ALLEMAGNE
1) Le régime général des délits d'imprudence et de négligence
L'article 15 du code pénal énonce
:
"
Seul l'acte intentionnel est punissable, à moins que la loi ne
sanctionne expressément l'acte commis par négligence
".
Le code oppose donc la négligence à l'intention, mais ne
définit aucune des deux notions.
Parmi les actes commis par négligence, le code pénal sanctionne
notamment toutes les atteintes à l'environnement (pollution de l'air, de
l'eau, dépôt non autorisé de déchets dangereux ou
toxiques...), ainsi que l'incendie et la plupart des autres infractions se
traduisant par un " danger public " (provocation d'une inondation,
d'une explosion...). En revanche, dans les articles du code pénal
consacrés, d'une part, à l'homicide et, d'autre part, aux coups
et blessures, le mot " négligence " ne figure pas. La
distinction s'établit différemment : le code oppose
l'homicide à l'homicide commis par un assassin (c'est-à-dire par
une personne poussée par la cupidité ou par l'instinct sexuel par
exemple). De même, il distingue les coups et blessures des coups et
blessures prémédités.
La doctrine distingue la négligence " consciente " de la
négligence " inconsciente ". La première correspond aux
cas où l'auteur prévoit que son acte aura des conséquences
illicites, mais espère qu'elles ne se produiront pas. La seconde
correspond à ceux où l'auteur ne prévoit pas les
conséquences de son acte, mais où il aurait dû le faire
s'il avait fait preuve de la diligence habituelle dans les rapport
sociaux.
2) La responsabilité pénale des personnes morales
Le
code pénal allemand ignore la notion de responsabilité
pénale des personnes morales
. Par conséquent, en application
de
l'article 14 du code pénal
relatif à
"
l'action pour autrui
", le maire, représentant
légal de la commune, peut voir sa propre responsabilité
pénale mise en cause lorsque la commune commet une infraction.
L'article 14 du code pénal
prévoit en effet que, lorsque
quelqu'un agit comme représentant légal d'un personne morale, une
loi qui justifie une sanction pénale est applicable au
représentant si les éléments constitutifs de l'infraction,
bien qu'absents de sa propre personne, sont réalisés chez la
personne représentée.
Bien que les personnes morales ne soient pas responsables pénalement,
elles peuvent être sanctionnées à la suite d'une faute
commise par leur représentant légal.
En effet, le droit
pénal allemand connaît, à côté des crimes et
des délits, une autre catégorie d'infractions : les
" infractions administratives " (
Ordnungswidrigkeiten
).
Dépourvues de tout caractère pénal
(1(
*
))
, elles sont sanctionnées par une
amende
(2(
*
))
et sont régies par
une loi spécifique.
L'article 30 de la loi sur les " infractions administratives " traite
des amendes qui peuvent être imposées aux personnes morales. Il
prévoit que, si quelqu'un, agissant comme l'organe représentant
d'une personne morale ou comme membre d'un tel organe, a commis une infraction
pénale ou une " infraction administrative " à cause de
laquelle cette personne morale a failli à sa mission, ou grâce
à laquelle la personne morale s'est enrichie ou aurait dû
s'enrichir, une amende peut être imposée à cette personne
morale.
Le montant de l'amende dépend de l'infraction. S'il s'agit d'une
infraction pénale intentionnelle, elle peut se monter à un
million de marks (soit 3,35 millions de francs). Si l'infraction
pénale résulte d'une négligence, l'amende ne peut pas
dépasser 500 000 marks. S'il s'agit d'une " infraction
administrative ", le montant de l'amende est déterminé par
la loi. Il est généralement compris entre 5 et
1 000 marks. Dans tous les cas, il faut cependant tenir compte de
l'article 17 de la même loi, d'après lequel les montants
peuvent être augmentés s'ils ne compensent pas les avantages
obtenus de façon illicite par la personne morale.
Le système
des " infractions administratives " permet de sanctionner la personne
morale, mais sans que cette sanction revête une quelconque connotation
pénale.
La procédure contre la personne morale se cumule en principe avec la
procédure
, administrative ou pénale selon la nature de
l'infraction,
contre la personne
physique
, car l'article 30
de la loi sur les " infractions administratives "
énumère limitativement les cas où la procédure
contre la personne morale exclut celle contre la personne physique
. Dans la
pratique, le cumul constitue cependant l'exception
, car les poursuites
contre la personne physique ne sont engagées que si elles semblent
absolument nécessaires.
3) La responsabilité pénale des élus locaux
Le
code pénal ne comporte aucune disposition spécifique aux
élus locaux
,
qui sont donc soumis au droit commun. Cependant,
leur qualité de "
dépositaire de l'autorité
publique
" justifie que les juges usent de leur pouvoir
d'appréciation pour les sanctionner plus sévèrement.
En effet, le code pénal comporte une partie consacrée aux
infractions spécifiques aux " dépositaires de
l'autorité publique ". Font partie de ces infractions, non
seulement celles qui sont propres aux fonctionnaires, comme la
prévarication, mais aussi des infractions susceptibles d'être
commises par tout citoyen. Ainsi, l'article 340 du code pénal, qui
traite des coups et blessures, prévoit que le " dépositaire
de l'autorité publique " qui s'est rendu coupable d'une telle
infraction encourt une peine de prison comprise entre trois mois et cinq ans,
alors que cette infraction est normalement sanctionnée par une amende ou
par une peine de prison d'au plus trois ans.
En pratique, les atteintes à l'environnement constituent le motif le
plus fréquent de mise en cause de la responsabilité pénale
des élus locaux.
Ainsi, en 1992,
la Cour
fédérale suprême a condamné le maire d'une commune
du Land de Hesse pour ne pas avoir fait respecter une décision
communale, selon laquelle certains propriétaires fonciers devaient,
aussi longtemps que le réseau de collecte des eaux usées les
desservant ne serait pas raccordé à une station
d'épuration publique, faire installer et fonctionner des
équipements individuels d'épuration.