SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES (Février 2006)
ESPAGNE
La loi organique n° 4 du 11 janvier 2000 relative aux droits et aux libertés des étrangers énonce que la vie de famille constitue un droit pour les étrangers qui résident en Espagne . Elle érige donc le regroupement familial en droit, dont elle précise les bénéficiaires et les conditions. La loi organique n° 4 du 11 janvier 2000 a été modifiée à plusieurs reprises, en particulier par la loi organique n° 8 du 22 décembre 2000, qui a restreint les possibilités de regroupement familial. Les dispositions législatives sur les étrangers ont été développées par un texte réglementaire. Celui qui s'applique actuellement est le décret royal n° 2393 du 30 décembre 2004. |
1) Les conditions générales relatives à l'étranger qui réside dans le pays
Pour pouvoir faire venir les membres de sa famille, l'étranger doit résider à titre régulier en Espagne depuis au moins un an et posséder un permis de séjour valable pendant encore au moins un an.
En outre, il doit disposer :
- d'un logement assez spacieux et confortable pour héberger ses proches ;
- d'une couverture sociale pour lui-même et pour les bénéficiaires du regroupement familial ;
- de ressources financières suffisantes, qu'il s'agisse ou non de revenus du travail. Le décret royal n° 2393 du 30 décembre 2004 laisse au ministre compétent le soin de déterminer par voie réglementaire les ressources exigées en fonction de la composition de la famille. En l'absence d'un tel texte, l'administration procède à une analyse au cas par cas.
2) Les bénéficiaires
a) Le conjoint
Pour que les dispositions relatives au regroupement familial puissent s'appliquer, les conjoints ne doivent pas être séparés ni en droit ni en fait, et le mariage doit avoir été célébré conformément à la loi.
Bien que les couples non mariés ne soient pas explicitement visés par le texte, la jurisprudence du Tribunal constitutionnel les assimile à des couples mariés lorsque la relation entre les partenaires est stable.
b) Les enfants
Trois groupes d'enfants peuvent bénéficier des dispositions relatives au regroupement familial :
- les enfants biologiques de l'étranger et de son conjoint, à condition qu'ils soient mineurs (ou majeurs incapables) et non mariés ;
- les enfants adoptifs de l'étranger et de son conjoint, s'ils répondent aux critères requis pour les enfants naturels et si l'adoption est valable en droit espagnol ;
- les enfants d'un seul des deux époux, à condition que celui-ci exerce seul l'autorité parentale, ou que la garde des enfants lui ait été confiée et qu'il l'assume effectivement.
c) Les autres membres de la famille
Le père et la mère de l'étranger et de son conjoint peuvent obtenir un permis de séjour au titre du regroupement familial, lorsqu'ils sont à la charge (8 ( * )) de leurs enfants et que leur installation en Espagne est justifiée. En pratique, le bénéfice de ces dispositions est réservé aux personnes de plus de soixante-cinq ans.
Les mineurs et les majeurs incapables dont l'étranger est le représentant légal peuvent bénéficier des dispositions sur le regroupement familial, indépendamment de tout lien de famille.
La loi organique n° 8 du 22 décembre 2000 a supprimé l'alinéa relatif aux autres membres de la famille (frères et soeurs, oncles et tantes...), dont la présence en Espagne pouvait être justifiée par des « raisons humanitaires ».
3) La durée des permis de séjour obtenus au titre du regroupement familial
Les bénéficiaires du regroupement familial obtiennent un titre de séjour de même durée que celui de la personne autour de laquelle le regroupement s'effectue. Après plusieurs années passées en Espagne - voire plus rapidement dans certaines circonstances particulières -, ils ont droit à un titre de séjour autonome , qui leur permet à leur tour de mettre en oeuvre les dispositions relatives au regroupement familial pour faire venir certains membres de leur famille.
a) Le conjoint
Il peut obtenir un titre de séjour autonome s'il détient un permis de travail. Il peut également obtenir un titre de séjour autonome :
- après cinq années de résidence en Espagne ;
- en cas de rupture de la vie conjugale, à condition que la vie commune avec l'étranger à l'origine du regroupement familial ait duré au moins deux années ;
- s'il est victime de violences conjugales, après qu'il a obtenu une ordonnance judiciaire de protection ;
- en cas de décès du conjoint à l'origine du regroupement familial.
b) Les enfants
Ils peuvent obtenir un titre de séjour autonome à leur majorité, à condition de détenir un permis de travail ou d'avoir résidé en Espagne pendant cinq années.
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Bien que la loi fasse du regroupement familial un droit pour les étrangers qui réunissent certaines conditions, il semble que l'administration prenne parfois ses décisions de façon discrétionnaire.
* (8) Le décret royal n° 2393 du 30 décembre 2004 précise que cette qualification est réservée aux personnes économiquement dépendantes et que la dépendance économique est considérée comme établie lorsque les intéressés ont reçu, au cours de l'année précédente, des fonds de la part de l'étranger installé en Espagne ou lorsque ce dernier a assumé des dépenses à leur place. Le texte réglementaire qui devait préciser les montants n'a pas été publié, de sorte que l'administration évalue au cas par cas la dépendance économique.