LA PRESCRIPTION DES ANTALGIQUES MAJEURS

Table des matières




NOTE DE SYNTYHESE

Les règles françaises de prescription et de délivrance des antalgiques majeurs (1( * )) sont considérées comme particulièrement sévères, et donc peu favorables à une prise en charge efficace de la douleur.

C'est pourquoi il a paru utile d'analyser les règles en vigueur chez quelques-uns de nos proches voisins (l' Allemagne , la Belgique , l' Espagne , l' Italie et le Royaume-Uni ), ainsi qu'au Danemark . Le Danemark est, après l'Irlande, le pays au monde où la consommation de stupéfiants employés à des fins médicales est la plus importante. D'après l'Organe international de contrôle des stupéfiants, la consommation par habitant sur la période 1992-1996 a été en effet supérieure à la consommation française au Danemark (de 60 %), en Suisse (de 50 %) et au Royaume-Uni (de 40 %). Elle a été en revanche inférieure en Belgique (de 40 %), en Allemagne et en Espagne (de 75 %), ainsi qu'en Italie (de plus de 90 %).

Cet examen, qui ne prend pas en compte les questions relatives au traitement des toxicomanes par des produits de substitution, fait apparaître que :

- à l'exception de la Belgique, tous les pays étudiés soumettent la prescription et la délivrance des antalgiques majeurs à des contraintes réglementaires comparables ;



- un assouplissement de la réglementation est perceptible dans tous les pays ;



- au Danemark, celui des pays étudiés où la consommation d'antalgiques majeurs est la plus importante, le contrôle repose non seulement sur des dispositions réglementaires, mais aussi sur la stabilité des relations entre les médecins et leurs patients.

1) La prescription et la délivrance des antalgiques majeurs sont soumises à de nombreuses contraintes réglementaires dans tous les pays étudiés sauf en Belgique

Dans tous les pays étudiés, des textes réglementaires particuliers régissent la prescription et la délivrance des médicaments à base d'opiacés . Pour éviter toute consommation abusive, ces textes imposent aux prescripteurs et aux pharmaciens le respect de certaines règles . A l'exception de la Belgique, tous les pays étudiés ont adopté des mesures similaires.

Le prescripteur doit utiliser des imprimés particuliers. Son ordonnance doit comporter certaines mentions qui ne sont pas requises lorsqu'il prescrit d'autres médicaments. La mention la plus fréquemment requise est l'indication en toutes lettres de la quantité prescrite. Les quantités susceptibles d'être prescrites sont limitées, tout comme la durée de la prescription. Cette dernière règle ne s'applique cependant pas au Danemark ni au Royaume-Uni. En règle générale, les prescripteurs doivent conserver une trace de leurs ordonnances, car ils sont soumis à une surveillance particulière portant sur leurs prescriptions d'opiacés.

La délivrance de ces médicaments par les pharmaciens est également très contrôlée : dans presque tous les pays, les pharmaciens doivent non seulement conserver les ordonnances relatives aux médicaments contenant des opiacés, mais aussi tenir, au jour le jour, un état de leurs stocks.

En Belgique, en revanche, la prescription des opiacés ne nécessite pas l'utilisation de formulaires spéciaux. Le médecin est seulement obligé de mentionner en toutes lettres la quantité prescrite. Quant aux pharmaciens, ils ne sont pas non plus soumis aux mêmes contraintes que dans les autres pays. C'est seulement sur rapport motivé de l'Inspection générale de la pharmacie qu'il peut leur être demandé de tenir un registre des stocks.

2) Un assouplissement de la réglementation est perceptible dans tous les pays

Tous les règlements régissant la prescription et la délivrance des antalgiques majeurs sont assez récents : le plus ancien est le règlement anglais, qui date de 1985. Les autres ont tous été modifiés dans les années 90. Les nouveaux textes s'efforcent de faciliter l'emploi de ces médicaments . L'évolution la plus notable concerne la durée de prescription, partout supérieure ou égale à 30 jours, sauf en Italie où elle reste limitée à 8 jours.

L' Allemagne constitue un bon exemple de cette tendance générale : l'ordonnance sur les stupéfiants , qui énonce les modalités de prescription des antalgiques majeurs, a été modifiée au début de l'année 1998 , afin que soit améliorée la prise en charge de la douleur. Ainsi, dans les situations d'urgence, le médecin peut désormais prescrire des antalgiques majeurs sur un formulaire normal d'ordonnance, voire sur papier libre. Il peut déroger aussi aux règles normales de prescription, en augmentant par exemple la durée du traitement ainsi que la quantité prescrite. Par ailleurs, le nouveau texte supprime la quantité maximale susceptible d'être prescrite par jour et la remplace par un plafond mensuel. Grâce à cet assouplissement, les personnes souffrant de douleurs chroniques ne sont plus empêchées de voyager.

3) Au Danemark, le contrôle de la prescription des antalgiques majeurs repose non seulement sur des mesures réglementaires mais aussi sur la stabilité des relations entre les médecins et leurs patients

Selon l'Organe international de contrôle des stupéfiants, le Danemark est, parmi les pays étudiés, celui où la consommation individuelle de stupéfiants employés à des fins médicales est la plus élevée.

La circulaire danoise sur " la prescription de médicaments engendrant la pharmacodépendance " comporte des mesures tout à fait comparables à celles qui existent dans les autres pays. Elle soumet médecins et pharmaciens à des contraintes analogues. Mais elle pose en outre comme principe que seul le médecin traitant est habilité à prescrire des antalgiques majeurs dans le cadre d'un traitement de longue durée. Si un médecin suppose que l'un de ses patients recourt fréquemment aux médecins de garde pour se faire prescrire des médicaments régis par la circulaire, il doit les en aviser. De même, les médecins de garde doivent prévenir le médecin traitant. Parallèlement, un médecin ne peut pas, sauf circonstance exceptionnelle, prescrire ces médicaments à une personne qui ne fait pas partie de sa clientèle régulière . Il est indubitable que la stabilité des relations entre médecins et patients constitue un moyen de contrôle très efficace.

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Ce dernier élément permet de relativiser le rôle de la réglementation et de souligner l'importance des facteurs culturels dans la prescription des antalgiques majeurs. La Belgique fournit d'ailleurs un bon exemple à cet égard : la prescription et la délivrance des opiacés y sont soumis à très peu de contraintes, et cependant leur consommation à titre médical y est beaucoup plus faible qu'en France.

ALLEMAGNE

Entre 1992 et 1996, la consommation moyenne de stupéfiants utilisés à des fins médicales , mesurée en doses quotidiennes déterminées, s'est élevée, d'après l'Organe international de contrôle des stupéfiants, à 5.028 par jour et par million d'habitants, ce qui représente environ 25 % du chiffre équivalent pour la France .

1) Les règles générales

La loi sur les stupéfiants limite la possibilité de prescrire des antalgiques majeurs aux cas où aucune autre thérapie n'est disponible. En effet, elle précise à l'article 13 que " Les stupéfiants énumérés à l'annexe III ne peuvent être administrés et prescrits que par des médecins, des chirurgiens-dentistes ou des vétérinaires (...) et seulement lorsque leur utilisation est justifiée. Cette utilisation est particulièrement injustifiée lorsque le but recherché peut être atteint d'une autre façon. "

Alors que les annexes I et II de la loi comportent respectivement la liste des produits stupéfiants dont la circulation est interdite, et celle dont la circulation est autorisée mais la prescription interdite, l'annexe III comporte la liste des produits stupéfiants qui peuvent être utilisés comme médicaments. On y trouve notamment les antalgiques majeurs.

2) Les modalités de prescription

Elles sont précisées dans l'ordonnance sur les stupéfiants , qui a été modifiée en janvier 1998 afin que soit facilité le traitement de la douleur. Les modifications sont entrées en vigueur le 1 er février 1998.

a) Le prescripteur

Il ne peut s'agir que d'un médecin ou d'un chirurgien-dentiste .

Toutefois, en cas d'erreur manifeste du prescripteur, le pharmacien peut apporter les corrections nécessaires, après s'en être entretenu avec l'auteur de l'ordonnance.

b) Les caractéristiques de l'ordonnance

En règle générale, elle doit être établie sur des imprimés spéciaux que l' Office fédéral du médicament met à la disposition de chaque médecin.

Ces imprimés sont numérotés et comportent le numéro qui a été attribué à chaque médecin . Ils ne peuvent servir à la délivrance d'autres médicaments, sauf prescription simultanée. Chaque ordonnance est établie en deux exemplaires : l'un est communiqué au pharmacien et l'autre est conservé par le prescripteur. Bien que ces imprimés ne puissent être utilisés que par un seul médecin, celui-ci peut les transmettre, à un remplaçant par exemple.

Depuis la dernière modification apportée à l'ordonnance sur les stupéfiants, il est possible, dans les situations d'urgence , par exemple à l'occasion d'une visite à domicile, de prescrire des produits stupéfiants sur un formulaire normal d'ordonnance ou sur du papier libre. Dans ce cas, le médecin doit rédiger une ordonnance de régularisation qu'il doit adresser à la pharmacie qui a délivré le médicament.

c) Les indications portées sur l'ordonnance

L'ordonnance doit comporter :

- les nom, prénom et adresse du patient ;

- la date de délivrance ;

- la description du médicament (poids, quantité de stupéfiant contenue...), dans la seule mesure (2( * )) où elle n'apparaît pas de façon détaillée sur l'emballage ou sur la notice d'utilisation ;

- la quantité prescrite, sans qu'il soit nécessaire de l'écrire à la fois en chiffres et en toutes lettres ;

- la posologie ;

- le cas échéant, le code correspondant à une situation particulière (A lorsque le prescripteur déroge aux règles de prescription, K lorsque l'ordonnance est délivrée pour les besoins de l'équipage d'un navire de la marine marchande, N dans les cas d'urgence) ;

- le nom, la qualité, l'adresse et le numéro de téléphone du prescripteur ;

- sa signature.

Seule la signature doit être apposée personnellement par le prescripteur. Les autres mentions peuvent être indiquées par quelqu'un d'autre. Elles peuvent par exemple être remplies à la machine. Toutefois, la nécessité d'avoir des doubles empêche par exemple l'utilisation d'une imprimante laser.

d) La quantité prescrite et la durée de prescription

L'ordonnance sur les stupéfiants fixe les quantités maximales susceptibles d'être prescrites pour trente jours .

Ainsi, un médecin ne peut théoriquement pas prescrire plus de 20.000 mg de morphine pour trente jours. Pour un dentiste, la quantité n'est que de 5.000 mg.

Le plafond mensuel, introduit par la dernière réforme, remplace l'ancien plafond quotidien. Il apporte beaucoup plus de souplesse, permettant par exemple les voyages.

De plus, la règle selon laquelle la prescription devait être limitée à un seul produit stupéfiant a été abandonnée. Il est désormais possible de prescrire deux des produits énumérés à l'article 2 de l'ordonnance sur les stupéfiants.

Enfin, dans des cas particuliers, le prescripteur peut déroger aux règles de prescription : il peut augmenter la durée de la prescription, le nombre des produits prescrits et la quantité. La mention " A " doit alors être portée sur l'ordonnance, mais il n'est plus nécessaire de signaler à l'autorité de contrôle tous les cas de dérogation.

En revanche, la prescription ne peut jamais être renouvelée par le pharmacien.

e) La délivrance des médicaments

Il faut présenter une ordonnance qui a été émise au plus sept jours auparavant.

La personne qui délivre le médicament doit indiquer sur l'ordonnance :

- le nom et l'adresse de la pharmacie ;

- la date de délivrance ;

- son paraphe.

Le responsable de la pharmacie doit conserver les ordonnances pendant trois ans.

3) Les contrôles

Les prescripteurs doivent conserver une copie de leurs ordonnances pendant trois ans. Pendant cette période, ils doivent les communiquer à l'administration locale compétente pour le contrôle des stupéfiants si celle-ci en fait la demande.

L'Office fédéral du médicament peut refuser de fournir un prescripteur potentiel en formulaires d'ordonnance s'il soupçonne une utilisation illégale des stupéfiants.

En cas de cessation d'activité, le prescripteur doit restituer à l'Office fédéral du médicament les formulaires non utilisés.

Toute disparition de formulaires doit être communiquée à l'Office fédéral du médicament.

Toutes les pharmacies, quel que soit leur statut, doivent pouvoir justifier l'état et l'évolution de leurs stocks sur demande de l'Office fédéral du médicament. Le règlement prévoit que la gestion du stock peut être automatisée ou manuelle. Dans le second cas, il admet aussi bien l'utilisation d'un registre à feuilles numérotées que celle d'un fichier, dans la mesure où c'est l'Office fédéral du médicament qui le fournit. En toute hypothèse, ces fichiers doivent être conservés pendant trois ans.

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Les médecins approuvent la simplification apportée par la réforme, mais ils regrettent de ne pas pouvoir transmettre leurs ordonnances directement par ordinateur aux pharmaciens.

En revanche, ces derniers soulignent le caractère très bureaucratique du processus, ce qui ce traduit par une attente non négligeable des patients.

Les associations de malades signalent l'insuffisante prise en charge de la douleur : en 1996, seulement 1,8 million d'ordonnances ont été délivrées conformément à l'ordonnance sur les stupéfiants, ce qui correspond à un nombre de malades que l'on peut estimer entre 100.000 et 150.000. Or, sur les 5 millions de personnes souffrant de douleurs chroniques en Allemagne, on estime qu'un million aurait besoin de médicaments nécessitant une ordonnance spéciale.

BELGIQUE

Entre 1992 et 1996, la consommation moyenne de stupéfiants utilisés à des fins médicales , mesurée en doses quotidiennes déterminées, s'est élevée, d'après l'Organe international de contrôle des stupéfiants, à 11.640 par jour et par million d'habitants, ce qui représente environ 60 % du chiffre équivalent pour la France .

1) Les règles générales

Elles sont définies par l'arrêté royal du 31 décembre 1930 concernant le trafic des substances soporifiques et stupéfiantes et par l'arrêté royal du 2 décembre 1988 réglementant certaines substances psychotropes.

L'article 2 de l'arrêté royal du 2 décembre 1988 pose comme principe que : " les pharmaciens ainsi que les médecins ou les médecins vétérinaires sont autorisés de plein droit à détenir ou à acquérir des substances psychotropes dans la limite de leurs besoins professionnels. "

2) Les modalités de prescription

En Belgique, la prescription médicale d'antalgiques majeurs n'est soumise qu'à très peu de contraintes légales .

a) Le prescripteur

Il ne peut s'agir que d'un médecin ou d'un dentiste .

b) Les caractéristiques de l'ordonnance

La réglementation ne prescrit pas l'utilisation de formulaires spéciaux. En effet, la loi du 22 février 1994 contenant certaines dispositions relatives à la santé publique prévoyait dans son article 1er que " le Roi peut, pour la prescription des médicaments contenant des substances soporifiques ou stupéfiantes ainsi que des substances psychotropes susceptibles d'engendrer une dépendance, imposer l'utilisation de feuillets spéciaux dont il fixe le modèle " , mais cette disposition n'a jamais été mise en application.

c) Les indications portées sur l'ordonnance

L'ordonnance doit être datée et signée du prescripteur et doit mentionner lisiblement les nom et adresse du signataire, ainsi qu'en toutes lettres la quantité de médicament à fournir. C'est seulement ce dernier point qui la distingue d'une ordonnance normale.

d) La quantité prescrite et la durée de prescription.

La réglementation ne fixe aucune limite.

e) La délivrance des médicaments

L'ordonnance ne peut être renouvelée par le pharmacien que si le médecin a indiqué en toutes lettres le nombre et le délai des renouvellements autorisés.

Le pharmacien doit inscrire chaque renouvellement " d'une manière apparente et à l'encre " sur la prescription et dans le livre d'ordonnances.

3) Les contrôles

Ils concernent les prescripteurs et les pharmaciens .

• L'article 23 de l'arrêté royal du 31 décembre 1930 concernant le trafic des substances soporifiques et stupéfiantes prévoit que " tout médecin, médecin-vétérinaire ou licencié en science dentaire qui aura prescrit ou acquis des doses exagérées de stupéfiants devra pouvoir justifier de leur emploi devant le médecin délégué par la commission médicale provinciale du ressort, assisté de l'inspecteur des pharmacies. "

• Les pharmaciens doivent transcrire les ordonnances de substances psychotropes qu'ils délivrent dans un registre. Ils y mentionnent les noms du prescripteur et du patient.

• Contrairement aux autres personnes qui détiennent des substances psychotropes, les pharmaciens ne sont pas soumis à l'obligation de tenir un registre des stocks où ils indiquent au jour le jour toutes les entrées et sorties. Cependant, cette obligation peut être notifiée à un pharmacien en particulier à la suite d'un rapport motivé à l'Inspection générale de la pharmacie (qui dépend du ministère de la Santé).

DANEMARK

Entre 1992 et 1996, la consommation moyenne de stupéfiants utilisés à des fins médicales , mesurée en doses quotidiennes déterminées, s'est élevée, d'après l'Organe international de contrôle des stupéfiants, à 30.671 par jour et par million d'habitants, plaçant le Danemark au second rang mondial derrière l'Irlande. Ainsi mesurée, la consommation danoise était de 60 % supérieure à la consommation française correspondante.

L'importance de la consommation d'opiacés, conjuguée à la forte croissance -12 %- enregistrée entre 1994 et 1996 et au fait que seulement 10 % de la morphine consommée dans le pays soit administrée à des patients en fin de vie, a conduit le ministère danois de la Santé à commander une analyse détaillée sur les caractéristiques de cette consommation entre le 1 er janvier 1994 et le 1 er juin 1996.

Les résultats ont été publiés en décembre 1997. Ils ne concernent que les prescriptions faites à des particuliers, et donc les achats réalisés dans des pharmacies, soit environ 90 % de la totalité. Ils excluent la consommation en milieu hospitalier. Les principaux enseignements sont les suivants :

- 5 % de la population était traitée en 1995 ;

- le nombre moyen de patients traités a augmenté de 13 % entre 1994 et 1995 ;

- l'augmentation de la consommation est principalement due à l'augmentation du nombre des consommateurs, en particulier des consommateurs de tramadol, un opiacé léger, la consommation des opiacés forts n'ayant augmenté que de 6 % tandis que celle des opiacés légers croissait de 22,6 % ;

- plus de la moitié des patients n'a qu'un médecin prescripteur et 87 % des ordonnances sont rédigées par le médecin traitant ;

- la consommation des opiacés à effet prolongé, pour lesquels le risque d'emploi abusif est plus faible, est de 40 % supérieure à celle des opiacés dont l'effet est limité dans le temps ;

- le nombre de prescriptions croît avec l'âge ;

- la répartition géographique des consommateurs est assez homogène.

1) Les règles générales

La circulaire sur la prescription de médicaments engendrant la pharmacodépendance concerne plusieurs catégories de médicaments, parmi lesquels la morphine et les autres antalgiques dont l'action est comparable à celle de la morphine.

La circulaire actuellement en vigueur a été prise en décembre 1995. Elle est entrée en vigueur le 1 er janvier 1996, remplaçant alors la précédente, qui datait de juin 1993.

Dans sa première partie, la circulaire précise que le médecin doit, au moment de la prescription d'un tel médicament, prêter attention au fait que l'utilisation de ce médicament peut provoquer ou entretenir une situation de dépendance.

A l'annexe n° 1 de la circulaire, on souligne que l'état de dépendance de certains malades peut être causé par la prescription injustifiée d'antalgiques majeurs dans certains cas (migraines, maux de dos et d'estomac par exemple). Dans de telles situations, le médecin se doit de réfléchir à la possibilité de prescrire d'autres antalgiques que des opiacés.

2) Les modalités de prescription

Elles sont contenues, d'une part, dans la circulaire mentionnée plus haut et, d'autre part, dans l'arrêté du 6 mai 1997 sur les ordonnances médicales.

a) Le prescripteur

Seul le médecin traitant (3( * )) est habilité à prescrire des antalgiques majeurs dans le cadre d'un traitement de longue durée. En cas d'absence, le médecin traitant doit donc se mettre d'accord avec son patient, ainsi qu'avec la pharmacie ou, le cas échéant, un autre médecin afin que le patient n'ait pas à s'adresser à un autre médecin (un médecin de garde par exemple).

Si un médecin traitant a de bonnes raisons de supposer que l'un de ses patients recourt fréquemment aux médecins de garde pour se faire prescrire l'un des médicaments régis par l'ordonnance, il doit prévenir ces derniers de cette situation. De même, les médecins de garde doivent prévenir le médecin traitant. Comme ces échanges d'informations nécessitent le consentement du patient, les médecins peuvent, lorsque le patient ne le donne pas, refuser de prescrire des médicaments couverts par l'ordonnance, à moins qu'une telle attitude ne soit injustifiable sur le plan professionnel.

Un médecin ne peut pas prescrire d'antalgiques majeurs à une personne qui ne fait pas partie de sa clientèle régulière . Toutefois, si les circonstances l'exigent, tout médecin peut prescrire des antalgiques majeurs à un patient qu'il ne connaît pas, mais en quantité limitée, de façon à ce que l'intéressé puisse attendre avant d'entrer en relation avec son médecin. Dans ce cas, le prescripteur doit vérifier l'identité du patient (nom, numéro d'immatriculation et adresse). Il doit aussi informer le médecin traitant de la prescription qu'il a effectuée.

b) Les caractéristiques de l'ordonnance

Elle doit être établie sur des imprimés spéciaux , délivrés par le ministère de la Santé.

Ces imprimés sont numérotés. Les médecins doivent prendre les précautions nécessaires pour éviter que des documents ne soient volés ou perdus. En cas de disparition, ils doivent prévenir le ministère de la Santé, qui annule ces documents et prévient les pharmacies.

c) Les indications portées sur l'ordonnance

L'ordonnance doit comporter :

- les nom, prénom et adresse du patient, ainsi que son numéro d'immatriculation et le numéro de sa commune ;

- la date de délivrance ;

- la quantité prescrite, en chiffres et en toutes lettres ;

- la signature et le numéro d'immatriculation du prescripteur.

C'est ce dernier point, ainsi que la double indication, en chiffres et en lettres, de la quantité prescrite qui la distinguent d'une ordonnance habituelle.

d) La quantité prescrite et la durée de prescription

Les praticiens ne sont soumis à aucune limite quantitative, mais ils ne peuvent pas faire plus d'une prescription par ordonnance.

e) La délivrance des médicaments

La délivrance des antalgiques majeurs obéit aux règles de droit commun énoncées par l'arrêté du 6 mai 1997 sur les ordonnances médicales.

En particulier, les textes ne limitent pas la validité des ordonnances prescrivant des antalgiques majeurs et prévoient l'application de la règle de droit commun, c'est-à-dire une validité de deux ans. Cependant, l'arrêté sur les médicaments précise que le prescripteur peut indiquer une durée plus courte s'il l'estime opportun.

Les ordonnances relatives aux antalgiques majeurs peuvent, comme les autres ordonnances, être transmises par le médecin au pharmacien par fax, par des moyens informatiques, voire, en cas de nécessité, par téléphone, à condition que le médecin téléphone personnellement.

D'une façon générale, les pharmaciens doivent organiser le travail de façon à ce qu'il soit possible d'identifier, trois mois plus tard, l'employé qui a servi un client donné.

3) Les contrôles

Bien que la stabilité des relations entre les médecins et leur clientèle constitue le principal moyen d'éviter des prescriptions abusives , il existe d'autres moyens de contrôle.

Le journal des médecins

Les médecins ont l'obligation d'enregistrer les prescriptions des médicaments soumis à l'ordonnance sur les stupéfiants sur un journal. Ils doivent y porter les indications suivantes :

- nom et numéro d'immatriculation du patient ;

- nature du traitement ;

- date du traitement et de la prescription ;

- forme d'administration du médicament ;

- quantité et dosage ;

- mention d'un éventuel contact avec des tiers.

Les sanctions appliquées aux médecins

Tous les médecins sont soumis au contrôle de l'administration de la santé.

En cas d'infraction aux règles contenues dans la circulaire, le médecin se voit rappeler le devoir qu'il a de tenir un journal relatif à la prescription des médicaments créant un effet d'accoutumance.

Si un médecin refuse de tenir ce journal, il peut se voir retirer le droit de prescrire certains des médicaments régis par l'ordonnance . La sanction vaut normalement pour une période comprise entre un et cinq ans mais elle peut être prononcée pour une durée plus longue.

Si un médecin se rend coupable d'infractions grossières ou répétées en ce qui concerne la prescription de médicaments engendrant la pharmacodépendance, des poursuites peuvent être engagées contre lui. Il encourt alors une amende et/ou une peine de prison.

L'archivage des ordonnances par les pharmaciens

Les pharmaciens ont l'obligation de conserver pendant un an les ordonnances concernant des antalgiques majeurs.

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Les annexes à la circulaire comportent, à l'attention des prescripteurs, des indications sur l'utilisation des médicaments créant un effet d'accoutumance.

S'agissant des antalgiques majeurs , leur emploi est préconisé pour le traitement des douleurs aiguës post-opératoires. En revanche, il est déconseillé dans les autres cas (douleurs récidivantes ou chroniques).

Pour le traitement des douleurs aiguës post-opératoires, l'administration d'antalgiques majeurs doit avant tout permettre d'empêcher le développement d'un état de douleur chronique. Il est recommandé d'administrer les antalgiques majeurs par voie parentérale (c'est-à-dire sous-cutanée, intramusculaire ou intraveineuse). La circulaire ne donne pas d'indications sur les quantités à utiliser. Elle comporte en revanche des informations sur l'efficacité des principaux antalgiques à base d'opium. Elle signale ainsi qu'une dose de 10 mg de morphine est efficace pendant trois à quatre heures, commence à être efficace au bout de quinze à trente minutes et atteint son efficacité maximale après cinquante à soixante minutes.

Pour le traitement des douleurs cancéreuses, il est indiqué que l'administration d'antalgiques majeurs ne constitue qu'un des éléments des soins palliatifs et qu'un accompagnement psycho-social du patient est nécessaire. La circulaire préconise l'administration de morphine vingt-quatre heures sur vingt-quatre par voie orale. La quantité à administrer dépend des besoins du patient. Ceux-ci doivent donc être régulièrement appréciés. Il est de plus précisé que le patient doit toujours avoir une préparation à sa disposition.

ESPAGNE

Entre 1992 et 1996, la consommation moyenne de stupéfiants utilisés à des fins médicales , mesurée en doses quotidiennes déterminées, s'est élevée, d'après l'Organe international de contrôle des stupéfiants, à 5.505 par jour et par million d'habitants, ce qui représente un peu plus du quart du chiffre équivalent pour la France .

1) Les règles générales

Le décret de 1984 sur les ordonnances médicales et la loi de 1990 sur le médicament prévoient que les médicaments qui contiennent des substances stupéfiantes ou psychotropes sont régis par un texte particulier.

Il s'agit du règlement 1994/1236 du 25 avril 1994 relatif aux ordonnances et aux conditions particulières de prescription et de délivrance des produits stupéfiants pour leur utilisation par l'homme .

Ce règlement, qui a remplacé un texte de 1930, s'efforce de faciliter l'utilisation rationnelle de certains médicaments, parmi lesquels les antalgiques majeurs, tout en évitant la fraude.

2) Les modalités de prescription

Le règlement 1994/1236 complète, pour ce qui concerne les produits stupéfiants, les dispositions contenues dans le décret de 1984 relatif aux ordonnances médicales. Il subordonne la délivrance de ces produits à la rédaction d'une ordonnance spécifique.

a) Le prescripteur

C'est le médecin .

b) Les caractéristiques de l'ordonnance

L'ordonnance doit être établie sur des imprimés spéciaux , dont le règlement précise les principales caractéristiques (taille, poids et couleur du papier...). Ces spécifications sont prévues pour éviter toute falsification.

Les imprimés sont numérotés . Ils sont distribués gratuitement aux médecins par le Système national de santé, par l'intermédiaire de l'Ordre des médecins, par carnets de trente , eux-mêmes numérotés. Alors qu'auparavant les autorités centrales étaient responsables de l'édition et de la distribution des carnets à souche, le règlement de 1994 a confié cette tâche aux communautés autonomes . Ainsi, les médecins sont approvisionnés plus rapidement.

Comme les ordonnances utilisées pour les autres médicaments, les ordonnances régies par le règlement de 1994 se composent de deux exemplaires : l'original, destiné au pharmacien, et la copie pour le patient.

c) Les indications portées sur l'ordonnance

En plus des données figurant sur toutes les ordonnances (références du médecin prescripteur et du patient, nom et présentation du médicament, mode d'administration, nombre de conditionnements, posologie, lieu, date, signature et paraphe), les ordonnances pour les antalgiques majeurs doivent comporter les indications suivantes :

- numéro de téléphone du médecin ;

- numéro du document d'identité du patient ;

- tampon de l'ordre ou de l'administration par qui le carnet à souches a été remis ;

- nombre de jours de traitement et posologie quotidienne ;

- nombre total de conditionnements, en toutes lettres ;

- date de la prescription et signature du médecin ;

- indication d'un éventuel renouvellement.

Il faut utiliser une ordonnance par médicament.

d) La quantité prescrite et la durée de prescription

Il n'est pas possible de prescrire un traitement pour une durée supérieure à trente jours . Il n'est pas non plus possible de prescrire plus de quatre conditionnements.

e) La délivrance des médicaments

L'ordonnance pour un produit pharmaceutique à base de stupéfiant a une validité de dix jours, comme toute autre ordonnance.

L'ordonnance n'est valable que si elle est rédigée sur l'imprimé spécial, si elle comporte toutes les mentions obligatoires et si elle n'a pas été annotée. Le pharmacien doit la contrôler. Il procède aux vérifications nécessaires avant toute délivrance de médicaments. Il doit indiquer au verso le numéro du document d'identité du patient. Il signe, date et tamponne l'ordonnance, qu'il conserve.

Il enregistre l'opération sur son livre de comptes et sur son registre relatif à la délivrance de médicaments à base de produits stupéfiants.

3) Les contrôles

Le système mis en place par le règlement de 1994 prévoit que le contrôle ne commence qu'après le traitement des patients.

A la réception des carnets à souche, les médecins signent un document de réception qui est conservé par l'Ordre des médecins, lequel les envoie chaque trimestre aux services sanitaires de la communauté autonome.

Quand ils reçoivent un nouveau carnet, les médecins doivent remettre la feuille de contrôle de l'ancien, sur laquelle ils ont indiqué toutes les prescriptions des produits régis par le règlement de 1994.

Le médecin qui cesse d'exercer dans le ressort d'un ordre donné doit remettre le carnet à souches qu'il détenait.

En janvier, avril, juillet et octobre de chaque année, les pharmacies doivent remettre les ordonnances correspondant aux produits stupéfiants qu'elles ont délivrés aux services sanitaires de la communauté autonome afin que ces derniers procèdent aux contrôles prescrits par le ministère de la Santé.

Au cours de la première quinzaine de chaque semestre, elles doivent adresser aux mêmes services un document récapitulant les mouvements de stocks. Dans le mois qui suit, les services sanitaires des différentes communautés autonomes envoient des informations récapitulatives au ministère de la Santé.

Un système informatique spécifique de suivi et de contrôle a été conçu et mis en oeuvre peu après la publication du règlement. Il est utilisé par les autorités sanitaires des communautés autonomes et par le ministère de la Santé.

ITALIE

Entre 1992 et 1996, la consommation moyenne de stupéfiants utilisés à des fins médicales , mesurée en doses quotidiennes déterminées, s'est élevée, d'après l'Organe international de contrôle des stupéfiants, à 1.446 par jour et par million d'habitants, ce qui représente moins de 10 % de la consommation française correspondante .

1) Les règles générales

Elles sont fixées par un décret du Président de la République, en date du 9 octobre 1990 intitulé " Texte unique des lois en matière de stupéfiants et substances psychotropes, de prévention, de soin et de réhabilitation des personnes toxicodépendantes ", et qui coordonne plusieurs textes législatifs.

Ce texte classe les substances susvisées en six tableaux. Seuls, les médicaments inscrits sur les trois premiers sont soumis à une réglementation particulière en matière de prescription médicale. Les antalgiques majeurs à base d'opiacés font partie du premier tableau.

2) Les modalités de prescription

Les articles 43 et 45 de la loi précisent les obligations du médecin et du pharmacien.

a) Le prescripteur

Il doit s'agir d'un médecin .

b) Les caractéristiques de l'ordonnance

Pour les antalgiques relevant des trois premiers tableaux, elle est établie sur des formules d'ordonnances particulières issues d'un carnet à souches et mises à la disposition des ordres professionnels de médecins par le ministère de la Santé. Les ordres les distribuent ensuite aux médecins qui en font la demande, en leur faisant signer chaque formule d'ordonnance lors de la remise des carnets.

Pour les antalgiques relevant des trois derniers tableaux, la prescription est rédigée sur une formule d'ordonnance ordinaire.

c) Les indications portées sur l'ordonnance

Le médecin doit faire figurer de façon indélébile :

- le nom, le prénom et l'adresse du patient ;

- en toutes lettres, la dose prescrite et l'indication du mode et de la durée d'administration du médicament.

Il doit par ailleurs indiquer la date, son adresse et numéro de téléphone, et apposer sa signature.

Chaque ordonnance est établie en 3 exemplaires.

d) La quantité prescrite et la durée de prescription

Chaque prescription doit être limitée " à une seule préparation ou à un dosage par soin d'une durée inférieure ou égale à huit jours ".

L'une des notes qui figurent en annexe au décret précise la quantité maximale de principe actif que les médecins doivent respecter pour l'établissement des doses moyennes quotidiennes. Pour la morphine, la limite se monte à 0,20 gramme par jour.

e) La délivrance des médicaments

L'ordonnance reste valable dix jours après son établissement.

Le pharmacien doit vérifier l'identité du patient. Il doit noter au bas de l'ordonnance le numéro du document d'identité présenté. Il doit fournir les médicaments sous la forme et la quantité prévues par l'ordonnance.

L'ordonnance n'est en aucun cas renouvelable.

3) Les contrôles

• Les médecins doivent conserver pendant deux ans une copie lisible de chaque prescription, portant la mention " copie pour documentation ". Les pharmaciens sont soumis à la même obligation. Cependant, pour eux, la durée de conservation est de 5 ans.

• La violation des obligations prévues par la loi et relatives à la prescription et à la délivrance peut entraîner :

- pour le médecin, une sanction pécuniaire (amende administrative comprise entre 200.000 et 1 million de lires, c'est-à-dire entre 700 F et 3.500 F) ;

- pour le pharmacien, la condamnation à une peine de prison de deux ans maximum ou à une amende administrative comprise entre 100.000 et 4 millions de lires (c'est-à-dire entre 350 F et 14.000 F).

• Par ailleurs, les pharmaciens doivent tenir, au jour le jour, un état des stocks sur un registre spécial dont chaque page est numérotée et signée par l'administration sanitaire.

Un inventaire doit être fait le 31 décembre de chaque année. Dans les deux semaines qui suivent, les pharmaciens doivent communiquer au service central de lutte contre la drogue et aux autorités sanitaires locales les principales données récapitulatives.

Indépendamment de cette obligation annuelle, le ministère de la Santé peut, à tout moment, demander aux pharmaciens de justifier l'état de leurs stocks.

Le non-respect de ces obligations est puni d'une amende administrative comprise entre 200 000 et 2 millions de lires (c'est-à-dire entre 700 F et 7.000 F).

* *

*

L'Italie est le pays européen où l'on prescrit le moins d'antalgiques majeurs aux patients. Certaines associations militent en faveur d'un assouplissement de la législation, qui consisterait notamment :

- à abandonner les formules d'ordonnances officielles en triple exemplaire pour un papier avec des copies carbone ;

- à allonger la durée de prescription à 28 jours ;

- à supprimer la mention en toutes lettres de la dose et de la posologie ;

- à dépénaliser les sanctions en cas d'erreur purement formelle ;

- à obliger tous les médecins généralistes à détenir des formules d'ordonnances spéciales.

ROYAUME-UNI

Entre 1992 et 1996, la consommation moyenne de stupéfiants utilisés à des fins médicales , mesurée en doses quotidiennes déterminées, s'est élevée, d'après l'Organe international de contrôle des stupéfiants, à 27.343 par jour et par million d'habitants, ce qui représente 40 % de plus que le chiffre français équivalent.

1) Les règles générales

D'après la loi de 1971 sur le mauvais usage des produits pharmaceutiques ( Misuse of Drugs Act 1971 ) l'utilisation et la distribution des médicaments susceptibles d'être dangereux ou nocifs doivent être contrôlées : leur production, leur détention et leur fourniture sont en principe interdites.

Ces médicaments, dits Controlled Drugs , sont classés en trois catégories. Ceux de la catégorie A, les plus dangereux, comportent notamment les antalgiques majeurs.

2) Les modalités de prescription

Le règlement 2066 du 19 décembre 1985 , pris en application de la loi de 1971 et entré en vigueur le 1 er avril 1986, définit les personnes autorisées à fournir et à détenir les médicaments régis par cette loi, et précise les conditions dans lesquelles ces activités peuvent être exercées.

a) Le prescripteur

Il ne peut s'agit que d'un médecin ou d'un dentiste .

b) Les caractéristiques de l'ordonnance

Il n'est pas nécessaire d'utiliser un formulaire spécifique. En revanche, l'ordonnance doit être entièrement rédigée de la main du prescripteur . Elle doit être indélébile .

c) Les indications portées sur l'ordonnance

L'ordonnance doit comporter :

- la signature et l'adresse du prescripteur, qui doit nécessairement résider au Royaume-Uni ;

- le nom et l'adresse du patient ;

- la date de délivrance ;

- la dose nécessaire, avec mention de la quantité en chiffres et en toutes lettres, qu'il s'agisse d'une préparation effectuée par le pharmacien ou d'un médicament déjà conditionné ;

- le cas échéant la mention de l'intervalle de temps à respecter entre deux prises.

Les ordonnances renouvelables ne sont pas autorisées.

d) La quantité prescrite et la durée de prescription

Les praticiens ne sont soumis à aucune limite quantitative . En revanche, la prescription ne peut pas être renouvelée par le pharmacien.

e) La délivrance des médicaments

L'ordonnance est valable pendant treize semaines . Le pharmacien doit vérifier que l'ordonnance comporte toutes les indications nécessaires, qu'elle a été rédigée par un prescripteur qui réside au Royaume-Uni. Il doit tenter de s'assurer de l'authenticité de la signature. Il doit garder l'ordonnance, à moins que cette dernière ne comporte une indication de fourniture fractionnée.

3) Les contrôles

Les registres

Les personnes habilitées à fournir des médicaments régis par le règlement de 1985 doivent tenir des registres où elles notent, au jour le jour et par ordre chronologique, les entrées et les sorties des différents produits.

Elles doivent y noter :

- la date de l'opération ;

- le nom de la personne ou de l'entreprise qui a fourni le médicament, ou à qui le médicament a été fourni ;

- la quantité reçue ou fournie ;

- la forme sous laquelle le médicament a été reçu ou fourni.

Les inscriptions sur ce registre doivent être indélébiles. Elles ne doivent pas être effacées ni corrigées, sauf mention marginale datée. Les registres doivent être conservés pendant deux ans à partir de la date de la dernière inscription qui y est portée.

Les autres documents

Tous les autres documents relatifs à la fourniture des médicaments régis par le règlement de 1985 doivent être conservés pendant deux ans.

Les opérations de contrôle

Le ministère compétent peut exiger la production des documents mentionnés plus haut. Il peut demander à tout moment la justification des stocks de médicaments.

SUISSE

Entre 1992 et 1996, la consommation moyenne de stupéfiants utilisés à des fins médicales , mesurée en doses quotidiennes déterminées, s'est élevée, d'après l'Organe international de contrôle des stupéfiants, à 29.725 par jour et par million d'habitants, ce qui représente environ 1,5 fois la consommation française correspondante.

1) Les règles générales

Elles sont fixées par la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants dont l'article 9 précise que : " Les médecins, les médecins-dentistes, les médecins-vétérinaires et les dirigeants responsables d'une pharmacie publique ou d'hôpital [...] peuvent sans autorisation se procurer, détenir, utiliser et dispenser des stupéfiants dans les limites que justifie l'exercice, conforme aux prescriptions, de leur profession. Sont réservées les dispositions cantonales réglant la dispensation directe par les médecins et les médecins-vétérinaires ".

Les antalgiques majeurs sont classés par l'Office intercantonal du contrôle des médicaments, en liste A. Par conséquent, leur vente ne peut se faire que sur ordonnance médicale non renouvelable.

L'article 11 de la loi limite la liberté de prescription des médecins, vétérinaires ou dentistes en exigeant qu'elle soit conforme " à la mesure admise par la science ".

La réglementation fédérale est reprise par les réglementations cantonales.

2) Les modalités de prescription

Elles sont précisées dans l'article 43 de l'ordonnance sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 29 mai 1996.

a) Le prescripteur

Il ne peut s'agir que d'un médecin ou d'un dentiste .

Ceux-ci ne peuvent prescrire des stupéfiants qu'à leurs propres patients ou à ceux qu'ils ont examinés eux-mêmes.

b) Les caractéristiques de l'ordonnance

Elle est établie sur des " formules d'ordonnances officielles ", qui sont fournies aux cantons par l'Office fédéral de la santé publique.

Si l'on prend l'exemple du canton de Genève, le règlement cantonal relatif à l'application de la loi fédérale sur les stupéfiants et de l'ordonnance sur les stupéfiants prévoit que " les prescriptions de stupéfiants doivent être établies exclusivement sur des ordonnances détachées du carnet à souches officiel pour stupéfiants délivré aux praticiens par l'institut d'hygiène ". Le carnet à souches comprend trois exemplaires : un rose pour le pharmacien, qui constitue le justificatif de sortie, un bleu pour le prescripteur, qui reste dans le carnet, et un blanc, l'original, pour le patient.

Certains stupéfiants font l'objet d'une prescription simplifiée. Dans ce cas, la prescription se fait sur une feuille d'ordonnance normale.

En revanche, la prescription de stupéfiants dans un établissement hospitalier, pour les besoins de ses patients, ne se fait pas par le biais du carnet à souches.

c) Les indications portées sur l'ordonnance

L'ordonnance doit indiquer :

- le nom, l'adresse, la signature manuscrite et le cachet du médecin qui a prescrit le stupéfiant ;

- le nom, le prénom, l'année de naissance et l'adresse du patient ;

- la date à laquelle l'ordonnance a été établie ;

- le nom du stupéfiant, sa présentation et son dosage ;

- la quantité ;

- le mode d'emploi.

d) La quantité prescrite et la durée de prescription

La quantité prescrite ne doit pas dépasser la dose nécessaire pour un mois de traitement . Cette durée peut être allongée de deux mois " si les circonstances le justifient " et à condition que le médecin indique de manière précise sur l'ordonnance la durée du traitement.

Pour les médicaments susceptibles de faire l'objet d'une prescription simplifiée, le prolongement de la durée peut aller jusqu'à six mois.

e) La délivrance des médicaments

L'ordonnance est valable un mois après son établissement. Elle n'est pas renouvelable, sauf autorisation expresse du médecin. En cas d'urgence et si le patient a été dans l'impossibilité d'obtenir une prescription médicale, le pharmacien peut " exceptionnellement délivrer sans ordonnance le plus petit emballage commercialisé d'un stupéfiant ". Le pharmacien établit alors un procès verbal remis à l'autorité cantonale compétente dans les cinq jours et informe le médecin traitant.

3) Les contrôles

Il existe certaines règles fédérales mais le contrôle réel se fait au niveau cantonal.

a) Les règles fédérales

Les pharmaciens doivent être en mesure de produire les documents attestant de l'acquisition de stupéfiants.

Les remises de stupéfiants par les pharmaciens à des médecins doivent être attestées par des commandes écrites ou des ordonnances.

Les médecins et les établissements hospitaliers doivent pouvoir produire les documents " attestant l'acquisition de stupéfiants ainsi que l'usage qu'ils en ont fait ".

Les documents concernant le commerce de stupéfiants doivent être conservés pendant dix ans.

b) Les règles cantonales

Le contrôle de l'application de la loi et de l'ordonnance sur les stupéfiants se fait par une autorité cantonale.

Pour le canton de Genève, ce sont le médecin cantonal (pour le contrôle des médecins) et le pharmacien cantonal (pour le contrôle des pharmaciens) qui agissent par délégation du département de la prévoyance sociale et de la santé. Une collaboration étroite existe entre ces deux personnes.

Le pharmacien cantonal vérifie, pour les stupéfiants, que les pharmaciens tiennent correctement leur comptabilité et que les différents justificatifs d'entrée et de sortie sont conservés.

Le règlement du 29 juillet 1953 prévoit notamment que " tous les bulletins de commande et ordonnances de stupéfiants doivent rester en mains du pharmacien. Celui-ci les inscrit dans le registre d'ordonnances, y appose le timbre de la pharmacie, les numéros et les dates ; il les envoie à la fin de chaque mois au pharmacien cantonal. "

* *

*

Des campagnes à l'échelon national ont eu lieu en 1988 et 1996 pour favoriser un usage plus fréquent des opiacés. La Suisse a d'ailleurs déjà presque doublé sa consommation de morphine entre 1991 et 1994, passant de 88,6 à 177,14 kg par million d'habitants.

ANNEXE

Utilisation des stupéfiants à des fins médicales pendant la période 1992 à 1996, mesurée par la consommation moyenne par jour

et par million d'habitants de doses quotidiennes déterminées
(1)

4( * )

Pays

Codéine

Dextropro-poxyphène

Dihydro-codéine

Diphéno-xylate

Ethyl-morphine

Morphine

Pethidine

Pholcodine

Autres

TOTAL

Irlande

12.216

1.053

20.162

-

-

2.264

89

3.174

717

39.675

Danemark

11.195

3.198

-

324

6

6.430

206

2

9.310

30.671

Suisse

16.154

7.770

37

82

29

1.371

54

74

4.154

29.725

Royaume-Uni

6.819

11.160

3.158

346

50

2.809

92

1.526

1.382

27.343

Canada

15.199

361

-

18

-

2.827

210

-

2.097

20.711

France

8.210

5.474

-

-

427

1.462

11

3.492

429

19.506

Etats-Unis

3.942

4.211

17

506

-

1.965

181

-

7.546

18.368

Belgique

5.211

260

139

480

426

715

19

741

3.648

11.640

Espagne

3.463

265

45

79

16

530

14

89

1.003

5.505

Allemagne

2.084

50

1.060

-

1

541

14

-

1.277

5.028

Italie

718

93

141

-

9

46

2

-

437

1.446

(1) Données fournies par l'Organe international de contrôle des stupéfiants.



(1) On désigne ainsi les médicaments contre la douleur les plus puissants, opiacés comme la morphine, ou non opiacés, comme certains produits psychotropes dotés de propriétés antalgiques.

(2) Cet assouplissement résulte de la dernière réforme. Auparavant, le prescripteur devait répéter des indications qui figuraient sur l'emballage.

(3) Environ 95 % des Danois sont inscrits chez un médecin généraliste. Ils peuvent le choisir librement, mais doivent rester inscrits chez le même pendant au moins un an.



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