Mme Céline Brulin. Cet amendement, qui se justifie par son texte même, vise à inscrire dans la loi l’obligation pour les architectes des Bâtiments de France de rendre des décisions compatibles avec le respect de la trajectoire du « zéro artificialisation nette » (ZAN) et avec les exigences, notamment énergétiques, relatives à la réhabilitation du bâti existant.
Je vais d’emblée rassurer tout le monde : il s’agit d’un amendement d’appel.
Reste que les élus locaux ont souvent le sentiment d’être confrontés à des avis et à des injonctions contradictoires : on leur dit qu’il ne faut plus artificialiser – cet objectif, nous le partageons –, mais sans leur donner les outils qui leur permettraient, selon le jargon usuel, de « reconstruire la ville sur la ville ». C’est un problème !
Il faut que nous fassions collectivement un effort et que nous nourrissions à cet égard la réflexion des architectes des Bâtiments de France et des Udap, car on ne peut plus, au regard des objectifs que j’ai mentionnés, concevoir la préservation du patrimoine exactement de la même manière que par le passé. De fait, il y aura des emprises à reconquérir au cœur de nos villes, ce qui va nécessairement supposer de composer avec un patrimoine existant. Or, pour le moment, cette dimension n’est pas prise en compte : tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Vous évoquez la trajectoire du ZAN, ma chère collègue ; ce sujet a été longuement débattu hier encore. Du reste, y a-t-il encore ou non une trajectoire ? Je pose cette question sous le contrôle de notre collègue Guislain Cambier, ici présent…
Pour ce qui est de l’ABF, nous considérons que son métier est le patrimoine. Quant aux contradictions des politiques publiques – il peut y en avoir, qu’il s’agisse des énergies renouvelables, du ZAN ou du patrimoine –, c’est au préfet de région qu’il revient de les trancher, et non aux architectes des Bâtiments de France : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 10 rectifié bis, présenté par Mmes Bellamy et Belrhiti, MM. Reichardt, Panunzi et Paccaud, Mme Aeschlimann, MM. Reynaud et Burgoa, Mme Ventalon, MM. Mouiller, Perrin et Rietmann, Mmes Demas et Dumont, MM. Sido, Pointereau et Rapin, Mmes Puissat, Gosselin et Garnier, MM. Bruyen, Somon, C. Vial, P. Vidal, Lefèvre et Belin, Mmes Gruny et Dumas, MM. Brisson, Grosperrin et Gremillet, Mmes Hybert et P. Martin, MM. Rojouan et Genet et Mme Josende, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le III de l’article L. 632-2 du code du patrimoine, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – L’autorité administrative compétente pour infirmer le refus d’accord de l’architecte des Bâtiments de France est le représentant de l’État dans le département. »
La parole est à Mme Béatrice Gosselin.
Mme Béatrice Gosselin. Cet amendement a été déposé par notre collègue Marie-Jeanne Bellamy.
Afin de favoriser le règlement des dossiers litigieux en amont des procédures de recours mobilisables à l’échelon régional, l’article 3 de la proposition de loi ouvre la possibilité pour le maire de saisir une commission de conciliation à l’échelon départemental. Le texte prévoit que cette dernière, placée sous l’égide du préfet de département, rende un avis qui serait seulement consultatif. Et c’est le préfet de région qui resterait en tout état de cause compétent pour ce qui est d’infirmer le refus d’accord de l’ABF.
Aussi, dans un souci de proximité et de cohérence avec la création de cette commission de conciliation, le présent amendement a-t-il pour objet de donner compétence au représentant de l’État dans le département, soit le préfet de département, pour statuer sur les recours introduits à l’encontre des avis des ABF.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Si nous souscrivons totalement à la préoccupation que vient d’exprimer notre collègue, l’avis de la commission est néanmoins défavorable sur cet amendement.
Voici un sujet essentiel : faut-il ou non replacer les ABF sous l’autorité des préfets ?
Mme Catherine Belrhiti. Oui, il le faut !
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Je me répète, dans un texte de ce type, examiné dans le cadre d’une niche transpartisane, en un temps contraint, il n’est pas question de revoir l’architecture de l’État. Mais c’est un vrai sujet ! À titre personnel, d’ailleurs, j’y suis plutôt favorable.
Cela dit, ma chère collègue, nous faisons déjà un pas dans le sens que vous indiquez, en créant la commission départementale : cette instance est placée, précisément, sous l’autorité du préfet de département, qui est chargé de la réunir, d’y inviter membres de droit et acteurs associés et d’en piloter les travaux.
Peut-être, aux yeux de certains, ce pas est-il insuffisant. J’ai plutôt tendance à partager votre avis, mais ce n’est pas ici et maintenant que nous pourrons faire davantage.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 10 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 4
À la première phrase du deuxième alinéa de l’article 1er de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture, après le mot : « constructions », sont insérés les mots : « , leur réhabilitation ».
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 11, présenté par Mme de Marco, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – À la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 1er de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture, les mots : « le permis de construire ainsi que les autorisations de lotir » sont remplacés par les mots : « les autorisations d’urbanisme ».
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. J’ai exprimé, en discussion générale, ma satisfaction de voir introduite, par l’article 4 de la proposition de loi, la notion de « réhabilitation » à l’article 1er de la loi de 1977 sur l’architecture.
Je me suis penchée de nouveau sur cet article 1er de la loi de 1977 : il mériterait un dépoussiérage. Il y est question des « autorisations de lotir », qui n’existent plus, madame la ministre, depuis 2007 !
Pour cette raison, je propose de remplacer la mention des « autorisations de lotir » par celle des « autorisations d’urbanisme » qui, il est vrai, englobe beaucoup de choses.
Je vais retirer cet amendement d’appel : je ne veux pas centrer notre débat de ce soir sur la modification de l’article 1er de la loi de 1977. Il serait intéressant néanmoins, madame la ministre, que vous vous engagiez à revoir ce texte, qui, à la lecture, se révèle obsolète. Le permis de lotir, j’y insiste, n’existe plus depuis plus de dix ans !
Je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 11 est retiré.
L’amendement n° 2 rectifié, présenté par Mme Drexler, M. Brisson, Mmes Billon, Ventalon, Muller-Bronn, Gosselin, Guidez, Morin-Desailly et Belrhiti et MM. Klinger, Reichardt, Delia, Grosperrin, Savin, Milon, Belin et Chasseing, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – À la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article 1er de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture, les mots : « le permis » sont remplacés par les mots : « les autorisations ».
La parole est à Mme Sabine Drexler.
Mme Sabine Drexler. Nous ne pouvons que constater les effets pervers cumulés des législations qui ont été votées depuis 2021 – loi Climat et Résilience, ZAN, diagnostic de performance énergétique (DPE) – sur la préservation du bâti ancien.
Tel est en particulier le cas des prescriptions de travaux qui poussent de nombreux propriétaires à isoler leur bien par l’extérieur avec des matériaux inadaptés, provoquant des dégâts irréversibles sur des constructions traditionnelles, notamment celles qui comportent du bois en façade. Ces travaux, de surcroît, dénaturent l’identité visuelle du bâti ancien.
Il est donc urgent de mieux conseiller les propriétaires en amont de ce type de travaux. Je pense notamment au secteur non protégé, dont il n’est pas question dans ce texte, et je profite de l’occasion qui m’est donnée, madame la ministre, pour vous alerter : il faut absolument que les propriétaires de bâtiments patrimoniaux non protégés soient mieux conseillés afin qu’ils puissent réaliser des travaux adaptés aux spécificités du bâti.
Je propose ainsi, par cet amendement, de modifier l’article 1er de la loi de 1977 sur l’architecture, qui ne vise actuellement que les permis de construire, pour y inclure toutes les demandes d’autorisation d’urbanisme, c’est-à-dire les permis de construire, les déclarations préalables, les permis de démolir, les permis d’aménager.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Les deux amendements, l’amendement n° 11 qui vient d’être retiré et l’amendement n° 2 rectifié, portent sur un vrai sujet de fond.
Aujourd’hui, l’avis de l’ABF est obligatoire dès lors qu’une demande d’autorisation concerne un terrain situé en périmètre protégé. Hors dudit périmètre et pour ce qui est du patrimoine non protégé, vous pouvez faire à peu près ce que vous voulez, en tout cas un bon nombre de choses.
Cette question du patrimoine hors secteur protégé est une question de fond que nous devons poser.
M. Pierre Ouzoulias. Tout à fait !
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Le présent texte porte sur les ABF, donc sur les zones protégées. Il n’empêche que nous avons choisi d’inscrire cette notion de réhabilitation dans la loi de 1977 sur l’architecture, car ce sujet est revenu en permanence au cours de nos travaux. Nous nous devions d’y faire droit afin d’être fidèles au travail que nous avons mené et aux propos que nous avons entendus lors des auditions.
Je comprends donc tout à fait l’esprit de ces amendements.
En revanche, je veux attirer l’attention sur les rédactions proposées : modifier l’article 1er dans le sens prévu par les amendements supposerait de modifier aussi l’article 3, c’est-à-dire, en clair, d’étendre le champ du recours obligatoire à un architecte.
Je résume, sans caricaturer : si nous allons au bout de cette logique, cela voudrait dire que, demain, le particulier qui déposerait une demande de déclaration préalable pour changer les fenêtres de sa maison dans un secteur non protégé pourrait devoir solliciter un architecte. Un architecte, c’est bien ; mais cela coûte un peu d’argent…
Je partage l’idée qu’il s’agit d’un sujet de fond ; mais tel n’est pas l’objet de cette proposition de loi, et, du reste, nous faisons déjà un pas dans la direction que souhaitaient les auteurs des amendements.
M. le président. La parole est à Mme Sabine Drexler.
Mme Sabine Drexler. Je retire mon amendement. En revanche, je maintiens l’alerte : j’espère que nous allons nous saisir de ce sujet, qui est un vrai sujet. J’ai parlé de conseiller les propriétaires, mais cela ne veut pas forcément dire faire appel à des architectes : les CAUE ou les architectes conseils des collectivités peuvent exercer ce rôle.
En tout état de cause, dès lors que des travaux sont envisagés en secteur non protégé, il faut absolument s’assurer qu’un conseil est fourni aux particuliers.
Mme Rachida Dati, ministre. Madame la sénatrice Drexler, les arguments que vous avancez sont parfaitement pertinents.
Simplement, ce que vous proposez dépasse le cadre de ce texte. Comme vous le savez, un travail est en cours avec le ministère du logement. Je vous le dis en toute transparence : nous devons nous mettre d’accord sur des positions communes afin d’intégrer toutes les questions que vous soulevez, qui sont, j’y insiste, vraiment pertinentes.
De mon côté, je défends vos arguments, et nous essayons de définir, avec le ministère du logement, une position intermédiaire, dans un souci d’efficacité.
Le travail interministériel est en cours : nous pourrons faire droit aux préoccupations que vous exprimez dans la future loi sur le logement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 4.
(L’article 4 est adopté.)
Intitulé de la proposition de loi
M. le président. L’amendement n° 18, présenté par M. Verzelen, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet intitulé :
Proposition de loi relative à l’exercice des missions des architectes des Bâtiments de France
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre-Jean Verzelen, rapporteur. Mes chers collègues, de tous ceux dont nous aurons débattu, cet amendement n’est certes pas le plus stratégique…
Nous avons oublié de mettre au mot « Bâtiments » la majuscule qui est la sienne dans le code du patrimoine lorsqu’il est question de l’architecte des Bâtiments de France.
M. le président. En conséquence, l’intitulé de la proposition de loi est ainsi rédigé.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Je commencerai par saluer notre rapporteur pour la qualité de son travail.
Nous défendons la place et le rôle des ABF, dont nous savons tout ce qu’ils apportent pour la préservation de notre patrimoine. C’est pour cette raison que nous nous sommes mobilisés ce soir, les membres de la commission de la culture étant présents en nombre dans l’hémicycle.
Il n’empêche que, selon moi, nous sommes passés à côté d’un texte qui aurait pu signifier autrement et beaucoup mieux la position du Sénat sur ce sujet : en particulier, nous sommes passés à côté de plus de proximité.
Puisque nous avions décidé, nonobstant l’avis contraire du Gouvernement, qu’une commission départementale était utile, il me semble que nous aurions pu largement accroître les compétences, le rôle et les missions de cette instance.
Nous aurions pu également donner une compétence supplémentaire au préfet de département. Le débat n’a pas eu lieu ; l’amendement, pourtant, était intéressant.
Dans cette assemblée, nous disons très souvent qu’il faut renforcer le rôle des préfets de département, qu’il faut faire revenir l’État dans le département. Las ! quand une occasion se présente, nous passons à côté.
Que Pierre-Jean Verzelen se rassure : malgré ces quelques occasions manquées, nous voterons le texte.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre Monier. Je remercie les collègues qui ont participé à la mission d’information et salue le travail effectué sur ce texte par le service de la commission de la culture.
Cette proposition de loi étant inscrite à l’ordre du jour d’une niche transpartisane, il était évident que le sujet de l’avis conforme, qui ne fait pas consensus, ne pouvait être évoqué.
La commission départementale est créée à l’article 3 : la conciliation sera bel et bien possible à l’échelon du département.
Quant à faire « redescendre » la compétence relative aux recours formés à l’encontre des avis de l’ABF en la confiant aux préfets de département plutôt qu’aux préfets de région, je n’y suis pas favorable. Ce qui ressort des débats que nous avons eus sur cette question lors des auditions, c’est qu’il vaut mieux que cette compétence soit exercée à une échelle un peu plus large.
Par ailleurs, je réitère mes propos de tout à l’heure : les auditions ont montré que les architectes des Bâtiments de France étaient des experts. On peut ne pas être d’accord avec eux, mais ils ont une connaissance du patrimoine que nous n’avons pas ici, dans cet hémicycle. Par ailleurs, il s’agit de fonctionnaires : ils sont donc indépendants. C’est aussi en cela qu’ils sont importants. Ils doivent, selon moi, toujours être présents : ce sont eux qui font du patrimoine de la France ce qu’il est.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Je suis très satisfait de constater que nous avons eu aujourd’hui un débat apaisé sur la question des ABF et de l’avis conforme qu’ils rendent, ce qui n’a pas toujours été le cas par le passé.
M. Max Brisson. C’est trompeur !
M. Pierre Ouzoulias. Je me souviens aussi de discussions extrêmement houleuses sur la place de l’archéologie préventive. (Sourires.) J’ai le sentiment que la nécessité de préserver le patrimoine est enfin entrée dans les mœurs et fait à présent partie des politiques publiques défendues de façon consensuelle par l’État, les collectivités et les maires. C’est une très bonne chose.
Quoi qu’il en soit, il ne faut pas en rester là. Il importe de développer une réflexion plus générale afin de s’assurer que les outils de la protection sont bien adaptés à l’objectif qui est à présent devant nous. Qu’allons-nous faire de tout le petit patrimoine qui n’est pas classé ou inscrit, mais qui constitue très souvent l’identité propre de certains de nos villages ? Force est de constater qu’il ne bénéficie aujourd’hui d’aucune protection ou d’aucune aide de l’État.
Sans aller jusqu’à la décentralisation, qui irait sans doute trop loin d’autant que les collectivités ne veulent pas – je pense – d’une compétence supplémentaire, nous pourrions réfléchir à une meilleure interaction entre les départements pour les CAUE, les régions pour l’inventaire et les services de l’État en région, pour mieux coordonner l’activité afin qu’elle soit planifiée et réfléchie sur ces territoires qui ont tous une cohérence d’un point de vue patrimonial.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Laurent Lafon, président de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport. Je remercie tous ceux qui ont participé, certains de manière très active, à la mission d’information sur les ABF, qui a permis de déboucher sur ce texte. Je salue, en particulier, le travail de Pierre-Jean Verzelen, qui en a été le rapporteur. Il est également l’auteur de cette proposition de loi et son rapporteur pour notre assemblée.
Nous avons réussi à avancer collectivement sur un sujet qui ne faisait pas forcément consensus parmi nous. J’espère que nos efforts se traduiront dans quelques instants dans notre vote.
Ce texte comprend un certain nombre d’avancées intéressantes, qui ne sont pas forcément toutes de nature législative. En effet, j’ai noté avec beaucoup d’intérêt, par exemple, qu’au cours de la mission d’information, mais aussi après, s’était établi un dialogue entre, d’une part, Marie-Pierre Monier et Pierre-Jean Verzelen et, d’autre part, les ABF.
Ceux-ci ont bien sûr été auditionnés dans le cadre de la mission ; après la remise du rapport, le rapporteur et la présidente sont allés voir les ABF en formation. C’est un point important, car nous souhaitons aussi que le dialogue se fasse dès cette étape. Les ABF ont également souhaité entendre leurs propositions, sur lesquelles s’est instauré un véritable échange. C’est fondamental, d’autant que les discussions peuvent parfois s’avérer complexes dans certains endroits – cela n’est pas le cas dans ma propre ville où j’ai un dialogue riche et intéressant avec l’ABF.
La mise en place de ce dialogue va demander un peu de temps. Il faut l’instaurer dès la formation, et l’accompagner par la mise en place de bonnes pratiques et l’élaboration de certains documents. Ce texte s’inscrit pleinement dans cette démarche afin d’avoir un dialogue apaisé et plus constructif, dans le respect des spécificités et des savoir-faire de chacun.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, auteur de la proposition de loi et rapporteur.
M. Pierre-Jean Verzelen, auteur de la proposition de loi, rapporteur. Comme Marie-Pierre Monier, je remercie tous les élus qui ont participé à la mission d’information et aux travaux préparatoires sur ce texte, ainsi que les services de la commission.
La question de fond, et la pierre angulaire de cette proposition de loi, est de savoir comment faire vivre l’avis conforme.
Premièrement, nous avons permis aux communes, de manière extrêmement souple, ce qui a d’ailleurs été critiqué par certains, de redéfinir un périmètre afin que l’avis conforme s’applique sur un territoire accepté et compris par tous.
Deuxièmement, nous avons prévu la publication des avis des ABF dans un registre national accessible en ligne. Chacun pourra à présent connaître les avis rendus près de chez lui et s’en servir comme d’un élément de jurisprudence dans les dossiers qu’il défendra.
Troisièmement, nous mettons en place une commission départementale de conciliation pour remettre les élus autour de la table, sous l’autorité du préfet de département, afin que les ABF puissent justifier leurs choix et, le cas échéant, les revoir.
Mes chers collègues, tout cela, nous l’avons fait dans le cadre d’une niche transpartisane, en deux heures : ce n’est pas rien ! Je vous remercie donc de cette avancée, ainsi que de votre confiance. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Rachida Dati, ministre. Monsieur Ouzoulias, vous avez eu raison de dire que nous avons eu un débat apaisé, car nous partions de loin : souvent, les discussions parlementaires, notamment avec les élus locaux, se transforment en tribunaux contre les ABF.
J’avoue avec modestie avoir découvert ces questions en arrivant au ministère de la culture – je pense également au rôle de l’archéologie préventive et de l’archéologie aquatique.
Comme l’a souligné le président Lafon, nous avons eu un débat transpartisan, preuve qu’il s’agit d’un sujet qui nous rassemble. Nous avons en effet tous le même objectif, qui est de préserver, de restaurer, de réhabiliter et de pérenniser le patrimoine. Il s’agit d’une volonté collective et commune, qui ne fait pas débat.
Nous avons évidemment besoin de personnes pour nous aider à préserver et à restaurer notre patrimoine. Cela a été dit, les ABF nous incitent parfois à revoir notre conception et aident les porteurs de projets. Ils jouent donc un rôle de conseiller et veillent à préserver l’esthétique du patrimoine. Il est vrai que l’on ne peut détourner le regard de l’immeuble qui est devant nous : soit l’on vit dedans, soit l’on vit avec…
Nous allons bientôt avoir des débats sur le logement. Dans le cadre du projet Quartiers de demain, qui concerne les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), nous avons prévu le recours à un architecte, ce qui pendant longtemps n’a pas été le cas pour le parc social. Nous voyons d’ailleurs comment certains quartiers ont été construits…
Les avancées, évoquées par le rapporteur, ne sont pas seulement juridiques : nous avons également fait aujourd’hui des avancées culturelles sur les ABF, voire sur les archéologues. Il serait intéressant que nous puissions intégrer la protection patrimoniale dans notre réflexion sur le logement, ce serait aussi une grande avancée culturelle.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi, dont le Sénat a ainsi rédigé l’intitulé : proposition de loi relative à l’exercice des missions des architectes des Bâtiments de France.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. Je constate que ce texte a été adopté à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt et une heures quarante, sous la présidence de Mme Sylvie Robert.)