Avertissement : Cette étude correspond à l'état de la législation en décembre 1996, elle a été remplacée par l'étude LC 133 de mars 2004. |
ALLEMAGNE
Les
infractions sexuelles font l'objet de la section du code pénal qui est
intitulée "
Infractions contre l'autodétermination en
matière sexuelle
" et qui résulte d'une loi de novembre
1973. Les profondes innovations apportées par cette loi ont
été largement contestées et n'ont pas été
votées par l'opposition chrétienne-démocrate de
l'époque. En effet, toutes les références à la
protection des idées morales traditionnelles ont été
écartées au profit du "
développement sexuel
harmonieux de la jeunesse
" et le champ des infractions a
été restreint, en même temps que les sanctions.
|
Le code
pénal sanctionne les "
actes sexuels
" commis sur ou
devant certaines personnes (mineurs, prisonniers, personnes
internées...) à condition qu'ils revêtent une
"
certaine importance
". Le code ne définit pas le
terme "
acte sexuel
" mais cette formulation élimine
l'élément subjectif compris dans les dispositions
antérieures à la loi de 1973 qui évoquait les
"
actes impudiques
". La jurisprudence est en effet unanime
pour qualifier d'"
acte sexuel
" toute relation sexuelle
consistant en un contact physique, quelle que soit l'intention de son auteur :
seul compte l'élément objectif.
Quant au critère d'importance, la jurisprudence l'interprète
comme étant à la fois quantitatif et relatif.
Pour qu'il y ait infraction, il faut que l'"
intérêt
protégé par la loi
", en l'occurrence la libre
disposition de soi en matière sexuelle, ait été mis en
danger de façon considérable. Cette atteinte est estimée
en fonction du moyen utilisé, de son intensité et de sa
durée. Le critère d'importance pris sous son aspect quantitatif
permet de distinguer les infractions sexuelles des actes dénotant une
absence de tact par exemple. Par ailleurs, l'âge de la victime conduit le
juge à apprécier différemment l'acte incriminé.
De façon générale,
la tentative d'abus est
punissable
. En revanche, celui qui commet un abus sur un mineur sans
intention
de commettre un tel acte, c'est-à-dire sans
connaître l'âge de la victime se voit infliger une peine plus
légère que celui qui agit en connaissance de cause.
Pour les infractions relevant de l'article 176, c'est-à-dire les
abus
commis sur des enfants de moins de 14 ans, le délai de prescription de
l'action publique commence à courir le jour du dix-huitième
anniversaire de l'enfant.
I - LE VIOL
Le code
pénal définit le viol comme l'acte sexuel hors mariage auquel une
femme est contrainte par la violence ou la menace. Le droit allemand n'envisage
donc explicitement que le viol des femmes et ne considère pas comme un
viol un acte de pénétration orale ou anale.
Cependant, à l'article 176, relatif aux abus sexuels commis sur des
enfants de moins de 14 ans, il qualifie de " particulièrement
grave " le fait d'avoir un rapport sexuel avec un enfant de moins de 14
ans. On peut donc assimiler au viol de mineur cette infraction qui est
sanctionnée par une
peine de prison comprise entre un et dix ans
(1(
*
)).
La durée de
l'emprisonnement est comprise entre cinq et quinze ans lorsque les faits
entraînent la mort de l'enfant.
Par comparaison, il faut noter que :
- le viol d'une femme est sanctionné par une peine de prison d'au moins
deux ans et qui ne peut être inférieure à cinq ans lorsque
le viol a entraîné la mort ;
- l'homicide est puni d'une peine de prison qui ne peut être
inférieure à cinq ans, l'homicide par imprudence étant
sanctionné par une peine de prison d'au plus cinq ans ;
- les coups et blessures sont sanctionnés par une peine de prison d'au
plus trois ans ou par une amende.
Dans certaines circonstances, l'abus sexuel ayant entraîné le
décès peut être puni par la réclusion à
perpétuité. Il faut pour cela que la qualification de
"
meurtre
" ait été retenue. D'après
l'article 211 du code pénal, le meurtrier est celui qui "
par
instinct sanguinaire, pour satisfaire ses pulsions sexuelles, par
cupidité ou pour n'importe quel mobile abject tue un être humain
sournoisement, cruellement, en employant un moyen constituant un danger public
ou encore pour permettre ou dissimuler une autre
infraction
".
II - LES AUTRES AGRESSIONS SEXUELLES
1) Sur des enfants de moins de 14 ans
D'après l'article 176 du code pénal, les
"
actes sexuels
" commis sur des enfants de moins de 14 ans
sont sanctionnés par une
peine de prison d'une durée comprise
entre six
mois et dix ans
. Dans les cas les moins graves, la peine
de prison est plafonnée à cinq ans.
Les "
actes sexuels
" qui entraînent une lésion
grave sont qualifiés de "
particulièrement
graves
" et donc punis de la même façon que le viol. Sont
également qualifiés de "
particulièrement
graves
" par la jurisprudence les abus
répétés.
2) Sur des jeunes de moins de 16 ans
L'article 182 du code pénal condamne "
l'abus sexuel
des jeunes
". Il punit les "
actes sexuels
" commis
sur une personne de moins de 16 ans :
- par une personne de plus de 18 ans, quel que soit son sexe, qui met à
profit une situation de détresse ou rémunère le mineur ;
- par une personne de plus de 21 ans, qui profite de "
l'insuffisante
capacité
d'autodétermination du mineur
".
Dans le premier cas, les faits sont sanctionnés par une peine de prison
d'au plus cinq ans ou par une amende, et dans le second, par une peine de
prison d'au plus trois ans ou par une amende.
Le tribunal peut cependant s'abstenir de punir le coupable si son tort est
"
limité
".
3) Sur des jeunes de moins de 18 ans par des personnes à qui ils ont été confiés
Sont
qualifiés d'"
infractions contre l'autodétermination en
matière sexuelle
" par l'article 174 du code pénal, et
à ce titre sanctionnés par une peine de prison d'au plus cinq ans
ou par une amende, les "
actes sexuels
" commis sur :
- un jeune de moins de 16 ans par une personne chargée de son
éducation, de sa formation, ou plus généralement
chargée de s'occuper de lui ;
- un jeune de moins de 18 ans par une personne chargée de son
éducation, de sa formation ou liée avec lui par une relation
quelconque (de travail par exemple) dans la mesure où cette personne se
prévaut de la dépendance créée entre eux par la
relation qui les lie ;
- un enfant, biologique ou adoptif, de moins de 18 ans.
Si le jeune a moins de 16 ans, l'agression est donc punissable même si la
personne ne s'est pas prévalue de la supériorité dans
laquelle elle se trouve par rapport au mineur. Les termes de l'article 174
excluent les abus sexuels commis par des adultes se trouvant
momentanément en relation avec le mineur. Ne sont ainsi pas
concernés le camionneur qui prend en auto-stop une jeune fille pour un
trajet de quelques heures ou le gérant d'une auberge de jeunesse. Dans
ce cas, l'infraction tombe sous le coup des dispositions
générales du code pénal sur les coups et blessures. En
revanche, les dispositions du code pénal relatives aux infractions
sexuelles sont susceptibles de s'appliquer au responsable d'un camp de vacances
par exemple.
Si les torts du coupable sont "
limités
", le tribunal
peut ne pas le punir.
III - LES ATTEINTES SEXUELLES
Le code
pénal n'établit pas de différence entre les divers
"
actes sexuels
" selon qu'ils supposent ou non le recours
à la force ou à l'intimidation. En revanche, il les distingue
selon leur gravité. Les atteintes commises sur des enfants de moins de
14 ans sont donc sanctionnées comme les "
actes
" les
moins graves, c'est-à-dire par une peine de prison d'au plus cinq ans ou
par une amende.
Cependant, le code individualise deux infractions relatives à
l'
exhibition
sexuelle
.
Le fait de se livrer à des actes à caractère sexuel
nettement marqué devant des enfants de moins de 14 ans ou devant
des "
personnes protégées
" est puni d'une peine
de prison de un à trois ans ou d'une amende.
En revanche, le simple exhibitionnisme (qui, d'après le code, est
nécessairement le fait d'un homme) est sanctionné par une peine
de prison d'au plus un an ou par une amende.
IV - LA PREVENTION DE LA RECIDIVE
1) La castration chimique
Plusieurs affaires récentes ont relancé le
débat sur l'introduction d'une nouvelle sanction pour les hommes
coupables d'abus sexuels sur des mineurs : la
castration chimique
, qui,
à la différence de la castration chirurgicale, n'est pas
irréversible. En effet, la castration chimique produit ses effets aussi
longtemps que dure la prise des médicaments destinés à
abaisser la production de l'hormone mâle testotérone.
En Allemagne, la
castration chimique volontaire
existe depuis la
loi
du 15 août
1969
.
La castration chimique est autorisée si :
- l'intéressé est volontaire et a plus de 25 ans ;
- elle est pratiquée, après expertise, par un médecin, en
fonction des connaissances médicales ;
- elle ne présente aucun inconvénient physique ou psychologique
pour l'individu ;
- elle peut prévenir, guérir ou soulager "
des maladies
graves, des troubles
psychiques ou des souffrances causés par son
instinct sexuel anormal
" ou si l'intéressé s'est rendu
coupable de certaines infractions au code pénal, parmi lesquels l'abus
sexuel envers des enfants, tel que le définit l'article 176.
2) L'extraterritorialité des dispositions pénales
L'Allemagne a introduit dans son code pénal (article 5-8), en
septembre 1993, la possibilité de poursuivre ses ressortissants
résidant en Allemagne et coupables d'avoir entretenu des rapports
sexuels à l'étranger avec des enfants de moins de 14 ans.
Les faits sont alors punissables comme s'ils s'étaient produits en
Allemagne. La difficulté à réunir les preuves et l'absence
de coopération de la justice locale font que cette disposition est
rarement appliquée. En trois ans, une seule condamnation a
été prononcée sur cette base. Quinze autres
procédures sont en cours.
Cette disposition peut également s'appliquer lorsque l'abus sexuel est
commis à l'étranger sur un jeune de moins de 18 ans lié
à un adulte par une relation d'autorité. Dans ce cas, il faut que
la victime soit elle aussi de nationalité allemande et qu'elle
réside en Allemagne.
*
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Le groupe S.P.D. propose deux mesures pour lutter contre la récidive : le traitement des délinquants sexuels incarcérés et l'examen par des experts avant toute libération anticipée.