SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES (Janvier 2004)
DANEMARK
Les
devoirs et les obligations des magistrats
ainsi que la
procédure
disciplinaire
sont définis au chapitre 4
du
code judiciaire
, tandis que la
composition de l'instance
disciplinaire
fait l'objet de l'article 1a du même texte.
|
Le régime disciplinaire juridictionnel décrit ci-dessous est réservé aux fautes les plus graves. Les autres relèvent du pouvoir disciplinaire de la hiérarchie, qui n'a pas été analysé.
1) Les devoirs et les obligations des magistrats
a) Les sources
Les
magistrats ne prêtent pas serment lorsqu'ils entrent en fonction.
La loi sur les fonctionnaires
Une partie des dispositions de la loi sur les fonctionnaires s'applique aux
magistrats, en particulier l'article 10, selon lequel : «
Le
fonctionnaire doit respecter scrupuleusement les règles qui
régissent sa profession et se montrer, aussi bien pendant le service
qu'en dehors, digne de l'estime et de la confiance
que l'exercice de
cette profession requiert
. »
Le code judiciaire
Le code judiciaire ne définit pas les devoirs et les obligations des
magistrats, mais prévoit
a contrario
l'intervention de l'instance
disciplinaire si un juge agit dans l'exercice de ses fonctions de façon
«
irrégulière ou inconvenante
».
Par ailleurs, le chapitre 4 du code judiciaire comprend plusieurs articles
relatifs aux
activités professionnelles annexes des magistrats
.
Si elles sont rémunérées, ces activités
requièrent l'autorisation du collège des présidents de
juridiction.
De plus, les magistrats qui exercent des activités professionnelles
annexes rémunérées ont l'obligation d'en établir
chaque année un compte rendu détaillé. Ce document, qui
précise notamment les revenus liés à chacune de ces
activités, doit être présenté à la
hiérarchie. Si elle le juge utile, celle-ci peut exiger du magistrat
qu'il justifie l'emploi du temps qu'il a consacré à ces
activités et qu'il précise les revenus qu'elles lui ont
rapportés.
b) Les fautes disciplinaires
Elles ne
sont pas définies, mais sont appréciées par l'instance
disciplinaire par rapport aux règles qui s'imposent aux magistrats.
Les principales fautes relevées jusqu'à maintenant ont
consisté en
manquements au devoir de neutralité
. À
titre d'exemple, les faits suivants ont été
considérés comme des fautes :
- indiquer à un accusé qu'il ne devait pas s'attendre
à être acquitté ;
- dire à une partie « taisez-vous ».
2) La procédure disciplinaire
a) Le déclenchement de la procédure
La
procédure disciplinaire peut être déclenchée
à la suite de la
plainte
d'un justiciable
ou à la
demande du ministre de la Justice
.
Si un justiciable estime qu'il a été lésé par
le comportement «
irrégulier ou inconvenant
»
d'un juge dans l'exercice de ses fonctions, il peut saisir directement
l'instance disciplinaire. La plainte du justiciable, qui doit être
écrite, est recevable dans les quatre semaines qui suivent la prise de
connaissance du motif de la demande de sanction. Le justiciable peut donc avoir
à déposer sa plainte avant même la fin de son procès.
Si ce qui est reproché au juge revêt un caractère de
gravité tel qu'un avertissement de la hiérarchie est
considéré comme insuffisant, c'est la procédure
disciplinaire qui est mise en oeuvre.
Les « omissions ou négligences » les moins graves
font l'objet d'un avertissement. Ces affaires sont traitées par le
président du tribunal ou, si le magistrat mis en cause n'appartient pas
à une formation collégiale, par le président de la cour
d'appel à laquelle le magistrat concerné est rattaché.
Le ministre de la Justice peut demander au procureur
général du royaume de saisir l'instance disciplinaire lorsqu'il
considère qu'un juge s'est comporté d'une manière
susceptible de s'«
affaiblir ou de
[se]
rendre indigne
de
l'estime et de la confiance
» que l'exercice de la
fonction judiciaire suppose.
b) L'instance disciplinaire
L'instance disciplinaire (le
særlige klageret
,
c'est-à-dire le tribunal spécial des plaintes) est un
tribunal
particulier
(4
(
*
))
,
composé de
trois magistrats
représentant les trois
niveaux de juridiction
(tribunaux de première instance, cours
d'appel et Cour suprême).
Ces trois magistrats sont nommés pour dix ans par le Roi sur proposition
du ministre de la Justice. Le pouvoir de proposition du ministre est formel,
puisque, aux termes de la loi, les trois candidats sont respectivement
présentés au ministre par l'Association des magistrats, par les
cours d'appel et par la Cour suprême. Les membres du
særlige
klageret
ne sont pas renouvelables dans leurs fonctions.
Le
særlige klageret
existe depuis le 1
er
juillet
1939.
c) Le déroulement de la procédure
Le
særlige klageret
vérifie le bien-fondé de la
plainte. Le cas échéant, il peut la rejeter immédiatement.
La procédure est
essentiellement écrite
et se
déroule selon les
règles applicables aux procès
civils
. Toutefois, le magistrat mis en cause peut demander qu'elle se
déroule oralement. Dans cette hypothèse, le
særlige
klageret
se prononce sur l'opportunité du huis clos. Le magistrat
mis en cause peut demander à être assisté par un avocat.
S'il apparaît que la procédure a été
déclenchée indûment, le
særlige klageret
peut
infliger une amende au justiciable qui en est à l'origine.
Pendant la procédure disciplinaire, le
særlige klageret
peut suspendre le magistrat mis en cause lorsque l'affaire apparaît
particulièrement grave ou lorsqu'une procédure pénale a
été ouverte parallèlement.
En moyenne, la procédure disciplinaire dure
deux mois
.
3) Les sanctions et les voies de recours
a) Les sanctions
Lorsque
la plainte apparaît fondée, le
særlige klageret
peut
exprimer sa
réprobation
à l'égard de la conduite du
magistrat ou lui infliger une
amende
. Dans les cas les plus graves, il
peut prononcer la
révocation
.
La décision du
særlige klageret
revêt la forme d'un
jugement, qui est prononcé en audience publique.
b) Les voies de recours ouvertes au magistrat sanctionné
Les
décisions de révocation peuvent être contestées
devant la Cour suprême. Il en va de même lorsque cette sanction a
été demandée, mais pas prononcée.
Les autres décisions sont portées en appel selon la
procédure civile de droit commun.
* *
*
L'activité disciplinaire du særlige klageret apparaît limitée, comme le montrent les chiffres suivants :
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Plaintes reçues |
50 |
26 |
32 |
33 |
46 |
68 |
Plaintes rejetées |
40 |
23 |
30 |
30 |
40 |
60 |
Décisions de réprobation ou de révocation |
0 |
0 |
0 |
1 |
0 |
1 |
Autres solutions (retrait de la plainte par exemple) |
10 |
3 |
2 |
2 |
6 |
7 |
* (3) Un ministère aux affaires constitutionnelles a été créé le 12 juin 2003. Il est dirigé par le Lord Chancelier. Ce ministère a en charge la plupart des compétences du Lord Chancelier et a pour tâche de mener à bien une série de réformes constitutionnelles dans le domaine judiciaire. Une fois ces réformes achevées, le poste de Lord Chancelier devrait être aboli. Des consultations sur ces différents projets sont en cours.