ALLEMAGNE



L'article 3 de la Loi fondamentale , qui est consacré à l'égalité devant la loi, énonce à l'alinéa 3 : " Nul ne doit être défavorisé ou avantagé en raison de son sexe, de son ascendance, de sa race, de sa langue, de sa patrie et de son origine géographique, de ses croyances, de ses opinions religieuses ou politiques. Nul ne doit être défavorisé en raison de son handicap. "

Ce principe constitutionnel n'a été que peu développé dans la législation, où les dispositions explicites à cet égard sont fragmentaires. Dans le domaine de l'emploi, les principaux textes qui évoquent l'interdiction de la discrimination sont les lois sur les fonctionnaires et sur les conseils d'établissement, ainsi que le code social.

1) Les pratiques discriminatoires explicitement interdites par la loi

Le principe formulé à l'article 3-3 de la Loi fondamentale interdit la plupart des discriminations, mais n'évoque pas la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

Par ailleurs, l'article 3-3 de la Loi fondamentale ne s'applique pas directement aux relations de droit privé
, et notamment aux relations entre employeurs et salariés. En effet, d'après l'article 1-3 de la Loi fondamentale, les droits fondamentaux que cette dernière énonce, parmi lesquels le principe de non-discrimination, ne s'imposent directement qu'aux pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire . L'article 3-3 vise donc avant tout à protéger les particuliers contre d'éventuels abus commis par les pouvoirs publics. Cependant, comme tous les autres articles relatifs aux droits fondamentaux, l'article 3-3, par l'obligation qu'il constitue pour le législateur, le gouvernement et les tribunaux, a un effet indirect sur les tiers .

De plus, à partir de l'obligation contractuelle qu'a l'employeur de prendre en compte les intérêts des salariés et de tout mettre en oeuvre pour assurer le bien-être de ces derniers, la jurisprudence a adapté le principe constitutionnel de non-discrimination au droit du travail : le principe d'égalité de traitement interdit à l'employeur toute différence de traitement reposant sur des motifs subjectifs ou arbitraires. Par conséquent, l'employeur n'a pas le droit de traiter différemment un salarié d'un groupe donné par rapport aux autres salariés du même groupe. Il a en revanche le droit d'établir une distinction entre différents groupes de salariés, dans la mesure où la distinction repose sur un critère objectif (situation familiale, ancienneté...).

Outre ce principe général, quelques dispositions législatives interdisent explicitement certaines pratiques discriminatoires en matière d'emploi.

La loi-cadre sur les fonctionnaires
énonce, à l'article 7, que les nominations doivent être faites en tenant compte de l'aptitude des candidats, indépendamment de toute considération de sexe, d'ascendance, de race, de croyance, d'opinions religieuse ou politique, d'origine sociale ou de parenté.

L'article 7 de la loi sur les fonctionnaires fédéraux reprend la même formulation.

La loi sur les conseils d'établissement précise, à l'article 75, que les employeurs et les conseils d'établissement doivent veiller à ce que tous les salariés soient traités conformément aux principes du droit et de l'équité. Cet article interdit en particulier toute différence de traitement fondée sur l'ascendance, la religion, la nationalité, l'origine, les activités politiques ou syndicales, les opinions ou le sexe.

L'article 36 du livre III du code social interdit aux bureaux publics de placement de prendre en compte certains des critères dont l'employeur demande qu'ils soient remplis par le candidat à l'emploi (relatifs à l'âge, à l'état de santé ou à la nationalité par exemple) lorsqu'ils n'ont aucun lien avec le poste à pourvoir.

L'article 2-1 de la loi sur la promotion de l'emploi interdit à l'employeur de défavoriser les salariés qui travaillent à temps partiel.

2) Les sanctions de ces interdictions

Conformément à l'article 134 du code civil, tout acte juridique qui enfreint une interdiction législative est frappé de nullité , à moins que l'interdiction ne soit assortie d'une autre sanction. En théorie, les décisions discriminatoires de l'employeur ne produisent donc aucun effet.

La loi sur les comités d'entreprise prévoit que, si l'employeur viole de manière grossière l'une des obligations qu'elle lui impose, la juridiction du travail peut lui imposer de renoncer à une décision antérieure ou, au contraire, de prendre une décision donnée.

Seule une minorité de juristes affirme que la violation du principe d'égalité de traitement peut justifier une demande de dédommagement des préjudices matériels sur la base de l'article 823 du code civil, lequel énonce : " quiconque porte illicitement atteinte, intentionnellement ou par imprudence, à la vie, à l'intégrité corporelle, à la santé, à la liberté, au droit de propriété ou à un autre droit d'autrui est tenu envers autrui de réparer le dommage qui en résulte ". En effet, il faudrait pour cela que le principe d'égalité de traitement fît partie, comme le " droit général de la personnalité ", des droits que la jurisprudence considère comme susceptibles de justifier une action fondée sur l'article 823 du code civil. Or, il n'est pas évident qu'une discrimination constitue une violation du " droit général de la personnalité ".

3) Les procédures spécifiques permettant aux victimes de faire valoir leurs droits

Il n'en existe aucune. Pour faire valoir leurs droits, les victimes de discriminations doivent donc utiliser les règles de droit commun . Elles doivent en particulier apporter la preuve de la discrimination.

L'article 23 de la loi sur les conseils d'établissement justifie que le conseil d'établissement lui-même ou l'un des syndicats représentés dans l'entreprise entame une action en justice en cas de " violation grossière " de l'une des obligations énoncées par cette même loi . Or, l'interdiction de la discrimination figure parmi ces obligations. Cependant, la possibilité offerte par l'article 23 de la loi sur les conseils d'établissement ne constitue en aucun cas un droit du salarié, qui ne peut donc pas exiger l'intervention du conseil d'établissement ou du syndicat.

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Les défenseurs des minorités (des étrangers, des homosexuels...) font valoir la quasi-absence de législation explicite sur l'interdiction de la discrimination et l'inefficacité des dispositions constitutionnelles.

C'est pourquoi plusieurs propositions tendant à prohiber les discriminations dans plusieurs domaines, parmi lesquels l'emploi , ont été préparées au cours des dernières années. Ces textes définissent la discrimination et le champ d'application de l'interdiction des discriminations. Ils prévoient des aménagements aux règles de preuve et permettent à certaines personnes morales (syndicats, associations de défense des droits de l'homme) d'intervenir au nom des victimes de discriminations dans toute procédure judiciaire ou extrajudiciaire.

Le dépôt d'un projet de loi sur l'interdiction de la discrimination faisait partie du programme de gouvernement du SPD et des Verts.

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