2. La création d'un répertoire national des retraites (article 20)
Le rapport Charpin a mis en lumière la nécessité de se doter d'instruments techniques propres à apporter une aide, mise à jour en continu, à l'analyse et la décision en matière de retraites.
L'article 20 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 propose ainsi de créer deux outils :
• un répertoire national des retraites et des pensions : tous les organismes obligatoires, de base et complémentaires, ainsi que les débiteurs d'avantages (complément familial, APE, personnes assurant la charge d'une personne handicapée, assurance volontaire vieillesse et invalidité) et les organismes gérant des régimes d'invalidité, seront tenus de communiquer à un organisme qui sera créé par décret en Conseil d'Etat toutes les informations sur la nature et les avantages servis, l'identification des assurés, de leurs ayants-droit et leurs droits ;
• un échantillon statistique inter-régime de cotisants, anonyme et représentatif, destiné à des études en continu et à des simulations.
Ces instruments figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, cependant votre rapporteur pour avis émet des doutes sur leur recevabilité au regard du champ défini par la loi organique pour les lois de financement de la sécurité sociale. L'insertion, à l'initiative du rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, notre collègue député M. Jérôme Cahuzac, de la transmission tous les deux ans au Parlement et au Conseil d'orientation des retraites d'une synthèse des travaux permettra peut-être de lever cette difficulté constitutionnelle.
Votre rapporteur pour avis estime que cette mesure va dans le bon sens. Elle ne doit cependant pas être une incitation à un attentisme motivé par le lancement de nouvelles études et projections mais véritablement constituer un outil d'aide à ce qui manque le plus en matière de retraite : la décision.
3. La pérennisation de l'interdiction du cumul emploi - retraite (article 21)
L'article 21 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 supprime toute limitation dans le temps des dispositifs existants restreignant le cumul emploi - retraite.
Les règles de limitation du cumul emploi - retraite ont été fixées corrélativement à l'abaissement de l'âge de la retraite par l'ordonnance n° 82-290 du 30 mars 1982 pour le régime général et le régime des pensions civiles et militaires, puis ont été étendues aux professions non salariées. Le cumul d'une pension de retraite avec une activité rémunérée est soumis à la condition de l'abandon de l'emploi occupé lors de la demande de liquidation de la pension. S'ils souhaitent pouvoir cumuler, les salariés doivent exercer leur activité chez un nouvel employeur, et les non salariés, exercer une autre profession.
Ces règles ont été régulièrement reconduites, la dernière fois par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 jusqu'au 31 décembre 2000, ce délai se justifiant, pour le gouvernement, par la nécessité d'analyser complètement le dispositif. M. Balmary a ainsi remis un rapport au gouvernement, qui montrerait " que ce dispositif auquel les partenaires sociaux sont fortement attachés, ne soulève pas de critique majeure de leur part et n'occasionnera pas de tensions particulières. Par ailleurs, il est probable que la suppression de ce dispositif aurait un impact non négligeable sur le chômage puisque les retraités pourraient, sans limitation, poursuivre leur activité professionnelle " 47 ( * ) .
Or, la lecture du rapport indique que cette vision des choses pêche par trop d'optimisme, ainsi que l'indique les citations figurant dans le rapport de notre collègue député Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour la vieillesse : " Aujourd'hui, dans un champ très large, mais criblé de dérogations ponctuelles, ne subsiste plus que l'interdiction faite à celui qui demande la liquidation de l'intégralité de sa retraite à partir de 60 ans, de poursuivre son activité antérieure ".
Déjà, le rapport Charpin avait considéré que les règles actuelles souffraient de complexité, de trop nombreuses dérogations, pour un effet très limité sur le niveau de l'emploi.
Votre rapporteur pour avis ne peut que s'interroger sur ces discordances entre le texte du rapport et sa lecture par le gouvernement. Il n'y voit qu'un exemple supplémentaire à la fois de sa volonté de tromperie et de son incapacité à définir clairement sa doctrine en matière de retraites. Or, s'agissant du cumul entre pension de retraite et revenus d'activité, la question dépasse les seuls équilibres financiers et statistiques du chômage. C'est une question de société qui mérite, elle aussi, plus qu'un simple article rapidement examiné du projet de loi de financement. Il n'a pas fait l'objet d'un instant de débat à l'Assemblée nationale. Quelle place pour le cumul dans la société future ? Que faire des situations inégalitaires qui prévalent aujourd'hui sur ce sujet ? Ne veut-on pas plus de flexibilité, de souplesse, de liberté dans ses choix de vie ? Ces questions sont loin d'être anodines et attendent des réponses que ne livre pas le gouvernement.
* 47 Exposé des motifs du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001.