SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES (Janvier 2004)
ESPAGNE
La
gestion de la politique nationale de l'emploi incombe à l'INEM,
établissement public placé sous la tutelle du ministère du
Travail. L'indemnisation et le placement des chômeurs font donc partie
des compétences de l'INEM
.
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1) L'indemnisation des chômeurs
L'assurance chômage est financée par des cotisations
des employeurs et des salariés, ainsi que par une contribution de
l'État, dont le montant annuel est déterminé par la loi de
finances.
La gestion de l'assurance chômage est assurée par l'INEM
(
Instituto nacional de empleo
), personne morale de droit public
(8
(
*
))
à
gestion
tripartite
placée sous la tutelle du ministère du Travail et
responsable de l'application de la politique nationale de l'emploi.
L'INEM a été créé en 1978 par le décret-loi
sur la gestion du système de sécurité sociale, mais ses
missions et ses structures ont été précisées par un
décret de 1986.
Les instances dirigeantes de l'INEM
, le conseil général et
la commission exécutive,
ont une composition tripartite
.
L'organe de décision est le
conseil général
:
il détermine les grandes orientations, s'assure du bon fonctionnement de
l'établissement, établit le projet de budget et approuve le
rapport annuel, qui est fourni au gouvernement. Le conseil
général comprend treize représentants des organisations
syndicales de salariés représentatives
(9
(
*
))
au niveau national, treize
représentants des associations patronales, également
représentatives au niveau national, et treize représentants de
l'administration. Le secrétaire général pour l'emploi
(10
(
*
))
et le directeur
général de l'INEM, respectivement président et
vice-président du conseil général, sont inclus dans les
treize représentants de l'administration.
La
commission exécutive
instruit les dossiers soumis au conseil
général, contrôle l'application des décisions qu'il
prend, lui propose les mesures qu'elle estime susceptibles d'améliorer
le fonctionnement de l'établissement et exerce toutes les fonctions que
le conseil général lui délègue.
Présidée par le directeur général de l'INEM, elle
réunit deux autres représentants de l'administration, trois des
représentants des salariés siégeant au conseil
général et trois des représentants des employeurs
siégeant également au conseil général.
Le directeur général de l'INEM est nommé par décret
en conseil des ministres, sur proposition du ministre du Travail.
Les services centraux de l'INEM se composent de plusieurs sous-directions, dont
la sous-direction des prestations, chargée de l'organisation et de la
gestion de toutes les activités liées à l'assurance
chômage.
Les missions de l'INEM sont assurées par ses
52 directions
provinciales
, dont les commissions exécutives ont une composition
tripartite, ainsi que par son réseau de
quelque
650 agences
pour l'emploi
.
2) Le placement des chômeurs
a) Les structures publiques
La
loi de 1980 relative aux principes fondamentaux en matière d'emploi
confie l'organisation du placement des salariés à l'INEM et
précise que le placement constitue un service public et gratuit.
Plus précisément,
ce sont
les
agences
locales pour l'emploi de l'INEM
qui assistent les
demandeurs
d'emploi dans leurs recherches, par exemple en les
informant sur les
postes vacants et sur la situation sur le marché du travail, en leur
offrant des emplois correspondant à leurs capacités, en
préparant des programmes de recherche d'emploi et de formation.
Les employeurs, bien que libres de choisir le mode de recrutement de leurs
salariés, sont tenus d'indiquer à l'INEM tout emploi vacant ainsi
que l'échéance des contrats de travail en cours. Lorsqu'ils
effectuent un recrutement en dehors de l'INEM, ils doivent lui transmettre une
copie du contrat de travail.
Dans le cadre du transfert progressif de compétences de l'État
aux communautés autonomes, ces dernières assument, pour la
plupart, la politique active de l'emploi, de sorte que les agences locales de
l'INEM sont amenées à collaborer avec les services sociaux des
communautés autonomes.
b) Les agences privées
La
loi portant statut des salariés interdit les agences de placement
à but lucratif, mais prévoit la possibilité de
créer des agences à but non lucratif.
Cette loi
détermine les grands principes applicables à ces agences
(fonctionnement selon les conditions déterminées par la
convention de collaboration conclue avec le service public de l'emploi,
rémunération correspondant à la seule couverture des frais
et respect du principe d'égalité).
Le décret royal du 5 mai 1995
relatif aux agences de placement
sans but lucratif et aux services intégrés pour l'emploi
(11
(
*
))
a
précisé les dispositions générales prévues
par la loi portant statut des salariés.
Les agences de placement doivent obtenir
l'autorisation d'exercice de
l'INEM.
L'octroi de l'autorisation est subordonné à la
présentation d'un dossier
comportant notamment un programme
prévisionnel d'activité et de
financement.
L'agrément peut être donné à
un particulier
ou à une
personne morale.
L'INEM tient le registre des
agences agréées.
L'autorisation obtenue, l'agence agréée conclut
avec
l'INEM une
convention
initiale d'une durée d'un an. Sur demande,
la durée de validité de la convention initiale peut être
prolongée d'un an. À l'issue de la deuxième année,
l'autorisation peut devenir illimitée. La convention doit
préciser le domaine d'activité et le secteur géographique
de l'agence, laquelle doit s'engager à ne pas sous-traiter à des
tiers la réalisation des services pour lesquels elle a obtenu
l'agrément.
Les agences agréées ont de nombreuses obligations par rapport
à
l'INEM
. Elles doivent en particulier lui fournir :
- les références des demandeurs d'emploi qui
requièrent leurs services ;
- les offres qu'elles reçoivent des employeurs ;
- les refus des demandeurs d'emploi, en en précisant le motif.
Les agences agréées ont l'obligation de tenir une
comptabilité séparée pour leurs activités de
placement et de disposer d'un compte bancaire spécifique. Elles sont
soumises
au
contrôle financier et administratif de l'INEM
,
auquel elles doivent communiquer au cours du premier mois de chaque
année un rapport d'activité relatif à l'année
écoulée et une estimation des activités de l'année
suivante. Chaque année, elles doivent également lui adresser un
rapport d'audit établi par des experts indépendants. Le contenu
et les modalités de transmission de ces documents sont
précisés dans la convention de collaboration.
c) La collaboration entre les structures publiques et privées de placement
La loi
de 1980 sur l'emploi dispose que tout demandeur d'emploi a l'obligation de
s'inscrire à l'INEM, cette obligation étant
considérée comme remplie lorsque l'intéressé est
inscrit dans une agence agréée. Cependant, les demandeurs
d'emploi qui demandent ou qui perçoivent des allocations de
chômage ne peuvent pas s'acquitter de cette obligation en s'inscrivant
dans une agence agréée : ils doivent être inscrits
à l'INEM.
De son côté, l'INEM doit signaler aux demandeurs d'emploi
l'existence des agences privées en leur précisant que celles-ci
peuvent réclamer des honoraires correspondant aux frais de
fonctionnement.
Par ailleurs, la loi portant statut des salariés prévoit que les
bureaux de recrutement participent au service public de l'emploi. Ces
entreprises, spécialisées dans la sélection des
salariés, doivent informer l'INEM de leurs activités.
Si la collaboration entre structures publiques et privées de placement
apparaît limitée, il en va différemment en matière
d'amélioration de l'employabilité des demandeurs d'emploi. En
effet, le décret royal du 5 mai 1995 relatif aux agences de placement
sans but lucratif et aux services intégrés pour l'emploi
prévoit l'établissement de conventions entre l'INEM et des
opérateurs publics ou privés sans but lucratif permettant
à ces derniers de mener diverses actions (information, formation, suivi
personnalisé...) susceptibles de faciliter le placement des
chômeurs. Les services intégrés pour l'emploi regroupent
l'ensemble des politiques destinées à permettre aux
chômeurs d'obtenir un emploi.
3) Les liens entre l'indemnisation et la recherche d'emploi
L'indemnisation et le placement relèvent de la
compétence de l'INEM, dont les agences locales fonctionnent comme des
guichets uniques.
L'indemnisation est subordonnée à la recherche active d'un
emploi
: les demandeurs d'emploi doivent participer à toutes
les actions (de motivation, d'information, de formation, de reconversion...)
que l'INEM leur propose et accepter tout poste adapté qui leur est
proposé, la notion de « poste adapté » ayant
été assouplie par la loi du 12 décembre 2002 portant
mesures urgentes pour la réforme du système de protection contre
le chômage et pour l'amélioration de la capacité d'emploi.
Tout poste correspondant à la profession sollicitée par le
demandeur d'emploi, à la profession exercée habituellement ou
à ses aptitudes est considéré comme adapté, dans la
mesure où il se trouve dans un rayon de 30 km autour de son domicile,
à moins que le temps de transport ne soit excessif par rapport au temps
de travail. Au bout d'un an de perception des allocations de chômage,
d'autres postes de travail peuvent être considérés comme
adaptés.
Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 12 décembre 2002,
les obligations du demandeur d'emploi font l'objet d'un
«
engagement d'activité
» que
l'intéressé signe lorsqu'il dépose son dossier de demande
d'indemnisation. Le non-respect de l'engagement peut entraîner la
suspension des allocations pour trois mois, puis pour six mois en cas de
récidive. La troisième infraction peut se traduire par la
suppression définitive des allocations. La mise en application des
engagements d'activité a nécessité le recrutement de
5 000 personnes par les services de l'INEM.
* (7) Tout emploi susceptible d'être occupé par l'intéressé, le cas échéant après une courte formation, et n'entraînant pas un temps de transport supérieur à trois ou quatre heures par jour est considéré comme acceptable.
* (8) L'INEM est un « organisme autonome ». La loi d'avril 1997 relative à l'organisation et au fonctionnement général de l'État a classé les personnes morales de droit public en deux catégories : les « organismes autonomes » (organismos autónomos) et les « entités publiques gestionnaires » (entidades públicas empresariales). Les premiers, régis par le droit public, exercent des activités administratives, tandis que les secondes, relevant essentiellemement du droit privé, ont des activités marchandes.
* (9) Voir l'étude LC 87 de mars 2001 sur la représentativité des syndicats.
* (10) Le secrétaire général pour l'emploi est le fonctionnaire qui collabore directement avec le ministre pour toutes les questions relatives à l'emploi. Les secrétaires généraux ne sont pas à la tête des directions des ministères.