BELGIQUE
La
loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors
de l'exécution de leur travail,
qui a permis de transposer la
directive 89/391/CEE, inclut la protection de la santé au travail dans
la politique du bien-être au travail et impose à l'employeur de
créer un
service interne de prévention et de protection au
travail
ou, à défaut, de recourir à un
service
externe
agréé qui l'assiste dans la mise en oeuvre de cette
politique.
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I. L'EXERCICE DE LA MEDECINE DU TRAVAIL
1) La place du médecin du travail dans l'entreprise
La loi du 4 août 1996 oblige chaque entreprise à créer un service, interne ou externe, de prévention et de protection au travail, au sein duquel la surveillance médicale est confiée à un médecin du travail qui assume les fonctions de " conseiller en prévention ".
a) Le statut juridique du médecin du travail
•
Les services de prévention et de protection au travail
La loi du 4 août 1996 impose à l'employeur de créer un
service interne de prévention et de protection au travail
(SIPP),
dont la mission est de l'assister, ainsi que l'ensemble des salariés,
dans la mise en oeuvre de la politique de bien-être au travail,
étant entendu que les "
mesures qui ont trait à la
protection de la santé des travailleurs au travail
" font
partie de cette politique.
L'arrêté royal du 27 mars 1998 relatif au service interne,
pris pour l'application de la loi de 1996, indique que l'employeur
"
crée au sein de ce service interne un
département chargé de la surveillance
médicale
". Ce département, qui est donc institué
et géré par l'employeur, a une direction propre confiée
à un (ou plusieurs) médecin(s) du travail, qui assume(nt) les
fonctions de conseiller en prévention. Le personnel de ce
département exerce ses missions sous la responsabilité exclusive
du médecin du travail.
Il a été indiqué au cours des travaux législatifs
que les services médicaux d'entreprise mis en place en application de la
législation précédente seraient intégrés
dans les services internes de prévention et de protection au travail.
La loi de 1996 précise que, "
si le service interne ne peut pas
exécuter lui-même toutes les missions qui lui ont
été confiées (...), l'employeur doit faire appel en
complément à un
service externe agréé de
prévention et de protection au travail
(SEPP)
". C'est le
cas notamment quand le service interne ne dispose pas d'un département
chargé de la surveillance médicale. C'est aussi toujours le cas
dans les entreprises de moins de 20 salariés, où l'employeur
occupe lui-même la fonction de conseiller en prévention, et dans
celles de moins de 200 salariés qui n'appartiennent pas à
des secteurs d'activité précisés par l'arrêté
du 27 mars 1998 relatif au service interne, dans la mesure où le
conseiller en prévention n'a pas de formation spécifique.
Le service externe est créé par des employeurs qui se regroupent
en une association sans but lucratif. Il suffit que ces employeurs soient au
nombre de trois.
Les services externes se composent de deux sections : l'une chargée
de la gestion des risques et l'autre de la surveillance médicale. Les
médecins du travail de cette section sont des conseillers en
prévention et sont responsables des activités du personnel qui
les assiste.
Les employeurs ont jusqu'au 1
er
avril 2000 pour conclure un
contrat avec un service externe agréé. Les anciens services
médicaux communs à plusieurs entreprises peuvent se transformer
en section " surveillance médicale " d'un service externe,
à condition d'obtenir un agrément avant le
1
er
avril 1999.
•
La nomination des médecins du travail
Pour procéder à la nomination, dans son entreprise, d'un
conseiller en prévention (et donc d'un médecin du travail),
l'employeur doit obtenir l'accord préalable du comité pour la
prévention et la protection au travail. A défaut, l'employeur
demande l'avis de l'administration de l'hygiène et de la médecine
du travail, qui entend les parties concernées et tente de concilier les
positions de chacun. En l'absence de conciliation, cette administration donne
un avis notifié à l'employeur par pli recommandé.
L'employeur informe alors à son tour le comité pour la
prévention et la protection au travail dans un délai de trente
jours, avant de prendre sa décision.
De même, le conseil d'administration de l'association créée
par les employeurs doit obtenir l'accord préalable des membres du
comité d'avis paritaire, composé de membres représentant
les employeurs associés et de membres représentant les
travailleurs des employeurs contractants, pour désigner le conseiller en
prévention qu'est nécessairement le médecin du travail.
•
Le contrat entre le médecin du travail et l'entreprise
C'est l'employeur, ou le conseil d'administration de l'association sans but
lucratif dans le cas du service interentreprises, qui engage le médecin
du travail.
S'agissant du contrat qui s'établit entre les deux parties, la doctrine
et la jurisprudence ont longtemps hésité entre deux
qualifications : contrat de travail, qui implique un lien de
subordination, ou contrat d'entreprise, qui n'en implique pas. En vertu de ce
dernier, la partie appelée entrepreneur s'engage vis-à-vis de
l'autre, le maître d'ouvrage, à réaliser un travail
donné pour un prix déterminé en effectuant des actes
matériels ou intellectuels, sans avoir de pouvoir de
représentation.
Dans le service interne
, le médecin du travail, comme tout
conseiller en prévention, "
fait partie du personnel de
l'employeur
". Il est donc lié par un
contrat de travail
.
Dans le service externe
, le médecin du travail peut être
lié à l'association sans but lucratif par un contrat de travail
ou par un contrat d'entreprise, la loi exigeant seulement que "
cette
relation contractuelle soit établie de façon à donner des
garanties suffisantes pour parvenir à une collaboration
durable
" entre le médecin du travail et l'entreprise
auprès de laquelle il remplit sa mission. Ainsi, il peut donc avoir le
statut de salarié ou d'indépendant
.
•
La fin du contrat
La
loi du 28 décembre 1977 garantissant la protection des
médecins du travail
a institué une procédure
particulière lorsque le chef d'entreprise ou le conseil d'administration
de l'association d'employeurs envisage de rompre le contrat qui le lie au
médecin du travail.
Ainsi il est prévu :
-
une notification préalable écrite
"
des motifs
de rupture du contrat et de la preuve de l'existence de ces motifs
",
ainsi que de l'intention de rompre le contrat, au médecin du travail et
aux membres du comité pour la prévention et la protection au
travail ou du comité d'avis paritaire ;
-
l'avis du comité pour la prévention et la protection au
travail ou du comité d'avis paritaire
en cas de désaccord du
médecin du travail, qui "
doit avoir été entendu
et appelé
" ;
-
un recours devant la commission de concertation des services
médicaux du ministère de l'Emploi et du Travail
, qui tente de
concilier les points de vue et qui, en cas d'échec, se prononce sur la
question de l'indépendance technique et morale du médecin du
travail ou de sa compétence ;
-
un recours devant les tribunaux
si la commission de concertation ne
s'est pas prononcée ou n'a pas pu se prononcer dans un délai de
deux mois ;
-
une indemnité
en cas de transgression de l'interdiction de
licenciement émise par la commission de concertation ou le tribunal
compétent.
b) L'indépendance et le secret professionnel
La
loi du 4 août 1996
prévoit que le conseiller en
prévention "
remplit sa mission en toute indépendance
vis-à-vis de l'employeur et des travailleurs
". Les
arrêtés d'application indiquent que les divergences relatives
à l'indépendance du conseiller en prévention sont soumises
à l'avis de l'administration de l'hygiène et de la
médecine du travail s'agissant d'un service interne, ou à celui
de la commission de suivi
(1(
*
))
dans le
cas d'un service externe.
La loi du 28 décembre 1977
garantissant la protection des
médecins du travail prévoit, à l'article 5, qu'il ne
peut y avoir rupture du contrat lorsque "
les motifs invoqués
portent atteinte à l'indépendance technique et morale de ce
médecin
". Cette indépendance est confortée par
les dispositions du règlement général pour la protection
du travail (RGPT), qui lui laisse des initiatives quant à la
fréquence et la nature des examens médicaux à pratiquer.
L'article 148 septiès du RGPT
impose au médecin du travail
de garder confidentielles les données médicales concernant les
personnes, ainsi que toutes les informations qu'il a eu à
connaître concernant l'entreprise (installations, procédés
de fabrication, composition des produits...).
Par ailleurs, le
code de déontologie médicale,
dans son
chapitre sur le secret professionnel du médecin, précise que
celui-ci est d'ordre public et que "
le médecin du travail peut
partager avec le personnel de l'équipe médicale, lui-même
tenu au secret professionnel, les seuls renseignements indispensables à
la réalisation de sa mission
". De plus, "
la fiche
d'examen médical prévue par la loi par laquelle le médecin
du travail communique à l'employeur sa décision, ne peut contenir
aucune indication diagnostique
". Le code de déontologie
reprend ainsi les dispositions figurant déjà dans le RGPT.
En revanche, le médecin du travail communique au salarié toutes
les informations relatives à l'exposition à certains risques,
comme les radiations ionisantes par exemple.
2) La formation du médecin du travail
L'arrêté royal du 27 mars 1998 relatif aux services
externes pour la prévention et la protection du travail indique, pour
les services externes et internes, la formation requise du conseiller en
prévention qui s'occupe de la médecine du travail. C'est un
docteur en médecine qui :
"
- soit est porteur d'un diplôme qui autorise l'exercice de la
médecine du travail et qui, à la date d'entrée en vigueur
du présent arrêté, est attaché en qualité de
médecin du travail à un ou plusieurs services médicaux du
travail agréés
", la liste des diplômes
d'enseignement complémentaire de la médecine du travail
étant fixée par un arrêté royal du 12 janvier
1968 ;
"
- soit est porteur du titre de médecin spécialiste en
médecine du travail ;
" - soit a réussi la formation théorique pour obtenir le
titre de médecin spécialiste en médecine du travail et
obtient ce titre au plus tard dans les trois ans qui suivent
".
La formation de base en médecine dure six ans. Selon
l'arrêté ministériel du 11 mai 1995, l'agrément
autorisant à porter le titre professionnel de médecin
spécialiste en médecine du travail s'obtient après une
formation correspondant au moins à quatre années à temps
plein, comprenant une formation spécifique de deux ans et des stages
agréés, ainsi que la présentation d'un travail
scientifique et personnel.
II. LES INSTANCES DE CONTROLE
La surveillance du respect de ces dispositions est confiée à l'administration de l'hygiène et de la médecine du travail qui a recours, pour accomplir sa mission, aux services de l'inspection médicale du travail composée de médecins-inspecteurs du travail et d'inspecteurs adjoints d'hygiène du travail.