NOTE DE SYNTHESE
En
France, la loi 92-108 du 3 février 1992 relative aux conditions
d'exercice des mandats locaux
a introduit plusieurs mesures organisant le
statut des élus.
Ces dispositions, applicables indépendamment du statut de l'employeur,
ont été depuis lors codifiées et intégrées
au
code général des
collectivités territoriales.
Elles prévoient que «
l'employeur est tenu de laisser
à tout salarié membre d'un conseil municipal le temps
nécessaire pour se rendre et participer :
»
1° aux séances plénières de ce
conseil ;
»
2
°
aux réunions des commissions dont il
est membre et instituées par une délibération du conseil
municipal ;
»
3
°
aux réunions des assemblées
délibérantes et des
bureaux des organismes où il a
été désigné pour représenter la
commune.
»
Les salariés membres d'un conseil général ou d'un conseil
régional bénéficient des mêmes mesures.
Outre ces
autorisations d'absence
, les élus locaux
bénéficient de
crédits d'heures
, dont l'importance
varie en fonction de la nature du mandat et, dans le cas des élus
municipaux, de la taille de la commune. Ces crédits d'heures,
accordés sous forme d'un forfait trimestriel non reportable, permettent
aux élus «
de
disposer
du
temps
nécessaire à l'administration de
[la collectivité]
ou de l'organisme auprès duquel
ils la représentent et
à la préparation des réunions des instances où
ils
siègent
». Seuls les conseillers municipaux
élus dans les communes de moins de 3 500 habitants ne
bénéficient pas de crédits d'heures.
L'employeur n'est pas tenu de payer le salarié pendant ses absences,
qu'elles relèvent du régime des autorisations ou de celui des
crédits d'heures.
Le dispositif prévu par la loi de 1992 s'applique aux fonctionnaires,
qui peuvent toutefois bénéficier de mesures plus favorables. Le
décret 59-310 du 14 février 1959, qui a été
maintenu en vigueur par le décret 86-442, accorde en effet aux
fonctionnaires occupant des fonctions publiques électives des
autorisations spéciales d'absence «
dans la limite de la
durée
totale des sessions des assemblées dont ils font
partie
», pour autant que le mandat détenu ne justifie pas
un détachement. Plusieurs circulaires précisent ce régime
et, en pratique, les autorisations spéciales d'absence, qui peuvent
également être octroyées hors sessions, dépendent de
l'organisation interne de chaque administration.
La présente étude analyse les mesures équivalentes
actuellement en vigueur dans plusieurs pays européens,
l'Allemagne,
la Belgique, le
Danemark, l'Espagne, la Grande-Bretagne, le Luxembourg,
les Pays-Bas et le Portugal
.
Pour chacun des ces pays, elle décrit les dispositifs (autorisations
d'absence, crédits d'heures, suspension du contrat de travail...)
adoptés pour permettre aux salariés d'exercer leur mandat
électif local, en mettant en évidence les éventuelles
disparités de traitement entre les salariés de droit privé
et les autres salariés, et en s'interrogeant sur le maintien de la
rémunération par l'employeur pendant le temps d'absence. Les
indemnités susceptibles d'être versées aux élus pour
compenser les retenues sur salaires n'ont pas été prises en
compte. Le cas particulier des élus locaux qui exercent leur mandat
à temps plein et qui perçoivent une rémunération
à ce titre n'a pas été retenu non plus.
L'examen des dispositions étrangères révèle
que :
- dans tous les pays étudiés, les employeurs ont
l'obligation d'accorder des facilités à leurs salariés qui
exercent un mandat électif local...
- ... sans que l'étendue de cette obligation soit partout
précisément définie.
1) Dans les pays étudiés, les employeurs doivent octroyer des
facilités à leurs salariés qui exercent un mandat
électif local
Dans chacun des huit pays étudiés, la législation sur les
collectivités territoriales, le droit du travail ou un texte
ad
hoc
disposent que les employeurs doivent libérer leurs
salariés de leurs obligations professionnelles pour leur permettre
d'exercer leurs mandats locaux.
En Allemagne, ce droit est prévu par les codes des communes des
différents
Länder
et repris, d'une part, par la loi sur la
fonction publique fédérale et, d'autre part, par les lois qui
régissent les fonctions publiques régionales. De même,
cette garantie est inscrite dans la loi danoise sur les collectivités
locales.
En revanche, en Espagne, en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas, elle figure dans
le droit du travail. Elle est donc énoncée dans les textes
généraux applicables aux salariés de droit privé et
reprise, le cas échéant sous une forme légèrement
différente, dans la loi relative aux fonctionnaires.
Dans les trois autres pays, la Belgique, le Luxembourg et le Portugal,
l'absence des salariés pour l'exercice d'un mandat électif local
fait l'objet de dispositions particulières. Deux lois belges de 1976 et
1986, applicables respectivement dans le secteur privé et dans les
services publics fédéraux, instituent un congé pour
l'exercice d'un mandat politique. Au Luxembourg, un règlement de 1989
développe le principe du droit à congé politique
posé par la loi communale et détermine les facilités
horaires accordées aux différents élus municipaux. La loi
portugaise de 1987 portant statut des élus locaux précise
notamment dans quelle mesure les employeurs doivent permettre à leurs
salariés titulaires d'un mandat électif de s'absenter.
2) L'étendue de l'obligation des employeurs est diversement
définie
a) En Allemagne, au Danemark, en Espagne, en Grande-Bretagne et aux
Pays-Bas, les élus locaux bénéficient d'autorisations
d'absence qui ne sont pas définies avec précision
Dans ces cinq pays, où les autorisations d'absence résultent de
la législation sur les collectivités locales ou du droit du
travail, les employeurs doivent faciliter l'exercice des mandats
électifs de leurs salariés en leur permettant de s'absenter
pendant le temps «
indispensable
»,
«
raisonnable
» ou
«
nécessaire
». La loi danoise est la seule
qui énumère les réunions et séminaires de formation
susceptibles de justifier une absence.
Généralement, l'absence de définition des obligations des
employeurs va de pair avec l'absence de dispositions sur le maintien de la
rémunération. C'est le cas en Allemagne, au Danemark, en
Grande-Bretagne et aux
Pays-Bas, de sorte que les absences
motivées par l'exercice d'un mandat électif entraînent en
principe une retenue sur le salaire. Seule la loi espagnole précise que
ces absences, qu'elle considère comme un «
devoir à
caractère public auquel on ne peut pas se soustraire
»,
sont sans effet sur la rémunération, l'employeur pouvant
cependant déduire du salaire versé les indemnités
perçues par son salarié en tant qu'élu.
b) En Belgique, au Luxembourg et au Portugal, le régime des
absences des élus locaux est très détaillé
Dans ces trois pays, qui ont adopté un dispositif
ad hoc
, le
régime des absences des élus locaux est très
détaillé. Il dépend de la nature du mandat exercé,
voire du statut de l'employeur, mais, en règle générale,
les absences sont assimilables à des crédits d'heures.
Au Luxembourg, tous les élus municipaux bénéficient de
crédits d'heures, dont l'importance varie en fonction de la population
de la commune. Les salariés ont droit au maintien de leur
rémunération, leurs employeurs étant remboursés une
fois par an par l'intermédiaire du fonds des dépenses communales.
De même, au Portugal, les élus locaux, selon qu'ils appartiennent
ou non à l'organe exécutif local, ont droit à des
crédits d'heures ou à de simples autorisations d'absence. Le
quantum des crédits d'heures dépend de la nature du mandat
(municipal ou paroissial) et de la population de la collectivité. Les
employeurs sont remboursés des charges financières
résultant de l'exercice de mandats électifs locaux par leurs
salariés.
C'est en Belgique que le dispositif est le plus complexe. Outre le
système des crédits d'heures rémunérés,
valables aussi bien pour les salariés du secteur privé que pour
ceux du secteur public, il existe deux autres formes de congé politique.
En effet, les salariés du secteur privé qui sont maires ou
adjoints au maire peuvent opter pour la suspension de leur contrat de travail,
tandis que les salariés du secteur public peuvent être mis en
congé, à leur demande ou d'office, selon la nature du mandat
exercé et, pour les mandats municipaux, selon la taille de la commune.
Le congé est exprimé en jours par mois ou en fraction d'un emploi
à temps plein. Bien que non rémunéré, le
congé politique est pris en compte pour l'avancement et le calcul des
droits à la retraite.
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L'examen des législations étrangères fait apparaître la grande diversité des solutions retenues. La reconnaissance du droit d'absence constitue le seul point commun à tous les pays étudiés, puisque les modalités d'exercice de ce droit ne sont précisées qu'en Belgique, au Luxembourg et au Portugal, ces trois pays ayant adopté soit un texte particulier sur le congé politique soit un statut de l'élu.