne n'ayant pas appliqué les décisions de l'OMC relatives au conflit du " boeuf aux hormones " et à celui du régime d'importation des bananes, les Etats-Unis ont résolu de mettre en place un système de sanctions commerciales tournantes, dit " législation carroussel ", sur la base d'une loi votée le 18 mai 2000. Aux termes de celle-ci, l'administration américaine est en effet tenue de réviser les sanctions qu'elle impose tous les six mois, afin d'en évaluer l'efficacité.

A la suite de cette décision, l'Union européenne a déposé le 5 juin dernier une demande de consultations à l'OMC, estimant que ce système de sanctions tournantes est de nature à affecter la prévisibilité des relations commerciales multilatérales.

Par ailleurs, le différend entre l'Union européenne et les Etats-Unis est toujours alimenté par les subventions déguisées aux exportations que permet le régime des Foreign Sales Corporation (FSC). Les Etats-Unis sont actuellement contraints, sous la pression de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), de réviser ce régime fiscal qui octroie d'importantes exonérations d'impôts aux filiales étrangères d'entreprises exportatrices américaines installées dans des paradis fiscaux.

Cependant, le projet de révision de ce dispositif n'était toujours pas voté le 31 octobre dernier, alors que l'OMC avait fixé au 1 er novembre 2000 le délai accordé aux Etats-Unis pour procéder à cette révision.

L'Union européenne, qui évalue à 4 milliards de dollars le montant des subventions déguisées aux exportations octroyées par les FSC, paraît déterminée à bloquer en réaction une partie des importations américaines, sous réserve d'une autorisation de l'OMC.

b) La politique agricole américaine

Le régime du Fair Act, qui semblait mettre en place une politique agricole libérale tendant à réduire les aides à l'agriculture, pourrait être supprimé.

En effet, une réflexion se fait jour aux Etats-Unis sur l'élaboration d'une nouvelle loi agricole, destinée à remplacer le Fair Act, dont l'échéance est fixée à 2002.

Les orientations retenues pour cette future loi font apparaître une volonté de mettre en place des aides plus directes et couplées au marché, qui permettraient la compensation des pertes de revenus des agriculteurs.

Ces propositions, qui vont à l'encontre de la logique du Fair Act, sont sous-tendues par l'argument selon lequel ce dernier n'aurait pas permis de stabiliser les prix agricoles, de sorte que des aides exceptionnelles, d'un montant total de 20 milliards de dollars en 1999 et 28 milliards de dollars en 2000 ont dû être versées.

Ce changement de cap de la politique agricole américaine devrait, s'il était confirmé, conduire l'Union européenne à s'interroger sur l'opportunité de renoncer aux aides au revenu et de mettre à bas le système des organisations communes de marché au moment où les Etats-Unis reviennent précisément à une logique protectionniste.

Le commissaire européen à l'agriculture, M. Franz Fischler, a récemment dénoncé la progression des soutiens directs à l'agriculture américaine, estimant à 16.000 dollars le montant moyen annuel des soutiens versés chaque année par agriculteur, soit plus du triple de la somme allouée par agriculteur européen.

3. La politique de l'Union européenne vis à vis des pays tiers

a) Les pays ACP

Un accord de partenariat, remplaçant la Convention de Lomé IV qui arrivait à échéance en février 2000, a été signé le 31 mai 2000 par les Etats membres de l'Union européenne et par les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique.

Cet accord vise à favoriser l'intégration des pays ACP dans les échanges mondiaux, en les incitant à conclure des accords régionaux de partenariat avec lesquels l'Union européenne passerait ensuite des accords de libre-échange. Il s'agit de substituer un partenariat régional au dispositif actuel de préférences unilatérales dont bénéficient les produits de ces pays à leur entrée sur le marché européen.

L'accord de partenariat signé en mai est assorti d'un " protocole banane " par lequel l'Union européenne s'engage à garantir l'accès au marché communautaire des bananes des pays ACP, ainsi que deux déclarations conjointes, portant l'une sur le rhum et l'autre sur le riz.

Une enveloppe de 13,5 milliards d'euros sera destinée aux pays ACP en accompagnement de ce nouveau partenariat.

b) Les relations de l'Union européenne avec les pays méditerranéens

De nouvelles concessions devraient être accordées par l'Union européenne au Maroc, à la Tunisie et à Israël, à l'occasion de la prochaine révision des protocoles agricoles de leurs accords d'association.

Votre rapporteur pour avis rappelle que les organisations professionnelles agricoles ont souhaité que ces concessions soient assorties de mesures compensatoires en faveur de l'agriculture européenne.

Par ailleurs, la Commission européenne a annoncé en septembre dernier des mesures visant à accélérer la libéralisation du commerce agricole avec les pays parties au processus de Barcelone, en vue de créer une zone de libre-échange à l'horizon 2010.

c) Les relations avec l'Afrique du Sud

L'accord de commerce et de coopération, conclu le 24 mars 1999, devait entrer en vigueur au 1 er janvier 2000. Son application a été repoussée à plusieurs reprises en raison de la réticence de l'Afrique du Sud à permettre l'application des deux accords annexes sur les vins et spiritueux signés en octobre 1999.

Les divergences actuelles concernent la fixation du début de la période transitoire de douze ans pendant laquelle l'Afrique du Sud pourra encore recourir sur son marché intérieur aux appellations porto et sherry, ainsi que sur les modalités d'octroi des aides communautaires au secteur des vins et spiritueux de ce pays.

Votre rapporteur pour avis rappelle, à cet égard, que la Commission des Affaires économiques a adopté le 10 novembre 1999, sur le rapport de notre collègue Gérard César, une proposition de résolution de M. Hubert Haenel, relative à la mise en oeuvre de l'accord de commerce et de développement entre l'Afrique du Sud et la Communauté européenne, et plaidant en faveur d'une position ferme de cette dernière dans le traitement du dossier du vin, afin de garantir une réelle protection des appellations européennes.

4. L'analyse de l'OCDE

Dans son dernier rapport consacré aux politiques agricoles de ses pays membres, l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) critique la hausse persistante des aides à l'agriculture, qui freine la libéralisation des échanges agricoles.

Confortant une tendance amorcée l'année précédente, ces aides à l'agriculture auraient augmenté en 1999 de 3 %. D'un montant total de 361 milliards de dollars, elles représentent 1,4 % du PIB de la zone OCDE.

Le taux de soutien aux producteurs varie cependant selon les pays membres. Inférieur à 10 % en Australie et en Nouvelle-Zélande, membres du groupe de Cairns, il dépasse 65 % au Japon, en Corée, en Norvège et en Suisse.

Il convient de noter que les deux tiers de ces aides ont été allouées aux producteurs au titre du soutien aux prix du marché. L'essentiel des soutiens au secteur agricole s'explique donc par la faiblesse des prix mondiaux et par les tensions qui en résultent sur le revenu des agriculteurs.



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