DANEMARK
Entre
1992 et 1996, la consommation moyenne de stupéfiants utilisés
à des fins
médicales
, mesurée en doses
quotidiennes déterminées, s'est élevée,
d'après l'Organe international de contrôle des stupéfiants,
à 30.671 par jour et par million d'habitants, plaçant le Danemark
au second rang mondial derrière l'Irlande. Ainsi mesurée, la
consommation danoise était de 60 % supérieure à la
consommation française correspondante.
L'importance de la consommation d'opiacés, conjuguée à la
forte croissance -12 %- enregistrée entre 1994 et 1996 et au fait
que seulement 10 % de la morphine consommée dans le pays soit
administrée à des patients en fin de vie, a conduit le
ministère danois de la Santé
à commander une
analyse détaillée
sur les caractéristiques de cette
consommation entre le 1
er
janvier 1994 et le
1
er
juin 1996.
Les résultats ont été publiés en décembre
1997. Ils ne concernent que les prescriptions faites à des particuliers,
et donc les achats réalisés dans des pharmacies, soit environ
90 % de la totalité. Ils excluent la consommation en milieu
hospitalier. Les principaux enseignements sont les suivants :
- 5 % de la population était traitée en 1995 ;
- le nombre moyen de patients traités a augmenté de 13 %
entre 1994 et 1995 ;
- l'augmentation de la consommation est principalement due à
l'augmentation du nombre des consommateurs, en particulier des consommateurs de
tramadol, un opiacé léger, la consommation des opiacés
forts n'ayant augmenté que de 6 % tandis que celle des
opiacés légers croissait de 22,6 % ;
- plus de la moitié des patients n'a qu'un médecin prescripteur
et 87 % des ordonnances sont rédigées par le médecin
traitant ;
- la consommation des opiacés à effet prolongé, pour
lesquels le risque d'emploi abusif est plus faible, est de 40 %
supérieure à celle des opiacés dont l'effet est
limité dans le temps ;
- le nombre de prescriptions croît avec l'âge ;
- la répartition géographique des consommateurs est assez
homogène.
1) Les règles générales
La
circulaire sur la prescription de médicaments engendrant la
pharmacodépendance
concerne plusieurs catégories de
médicaments, parmi lesquels la morphine et les autres antalgiques dont
l'action est comparable à celle de la morphine.
La circulaire actuellement en vigueur a été prise en
décembre 1995. Elle est entrée en vigueur le
1
er
janvier 1996, remplaçant alors la
précédente, qui datait de juin 1993.
Dans sa première partie, la circulaire précise que le
médecin doit, au moment de la prescription d'un tel médicament,
prêter attention au fait que l'utilisation de ce médicament peut
provoquer ou entretenir une situation de dépendance.
A l'annexe n° 1 de la circulaire, on souligne que l'état de
dépendance de certains malades peut être causé par la
prescription injustifiée d'antalgiques majeurs dans certains cas
(migraines, maux de dos et d'estomac par exemple). Dans de telles situations,
le médecin se doit de réfléchir à la
possibilité de prescrire d'autres antalgiques que des opiacés.
2) Les modalités de prescription
Elles sont contenues, d'une part, dans la circulaire mentionnée plus haut et, d'autre part, dans l'arrêté du 6 mai 1997 sur les ordonnances médicales.
a) Le prescripteur
Seul le
médecin traitant
(3(
*
))
est habilité à prescrire des antalgiques majeurs dans le
cadre d'un traitement de longue durée. En cas d'absence, le
médecin traitant doit donc se mettre d'accord avec son patient, ainsi
qu'avec la pharmacie ou, le cas échéant, un autre médecin
afin que le patient n'ait pas à s'adresser à un autre
médecin (un médecin de garde par exemple).
Si un médecin traitant a de bonnes raisons de supposer que l'un de ses
patients recourt fréquemment aux médecins de garde pour se faire
prescrire l'un des médicaments régis par l'ordonnance, il doit
prévenir ces derniers de cette situation. De même, les
médecins de garde doivent prévenir le médecin traitant.
Comme ces échanges d'informations nécessitent le consentement du
patient, les médecins peuvent, lorsque le patient ne le donne pas,
refuser de prescrire des médicaments couverts par l'ordonnance, à
moins qu'une telle attitude ne soit injustifiable sur le plan professionnel.
Un médecin ne peut pas prescrire d'antalgiques majeurs à une
personne qui ne fait pas partie de sa
clientèle
régulière
. Toutefois, si les circonstances l'exigent, tout
médecin peut prescrire des antalgiques majeurs à un patient qu'il
ne connaît pas, mais en quantité limitée, de façon
à ce que l'intéressé puisse attendre avant d'entrer en
relation avec son médecin. Dans ce cas, le prescripteur doit
vérifier l'identité du patient (nom, numéro
d'immatriculation et adresse). Il doit aussi informer le médecin
traitant de la prescription qu'il a effectuée.
b) Les caractéristiques de l'ordonnance
Elle
doit être établie sur des
imprimés spéciaux
,
délivrés par le ministère de la Santé.
Ces imprimés sont numérotés. Les médecins doivent
prendre les précautions nécessaires pour éviter que des
documents ne soient volés ou perdus. En cas de disparition, ils doivent
prévenir le ministère de la Santé, qui annule ces
documents et prévient les pharmacies.
c) Les indications portées sur l'ordonnance
L'ordonnance doit comporter :
- les nom, prénom et adresse du patient, ainsi que son numéro
d'immatriculation et le numéro de sa commune ;
- la date de délivrance ;
- la quantité prescrite, en chiffres et en toutes lettres ;
- la signature et le numéro d'immatriculation du prescripteur.
C'est ce dernier point, ainsi que la double indication, en chiffres et en
lettres, de la quantité prescrite qui la distinguent d'une ordonnance
habituelle.
d) La quantité prescrite et la durée de prescription
Les praticiens ne sont soumis à aucune limite quantitative, mais ils ne peuvent pas faire plus d'une prescription par ordonnance.
e) La délivrance des médicaments
La
délivrance des antalgiques majeurs obéit aux règles de
droit commun énoncées par l'arrêté du 6 mai
1997 sur les ordonnances médicales.
En particulier, les textes ne limitent pas la validité des ordonnances
prescrivant des antalgiques majeurs et prévoient l'application de la
règle de droit commun, c'est-à-dire une validité de deux
ans. Cependant, l'arrêté sur les médicaments précise
que le prescripteur peut indiquer une durée plus courte s'il l'estime
opportun.
Les ordonnances relatives aux antalgiques majeurs peuvent, comme les autres
ordonnances, être transmises par le médecin au pharmacien par fax,
par des moyens informatiques, voire, en cas de nécessité, par
téléphone, à condition que le médecin
téléphone personnellement.
D'une façon générale, les pharmaciens doivent organiser le
travail de façon à ce qu'il soit possible d'identifier, trois
mois plus tard, l'employé qui a servi un client donné.
3) Les contrôles
Bien que
la
stabilité des relations entre les médecins et leur
clientèle constitue le principal moyen d'éviter des prescriptions
abusives
, il existe d'autres moyens de contrôle.
Le journal des médecins
Les médecins ont l'obligation d'enregistrer les prescriptions des
médicaments soumis à l'ordonnance sur les stupéfiants sur
un journal. Ils doivent y porter les indications suivantes :
- nom et numéro d'immatriculation du patient ;
- nature du traitement ;
- date du traitement et de la prescription ;
- forme d'administration du médicament ;
- quantité et dosage ;
- mention d'un éventuel contact avec des tiers.
Les sanctions appliquées aux médecins
Tous les médecins sont soumis au contrôle de l'administration de
la santé.
En cas d'infraction aux règles contenues dans la circulaire, le
médecin se voit rappeler
le devoir
qu'il a de tenir un
journal
relatif à la prescription des médicaments
créant un effet d'accoutumance.
Si un médecin refuse de tenir ce journal, il peut se voir
retirer le
droit de prescrire certains des médicaments régis par
l'ordonnance
. La sanction vaut normalement pour une période comprise
entre un et cinq ans mais elle peut être prononcée pour une
durée plus longue.
Si un médecin se rend coupable d'infractions grossières ou
répétées en ce qui concerne la prescription de
médicaments engendrant la pharmacodépendance, des poursuites
peuvent être engagées contre lui. Il encourt alors une amende
et/ou une peine de prison.
L'archivage des ordonnances par les pharmaciens
Les pharmaciens ont l'obligation de conserver pendant un an les ordonnances
concernant des antalgiques majeurs.
* *
*
Les
annexes à la circulaire comportent, à l'attention des
prescripteurs, des indications sur l'utilisation des médicaments
créant un effet d'accoutumance.
S'agissant des
antalgiques majeurs
, leur
emploi est
préconisé pour le traitement des douleurs aiguës
post-opératoires.
En revanche, il est
déconseillé
dans les autres cas
(douleurs récidivantes ou chroniques).
Pour le traitement des douleurs aiguës post-opératoires,
l'administration d'antalgiques majeurs doit avant tout permettre
d'empêcher le développement d'un état de douleur chronique.
Il est recommandé d'administrer les antalgiques majeurs par voie
parentérale (c'est-à-dire sous-cutanée, intramusculaire ou
intraveineuse). La circulaire ne donne pas d'indications sur les
quantités à utiliser. Elle comporte en revanche des informations
sur l'efficacité des principaux antalgiques à base d'opium. Elle
signale ainsi qu'une dose de 10 mg de morphine est efficace pendant trois
à quatre heures, commence à être efficace au bout de
quinze à trente minutes et atteint son efficacité maximale
après cinquante à soixante minutes.
Pour le traitement des douleurs cancéreuses, il est indiqué que
l'administration d'antalgiques majeurs ne constitue qu'un des
éléments des soins palliatifs et qu'un accompagnement
psycho-social du patient est nécessaire. La circulaire préconise
l'administration de morphine vingt-quatre heures sur vingt-quatre par voie
orale. La quantité à administrer dépend des besoins du
patient. Ceux-ci doivent donc être régulièrement
appréciés. Il est de plus précisé que le patient
doit toujours avoir une préparation à sa disposition.