ESPAGNE

Estimé à environ 1,5 million au milieu des années 2000, le nombre des citoyens espagnols établis hors d'Espagne serait actuellement supérieur à 1,8 million de personnes 26 ( * ) .

A. LA REPRÉSENTATION AU PARLEMENT

1. Existe-t-il une représentation au Parlement ?

L'article 88 de la Constitution espagnole de 1978 dispose que :

- sont électeurs tous les Espagnols qui jouissent du plein exercice de leurs droits civils et politiques ;

- la loi reconnaît et l'État facilite l'exercice du droit de suffrage aux Espagnols qui se trouvent hors du territoire de l'Espagne.

En outre, selon l'article 4.1 de la loi n° 40 du 14 décembre 2006, « les Espagnols qui résident à l'étranger ont le droit d'être électeurs à toutes les élections, dans les mêmes conditions que les citoyens qui résident en Espagne [...] ».

Enfin l'article 31 de la loi organique n° 5 du 19 juin 1985 sur le régime électoral général interdit d'être inscrit à la fois sur la liste électorale des Espagnols qui vivent dans leur pays et sur celle des Espagnols établis hors d'Espagne, le Censo Electoral de Residentes Ausentes (CERA) .

2. Participation aux scrutins

L'élection a lieu par correspondance ou dans un poste diplomatique ou consulaire espagnol.

3. Circonscriptions électorales

Il n'existe pas de circonscription spécifique propre aux Espagnols établis hors d'Espagne. Ceux qui veulent voter adressent une demande à l'administration provinciale de leur choix en charge des élections.

• Pour l'élection au Congrès des députés

Les élections au Congrès des députés, ont lieu par province, à la représentation proportionnelle.

• Pour l'élection au Sénat

Les Sénateurs sont :

- élus au suffrage universel direct à raison de 4 par province ;

- ou désignés par les communautés autonomes à raison d'un sénateur plus un pour chaque million d'habitants résidant sur leur territoire.

B. LA REPRÉSENTATION PAR DES STRUCTURES AD HOC

En vertu de la loi n° 40 du 14 décembre 2006, les Espagnols établis hors du Royaume sont aussi représentés par :

- les conseils des résidents espagnols ;

- et par le Conseil général de la citoyenneté espagnole établie hors d'Espagne.

Les communautés autonomes peuvent aussi constituer des organes spécifiques équivalents à ces entités.

1. Dans les divers pays étrangers, les conseils des résidents espagnols (CRES)

Le statut des conseils des résidents espagnols résulte du décret royal n° 1960 du 18 décembre 2009.

• Dénomination et mission

Les conseils des résidents espagnols, consejos de residentes españoles (CRES) peuvent être créés dans chaque circonscription consulaire où résident au moins 1 200 citoyens inscrits sur la liste électorale des Espagnols établis hors d'Espagne.

Les 41 « CRES » sont situés dans 25 pays, dont 15 d'Amérique latine et d'Amérique centrale, 7 d'Europe, 2 d'Amérique du Nord et 1 d'Afrique.

Organe consultatif et de conseil, le « CRES » a pour mission de :

- constituer un canal de communication entre les communautés espagnoles existant hors d'Espagne et les services consulaires ;

- débattre et proposer aux services consulaires les moyens liés à leurs fonctions et contribuer à les améliorer dans leurs circonscriptions ;

- conseiller et informer ces services sur les questions qui concernent la communauté espagnole ;

- coopérer avec eux et avec d'autres institutions aussi bien espagnoles que locales pour renforcer le caractère institutionnel des actions au bénéfice des Espagnols ;

- collaborer avec les services consulaires lors de l'élection des « CRES » ;

- et participer à la procédure d'attribution des subventions versées aux Espagnols à l'étranger.

Relèvent de sa compétence :

- les droits civils et ceux exercés au travail ;

- l'insertion des élèves espagnols dans le système éducatif du pays, où ils vivent, les activités susceptibles d'assurer le maintien des liens culturels avec l'Espagne notamment en matière éducative ;

- la participation des résidents espagnols à la vie politique de l'Espagne dans le respect de la loi espagnole, de celle du pays et du droit international ;

- et l'action sociale et culturelle en faveur des Espagnols.

• Composition et organisation

Les « CRES » se composent de :

- 7 membres élus lorsque le nombre de résidents espagnols n'excède pas 40 000 ;

- 11 membres élus lorsque le nombre de ces citoyens est compris entre 40 000 et 80 000 ;

- et 15 membres élus lorsque ce nombre dépasse 80 000.

Chaque comité élit son président parmi ses membres. Celui-ci désigne le secrétaire.

Outre les membres élus, participent aux travaux du « CRES » sans pouvoir prendre part au vote :

- le chef du poste consulaire ou son représentant ;

- les syndicats, les organisations d'employeurs et les personnes qui y sont invitées ;

- et les membres du Conseil général de la citoyenneté espagnole établie hors d'Espagne.

• Modalités de désignation et statut

Les membres du « CRES » sont élus par les citoyens espagnols inscrits sur la liste électorale des citoyens espagnols établis hors d'Espagne.

2. Niveau national : le Conseil général de la citoyenneté espagnole établie hors d'Espagne (CGCEE)

• Dénomination et mission

Le Consejo general de la ciudadanía española en el exterior ( CGCEE) 27 ( * ) est l'organe « consultatif et de conseil » rattaché au ministère du Travail et des Affaires sociales, par l'intermédiaire de la direction générale de l'Émigration. Il assure aussi « la représentation de toutes les communautés autonomes et des villes autonomes qui le souhaitent, ainsi que celle des fédérations et associations d'émigrés représentatives enregistrées ».

En vertu du décret royal n° 230 du 15 février 2008, qui détermine son statut, le CGCEE :

- réalise et commande des études sur les questions relatives à la citoyenneté espagnole hors d'Espagne ;

- formule des propositions et des recommandations liées « aux objectifs et à l'application des principes qui inspirent la politique concernant les citoyens espagnols établis hors d'Espagne ;

- est informé de l'action des services de l'État en la matière et en ce qui concerne les personnes qui sont revenues en Espagne ;

- établit des relations avec les organes consultatifs des communautés autonomes qui permettent la participation des Espagnols établis hors de leur pays.

- a connaissance et informe sur les avant-projets de lois et de décrets royaux relatifs aux droits civils, au droit du travail et à la protection sociale, à l'éducation et à la culture dès lors qu'ils concernent son domaine de compétence et touchent directement les Espagnols établis hors d'Espagne ;

- et demande chaque année à être entendu par les commissions des Cortes generales pour les informer sur la situation des Espagnols établis hors d'Espagne ;

Il approuve en outre son règlement intérieur.

Les propositions et les recommandations qu'il formule ainsi que les rapports qu'il élabore sont remis au ministère du Travail et des Affaires sociales.

• Composition et organisation

Le Conseil général de la citoyenneté espagnole établie hors d'Espagne se compose de 82 membres investis d'un mandat de 4 ans , dont :

- un président nommé par le ministre du Travail après consultation des membres et approbation d'au moins la moitié de ceux-ci statuant en séance plénière ;

- 2 vice-présidents en la personne du secrétaire d'État à l'immigration et à l'émigration - qui est aussi le secrétaire du Conseil - et du secrétaire général des Affaires migratoires du ministère des Affaires étrangères et de la coopération qui peuvent se faire représenter ;

- un maximum de 43 membres élus (38 actuellement) dans les pays où existe un conseil des résidents espagnols à raison de :

4 conseillers dans les pays où les listes électorales des Espagnols établis hors d'Espagne dépassent 200 000 personnes,

3 conseillers dans les pays où cette population est comprise entre 100 000 et 200 000 personnes,

2 conseillers dans les pays où cette population est comprise entre 25 000 personnes et 100 000 personnes,

1 conseiller dans les pays où cette population est inférieure à 25 000 personnes ;

- des membres nommés (44 actuellement) par le ministre du Travail et des Affaires sociales à raison de :

8 conseillers ou un nombre qui ne dépasse pas 20 % du total des conseillers élus, parmi les membres d'associations espagnoles représentatives 28 ( * ) établies hors d'Espagne dont au moins deux représentant les jeunes et les femmes,

8 conseillers représentant les organisations d'entrepreneurs et les syndicats les plus représentatifs,

un conseiller représentant, si elles le souhaitent, chaque communauté autonome et les villes de Ceuta et Melilla,

un conseiller ayant le rang de directeur général représentant les ministères de la Justice, de l'Économie, de l'Intérieur, de l'Éducation, de la Politique sociale et du Sport, de l'Égalité, ainsi que des Sciences et de l'Innovation.

Les membres élus - actuellement 38 - sont désignés à la proportionnelle en fonction du nombre des Espagnols inscrits sur les listes électorales des personnes établies hors d'Espagne 29 ( * ) à raison de :

- 9 en Europe (Allemagne 1 ; Belgique 2 ; France 1 ; Irlande 1 ; Italie 1 ; Pays-Bas 1 ; Suisse 2) ;

- 2 en Amérique du Nord (Canada 1 ; USA 1);

- 25 en Amérique du Sud et en Amérique centrale (Argentine 4 ; Bolivie 1 ; Brésil 2 ; Chili  2 ; Colombie 1 ; Costa Rica 1 ; Cuba 2 ; Guatemala 1 ; Mexique 2 ; Nicaragua 1 ; Panama 1 ; Pérou 1 ; République Dominicaine 1 ; Uruguay, 2 ; Venezuela 3) ;

- 1 en Afrique (Maroc 1) ;

- et 1 en Océanie (Australie 1).

Le CGCEE réunit une fois par an son Assemblée plénière et siège, le cas échéant, de façon extraordinaire.

Il constitue une commission permanente composée :

- du président ;

- des présidents des quatre commissions (voir infra ) ;

- et de trois conseillers élus par l'Assemblée plénière.

Réunies entre les sessions plénières, et composées d'un minimum de 10 membres, ses quatre commissions évoquent les sujets relevant de leur compétence :

- affaires éducatives et culturelles ;

- affaires sociales et travail ;

- droits civils et participation ;

- jeunes et femmes.

Des experts peuvent participer aux travaux du CGCEE et à ceux de la commission permanente et des quatre autres commissions.

• Modalités de désignation

Le corps électoral est formé par une assemblée constituée, dans chaque pays, des membres du ou des « CRES » . Cependant les règles de répartition des sièges entre les pays ont pour effet d'empêcher la désignation d'un membre du CGCEE dans certains États pourtant dotés d'un « CRES ».

Sont éligibles les membres des « CRES » .

• Financement et moyens

L'État pourvoit à l'attribution de moyens suffisants au CGCEE pour la mise en oeuvre de ses missions.

Les membres du Conseil perçoivent l'indemnisation versée aux agents publics pour raison de service, ainsi que le remboursement des frais de voyage sous réserve de l'autorisation de la direction générale de l'Émigration.

Les services de l'État sont tenus de collaborer avec le CGCEE dans les matières relevant de sa compétence.

• Perspectives de réforme

La loi organique n° 2 du 28 janvier 2011 a modifié la loi organique n° 5 du 19 juin 1985, sur le régime électoral général. Pour lutter contre la fraude électorale elle a prévu que, désormais, les Espagnols établis hors d'Espagne devraient explicitement demander à exercer leur droit de vote et ne recevraient plus directement le matériel électoral qui leur était systématiquement adressé auparavant.

Aux élections au Congrès des Députés de septembre 2011, le taux de participation des électeurs vivant hors d'Espagne s'est établi à 4,95 % contre 31,74 % aux élections de 2008. Lors de sa réunion de septembre 2011, le CGCEE avait, du reste, déploré n'avoir pas été auditionné par les parlementaires à l'occasion de la préparation de cette modification de la loi organique et souligné que le projet de réforme ne prenait pas en compte le fait que si, en Espagne, chaque citoyen dispose d'un bureau de vote à proximité de son domicile, tel n'est pas le cas à l'étranger.

Une proposition tendant à réformer la loi organique n° 5 du 19 juin 1985 sur le régime électoral général pour faciliter l'exercice du droit de vote des Espagnols hors d'Espagne, a été déposée par le Groupe socialiste du Congrès des députés en octobre 2011. Elle tend à supprimer l'obligation, désormais faite aux Espagnols établis à l'étranger, de demander à voter pour participer aux élections.

LA REPRÉSENTATION INSTITUTIONNELLE DES CITOYENS ÉTABLIS HORS DE LEUR PAYS


* 26 Selon des chiffres publiés par le gouvernement de Galice.

* 27 L'ancienne appellation de « Conseil général de l'Émigration » subsiste à l'article 10 de la loi n° 40/2006. La dénomination « CGCEE » résulte de l'article 1 er du décret royal 230/2008.

* 28 La représentativité est déterminée en fonction de la population espagnole du pays où l'association a son siège, du nombre de pays où l'association est présente, des activités mises en oeuvre, de l'ancienneté, du nombre de membres, de l'existence de locaux et de l'équilibre entre Europe et Amérique.

* 29 Les dernières élections, organisées en 2011, ont été repoussées au Maroc.

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