Sommaire

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

M. Guy Benarroche, M. Fabien Genet.

1. Procès-verbal

2. Souhaits de bienvenue au Président de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN

3. Souhaits de bienvenue à un nouveau sénateur

4. Questions d’actualité au Gouvernement

situation en ukraine et souveraineté stratégique de l’europe

M. Raphaël Daubet ; M. Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ; M. Raphaël Daubet.

guerre en ukraine et utilisation des avoirs gelés russes

M. Didier Marie ; M. Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ; M. Didier Marie.

situation en ukraine et économie de guerre

Mme Michelle Gréaume ; M. Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ; Mme Michelle Gréaume.

sécurisation des centres pénitentiaires pour narcotraficants

M. Olivier Bitz ; M. Gérald Darmanin, ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.

5. Salut aux auditeurs de l’Institut du Sénat

6. Questions d’actualité au Gouvernement (suite)

financement de l’effort de guerre et choix budgétaires

Mme Mélanie Vogel ; M. Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

financement des dépenses de défense

M. Jean-François Husson ; M. Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ; M. Jean-François Husson.

enseignement scolaire à wallis-et-futuna

M. Mikaele Kulimoetoke ; Mme Élisabeth Borne, ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

simplification des normes

M. Marc Laménie ; M. Laurent Marcangeli, ministre de l’action publique, de la fonction publique et de la simplification ; M. Marc Laménie.

situation des alaouites et des chrétiens en syrie

Mme Valérie Boyer ; M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux ; Mme Valérie Boyer.

situation des praticiens diplômés hors union européenne (i)

Mme Émilienne Poumirol ; M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

situation des praticiens diplômés hors union européenne (ii)

M. Jean Sol ; M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

situation en syrie

Mme Nathalie Goulet ; M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux ; Mme Nathalie Goulet.

financements publics des laboratoires départementaux d’analyse

M. Jean-Gérard Paumier ; Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire ; M. Jean-Gérard Paumier.

baisse du tarif de l’électricité photovoltaïque

M. Jean-Jacques Michau ; Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics ; M. Jean-Jacques Michau.

programme d’éducation à la vie affective et relationnelle et à la sexualité

Mme Sylviane Noël ; Mme Élisabeth Borne, ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

recrudescence de certains cancers chez les jeunes

Mme Annick Jacquemet ; M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins ; Mme Annick Jacquemet.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Anne Chain-Larché

7. Mises au point au sujet de votes

8. Conventions internationales. – Adoption en procédure d’examen simplifié de trois projets de loi dans les textes de la commission

Élargissement du champ d’action géographique de la Berd. – Adoption, en procédure accélérée, du projet de loi dans le texte de la commission.

Accord avec l’observatoire du réseau d’antennes d’un kilomètre carré. – Adoption, en procédure accélérée, du projet de loi dans le texte de la commission.

Traité de coopération dans le domaine de la défense avec l’Espagne. – Adoption définitive, en procédure accélérée, du projet de loi dans le texte de la commission.

9. Égalité des chances pour l’accès à certaines écoles de service public. – Adoption définitive en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Texte élaboré par la commission

Vote sur l’ensemble

M. Laurent Marcangeli, ministre de l’action publique, de la fonction publique et de la simplification

Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission des lois

Mme Patricia Schillinger

Mme Mireille Conte Jaubert

M. Paul Toussaint Parigi

Mme Cécile Cukierman

Mme Monique de Marco

Mme Audrey Linkenheld

M. Louis Vogel

Mme Muriel Jourda

Adoption définitive de la proposition de loi dans le texte de la commission.

10. Résilience des infrastructures critiques et renforcement de la cybersécurité. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Article 8

Amendement n° 98 du Gouvernement. – Adoption.

Amendements identiques nos 17 rectifié septies de Mme Catherine Morin-Desailly, 30 de Mme Audrey Linkenheld et 83 rectifié sexies de M. Yves Bleunven. – Rejet des trois amendements.

Amendements identiques nos 82 rectifié de Mme Michelle Gréaume et 114 de la commission

Amendement n° 50 rectifié de M. Akli Mellouli. – Rectification.

Amendements identiques nos 82 rectifié de Mme Michelle Gréaume, 114 de la commission et 50 rectifié bis de M. Akli Mellouli. – Adoption des trois amendements.

Adoption de l’article modifié.

Article 9

Amendement n° 99 du Gouvernement. – Adoption.

Amendements identiques nos 18 rectifié septies de Mme Catherine Morin-Desailly, 31 de Mme Audrey Linkenheld et 84 rectifié sexies de M. Yves Bleunven. – Rejet des amendements nos 18 rectifié septies et 31, l’amendement n° 84 rectifié sexies n’étant pas soutenu.

Amendement n° 115 de la commission. – Adoption.

Amendements identiques nos 51 rectifié de M. Akli Mellouli et 68 de Mme Michelle Gréaume. – Retrait de l’amendement n° 68, l’amendement n° 51 rectifié étant devenu sans objet.

Adoption de l’article modifié.

Article 10 – Adoption.

Après l’article 10

Amendement n° 56 rectifié de M. Pierre-Jean Verzelen. – Non soutenu.

Article 11 – Adoption.

Article 12

Amendement n° 22 rectifié septies de Mme Catherine Morin-Desailly et sous-amendement n° 125 du Gouvernement. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Amendement n° 59 rectifié de M. Olivier Cadic. – Retrait.

Adoption de l’article modifié.

Article 13

Amendement n° 16 rectifié septies de Mme Catherine Morin-Desailly. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 14

Amendement n° 47 de Mme Audrey Linkenheld. – Rejet.

Amendement n° 85 rectifié quater de M. Yves Bleunven. – Rejet.

Amendements identiques nos 24 rectifié de Mme Maryse Carrère et 69 de Mme Michelle Gréaume. – Retrait de l’amendement n° 24 rectifié ; rejet de l’amendement n° 69.

Amendement n° 37 de Mme Audrey Linkenheld. – Adoption.

Amendement n° 94 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 14

Amendement n° 67 de Mme Michelle Gréaume. – Rejet.

Article 15

Amendement n° 100 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 16

Amendement n° 66 de Mme Michelle Gréaume. – Rejet.

Adoption de l’article.

Après l’article 16

Amendement n° 1 rectifié quinquies de M. Olivier Cadic. – Adoption, par scrutin public n° 227, de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 17

Amendement n° 33 de Mme Audrey Linkenheld. – Rejet.

Amendement n° 101 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles 18 et 19 – Adoption.

Article 20

Amendement n° 40 de Mme Sylvie Robert. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 21

Amendement n° 41 de Mme Sylvie Robert. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles 22 à 24 – Adoption.

Après l’article 24

Amendement n° 60 rectifié de M. Olivier Cadic. – Rejet.

Article 25

Amendement n° 48 de Mme Audrey Linkenheld. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 26 A (nouveau) – Adoption.

Article 26

Amendement n° 102 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 27

Amendement n° 116 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 9 rectifié de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Rejet.

Amendement n° 86 rectifié quater de M. Yves Bleunven. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Article 28

Amendement n° 32 de Mme Audrey Linkenheld. – Rejet.

Amendement n° 10 rectifié de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Rejet.

Amendements identiques nos 2 rectifié de M. Bernard Fialaire, 5 de Mme Nicole Duranton, 52 rectifié de M. Akli Mellouli et 63 de Mme Michelle Gréaume. – Rejet des quatre amendements.

Amendement n° 20 rectifié sexies de Mme Catherine Morin-Desailly. – Retrait.

Rappel au règlement

M. Jacques Fernique

Article 28 (suite)

Adoption de l’article.

Article 29

Amendement n° 103 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 13 rectifié de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Devenu sans objet.

Amendement n° 28 de Mme Audrey Linkenheld. – Devenu sans objet.

Amendement n° 12 rectifié de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Retrait.

Adoption de l’article modifié.

Article 30

Amendement n° 29 de Mme Audrey Linkenheld. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 31

Amendement n° 104 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 117 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 89 rectifié quinquies de M. Yves Bleunven. – Retrait.

Amendement n° 23 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Amendement n° 61 rectifié de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Retrait.

Adoption de l’article modifié.

Article 32 (supprimé)

Articles 33 à 35 – Adoption.

Article 36

Amendement n° 58 rectifié de M. Olivier Cadic. – Retrait.

Amendement n° 105 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 37

Amendement n° 106 du Gouvernement. – Rejet.

Amendements identiques nos 21 rectifié nonies de Mme Catherine Morin-Desailly, 46 rectifié de Mme Hélène Conway-Mouret et 88 rectifié quinquies de M. Yves Bleunven. – Adoption des trois amendements.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 37

Amendement n° 118 de la commission. – Retrait.

Articles 38 et 39 – Adoption.

Après l’article 39

Amendements identiques nos 15 rectifié septies de Mme Catherine Morin-Desailly et 44 de M. Rémi Cardon. – Rejet des deux amendements.

Article 40 – Adoption.

Article 41

Amendement n° 110 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 42

Amendement n° 72 de Mme Michelle Gréaume. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 43 A (nouveau)

Amendement n° 123 du Gouvernement et sous-amendement n° 124 de M. Michel Canévet. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 43 A

Amendement n° 107 rectifié du Gouvernement. – Rejet.

Articles 43 à 45 – Adoption.

Après l’article 45

Amendement n° 119 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 111 rectifié du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Amendement n° 112 rectifié du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Articles 46 à 48 – Adoption.

Article 49

Amendement n° 120 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles 49 bis (nouveau), 50, 51 et 52 – Adoption.

Article 53 (supprimé)

Article 54 – Adoption.

Après l’article 54

Amendement n° 73 de Mme Michelle Gréaume. – Rejet.

Article 55 – Adoption.

Article 56

Amendement n° 121 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 57 – Adoption.

Après l’article 57

Amendement n° 74 rectifié de Mme Michelle Gréaume. – Rejet.

Article 58 – Adoption.

Après l’article 58

Amendement n° 14 rectifié de Mme Vanina Paoli-Gagin. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Articles 59 et 60 – Adoption.

Après l’article 60

Amendement n° 75 rectifié de Mme Michelle Gréaume. – Rejet.

Article 61 – Adoption.

Après l’article 61

Amendement n° 77 rectifié bis de Mme Michelle Gréaume. – Rejet.

Amendement n° 81 rectifié de Mme Michelle Gréaume. – Rejet.

Amendement n° 79 de Mme Michelle Gréaume. – Rejet.

Article 62 A (nouveau) – Adoption.

Article 62

Amendement n° 109 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 122 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Vote sur l’ensemble

Mme Catherine Morin-Desailly

M. Gérard Lahellec

Adoption du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Didier Mandelli

11. Trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux. – Discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale

M. Guislain Cambier, auteur de la proposition de loi

M. Jean-Baptiste Blanc, auteur de la proposition de loi

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur de la commission des affaires économiques

Mme Amel Gacquerre, rapporteure de la commission des affaires économiques

M. Daniel Gueret, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable

M. François Rebsamen, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation

M. Bernard Buis

M. Philippe Grosvalet

M. Franck Menonville

Mme Cécile Cukierman

M. Ronan Dantec

M. Christian Redon-Sarrazy

M. Joshua Hochart

M. Cédric Chevalier

Mme Dominique Estrosi Sassone

M. Yves Bleunven

M. Sébastien Fagnen

M. Jean-Claude Anglars

M. Jean-Raymond Hugonet

Clôture de la discussion générale.

Avant l’article 1er

Amendement n° 9 rectifié ter de Mme Anne-Sophie Romagny et sous-amendement n° 184 de M. Yves Bleunven. – Rejet du sous-amendement et de l’amendement.

Article 1er

M. Yannick Jadot

M. Laurent Duplomb

M. Jean-Pierre Corbisez

M. Grégory Blanc

M. Jean-Baptiste Blanc

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur

M. Laurent Somon

M. Ronan Dantec

M. Guislain Cambier

M. Cédric Chevalier

Amendement n° 11 de M. Sebastien Pla. – Retrait.

Amendements identiques nos 72 de M. Ronan Dantec et 174 de M. Simon Uzenat. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 136 rectifié du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 94 rectifié bis de M. Michel Canévet. – Rejet.

Amendement n° 185 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 157 rectifié de M. Yves Bleunven. – Retrait.

Amendement n° 163 de M. Christian Redon-Sarrazy. – Rejet.

Amendement n° 56 rectifié bis de M. Jean-Michel Arnaud. – Retrait.

Amendement n° 8 rectifié quater de Mme Anne-Sophie Romagny. – Retrait.

Amendement n° 25 rectifié de M. Éric Gold. – Retrait.

Amendements identiques nos 126 rectifié de Mme Cécile Cukierman et 166 de M. Christian Redon-Sarrazy. – Rejet des deux amendements.

Renvoi de la suite de la discussion.

12. Mises au point au sujet de votes

13. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

M. Guy Benarroche,

M. Fabien Genet.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Souhaits de bienvenue au Président de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, j’ai le plaisir de saluer la présence, dans la tribune d’honneur, du président de l’Assemblée parlementaire de l’Otan, M. Marcos Perestrello de Vasconcellos. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les ministres, se lèvent et applaudissent.) Il est accompagné par nos collègues Cédric Perrin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, et Christian Cambon, président de la délégation française à l’Assemblée parlementaire de l’Otan (AP-Otan).

En visite en France, M. Perestrello, après un échange à la présidence du Sénat, a été entendu ce matin par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, et rencontrera les membres de la délégation française à l’AP-Otan.

Dans un contexte international d’une exceptionnelle gravité, et face aux incertitudes pesant sur l’avenir du lien transatlantique, un forum tel que l’Assemblée parlementaire de l’Otan, qui offre aux parlementaires des 32 pays de l’Alliance un espace de réflexion sur les défis menaçant notre sécurité collective et les moyens d’y faire face, s’avère plus que jamais indispensable.

À ce titre, l’Assemblée parlementaire de l’Otan, dont nous célébrons cette année le soixante-dixième anniversaire, représente un outil précieux et efficace de la diplomatie parlementaire et met en exergue la spécificité de l’Alliance, fondée à la fois sur un dispositif et des moyens militaires, ainsi que sur un socle de valeurs centré sur la démocratie auquel le président Perestrello tient particulièrement. Nous avons pu aborder ces sujets ce matin lors d’une audience à la présidence du Sénat.

Mes chers collègues, en votre nom à tous, permettez-moi de souhaiter à M. Perestrello la plus cordiale bienvenue au Sénat de la République française. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mmes et MM. les ministres, applaudissent longuement.)

3

Souhaits de bienvenue à un nouveau sénateur

M. le président. Mes chers collègues, je tiens à saluer notre nouveau collègue, M. David Margueritte, qui remplace M. Philippe Bas, nommé au Conseil constitutionnel. Au nom du Sénat, je lui souhaite la bienvenue parmi nous. (Applaudissements.) Nous aurons l’occasion d’échanger entre Normands, mon cher collègue ! (Sourires.)

4

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun de vous, mes chers collègues, à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu’il s’agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.

situation en ukraine et souveraineté stratégique de l’europe

M. le président. La parole est à M. Raphaël Daubet, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Raphaël Daubet. Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, les États-Unis reviennent sur la suspension de leur aide à l’Ukraine. Un espoir fragile de cessez-le-feu avec la Russie se profile, mais rien n’est encore gagné.

On ignore ce que seront les contreparties auxquelles l’Ukraine devra consentir.

On ignore pour l’heure ce que sera la position de la Russie.

Cette séquence diplomatique, dont nous espérons qu’elle sera un premier pas vers une résolution du conflit, ne doit pas nous détourner de nos responsabilités. Pouvoir compter sur notre propre défense n’est pas une option, mais une nécessité.

Notre groupe sait clairement ce qu’il veut : une Europe forte, capable de défendre ses intérêts stratégiques propres. Une telle ambition européenne sera servie d’abord par une ambition nationale française et par un effort d’investissement d’ampleur. Nos entreprises de défense s’organisent ; c’est vrai, notamment, dans le département dont je suis élu, le Lot.

Monsieur le ministre, si vous souhaitez que les Français consentent un tel effort d’investissement, une transparence totale s’impose.

À l’évidence, si l’on ne veut pas augmenter la pression sur nos finances publiques, nos possibilités sont limitées. Mobiliser l’épargne des Français peut s’entendre, à condition que cela soit consenti.

Allez-vous créer un livret dédié au financement de notre défense ? Quand comptez-vous faire des annonces concrètes à cet égard ?

Laisser les Français dans l’incertitude, c’est faire le lit des opposants à cet objectif vital. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Olivier Cigolotti applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Éric Lombard, ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le sénateur Daubet, la question est sérieuse, et nous y travaillons très activement depuis que le Président de la République, dans son discours de la Sorbonne, a souhaité que l’Union européenne acquière son autonomie stratégique.

Un réveil est en train de se produire à la suite des événements tragiques qui se déroulent en Ukraine et qui nous obligent dorénavant à prendre en main notre destin, y compris en matière de défense.

Nous y travaillons à tous les niveaux.

Avec nos collègues de l’Union européenne, avec lesquels j’ai passé deux jours à Bruxelles, nous avons décidé à l’unanimité de mettre en œuvre un plan de soutien à notre industrie de défense.

En France, ce soutien est ancien. Le budget de la défense prévu dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM) est ambitieux et continuera à augmenter.

Vous posez la question des financements nouveaux, notamment privés. Nous allons en effet mobiliser l’épargne privée. Ainsi, le 20 mars prochain, mon collègue ministre des armées et moi-même réunirons à Bercy les investisseurs et les entreprises de la base industrielle et technologique de défense (BITD) afin de mobiliser l’épargne privée, dans l’objectif que celle-ci finance notre effort de défense, qui va s’accroître.

Je préfère réserver l’ensemble des annonces que nous nous apprêtons à faire pour cette journée du 20 mars. Pour autant, puisque vous m’avez posé une question précise, je vous répondrai que je ne suis pas certain qu’un livret dédié soit une solution.

Il existe d’ores et déjà, en effet, de nombreux outils d’épargne, qu’il s’agisse des fonds du livret A, gérés, comme vous le savez, par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), ou des fonds se trouvant sur l’ensemble des véhicules d’investissement gérés par les banques, les assureurs et les gestionnaires d’actifs. C’est surtout cette épargne que nous souhaitons mobiliser, afin que les Françaises et les Français participent à cet effort qui nous permettra d’assurer la sécurité de notre pays et de l’ensemble de l’Union européenne. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Raphaël Daubet, pour la réplique.

M. Raphaël Daubet. Je souhaitais simplement vous alerter, monsieur le ministre, sur la nécessité de la transparence et de la confiance, parce que nous avons besoin de l’engagement de tous pour atteindre cet objectif. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Marie-Claire Carrère-Gée applaudit également.)

guerre en ukraine et utilisation des avoirs gelés russes

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Didier Marie. Monsieur le ministre, après la tentative de racket sur les terres rares, l’humiliation du président Zelensky dans le Bureau ovale, la trahison de l’arrêt de l’aide militaire, l’Ukraine vit un nouveau revirement américain avec le rétablissement de l’aide et la proposition d’une trêve. Soit.

C’est une bonne nouvelle, mais comment l’Ukraine peut-elle avoir confiance dans l’administration Trump, dont la conception du droit consiste à ce que les règles ne s’appliquent que lorsqu’elles servent ses intérêts ?

Face à ces pressions et à cette instabilité, l’Ukraine a plus que jamais besoin du soutien politique, économique et militaire de l’Europe.

Certes, nous avons pris des mesures fortes : une aide financière supérieure à celle des États-Unis et l’utilisation des intérêts des avoirs russes gelés. Mais aujourd’hui, face à l’urgence et à l’incertitude, se pose la question de l’utilisation des 210 milliards d’euros d’avoirs gelés en Europe pour financer l’effort de défense ukrainien, pour prix de la résistance et d’une paix juste.

Certains, au sein du Gouvernement, émettent des réserves juridiques ou économiques sur cette saisie, quand d’autres s’appuient sur le droit coutumier international pour la justifier. Au-delà du débat juridique, quel est le plus grand risque ? L’utilisation de ces avoirs ou la déstabilisation de l’ensemble du continent européen ? Est-ce à l’agresseur ou aux citoyens européens de payer ?

Ma question est simple : le Gouvernement compte-t-il porter cette exigence de justice devant le prochain Conseil européen ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Éric Lombard, ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le sénateur Marie, vous posez une question grave. Je veux, tout d’abord, rappeler le soutien indéfectible de la France et de l’Union européenne à l’Ukraine dans cette période extrêmement difficile.

Avec mon collègue Jean-Noël Barrot, j’ai pu donner une nouvelle preuve de ce soutien en accueillant à Bercy, la semaine dernière, la Première vice-Première ministre ukrainienne, Ioulia Svyrydenko, et en annonçant l’ouverture d’un plan de soutien à hauteur de 200 millions d’euros supplémentaires.

Les fonds que vous évoquez, détenus par la Banque centrale de la Fédération de Russie, sont sous sanction de l’Union européenne et se trouvent sur le territoire européen. Le produit de ces fonds est utilisé pour soutenir l’Ukraine.

Nous maintiendrons ces fonds sous sanction aussi longtemps que nous serons dans cette situation tragique. Si nous agissions différemment, nous perdrions le produit desdits fonds, qui permet de soutenir l’Ukraine.

Par ailleurs, si ces fonds, qui appartiennent à un pays avec lequel nous ne sommes pas en guerre, venaient à être confisqués, nous courrions le risque d’une déstabilisation financière de nos marchés.

Nous sommes donc convaincus que la sanction dans la durée est la bonne solution et qu’elle nous permettra d’aborder, le moment venu, la question des accords de règlement. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour la réplique.

M. Didier Marie. Monsieur le ministre, les Ukrainiens attendent des gestes forts de la part de l’Europe et la Russie ne peut se prévaloir d’une règle de protection légale de ses actifs alors que M. Poutine piétine le droit international.

L’utilisation de ces fonds contribuerait à inverser le sentiment d’impunité de la Russie, et pourrait même être un élément de négociation. Permettez-moi de citer le Président de la République : « L’Europe doit retrouver le goût du risque, de l’ambition et de la puissance. » Passons des paroles aux actes ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Jacques Fernique applaudit également.)

situation en ukraine et économie de guerre

M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Mme Michelle Gréaume. Monsieur le ministre, mon groupe a toujours condamné, sans hésitation, l’agression odieuse de Vladimir Poutine contre l’Ukraine, la violation du droit international perpétrée par la Russie et les crimes de guerre commis par son armée. Nous appelons à une paix juste, garantissant la sécurité du pays agressé et écartant toute capitulation.

Depuis lundi, sous la pression d’un Trump pressé de mettre fin à ce conflit pour faire des affaires librement, des négociations ont commencé. Nous regrettons, comme beaucoup, que l’Europe subisse le tempo du président américain et n’ait pas été à l’initiative.

Nous sommes à un tournant, face à cet axe qui se met en place entre Trump et Poutine. Comment y répondre ? En accumulant les armes toujours plus, encore et encore ? En suivant Mme von der Leyen, qui affirme que « le temps est venu d’assurer la paix par la force » ? Qui peut croire que les peuples ont à gagner dans cette course folle aux armements ?

Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, en quoi le plan d’économie de guerre de 800 milliards d’euros présenté par Mme von der Leyen représente un gage de paix pour l’avenir ?

Le Président de la République indiquait, surjouant les menaces et les peurs : « Il faudra des réformes, des choix, du courage. »

Quels sacrifices entendez-vous vous demander aux Français ? Quelles coupes budgétaires envisagez-vous ? Confirmez-vous, par exemple, que la remise en cause de la retraite à 64 ans, dans ce contexte, ne serait plus à l’ordre du jour ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Éric Lombard, ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Madame la sénatrice Gréaume, l’Europe n’est pas aussi absente du débat que vous l’indiquez.

L’Histoire dira peut-être que l’origine du cessez-le-feu, lequel est en ce moment en discussion, était le déplacement effectué par le Président de la République, avec quelques ministres, à la Maison-Blanche il y a un peu plus de quinze jours. En effet, il avait alors proposé au président Trump un accord de cessez-le-feu soutenu par le président Zelensky et les différents dirigeants européens.

Ce projet, soutenu ensuite par les Britanniques et par l’ensemble de l’Union européenne, nous permettra, peut-être, d’aboutir au cessez-le-feu attendu.

L’effort de guerre, madame la sénatrice, est surtout un effort pour la paix. Dans un monde devenu plus dangereux, nous sommes convaincus que l’Europe doit se protéger. Cette protection doit être autonome, indépendante des États-Unis, et nécessitera de mobiliser des moyens nouveaux.

Compte tenu de notre situation budgétaire, ces moyens nouveaux ne peuvent être mis en œuvre que dans le cadre de la trajectoire de réduction de nos déficits que le Premier ministre et moi-même avons présentée.

Avec le ministre des armées, le Président de la République et le Premier ministre, je travaille pour définir précisément le quantum des investissements et des besoins nouveaux qui nous permettra de garantir la paix. Lorsque cette définition sera établie, nous vous les présenterons dans le cadre des prochaines lois de finances. Mais il est bien clair qu’ils ne devront se traduire ni par une dette supplémentaire ni, comme l’a dit le Premier ministre, par une dégradation de notre modèle social. C’est entre ces deux bornes que notre travail va se poursuivre. (M. Xavier Iacovelli applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour la réplique.

Mme Michelle Gréaume. Monsieur le ministre, votre démarche comporte deux contradictions fondamentales.

Tout d’abord, vous voulez exploser les compteurs des déficits publics pour un effort de guerre sans précédent représentant 3,5 % à 5 % de notre PIB, soit 30 milliards à 40 milliards d’euros de plus par an, alors que la question que nous devons nous poser est la suivante : de quelle sécurité collective devons-nous disposer en Europe pour éviter la guerre et pour consacrer les richesses au développement de l’humanité, et non pas à sa destruction ?

Ensuite, vous dénoncez la trahison de Trump. Mais, demain comme aujourd’hui, c’est l’Otan sous commandement américain que vous financerez et surarmerez toujours plus.

S’émanciper de Trump et des USA, c’est sortir, dans un premier temps, du commandement intégré de l’Otan ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – M. Jean-Jacques Panunzi applaudit également.)

sécurisation des centres pénitentiaires pour narcotraficants

M. le président. La parole est à M. Olivier Bitz, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Olivier Bitz. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.

Notre pays a aujourd’hui pris conscience de la menace que fait peser le narcotrafic sur sa sécurité intérieure. L’administration pénitentiaire a un rôle fondamental à jouer dans le combat engagé par l’État contre ce phénomène. L’objectif est clair : empêcher les détenus, qu’ils soient prévenus ou condamnés, de poursuivre leurs activités criminelles depuis leur cellule.

La désignation des deux premiers établissements pénitentiaires de haute sécurité marque votre volonté d’agir, monsieur le ministre d’État, et d’agir vite. Le choix de Condé-sur-Sarthe, dans l’Orne, après celui de Vendin-le-Vieil, dans le Pas-de-Calais, traduit une véritable reconnaissance du professionnalisme de ses agents pour la prise en charge des détenus les plus dangereux.

Cependant, et c’est aussi le cas pour Vendin-le-Vieil, votre décision nécessitera des moyens complémentaires, au sein de l’établissement comme à l’extérieur.

Au sein de l’établissement, la nécessité de renforcer les effectifs est une évidence. Surveillants sur la coursive, équipe locale de sécurité pénitentiaire ou encore renseignement : il nous faut trouver les moyens pour attirer des profils expérimentés, sans évidemment déshabiller le centre de détention d’Argentan, situé à quarante kilomètres, et déjà en manque de personnel.

À l’extérieur de l’établissement, quel sera l’impact du choix de Condé-sur-Sarthe sur l’activité du tribunal judiciaire d’Alençon et, surtout, sur les forces de sécurité intérieure ?

La question du prêt de main-forte par la police ou la gendarmerie pour les extractions que nous n’aurons pas réussi à éviter, celle de la protection des agents pénitentiaires et de leurs familles contre les risques de pression, ou encore celle de la lutte contre les activités illicites qui auraient été attirées par la présence à Condé-sur-Sarthe de ces détenus hors norme, ne sauraient être traitées à moyens constants, c’est-à-dire avec ceux qui sont présents dans un département rural comme l’Orne.

Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous rassurer les Ornais sur le nécessaire renforcement des moyens de l’État pour assurer la réussite du projet de prison « anti-narcos » à Condé-sur-Sarthe, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’établissement ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Gérald Darmanin, ministre dÉtat, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur Bitz, permettez-moi tout d’abord de vous remercier d’avoir accompagné ce projet. Nous avons visité ensemble la prison de Condé-sur-Sarthe et avons convenu, avec les personnels de l’administration pénitentiaire, que cet établissement pourrait accueillir assez rapidement, soit le 15 octobre prochain, les cent plus gros narcotrafiquants ; celui de Vendin-le-Vieil sera prêt à faire de même le 31 juillet. Ce sont donc, au total, deux cents narcotrafiquants qui seront isolés au sein du territoire national.

Nous avons décidé, avec les magistrats chargés de cette affaire, d’envoyer M. Mohamed Amra à Condé-sur-Sarthe, alors qu’il est en détention provisoire, précisément parce qu’il s’agit d’un établissement de haute sécurité.

Vous l’aurez compris, l’une des originalités du dispositif mis en place par le Gouvernement dans ce type d’établissement consiste à ne plus faire de distinction entre les prévenus et les condamnés pour peine, mais à examiner la dangerosité des personnes. Cela soulagera, par ailleurs, une grande partie des maisons d’arrêt que vous avez évoquées et qui connaissent une situation de surpopulation carcérale.

Des moyens supplémentaires, il en faut en effet, et beaucoup.

Il en faut à l’intérieur de la prison. Première nouveauté : les agents habilités devront toujours être deux pour accompagner un détenu afin d’éviter les risques de corruption et de menaces.

Il faut aussi des moyens budgétaires à hauteur de 5 millions d’euros par prison, pris sous le plafond des crédits du ministère de la justice sans demande budgétaire supplémentaire, pour faire des travaux très importants dans les domaines suivants : ondes millimétriques, caillebottis aux fenêtres, lutte anti-drone et mesures contre la communication quelle qu’elle soit.

Le régime de détention que je propose en ce moment au Parlement, avec le soutien du Gouvernement et celui – je l’espère – du Conseil d’État, dont l’avis définitif devrait être rendu très bientôt, permettra de limiter les mouvements, et notamment les extractions judiciaires. Nous prévoyons en effet, à la demande du Premier ministre, d’installer la visio à 100 % dans ces établissements.

Je souhaite que tous les parlementaires votent ce texte, à l’Assemblée nationale comme au Sénat. J’ai malheureusement constaté que le groupe socialiste et le groupe écologiste n’avaient pas voté favorablement en commission des lois… J’espère qu’ils le feront la semaine prochaine, pour le bien de l’administration pénitentiaire. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)

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Salut aux auditeurs de l’Institut du Sénat

M. le président. Je suis heureux de saluer la présence dans nos tribunes des auditrices et des auditeurs de la huitième promotion de l’Institut du Sénat. (Mmes et MM. les sénateurs applaudissent.)

Sur l’initiative de notre ancien collègue Jean-Léonce Dupont, le bureau du Sénat avait décidé en 2015 de mettre en œuvre ce programme de formation, en vue de mieux faire connaître les modalités de fonctionnement et les enjeux de notre démocratie parlementaire à des personnalités d’horizons géographiques et professionnels très divers. Les vingt auditeurs de cette huitième promotion, issus de sept départements et de huit entités nationales, représentent en effet les sphères d’activité professionnelle publique, économique, éducative, scientifique ou encore associative.

Tout au long de leurs travaux, qui ont commencé ce matin et s’achèveront à la fin du mois de juin, ils rencontreront plusieurs de nos collègues sénateurs et des fonctionnaires du Sénat.

En votre nom à tous, je leur souhaite une excellente session au Sénat et je suis certain que, à l’issue de ces quatre mois, ils pourront être les témoins privilégiés de notre activité parlementaire. (Applaudissements.)

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Questions d’actualité au Gouvernement (suite)

financement de l’effort de guerre et choix budgétaires

M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Mélanie Vogel. Monsieur le ministre, notre devoir, depuis le 24 février 2022, est de rendre certain l’échec de l’agression russe en Ukraine. Et depuis que les Américains ont élu un impérialiste autoritaire totalement erratique, aux mains d’un autocrate impérialiste froidement calculateur, notre devoir est d’être en mesure, en tant qu’Européens, d’assurer notre sécurité et de défendre nos valeurs de manière autonome aujourd’hui et demain.

Or, depuis la semaine dernière, on entend que les nécessaires investissements dans la défense se feront sans taxer les riches, c’est-à-dire sur le dos du climat, des services publics, du vélo et même des retraites. C’est terriblement dangereux et complètement idiot !

En 2024, nous avons donné 19 milliards d’euros à l’Ukraine au niveau européen, mais aussi 22 milliards d’euros à la Russie en échange de ses énergies fossiles. La France est le premier importateur de gaz naturel liquéfié (GNL) russe. Notre inaction climatique finance directement l’agression poutinienne contre nous !

La réalité, c’est que la transition énergétique n’est pas en concurrence avec la défense : elle fait partie intégrante de notre arsenal pour battre Poutine.

C’est la même chose pour la justice sociale. Quand la classe moyenne paie proportionnellement plus d’impôts que les plus riches, quand 210 milliards d’euros d’avoirs russes se trouvent en Europe, quand la taxe Zucman permettrait, en ciblant 1 800 ultrariches, de lever 20 milliards d’euros d’impôts, on ne peut pas demander aux Français de payer des chars avec leurs services publics et leurs pensions de retraite, tandis que des super-riches achètent des yachts grâce aux impôts qu’ils ne paient pas… C’est impossible !

En faisant cela, vous minerez l’indispensable soutien citoyen à l’effort de guerre et vous jetterez des électeurs par centaines de milliers dans les bras de ceux qui préfèrent se soumettre à Poutine.

Avez-vous vraiment davantage peur de taxer les riches que de laisser Poutine gagner ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Éric Lombard, ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Madame la sénatrice Vogel, nous, les Français, les Européens, sommes derrière l’Ukraine depuis trois ans, également – passée une parenthèse de quelques jours – avec les Américains. En effet, si je comprends bien ce qui s’est passé, le soutien américain a repris et devrait durer jusqu’au cessez-le-feu et au rétablissement d’une paix durable, qui est notre priorité.

Ensuite s’ouvre une nouvelle phase consistant à assurer la défense de l’Union européenne et de la France dans cet environnement nouveau qui exige, plus que jamais, la concorde et la participation de toutes et de tous.

C’est pourquoi, sous la conduite du Premier ministre, nous veillerons dans le cadre des prochaines lois de finances et lors de l’exécution du budget pour cette année, à pouvoir financer un effort accru, en faisant participer l’ensemble des Françaises et des Français dans le respect de notre modèle, notamment social, et de la transformation écologique, qui reste l’une de nos priorités. (M. Yannick Jadot sexclame.) Si l’effort de défense prend aujourd’hui plus d’importance, c’est, hélas ! parce que la dureté des temps le commande ; nous travaillons avec nos collègues européens afin de préciser son montant.

Comme je l’ai rappelé à mes collègues européens à Bruxelles, durant deux jours, cet effort de défense qui sera consenti par tous les Français et par tous les Européens doit aussi permettre de consolider notre industrie et de soutenir le rapatriement des filières industrielles en France et en Europe. En effet, l’industrie est, à la fois, un facteur de transformation écologique…

M. Yannick Jadot. Avec le GNL russe !

M. Éric Lombard, ministre. … et de création d’emplois durables, et un outil d’autonomie. On le sait, ceux de nos voisins européens qui ont acheté des armes aux États-Unis se trouvent vis-à-vis de ce pays dans une situation de dépendance à laquelle nous devons nous soustraire.

financement des dépenses de défense

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. Jean-François Husson. Monsieur le ministre, sous nos yeux, l’ordonnancement du monde est bouleversé et notre sécurité remise en question. Dans ce contexte inédit depuis plusieurs décennies, il nous faut plus que jamais nous adapter et prendre des décisions à la fois fermes et fortes.

Le Président de la République et le Gouvernement ont fixé un objectif nouveau, auquel je souscris, de hausse de notre effort militaire au-delà de la trajectoire de la loi de programmation militaire.

Cet effort pèsera sur le budget de l’État pour l’achat des matériels et des équipements militaires. Il nécessitera un financement privé spécifique de nos entreprises pour leur permettre d’adapter leurs capacités de production.

Cet effort se ferait sans augmentation d’impôts, sans toucher à nos dépenses sociales et – vous venez de le dire – sans augmenter notre dette.

Pouvez-vous nous dire quelles seront les sources et les modalités de financement de cet effort de défense tout à fait inédit ? À quelle hauteur nouvelle se situera-t-il dès 2025 et pour 2026 ?

Pouvez-vous nous confirmer que le Parlement débattra bientôt de ces questions, car celles-ci concernent en effet, au premier chef, notre communauté nationale, au travers – je l’imagine – d’un projet de loi de finances rectificative d’ici à l’été prochain, si nous voulons tenir les engagements pris par le Président de la République lors de son allocution télévisée de la semaine dernière ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

M. Éric Lombard, ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le rapporteur général, cher Jean-François Husson, nous devons en effet relever un défi de grande importance.

Nous devrons d’abord traiter la question à l’échelon européen. Le sommet des ministres des finances de l’Union a été consacré, pendant deux jours, à l’investissement futur dans une industrie de défense européenne. Ensuite, il faudra naturellement relever ce défi à l’échelon français.

En réalité, la difficulté de l’exercice budgétaire, que vous connaissez mieux que personne, sera accrue par l’effort à faire. Monsieur le rapporteur général, vous connaissez la trajectoire de nos finances publiques (M. Jean-François Husson fait le signe quelles baissent.) et les chiffres par cœur.

Le déficit budgétaire de l’année 2024 s’est établi à 6 % du PIB – nous attendons le chiffre définitif d’un jour à l’autre. Nous sommes très attachés à l’engagement que nous avons pris vis-à-vis des Français, mais aussi de l’Union européenne de le descendre à 5,4 % l’année prochaine et d’atteindre 3 % en 2029.

L’effort demandé est de l’ordre de 40 milliards d’euros par an, à partager entre les dépenses et les recettes.

M. Éric Lombard, ministre. Il faudra l’accroître pour financer l’effort de défense dès cette année, parce que nous participerons sans doute au maintien du cessez-le-feu en Ukraine, et parce que nous accélérerons dès cette année nos efforts en matière d’armement.

Cela demande un changement des trajectoires et de nos habitudes. À ce stade, avec la ministre chargée des comptes publics, Amélie de Montchalin, je prends devant vous l’engagement de faire un effort de méthode. Chaque mois, au travers des rendez-vous que nous avons annoncés, nous dialoguerons avec vous pour préparer de manière collégiale et transparente l’effort nécessaire de la Nation pour inverser notre trajectoire budgétaire, qu’il faudra accroître pour porter notre effort de défense. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour la réplique.

M. Jean-François Husson. Monsieur le ministre, au regard de la gravité de la situation internationale, je crains qu’il ne faille de nouveau changer de braquet.

La gravité de la situation géopolitique impose d’aller beaucoup plus vite. Nous devons rapidement débattre au Parlement pour déterminer la trajectoire, sans bis repetita des augmentations de fiscalité presse-bouton, sur lesquelles vous vous êtes engagés à ne pas revenir.

Je le répète : pas de dette, pas d’impôts, pas de remise en cause des dépenses sociales ? C’est intenable ! Nous devons la vérité aux Français. Nous devons avoir le courage de réformer.

M. Michel Savin. Un peu de courage !

M. Jean-François Husson. En cela, je soutiens la proposition du Président de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

enseignement scolaire à wallis-et-futuna

M. le président. La parole est à M. Mikaele Kulimoetoke, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Mikaele Kulimoetoke. Ma question s’adresse à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Madame la ministre, c’est la deuxième fois que j’interviens sur le dossier de l’enseignement primaire à Wallis-et-Futuna. Je remercie l’État d’avoir enfin pris l’engagement, cinquante-cinq ans plus tard, d’intégrer le personnel enseignant et non enseignant dans la fonction publique d’État.

Cette démarche est conforme aux dispositions de la loi du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d’outre-mer, qui y a aussi institué l’école publique tant au primaire qu’au secondaire, tout en garantissant le respect de nos spécificités locales.

Le rapport de l’inspection générale de l’administration a été rendu. Sous le pilotage du préfet et de la vice-rectrice, les groupes de travail ont réuni tous les acteurs locaux : les élus, les représentants des chefferies coutumières, la mission catholique, les syndicats et les parents d’élèves. Ainsi, le consensus recherché par le Gouvernement a été trouvé.

Madame la ministre, je vous remercie d’avoir été particulièrement attentive à ce dossier, ce qui a permis la tenue de la réunion interministérielle définitive le vendredi 7 mars dernier.

Pouvez-vous préciser quel véhicule législatif le Gouvernement privilégiera pour rendre à l’État sa compétence, comme notre loi statutaire le prévoit, et pour garantir la mise en place concrète du statut de l’enseignement primaire à Wallis-et-Futuna, avant l’été 2025 ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat, ministre de léducation nationale, de lenseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur Mikaele Kulimoetoke, je vous remercie de votre question et d’avoir souligné que nous avons pris ce dossier à bras-le-corps depuis mon arrivée au ministère.

Oui, l’État va tenir sa parole en ce qui concerne le statut des enseignants du premier degré à Wallis-et-Futuna. Le protocole signé en juillet 2023 est à cet égard fondamental. L’évolution du statut des enseignants doit permettre d’assurer l’égalité territoriale et également être un levier pour la réussite des élèves.

M. Jacques Grosperrin. Tout comme en métropole !

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat. J’y suis attachée, comme l’ensemble des acteurs du territoire.

À la suite de ce protocole, vous l’avez rappelé, une mission interministérielle a rendu ses conclusions, qui prévoient des mesures tant législatives que réglementaires.

J’ai l’ambition que ce travail se concrétise rapidement. Il a donc été fait le choix d’un projet de loi d’habilitation à légiférer par ordonnance, suivant l’option privilégiée par les élus de Wallis-et-Futuna et également recommandée par la mission interministérielle.

Le texte, déjà prêt, va être transmis au Conseil d’État. Nous envisageons de fixer son examen lors de la semaine du 12 mai à l’Assemblée nationale, et de celle du 2 juin au Sénat.

Comme l’État s’était engagé à être prêt pour la rentrée du 17 février dernier, une mesure compensatoire sera mise en place pour la période allant de cette date à l’entrée en vigueur effective de la réforme, afin qu’aucun enseignant ne soit lésé par ce décalage.

Monsieur le sénateur, vous l’avez dit et j’y tiens également, cette réforme doit être menée au bénéfice des élèves wallisiens et de leur réussite, car tous les élèves de France doivent bénéficier de l’ambition éducative du Gouvernement.

La réforme sera bientôt entre les mains du Parlement. Je sais pouvoir compter sur votre mobilisation lors de son prochain examen au Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

simplification des normes

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.)

M. Marc Laménie. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’action publique, de la fonction publique et de la simplification.

Pour l’organisation des jeux Olympiques, la reconstruction de Notre-Dame et maintenant celle de Mayotte, à chaque fois, le Gouvernement a fait voter au Parlement un texte d’exception.

En France, en 2025, dès que l’État veut entreprendre un projet, il est obligé de s’autoriser lui-même par la loi à déroger aux lourdeurs administratives qu’il impose aux citoyens et aux acteurs économiques que sont les entreprises, les agriculteurs et les indépendants.

Une autre solution serait d’alléger cette lourdeur administrative pour tout le monde, en réduisant radicalement ces normes, puisque l’État peut s’en passer.

Le président Olivier Rietmann, sénateur de Haute-Saône, nous alertait déjà sur ce sujet en 2023. Plus récemment, dans les Ardennes, le maire de Charleville-Mézières Boris Ravignon a rendu avec passion deux rapports de grande qualité sur la simplification.

La moitié des entreprises qui auraient pu bénéficier d’aides publiques disent avoir été contraintes de renoncer aux démarches en raison de leur complexité. Le Gouvernement estime que le coût macroéconomique de la réglementation pesant sur les entreprises est d’au moins 3 % du PIB, soit 60 milliards d’euros par an et plus que le budget du ministère de la défense.

Un premier projet de loi de simplification de la vie économique a été présenté par un gouvernement précédent au mois d’avril 2024. La Haute Assemblée l’a examiné en responsabilité, et il sera prochainement examiné par l’Assemblée nationale.

Monsieur le ministre, ma question est simple : quel est le programme de travail en matière de simplification administrative ? Présenterez-vous d’autres projets de loi de simplification ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Évelyne Perrot, MM. Olivier Cadic et Vincent Capo-Canellas applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’action publique, de la fonction publique et de la simplification.

M. Laurent Marcangeli, ministre de laction publique, de la fonction publique et de la simplification. Monsieur le sénateur Laménie, nous ne nous arrêterons pas au projet de loi de simplification de la vie économique qui sera examiné à partir de la fin du mois à l’Assemblée nationale.

Le Premier ministre l’a annoncé dans sa déclaration de politique générale, il a perçu, notamment lorsqu’il était haut-commissaire au plan, le poids de normes parfois mal fagotées, si vous me passez l’expression, qui empêchent les entreprises et nos concitoyens de vivre correctement leurs rapports avec nos administrations.

En tant que ministre chargé de la simplification, je ferai dans les semaines à venir un certain nombre de propositions qui viendront s’ajouter au projet de loi de simplification de la vie économique que le Sénat a adopté l’année dernière.

J’essaierai d’adopter une nouvelle méthode. M. le Premier ministre l’a déjà indiqué, il faudra peut-être inverser les charges, et voir ce que l’administration peut faire à la place de nos concitoyens dans le cadre des démarches administratives qu’ils réalisent.

Ensuite, je compte sur l’ensemble des bonnes volontés au Parlement pour pouvoir appuyer des propositions d’initiative parlementaire visant à simplifier la vie de nos concitoyens. Sans vouloir pousser à un concours Lépine, le Gouvernement est prêt à travailler avec le Parlement sur des textes courts, précis, qui parlent aux Français et qui seraient de nature à régler un certain nombre de problèmes rencontrés par les entreprises, les collectivités ou le monde associatif. Nous le savons, il y a beaucoup à faire.

Enfin, l’ensemble des ministres concernés sont aussi prêts à agir pour prendre le chemin de la simplification et répondre à une préoccupation majeure de nos concitoyens.

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question. Le Gouvernement prendra ce chemin et nous avons besoin du travail des parlementaires pour nous accompagner. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Henri Cabanel applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour la réplique.

M. Marc Laménie. Monsieur le ministre, nous vous entendons et nous vous soutiendrons.

Depuis 2002, les codes du travail, de commerce, de l’environnement et de la consommation ont vu leur nombre de pages largement multiplié, par 2,5, par 3,5, voire par 7. Il est urgent d’agir ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

situation des alaouites et des chrétiens en syrie

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Valérie Boyer. Monsieur le ministre, dès 2011, au moment du Printemps arabe, un slogan aux relents génocidaires était poussé par les Frères musulmans en Syrie : « L’Alaouite au tombeau, le Chrétien à Beyrouth. »

Malheureusement, l’Histoire bégaie encore une fois, que ce soit pour les Chrétiens et Yézidis massacrés en Irak et en Syrie par Daesh, les Kurdes par la Turquie, les Juifs par le Hamas, les Arméniens d’Artsakh par l’Azerbaïdjan, les Européens par le totalitarisme islamique et les vagues d’attentats, et désormais, encore, les minorités en Syrie.

En effet, le massacre, ces derniers jours, de milliers de civils, d’hommes, de femmes, chrétiens et alaouites, par des islamistes de toutes origines, nous le démontre de nouveau.

Pourtant, lorsque ces derniers prirent le pouvoir en décembre dernier, leur chef Jolani prétendait que tous les Syriens étaient frères. Dès lors, la communauté internationale réunie sous l’égide du président Macron se précipitait pour soutenir la transition politique en Syrie.

En effet, Jolani, pour reprendre la formule de Gilles Kepel, « djihadiste relooké par les mediatrainers turco-qatari » (M. Yannick Jadot sexclame.), n’était plus considéré comme un sanguinaire, mais comme un combattant de la liberté, puisqu’il portait une cravate et une barbe bien taillée.

Pourtant, ce loup islamiste déguisé en agneau démocrate a refusé de serrer la main d’une femme, la ministre allemande en visite en Syrie avec notre ministre M. Barrot.

Mme Cécile Cukierman. C’est vrai !

Mme Valérie Boyer. Dès 2014, j’avais déjà alerté, aux côtés de François Fillon (Protestations sur des travées des groupes SER et GEST.), sur la disparition de ces populations autochtones devenues minoritaires, victimes de ces crimes contre l’humanité et de génocide, notamment depuis 1915.

M. Yannick Jadot. Avec Bachar, c’était mieux ?

Mme Valérie Boyer. Comme en Irak ou en Artsakh, la France assiste encore impuissante à une épuration ethnique, revendiquée par les Frères musulmans. Ne laissons pas la France faillir à son devoir historique et moral de protection des minorités !

Aussi, monsieur le ministre, alors que l’Union européenne s’est précipitée pour rencontrer Jolani, que compte faire la France pour que les pays européens parlent d’une même voix et agissent enfin pour protéger ces minorités persécutées en voie d’extinction ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie d’excuser l’absence de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, qui se rend à la réunion du G7 au Canada.

Nous avons toutes et tous été choqués par les images insoutenables des exactions perpétrées ces derniers jours en Syrie. Il s’agit de crimes inacceptables que nous condamnons avec la plus grande fermeté.

Tous leurs auteurs devront être jugés et punis. Il n’y aura pas de justice sans que toute la lumière soit faite sur les événements tragiques qui ont eu lieu.

Nous n’avons jamais eu ni naïveté ni complaisance à l’égard du nouveau pouvoir syrien. Nous avons exprimé auprès du ministre des affaires étrangères des autorités intérimaires syriennes, M. Chibani, notre indignation collective et l’exigence de protéger toutes les populations, à quelque communauté qu’elles appartiennent. (Mme Cécile Cukierman proteste.)

Nous condamnons également les tentatives de déstabilisation de la Syrie par des groupes proches du régime d’Assad, peut-être appuyés par des ingérences étrangères qui ont lancé ce bain de sang.

Nous prenons note de l’annonce par les autorités intérimaires syriennes de la mise en place d’une commission d’enquête et d’un comité de la préservation de la paix civile. (Mme Cécile Cukierman sexclame.)

Alaouites, Chrétiens, Kurdes, Druzes, Sunnites, toutes les composantes du pluralisme syrien doivent trouver leur place et être traitées à égalité dans la nouvelle Syrie. L’accord politique conclu lundi entre les nouvelles autorités syriennes et nos partenaires kurdes des Forces démocratiques syriennes est un signe positif. La lutte contre le terrorisme islamiste et l’extrémisme doit aussi se poursuivre.

À Paris, le 13 février dernier, la communauté internationale a exprimé conjointement ces principes et ces attentes, qui ont été entendues et endossées par les autorités syriennes. Il s’agit maintenant, si l’on veut éviter que la Syrie ne retombe dans l’horreur et la guerre civile de les mettre en œuvre sans délai.

M. le président. Il faut conclure !

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué. La France ne ménagera aucun effort dans cette perspective. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour la réplique.

Mme Valérie Boyer. Monsieur le ministre, comment faire confiance à Jolani ? Comment éviter la solution finale, l’extermination totale de ces minorités aujourd’hui en danger de mort ? Ne soyons pas de nouveau les témoins silencieux de ce massacre annoncé.

Mme Cécile Cukierman. Elle a raison !

Mme Valérie Boyer. Permettez-moi de citer l’Évangile selon Saint-Luc : « S’ils se taisent, les pierres crieront. » (Vives protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.) Mais il sera peut-être trop tard demain pour que la langue du Christ soit encore parlée par les Araméens, qui sont en voie d’extermination. (Mêmes mouvements.)

M. le président. Il faut conclure !

Mme Valérie Boyer. Monsieur le ministre, il ne faut pas les abandonner. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur des travées des groupes SER et GEST.)

M. Yannick Jadot. Et la laïcité ?

situation des praticiens diplômés hors union européenne (i)

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Émilienne Poumirol. Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur la situation des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue). Depuis mercredi dernier, 300 d’entre eux ont entamé une grève de la faim pour alerter sur la précarité dans laquelle ils sont placés.

En effet, alors que, selon les mots du Président de la République lui-même, « ils tiennent […] à bout de bras nos services de soins », nombre d’entre eux travaillent aujourd’hui dans des établissements de santé publics sans bénéficier d’une autorisation de plein exercice.

À plusieurs titres, ces médecins sont placés dans une situation précaire. Une précarité financière d’abord : alors qu’ils occupent des fonctions de senior, ils exercent sous le statut d’interne, et la rémunération de nombre d’entre eux dépasse à peine le Smic.

Pour certains s’ajoute une précarité administrative, puisqu’ils sont astreints à renouveler chaque année, voire tous les six ou trois mois, leur autorisation de séjour.

Enfin, pour obtenir l’autorisation de plein exercice et être inscrits au tableau de l’ordre des médecins, les Padhue doivent valider des épreuves de vérification des connaissances (EVC) particulièrement sélectives, puis effectuer un parcours de consolidation de deux ans.

Les résultats de la session 2024 des EVC, parus le 31 janvier dernier, ont suscité une forte colère. Seulement un peu plus de 3 000 postes ont été pourvus, alors que 4 000 étaient ouverts par décret. Alors que les fédérations de Padhue dénoncent des critères d’admission opaques et arbitraires, on promet pour toute réponse une réforme du concours, que ces praticiens devront repasser une énième fois.

Monsieur le ministre, vous avez rencontré les Padhue en décembre dernier et vous avez noté leur importance pour notre système de soins, ainsi que les conditions difficiles dans lesquelles ils exercent.

Quand allez-vous enfin proposer des mesures concrètes et pérennes pour favoriser la régularisation médicale et administrative de ces médecins ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Madame la sénatrice Poumirol, je vous remercie de poser la question de la situation des Padhue, que nous devons en effet gérer avec rigueur, mais aussi avec humanité.

Il faut reconnaître que, dans bon nombre de nos hôpitaux, de 30 % à 40 % du personnel hospitalier est constitué de praticiens diplômés en dehors de l’Union européenne.

Vous évoquez les 4 000 postes ouverts au concours de 2024. Je me permets de vous préciser que 1 700 postes supplémentaires ont été ouverts depuis l’année précédente, soit une augmentation de 46 %.

La situation n’est pas satisfaisante pour autant. Nous avons produit une autorisation d’exercice provisoire, chaque candidat Padhue se voyant attribuer un poste de praticien hospitalier contractuel transitoire.

Catherine Vautrin et moi-même sommes pleinement mobilisés sur ce sujet. Vous l’avez rappelé, j’ai rencontré l’ensemble des syndicats de Padhue.

Sur la demande du Premier ministre, dans un souci de simplification, je proposerai très prochainement par voie réglementaire d’améliorer la voie interne, en associant les chefs de service, les présidents de commission médicale d’établissement (CME) et les doyens à la validation des acquis sur le terrain de stage, comme nous le faisons actuellement pour les internes.

Dès que nous aurons la possibilité de légiférer, je vous proposerai également de transformer le concours en examen, afin de permettre à l’ensemble des Padhue ayant réussi leurs évaluations de connaissances d’exercer. Je vous promets ce texte pour 2026, dès que nous aurons pu délibérer.

M. le président. Il faut conclure !

M. Yannick Neuder, ministre. Nous avons besoin du Parlement pour avancer sur ces sujets.

situation des praticiens diplômés hors union européenne (ii)

M. le président. La parole est à M. Jean Sol, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean Sol. Depuis plusieurs années, les praticiens à diplôme hors Union européenne jouent un rôle essentiel dans le fonctionnement de notre système de santé.

Nombreux dans les hôpitaux publics, ils pallient souvent le manque de médecins, notamment dans les spécialités et les territoires en tension.

Pourtant, leur situation administrative reste précaire, marquée par des procédures de régularisation longues et complexes ainsi que par une reconnaissance professionnelle inégale sur tout le territoire national.

Depuis la publication des résultats des épreuves de vérification des connaissances, ils dénoncent par la voix de leurs syndicats une sélection qu’ils jugent inéquitable et incohérente.

D’une part, le nombre de postes finalement pourvus est inférieur à celui qui était initialement ouvert.

Certaines filières, pourtant en tension, sont particulièrement touchées : en médecine générale par exemple, 563 candidats ont été admis sur 826 postes ouverts ; et alors que la santé mentale est une priorité nationale, seuls 39 praticiens ont été admis sur 263 postes.

D’autre part, les critères d’admissibilité semblent avoir varié selon les spécialités au gré des jurys. Certains candidats n’ont pas été admis avec une note supérieure à 10, tandis que d’autres, avec une note inférieure, l’ont été dans des filières différentes.

Cette situation singulière est d’autant plus incompréhensible que ces médecins exercent dans nos hôpitaux depuis des années dans des conditions salariales souvent précaires, alors même qu’ils pallient la pénurie médicale qui frappe notre pays.

Le Président de la République s’était engagé à régulariser ces professionnels en exercice. Pourtant, aujourd’hui, ces praticiens se sentent abandonnés face à cette situation qui compromet non seulement leur avenir professionnel et celui de leurs familles, mais aussi la qualité et la continuité des soins prodigués aux patients.

Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour répondre à la colère et au sentiment d’injustice exprimés par ces praticiens essentiels au fonctionnement de notre système de santé ? (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, SER, GEST et CRCE-K.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Monsieur le sénateur Sol, en complément de ma réponse à la question de Mme Poumirol, je peux rappeler quelques chiffres. Nous comptons 20 000 praticiens à diplôme hors Union européenne actuellement inscrits au Conseil national de l’ordre des médecins. Ils participent grandement à l’accès aux soins dans notre pays, ainsi que vous l’avez indiqué. Nous devons donc simplifier la situation.

Je le répète, nous créerons par voie réglementaire une voie interne de validation qui pourra être effective dès 2025.

Les problèmes que vous évoquez ont trait aux modalités de validation des évaluations des connaissances. Actuellement, un concours est organisé ; or, en France, le jury du concours est souverain.

Tout l’enjeu du futur véhicule législatif sera de transformer ce concours en examen, en y associant également une évaluation de proximité réalisée par les médecins encadrant les praticiens dans les hôpitaux. Le but sera d’éviter tout sentiment d’injustice et de proposer des solutions pérennes pour permettre aux médecins diplômés hors Union européenne d’exercer dans de bonnes conditions, sans avoir à subir un stress permanent dû au renouvellement permanent de leur statut.

Nous agirons donc dès 2025 par voie réglementaire, et nous proposerons dès 2026 un véhicule législatif pour améliorer la situation, afin d’assurer à l’ensemble des Françaises et des Français la qualité des praticiens hospitaliers. Catherine Vautrin et moi-même sommes totalement engagés sur ce sujet. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

situation en syrie

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Nathalie Goulet. « Vers l’Orient compliqué, je volais avec des idées simples. Je savais qu’au milieu des facteurs enchevêtrés une partie essentielle s’y jouait. Il fallait donc en être. » Vous connaissez tous cette formule du général de Gaulle, et je vous parlerai de la situation en Syrie.

Les facteurs y sont bien enchevêtrés : violences insoutenables mentionnées tout à l’heure, espoir de reconstruction avec l’accord qui vient d’être signé avec les Kurdes et les Druzes. Il y a aussi les ingérences étrangères dont la Syrie doit pouvoir être débarrassée, de la part des Iraniens bien sûr, mais aussi des Frères musulmans ou encore des Israéliens, qui ont hier matin bombardé le sud du pays.

Chacun joue sur les divisions communautaires mortifères de cette région. La situation est extrêmement délicate : reconstruction du pays, destruction des armes chimiques, djihadistes incarcérés, stocks de Captagon.

Monsieur le ministre, nous avons eu droit aux talibans inclusifs. Ma question est simple : comment la France, qui a joué un rôle important dans la reprise du processus de reconstruction, compte-t-elle s’impliquer ? Peut-on faire confiance au président par intérim sans jouer les idiots utiles de l’un ou de l’autre des prédateurs régionaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Madame la sénatrice Nathalie Goulet, je l’ai dit, la France condamne toutes les exactions contre les civils, quelles que soient les communautés visées et quels que soient leurs auteurs, groupes affiliés au régime de Bachar el-Assad ou groupes terroristes.

Il s’agit de justice, mais aussi de l’avenir de la Syrie. Nous n’avons eu de cesse de le répéter, ce pays ne pourra retrouver sa stabilité et sa prospérité sans un processus politique qui garantisse la sécurité et les droits de toutes les communautés. Je pense en particulier à la sécurité contre le terrorisme ou à la prolifération des armes chimiques.

La lutte contre le terrorisme passe d’abord par le respect des droits et des intérêts des Kurdes en Syrie et par la destruction des stocks d’armes chimiques du régime. Les résultats obtenus lundi avec les Kurdes de Syrie sont très encourageants, et ont été suivis par un accord hier avec les Druzes.

Par ailleurs, l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques va pouvoir se déployer en Syrie pour détruire les stocks du régime de Bachar el-Assad, qui constituent une menace pour la sécurité internationale. Ce travail doit se poursuivre parce qu’en Syrie se joue une partie de notre sécurité.

Il va de soi que nous ne pourrons pas accepter de nouvelles levées de sanctions si nous n’avons pas de garantie que les exactions ne resteront pas impunies.

Enfin, la France suit avec préoccupation les développements dans le Golan. Nous appelons donc Israël à la retenue. Toute action militaire unilatérale en Syrie ferait le jeu d’acteurs à l’agenda déstabilisateur, au premier rang desquels l’État islamique.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour la réplique.

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le ministre, il faut conforter la commission d’enquête mise en place par le président par intérim. Il faut aussi conforter le dialogue national avec les Chrétiens en cours et assurer notre présence.

Pour ma part, je n’ai pas eu l’occasion d’aller rencontrer Bachar el-Assad à de multiples reprises…

M. Yannick Jadot. Bravo ! (Mme Ghislaine Senée applaudit.)

Mme Nathalie Goulet. Ce que je sais, en tout cas, c’est que nous avons un rôle à jouer, notamment pour ce qui concerne les djihadistes. C’est très important : comme vous l’avez indiqué, une partie de notre sécurité se joue en Syrie. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

financements publics des laboratoires départementaux d’analyse

M. le président. La parole est à M. Jean-Gérard Paumier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Gérard Paumier. Madame la ministre de l’agriculture, le 20 février dernier, la direction générale de la concurrence de la Commission européenne a sollicité la direction générale de l’alimentation de votre ministère pour qu’elle réponde à un questionnaire sur les financements publics des laboratoires départementaux d’analyses.

Cette demande fait suite au dépôt auprès de la Commission européenne, le 27 mai 2024, d’une nouvelle plainte pour concurrence déloyale par l’association de laboratoires privés Aprolab et Eurofins vis-à-vis des quatre laboratoires publics français les plus importants, qui travaillent pour plus de la moitié des départements.

Pourtant, à la suite de la mise en place du décret sur la notion de service d’intérêt économique général (Sieg) national, cette association de laboratoires privés s’était engagée auprès de vos services à mettre un terme au contentieux qui l’opposait aux laboratoires publics, contentieux qu’elle avait engagé à Bruxelles voilà plus de quinze ans et qui représente, pour ces derniers, une véritable épée de Damoclès.

Je le rappelle, le groupe Eurofins, porteur de la plainte Aprolab, est une entreprise du CAC 40, installée au Luxembourg, dont les dirigeants habitent en Belgique et qui a défrayé la chronique dans plusieurs dossiers récents ; cela pourrait justifier de s’intéresser de plus près à ses pratiques.

Madame la ministre, vous savez l’importance du rôle des laboratoires départementaux d’analyses dans le maillage sanitaire français et leur implication essentielle dans la gestion des crises récentes, comme celles du covid-19, de la grippe aviaire, de la fièvre catarrhale ovine ou encore de la maladie hémorragique et épizootique des bovins.

Dans ces conditions, quelles actions comptez-vous engager pour permettre à nos laboratoires publics d’analyses, qui ont démontré leur efficacité et leur réactivité, de continuer d’exercer sereinement leurs missions au service de notre agriculture, de notre environnement, de notre santé et de notre souveraineté alimentaire ? (Applaudissements sur des travées des groupes UC et INDEP.)

M. Vincent Louault. Excellent !

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Mme Annie Genevard, ministre de lagriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur Jean-Gérard Paumier, mes services traitent ce dossier depuis 2014, année durant laquelle l’association des laboratoires privés Aprolab a déposé une plainte auprès de la Commission européenne. Cette plainte ciblait, vous l’avez dit, les compensations attribuées aux laboratoires départementaux d’analyses par les conseils départementaux et qui, selon le plaignant, faussaient le coût des analyses dans le domaine concurrentiel privé.

Cette procédure a été suspendue en 2020 par la Commission européenne elle-même, à la faveur de la recherche d’une solution amiable entre les autorités françaises et les laboratoires du groupement Aprolab. Cette solution consistait à mettre en place des mandats de services d’intérêt économique général, chantier conduit à son terme quatre ans plus tard, avec l’appui politique du Gouvernement.

Néanmoins, malgré les engagements pris, le plaignant estime dorénavant que des laboratoires visés dans la nouvelle plainte continuent de percevoir des aides d’État incompatibles avec le marché intérieur, en particulier de la part des conseils départementaux, sous forme de subventions d’équilibre. La Commission européenne a donc interrogé la France le 20 février dernier à propos de ces nouvelles plaintes.

Mes services techniques et juridiques travaillent activement, en collaboration avec les laboratoires concernés et les représentants des collectivités territoriales, pour répondre à la Commission européenne. Vous pouvez en outre compter, monsieur le sénateur, sur mon implication personnelle dans la défense du système mis en place l’année dernière, en concertation avec les acteurs des territoires et des laboratoires.

J’ajoute que j’ai fait une priorité de la défense du maillage territorial des laboratoires, qui constitue, disons-le, une garantie de réponse rapide aux événements sanitaires tels que ceux qui ont affecté si lourdement nos élevages durant l’année 2024. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Gérard Paumier, pour la réplique.

M. Jean-Gérard Paumier. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse et de votre vigilance à Bruxelles sur ce dossier, dont l’apparence technique ne doit pas occulter l’importance politique pour nombre de nos territoires. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

baisse du tarif de l’électricité photovoltaïque

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jean-Jacques Michau. Madame la ministre, le projet d’arrêté, faisant actuellement l’objet d’une consultation, relatif à la baisse brutale et rétroactive des soutiens aux petites et moyennes installations solaires en toiture continue de provoquer colère et incompréhension.

Des dirigeants de PME issus de tous les territoires, en particulier du département dont je suis élu, l’Ariège, sont très inquiets devant la perspective d’un coup de rabot gouvernemental, alors qu’ils font vivre le tissu économique local, notamment dans les communes rurales. Les inquiétudes sont grandes également chez des agriculteurs, qui comptent souvent sur les installations solaires disposées en toiture pour compléter leurs revenus – et nous avons évoqué ici même, très récemment encore, la faiblesse de ces revenus…

De même, les particuliers qui se sont tournés vers l’autoconsommation, une démarche vertueuse qu’il convient d’encourager, risquent de ne pouvoir faire ces investissements coûteux ; en effet, dans le secteur de l’autoconsommation, le taux réduit de TVA de 5,5 % n’entrerait en vigueur qu’en octobre prochain, alors même que les aides gouvernementales ont pris fin le 1er février dernier ! N’est-ce pas incohérent ?

Par ailleurs, voilà moins d’un an, était signé avec l’État un Pacte solaire destiné à soutenir le déploiement et l’industrialisation photovoltaïque en France. Ce pacte est-il passé aux oubliettes ? Ce stop and go, toute une filière essentielle à la transition écologique risque d’en faire les frais.

Madame la ministre, pour éviter la fragilisation de ce secteur, les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain souhaitent savoir si vous seriez d’accord pour renoncer à la dégressivité brutale du prix d’achat ainsi qu’à la rétroactivité, et pour faire coïncider la date de baisse du taux de TVA avec celle de l’évolution des prix de rachat. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées des groupes CRCE-K et GEST. – Mme Vanina Paoli-Gagin applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des comptes publics.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Monsieur le sénateur, je vous répondrai, au nom de Marc Ferracci, ministre délégué chargé de l’industrie et de l’énergie, actuellement en déplacement, en quatre points.

En premier lieu, la priorité de la France est bien de respecter la trajectoire « zéro carbone » d’ici à 2050 ; telle est notre boussole.

En deuxième lieu, cette trajectoire repose sur plusieurs briques : d’abord, le nucléaire, avec un retour à un maximum de production et de nouveaux investissements ; ensuite, le déploiement de l’éolien terrestre et maritime ; enfin, une nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie, la précédente ayant certes conduit à un développement très important du solaire, mais au prix de surproductions massives en journée, d’où des prix négatifs et une surcharge pour les finances publiques.

En troisième lieu, un arrêté fait actuellement l’objet d’une concertation, avec deux axes pour le photovoltaïque. Le premier consiste à encourager la production individuelle, vous l’avez dit, au travers d’une TVA à 5,5 % visant à favoriser l’orientation vers l’autoconsommation. Le second consiste à favoriser des installations plus grandes, afin d’atteindre la masse critique permettant de produire à moindre coût, notamment en mutualisant les coûts de raccordement au réseau de RTE (Réseau de transport d’électricité). En effet, une production trop fragmentée coûte extrêmement cher en raccordement, c’est pourquoi il vaut mieux massifier la production. Bref, nous sommes concentrés sur la décarbonation, mais nous cherchons également à préserver les deniers de l’État.

En quatrième lieu, enfin, vous l’avez dit, il s’agit d’une consultation et, je puis vous le dire au nom de Marc Ferracci et d’Éric Lombard, ici présent, une consultation n’est pas une décision. Nous restons donc à l’écoute de la filière, afin de développer la meilleure solution et de maintenir l’encouragement de ceux qui veulent participer à la transition vers la décarbonation, la transition énergétique, écologique, qui fonctionnera grâce non pas à des décrets, mais à une mobilisation générale. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour la réplique.

M. Jean-Jacques Michau. J’insiste sur le fait, madame la ministre, que cette politique risque de détruire 60 000 emplois sur le territoire ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST, et sur des travées du groupe CRCE-K.)

programme d’éducation à la vie affective et relationnelle et à la sexualité

M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Sylviane Noël. Ma question s’adresse à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale.

Madame la ministre, le principe de neutralité de l’école impose que l’enseignement dispensé soit exempt de toute forme de prosélytisme idéologique, philosophique ou encore politique. Or plusieurs dispositions du programme de l’éducation à la vie affective et relationnelle et à la sexualité (Evars) contreviennent à cette exigence, en introduisant des notions et postulats controversés qui relèvent davantage du militantisme que d’un enseignement objectif et factuel.

J’en veux pour preuve l’approche de la lutte contre les stéréotypes de genre, omniprésente dès la maternelle, qui prend systématiquement la forme d’une contestation des représentations du féminin et du masculin. En outre, le projet introduit, dès la classe de cinquième, la dissociation artificielle entre sexe et genre.

Nous ne croyons pas qu’il appartienne à l’école de la République de créer un doute identitaire chez nos adolescents (M. Yannick Jadot sexclame.) sur des réalités biologiques établies, alors même que cette période de la vie est marquée par une construction de soi qui doit être sécurisée par des repères clairs et bienveillants. (Protestations sur les travées du groupe GEST.)

À l’inverse, plusieurs enjeux fondamentaux de la vie affective et relationnelle sont complètement occultés de ce nouveau programme. (Mêmes mouvements.) L’enseignement de l’éducation à la sexualité impose de transmettre des informations objectives et adaptées à l’âge des élèves, dans le respect du principe de neutralité. Vous avez annoncé deux jours de formation au profit des intervenants du programme destiné aux jeunes de 3 à 18 ans, sur un sujet éminemment sensible et intime. C’est irréaliste ! Qui assurera ces séances ? Comptez-vous faire appel au planning familial ?

Que dire enfin de l’exclusion incompréhensible et inacceptable des parents de l’information préalable sur les séances d’Evars, alors que ces derniers doivent être pleinement informés et associés au contenu des interventions ? Nous ne pouvons accepter que l’éducation sexuelle soit le cheval de Troie de la théorie du genre (Ah ! sur les travées du groupe SER.) et du « transactivisme » à l’œuvre dans nos écoles. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Exclamations sur des travées du groupe SER.)

M. le président. Veuillez poser votre question, ma chère collègue !

Mme Sylviane Noël. Face à ces dérives, nous exigeons que soient enfin garantis un respect strict du principe de neutralité, un renforcement de la prévention contre les dangers réels et le rétablissement du droit à l’information des parents. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat, ministre de léducation nationale, de lenseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Sylviane Noël, je comprends les questions que peut soulever l’éducation à la vie affective et relationnelle, et à la sexualité.

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat. Ce sont évidemment des sujets sensibles, qui doivent être abordés avec beaucoup de rigueur et de discernement.

C’est précisément la raison pour laquelle, en juin 2023, alors que j’étais Première ministre, j’avais demandé au ministre de l’éducation nationale de saisir le Conseil supérieur des programmes, afin de disposer d’un cadre pédagogique incontestable. Or ce programme a été approuvé à l’unanimité du Conseil, qui représente, je le rappelle, l’ensemble de la communauté éducative, y compris donc les parents d’élèves et les associations familiales.

Les experts du Conseil supérieur des programmes ont ainsi veillé à la progressivité et à l’adéquation du programme, en fonction de l’âge et de la maturité des élèves. Dans le premier degré, il s’agit d’une éducation à la vie affective et relationnelle ; dans le second degré est intégrée une dimension d’éducation à la sexualité. Nous nous accorderons tous, je pense, pour dire que cette progressivité est importante.

En ce qui concerne les intervenants, j’ai tenu à ce que ce soient les professeurs, en lien avec l’ensemble du personnel de l’éducation nationale, en particulier de santé scolaire, qui présentent ce programme aux élèves. C’est pour cela que, comme vous l’avez souligné, des formations sont prévues.

Enfin, je tiens à dire qu’il me semble en effet important de lutter contre les stéréotypes de genre, surtout dans notre pays, où seulement 25 % des ingénieurs sont des femmes. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Mme Michelle Gréaume applaudit également.) Du reste, soyons clairs, les familles seront bien associées, informées du contenu de ces programmes comme de tous les autres, notamment lors des réunions parents-professeurs de début d’année.

Voyez-vous, madame la sénatrice, selon moi, garantir à chaque enfant une éducation au respect, au consentement, à l’égalité entre les femmes et les hommes, c’est lui donner les clés pour se protéger et grandir en confiance ;…

M. le président. Il faut conclure !

Mme Élisabeth Borne, ministre dÉtat. … cela relève de notre responsabilité collective et c’est ce à quoi s’emploie ce programme d’éducation à la vie affective et relationnelle, et à la sexualité. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, UC, SER, CRCE-K et GEST.)

recrudescence de certains cancers chez les jeunes

M. le président. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Annick Jacquemet. Ma question s’adresse à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

Monsieur le ministre, pour la première fois en France, une étude a porté sur l’incidence des cancers chez les adolescents et les jeunes adultes de 15 à 39 ans, dans dix-neuf départements. Les résultats de ces travaux, connus depuis le 3 mars dernier, ont révélé une hausse constante de l’incidence de plusieurs types de cancers entre 2000 et 2020. Sur cette période, les glioblastomes ont augmenté de 122 %, les carcinomes du rein de près de 90 % et les liposarcomes de 74 %. Bien que n’évoluant pas à la même vitesse, la tendance observée pour les carcinomes colorectaux, les cancers du sein et les lymphomes de Hodgkin n’en demeure pas moins préoccupante.

J’ajoute, comme le démontrent plusieurs études récentes, que la progression de certains cancers précoces n’est pas propre à notre pays. Selon un article paru dans le British Medical Journal Oncology en 2023, le nombre de nouveaux cas chez les moins de 50 ans est passé de 1,82 million en 1990 à 3,26 millions en 2019.

Face à cette situation alarmante, il semble indispensable de mieux comprendre les facteurs de risque et les dangers liés à certaines expositions, et d’y sensibiliser les jeunes adultes. Monsieur le ministre, quel rôle le Gouvernement entend-il jouer concrètement dans le soutien à la recherche médicale ? À l’aune des résultats de cette étude, prévoyez-vous d’affiner les stratégies de prévention et de faciliter l’accès précoce au dépistage, afin d’enrayer la dynamique à l’œuvre dans cette tranche d’âge ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de laccès aux soins. Madame la sénatrice Jacquemet, le nombre de cancers connaît en effet une augmentation, particulièrement chez les plus jeunes et nous avons du mal à bien en cerner les facteurs.

M. Yannick Jadot. Les pesticides !

M. Yannick Neuder, ministre. Le phénomène est probablement multifactoriel : substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS), microparticules, etc. (Mme Mathilde Ollivier proteste.)

M. Yannick Jadot. Et les pesticides ! On peut dire le mot !

M. Yannick Neuder, ministre. Nous avons donc diligenté un projet national de recherche, qui sera financé à hauteur de 50 millions d’euros, en lien avec l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), afin de mieux comprendre les déterminismes de ces cancers. Nous sommes tout de même dans un pays scientifique, dans la patrie de Pasteur, et nous devons donc lutter tous ensemble, sur toutes les travées, contre l’obscurantisme afin d’expliquer ces phénomènes ; Mme Vautrin et moi-même sommes particulièrement mobilisés sur ces sujets.

En ce qui concerne les mesures concrètes, au-delà des protocoles de recherche, il convient également d’engager des mesures de prévention et la première d’entre elles, c’est la vaccination ! La France dispose d’outils qui permettent d’éradiquer le cancer, notamment celui qui est lié au papillomavirus et nous nous demandons s’il faut rendre cette vaccination obligatoire, notamment pour les 11-14 ans, car, on le sait, certains cancers touchant le jeune homme et la jeune femme, notamment le cancer du col de l’utérus, pourraient être éradiqués. En outre, il conviendrait de procéder à un rattrapage vaccinal sur d’autres sujets, notamment la méningite.

Ce phénomène pose également la question des autres facteurs, comme le tabagisme, l’alcool et la mauvaise nutrition, la « malbouffe ». Nous travaillons sur ce sujet avec Annie Genevard et l’industrie agroalimentaire (M. Bernard Jomier sexclame.) ; nous avons ainsi obtenu que les boulangers diminuent la teneur en sel de leur pain.

En outre, j’ai saisi la Haute Autorité de santé pour savoir s’il était pertinent d’abaisser l’âge de dépistage, notamment du cancer du sein, comme certains pays européens l’ont fait, afin de dépister plus et mieux, sans pour autant risquer de trop dépister et d’enclencher des traitements qui ne seraient pas acceptables.

Enfin, le dernier aspect de notre stratégie réside dans le sport santé, que nous allons développer pour limiter tous ces cancers. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC, et sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour la réplique.

Mme Annick Jacquemet. Les témoignages poignants des adolescents et des jeunes adultes concernés en attestent, ces maladies ont des répercussions d’autant plus importantes sur leur vie sociale, professionnelle et familiale qu’elles apparaissent à un stade précoce. N’attendons pas que la tendance s’accélère pour avoir une réaction d’ampleur, à la hauteur de la situation. J’ai cru comprendre que vous preniez la problématique à bras-le-corps, monsieur le ministre, et je vous en remercie. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP. – M. Mickaël Vallet applaudit également.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Notre prochaine séance de questions d’actualité au Gouvernement aura lieu le 19 mars prochain.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de Mme Anne Chain-Larché.)

PRÉSIDENCE DE Mme Anne Chain-Larché

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

7

Mises au point au sujet de votes

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.

Mme Anne-Catherine Loisier. Au cours de la séance du 11 mars 2025, lors du scrutin public n° 226 sur l’ensemble de la proposition de loi organique visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales afin de garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité, je souhaitais voter contre et non voter pour, en cohérence avec mon vote lors du scrutin n° 225.

De même, Mme Devésa souhaitait s’abstenir et non voter pour.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Delcros.

M. Bernard Delcros. Lors du scrutin public n° 218 sur les amendements identiques nos 37 rectifié et 44 à l’article 1er de la proposition de loi visant à renforcer la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal, j’ai été enregistré comme n’ayant pas participé pas au vote alors que je souhaitais voter pour.

Par ailleurs, lors du scrutin public n° 221 sur l’amendement n° 27 rectifié bis à l’article 1er ter de la même proposition de loi, j’ai été enregistré comme ayant voté pour alors que je souhaitais voter contre.

Mme la présidente. La parole est à M. Louis Vogel.

M. Louis Vogel. Lors du scrutin public n° 215 sur les amendements identiques nos 7 rectifié ter et 25 rectifié ter tendant à supprimer l’article 1er de la proposition de loi visant à renforcer la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal, je souhaitais m’abstenir.

Par ailleurs, lors du scrutin public n° 222 sur l’article 1er ter de la même proposition de loi, Mme Corinne Bourcier souhaitait s’abstenir.

Enfin, lors du scrutin public n° 225 sur l’ensemble de cette même proposition de loi, MM. Vincent Louault et Pierre Jean Rochette souhaitaient voter contre.

Mme la présidente. La parole est à M. Guislain Cambier.

M. Guislain Cambier. Lors du scrutin public n° 226 sur l’ensemble de la proposition de loi organique visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales afin de garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité, je souhaitais voter contre et non pas pour.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Mandelli.

M. Didier Mandelli. Lors du scrutin public n° 225, j’ai été comptabilisé comme ayant voté pour alors que je souhaitais voter contre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Lors du scrutin public n° 226 sur l’ensemble de la proposition de loi organique visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales afin de garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité, mon collègue Olivier Bitz et moi, alors que nous souhaitions tous les deux voter contre, avons été comptabilisés comme ayant voté pour.

Sachant que ce texte a été adopté avec quatre voix de majorité, la somme des rectifications – la série est longue ! – pose une difficulté. En effet, si nos instructions de vote avaient bien été prises en compte, cette proposition de loi organique aurait évidemment été rejetée par le Sénat.

Dans le cadre de la réforme à venir du règlement, il sera important, madame la présidente, d’envisager une mesure, quelle qu’elle soit : nous ne pouvons pas continuer à faire face à des problèmes de vote qui affectent la sincérité des scrutins.

Mme la présidente. Je partage tout à fait votre point de vue, chère collègue. À la suite de ces nombreuses mises au point, les conclusions qui s’imposent seront certainement tirées.

La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.

Mme Sylvie Vermeillet. Lors du scrutin public n° 226 sur l’ensemble de la proposition de loi organique visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales afin de garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité, je souhaitais voter contre.

Mme la présidente. La parole est à M. André Reichardt.

M. André Reichardt. Lors du scrutin public n° 226, j’ai été comptabilisé comme ayant voté contre alors que je souhaitais m’abstenir.

Mme la présidente. La parole est à Mme Pauline Martin.

Mme Pauline Martin. Même combat que mes camarades !

Lors du scrutin public n° 220, j’ai été comptabilisée comme ayant voté pour alors que je souhaitais voter contre.

Mme la présidente. Acte est donné de ces mises au point, mes chers collègues. Elles figureront dans l’analyse politique des scrutins concernés. En outre, toutes ces rectifications auront une suite.

8

Conventions internationales

Adoption en procédure d’examen simplifié de trois projets de loi dans les textes de la commission

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen de trois projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.

Pour ces trois projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

projet de loi autorisant l’approbation de la résolution n° 259 portant modification de l’article 1er de l’accord portant création de la banque européenne pour la reconstruction et le développement afin de permettre l’élargissement limité et progressif du champ d’action géographique de la banque à l’afrique subsaharienne et à l’irak

Article unique

Est autorisée l’approbation de la Résolution n° 259 portant modification de l’article 1er de l’Accord portant création de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement afin de permettre l’élargissement limité et progressif du champ d’action géographique de la Banque à l’Afrique subsaharienne et à l’Irak, adoptée le 18 mai 2023, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Mme la présidente. Je mets aux voix le texte adopté par la commission, après engagement de la procédure accélérée, sur ce projet de loi (projet n° 232, texte de la commission n° 406, rapport n° 405).

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.

(Le projet de loi est adopté.)

projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le gouvernement de la république française et l’observatoire du réseau d’antennes d’un kilomètre carré (skao) relatif à l’adhésion de la france à l’observatoire

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et l’Observatoire du réseau d’antennes d’un kilomètre carré (SKAO) relatif à l’adhésion de la France à l’Observatoire (ensemble une annexe), signé à Londres le 11 avril 2022, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Mme la présidente. Je mets aux voix le texte adopté par la commission, après engagement de la procédure accélérée, sur ce projet de loi (projet n° 104, texte de la commission n° 408, rapport n° 407).

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.

(Le projet de loi est adopté.)

projet de loi autorisant la ratification du traité sur la coopération dans le domaine de la défense entre la république française et le royaume d’espagne

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée la ratification du traité sur la coopération dans le domaine de la défense entre la République française et le Royaume d’Espagne, signé à Barcelone le 19 janvier 2023 et dont le texte est annexé à la présente loi.

Mme la présidente. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur ce projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée (projet n° 371, texte de la commission n° 404, rapport n° 403).

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.

(Le projet de loi est adopté définitivement.)

9

 
Dossier législatif : proposition de loi visant à proroger le dispositif d'expérimentation favorisant l'égalité des chances pour l'accès à certaines écoles de service public
Article 1er

Égalité des chances pour l’accès à certaines écoles de service public

Adoption définitive en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle les explications de vote et le vote sur la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à proroger le dispositif d’expérimentation favorisant l’égalité des chances pour l’accès à certaines écoles de service public (proposition n° 353, texte de la commission n° 397, rapport n° 396).

La conférence des présidents a décidé que ce texte serait discuté selon la procédure de législation en commission prévue au chapitre XIV bis du règlement du Sénat.

Au cours de cette procédure, le droit d’amendement des sénateurs s’exerce en commission, la séance plénière étant réservée aux explications de vote et au vote sur l’ensemble du texte adopté par la commission.

proposition de loi visant à proroger le dispositif d’expérimentation favorisant l’égalité des chances pour l’accès à certaines écoles de service public

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi visant à proroger le dispositif d'expérimentation favorisant l'égalité des chances pour l'accès à certaines écoles de service public
Article 2

Article 1er

(Non modifié)

I. – Le premier alinéa de larticle 1er de lordonnance n° 2021-238 du 3 mars 2021 favorisant légalité des chances pour laccès à certaines écoles de service public est ainsi modifié :

1° La date : « 31 décembre 2024 » est remplacée par la date : « 31 août 2028 » ;

2° Le mot : « organisé » est remplacé par le mot : « ouvert » ;

3° Sont ajoutés les mots : « ou de militaires ».

II. – Larticle 1er de lordonnance n° 2021-238 du 3 mars 2021 favorisant légalité des chances pour laccès à certaines écoles de service public, dans sa rédaction résultant des 1° et 2° du I du présent article, est applicable aux concours ouverts à compter du 1er août 2024.

Article 1er
Dossier législatif : proposition de loi visant à proroger le dispositif d'expérimentation favorisant l'égalité des chances pour l'accès à certaines écoles de service public
Article 2 bis

Article 2

(Non modifié)

À la première phrase de larticle 5 de lordonnance n° 2021-238 du 3 mars 2021 précitée, la date : « 30 juin 2024 » est remplacée par la date : « 31 mars 2028 ».

Article 2
Dossier législatif : proposition de loi visant à proroger le dispositif d'expérimentation favorisant l'égalité des chances pour l'accès à certaines écoles de service public
Article 3 (début)

Article 2 bis

(Non modifié)

Lordonnance n° 2021-238 du 3 mars 2021 précitée est ratifiée.

Article 2 bis
Dossier législatif : proposition de loi visant à proroger le dispositif d'expérimentation favorisant l'égalité des chances pour l'accès à certaines écoles de service public
Article 3 (fin)

Article 3

(Suppression maintenue)

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du texte adopté par la commission, je vais donner la parole, conformément à l’article 47 quinquies de notre règlement, au Gouvernement, puis au rapporteur de la commission, pendant sept minutes, et, enfin, à un représentant par groupe pendant cinq minutes.

La parole est à M. le ministre.

M. Laurent Marcangeli, ministre de laction publique, de la fonction publique et de la simplification. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, chose promise, chose due ! Voilà six semaines, je m’engageais à ce que le Gouvernement prolonge le dispositif des concours Talents jusqu’en 2028. Aujourd’hui, nous allons, je l’espère, graver cet engagement dans le marbre de la loi.

Cette prolongation est particulièrement attendue par les étudiants et les parents d’élèves, qui vivent dans l’incertitude depuis la fin de l’année dernière. Nous allons ainsi pouvoir les rassurer et permettre aux élèves de passer les épreuves qu’il leur reste dans les meilleures conditions.

Avant de parler des prochaines étapes et de la mise en œuvre de la proposition de loi que vous vous apprêtez à voter, j’aimerais faire un dernier rappel sur le « pourquoi du comment » de cette initiative, si vous me permettez l’expression.

J’ai eu l’occasion, à de nombreuses reprises, d’affirmer mon attachement personnel aux concours Talents, que ce soit devant les étudiants de l’Institut national du service public (INSP) et de l’Institut national des études territoriales (Inet) lors de mon déplacement à Strasbourg le 16 janvier dernier, devant vos collègues de l’Assemblée nationale le 18 février dernier ou devant la commission des lois du Sénat la semaine dernière.

La prorogation des concours Talents est d’abord motivée par la situation d’urgence dans laquelle nous nous trouvons. Il est nécessaire d’adopter ce texte au plus vite, à la fois pour sécuriser juridiquement les places des concours existants et limiter au maximum le risque de contentieux. En effet, certains concours prévus en 2025 ont été ouverts par voie d’arrêtés pris en 2024. C’est notamment le cas pour les concours d’accès à l’INSP, à l’Inet et à l’École nationale supérieure de police (ENSP), les épreuves d’accès à cette dernière école ayant déjà commencé.

C’est d’ailleurs pour répondre à l’urgence de la situation que le Gouvernement a choisi de soutenir, sans hésitation, la proposition de loi déposée par une députée socialiste, Mme Florence Herouin-Léautey, de l’inscrire en priorité à l’ordre du jour fixé par le Gouvernement et d’engager la procédure accélérée sur ce texte.

Cette urgence m’a été rappelée par des parlementaires de tous bords lors de mes déplacements, ainsi qu’à l’Assemblée nationale et dans cet hémicycle, où j’ai été interpellé, lors des débats budgétaires, par Mme la rapporteure. Je tiens d’ailleurs à la remercier de son implication, de son suivi et de sa vigilance sur les sujets relatifs à la fonction publique de manière générale.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la fabrique de la loi en la circonstance, vous le savez, exige pour faire vite de faire conforme. À cet égard, je remercie les sénateurs de la commission des lois, qui, sensibles à nos arguments et à l’impérieuse nécessité d’aller vite, ont adopté le texte sans modification et à l’unanimité la semaine dernière.

Nos débats d’aujourd’hui ne sont pas uniquement d’ordre juridique, car cette proposition de loi témoigne, en réalité, d’un enjeu bien plus important : la manière dont un État fort recrute ses meilleurs agents publics. Avec ce texte, nous abordons deux concepts qui me semblent essentiels pour l’avenir de la fonction publique, à savoir l’attractivité et la méritocratie républicaine. À sa manière, cette proposition de loi consacre, au fond, le droit de chacun – peu importe d’où il vient – d’aspirer aux plus grandes responsabilités administratives dans notre pays.

Pour attirer les talents, il faut aller les chercher partout où ils sont, dans tous nos territoires, en métropole comme dans nos outre-mer. En somme, il faut savoir recruter des talents issus de tous milieux sociaux.

C’est dans cette optique que le dispositif des prépas Talents a été mis en place et que le Gouvernement a créé des concours externes, les concours Talents, permettant à l’État de former les cadres de demain. Signe d’ouverture, de démocratisation et de succès du dispositif, les toutes dernières places offertes à ces concours l’ont d’ailleurs été dans les outre-mer, territoires auxquels je sais chacun attaché dans cet hémicycle.

J’en profite pour vous rappeler également que je suis favorable à ce que les prépas Talents soient désormais étendues aux concours des écoles d’ingénieurs. Ce n’est un secret pour personne : dans les prochains mois et les prochaines années, l’État devra affronter des défis auxquels il n’avait plus fait face depuis longtemps.

De la montée en puissance de nos capacités de défense au renforcement d’une stratégie nationale de résilience en passant par la mise en œuvre du plan d’adaptation du territoire au changement climatique – Christophe Béchu a porté ce sujet lorsqu’il était ministre –, nous aurons de plus en plus besoin d’ingénieurs supplémentaires, à la tête bien faite, dans les rangs de la fonction publique.

Enfin, la prolongation de l’expérimentation des parcours et des concours Talents, ainsi que leur sécurisation juridique jusqu’en août 2028, permettra à l’ensemble des parlementaires et au Gouvernement de disposer de données consolidées sur plusieurs années et d’un bilan pour acter ou non, avec recul, l’intérêt de pérenniser ce dispositif qu’il nous faut encore mieux faire connaître au grand public.

À cet égard, je recevrai dans les prochaines semaines l’association La Cordée afin que nous puissions valoriser le dispositif et les parcours des élèves au sein du service public.

En tant que ministre, je souhaite que nous nous inspirions de l’adoption de ce texte pour faire avancer l’ensemble des sujets entrant dans le périmètre de mon ministère, qu’il s’agisse de la fonction publique ou de la simplification, comme je l’ai indiqué lors de la séance de questions d’actualité au Gouvernement.

Alors que je présidais il y a encore quelques mois un groupe parlementaire à l’Assemblée nationale sur l’ensemble de mon périmètre, j’ai à cœur de faire vivre la philosophie du dialogue, du compromis et de la concertation. Elle est plus vitale que jamais dans cet hémicycle, et peut-être plus encore ailleurs… Je sais que vous êtes prêts.

Nous devons aux Françaises et aux Français cet esprit de dialogue permanent et de concertation. Nous le devons aussi à nos institutions. Nous aurons donc l’occasion – j’en suis sûr – de travailler ensemble sur de nombreux textes d’initiative parlementaire, que je soutiendrai, pour améliorer la fonction publique dans son ensemble et le quotidien de celles et de ceux qui veulent servir la France. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP. – Mme Sylvie Vermeillet applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons aujourd’hui la dernière étape de l’examen par le Sénat de cette proposition de loi.

Sans préjuger de l’issue du vote de ce jour, que j’espère – je le dis avec sincérité – unanimement favorable, je relève que le parcours législatif de ce texte aura été particulièrement rapide. Déposé le 19 décembre dernier par la députée Florence Herouin-Léautey, il a été voté par l’Assemblée nationale le 18 février et notre commission des lois l’a adopté, sans modification, mercredi dernier, selon la procédure de législation en commission. Par ailleurs, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée le 20 janvier.

De façon logique, cette accélération du calendrier est liée à la nécessité de proroger dès que possible l’expérimentation des concours du plan Talents du service public, alors que celle-ci a pris fin brutalement le 31 décembre dernier. Bien sûr, l’urgence à légiférer face à laquelle nous sommes aujourd’hui placés résulte directement du manque d’anticipation dont a fait preuve le pouvoir exécutif : celui-ci a laissé l’expérimentation aller à son terme sans remettre au Parlement le rapport d’évaluation qui avait été prévu dans la loi pour le 30 juin 2024 au plus tard.

Certes, le gouvernement actuel n’est pas responsable des soubresauts politiques des mois derniers, mais il n’en est pas moins regrettable de devoir se prononcer dans l’urgence sur la prorogation de cette expérimentation. Il est à espérer que cette situation ne se reproduira pas et qu’il sera donné au Parlement la possibilité de décider en amont et en connaissance de cause de la pérennisation ou non de ce dispositif.

Ces remarques de méthode étant faites, j’en viens au contenu de la proposition de loi adoptée par la commission des lois.

Comme vous le savez, l’expérimentation des classes préparatoires et des concours Talents a débuté en 2021, à la suite de l’ordonnance du 3 mars 2021, qui découlait elle-même de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique. Ainsi, les classes prépas Talents ont succédé aux classes préparatoires intégrées. Accessibles sur dossier et après un entretien de motivation, elles visent à permettre à des étudiants issus de classes socioéconomiques défavorisées de bénéficier d’un accompagnement renforcé pour préparer les concours de la fonction publique, en particulier les six concours externes spéciaux dits Talents.

Ces concours ont été mis en place pour l’accès à cinq écoles de service public formant des cadres d’emploi de catégorie A+ dans les trois versants de la fonction publique : l’Institut national du service public, pour l’accès à la voie générale, l’Institut national des études territoriales, pour la formation d’administrateur territorial, l’École des hautes études en santé publique (EHESP), pour la formation de directeur d’hôpital et de directeur d’établissement sanitaire, social et médico-social, l’École nationale supérieure de la police, pour la formation de commissaire de la police nationale, et l’École nationale d’administration pénitentiaire (Enap), pour la formation de directeur des services pénitentiaires.

Le nombre de places offertes par année aux lauréats des concours Talents est compris entre 10 % et 15 % du nombre de places ouvertes au titre du concours externe classique d’accès à l’école concernée. Aussi bien le jury que les programmes et les épreuves sont identiques à ceux du concours externe classique.

Dans la mesure où l’expérimentation s’est éteinte du jour au lendemain, sans qu’une pérennisation du dispositif ait été proposée, une forte insécurité juridique pèse sur les concours Talents de la session 2025, comme M. le ministre l’a rappelé. Les écoles de service public ont d’ailleurs abordé l’organisation de cette session de manière variable : l’ENSP et l’INSP ont pris un arrêté d’ouverture de concours à l’été 2024, l’Inet et l’EHESP au début de l’année 2025. Quant à l’Enap, elle a fait le choix de ne pas ouvrir de concours Talents au titre de cette session.

Les calendriers des épreuves sont eux-mêmes variables : les épreuves d’admissibilité du concours de commissaire de police nationale ont eu lieu dès le mois de janvier dernier, celles du concours de l’INSP auront lieu dans deux semaines et les premières épreuves de l’Inet, de l’EHESP et de l’ENSP sont, quant à elles, prévues au mois de juin prochain.

De plus, un contentieux est en cours devant le Conseil d’État dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l’arrêté d’ouverture du concours Talents pour l’accès à l’INSP. Comme vous l’aurez compris, mes chers collègues, il est indispensable de sécuriser les concours Talents de la session en cours.

Au-delà, il paraît également opportun de proroger pour trois années supplémentaires cette expérimentation, soit jusqu’en août 2028 comme le prévoit le texte, de manière à disposer de suffisamment de recul et de données en vue de réaliser un bilan étayé.

Monsieur le ministre, comme vous en êtes vous-même convenu en commission la semaine dernière, le rapport remis au Parlement le 14 février dernier était pour le moins perfectible, dans la mesure notamment où il comportait uniquement des éléments relatifs aux taux de réussite aux concours Talents. La prorogation qui nous est proposée est pertinente et utile en ce qu’elle permettra au Parlement de disposer en temps et en heure du rapport d’évaluation prévu dans la loi, c’est-à-dire au plus tard le 31 mars 2028, comme le prévoit l’article 2 de la proposition de loi, rapport dont le contenu sera bien conforme au contenu prévu par décret.

De surcroît, cette évaluation est d’autant plus indispensable que le périmètre de l’expérimentation aura lui-même été élargi à de nouvelles écoles, comme le prévoit l’article 1er du texte. Celui-ci ouvre en effet la possibilité de créer une voie Talents dans les écoles formant les militaires, en particulier pour l’accès au corps des ingénieurs de l’armement.

Même si la commission partage l’objectif de favoriser une plus grande diversité sociale et territoriale au sein de la haute fonction publique, y compris dans les grands corps techniques, elle a souligné les spécificités inhérentes aux règles de recrutement des membres de ces corps, qui limitent fortement la portée d’éventuels concours Talents. La commission a toutefois adopté cette disposition, dont le bilan devra être soigneusement établi le moment venu.

Au regard de l’urgence à redonner aux concours Talents une base légale, la commission des lois a adopté sans modification cette proposition de loi, que je vous invite à voter ainsi.

Au-delà de ce texte, j’invite le Gouvernement à mener une réflexion de fond sur la nécessité de renforcer l’attractivité de la fonction publique auprès de l’ensemble des jeunes et d’agir en faveur de l’égalité des chances le plus en amont possible. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Mme Patricia Schillinger. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes appelés aujourd’hui à nous prononcer sur la prorogation de l’expérimentation des concours Talents pour l’accès à certaines grandes écoles de service public. Il s’agit d’un dispositif essentiel, qui vise à renforcer l’égalité des chances et à lutter contre les déterminismes sociaux en ouvrant davantage la haute fonction publique à la diversité des parcours et des origines.

Depuis leur mise en place en 2021, ces concours s’adressent aux étudiants boursiers issus des classes préparatoires Talents, lesquelles offrent un accompagnement renforcé aux jeunes aux ressources limitées. L’objectif est clair : permettre à chacun, quelle que soit son origine sociale, de suivre sa vocation et d’accéder aux plus hautes responsabilités publiques. Ce n’est pas une remise en cause du principe du mérite, bien au contraire ! Il s’agit de s’assurer que les talents de notre pays s’expriment pleinement, sans être bridés par des inégalités de départ.

Pourtant, au 31 décembre dernier, ce dispositif est arrivé à échéance sans que le rapport d’évaluation prévu ait été rendu dans les délais. Cette situation a entraîné une insécurité juridique pour les concours Talents de la session 2025, qui avaient déjà débuté dans certains établissements. Une intervention législative urgente s’est donc imposée afin d’éviter que les candidats ne se retrouvent privés d’une opportunité pour laquelle ils se sont investis pleinement.

C’est tout l’objet de cette proposition de loi, adoptée sans modification en commission. Elle prévoit la prorogation du dispositif jusqu’au 31 août 2028, afin que nous puissions disposer d’un bilan complet et fiable sur les effets réels de cette expérimentation ; le report de la remise du rapport d’évaluation au 31 mars 2028, ce qui permettra d’analyser la réussite et l’intégration des lauréats dans la fonction publique ; la sécurisation des concours Talents ouverts dès 2025 afin de lever tout risque juridique pesant sur les épreuves en cours ; l’extension de l’expérimentation à certains corps d’ingénieurs de l’État, dans le but d’élargir encore le champ des opportunités offertes.

Ce texte répond donc à une double nécessité : garantir la continuité du dispositif et une évaluation approfondie avant toute décision de pérennisation. La commission des lois du Sénat a ainsi validé sans modification la proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale, car elle est consciente de l’importance de donner aux jeunes concernés une visibilité et une sécurité indispensables pour leur avenir.

Comme nous le savons, les grandes écoles de service public sont marquées par une homogénéité sociale persistante. Si nous voulons une haute fonction publique qui reflète la diversité et les réalités de notre société, alors nous devons continuer à ouvrir des voies d’accès qui garantissent à tous les talents, sans distinction d’origine, la possibilité de s’engager au service de l’intérêt général.

Le groupe RDPI soutiendra donc cette proposition de loi avec conviction, car elle traduit des engagements républicains forts : l’égalité des chances et la promotion d’une fonction publique plus inclusive, plus ouverte et plus représentative de notre pays. (M. André Guiol applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Mireille Conte Jaubert, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Mireille Conte Jaubert. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis maintenant plusieurs décennies, notamment grâce aux travaux menés en matière de sociologie, il n’est plus possible d’ignorer les lacunes structurelles en matière d’accès à l’enseignement et leurs conséquences à long terme.

La notion de « capital culturel » a largement mis en lumière le déterminisme auquel pouvait se heurter un enfant ou un jeune adulte au cours de sa scolarité. Les conséquences de cet héritage transmis par le milieu social et familial valent tout particulièrement pour les études supérieures. Aussi la seule proclamation du principe d’égalité ne suffit-elle plus. Cette prise de conscience de l’inégalité des chances en matière d’éducation doit inciter les pouvoirs publics à œuvrer à un décloisonnement.

Si l’égalité des chances est essentielle partout, elle l’est d’autant plus pour accéder à notre fonction publique : une administration ne saurait être le reflet imparfait de la société qu’elle sert. Toute forme d’isolement risquerait de lui faire perdre ce qui fait sa légitimité : sa capacité à comprendre, à représenter et à protéger chacun de nos concitoyens.

C’est à cette ambition qu’a répondu la mise en place des concours Talents du service public en 2021. Par cette innovation bienvenue, nous avons su reconnaître que l’excellence ne naît pas toujours dans les mêmes cercles, que le potentiel n’a pas d’adresse et que, souvent, il suffit d’un coup de pouce et d’un cadre adapté pour qu’une vocation fasse son œuvre.

En offrant un accompagnement renforcé, ces classes préparatoires ont ouvert les portes des grandes écoles de la fonction publique à des étudiants issus de milieux défavorisés, prouvant que la réussite est une question non pas d’origine, mais d’opportunité.

Voilà pourtant que cette belle dynamique a été brutalement stoppée. La fin de cette expérimentation, programmée au 31 décembre 2024, a laissé derrière elle un vide juridique et une incertitude pesante.

Que deviennent les candidats qui ont travaillé sans relâche pour préparer ces concours ? Quelle réponse leur donner alors que certaines écoles ont déjà commencé les épreuves tandis que d’autres hésitent, paralysées par l’absence de cadre légal ? Laisser les choses en l’état reviendrait à trahir la promesse faite à ces jeunes, en refermant les portes que nous venons de leur ouvrir.

Dans ces circonstances, la proposition de loi que nous examinons n’est pas qu’un simple ajustement technique, elle est une nécessité.

D’abord, elle permet de prolonger l’expérimentation jusqu’en 2028, évitant ainsi l’interruption brutale d’un dispositif qui commence à peine à porter ses fruits.

Ensuite, l’adoption de cette proposition de loi sécurisera les concours déjà ouverts, la fin de l’expérimentation ayant plongé la session 2025 dans l’incertitude. En assurant la continuité du dispositif, ce texte vise à protéger les candidats d’une annulation injuste et à garantir l’équité des épreuves.

M. Laurent Marcangeli, ministre. Tout à fait.

Mme Mireille Conte Jaubert. Nous comprenons évidemment les difficultés institutionnelles qui ont fait obstacle à une prolongation du dispositif par le Gouvernement durant l’hiver dernier. Nous pouvons malgré tout regretter que le rapport qui devait être remis à l’été 2024 n’ait jamais été publié.

Enfin, en étendant l’expérimentation à d’autres corps de la fonction publique, cette proposition de loi élargit encore le champ des possibles pour ceux qui, jusque-là, en paraissaient exclus.

En somme, cette proposition de loi ne corrige pas seulement une faille juridique, elle conforte un outil essentiel pour rendre la fonction publique plus accessible et plus représentative de la diversité de notre société.

Toutefois, ce texte ne résout pas tout. Une sensibilisation dès le secondaire permettrait de montrer à tous ces jeunes qui n’osent même pas rêver de la fonction publique que, avec du travail, ces métiers sont aussi les leurs. En effet, les publics ciblés sont souvent mal informés de l’existence des prépas Talents, ce qui limite leur portée. Assurer la promotion de ces dispositifs est l’unique moyen de donner aux futurs candidats l’envie de se projeter et, surtout, de leur donner confiance.

L’égalité des chances n’est pas seulement un concept abstrait. Elle est une idée qui, lorsqu’elle prend forme, change des destins, transforme des vies et enrichit notre République. Veillons à ce qu’elle soit non pas un mirage, mais bien une réalité durable ! Pour ces raisons, le groupe du RDSE votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Louis Vogel applaudit également.)

M. Paul Toussaint Parigi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2021, dans le cadre de la réforme de l’encadrement supérieur, le Gouvernement a pris un certain nombre de mesures visant à diversifier le recrutement dans la haute fonction publique.

Fort du constat hélas ! peu encourageant de l’accentuation des inégalités sociales au sein de nos écoles de service public, cette réforme visait à favoriser des recrutements plus inclusifs et plus diversifiés et, en consolidant la dimension méritocratique desdits recrutements, à attirer les nouvelles générations au service de l’intérêt général.

Au cœur de cette réforme, le dispositif des filières Talents avait pour objet de faciliter l’accès des étudiants issus de milieux modestes, quelle que soit leur origine sociale ou géographique, à cinq grandes écoles de service public, en leur réservant 10 % à 15 % des places offertes aux concours externes.

Or ce dispositif a été interrompu de manière abrupte à compter du 31 décembre 2024, sans que le rapport d’évaluation qui devait être remis au Parlement au plus tard le 30 juin 2024 soit présenté, ce qui a placé les candidats ayant déjà commencé la préparation des concours de l’année 2025 dans une situation d’incertitude quant au maintien de ces derniers.

Fort heureusement, la mobilisation politique et transpartisane sur ce sujet ainsi que la volonté du Gouvernement, représenté par M. le ministre Laurent Marcangeli, que je tiens à saluer amicalement, ont permis l’inscription à l’ordre du jour du Parlement de cette proposition de loi portant prorogation de cette expérimentation jusqu’au 31 août 2028.

Je salue également l’appui du Gouvernement à l’élargissement de l’expérimentation à l’accès aux grands corps techniques d’encadrement supérieur de la fonction publique de l’État, par symétrie avec l’accès aux grands corps administratifs : cet élargissement renforce la portée du dispositif.

La prépa Talents n’est pas seulement un programme d’accompagnement, c’est un véritable levier de transformation sociale répondant au droit de chaque élève talentueux d’intégrer la fonction publique, de servir l’État et de contribuer à la richesse et à la diversité de nos institutions. C’est l’un des outils qui permettent d’honorer les promesses de notre idéal républicain dans ses fondements mêmes, en offrant à chaque talent la chance de s’épanouir et de participer, à sa mesure, à la construction d’une société plus riche et plus juste.

Bien qu’il ne puisse à lui seul remédier au défaut d’égalité des chances dans la fonction publique, ce dispositif diversifie sans conteste les origines géographiques des lauréats, répondant ainsi aux enjeux d’attractivité et de méritocratie qui doivent prévaloir.

Pour ces raisons, le groupe centriste votera ce texte sans hésitation, considérant qu’il constitue une avancée significative pour la fonction publique et, plus largement, en faveur de l’égalité des chances au sein de notre société. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Mme Cécile Cukierman. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec cette proposition de loi, nous sommes appelés à proroger l’expérimentation des concours Talents jusqu’au 31 août 2028.

Cette mesure semble de bon sens, du moins en apparence : il est difficile pour nous, voire impensable, de nous opposer à l’objectif d’égalité des chances dans l’accès aux grandes écoles de la fonction publique.

Cependant, il ne faudrait pas que cette prorogation nous dispense d’une réflexion plus large et plus approfondie sur l’efficacité réelle du dispositif.

Comme l’a souligné le groupe des députés communistes à l’Assemblée nationale, nous devons prendre en considération un certain nombre de préoccupations, lesquelles expliquent notre position partagée sur ce texte.

Tout d’abord, le délai prévu pour cette expérimentation ayant expiré le 31 décembre 2024 et le rapport d’évaluation qui devait être remis pour juin dernier ne l’ayant jamais été – cela vient d’être rappelé –, nous sommes dans une situation d’incertitude qui soulève des questions légitimes quant à la qualité même du dispositif.

Nous sommes confrontés à un vide juridique alors même que des étudiants se sont préparés pendant des mois, voire pendant des années, pour ces concours. En tout état de cause, il nous paraît incohérent de passer d’un vide juridique à une prorogation automatique, sans réelle analyse de fond. Néanmoins, et bien qu’elle ne soit pas l’idéal, nous soutenons cette prorogation, car il y va de la sécurité juridique des candidats et de leur avenir.

Nous devons nous interroger : prorogeons-nous aujourd’hui pour mieux évaluer ou pour mieux repousser le véritable traitement des problèmes ?

Derrière cette prorogation, il y a une évidence qui semble parfois nous échapper : l’égalité des chances ne se joue ni à bac+3, ni à bac+5, ni au moment d’intégrer une classe préparatoire, ni à celui de passer un concours. Elle se joue bien plus tôt, dès le collège et le lycée, notamment dans l’orientation scolaire et les choix d’études.

Si nous nous contentons de mesures tardives, comme celles qui sont proposées via le dispositif des prépas Talents, nous risquons de ne toucher qu’une petite partie de la population estudiantine.

L’égalité des chances, c’est d’abord offrir à tous les élèves, indépendamment de leur origine sociale ou géographique, des parcours d’éducation qui leur permettent d’accéder aux filières qui sont ici visées.

L’accès aux grandes écoles et à la fonction publique est la résultante d’un parcours qui doit commencer bien avant le concours proprement dit.

Nous devons donc repenser l’éducation en amont, dès les premières étapes du parcours scolaire, en facilitant l’accès à des formations préparatoires adaptées, à des soutiens spécifiques et à une meilleure orientation dès le plus jeune âge.

Faut-il se satisfaire d’un dispositif qui ne concerne de fait qu’un nombre restreint d’étudiants ? Ne devrions-nous pas réfléchir à des mesures plus ambitieuses, intervenant bien plus tôt, j’y insiste, dans les trajectoires scolaires ?

Ce n’est qu’au travers d’un changement global, de l’école primaire au lycée, que nous pourrons véritablement offrir à chacun les mêmes chances de réussir ces concours.

Un autre point mérite notre attention : l’extension du dispositif aux corps techniques d’encadrement supérieur de l’État.

Si l’intention est louable, la réalité est plus nuancée. Les voies de recrutement dans ces corps sont très spécifiques, et l’ajout d’un concours Talents risque de n’être qu’une mesure symbolique sans effet réel sur la diversité des recrutements.

Plus largement, comment rendre l’ensemble des métiers publics plus accessibles – accessibles à tous – en repensant nos critères d’accès et nos exigences afin de ne pas exclure de facto les talents qui n’ont pas eu les mêmes chances que les autres ?

Convaincus que le temps de cette prorogation nous permettra de répondre aux questions posées et de procéder – je le souhaite et je le demande – à une véritable évaluation du dispositif, nous voterons cette proposition de loi, malgré les quelques doutes que j’ai évoqués. Il demeure essentiel, cela dit, d’aller au-delà d’un simple renouvellement de l’expérimentation et d’entamer une réflexion approfondie sur l’égalité des chances dans l’ensemble de notre fonction publique. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées du groupe SER. – M. Louis Vogel applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique de Marco, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Monique de Marco. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans La Ferme des animaux, George Orwell montre comment le soulèvement démocratique des animaux au sein d’une ferme bascule progressivement vers un régime autoritaire. Les cochons, doués d’une intelligence supérieure, forment rapidement une élite et asservissent les autres animaux ; et les droits universels originellement proclamés sont bientôt réduits au seul commandement suivant : « Tous les animaux sont égaux, mais certains animaux sont plus égaux que d’autres. »

La situation de l’élite administrative française est à l’image de cette parabole. En théorie, le recrutement par concours place tous les candidats en situation d’égalité. Mais, en pratique, les différences de capital social entre les candidats favorisent certains d’entre eux : les Parisiens représentent 2,5 % des étudiants, mais un tiers des admis dans les grandes écoles ; quant aux enfants des classes supérieures, singulièrement ceux des hauts fonctionnaires, ils y sont eux aussi surreprésentés.

Les mécanismes de reproduction sociale par le biais du concours sont bien connus. En 1954, un candidat éconduit au concours d’entrée à l’ENA, l’École normale d’administration, avait été jusque devant le Conseil d’État pour contester la décision de barrer l’accès de l’école à tout candidat communiste.

Mme Monique de Marco. C’est le fameux arrêt Barel.

Or personne n’ignore ici l’influence des anciens élèves de l’ENA dans la conduite des affaires du pays.

Ce phénomène va croissant avec le prestige entourant l’école : il est plus marqué encore pour l’INSP, la nouvelle école d’administration, que pour l’école nationale supérieure de la police. Certaines études récentes montrent que les chances d’intégrer l’ENA sont multipliées par 330 si le père du candidat en est lui-même un ancien élève.

Une telle situation n’est pas digne d’une grande démocratie. Il nous appartient donc de veiller à réduire les barrières administratives et sociales qui bloquent l’accès aux carrières publiques les plus prestigieuses.

C’est pourquoi nous voterons cette proposition de loi qui vise à pérenniser l’expérimentation des classes préparatoires Talents mise en place en 2021.

La proposition de loi de la députée Florence Herouin-Léautey pallie ainsi les manquements du Gouvernement, qui n’a pas honoré son obligation d’informer le Parlement sur le bilan de l’expérimentation. Elle protège en outre les élèves admis dans les classes préparatoires spécifiques. Nous la soutenons donc sans réserve.

Il importe toutefois de rappeler que ce dispositif ne permettra pas à lui seul de restaurer l’égalité des chances entre candidats en matière de carrières publiques.

L’intégration dans ces grandes écoles clôt en réalité des parcours universitaires exemplaires, à l’université et surtout dans d’autres écoles déjà sélectives : l’ENS (École normale supérieure), Sciences Po, HEC.

Elle dépend aussi de l’efficacité de notre système de bourses, et ce tout au long des parcours universitaires. Les fragilités dudit système et la précarité croissante des étudiants affaiblissent par conséquent notre méritocratie en général.

Seules des réformes structurelles, comme l’instauration d’une allocation universelle d’études destinée à l’ensemble des étudiants, sur le modèle de ce qui existe dans les pays scandinaves et de l’allocation déjà versée aux étudiants normaliens, pourraient aboutir à une réelle égalité des chances.

Avec ce texte est aussi posée la question de notre rapport à l’élitisme, qui imprègne tout notre système méritocratique, dans la crise politique que nous traversons.

Je veux à ce propos partager avec vous, monsieur le ministre, mes chers collègues, les conclusions auxquelles parvient l’anthropologue Peter Turchin dans son récent ouvrage Le Chaos qui vient. Il y développe l’idée que la surproduction d’élites dirigeantes serait la cause de crises, voire de l’effondrement des sociétés, et ce en raison de la compétition qu’une telle surproduction ferait naître entre les cadres dirigeants.

Dans le même temps, une récente étude de France Stratégie montre que 15 % des postes ouverts aux concours de la fonction publique n’ont pas été pourvus en 2022. Alors qu’une compétition exacerbée règne pour l’accès aux postes de catégorie A+, les catégories A, B, et C, quant à elles, souffrent d’un déficit d’attractivité.

Aussi la nécessité d’un rééquilibrage me paraît-elle incontestable.

Le groupe écologiste continuera donc de soutenir un renforcement de la diversité et de l’attractivité pour l’ensemble des catégories. Nous restons fidèles à une vision claire, celle d’un service public de qualité, au service de tous, doté des moyens de fonctionner. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et CRCE-K.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Audrey Linkenheld. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que les enfants d’ouvriers représentaient 19,6 % de la population active française en 2019, ils ne constituent que 5 % des promotions des écoles de la haute fonction publique pour les années 2020 et 2021. Ce n’est en définitive guère mieux qu’il y a trente ans, lorsque, fille d’un ouvrier et d’une employée et première bachelière de la famille, j’entrais à Science Po Paris.

Ces chiffres édifiants montrent combien, dans notre République, une forme de reproduction sociale continue de limiter les chances de nombreux jeunes, en particulier de celles et ceux qui sont issus des milieux les plus modestes.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain soutient de longue date toutes les initiatives favorisant non seulement l’égalité des chances, mais l’égalité réelle. La démocratisation des parcours éducatifs – de tous les parcours – ne s’oppose pas, selon nous, à l’excellence. Au contraire, elle la bonifie, parce que la diversité – sociale, géographique, académique – des profils dirigeants est créatrice de valeur, dans le secteur privé comme dans le secteur public.

Nous sommes donc ouverts à la mise en œuvre de dispositifs tels que les prépas Talents ou les programmes d’études intégrées, dont l’Institut d’études politiques de Lille fut pionnier dès 2007.

Ces dispositifs sont des leviers indispensables pour permettre à des étudiants d’accéder à des métiers et à des écoles dont leurs parents comme eux-mêmes ignoraient sans aucun doute l’existence jusqu’alors, et pour leur donner la possibilité, par la même occasion, de se mettre au service de l’intérêt général.

C’est dans le cadre du plan Talents du service public et par l’ordonnance du 3 mars 2021 que les concours Talents ont été institués de manière expérimentale, pour trois ans, afin de relever la proportion d’élèves issus des catégories socioprofessionnelles les moins favorisées dans les cinq écoles qui mènent aux trois versants de la haute fonction publique, l’INSP, l’Inet, l’EHESP, l’ENSP et l’ENA.

Les trois années d’expérimentation ont passé et les 103 prépas Talents ne semblent pas avoir posé de difficultés, bien au contraire, aux cinq écoles et aux plusieurs centaines d’étudiants qui, dans l’intervalle, y ont été admis.

Malgré cela, aucune initiative gouvernementale nouvelle n’a vu le jour : ni évaluation en bonne et due forme et dans les délais utiles ni prolongation ou pérennisation de l’expérimentation.

Ce manque – ce manquement, pourrais-je dire – a d’ailleurs été signalé ici même, lors du débat budgétaire sur le programme 148 de la mission « Transformation et fonction publiques » du projet de loi de finances pour 2025, par la rapporteure Catherine Di Folco comme par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Et c’est finalement l’initiative parlementaire qui a pris le relais, grâce à Florence Herouin-Léautey et aux députés socialistes.

Leur proposition de loi, déposée à l’Assemblée nationale le 19 décembre 2024 et que nous examinons aujourd’hui, a donc pour objet de revenir en trois points sur l’ordonnance de 2021 : prorogation de l’expérimentation des concours Talents, qui a expiré le 31 décembre dernier ; report de la remise au Parlement du rapport d’évaluation, dont nous espérons qu’il sera plus complet que le récent rapport partiel ; extension du dispositif aux militaires.

Ces trois évolutions ont été validées à l’Assemblée nationale comme elles l’ont été en commission des lois du Sénat : le dispositif est prorogé jusqu’au 31 août 2028 et une évaluation est demandée au 31 mars 2028.

Au regard de l’urgence qu’il y a à consolider la base légale des concours pour la session 2025, au regard aussi de l’attente angoissée des étudiants et de leurs familles, le groupe socialiste se joint en séance, comme il l’a fait en commission, au souhait d’un vote conforme, donc d’une entrée en vigueur au plus vite de la nouvelle ordonnance.

Bien sûr, la prolongation des prépas et concours Talents ne suffira pas à elle seule à renverser des mécanismes de reproduction sociale encore profondément ancrés dans notre système éducatif et professionnel. Cette proposition de loi constitue néanmoins un pas utile vers un modèle plus inclusif, afin que chaque jeune, quelle que soit son origine sociale ou culturelle, bénéficie de véritables chances d’accès aux fonctions d’excellence, y compris publiques.

Une occasion est ainsi donnée à ces jeunes de rendre à la République ce qu’elle a pu leur apporter et à la République, précisément, de bénéficier pleinement de leurs talents. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Monique de Marco et M. Pierre Ouzoulias applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Louis Vogel, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Louis Vogel. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen dispose : « Tous les citoyens étant égaux [aux] yeux [de la loi] sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. »

Le législateur savait écrire…

M. Pierre Ouzoulias. Exactement !

M. Louis Vogel. La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui a pour objet de concrétiser ce principe méritocratique auquel nous sommes tous attachés. Mais, pour obtenir une véritable égalité des chances, il ne suffit pas de dire à nos jeunes : « Les portes de nos écoles sont ouvertes ! » Il faut faire davantage pour ceux d’entre eux qui, justement, sont les plus défavorisés : il faut leur donner un coup de pouce.

Tel est l’objet de ce texte. Je me réjouis qu’il soit examiné dans un esprit consensuel, bien au-delà des clivages partisans : venant du Sénat, cela n’a rien d’étonnant.

Cette proposition de loi répond à trois objectifs – les orateurs précédents les ayant cités, je me contenterai de les rappeler brièvement.

En premier lieu, ce texte prolonge l’expérimentation du concours externe Talents pour l’accès à certaines écoles de service public. Initialement conçu pour ne plus être applicable après le 31 décembre 2024, le programme Talents est donc prorogé jusqu’au 31 août 2028. En conséquence, la proposition de loi reporte au 31 mars 2028 la remise au Parlement par le Gouvernement du rapport d’évaluation de l’expérimentation.

En deuxième lieu, il élargit la voie des concours Talents aux concours permettant l’accès aux écoles assurant la formation de militaires, afin d’y inclure l’accès au corps des ingénieurs de l’armement, ce qui est fondamental dans le contexte actuel.

En troisième lieu, il précise le dispositif des prépas Talents, qui sera appliqué, de façon rétroactive, aux concours ouverts à compter du 1er août 2024.

Cette proposition de loi répare donc un certain nombre de malfaçons intrinsèquement dues au caractère expérimental des mesures visées, l’expérimentation étant par définition de durée limitée.

Je me félicite de l’esprit transpartisan qui a prévalu lors de l’examen de la proposition de loi en commission. Cet esprit traduit notre engagement à tous en faveur de l’égalité des chances, qui donne à chacun la possibilité de réussir en fonction de son mérite. Il faut rappeler cette vérité souvent oubliée : l’État a besoin de tous les jeunes talentueux, quelle que soit leur origine sociale ou géographique, et la fonction publique doit refléter la diversité de notre pays.

Je ne saurais conclure mon propos sans saluer la qualité du travail de notre rapporteure, notre collègue Catherine Di Folco.

Cette proposition de loi va en réalité bien au-delà de la seule prolongation d’un dispositif : elle relève un véritable défi, celui du renforcement de la méritocratie républicaine par l’édification d’une fonction publique plus représentative de l’ensemble de notre société.

Par les temps difficiles que traverse notre pays, il convient de redonner de l’espoir à nos jeunes en leur donnant des raisons de penser qu’ils ont une chance de réussir ; il convient également de nous serrer les coudes et de souder notre communauté nationale.

Tel est au fond l’objet de cette proposition de loi : elle n’est pas seulement un texte technique de prolongation d’un dispositif ; elle s’inscrit dans cet esprit républicain dont nous avons tant besoin aujourd’hui.

M. Pierre Ouzoulias. Très bien !

M. Louis Vogel. Pour toutes ces raisons, les sénateurs du groupe Les Indépendants – République et Territoires la voteront. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC. – Mme Monique de Marco et M. Pierre Ouzoulias applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Muriel Jourda, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Muriel Jourda. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais exprimer en quelques mots la position du groupe Les Républicains sur ce texte que nous avons traité selon la procédure de législation en commission.

Cette proposition de loi est née à la fois d’une erreur, d’un espoir et d’une promesse.

L’erreur, tout d’abord, quelle est-elle ? Disons les choses telles qu’elles sont, nous parlons d’une expérimentation dont vous aurez saisi, mes chers collègues, neuf orateurs s’étant exprimés avant moi, qu’elle porte sur notre capacité à ouvrir à une population la plus diversifiée possible des concours donnant accès à cinq grandes écoles de la fonction publique.

De cette expérimentation, nous connaissions, par construction, la date de fin : le 31 décembre dernier. L’expiration de ce délai n’est donc pas arrivée abruptement : nous savions exactement quand elle adviendrait. Un rapport, de surcroît, devait être remis six mois avant l’échéance ; il ne l’a jamais été. C’est une erreur, j’y insiste, que de n’avoir ni remis ce rapport ni, le cas échéant et sur la base du rapport, reconduit l’expérimentation.

L’espoir, ensuite, c’est celui de ceux qui ont néanmoins organisé les concours prévus sur le fondement d’un régime juridique qui n’existait plus ou dont on n’avait pas la certitude qu’il existât toujours. Un recours a du reste été déposé, malheureusement, contre un concours qui avait été organisé sur la base de ce régime inexistant.

La promesse, enfin, c’est celle qui émane de la note par laquelle, monsieur le ministre, vous faites malgré tout état de résultats tout à fait encourageants en matière de diversification du recrutement.

Le groupe Les Républicains votera donc évidemment ce texte dont l’objet est de prolonger rétroactivement l’expérimentation dont il est question, de sécuriser – il faut l’espérer – les résultats des concours organisés sur cette base, mais aussi de poursuivre l’effort engagé de diversification des profils accédant aux cinq grandes écoles de la fonction publique ici visées.

Toutefois, je ne conclurai pas mon propos sans préciser qu’à mon sens cette diversification intervient à un stade quelque peu tardif, celui des concours. Si nous voulons effectivement honorer la promesse méritocratique républicaine dont Louis Vogel parlait à juste titre, ce n’est pas au niveau des concours que nous devons agir : c’est au niveau de l’instruction publique, celle-là même qui doit être dispensée depuis les premiers jours de scolarisation jusqu’auxdits concours. Il convient en effet que l’ouverture recherchée se fasse sur la base d’une instruction solide, donnant à chacun, d’où qu’il vienne, les mêmes chances.

Voilà, mes chers collègues, ce que je souhaitais dire, au nom du groupe Les Républicains, sur ce texte que nous approuvons. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP.)

Mme la présidente. Je mets aux voix, dans le texte de la commission, la proposition de loi visant à proroger le dispositif d’expérimentation favorisant l’égalité des chances pour l’accès à certaines écoles de service public.

(La proposition de loi est adoptée définitivement.) – (Applaudissements.)

Article 3 (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à proroger le dispositif d'expérimentation favorisant l'égalité des chances pour l'accès à certaines écoles de service public
 

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Article 7 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité
Article 8

Résilience des infrastructures critiques et renforcement de la cybersécurité

Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité (projet n° 33, texte de la commission spéciale n° 394, rapport n° 393).

Je rappelle que la procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein de la section 2 du chapitre II du titre II, à l’article 8.

TITRE II (suite)

CYBERSÉCURITÉ

Chapitre II (suite)

De la cyber résilience

Section 2 (suite)

Des exigences de sécurité des systèmes d’information

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité
Article 9

Article 8

Sont des entités essentielles :

1° Les entreprises appartenant à un des secteurs d’activité hautement critiques qui emploient au moins 250 personnes ou dont le chiffre d’affaires annuel excède 50 millions d’euros et dont le total du bilan annuel excède 43 millions d’euros ;

2° Les établissements publics à caractère industriel et commercial, à l’exception du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives pour ses seules activités dans le domaine de la défense, ainsi que les régies dotées de la seule autonomie financière chargées d’un service public industriel et commercial créées en application du 2° de l’article L. 2221-4 du code général des collectivités territoriales, appartenant à un des secteurs d’activité hautement critiques, qui emploient au moins 250 personnes ou dont les produits d’exploitation excèdent 50 millions d’euros et le total du bilan annuel excède 43 millions d’euros. Le critère d’emploi est calculé selon les modalités prévues au I de l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale, les critères financiers sont appréciés au niveau de la personne morale ou de la régie concernée ;

3° Les opérateurs de communications électroniques qui emploient au moins 50 personnes ou dont le chiffre d’affaires annuel et le total du bilan annuel excèdent chacun 10 millions d’euros ;

4° Les prestataires de services de confiance qualifiés ;

5° Les offices d’enregistrement ;

6° Les fournisseurs de services de système de noms de domaine ;

7° Les administrations suivantes :

a) Les administrations de l’État et leurs établissements publics administratifs, à l’exception des administrations de l’État qui exercent leurs activités dans les domaines de la sécurité publique, de la défense et de la sécurité nationale, de la répression pénale et des missions diplomatiques et consulaires françaises pour leurs réseaux et systèmes d’information ainsi que de leurs établissements publics administratifs qui exercent leurs activités dans les mêmes domaines ou qui sont désignés entité importante par arrêté du Premier ministre. Le Premier ministre désigne par arrêté les établissements publics administratifs de l’État qui, compte tenu du faible impact économique et social de leur activité, ne sont pas soumis à la présente loi, dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État ;

b) Les régions, les départements, les communes d’une population supérieure à 30 000 habitants, leurs établissements publics administratifs dont les activités s’inscrivent dans un des secteurs d’activité hautement critiques ou critiques ;

c) Les centres de gestion mentionnés à l’article L. 452-1 du code général de la fonction publique ;

d) Les services départementaux d’incendie et de secours mentionnés à l’article L. 1424-1 du code général des collectivités territoriales ;

e) Les communautés urbaines, les communautés d’agglomération et les métropoles, leurs établissements publics administratifs dont les activités s’inscrivent dans un des secteurs d’activité hautement critiques ou critiques ;

f) Les syndicats mentionnés aux articles L. 5212-1, L. 5711-1 et L. 5721-2 du même code dont les activités s’inscrivent dans un des secteurs d’activité hautement critiques ou critiques et dont la population est supérieure à 30 000 habitants ;

g) Les institutions et organismes interdépartementaux mentionnés à l’article L. 5421-1 dudit code dont les activités s’inscrivent dans un des secteurs d’activité hautement critiques ou critiques ;

h) Et les autres organismes et personnes de droit public ou de droit privé chargés d’une mission de service public administratif, mentionnés au 1° de l’article L. 100-3 du code des relations entre le public et l’administration, à compétence nationale, à l’exception de ceux qui sont désignés entité importante par arrêté du Premier ministre. Le Premier ministre désigne par arrêté les organismes et personnes morales qui, compte tenu du faible impact économique et social de leur activité, ne sont pas soumis à la présente loi, dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État ;

8° Les opérateurs d’importance vitale en tant qu’ils exercent une activité qualifiée de service essentiel en application du second alinéa du 1° du I de l’article L. 1332-2 du code de la défense ;

9° Les opérateurs de services essentiels désignés en application de l’article 5 de la loi n° 2018-133 du 26 février 2018 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité avant l’entrée en vigueur de la présente loi ;

10° Les établissements d’enseignement menant des activités de recherche, désignés par arrêté du Premier ministre dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État, qui remplissent l’un des critères mentionnés à l’article 10.

Mme la présidente. L’amendement n° 98, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après le mot :

entreprises

insérer les mots :

relevant d’un type d’entités

II. – Alinéa 3

Après le mot :

territoriales,

insérer les mots :

relevant d’un type d’entités

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée de lintelligence artificielle et du numérique. Cet amendement vise à mettre en cohérence les dispositions de l’article 8 avec celles de l’article 7 tel qu’amendé en commission spéciale.

Le présent amendement, qui est donc rédactionnel, tend à remplacer, lorsque nécessaire, le critère de l’appartenance à un secteur d’activité par celui de l’appartenance à un type d’entités.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur de la commission spéciale chargée dexaminer le projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité. Il s’agit, comme l’a expliqué Mme la ministre, de mettre en cohérence les dispositions de l’article 8 avec celles de l’article 7 réécrit par la commission spéciale : avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 98.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 17 rectifié septies est présenté par Mme Morin-Desailly, M. Laugier, Mme Patru, M. Duffourg, Mmes Billon et Saint-Pé, MM. Henno et Lafon, Mme Jacquemet, M. Chauvet, Mme Gacquerre et MM. Pillefer et P. Martin.

L’amendement n° 30 est présenté par Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, M. Cardon, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 83 rectifié sexies est présenté par MM. Bleunven, J.M. Arnaud, Cambier et Parigi.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2

1° Remplacer le mot :

ou

par le mot :

et

2° Remplacer le mot :

et

par le mot :

ou

La parole est à M. Bernard Pillefer, pour présenter l’amendement n° 17 rectifié septies.

M. Bernard Pillefer. Il est défendu, madame la présidente !

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour présenter l’amendement n° 30.

Mme Audrey Linkenheld. Nous avons déjà examiné cet amendement en commission.

Il vise à aligner le contenu de ce projet de loi sur celui de la directive du 14 décembre 2022 concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans l’ensemble de l’Union, dite NIS 2 (Network and Information Security), et notamment de son article 3.

Il nous semble préférable, en effet, que les critères retenus pour déterminer quelles sont les « entités essentielles », critères respectivement relatifs à la taille de l’effectif et au chiffre d’affaires, soient cumulatifs et non alternatifs.

Nous proposons un petit changement de mot, mais ce changement veut dire beaucoup.

Mme la présidente. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi, pour présenter l’amendement n° 83 rectifié sexies.

M. Paul Toussaint Parigi. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Ces amendements sont à la fois complexes et importants ; ils peuvent être source de confusion. En effet, quand la directive est écrite à la forme négative, le texte du Gouvernement l’est, lui, en mode positif.

S’agissant du dépassement de seuils, ce passage du négatif au positif requiert, à disposition inchangée, de remplacer « et » par « ou » et « ou » par « et ».

Cela étant dit, et afin que notre assemblée soit tout à fait éclairée, je demande à Mme la ministre de bien vouloir répéter l’exercice de clarification – assez complexe, il faut bien le dire – auquel nous avons procédé en commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. La question est assez technique.

Les articles 8 et 9 du projet de loi transposent strictement le champ d’application de la directive NIS 2, en précisant les seuils à partir desquels les entreprises sont considérées comme des entités essentielles ou importantes.

La rédaction se fonde, conformément à l’article 2 de la directive, sur la recommandation 2003/361/CE de la Commission européenne qui définit les microentreprises, les petites entreprises et les moyennes entreprises.

Comme la directive vise les grandes et moyennes entreprises, la rédaction actuelle du texte s’explique par le principe de contraposition qui, par inversement des définitions, a dû être appliqué pour préciser le périmètre. Cependant, l’objectif est bien le même. La Belgique et l’Italie ont par ailleurs suivi cette même logique de contraposition.

Ainsi, pour l’article 8 qui définit les entités essentielles, le périmètre est celui des grandes entreprises, c’est-à-dire les entités qui ne relèvent pas de la catégorie des moyennes entreprises au sens de la définition de l’Union. La rédaction est donc proposée en appliquant le principe de contraposition à la définition de la moyenne entreprise. Il en résulte que les entités essentielles sont les entreprises qui appartiennent à des secteurs d’activité hautement critiques qui emploient au moins 250 personnes ou dont le chiffre d’affaires excède 50 millions d’euros et dont le bilan annuel excède 43 millions d’euros.

Nous parlons donc bien de la même chose. Cette logique de contraposition n’a été utilisée que pour rester fidèle au texte de la Commission européenne.

Le Gouvernement demande donc le retrait de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 17 rectifié septies, 30 et 83 rectifié sexies.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 82 rectifié est présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 114 est présenté par MM. Chaize, Saury et Canévet, au nom de la commission spéciale.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 13

Après les mots :

communautés d’agglomération

insérer les mots :

comprenant au moins une commune d’une population supérieure à 30 000 habitants

La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 82 rectifié.

M. Pierre Ouzoulias. Par cet amendement, nous proposons de compléter la définition des entités essentielles en y ajoutant un nouveau critère.

En effet, certaines communautés d’agglomération sont composées de communes comptant peu d’habitants. Or nous craignons qu’elles n’aient pas les moyens techniques, matériels et financiers de mettre en œuvre le dispositif prévu par le texte.

Nous souhaitons donc que soient exclues du dispositif les communautés d’agglomération qui ne comprendraient pas au moins une commune de 30 000 habitants et plus. Nous avons fait le calcul : 120 communautés d’agglomération sortiraient ainsi du dispositif, tandis que 110 autres seraient considérées comme des entités essentielles.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 114.

M. Patrick Chaize, rapporteur. Par cet amendement identique, nous proposons que les communautés d’agglomération qui ne comptent aucune commune de plus de 30 000 habitants ne soient pas considérées comme des entités essentielles.

Mme la présidente. L’amendement n° 50 rectifié, présenté par MM. Mellouli, Dossus, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Senée, Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Après les mots :

communautés d’agglomération

insérer les mots :

comprenant au moins une commune de 30 000 habitants et plus

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Madame la présidente, je souhaite rendre cet amendement identique aux amendements nos 82 rectifié et 114.

Mme la présidente. Il s’agit donc de l’amendement 50 rectifié bis, dont le libellé est identique aux amendements nos 82 rectifié et 114.

Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. L’avis est favorable, les deux amendements étant identiques à celui de la commission spéciale.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Le sujet est en effet important.

Je l’ai rappelé dans mon propos liminaire : les cyberattaques visent particulièrement les collectivités. Selon l’Anssi (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information), une attaque sur quatre ciblerait ces entités, quelle que soit leur taille.

Les communautés d’agglomération sont une forme d’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) plus structuré, dont le fonctionnement est plus intégré que celui des communautés de communes. Cette particularité, couplée à leur taille, augmente leur vulnérabilité et leur exposition à la menace cyber.

Par ailleurs, les communautés d’agglomération ont, en moyenne, une plus grande maturité en matière de numérique et de sécurité des systèmes d’information. Ainsi, 60 % des 229 communautés d’agglomération ont bénéficié d’un parcours de cybersécurité de l’Anssi et ont par conséquent d’ores et déjà accompli des progrès importants de sécurisation de leurs systèmes d’information. Elles auront donc des efforts moindres à réaliser pour atteindre les objectifs fixés par la loi.

Limiter le statut d’entité essentielle à certaines communautés d’agglomération serait risqué au regard du niveau de protection et du principe d’égalité. En effet, plusieurs communautés d’agglomération au profil démographique très proche, voire similaire, seraient alors soumises à des niveaux d’exigences différents.

À titre d’exemple, la communauté d’agglomération du Grand Sénonais rassemble 60 000 habitants. Sa plus grande agglomération, Sens, compte 27 034 habitants et a bénéficié d’un parcours de cybersécurité. Cette communauté d’agglomération serait, selon le mécanisme proposé, une entité importante.

La communauté d’agglomération du lac du Bourget, qui compte 60 000 habitants, dont 30 291 pour l’agglomération d’Aix-les-Bains, serait, elle, une entité essentielle.

Il nous semble plus sécurisant pour les EPCI concernés, notamment pour la planification des investissements en matière de cybersécurité, d’être fixés dès l’adoption de la loi sur leur éventuel assujettissement, plutôt que de voir celui-ci modifié en fonction de la population de la commune centre.

L’objectif de massification de la cyberdéfense porté par la directive peut passer, pour les collectivités territoriales, par un effort et une incitation à la mutualisation de leurs systèmes d’information afin qu’elles puissent plus facilement répondre aux exigences.

Pour autant, le Gouvernement est attaché à la proportionnalité des obligations et entend l’inquiétude des auteurs de ces trois amendements. Le Sénat est la chambre des territoires. Aussi, mesdames, messieurs les sénateurs, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée sur ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Vous avez raison, madame la ministre : il faut en effet faire preuve de sagesse. Le véritable risque est de rendre obligatoire pour des communautés d’agglomération des dispositifs qu’elles ne pourraient pas mettre en œuvre.

Si je vous ai bien entendue, vous avez conscience d’être ici au Sénat et de faire face à des élus qui savent bien ce qu’il est possible ou non de faire dans les territoires.

Sans doute pouvons-nous prendre votre avis de sagesse pour un avis favorable. Nous, élus, aimerions porter la voix de la sagesse gouvernementale auprès de nos collègues dans les territoires, qui nous ont demandé de les défendre en cette chambre.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 82 rectifié, 114 et 50 rectifié bis.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 8, modifié.

(Larticle 8 est adopté.)

Article 8
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Article 10

Article 9

Sont des entités importantes :

1° Les entreprises appartenant à un des secteurs d’activité hautement critiques ou critiques qui ne sont pas des entités essentielles et qui emploient au moins 50 personnes ou dont le chiffre d’affaires et le total du bilan annuel excèdent chacun 10 millions d’euros ;

2° Les opérateurs de communications électroniques qui ne sont pas des entités essentielles ;

3° Les prestataires de services de confiance qui ne sont pas des entités essentielles ;

4° Les communautés de communes et leurs établissements publics administratifs dont les activités s’inscrivent dans un des secteurs d’activité hautement critiques ou critiques ;

5° Les établissements d’enseignement menant des activités de recherche qui ne sont pas des entités essentielles. Le Premier ministre désigne par arrêté les établissements qui, compte tenu du faible impact économique et social de leur activité, ne sont pas soumis à la présente loi, dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État ;

6° Les établissements publics administratifs de l’État expressément désignés en tant qu’entités importantes par arrêté du Premier ministre dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ;

7° Les autres organismes et personnes de droit public ou de droit privé chargés d’une mission de service public administratif, mentionnés au 1° de l’article L. 100-3 du code des relations entre le public et l’administration, à compétence nationale, expressément désignés en tant qu’entités importantes par arrêté du Premier ministre dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État ;

8° Les établissements publics à caractère industriel et commercial et les régies dotées de la seule autonomie financière chargées d’un service public industriel et commercial créées en application du 2° de l’article L. 2221-4 du code général des collectivités territoriales, relevant des secteurs d’activité hautement critiques ou critiques, qui emploient au moins 50 personnes ou dont le produit d’exploitation et le total du bilan annuel excèdent chacun 10 millions d’euros et qui ne sont pas entités essentielles. Le critère d’emploi est calculé selon les modalités prévues au I de l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale, les critères financiers sont appréciés au niveau de la personne morale ou de la régie concernée.

Mme la présidente. L’amendement n° 99, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 2

Après le mot :

entreprises

insérer les mots :

relevant d’un type d’entités

II. - Alinéa 9

Après le mot :

relevant

insérer les mots :

d’un type d’entités appartenant à un

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Cet amendement rédactionnel vise à préciser la définition des entités importantes en remplaçant le critère d’appartenance à un secteur d’activité par celui de l’appartenance à un type d’entité, comme nous l’avons fait à l’article 8 pour les entités essentielles.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de cohérence, la commission y est favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 99.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 18 rectifié septies est présenté par Mme Morin-Desailly, M. Laugier, Mme Patru, M. Duffourg, Mme Billon, MM. Henno et Lafon, Mmes Saint-Pé et Jacquemet, M. Chauvet, Mme Gacquerre et MM. Pillefer et P. Martin.

L’amendement n° 31 est présenté par Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, M. Cardon, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 84 rectifié sexies est présenté par MM. Bleunven, J.M. Arnaud, Cambier et Parigi.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2

1° Remplacer la deuxième occurrence du mot :

ou

par le mot :

et

2° Remplacer la deuxième occurrence du mot :

et

par le mot :

ou

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour présenter l’amendement n° 18 rectifié septies.

Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement vise à corriger la rédaction de l’article 9 pour éviter tout écart de transposition avec la directive NIS 2. Il tend à prévoir que les critères fixés pour l’application de cette directive soient non pas alternatifs, mais cumulatifs.

En effet, il ressort de l’article 2 de la directive NIS 2 que le texte s’applique à une entreprise moyenne si son effectif est d’au moins 50 personnes et que son chiffre d’affaires ou le total du bilan annuel excède 10 millions d’euros.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour présenter l’amendement n° 31.

Mme Audrey Linkenheld. Comme pour l’article 8, nous faisons face à un cas de contraposition.

Je n’ai pas eu l’occasion de procéder à une comparaison précise entre les textes. Je n’ai donc pas vérifié si la contraposition était réelle, à savoir que si A égale B, alors non A égale non B.

L’amendement est défendu.

Mme la présidente. L’amendement n° 84 rectifié sexies n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. La commission spéciale émet un avis défavorable sur ces amendements, pour les mêmes raisons que sur les amendements à l’article 8.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 18 rectifié septies et 31.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 115, présenté par MM. Chaize, Saury et Canévet, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

4° Les communautés d’agglomération ne comprenant pas au moins une commune d’une population supérieure à 30 000 habitants, les communautés de communes… (le reste sans changement)

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement, en lien avec l’amendement déposé par les rapporteurs à l’article 8, vise à faire basculer de la catégorie d’entité essentielle vers la catégorie d’entité importante les communautés d’agglomération ne comprenant pas au moins une commune dont la population est supérieure à 30 000 habitants.

Il s’agit, dans un souci de proportionnalité, d’éviter d’imposer des obligations excessives en matière de cybersécurité à des intercommunalités dont la taille ne le justifierait pas.

Seraient ainsi considérées comme des entités importantes les 120 communautés d’agglomération qui ne comptent pas au moins une commune de plus de 30 000 habitants, ainsi que les communautés de communes.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 51 rectifié est présenté par MM. Mellouli, Dossus, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Senée, Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

L’amendement n° 68 est présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 5

Remplacer les mots :

de communes

par les mots :

d’agglomération ne comprenant aucune commune de 30 000 habitants et plus

La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 51 rectifié.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 68.

M. Pierre Ouzoulias. Je retire mon amendement, au profit de l’amendement n° 115 de la commission, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 68 est retiré.

Quel est l’avis de la commission spéciale sur l’amendement n° 51 rectifié ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. La commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 115 et 51 rectifié ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Par souci de cohérence avec le débat que nous avons eu sur l’article 8, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 115.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 51 rectifié n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 9, modifié.

(Larticle 9 est adopté.)

Article 9
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Après l’article 10

Article 10

Outre les entités mentionnées aux articles 8 et 9, le Premier ministre peut désigner par arrêté comme entité essentielle ou comme entité importante une entité exerçant une activité relevant d’un secteur d’activité hautement critique ou critique, quelle que soit sa taille, sous réserve de justifier cette désignation au regard de l’un des critères suivants :

1° L’entité est le seul prestataire sur le territoire national d’un service qui est essentiel au maintien du fonctionnement de la société et d’activités économiques critiques ;

2° Une perturbation du service fourni par l’entité pourrait avoir un impact important sur la sécurité publique, la sûreté publique ou la santé publique ;

3° Une perturbation du service fourni par l’entité pourrait induire un risque systémique important, en particulier pour les secteurs où cette perturbation pourrait avoir un impact transfrontière ;

4° L’entité est critique en raison de son importance spécifique au niveau national ou local pour le secteur ou le type de service concerné, ou pour d’autres secteurs interdépendants sur le territoire national – (Adopté.)

Article 10
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Article 11

Après l’article 10

Mme la présidente. L’amendement n° 56 rectifié n’est pas soutenu.

Après l’article 10
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Article 12

Article 11

I. – Les entités essentielles et les entités importantes sont régies par les dispositions du présent titre lorsque, selon le cas :

1° Elles sont établies sur le territoire national ;

2° S’agissant des opérateurs de communications électroniques, ils fournissent leurs services sur le territoire national ;

3° S’agissant des fournisseurs de services de système de noms de domaine, des offices d’enregistrement, des fournisseurs de services d’informatique en nuage, des fournisseurs de services de centres de données, des fournisseurs de réseaux de diffusion de contenu, des fournisseurs de services gérés, des fournisseurs de services de sécurité gérés, ainsi que des fournisseurs de places de marché en ligne, de moteurs de recherche en ligne ou de plateformes de services de réseaux sociaux :

a) Ils ont leur établissement principal sur le territoire national ;

b) Ou, s’ils sont établis hors de l’Union européenne mais offrent leurs services sur le territoire national, ils ont désigné un représentant établi sur le territoire national.

Toutefois, les conditions d’établissement sur le territoire national ne s’appliquent pas aux administrations et établissements publics.

II. – Les obligations du présent titre applicables aux bureaux d’enregistrement et agents agissant pour le compte de ces derniers concernent :

1° Ceux qui ont leur établissement principal sur le territoire national ;

2° Ou ceux qui ont désigné un représentant établi sur le territoire national, s’ils sont établis hors de l’Union européenne mais offrent leurs services sur le territoire national.

III. – Pour l’application des I et II, l’établissement principal s’entend du lieu où sont principalement prises les décisions relatives aux mesures de gestion des risques en matière de cybersécurité ou, à défaut, le lieu où les opérations de cybersécurité sont effectuées ou, à défaut, l’établissement comptant le plus grand nombre de salariés dans l’Union européenne – (Adopté.)

Article 11
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Article 13

Article 12

L’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information établit et met à jour au moins tous les deux ans la liste des entités essentielles, des entités importantes et des bureaux d’enregistrement sur la base des informations que ces entités et bureaux d’enregistrement lui communiquent.

Les informations à transmettre, leurs modalités de communication et les délais dans lesquels les modifications doivent être transmises sont définis par décret en Conseil d’État pris après avis de la commission nationale de l’informatique et des libertés.

Mme la présidente. L’amendement n° 22 rectifié septies, présenté par Mme Morin-Desailly, MM. Duffourg et Laugier, Mmes Billon, Patru et Saint-Pé, MM. Lafon et Henno, Mme Jacquemet, M. Chauvet, Mme Gacquerre et MM. Pillefer et P. Martin, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Dans les trois années qui suivent l’entrée en application de la présente loi, l’ensemble des entités concernées sont informées et sensibilisées par les ministères concernés.

II. – Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

Dans le respect des modalités de chiffrement de bout en bout ainsi que de protection des données recueillies des lois extraterritoriales, les informations à transmettre, leurs modalités de communication et les délais dans lesquels les modifications doivent être transmises sont définis par décret en Conseil d’État.

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement a une double visée.

Premièrement, les entités concernées devront d’abord être informées et sensibilisées par les ministères concernés dans les trois ans qui suivent l’entrée en application de la loi.

En effet, certaines entreprises seront soumises pour la première fois à des obligations en matière de cybersécurité. Il est à craindre qu’un certain nombre d’entre elles, nouvellement concernées par ces exigences, tardent à identifier les nouvelles mesures à mettre en place. Un travail d’identification croisé doit être effectué par les ministères concernés pour identifier et présensibiliser les entreprises destinataires de nouvelles obligations pour les informer et les accompagner au mieux.

Deuxièmement, cet amendement vise à sécuriser les échanges d’informations et de données sensibles entre les entités concernées et l’Anssi. Il est primordial que ce partage se fasse au travers de mécanismes de protection des informations divulguées afin de garantir la confidentialité des données, potentiellement sensibles, et de les préserver d’un risque d’extraterritorialisation, conformément à l’article 31 de la loi n° 2024-449 du 21 mai 2024 visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique.

Cette proposition figurait dans le rapport de la Commission supérieure du numérique et des postes.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 125, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 22 rectifié septies, alinéas 1 à 3

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme la ministre déléguée, pour présenter ce sous-amendement et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 22 rectifié septies.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Le sous-amendement n° 125 vise à supprimer le I de l’amendement n° 22 rectifié septies, qui ne relève pas du niveau législatif.

Sur le fond, le Gouvernement a pleinement conscience que la communication et la sensibilisation des futures entités régulées seront des facteurs clés de réussite pour la bonne mise en œuvre du texte.

La stratégie de l’Anssi passe par exemple par la mise à disposition du portail numérique MonEspaceNIS2, qui permet aux entités de s’informer et de tester leur éligibilité. Elle s’appuie également sur des acteurs relais – les associations, la gendarmerie et les syndicats professionnels – pour décupler son action d’information et d’accompagnement. Des kits de communication seront par ailleurs proposés aux associations d’élus et aux associations professionnelles afin qu’elles puissent informer leurs adhérents, les inciter à tester leur éligibilité et à réaliser les premières actions de mise en conformité à la directive NIS 2.

Le Gouvernement est favorable au II de l’amendement n° 22 rectifié septies, qui constitue une garantie utile, dont l’Anssi a déjà à cœur d’assurer la pleine effectivité. Il est donc favorable à l’amendement n° 22 rectifié septies, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 125.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. La commission spéciale est elle aussi favorable à l’amendement n° 22 rectifié septies, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 125.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. La disposition la plus importante de mon amendement est bien sûr contenue dans son II.

Je suis donc prête à soutenir le sous-amendement, pour autant que vous preniez l’engagement de bien accompagner nos entreprises – mais ce débat fera foi. Nous espérons que l’ensemble de la réglementation découlant de ce projet de loi et les moyens mis en œuvre pour son application permettront cet accompagnement.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 125.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 22 rectifié septies, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 59 rectifié, présenté par MM. Cadic et Canévet, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les ministères coordonnateurs des secteurs d’activité visés à l’article 7 sont destinataires pour avis de la liste des entités essentielles et des entités importantes qui relèvent de leur compétence. Les ministères coordonnateurs peuvent, en lien avec l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information, amender la liste qui leur a été communiquée.

La parole est à M. Olivier Cadic.

M. Olivier Cadic. Les opérateurs d’importance vitale (OIV) sont désignés par les ministères coordonnateurs du secteur auxquels ils appartiennent.

En cohérence, cet amendement vise à mettre l’expertise des ministères coordonnateurs des secteurs d’activité visés par l’article 7 du projet de loi au service de l’Autorité nationale de sécurité des systèmes d’information, afin que les listes d’entités importantes et essentielles prennent en compte les spécificités des écosystèmes concernés.

Ainsi, certaines entités ne correspondant pas aux critères prédéfinis d’entités importantes ou essentielles pourraient être intégrées à la liste des entités concernées pour des critères stratégiques, économiques, technologiques ou sociaux relevant de l’analyse des ministères coordonnateurs.

Les ministères concernés ont en effet exprimé leur souhait d’être associés à l’élaboration de cette liste.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. L’article 12 prévoit qu’il appartient aux entreprises et aux collectivités qui satisfont aux critères d’une entité essentielle, définis à l’article 8, ou d’une entité importante, en vertu de l’article 9, de se déclarer auprès de l’Anssi. Ce ne sont pas les ministères qui les désignent.

Il paraît clair que les ministères seront associés au recensement des entités qui pourraient être désignées par le Premier ministre sur le fondement de l’article 10. Cet amendement ne me paraît donc pas nécessaire.

J’écouterai avec intérêt l’avis du Gouvernement sur cet amendement. Néanmoins, j’en demande le retrait ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Les opérateurs d’importance vitale sont désignés par les ministères coordonnateurs après avis de la commission interministérielle. Mais dans le cas de NIS 2, cet assujettissement des entités se fait selon des critères bien précis, établis dans la loi, qui permettent de définir s’il s’agit d’une entité essentielle ou importante.

Par ailleurs, il est d’ores et déjà prévu que la faculté du Premier ministre d’assujettir une entité s’exerce après avis des ministres.

Je partage donc l’avis de la commission spéciale et, comme elle, je demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Monsieur Cadic, l’amendement n° 59 rectifié est-il maintenu ?

M. Olivier Cadic. Cet amendement visait essentiellement à obtenir des précisions de la part du Gouvernement sur l’application de ces mesures, à la demande des ministères. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, et je retire mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 59 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 12, modifié.

(Larticle 12 est adopté.)

Article 12
Dossier législatif : projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité
Article 14

Article 13

Les dispositions de la présente loi, y compris celles relatives à la supervision, ne sont pas applicables aux entités essentielles et importantes qui sont soumises, en application d’un acte juridique de l’Union européenne, à des exigences sectorielles de sécurité et de notification d’incidents ayant un effet au moins équivalent aux obligations résultant des articles 14 et 17. Pour être équivalentes, les exigences de notification des incidents doivent également prévoir un accès immédiat aux notifications d’incidents par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information.

Mme la présidente. L’amendement n° 16 rectifié septies, présenté par Mme Morin-Desailly, M. Laugier, Mmes Patru et Billon, M. Duffourg, Mme Saint-Pé, MM. Lafon et Henno, Mme Jacquemet, M. Chauvet, Mme Gacquerre et MM. Pillefer et P. Martin, est ainsi libellé :

Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

À intervalle régulier, l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information informe les entités du degré d’exigence qui pèse sur elles.

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. De nombreuses réglementations numériques, sectorielles et non sectorielles, viennent s’imposer aux entreprises, qui devront se conformer aux textes les plus contraignants.

Aussi, afin d’éviter toute interprétation individuelle et de s’assurer que la réglementation la plus exigeante sera appliquée, l’Anssi devra informer régulièrement les entités du degré d’exigence qui pèse sur elles.

Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. L’article 13 assure la conciliation entre la transposition de la directive NIS 2, qui s’applique à tous les secteurs de l’économie, et le règlement (UE) 2022/2554 sur la résilience opérationnelle numérique, dit Dora (Digital Operational Resilience Act), et la directive (UE) 2022/2556, qui constituent une spécificité propre aux secteurs bancaire et financier.

Il ne paraît donc pas nécessaire – ce serait lourd pour l’Anssi – de prévoir une information régulière des 15 000 entités régulées par la directive NIS 2. Ces entreprises sauront rapidement quelles règles elles devront respecter, seules les banques, les assurances ou les entreprises du secteur financier étant concernées par le paquet Dora.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. J’entends l’objectif des auteurs de cet amendement. Nous avons d’ailleurs déjà évoqué l’importance de l’accompagnement pour la bonne application de ce texte.

Cependant, il nous semble que cet objectif est déjà satisfait par la rédaction actuelle du texte. C’est bien l’Union européenne qui reconnaît le texte comme un acte juridique sectoriel de l’Union, au sens de l’article 4 de la directive NIS 2, comme cela a été le cas pour le règlement Dora.

Dès lors, les entités sont les plus à même de savoir si elles sont soumises à un acte sectoriel, qui peut d’ailleurs très bien prévoir une autorité nationale compétente, différente de l’Anssi. C’est par exemple le cas de Dora qui prévoit trois autorités financières compétentes.

Dans les faits, l’Anssi a fait de la sensibilisation un enjeu majeur de la réussite de la transposition de la directive NIS 2. C’est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, même s’il partage l’objectif de sensibilisation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. J’ai écouté attentivement les arguments de M. le rapporteur et de Mme la ministre, auxquels je souscris volontiers.

L’essentiel est que nous ayons eu ce débat. Chacun est désormais sensibilisé aux règles qu’il faudra respecter.

Je retire donc mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 16 rectifié septies est retiré.

Je mets aux voix l’article 13.

(Larticle 13 est adopté.)

Article 13
Dossier législatif : projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité
Après l’article 14

Article 14

Les entités essentielles, les entités importantes, les administrations de l’État et leurs établissements publics administratifs qui exercent leurs activités dans les domaines de la sécurité publique, de la défense et de la sécurité nationale ainsi que de la répression pénale, les missions diplomatiques et consulaires françaises pour leurs réseaux et systèmes d’information, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives pour ses activités dans le domaine de la défense ainsi que les juridictions administratives et judiciaires prennent les mesures techniques, opérationnelles et organisationnelles appropriées et proportionnées pour gérer les risques qui menacent la sécurité des réseaux et des systèmes d’information qu’elles utilisent dans le cadre de leurs activités ou de la fourniture de leurs services, ainsi que pour éliminer ou réduire les conséquences que les incidents ont sur les destinataires de leurs services et sur d’autres services. Ces mesures garantissent, pour leurs réseaux et leurs systèmes d’information, un niveau de sécurité adapté et proportionné au risque existant. Elles visent à :

1° Prévoir que les organes de direction approuvent et supervisent les mesures de pilotage de la sécurité des réseaux et systèmes d’information, leurs membres ainsi que les personnes exposées aux risques devant être formés à la cybersécurité ;

2° Assurer la protection des réseaux et systèmes d’information, y compris en cas de recours à la sous-traitance ;

3° Mettre en place des outils et des procédures pour assurer la défense des réseaux et systèmes d’information et gérer les incidents ;

4° Garantir la résilience des activités.

Un décret en Conseil d’État fixe les objectifs auxquels doivent se conformer les personnes mentionnées au premier alinéa afin que les mesures adoptées pour la gestion des risques satisfassent aux 1° à 4°. Ce décret détermine également les conditions d’élaboration, de modification et de publication d’un référentiel d’exigences techniques et organisationnelles qui sont adaptées aux différentes personnes mentionnées au premier alinéa, en fonction de leur degré d’exposition aux risques, de leur taille, de la probabilité de survenance d’incidents et de leur gravité, y compris leurs conséquences économiques et sociales.

Ce référentiel peut prescrire le recours à des produits, des services ou des processus certifiés au titre du règlement (UE) n° 2019/881 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 relatif à l’ENISA (Agence de l’Union européenne pour la cybersécurité) et à la certification de cybersécurité des technologies de l’information et des communications, et abrogeant le règlement (UE) n° 526/2013.

Par dérogation aux sixième et septième alinéas du présent article, les fournisseurs de services de systèmes de noms de domaine, les offices d’enregistrement, les fournisseurs de services d’informatique en nuage, les fournisseurs de services de centres de données, les fournisseurs de réseaux de diffusion de contenu, les fournisseurs de services gérés, les fournisseurs de services de sécurité gérés, ainsi que les fournisseurs de places de marché en ligne, de moteurs de recherche en ligne et de plateformes de services de réseaux sociaux, et les prestataires de services de confiance mettent en œuvre les exigences techniques et méthodologiques qui leur sont propres.

Ces mesures techniques, opérationnelles et organisationnelles sont mises en œuvre aux frais des personnes concernées.

Mme la présidente. L’amendement n° 47, présenté par Mmes Linkenheld, Conway-Mouret et Blatrix Contat, M. Cardon, Mme Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1, après la deuxième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Pour l’évaluation de la proportionnalité de ces mesures, il est tenu compte du degré d’exposition de l’entité aux risques, de sa taille et de la probabilité de survenance d’incidents et de leur gravité, y compris leurs conséquences sociétales et économiques.

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. L’article 14 prévoit les mesures techniques, opérationnelles et organisationnelles appropriées et proportionnées que devront prendre les entités pour gérer les risques menaçant la sécurité des réseaux et des systèmes d’information et réduire les conséquences d’éventuels incidents.

Cet amendement, selon les termes de l’article 21 de la directive NIS 2, tend à préciser les critères d’évaluation de la proportionnalité des mesures en ajoutant qu’il sera tenu compte du degré d’exposition de l’entité aux risques, de sa taille et de la probabilité de survenance d’incidents et de leur gravité, y compris leurs conséquences sociales et économiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement est pleinement satisfait par la rédaction adoptée par la commission spéciale à l’alinéa 6.

La commission en demande donc le retrait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Le choix a été fait de transposer l’exigence en faisant peser sur l’Anssi l’évaluation de la proportionnalité des mesures. Cette position a le mérite de ne pas rendre l’entité seule responsable de l’évaluation de son risque, ce qui pourrait la placer en difficulté, en particulier lorsqu’il s’agit de petites entités.

Nous considérons que le texte actuel permet de répondre à votre demande, madame la sénatrice. Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 47.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 85 rectifié quater, présenté par MM. Bleunven, J.M. Arnaud, Cambier et Henno, Mme Jacquemet et MM. Lafon, Parigi et Pillefer, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigée :

lorsque celle-ci a une implication directe sur la sécurité des réseaux et systèmes d’information. Les rôles et les responsabilités de chacun sont précisés autant que de possible au préalable ;

La parole est à M. Paul Toussaint Parigi.

M. Paul Toussaint Parigi. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. La question de la sous-traitance est déterminante, car le recours à un sous-traitant qui serait mal protégé contre les menaces cyber peut constituer une vulnérabilité grave pour une entité.

Il était donc important de faire figurer cette notion à l’article 14 du projet de loi.

Je considère en revanche que les modalités précises de prise en compte de la sous-traitance, notamment les rôles et responsabilités de chacun, devront être détaillées dans le décret d’application de l’article 14 du projet de loi, ainsi que dans le référentiel préparé par l’Anssi.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. La sécurisation de la chaîne des sous-traitants est une priorité de la directive NIS 2. Je le rappelle, un nombre croissant d’attaques passe par ce vecteur.

La proposition de limiter la prise en compte des seuls sous-traitants ayant une implication directe sur la sécurité des réseaux et des systèmes d’information pourrait néanmoins conduire les entités à négliger un pan de leur chaîne de sous-traitance, ce qui augmenterait le risque de compromission par un acteur malveillant et de dégradation, voire d’interruption, de ses activités.

En sus, en l’absence de définition plus précise, la notion d’« implication directe » risquerait de complexifier la démarche de mise en conformité des entités et la mission de contrôle de l’Autorité.

Par ailleurs, l’adoption de cet amendement pourrait entraîner une mauvaise transposition de la directive. En effet, si son article 21 prévoit bien la prise en compte de cette chaîne de sous-traitance, elle ne restreint pas cette prise en compte aux seuls fournisseurs ayant une implication directe sur la sécurité des réseaux et des systèmes d’informatique.

Néanmoins, les entreprises de services numériques sont pour une grande partie soumises à la directive NIS 2. Ils devront donc de facto augmenter leur sécurité.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 85 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 24 rectifié est présenté par Mme M. Carrère, MM. Bilhac, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mmes Guillotin et Jouve, MM. Masset et Laouedj, Mme Pantel et M. Ruel.

L’amendement n° 69 est présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et leurs établissements publics administratifs visés aux articles 8 et 9 disposent d’un délai maximum de 5 ans pour se mettre en conformité avec le présent titre II.

La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 24 rectifié.

M. Bernard Fialaire. Nous partageons pleinement l’objectif de la directive européenne NIS 2 de renforcer la sécurité de nos systèmes d’information. Cependant, nous restons vigilants pour éviter toute forme de surtransposition, en particulier pour nos collectivités.

Nous le constatons tous ici : les plus petites collectivités manquent souvent de ressources techniques, humaines et financières pour transposer une directive aussi importante que complexe.

C’est pourquoi nous vous proposons, par cet amendement, d’étendre le délai d’application de mise en conformité à cinq ans. Ce temps permettra la mise en place de formations adaptées pour les élus, la structuration d’une filière cyber territorialisée et la mise en œuvre d’un accompagnement efficace de l’État.

Accorder ce temps d’adaptation, c’est préserver l’efficacité de la directive et favoriser la montée en compétences des collectivités sur ces sujets d’avenir.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 69.

M. Pierre Ouzoulias. M. Fialaire a très bien défendu mon amendement. Cependant, je souhaite m’exprimer plus largement sur l’article 14.

Le président Macron l’a affirmé : « Sur toutes nos politiques publiques, nous ne pouvons pas avoir les mêmes débats que naguère. » Après ces propos, le Président de la République a demandé au Premier ministre et à l’ensemble du Gouvernement, dont vous faites partie, madame la ministre, d’émettre des propositions pour décliner de façon plus aboutie une politique nationale à tous les échelons de notre pays.

La question qui se pose est donc celle de l’articulation entre un projet national de défense contre les attaques cyber et le rôle échu aux collectivités à cet égard.

Autrement dit, madame la ministre, des transferts de la compétence cyber de l’État vers les collectivités dans des proportions telles que celles que vous préconisez aujourd’hui vous semblent-ils pertinents ?

Il me semble indispensable d’avoir un débat de fond sur la capacité des petites communes à mettre en œuvre des dispositifs coûteux et complexes. Ne revient-il pas plutôt à l’État de leur proposer un cadre dans lequel inscrire leur action ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Je partage pleinement la volonté de la présidente Carrère, auteure de cet amendement, de laisser aux communes, à leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et à leurs établissements publics administratifs plusieurs années pour mettre en place de façon progressive les obligations en matière de cybersécurité qui sont prévues à l’article 14.

Dans cet esprit, j’ai d’ailleurs déposé un amendement portant article additionnel après l’article 37, que nous examinerons tout à l’heure, et qui tend à reporter au-delà d’un délai de trois ans la réalisation de contrôles et, a fortiori, l’application de sanctions au sens du chapitre 3 du titre II du projet de loi.

La fixation à cinq ans d’un délai de mise en conformité avec les dispositions du titre II dans son ensemble pose en revanche une difficulté.

En effet, l’enregistrement des entités prévu à l’article 12 devrait idéalement intervenir dans l’année suivant la promulgation de la loi. De même, la procédure de notification des incidents prévue à l’article 17 devra être rapidement mise en place.

Pour ces raisons, la commission spéciale demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Le Gouvernement a bien conscience de l’effort qui est demandé aux petites communes. Nous sommes à la tâche pour les accompagner et pour nous assurer que les obligations découlant de NIS 2 seront vues non pas comme une contrainte, mais bien comme un moyen pour elles de se mettre en sécurité et de rassurer leurs habitants.

Nous savons combien la marche est haute pour un certain nombre d’entités, et c’est pourquoi nous avons étudié toutes les pistes envisageables.

Le Conseil d’État nous a indiqué qu’il n’était pas possible d’inscrire dans la loi un délai de mise en conformité. Nous ne pourrons donc pas émettre un avis favorable sur ces amendements.

Toutefois, conscients des efforts financiers, humains, techniques et organisationnels qui sont attendus de la part de ces entités, ainsi que de l’effort d’accompagnement que nous devrons encore fournir pour leur permettre de se mettre en conformité, nous avons demandé à l’Anssi de travailler sur un délai de trois ans pendant lequel les contrôles se feraient uniquement à blanc, avec une visée pédagogique, éducative et d’accompagnement. Il s’agit, nous semble-t-il, de la meilleure façon de procéder.

Nous veillerons par ailleurs à ce que la stratégie nationale en matière de cybersécurité, dont nous avons longuement parlé hier soir, inclue un plan consacré aux collectivités.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour explication de vote.

M. Bernard Fialaire. Je prends acte des engagements de l’État : accompagner les collectivités pendant trois ans, faire preuve de bienveillance et, surtout, apporter aux communes le soutien technique nécessaire.

Dans ce contexte et compte tenu de votre promesse, madame la ministre, nous retirons notre amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 24 rectifié est retiré.

La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, j’attendais de vous une réponse plus politique ; or vous nous faites une réponse technique, que j’entends, mais qui n’est pas nécessairement satisfaisante.

Ma crainte, lorsque je repense aux propos du Président de la République, est que cet article 14 soit déjà complètement obsolète, compte tenu de la menace qui est désormais identifiée.

Dès lors, comment voyez-vous l’interaction entre, d’une part, une politique nationale qui demande à être retravaillée dans une perspective bien plus offensive et ambitieuse et, d’autre part, ce que pourraient être les politiques des collectivités ?

Une réflexion de fond s’impose. Nous pouvons voter l’article 14, mais nous savons déjà qu’il ne suffira pas : il faut passer à un stade supérieur de défense.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 69.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 37, présenté par Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, M. Cardon, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

, et les modalités de concertation des représentants des entités concernées et des associations d’élus

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. Nos travaux en commission ont permis de préciser qu’un décret déterminera les conditions d’élaboration, de modification et de publication du référentiel d’exigences techniques et organisationnelles.

Il est prévu – je vous accorde, monsieur le rapporteur Chaize, que j’ai présenté précédemment un amendement qui est déjà satisfait – que ce décret soit adapté aux différentes entités, en fonction notamment de leur degré d’exposition.

Au travers de cet amendement, nous proposons de préciser que ce décret intègre également les modalités de concertation avec les représentants des entités privées ou publiques, y compris avec les associations d’élus. Cela a été dit au cours de nos débats, mais même si cela va sans dire, cela va toujours mieux en l’écrivant.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Les représentants des entités concernées et des associations d’élus sont déjà étroitement associés aux travaux de l’Anssi, notamment à l’élaboration du référentiel.

Cet amendement nous paraissant quelque peu superfétatoire, la commission y est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. En effet, l’Anssi a déjà choisi un fonctionnement fondé sur la concertation pour avancer dans l’élaboration de ce texte. Toutefois, ces consultations nous semblent les bienvenues et leur mention serait utile.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Monsieur le rapporteur, permettez-moi de revenir sur l’objet de cet amendement : il s’agit non pas de prévoir la participation des associations d’élus aux travaux qui sont menés par l’Anssi, mais de préciser dans le décret les modalités de concertation en général – il est vrai que la concertation a lieu –, y compris avec les associations d’élus.

Madame la ministre, j’ai compris que vous souscriviez à cette demande de précision et je vous en remercie.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Chaize, rapporteur. Compte tenu de ces explications, je reviens sur ma position et j’émets, à titre personnel, un avis de sagesse. (Très bien ! sur des travées du groupe SER.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 37.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 94, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Après les mots :

du présent article,

insérer les mots :

lorsqu’ils sont des entités importantes ou essentielles,

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Cet amendement vise à circonscrire le champ des opérateurs du numérique aux seuls opérateurs qui relèvent de NIS 2.

Il s’agit d’éviter la surtransposition de la directive, selon un principe qui nous guide constamment dans l’application de ce texte : la simplification.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Il s’agit d’une précision utile permettant d’éviter une surtransposition. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 94.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 14, modifié.

(Larticle 14 est adopté.)

Article 14
Dossier législatif : projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité
Article 15

Après l’article 14

Mme la présidente. L’amendement n° 67, présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Les entités mentionnées au titre II de la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité recourent en priorité, pour l’externalisation de services de technologies de l’information et de la communication, à des prestataires remplissant les conditions suivantes :

1° Être titulaire d’un label de conformité délivré par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information ;

2° Être assujetti en France à l’impôt sur les sociétés au sens de l’article 209 du code général des impôts, sauf lorsque la prestation est assurée par un opérateur interne appartenant au même groupe que l’entité requérante ;

II. – À titre dérogatoire, lorsqu’aucun prestataire ne satisfait pour le service recherché aux critères mentionnés au I, l’entité concernée peut recourir à un autre prestataire, sous réserve de l’obtention d’une autorisation expresse de l’Autorité de contrôle compétente et après démonstration documentée de l’absence d’offre disponible répondant aux critères susmentionnés.

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, n’ayant pas obtenu hier de votre part les réponses attendues, je me permets de relancer le débat : nous avons perdu énormément de compétences – ce constat est largement admis – dans le domaine de l’autonomie technologique pour lutter contre les attaques cyber. Il nous faut absolument – c’est fondamental – reconstruire notre souveraineté en la matière.

Le président Macron l’a dit : nous sommes en guerre. Et nous sommes en guerre sur tous les aspects, y compris celui tout à fait essentiel dont nous parlons ce soir.

Le Gouvernement doit changer radicalement de doctrine. Il faudrait que vous nous disiez comment, dans les prochains mois – c’est la demande du Président de la République –, nous pourrons engager une nouvelle politique afin d’assurer notre souveraineté dans le domaine du numérique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement, qui tend à introduire un principe de préférence pour les entreprises de cybersécurité françaises, ne me paraît pas compatible avec les dispositions de l’article 56 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, qui garantit la libre prestation de services.

Il laisse certes la possibilité, pour une entité régulée, de recourir à une entreprise de cybersécurité établie dans un autre État membre, mais dans des conditions extrêmement restrictives et sous réserve d’un processus bureaucratique qui viendrait surcharger l’Anssi.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, je vous remercie de souligner que le Président de la République tient depuis 2017 un discours sur la nécessité de renforcer notre souveraineté dans le domaine numérique et technologique.

Nous sommes à un moment charnière et nous en parlions hier : cette voix est aujourd’hui, semble-t-il plus que jamais, entendue à l’échelle européenne, et c’est une bonne chose.

Je vous rejoins sur ce point : pour assurer notre souveraineté numérique et notre sécurité, nous avons besoin de créer des géants technologiques.

Si nous sommes défavorables, pour les raisons que vient d’exposer le rapporteur Chaize, à votre proposition de créer un label pour les prestataires de services, je tiens à vous rassurer : les discussions que nous menons ici sont aussi celles que nous avons à l’échelle de l’Union européenne.

Ainsi, j’étais à Varsovie la semaine dernière avec mes vingt-sept homologues. L’Agence européenne pour la cybersécurité (Enisa) y a indiqué qu’elle étudiait des pistes de labellisation de solutions européennes. Dans le cadre du grand plan de réarmement qui est en cours, nous devons nous donner les moyens de favoriser le développement de notre écosystème européen de solutions cyber.

Au-delà du label, nous sommes convaincus que la montée en puissance de cet écosystème passe par la mobilisation de chacun. Les Campus Cyber, par exemple, sont un atout formidable pour accompagner les solutions sur l’ensemble du territoire.

Nous avons besoin de la mobilisation de l’Anssi pour lister ces solutions et les mettre en relation avec les entreprises et collectivités qui seront assujetties à NIS 2. Soyez assurés que j’y veille. Ce texte marche sur deux jambes : une jambe réglementaire et une jambe industrielle. Nous mettrons tout notre poids dans la balance pour que l’industrie cyber en profite.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, j’entends bien que le Président de la République nous parle de ce dossier depuis 2017, mais concrètement, qu’a fait la France dans ce domaine ?

Personnellement, je trouve que nous avons perdu du terrain. Vous n’avez pas répondu, hier, aux questions de mon collègue Fabien Gay à propos d’Atos. Cet exemple illustre malheureusement notre échec.

Plus que de solutions techniques ou technologiques, nous avons besoin d’une politique de souveraineté nationale dirigée par la France. Que cette politique se mène en collaboration avec les autres pays européens ne me pose aucun problème, mais il faut changer d’échelle, et surtout de projet politique.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 67.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 14
Dossier législatif : projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité
Article 16

Article 15

Les personnes mentionnées à l’article 14 qui mettent en œuvre les exigences du référentiel mentionné au sixième alinéa du même article 14 ou qui mettent en œuvre tout autre référentiel reconnu comme équivalent par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information, peuvent s’en prévaloir auprès de celle-ci lors d’un contrôle pour démontrer le respect des objectifs mentionnés au même sixième alinéa.

Dans le cas contraire, ces personnes sont tenues de démontrer que les mesures qu’elles mettent en œuvre permettent de se conformer à ces objectifs.

Mme la présidente. L’amendement n° 100, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par les mots :

, le cas échéant, au moyen d’un label de confiance approuvé par l’Autorité nationale de sécurité des systèmes d’information

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Cet amendement vise à permettre aux entités concernées par l’article 14 de démontrer plus facilement, au moyen d’un label de confiance, que les mesures qu’elles mettent en œuvre sont conformes aux nouvelles exigences.

Par la lisibilité qu’elle apporte sur le niveau de sécurité, la labellisation est un outil qui incite les entités à élever leur niveau de sécurité.

Nous avons déjà dit que la cybersécurité pouvait être valorisée en tant qu’atout concurrentiel.

Certes, une entité soumise à la directive NIS 2 peut voir comme des contraintes les obligations qu’elle impose, ainsi que les normes à respecter et les coûts de mise en conformité, lesquels, rappelons-le, restent bien moindres que ceux qui sont induits par une cyberattaque.

Il nous semble toutefois nécessaire d’aller plus loin. Une collectivité ou une entreprise assujettie à NIS 2 doit pouvoir valoriser, auprès de ses clients, de son prestataire d’assurance ou encore des banques, le fait d’avoir relevé son niveau d’exigence en matière de cybersécurité. Elle doit pouvoir en faire un véritable atout concurrentiel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. La commission spéciale est très favorable à cet amendement. La création d’un label de confiance était en effet une demande forte qu’elle avait formulée au Gouvernement. Je remercie donc ce dernier d’avoir travaillé sur cette question.

Au-delà des contraintes que représentent les contrôles ou les sanctions auxquels seront soumises les entreprises et les administrations publiques, il faut mettre en place des outils incitatifs : le fait de se conformer au référentiel cyber prévu dans le présent projet de loi doit constituer un réel atout auprès des banques, des assurances ou des clients d’une entité.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 100.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 15, modifié.

(Larticle 15 est adopté.)

Article 15
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Après l’article 16

Article 16

Les opérateurs mentionnés à l’article L. 1332-2 du code de la défense identifient, tiennent à jour et communiquent à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information la liste de leurs systèmes d’information d’importance vitale mentionnés au 2° de l’article L. 1332-1 du même code selon des modalités fixées par le Premier ministre.

Ces opérateurs mettent en œuvre sur leurs systèmes d’information d’importance vitale les exigences du référentiel mentionné à l’article 14 de la présente loi ainsi que les exigences spécifiques à ces systèmes d’information fixées par le Premier ministre.

Les administrations qui sont entités essentielles ou importantes ainsi que les administrations de l’État et leurs établissements publics administratifs qui exercent leurs activités dans les domaines de la sécurité publique, de la défense et de la sécurité nationale, de la répression pénale, ou des missions diplomatiques et consulaires françaises pour leurs réseaux et systèmes d’information, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives pour ses activités dans le domaine de la défense ainsi que les juridictions administratives et judiciaires mettent en œuvre les exigences du référentiel mentionné au même article 14 ainsi que les exigences spécifiques fixées par le Premier ministre à l’égard des systèmes d’information permettant des échanges d’informations par voie électronique avec le public et d’autres administrations.

Les exigences spécifiques mentionnées aux premier à troisième alinéas du présent article peuvent prescrire le recours à des dispositifs matériels ou logiciels ou à des prestataires de services certifiés, qualifiés ou agréés ou prévoir que le recours à des dispositifs matériels ou logiciels ou à des prestataires de services certifiés, qualifiés ou agréés emporte présomption de conformité à l’exigence de sécurité concernée. Ces exigences peuvent également prescrire des audits de sécurité réguliers réalisés par des organismes indépendants. Les personnes mentionnées au présent article appliquent ces exigences à leurs frais.

Mme la présidente. L’amendement n° 66, présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les services de l’État, administrations, établissements publics et entreprises du secteur public, les collectivités territoriales et leurs établissements publics utilisent des logiciels libres et des formats ouverts lors du développement, de l’achat ou de l’utilisation d’un système informatique. L’utilisation de solutions propriétaires doit être une exception motivée.

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Cet amendement porte sur la question fondamentale des logiciels libres.

Nous faisons mine de découvrir que lorsque nos « amis américains » livrent des armements à l’Ukraine, par exemple des avions de chasse, ils gardent la possibilité de désactiver à distance un certain nombre de systèmes d’armes.

Il en va rigoureusement de même pour les logiciels : lorsque nous achetons des logiciels à l’étranger, il est parfaitement possible que, dans leurs algorithmes internes, des dispositifs cachés permettent, à un moment donné, de les bloquer à distance.

Les logiciels libres, dont le code source et les algorithmes sont publics, sont sans doute un élément de notre souveraineté nationale. Il faut donc encourager les administrations – elles le font déjà beaucoup –, à les utiliser. C’est fondamental.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. S’il peut être intéressant d’inciter les administrations publiques à recourir à des logiciels libres, il paraît difficile de les y contraindre. Elles doivent pouvoir s’équiper selon leurs besoins, dans le respect des règles qui régissent la commande publique.

La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Je tiens avant tout à rappeler ici mon attachement aux logiciels libres.

Nous l’avons montré, me semble-t-il, lors du Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle : la France porte une voix ambitieuse pour le logiciel libre. Elle a réussi à rassembler plus de soixante pays pour créer une fondation visant à soutenir le développement de l’intelligence artificielle libre.

Cependant, monsieur le sénateur, vous évoquiez notre souveraineté. À cet égard, il faut absolument éviter de mettre de côté les logiciels propriétaires français et européens, qui revêtent également une dimension souveraine et peuvent constituer des solutions pour nos administrations.

Notre politique industrielle vise aussi, et avant tout, à faire éclore un marché. N’ayons pas honte, dans cet objectif de souveraineté industrielle, de faire travailler ensemble nos administrations et sociétés françaises, bien au contraire.

Le logiciel libre ne peut pas être la seule voie possible pour nos administrations. C’est pourquoi je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Je soutiens l’amendement de mon collègue Ouzoulias.

Vous nous dites que le logiciel libre serait imposé aux collectivités. J’y vois plutôt un renversement de logique : il deviendrait la norme, quand le recours aux logiciels propriétaires devrait être motivé.

Il s’agit ici de faire évoluer et de fiabiliser davantage l’écosystème numérique de nos collectivités. Or, dans cette perspective, le logiciel libre est un atout.

Il existe tout un tissu économique fondé sur le logiciel libre. Aussi, je ne vois pas l’opposition qu’il pourrait y avoir entre, d’un côté, une branche commerciale et, de l’autre une branche qui serait gratuite. Dans l’écosystème du logiciel libre, tout n’est pas gratuit.

Cet amendement pourrait contribuer à renverser les a priori sur la différence entre les logiciels libres et les logiciels propriétaires. Ses dispositions ne sont pas contraignantes. En revanche, elles renverseraient la logique. Cela serait utile, selon moi, pour nos collectivités.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 66.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 16.

(Larticle 16 est adopté.)

Article 16
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Article 17

Après l’article 16

Mme la présidente. L’amendement n° 1 rectifié quinquies, présenté par MM. Cadic et Canévet, Mme Morin-Desailly, MM. Haye et L. Hervé, Mmes Loisier, Housseau, Florennes, Sollogoub, Jacquemet, de La Provôté, Saint-Pé, Patru, Evren, Perrot et Billon, M. Kern, Mme Gacquerre, M. Milon, Mme Joseph, MM. Mellouli et Michallet, Mme Briante Guillemont et MM. Chasseing et Dossus, est ainsi libellé :

Après l’article 16

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il ne peut être imposé aux fournisseurs de services de chiffrement, y compris aux prestataires de services de confiance qualifiés, l’intégration de dispositifs techniques visant à affaiblir volontairement la sécurité des systèmes d’information et des communications électroniques tels que des clés de déchiffrement maîtresses ou tout autre mécanisme permettant un accès non consenti aux données protégées.

La parole est à M. Olivier Cadic.

M. Olivier Cadic. Cet amendement tend à ne pas imposer aux fournisseurs de services de chiffrement l’intégration de dispositifs techniques visant à affaiblir volontairement la sécurité de leur système.

En effet, certaines initiatives législatives et réglementaires récentes ont cherché à imposer à ces fournisseurs l’intégration de portes dérobées (backdoors), de clés de déchiffrement maîtresses ou autres mécanismes, dont le seul but est de créer des failles exploitables par nos autorités comme techniques de surveillance.

Ces backdoors sont des cadeaux faits aux acteurs malveillants – cybercriminels, États hostiles, entités privées –, comme le démontre le cas Salt Typhoon, des cybercriminels chinois ayant exploité des vulnérabilités imposées aux acteurs de la « Tech US » par le législateur américain.

En outre, fragiliser la sécurité des solutions de chiffrement françaises et européennes nuirait à notre compétitivité face aux acteurs internationaux qui, eux, ne seraient pas nécessairement soumis aux mêmes contraintes.

Ce projet de loi prévoit une hausse drastique des normes de cybersécurité. Où serait la cohérence si nous acceptions, dans le même texte, de créer sciemment des failles de sécurité ? Cela irait, en outre, à l’encontre des principes de sécurité reconnus à l’échelon international et imposés par la directive NIS 2.

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui doit empêcher une telle possibilité. Nous devons respecter les principes fondateurs du règlement général sur la protection des données (RGPD), protéger le droit à la vie privée et à la protection des données personnelles.

Le chiffrement garantit une confidentialité absolue des échanges et des transactions numériques. Cet amendement a reçu un fort soutien de la part de l’écosystème cyber. Il vise à inscrire dans la loi un principe clair de sécurité numérique.

Madame la ministre, comme je l’ai évoqué lors de la discussion générale, votre avis sur le sujet sera suivi de très près.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur une disposition votée voilà tout juste quelques semaines par le Sénat lors de l’examen de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic.

Il s’agissait de renforcer la lutte contre les réseaux de narcotrafic, les groupes terroristes et, au-delà, contre toutes les organisations criminelles qui tirent profit de la généralisation des messageries chiffrées et des difficultés, pour les services de renseignement, à accéder aux informations qui sont échangées sur ces plateformes.

Par cohérence avec les travaux du Sénat, je suis donc défavorable à cet amendement. La commission spéciale étant néanmoins divisée sur ce sujet sensible (Mme Audrey Linkenheld sexclame.), nous avons choisi collectivement de solliciter l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Le présent amendement tend à prévoir une forme de sanctuarisation du chiffrement dans la loi.

Le sujet est complexe et mérite que nous nous y arrêtions quelques instants. Il a d’ailleurs suscité de nombreuses discussions dans cet hémicycle comme au sein de votre commission.

Personne ne comprend mieux que moi l’intention qui sous-tend cet amendement. J’ai déjà eu l’occasion de rappeler mon attachement à la préservation d’un niveau élevé de chiffrement, qui est au cœur de notre confiance numérique.

S’il est légitime que les autorités puissent, conformément à la doctrine nationale sur le chiffrement, obtenir, sous le contrôle d’un juge ou d’une autorité indépendante, un accès ciblé aux données, y compris aux données chiffrées, il importe qu’un tel accès n’aboutisse pas à un affaiblissement généralisé du chiffrement.

Ce préalable étant posé, je suggérerai néanmoins à M. Cadic de retirer son amendement, et ce pour deux raisons.

D’une part, le chiffrement des communications, en ce qu’il concourt à la protection du secret des correspondances et de la vie privée, principe à valeur constitutionnelle, bénéficie déjà d’une première protection.

D’autre part, il faut éviter les effets de bord, dans un sens comme dans l’autre. Certes, il y a des cas légitimes dans lesquels un accès ciblé et proportionné aux communications peut être nécessaire. Ainsi, nous comprenons bien – vous avez cité la disposition que vous avez adoptée récemment – que la question se pose dans le cadre de la lutte contre le narcotrafic, mais aussi contre le terrorisme ou d’autres fléaux contre lesquels nous sommes mobilisés.

Monsieur le sénateur Cadic, votre amendement pourrait toutefois avoir, me semble-t-il, une portée trop large et donner lieu, lui aussi, à des effets de bord. Si j’émets un avis défavorable sur votre amendement, cela ne m’empêchera pas de porter une vigilance extrême à l’égard de toute disposition qui viendrait affaiblir le chiffrement des données.

Mme la présidente. La parole est à M. Cédric Perrin, pour explication de vote.

M. Cédric Perrin. Nous avons en effet adopté cette disposition particulière lors de l’examen de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic.

Notre objectif est, je le rappelle, de trouver un équilibre entre, d’une part, le strict respect des libertés publiques et, d’autre part, la possibilité pour l’État de se défendre à armes égales contre celles et ceux qui veulent développer des réseaux de narcotrafic ou de criminalité organisée et qui, connaissant parfaitement la possibilité, pour les services de renseignement d’utiliser les emails et les SMS, délaissent ces outils au profit de messageries cryptées comme WhatsApp, Signal ou encore Telegram.

L’amendement que nous avons adopté avait pour objet de permettre aux services de renseignement, sous le strict contrôle du groupement interministériel de contrôle (GIC), de celui de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) et après avis du cabinet du Premier ministre, de trouver des solutions techniques afin de déchiffrer les communications sur ces messageries.

En aucune manière, et contrairement à ce qui est dit dans la presse ou à ce que prétendent les entreprises du numérique – elles se sont livrées, évidemment, à du lobbying auprès d’un certain nombre de nos collègues –, il ne créait de porte dérobée ou de dispositif d’intrusion nouveau.

Je rappelle que ces méthodes sont développées par des organismes comme la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) ou le Government Communications Headquarters (GCHQ) en Grande-Bretagne.

L’idée est de pouvoir, grâce à des solutions techniques, accéder au contenu de communications chiffrées. Pour ce faire, il faut imposer aux plateformes d’implémenter dans leurs applications des fonctionnalités permettant, le cas échéant, sur réquisition, d’ajouter un interlocuteur invisible aux conversations de manière à pouvoir écouter certaines personnes.

Il n’est donc ici nullement question de backdoor ou de porte dérobée. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie sexclame.)

Personnellement, je suis très défavorable à l’amendement n° 1 rectifié quinquies. À un moment donné, nous devons nous donner les moyens de lutter contre les fléaux qui nous entourent.

On ne peut pas demander aux services de se battre avec un pistolet à billes contre des personnes équipées de kalachnikovs, voire de lance-roquettes.

Mme la présidente. La parole est à M. Hugues Saury, pour explication de vote.

M. Hugues Saury. Je comprends parfaitement la nécessité de respecter dans de nombreux domaines le chiffrement des données de certaines conversations.

Toutefois, il existe aussi des impératifs concernant les intérêts fondamentaux de la Nation, notamment sa sécurité.

Les évolutions proposées à l’article L. 871-1 du code de la sécurité intérieure consistent à substituer à l’obligation pour les messageries chiffrées de transmettre des conventions de déchiffrement une obligation de mettre en œuvre les mesures techniques nécessaires afin de permettre aux services de renseignement d’accéder au contenu intelligible des correspondances et aux données qui y transitent.

Cet accès est limité aux seules correspondances et aux données ayant fait l’objet d’une autorisation spécifique de mise en œuvre des techniques de recueil de renseignements, après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement.

Ces méthodes, à l’instar des interceptions légales, sont à distinguer des portes dérobées ou backdoors, que dénoncent les auteurs de l’amendement n° 1 rectifié quinquies.

Il s’agit au contraire de procédés connus, dont la sécurité repose non pas sur la dissimulation, mais sur des fondamentaux cryptographiques solides. Ils sont conçus afin de restreindre l’accès aux données aux seules personnes autorisées.

Il faut avoir conscience que, s’il était adopté, cet amendement viendrait diminuer considérablement les possibilités nouvellement offertes aux services de renseignement. Pour ma part, je ne le voterai pas.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Ce que vous dites est assez paradoxal : si le dispositif que vous décrivez n’est pas une backdoor, alors nous pouvons voter cet amendement puisqu’il ne vise nullement à remettre en question une backdoor que vous auriez prévue dans la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic.

Monsieur Perrin, je suis désolé : le système que vous avez décrit – une feature qui permettrait, sur n’importe quelle application, d’avoir accès à des conversations sur réquisition – est bel et bien une backdoor. Et dire qu’elle serait purement circonscrite à l’usage des pouvoirs publics est une chimère.

Intégrer dans les applications de messagerie des dispositifs permettant d’accéder aux conversations, c’est affaiblir l’ensemble de notre écosystème de cybersécurité.

Nous utilisons tous aujourd’hui des messageries cryptées. En intégrant ce genre de dispositif, vous nous affaiblissez tous. Le chiffrement est la pierre angulaire de la cybersécurité.

Cet amendement a donc pleinement sa place dans ce texte relatif au renforcement de la cybersécurité. Il en est même le cœur, à mon avis. Sa portée est bien plus large que celle de la disposition qui a été adoptée lors de l’examen la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic.

De nos jours, nous avons besoin de nous protéger face à l’affaiblissement du chiffrement. C’est d’ailleurs l’Anssi qui le dit. Celle-ci estime en effet qu’imposer un affaiblissement généralisé des moyens cryptographiques, comme vous avez souhaité le faire dans la proposition de loi sur le narcotrafic, « serait attentatoire à la sécurité numérique et aux libertés de l’immense majorité des utilisateurs respectueux des règles, tout en étant rapidement inefficace vis-à-vis de la minorité ciblée ».

Pour ma part, je me réfère aux référentiels de l’Anssi. Si nous voulons nous protéger contre un affaiblissement de la cybersécurité, nous devons voter cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Je tiens à faire part de mon désarroi. Je comprends tout à fait le sens de l’amendement déposé par notre collègue Cadic, et je le voterai.

En tant que sénateur, j’ai reçu, comme vous, mes chers collègues, des consignes strictes pour que mes données soient déposées sur certains portails sécurisés et cryptées. Je devais veiller à ce qu’elles ne soient pas accessibles à des tiers. Il s’agissait d’un enjeu de sécurité nationale.

Toutes nos données, bien évidemment, sont accessibles de l’extérieur, et il est tout à fait normal que les parlementaires les protègent. J’ai donc suivi les consignes. Mais les seuls hébergeurs qui nous garantissent que la totalité de nos données sont cryptées et protégées sont en Suisse !

Les injonctions des services de renseignement français nous obligent à héberger nos données là-bas. Est-ce ainsi que l’on compte protéger la souveraineté nationale ?

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour explication de vote.

M. Jean-Raymond Hugonet. Je l’avoue, je trouve ce débat quelque peu surréaliste. Je comprends, bien évidemment, le besoin de protection. L’espace numérique ne doit pas être une grande foire à tout !

Bien sûr, nous ne voterons pas cet amendement, mais chacun doit bien comprendre de quoi il s’agit. Il n’y a pas si longtemps, nous avons adopté des dispositions permettant aux ministères de l’intérieur et de la justice d’aller plus loin dans la lutte contre les trafics et de faire face à de véritables fléaux.

Le but n’est bien évidemment pas de remettre en cause la protection des données numériques de chacun.

M. Thomas Dossus. C’est pourtant le risque !

M. Jean-Raymond Hugonet. J’entends vos préoccupations, mais ces dispositions ne visent pas, j’y insiste, à transformer l’espace numérique en une grande foire à tout !

M. Jean-Raymond Hugonet. Il ne s’agit nullement de mettre sur la place publique toutes les données, comme vous essayez de nous le faire croire !

M. Thomas Dossus. Bien sûr que si !

M. Jean-Raymond Hugonet. Tel n’est pas du tout l’objectif. Nous entendons simplement répondre à un besoin fondamental pour le pays.

Je le répète, j’ai du mal à comprendre ce débat, mes chers collègues. Il me semble vraiment surréaliste, parce que nos services ont un besoin impératif des facultés nouvelles que nous leur avons octroyées. Mais si vous préférez laisser prospérer le narcotrafic et les trafics en tout genre dans notre pays – peut-être est-ce le souhait de certains –, allons-y, votons cet amendement !

M. Pierre Ouzoulias. Ce n’est pas la question !

M. Jean-Raymond Hugonet. Si, car chacun sait bien ce que ces trafics financent… Sincèrement, je vous garantis que je ne comprends pas ce débat : il faut se pincer pour y croire.

Bien évidemment, nous voterons contre cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. La question n’est pas de savoir si l’on veut lutter ou non contre le narcotrafic. Ce combat s’impose comme une évidence, de même que celui contre la cyberpédopornographie ou contre le terrorisme.

La question est de savoir si les mesures prises seront efficaces et si elles n’auront pas des conséquences délétères.

Je veux y insister, les grands spécialistes en matière de cryptologie – je pense à Guillaume Poupard, ancien président de l’Anssi, aux membres de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), ou encore à Bruce Schneier – nous alertent sur l’immense régression que constituerait, pour la sécurité des communications, l’introduction de portes dérobées dans les messageries.

M. Pierre Ouzoulias. Tout à fait !

Mme Catherine Morin-Desailly. Quelles que soient leurs modalités de mise en œuvre par les acteurs concernés, ces mesures auraient en substance les mêmes résultats.

Elles aboutiraient à un affaiblissement généralisé de la sécurité des communications, avec plusieurs effets tout à fait fâcheux : une dégradation de nos droits et libertés fondamentaux, notamment du droit au secret des communications et de la liberté d’expression ; une exposition accrue de tous les Français à un espionnage massif de la part d’États étrangers, qui n’auront aucune difficulté à exploiter ces vulnérabilités – on connaît leurs capacités, car ils nous espionnent déjà ; une exposition accrue de nos décideurs politiques et industriels à un espionnage ciblé ; une perte de confiance dans l’économie numérique, bien sûr ; enfin, une dégradation de l’image de la France sur la scène internationale, alors que nous cherchons justement à attirer des acteurs innovants.

Cependant, le plus grave, c’est que l’efficacité de ce dispositif pour lutter contre la criminalité organisée est sujette à caution. En réalité, on peut s’attendre à ce que cette criminalité trouve les moyens de contourner les nouvelles possibilités de déchiffrement en recourant à des moyens de communication alternatifs chiffrés, qui seront inévitablement disponibles, ou alors en chiffrant le message communiqué à l’intérieur d’une communication elle-même non chiffrée.

Il n’existe par ailleurs, mes chers collègues, aucune étude d’impact ni justification étayée de l’utilité de cette mesure. Un groupe de travail européen travaille actuellement sur cette question. Dans son rapport de décembre 2024, ses membres admettaient que leur réflexion était toujours en cours sur ce point. À tout le moins, attendons leurs conclusions.

Je pense donc que, dans l’immédiat, nous devons soutenir cet amendement.

M. Cédric Perrin. Mais vous avez voté cette mesure il y a un mois !

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.

Mme Corinne Narassiguin. Je veux remercier le sénateur Cadic d’avoir déposé cet amendement. Le groupe socialiste le votera, parce que, comme cela a déjà dit à plusieurs reprises, la disposition introduite en quelque sorte à la dernière minute, en séance, lors de l’examen de la proposition de loi sur le narcotrafic ne constituait clairement pas le bon véhicule pour traiter des questions relatives à la cryptographie, aux modalités d’accès à ces messageries, ou encore à la création de portes dérobées. (Mme Catherine Morin-Desailly et M. Olivier Cadic approuvent.)

Il se trouve que, dans une vie professionnelle antérieure, j’ai été spécialiste des questions de sécurité des systèmes d’information. Je pense donc pouvoir dire avec assez d’assurance qu’il n’existe pas de système de porte dérobée qui ne puisse être exploité par d’autres que ceux qui l’ont mis en place.

Bien entendu, nous voulons tous donner à nos services de renseignement la capacité de lutter contre le narcotrafic ou contre les usages criminels des messageries cryptées. Mais cela ne peut pas se faire au prix d’un affaiblissement général de la sécurité de nos messageries. C’est un point important.

Le sénateur Dossus l’a très bien dit : si le système dont on dote nos services de renseignement est parfaitement sécurisé, alors il ne sera pas concerné par cet amendement.

L’enjeu est bien d’assurer la cybersécurité de nos systèmes en général. C’est pour cette raison que nous voterons cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.

M. Loïc Hervé. Les arguments avancés par notre collègue Jean-Raymond Hugonet me poussent à intervenir dans ce débat.

Je suis un peu gêné : chaque fois que l’on évoque, dans cet hémicycle, la question de la protection de la vie privée et des libertés publiques, chaque fois que nous rappelons la nécessité de respecter certains principes, on nous accuse d’une forme de complicité avec tous les maux de la société.

Ce type de raisonnement pose un problème fondamental quant à la manière dont nous légiférons. Pendant dix ans, j’ai représenté la Haute Assemblée au sein de la Cnil. (MM. Cédric Perrin et Jean-Raymond Hugonet sexclament.)

Je vous vois lever les yeux au ciel, mes chers collègues. Vous en avez le droit, mais j’ai aussi celui d’évoquer cette expérience ! Cette fonction est désormais exercée par Mme Catherine Morin-Desailly et M. Jérôme Durain.

L’attachement aux libertés publiques devrait constituer le socle commun de nos discussions. L’atteinte à ces libertés doit être l’exception. Tel est le fondement d’une démocratie libérale.

Or nous sommes en train de faire l’inverse ! C’est notre rôle au Sénat, en tant qu’avocats des libertés, de rappeler ces droits fondamentaux lorsque nous légiférons. Cela ne fait pas de nous des défenseurs du crime !

Je voterai évidemment l’amendement de M. Cadic. Dans la période que nous traversons, il est toujours utile de rappeler les principes fondamentaux – c’est d’ailleurs ce que j’ai fait aussi à des moments plus difficiles, comme pendant la crise du covid-19, lors de l’examen des textes dont j’étais rapporteur, à l’époque, pour la commission des lois.

Je vous remercie, madame la ministre, de vos arguments, qui sont très importants, et de votre vigilance sur ces sujets : celle-ci est essentielle dans les temps que nous vivons.

Mme la présidente. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour explication de vote.

M. Mathieu Darnaud. Je veux revenir quelques instants sur les arguments qui viennent d’être avancés par le président Hervé. Celui-ci, finalement, détourne complètement la discussion de son sujet originel.

Nul ici ne peut être suspecté de ne pas défendre pied à pied les libertés publiques. (M. Thomas Dossus sexclame.) Mais c’est une drôle de façon de légiférer que de voter une disposition et, un mois plus tard, à l’occasion de l’examen d’un texte qui porte sur un autre sujet, de la détricoter insidieusement !

M. Thomas Dossus. C’est ce que vous faites avec le zéro artificialisation nette (ZAN) !

M. Mathieu Darnaud. Monsieur Dossus, je trouve que c’est là une curieuse manière de procéder, alors qu’il me semblait que, pour votre groupe également, la question de la lutte contre le narcotrafic constituait une priorité.

Mme la présidente. La parole est à M. Damien Michallet, pour explication de vote.

M. Damien Michallet. Monsieur Hervé, vous avez remercié Mme la ministre de ses propos. Or je vous rappelle que celle-ci a demandé le retrait de l’amendement… J’en déduis que nous nous sommes sans doute mal compris et que nous sommes d’accord sur le fond. J’en conclus aussi, mais peut-être prématurément, que le sénateur Cadic retirera son amendement ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Notre débat n’est peut-être pas tout à fait à la hauteur de l’enjeu. Il s’agit ici de donner la possibilité à nos services de sécurité de tracer les narcotrafiquants et les narcoterroristes qui utilisent des messageries cryptées. Tel est bien le sujet.

Lorsque nous voterons cet amendement, nous répondrons en fait à cette question : avons-nous, oui ou non, envie de laisser la situation actuelle perdurer ? Comptons-nous, ou non, confirmer le dispositif que nous avons adopté voilà un mois ?

Mme la présidente. La parole est à M. Akli Mellouli, pour explication de vote.

M. Akli Mellouli. Je suis très heureux d’entendre qu’une loi votée doit être intangible et que l’on ne doit plus la modifier ! Alors pourquoi réécrit-on des lois ? Pourquoi, en particulier, souhaitez-vous revenir sur le ZAN ? Après tout, on s’enrichit au cours des débats que nous avons et nos positions peuvent évoluer…

Le dispositif que vous évoquez a été retoqué à l’Assemblée nationale, pour des raisons que je ne réexposerai pas ici.

Vous affirmez, monsieur Michallet, qu’il faut retirer cet amendement, puisque tel est l’avis du Gouvernement. Devrons-nous donc alors, chaque fois que le Gouvernement émettra une demande de retrait, retirer nos propositions ?

M. Damien Michallet. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Akli Mellouli. Cet amendement de notre collègue Cadic vise à garantir nos libertés. La liberté est la première des sécurités. On ne peut pas réduire notre sécurité au motif qu’il y a des faits divers.

Ce n’est pas parce que nous ne souhaitons pas adopter les mesures que vous proposez que nous ne voulons pas lutter contre le narcotrafic. Nous entendons lutter contre les narcotrafiquants, mais dans le respect de nos libertés individuelles et collectives : c’est cela qui distingue les démocraties par rapport à d’autres régimes en vigueur dans certains États. En démocratie, les libertés publiques et les libertés individuelles doivent être protégées !

Nous devons, en l’occurrence, défendre certains principes, tels que l’anonymisation des données. Il y va de ce domaine comme de la géopolitique : nous devons lutter pour nos principes, nos valeurs, y compris dans des rapports de force.

Il s’agit de préserver les libertés publiques garanties par la Constitution et nos institutions. La République, c’est aussi la garantie des libertés. Et, je le répète, la première des sécurités, c’est la liberté.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je n’avais pas prévu d’intervenir pour soutenir cet amendement – Corinne Narassiguin l’a fait de manière très pertinente –, mais j’ai entendu certains de nos collègues tenir des propos qui ne sont pas totalement corrects, me semble-t-il.

Nous pouvons avoir un débat sur la pertinence du renforcement du système de cryptage sans que vous nous accusiez d’être les complices des narcotrafiquants !

M. Cédric Perrin. Dans les faits, cela revient au même…

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je vous suggère donc de faire preuve d’un petit peu de nuance, mes chers collègues.

Jérôme Durain a présidé, au nom du groupe socialiste, la commission d’enquête sur le narcotrafic et il est le premier signataire de la proposition de loi issue de ses travaux. Il est – avec d’autres, notamment Étienne Blanc – celui grâce à qui ce sujet a fait l’objet d’un texte de loi. Épargnez-nous donc ce procès qui n’a pas lieu d’être.

Par ailleurs, le sénateur Perrin est arrivé en séance et nous a expliqué, de manière assez allusive, que nous ne pouvions pas tout savoir, mais que lui siégeait dans certaines instances, ce qui lui permettait de déclarer cette disposition tout à fait importante et nécessaire. (M. Cédric Perrin sexclame.) Toutefois, il y a là une contradiction, que Thomas Dossus a d’ailleurs relevée, et je l’en remercie. S’il ne s’agit pas d’une backdoor, comme vous l’avez expliqué, vous pouvez être tranquille. Il faudrait donc savoir !

Nous légiférons, de manière un peu rapide, sur une mesure lourde d’enjeux, qui a été rejetée à l’Assemblée nationale, en commission, et qui avait d’ailleurs été adoptée au Sénat, si ma mémoire ne me fait pas défaut, contre l’avis de la commission des lois. Il me semble, monsieur Darnaud, que l’on a le droit de délibérer !

Ce sujet est grave et complexe, mais les mauvais procès n’ont pas lieu d’être. Nous sommes tous responsables. Nous voulons tous lutter contre le narcotrafic, mais nous entendons aussi défendre la sécurité des échanges sur les messageries.

Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour explication de vote.

Mme Agnès Canayer. En effet, eu égard à l’importance des enjeux, notre débat mérite d’être apaisé.

Sur le plan de la méthode, il n’est pas souhaitable pour la lisibilité et l’efficacité de la loi de détricoter un dispositif qui a été voté récemment.

Par ailleurs, je suis élue d’une grande ville portuaire, Le Havre, où le narcotrafic est très présent, et membre de la délégation parlementaire au renseignement. Or nos services nous disent qu’ils ont besoin d’avoir accès à ces outils cryptés pour lutter à armes égales contre les narcotrafiquants.

Si l’on veut garantir la liberté, il faut d’abord garantir la sécurité.

M. Thomas Dossus. Au contraire, vous la fragilisez !

Mme Agnès Canayer. Les acteurs portuaires font l’objet de menaces ou de tentatives de corruption de la part des trafiquants. Ils ont besoin d’être protégés. Nous devons garantir leur sécurité. C’est pour cela qu’il faut donner à nos services, notamment de renseignement, des armes qui soient à la hauteur des enjeux.

Je ne soutiendrai pas cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.

M. Olivier Cadic. Nous avons entendu quelques propos caricaturaux, mais tout ce qui est excessif est insignifiant !

Lorsque j’ai lancé ma place de marché, en 1999, elle a été hackée au bout de seulement vingt-quatre heures… Je connais donc un peu la question.

M. Cédric Perrin. C’est donc une vengeance personnelle ?…

M. Olivier Cadic. La disposition dont nous débattons et qui a été adoptée lors de l’examen de la proposition de loi sur le narcotrafic ne figurait pas parmi les recommandations de la commission d’enquête dont le texte de loi est issu. J’étais vice-président de cette commission, donc je puis vous assurer que cette mesure a été proposée par la suite.

Cette disposition a été discutée dans des conditions sur lesquelles je ne reviendrai pas. Elle a été adoptée parce que nous avions la volonté d’afficher un consensus sur la question de la lutte contre le narcotrafic. Elle a d’ailleurs été supprimée à l’Assemblée nationale, à l’unanimité, dès le stade de la commission.

Cet amendement vise à remettre l’église au milieu du village.

M. Pierre Ouzoulias. La mairie ! (Sourires.)

M. Olivier Cadic. Le Sénat est la maison des libertés publiques.

Quant à l’argument selon lequel cette disposition serait nécessaire au motif que les narcotrafiquants utilisent désormais les messageries cryptées, je rappelle que Pablo Escobar n’utilisait pas WhatsApp, évidemment. Par ailleurs, qui parmi nous utilise WeChat ?

M. Cédric Perrin. Et qui est à la solde des lobbies du numérique ?

M. Olivier Cadic. Personne, car nul d’entre nous n’aurait l’idée d’utiliser une messagerie chinoise. Voilà qui illustre mes propos : nous avons besoin de confiance et de sécurité. Tel est l’enjeu de notre combat.

Madame la ministre, je salue le début de votre intervention. J’ai bien noté que vous ne vous étiez pas déclarée défavorable à cet amendement. Le message est très bien passé.

Comme vous, je suis indépendant. Je suis engagé en politique pour défendre des idées et des libertés.

M. Cédric Perrin. Et des lobbies !

M. Olivier Cadic. En l’occurrence, je défends la confiance dans nos réseaux et dans le numérique. C’est le gage de notre sécurité.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié quinquies.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Union Centriste.

Je rappelle que la commission spéciale et le Gouvernement ont demandé le retrait de cet amendement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 227 :

Nombre de votants 334
Nombre de suffrages exprimés 315
Pour l’adoption 181
Contre 134

Le Sénat a adopté.

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

Après l’article 16
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Article 18

Article 17

Les personnes mentionnées à l’article 14 notifient sans retard injustifié à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information tout incident ayant un impact important sur la fourniture de leurs services.

Un incident est considéré comme important si :

1° Il a causé ou est susceptible de causer une perturbation opérationnelle grave des services ou des pertes financières pour la personne concernée ;

2° Il a affecté ou est susceptible d’affecter d’autres personnes physiques ou morales en causant des dommages matériels, corporels ou moraux considérables.

Les personnes mentionnées à l’article 14 soumettent à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information :

a) Sans retard injustifié et au plus tard dans les vingt-quatre heures après avoir eu connaissance de l’incident important, une notification initiale qui, le cas échéant indique si l’incident important est susceptible d’avoir été causé par des actes illicites ou malveillants ou s’il pourrait avoir un impact en dehors du territoire national ;

b) Sans retard injustifié et au plus tard dans les soixante-douze heures après avoir eu connaissance de l’incident important, une notification intermédiaire qui, le cas échéant, met à jour les informations mentionnées au a, et fournit une évaluation initiale de l’incident important, y compris de sa gravité et de son impact, ainsi que des indicateurs de compromission lorsqu’ils sont disponibles. Par dérogation, les entités mentionnées au 4° de l’article 8 et au 3° de l’article 9 procèdent à cette notification sans retard injustifié et au plus tard dans les vingt-quatre heures après avoir eu connaissance de l’incident important ayant un impact sur la fourniture de leurs services de confiance ;

c) À la demande de l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information, un rapport sur les mises à jour pertinentes de la situation ;

d) Au plus tard un mois après la notification intermédiaire mentionnée au b, un rapport final, sous réserve que l’incident soit traité ;

e) Dans le cas contraire, un rapport d’avancement, au plus tard un mois après la notification intermédiaire mentionnée au même b, devant être complété par un rapport final dans un délai d’un mois après le traitement de l’incident.

L’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information fournit, sans retard injustifié et si possible dans les vingt-quatre heures suivant la réception de la première notification reçue, une réponse à la personne émettrice de la notification.

Pour prévenir un incident concernant une entité essentielle ou une entité importante ou pour faire face à un incident en cours ou lorsque la divulgation de l’incident est dans l’intérêt public, l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information peut, après avoir consulté l’entité essentielle ou importante concernée, exiger de celle-ci qu’elle informe le public de l’incident ou le faire elle-même.

Le cas échéant, les entités essentielles et importantes notifient sans retard injustifié :

– les incidents importants susceptibles de nuire à la fourniture de ces services ;

– les vulnérabilités critiques affectant leurs services ou les affectant potentiellement, ainsi que les mesures ou corrections, dès qu’elles en ont connaissance, que ces destinataires peuvent appliquer en réponse à cette vulnérabilité ou à cette menace.

Cette obligation de notification ne s’étend pas aux informations dont la divulgation porterait atteinte aux intérêts de la défense et de la sécurité nationale.

En cas d’incident important ou de vulnérabilité critique, les personnes mentionnées au premier alinéa peuvent communiquer à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information la liste des destinataires de leurs services. Cette autorité tient compte, dans l’usage qu’elle fait de ces informations, des intérêts économiques de ces personnes et veille à ne pas révéler d’informations susceptibles de porter atteinte à leur sécurité et au secret en matière commerciale et industrielle.

L’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information informe la Commission nationale de l’informatique et des libertés de tout incident mentionné au premier alinéa susceptible d’entraîner une violation de données à caractère personnel.

Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. Il précise notamment la procédure applicable et les critères d’appréciation des caractères importants et critiques des incidents et vulnérabilités.

Mme la présidente. L’amendement n° 33, présenté par Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, M. Cardon, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

incident ayant un impact important

par les mots :

incident important ayant un impact

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. Cet amendement a pour objet la notion d’incident. Nous avons déjà discuté de sa définition, et les travaux de la commission spéciale ont déjà permis, fort opportunément, de préciser certains éléments. Il faut que chacune des entités concernées sache bien à quoi correspond un incident et à quel moment elle doit le signaler.

Par notre amendement, nous proposons de modifier légèrement le texte. L’article, dans sa rédaction actuelle, vise un « incident ayant un impact important ». Il nous semblerait plus juste de remplacer cette expression par celle d’« incident important ayant un impact ».

Je sais que le Gouvernement a déposé un amendement qui vise à apporter un certain nombre de précisions et que nous examinerons dans un instant. Je crois que, sur le fond, nous sommes d’accord : des précisions sont nécessaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. La commission spéciale a repris dans son texte les termes exacts de la directive, qu’il convient de conserver tels quels.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Puisque le texte actuel reprend exactement celui de la directive, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 33.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 101, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Après le mot :

importants

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

ayant un impact direct sur les destinataires de leurs services, notamment lorsqu’ils ont causé ou sont susceptibles de causer l’extraction de données sensibles de ces derniers, ou de causer la mort ou des dommages considérables à la santé d’une personne physique destinataire, ou qu’ils consistent en un accès non autorisé effectif au réseau et aux systèmes d’information de l’entité, susceptible d’être malveillant et de causer une perturbation opérationnelle grave pour le destinataire ;

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Cet amendement vise à renforcer la sécurité juridique des entités concernées.

Dans un souci de clarification, nous précisions les types d’incidents importants que ces dernières devront notifier aux destinataires de leurs services, afin de satisfaire à la lettre l’article 23 de la directive, qui soumet cette notification à la détermination de son caractère approprié.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement du Gouvernement, dont la rédaction s’inspire du règlement d’exécution du 17 octobre 2024 de la directive NIS 2, tend à apporter une véritable clarification juridique. Cela constitue un net progrès par rapport à la version initiale du texte, qui comportait la notion d’« incident critique », laquelle était source de confusion.

La commission spéciale émet donc un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 101.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17, modifié.

(Larticle 17 est adopté.)

Section 3

Enregistrement des noms de domaine

Article 17
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Article 19

Article 18

Les offices d’enregistrement et les bureaux d’enregistrement ainsi que les agents agissant pour le compte de ces derniers qui satisfont à l’une des conditions prévues à l’article 11 sont soumis aux dispositions de la présente section – (Adopté.)

Article 18
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Article 20

Article 19

Les offices d’enregistrement collectent, par l’intermédiaire des bureaux d’enregistrement ainsi que des agents agissant pour le compte de ces derniers, les données nécessaires à l’enregistrement des noms de domaine.

Les offices et les bureaux d’enregistrement sont responsables du traitement de ces données au regard de la réglementation en matière de protection des données personnelles. Ils tiennent ces bases de données à jour, en maintenant les données exactes et complètes, sans redondance de collecte. À cette fin, ils mettent en place des procédures, accessibles au public, permettant de vérifier ces données lors de leur collecte et d’assurer la sécurité de leur base de données.

Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, fixe la liste des données relatives aux noms de domaine devant être collectées – (Adopté.)

Article 19
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Article 21

Article 20

Les offices et les bureaux d’enregistrement conservent les données relatives à chaque nom de domaine dans leur base de données tant que le nom de domaine est utilisé.

Mme la présidente. L’amendement n° 40, présenté par Mmes S. Robert, Linkenheld et Blatrix Contat, M. Cardon, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

tant que le nom de domaine est utilisé

par les mots :

pendant la durée d’utilisation du nom de domaine et jusqu’à expiration d’un délai d’un an à compter de la cessation de l’utilisation de ce nom de domaine

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Nous avons observé une augmentation du nombre d’enregistrements de faux noms de domaines lors des jeux Olympiques. Ces noms ont été utilisés pour promouvoir des articles de contrefaçon, des faux billets ou des sites de streaming frauduleux.

Certains bureaux d’enregistrement de noms de domaine sont complices. Ils se fondent sur la confidentialité pour s’opposer à la communication des données d’enregistrement ou divulguent au titulaire du nom de domaine l’identité du demandeur de la communication de ces données.

L’article 20 impose aux offices et aux bureaux d’enregistrement de conserver les données relatives à l’enregistrement des noms de domaine, sans prévoir aucune période minimale de conservation.

Cette obligation demeurerait donc valable uniquement tant que le nom de domaine est utilisé.

Il en résulte un risque majeur de fraude au bénéfice des délinquants numériques, qui peuvent utiliser un nom de domaine simplement durant quelques jours, avant d’en employer un autre, et en renouvelant ce processus indéfiniment, sans que l’on soit en mesure de procéder rapidement à leur identification.

Pour prévenir les risques de fraude et permettre l’identification des délinquants numériques, cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a pour objet que la conservation des données soit obligatoire pendant une durée d’un an à compter de la cessation de l’utilisation du nom de domaine.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement a effectivement pour objet la conservation des données relatives à l’enregistrement des noms de domaine pendant la durée d’utilisation du nom de domaine et jusqu’à l’expiration d’un délai d’un an à compter de la cessation de son utilisation, alors que l’article 20 énonce actuellement que cette conservation n’est valable que tant que le nom de domaine est employé.

Je souhaiterais que le Gouvernement nous indique si le risque de fraude évoqué par le groupe SER et par la société civile des producteurs phonographiques est avéré et si, dans l’affirmative, la conservation des données d’enregistrement pendant un an pourrait être pertinente pour lutter contre une telle fraude.

Je souhaite donc entendre l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Comme je l’ai indiqué hier, notre objectif est de ne pas surtransposer la directive NIS 2. Celle-ci prévoit uniquement que les données doivent être conservées tant que le nom de domaine est utilisé.

Ce projet de loi n’a pas tant pour objet la lutte contre la délinquance numérique que vous mentionnez que la transposition d’un cadre européen visant à assurer un niveau élevé de cybersécurité, à la fois par les mesures qu’il contient et par les modalités de signalement d’incidents.

Toutefois, l’adoption de cet amendement aurait l’avantage d’instaurer une durée minimale de conservation des données à compter de la cessation de l’utilisation du nom de domaine.

Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. La commission spéciale s’en remet également à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 40.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 20, modifié.

(Larticle 20 est adopté.)

Article 20
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Article 22

Article 21

Les offices et bureaux d’enregistrement rendent publiques sans retard injustifié après l’enregistrement d’un nom de domaine, les données d’enregistrement relatives à ce nom de domaine dès lors qu’elles n’ont pas de caractère personnel.

Mme la présidente. L’amendement n° 41, présenté par Mmes S. Robert, Linkenheld et Blatrix Contat, M. Cardon, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. - Après la première occurrence du mot :

domaine

insérer les mots :

, à titre gratuit

II. - Compléter cet article par les mots :

, y compris les données d’enregistrement de nom de domaine des personnes morales

III. - Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

À cette fin, les offices et bureaux d’enregistrement mettent à disposition une interface en permettant l’accès.

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. L’article 21 prévoit que les offices et les bureaux d’enregistrement des noms de domaine rendent publiques, sans retard injustifié après l’enregistrement d’un nom de domaine, les données d’enregistrement relatives à ce nom de domaine, dès lors que celles-ci n’ont pas de caractère personnel.

Par cet amendement, nous souhaitons encadrer cette obligation, en précisant que la mise à disposition des données doit être gratuite et qu’il appartient aux offices et aux bureaux d’enregistrement de se doter d’une interface, afin de permettre au public d’accéder à ces informations.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Sous réserve de l’avis du Gouvernement, je serais plutôt favorable à cet amendement, qui tend à renforcer concrètement, via la garantie de gratuité et l’obligation de mise à disposition d’une interface, la publicité des données d’enregistrement relatives aux noms de domaine, ce qui correspond à l’objet de l’article 21.

Je souhaite toutefois connaître au préalable l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. La directive NIS 2 impose aux offices et bureaux d’enregistrement des noms de domaine de premier niveau de collecter les données d’enregistrement à des fins de constitution d’une base de données. Ces données sont rendues publiques, à l’exception de celles qui ont un caractère personnel, ce qui, vous en conviendrez, est justifié.

Dans la mesure où cette directive implique que la publication des données s’effectue à titre gratuit, la précision que souhaitent apporter les auteurs de cet amendement ne nous paraît pas nécessaire.

En outre, cette publication s’effectue déjà via une interface spécifique, par l’intermédiaire des protocoles existants et de leur version modernisée et plus sécurisée, le Registration Data Access Protocol (RADP). Ces protocoles sont standardisés à l’échelle internationale. Ils garantissent un accès simple et gratuit aux données d’enregistrement non personnelles des noms de domaine.

Ainsi les bureaux et les offices d’enregistrement ont déjà développé cette interface ayant à vocation à rendre les données publiques et gratuites.

C’est pourquoi, considérant que cet amendement est satisfait, le Gouvernement demande son retrait.

Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 41.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 21.

(Larticle 21 est adopté.)

Article 21
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Article 23

Article 22

Pour les besoins des procédures pénales et de la sécurité des systèmes d’information, les agents habilités à cet effet par l’autorité judiciaire ou par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information peuvent obtenir des offices et bureaux d’enregistrement les données mentionnées à l’article 20.

Les offices et les bureaux d’enregistrement fixent les règles de procédure pour la communication de ces données aux agents mentionnés au premier alinéa. Cette communication intervient dans un délai n’excédant pas soixante-douze heures. Ces règles sont accessibles au public.

Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, fixe les modalités d’application du présent article – (Adopté.)

Section 4

Coopération et échange d’informations

Article 22
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Article 24

Article 23

Les dispositions de l’article 11 du code de procédure pénale ou celles relatives aux autres secrets protégés par la loi ne font pas obstacle à la communication d’informations dont ils disposent aux fins de l’accomplissement de leurs missions respectives, à l’exception des informations dont la communication porterait atteinte à la sécurité publique, à la défense et la sécurité nationale ou à la conduite des relations internationales, entre, d’une part, l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information, et, d’autre part, la Commission nationale de l’informatique et des libertés ou les autorités compétentes chargées de la gestion des risques en matière de cybersécurité en vertu d’un acte sectoriel de l’Union européenne ou les autorités chargées de la conduite de la politique pénale, de l’action publique et de l’instruction ou la Commission européenne ou les autorités compétentes des autres États membres de l’Union européenne ou des centres de réponse aux incidents de sécurité informatique ou des organismes internationaux concourant aux missions de sécurité ou de défense des systèmes d’information.

La communication d’informations effectuée en application du premier alinéa ne peut intervenir que si elle est nécessaire à l’accomplissement des missions des personnes émettrices ou destinataires de ces informations. Les informations échangées se limitent au minimum nécessaire et sont proportionnées à l’objectif du partage. Le partage d’informations préserve la confidentialité des informations concernées et protège la sécurité et les intérêts commerciaux des entités concernées.

Les modalités d’application du présent article, notamment les modalités du partage d’informations, sont déterminées par décret en Conseil d’État – (Adopté.)

Article 23
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Après l’article 24

Article 24

L’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information agrée des organismes publics ou privés en tant que relais dans la prévention et la gestion des incidents. L’autorité et les organismes qu’elle a ainsi agréés sont autorisés à échanger entre eux des informations couvertes par des secrets protégés par la loi.

Les modalités d’application du présent article, notamment les modalités de dépôt et d’examen des demandes d’agrément des organismes mentionnés au premier alinéa, sont déterminées par décret en Conseil d’État – (Adopté.)

Article 24
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Article 25

Après l’article 24

Mme la présidente. L’amendement n° 60 rectifié, présenté par MM. Cadic et Canévet, est ainsi libellé :

Après l’article 24

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les entités essentielles et importantes ainsi que, le cas échéant, leurs fournisseurs ou prestataires de services peuvent échanger entre elles, à titre volontaire, au sein de communautés, des informations pertinentes en matière de cybersécurité, y compris des informations relatives aux cybermenaces, aux incidents évités ou non, aux vulnérabilités, aux techniques et procédures, aux indicateurs de compromission, aux tactiques, techniques et procédures adverses, ainsi que des informations spécifiques sur les acteurs de la menace, des alertes de cybersécurité et des recommandations concernant la configuration des outils de cybersécurité pour détecter les cyberattaques, lorsque ce partage d’informations :

1° Vise à prévenir et à détecter les incidents, à y réagir, à s’en rétablir ou à atténuer leur impact ;

2° Renforce le niveau de cybersécurité, notamment en sensibilisant aux cybermenaces, en limitant ou en empêchant leur capacité de se propager, en soutenant une série de capacités de défense, en remédiant aux vulnérabilités et en les révélant, en mettant en œuvre des techniques de détection, d’endiguement et de prévention des menaces, des stratégies d’atténuation ou des étapes de réaction et de rétablissement, ou en encourageant la recherche collaborative en matière de cybermenaces entre les entités publiques et privées.

Cet échange est mis en œuvre au moyen d’accords de partage d’informations en matière de cybersécurité, compte tenu de la nature potentiellement sensible des informations partagées.

Les échanges volontaires des informations prévues au premier alinéa peuvent nécessiter le traitement de certaines catégories de données à caractère personnel, telles que les adresses IP, les localisateurs de ressources uniformes (URL), les noms de domaine, les adresses électroniques, les informations compromises ou encore les horodatages lorsqu’ils révèlent des données à caractère personnel.

Ces traitements de données à caractère personnel sont considérés comme nécessaires à des intérêts légitimes poursuivis par des entités essentielles et importantes, ainsi que par leurs fournisseurs ou prestataires de services, conformément à l’article 6, paragraphe 1, point f), du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE.

Ces accords de partage d’informations précisent les éléments opérationnels, y compris le recours éventuel à des plateformes TIC spécialisées et d’outils d’automatisation, le contenu et les conditions – notamment de sécurisation renforcée – de ces partages.

Lorsque des autorités publiques ou les centres de réponse aux attaques informatiques participent à ces accords de partage et mettent à disposition tout ou partie des informations visées à l’alinéa 1 dont elles disposent, elles respectent les conditions prévues par décret en Conseil d’État.

Les entités essentielles et importantes notifient à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information sans délai indu leur participation aux accords de partage d’informations en matière de cybersécurité visés au présent article lorsqu’elles concluent de tels accords ou, le cas échéant, lorsqu’elles se retirent de ces accords une fois que le retrait prend effet.

La parole est à M. Olivier Cadic.

M. Olivier Cadic. Cet amendement vise à transposer les dispositions de l’article 29 de la directive NIS 2, qui prévoient l’existence d’accords de partage d’informations en matière de cybersécurité, permettant aux entités essentielles, aux entités importantes et à leurs prestataires en matière de cybersécurité d’échanger des informations détaillées et opérationnelles sur les menaces cyber, afin de mieux y faire face. C’est une demande forte de leur part.

Selon les considérants 119 et 120 de la directive, « le partage d’informations contribue à accroître la sensibilisation aux cybermenaces, laquelle renforce à son tour la capacité des entités à empêcher les menaces de se concrétiser en incidents réels et leur permet de mieux contenir les effets des incidents et de se rétablir plus efficacement. […] Il est donc nécessaire de permettre l’émergence, au niveau de l’Union, d’accords de partage volontaire d’informations en matière de cybersécurité.

« À cette fin, les États membres devraient activement aider et encourager les entités, telles que celles fournissant des services de cybersécurité et actives dans la recherche, ainsi que les entités concernées qui ne relèvent pas du champ d’application de la présente directive, à participer à ces mécanismes d’échange d’informations en matière de cybersécurité. Ces accords devraient être établis conformément aux règles de concurrence de l’Union et au droit de l’Union en matière de protection des données. »

Pour lever tout doute à ce sujet, il semble nécessaire de reprendre également le contenu du considérant 121, qui décrit le recours à la base légale de l’intérêt légitime pour fonder les traitements de données à caractère personnel qui pourraient être effectués à cette occasion et reconnaître que le partage de données concernées est conforme aux exigences du RGPD.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. La portée juridique de cet amendement me semble très limitée. Et dans le cas où il en aurait une, l’impact de son adoption serait vraisemblablement négatif.

Tout d’abord, ce que la loi n’interdit pas étant autorisé, il n’y a pas d’intérêt à prévoir explicitement une telle faculté d’échange d’information en matière de cybersécurité entre les entités régulées, puisque rien ne l’interdit et qu’elle existe déjà aujourd’hui.

En outre, par un raisonnement a contrario, on pourrait conclure qu’il ne serait pas autorisé d’échanger certaines informations lorsque celles-ci ne répondent pas aux critères posés aux 1° et 2°. L’adoption de cet amendement serait donc susceptible de limiter les informations échangées entre entités régulées en matière de cybersécurité.

Enfin, cette disposition viendrait ajouter des lourdeurs bureaucratiques, avec l’exigence de notification à l’Anssi de la participation aux accords d’information en matière de cybersécurité.

Pour toutes ces raisons, je sollicite le retrait de cet amendement, faute de quoi mon avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même avis, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 60 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Chapitre III

De la supervision

Après l’article 24
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Article 26 A (nouveau)

Article 25

Lorsqu’elle a connaissance d’une menace susceptible de porter atteinte à la sécurité des systèmes d’information des personnes mentionnées à l’article 14 et des bureaux d’enregistrement, l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information peut prescrire à la personne ou au bureau d’enregistrement concerné les mesures nécessaires pour éviter un incident ou y remédier et déterminer les délais accordés pour les mettre en œuvre et en rendre compte.

Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État.

Mme la présidente. L’amendement n° 48, présenté par Mmes Linkenheld, Conway-Mouret et Blatrix Contat, M. Cardon, Mme Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Après le mot :

nécessaires

Insérer les mots :

, adaptées et proportionnées

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. L’article 25 concerne les mesures que l’Anssi est susceptible de prescrire lorsqu’elle a connaissance d’une menace sur la sécurité des systèmes d’information des différentes entités mentionnées à l’article 14 de ce projet de loi, à savoir les entités essentielles, les entités importantes, les administrations de l’État, les missions diplomatiques, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), les juridictions administratives et judiciaires – bref des entités de natures vraiment très diverses, allant des petites et moyennes entreprises jusqu’à différentes formes de collectivités.

Il nous semble que, au regard de cette diversité, et conformément à l’esprit de l’article 21 de la directive NIS 2, il serait utile de préciser dans le texte que les mesures prescrites par l’Anssi en cas de menace doivent être adaptées et proportionnées à la situation de chacune des entités.

Tel est l’objet de cet amendement.

Puisque je vous ai déjà parlé de la cyberattaque dont a été victime la ville de Lille, mes chers collègues, je me permets de signaler que c’est grâce à l’information reçue par l’Anssi sur une menace que nous avons pu circonscrire les conséquences de cet incident.

Je le répète, ces mesures que peut prendre l’Anssi sont véritablement très importantes, mais nous souhaitons qu’elles soient adaptées et proportionnées.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement, qui a été parfaitement présenté, vise à préciser que les mesures pouvant être prescrites par l’Anssi, lorsqu’elle a connaissance d’une menace susceptible de porter atteinte à la sécurité des systèmes d’information d’une entité, doivent être non seulement nécessaires pour éviter l’incident ou y mettre un terme, mais aussi adaptées et proportionnées.

Cette précision ne paraît pas indispensable, dans la mesure où, par définition, des mesures nécessaires ne peuvent être ni inadaptées ni disproportionnées.

L’avis de la commission spéciale est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. L’objectif visé par cet article est, en cas de menace susceptible de porter atteinte à la sécurité des systèmes informatiques des entités visées par le texte, d’éviter la survenue d’incidents ou d’y remédier s’ils n’ont pu être empêchés. Les mesures prescrites seront donc nécessaires et proportionnées à cet objectif.

L’approche de l’Anssi consiste à dimensionner ces prescriptions au cas par cas, de manière adaptée à la menace et aux nécessités opérationnelles qu’impliquent les incidents. Cela nous semble donc parfaitement cohérent avec l’amendement que vous proposez.

C’est pourquoi j’émets, pour ma part, un avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 48.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 25.

(Larticle 25 est adopté.)

Section 1

Recherche et constatations des manquements

Sous-section 1

Habilitation

Article 25
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Article 26

Article 26 A (nouveau)

À l’avant-dernier alinéa de l’article L. 103 du code des postes et des communications électroniques, les mots : « établie selon un » sont remplacés par les mots : « lorsqu’il répond aux prescriptions d’un » – (Adopté.)

Article 26 A (nouveau)
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Article 27

Article 26

Les agents et personnels spécialement désignés et assermentés de l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information et des services de l’État désignés par elle sont habilités à rechercher et à constater les manquements aux obligations, prescriptions et exigences prévues :

1° Par le règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive n° 1999/93/CE ;

2° Par le règlement (UE) n° 2019/881 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 relatif à l’ENISA (Agence de l’Union européenne pour la cybersécurité) et à la certification de cybersécurité des technologies de l’information et des communications, et abrogeant le règlement (UE) n° 526/2013 ;

3° Aux chapitres II et III du présent titre ;

4° À l’article L. 100, aux III et IV de l’article L. 102 et à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 103 du code des postes et des communications électroniques ;

5° Par les exigences de cybersécurité résultant des autorisations, certifications, qualifications et agréments délivrés par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information.

Les agents et personnels des organismes indépendants spécialement habilités par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information peuvent concourir à la recherche des manquements mentionnés au premier alinéa du présent article sous le contrôle des agents et personnels mentionnés au même alinéa.

Mme la présidente. L’amendement n° 102, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

ou, le cas échéant, par les organismes d’évaluation de la conformité

II. – Alinéa 7

Après les mots :

organismes indépendants

insérer les mots :

ou experts

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Le présent amendement vise à préciser la rédaction de l’article 26, afin de couvrir deux situations opérationnelles.

Tout d’abord, en application de la réglementation européenne et nationale sur la certification, certains certificats sont également délivrés par des organismes d’évaluation de la conformité. Il apparaît donc nécessaire de prévoir la supervision de l’activité de certification desdits organismes.

En outre, la recherche de manquements implique de recourir à des experts qui ne seront ni des contrôleurs au sens du premier alinéa ni des organismes indépendants.

Il s’agit par exemple d’experts d’autorités de supervision d’États de l’Union européenne dans le cas d’enquêtes transfrontalières, de consultants indépendants qui pourraient faire notamment des audits, des scans, ou encore d’agents de l’État dont l’expertise pointue pourrait être temporairement utile, sans pour autant qu’il soit nécessaire de les désigner et de les assermenter comme des contrôleurs.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision, dont les dispositions permettent d’embrasser l’ensemble des situations susceptibles de se présenter.

L’avis de la commission spéciale est donc favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 102.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 26, modifié.

(Larticle 26 est adopté.)

Sous-section 2

Des pouvoirs

Article 26
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Article 28

Article 27

La personne faisant l’objet d’un contrôle de l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information met à disposition des agents et personnels mentionnés à l’article 26 les moyens nécessaires pour vérifier sur pièces et sur place le respect des obligations qui lui incombent.

Ces agents et personnels ont accès aux locaux à usage professionnel des entités contrôlées et sont habilités à :

1° Exiger la communication de tout document nécessaire à l’accomplissement de leur mission, quel qu’en soit le support, et obtenir ou prendre copie de ces documents par tout moyen et sur tout support ;

2° Recueillir, sur convocation, sur place ou sur demande, tout renseignement ou toute justification nécessaire au contrôle ;

3° Accéder aux systèmes d’information, aux logiciels, aux programmes informatiques et aux données stockées et en demander la transcription par tout traitement approprié dans des documents directement exploitables pour les besoins de la supervision ;

4° Procéder, sur convocation ou sur place, aux auditions de toute personne susceptible d’apporter des éléments utiles à leurs constatations. Ils en dressent procès-verbal, qui doit comporter les questions auxquelles il est répondu. Les personnes entendues procèdent elles-mêmes à sa lecture, peuvent y faire consigner leurs observations et y apposent leur signature. Si elles déclarent ne pas pouvoir lire, lecture leur en est faite préalablement à la signature. En cas de refus de signer le procès-verbal, mention en est faite sur celui-ci.

Dans le cadre du contrôle, le secret professionnel ne peut être opposé aux agents et personnels mentionnés au premier alinéa du présent article.

Ces agents et personnels sont tenus au secret professionnel pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont connaissance en raison de leurs fonctions, sous réserve des éléments utiles à l’établissement des documents nécessaires à l’instruction.

Les rapports, avis et autres documents justifiant la saisine de la commission des sanctions mentionnée à l’article L. 1332-15 du code de la défense en application de l’article 28 de la présente loi ou l’adoption d’une mesure d’exécution prévue à l’article 31, y compris ceux établis ou recueillis dans le cadre des opérations de contrôle, peuvent être communiqués à la personne contrôlée.

Il est dressé procès-verbal des vérifications et visites menées en application du présent article, qui fait foi jusqu’à preuve du contraire.

Mme la présidente. L’amendement n° 116, présenté par MM. Chaize, Saury et Canévet, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

qui lui incombent

par les mots :

mentionnées au même article

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Chaize, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 116.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 9 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos et MM. Grand, Laménie, V. Louault, A. Marc, L. Vogel et Wattebled, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Après le mot :

Accéder

insérer les mots :

, lorsque cela est directement nécessaire à l’accomplissement de leur mission,

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Cet amendement tend à introduire un critère de nécessité, pour mieux apprécier et objectiver la légalité des demandes d’accès et offrir ainsi un niveau renforcé de sécurité juridique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Si cet amendement était adopté, les agents et personnels chargés du contrôle ne pourraient accéder aux systèmes d’information, logiciels, programmes informatiques et données stockées par l’entité contrôlée que lorsque cet accès est directement nécessaire à l’accomplissement de leur mission.

Je précise qu’il s’agit d’une simple faculté accordée à ces agents et personnels, parmi d’autres qui sont énumérées à l’article 27. En tout état de cause, il est important que ceux-ci puissent accéder à ces éléments, et notamment aux systèmes d’information, dans la mesure où le contrôle qu’ils mènent porte précisément sur le niveau de sécurité de ces systèmes d’information. Dans tous les cas, cet accès sera donc directement nécessaire à l’accomplissement de leur mission.

L’avis de la commission spéciale est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Les mesures de supervision et d’exécution imposées aux entités doivent être proportionnées à chaque cas d’espèce et motivées en détail, conformément aux articles 32 et 33 de la directive. L’introduction d’un critère de nécessité permet d’apporter un certain nombre de garanties.

Il est également indispensable, ainsi que le rappelle la directive NIS 2 aux mêmes articles, que ces mesures soient effectives et dissuasives, ce qui exige de laisser l’autorité de supervision effectuer sans entrave les vérifications sur place nécessaires.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 9 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 86 rectifié quater, présenté par MM. Bleunven, J.-M. Arnaud, Cambier et Henno, Mme Jacquemet et MM. Lafon, Parigi et Pillefer, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer les mots :

et en demander la transcription par tout traitement approprié dans des documents directement exploitables pour les besoins de la supervision

La parole est à M. Paul Toussaint Parigi.

M. Paul Toussaint Parigi. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement vise à empêcher les agents chargés du contrôle de demander à l’entité contrôlée la transcription par tout traitement approprié de ses systèmes d’information, logiciels, programmes informatiques et données stockées dans des documents directement exploitables pour les besoins de la supervision.

Je partage la préoccupation de nos collègues au sujet des capacités techniques de nos TPE et PME.

Je rappelle toutefois que la complexité des systèmes d’information, logiciels et autres programmes informatiques est naturellement proportionnelle à la taille de l’entité concernée. Une telle demande, qui ne sera d’ailleurs que facultative, ne me semble donc pas de nature à constituer un obstacle insurmontable pour une petite entreprise.

Je tiens également à le souligner, cet amendement tend à supprimer cette possibilité pour toutes les entreprises, y compris les plus grandes, ce qui ne me paraît pas opportun. En tout état de cause, il est important que toutes les entreprises concernées, petites ou grandes, coopèrent avec l’Anssi dans le cadre de la mise en œuvre de la directive NIS 2, tant dans leur intérêt que dans celui du pays.

La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 86 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 27, modifié.

(Larticle 27 est adopté.)

Article 27
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Article 28 (suite)

Article 28

La personne faisant l’objet d’un contrôle de l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information est tenue de coopérer avec les agents et personnels mentionnés à l’article 26, qui sont habilités à constater toute action de sa part de nature à faire obstacle au contrôle.

Le fait, pour la personne contrôlée, de faire obstacle aux contrôles, notamment en fournissant des renseignements incomplets ou inexacts ou en communiquant des pièces incomplètes ou dénaturées, est constitutif d’un manquement et puni d’une amende administrative prononcée par la commission des sanctions mentionnée à l’article L. 1332-15 du code de la défense, dont le montant, proportionné à la gravité du manquement, ne peut excéder dix millions d’euros ou 2 % du chiffre d’affaires annuel mondial, hors taxes, de l’exercice précédent de l’entreprise à laquelle appartient la personne contrôlée, le montant le plus élevé étant retenu.

L’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information notifie à la personne contrôlée les griefs constitutifs d’obstacle au sens du deuxième alinéa du présent article retenus à son encontre, et saisit la commission des sanctions mentionnée à l’article L. 1332-15 du code de la défense, qui se prononce dans les conditions prévues à la section 3 du présent chapitre.

Le présent article ne s’applique pas aux administrations de l’État et à ses établissements publics administratifs.

Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 32, présenté par Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, M. Cardon, Mmes Conway-Mouret et Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Si, et dans la mesure où, il n’est pas possible de fournir toutes les informations en même temps, les informations peuvent être communiquées de manière échelonnée sans autre retard indu.

II. – Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

aux collectivités territoriales, à leurs groupements et leurs établissements publics administratifs

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Mme Audrey Linkenheld. L’article 28 prévoit des sanctions lorsqu’une entité fait obstacle aux demandes d’informations de l’Anssi ou en cas de fourniture de renseignements incomplets.

La situation inhérente à une crise cyber ne permet pas toujours à une entité de fournir l’ensemble des informations requises dans les délais impartis, sans pour autant que sa bonne foi puisse être mise en cause.

Nous proposons simplement ici de reproduire une disposition issue de l’article 33 du RGPD sur la transmission progressive des informations en fonction de la disponibilité de celles-ci.

Nous souhaitons également, pour assurer une égalité de traitement, étendre la dispense d’application prévue pour les administrations de l’État aux collectivités territoriales.

Mme la présidente. L’amendement n° 10 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos et MM. Grand, Laménie, V. Louault, A. Marc, L. Vogel et Wattebled, est ainsi libellé :

Alinéa 2

1° Après le mot :

fournissant

insérer le mot :

sciemment

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Si, et dans la mesure où, il n’est pas possible de fournir toutes les informations en même temps, les informations peuvent être communiquées de manière échelonnée sans autre retard indu.

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Les quatre amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 2 rectifié est présenté par MM. Fialaire et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Gold et Grosvalet, Mmes Guillotin et Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Ruel.

L’amendement n° 5 est présenté par Mmes Duranton et Havet, MM. Patriat, Buis et Buval, Mme Cazebonne, MM. Fouassin, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth, M. Rambaud, Mme Ramia, M. Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

L’amendement n° 52 rectifié est présenté par MM. Mellouli, Dossus, Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Senée, Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

L’amendement n° 63 est présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

aux collectivités territoriales, à leurs groupements et à leurs établissements publics administratifs

La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 2 rectifié.

Mme Maryse Carrère. Le projet de loi que nous examinons impose des obligations importantes aux collectivités locales.

Les élus locaux sont bien sûr conscients des enjeux liés aux cyberattaques et à la cyberdéfense. Cependant, nous savons tous ici que nos collectivités sont confrontées à des défis budgétaires considérables. Dans ce contexte, il serait prématuré d’ajouter des sanctions financières supplémentaires.

Plutôt que de pénaliser des collectivités déjà en difficulté, nous proposons d’exonérer de sanctions les collectivités locales, leurs groupements et leurs établissements publics. Mes chers collègues, soutenir cet amendement revient à concilier les impératifs de sécurité nationale avec la réalité des finances locales et à favoriser une approche volontariste dans la mise en œuvre de la directive.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Duranton, pour présenter l’amendement n° 5.

Mme Nicole Duranton. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 52 rectifié.

M. Thomas Dossus. Nous souhaitons également exonérer les collectivités territoriales et leurs groupements des sanctions financières prévues en cas de manquement aux obligations de sécurité des systèmes d’information. Il s’agit de prendre en compte la situation budgétaire difficile des collectivités en évitant de leur imposer des contraintes financières supplémentaires.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour présenter l’amendement n° 63.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Les amendements nos 32 et 10 rectifié visent à permettre la communication échelonnée des informations demandées lorsqu’il n’est pas possible de les fournir en même temps. Rien ne fait obstacle à ce que ces informations soient communiquées de façon progressive par l’entité contrôlée, au cours du contrôle, lorsque c’est nécessaire.

En outre, je rappelle que l’amende prévue en cas de fourniture de renseignements incomplets ou inexacts ou de communication de pièces incomplètes ou dénaturées ne pourra être prononcée par la commission des sanctions que sur saisine de l’Anssi, laquelle disposera donc d’une marge d’appréciation.

L’amendement n° 10 rectifié tend également à ne sanctionner les cas d’obstacle au contrôle que lorsque l’entité concernée agit ainsi sciemment.

Or il n’est pas aisé pour un contrôleur de déterminer si l’entité contrôlée a sciemment fait obstacle au contrôle ou si cette défaillance résulte de circonstances indépendantes de sa volonté. Dans le doute, le caractère répressif du dispositif risquerait donc d’être considérablement atténué, ce qui n’inciterait pas les entités contrôlées à coopérer de bonne foi aux opérations de contrôle.

Les amendements identiques nos 2 rectifié, 5, 52 rectifié et 63 visent quant à eux à exonérer les collectivités territoriales de l’obligation de coopérer avec l’Anssi et de l’amende prévue en cas d’obstacle aux contrôles.

Bien que je sois sensible, au même titre que chacun d’entre vous, mes chers collègues, à la situation spécifique des collectivités territoriales, je crois indispensable que celles-ci coopèrent avec l’Anssi dans le cadre de ses contrôles. Aucune circonstance ne serait en effet susceptible de justifier qu’il soit fait obstacle au contrôle de manière délibérée, notamment par la fourniture de renseignements incomplets ou inexacts ou par la communication de pièces incomplètes ou dénaturées.

Au reste, bien que l’État dispose d’un pouvoir hiérarchique sur ses administrations et établissements publics lui permettant de leur imposer le respect de leurs obligations, il n’existe aucun dispositif similaire à l’égard des collectivités territoriales, et c’est bien normal, comme l’a souligné le Conseil d’État.

Il me paraît donc justifié de prévoir la possibilité d’une amende en cas d’obstacle au contrôle, et seulement dans ce cas, la décision revenant à la commission des sanctions, laquelle disposera, comme je l’ai indiqué, d’une marge d’appréciation en la matière.

Le contexte actuel est trop grave et les enjeux trop importants pour que quiconque soit dispensé de contribuer à l’effort collectif de renforcement de notre cybersécurité.

J’émets par conséquent un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Nous sommes également opposés à ce que les collectivités locales et leurs établissements publics soient exonérés de sanction en cas d’obstacle à un contrôle par la fourniture de renseignements incomplets ou erronés, et non plus seulement en présence d’une non-conformité non corrigée aux règles de sécurité ou d’un défaut de notification.

En effet, nous mettrions en péril l’ensemble du dispositif si nous ne prévoyions aucun levier pour obtenir la communication des documents et des renseignements utiles au contrôle et la garantie qu’il ne soit pas fait obstacle à ce dernier.

J’émets donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 32.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 10 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2 rectifié, 5, 52 rectifié et 63.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 20 rectifié sexies, présenté par Mme Morin-Desailly, MM. Laugier et Duffourg, Mmes Patru et Billon, MM. Henno et Lafon, Mme Jacquemet, M. Chauvet, Mme Gacquerre et M. Pillefer, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après les mots :

faire obstacle

insérer les mots :

de façon délibérée

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. L’article 28 du présent projet de loi prévoit que la personne contrôlée est tenue de coopérer avec l’Anssi et que tout manquement est puni d’une amende administrative.

Or un renseignement incomplet ou inexact peut être le résultat d’un cas de force majeure ou de circonstances qui ne dépendent pas uniquement de la personne contrôlée.

C’est pourquoi, afin de garantir une évaluation proportionnée des manquements, cet amendement vise à préciser que l’absence de coopération de la personne contrôlée doit être délibérée pour que le manquement soit caractérisé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Comme je l’ai déjà indiqué, si je souscris à l’intention de notre collègue Catherine Morin-Desailly, il m’apparaît difficile pour un contrôleur de déterminer si l’entité contrôlée a fourni des renseignements incomplets ou inexacts ou communiqué des pièces incomplètes ou dénaturées de manière délibérée, ou bien si cette défaillance résulte de circonstances indépendantes de sa volonté.

Dans le doute, la précision proposée atténuerait le caractère répressif du dispositif et ne contribuerait pas à inciter les entités contrôlées à répondre de bonne foi aux demandes qui leur sont adressées par les agents et personnels chargés du contrôle.

La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Sur le fond, nous sommes d’accord avec vous, madame Catherine Morin-Desailly.

Cependant, pour plus de cohérence, nous sollicitons le retrait de cet amendement, au bénéfice de l’article 37 du texte et de votre amendement n° 21 rectifié nonies, qui sera examiné tout à l’heure.

Mme la présidente. Madame Morin-Desailly, l’amendement n° 20 rectifié sexies est-il maintenu ?

Mme Catherine Morin-Desailly. J’ai été convaincue par M. le rapporteur et Mme la ministre. Je retire donc mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 20 rectifié sexies est retiré.

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour un rappel au règlement.

M. Jacques Fernique. Madame la présidente, notre règlement prévoit la possibilité de voter à main levée. Mais pour voter à main levée, encore faut-il lever la main !

Or, manifestement, lors du vote sur les amendements identiques portant sur l’article 28, ceux qui ont levé la main pour faire adopter ces amendements étaient au moins trois fois plus nombreux que nos collègues qui se sont manifestés pour s’y opposer…

Mme la présidente. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

J’espère que la leçon sera retenue, et cela par tout le monde.

Article 28
Dossier législatif : projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité
Article 29

Article 28 (suite)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 28.

(Larticle 28 est adopté.)

Article 28 (suite)
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Article 30

Article 29

Le contrôle de l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information peut prendre les formes suivantes :

1° Inspections sur place et contrôles à distance ;

2° Audits de sécurité réguliers et ciblés réalisés par elle ou par un organisme indépendant choisi par elle ;

3° Scans de sécurité ;

4° Audits en cas d’incident important ou d’une violation des obligations mentionnées à l’article 26.

Le coût de ces mesures est à la charge des personnes contrôlées sauf lorsque le contrôle ne révèle pas de manquement aux obligations, prescriptions et exigences mentionnées à l’article 26.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 103, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 3

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

…° Audits de sécurité réguliers et ciblés réalisés par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information ;

…° Audits de sécurité réguliers et ciblés réalisés par un organisme indépendant désigné par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information ;

III. - Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

Le coût des mesures mentionnées aux 1°, 2°, 4° et 5° est à la charge de l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information. Celui des mesures mentionnées au 3° est à la charge de la personne contrôlée, sauf, lorsque les circonstances l’exigent, si l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information en décide autrement.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Afin d’éviter toute surtransposition, le présent amendement tend à modifier les conditions dans lesquelles le coût des contrôles peut être mis à la charge de l’entité assujettie. Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer ce sujet de la surtransposition.

En l’état du texte, la prise en charge du coût des mesures de contrôle n’est prévue que lorsque celles-ci ne révèlent pas de manquement.

S’il est louable d’encourager la mise en conformité, une telle disposition pose néanmoins plusieurs difficultés. D’une part, elle s’insère mal dans l’économie générale du projet de loi, aux termes duquel le manquement n’a vocation à être qualifié qu’à l’issue de la procédure d’instruction. D’autre part, elle pourrait s’apparenter à une sanction financière prononcée directement par le contrôleur, ce qui irait également à l’encontre du phasage de la procédure de sanction, tel qu’il est prévu par le projet de loi.

Au-delà de ces difficultés, la rédaction actuelle du texte aboutirait à une surtransposition, puisqu’elle reviendrait à faire endosser aux entités assujetties le coût des contrôles dès qu’ils révèlent un manquement, quelle que soit la nature de la mesure de contrôle utilisée pour découvrir ce dernier. Il apparaît donc que le champ d’application de cette prescription est plus large que les cas prévus par la directive NIS 2, qui ne prévoit la prise en charge par les entités du contrôle qu’en cas d’audits de sécurité ciblés.

Afin d’éviter toute surtransposition, il est donc proposé ici que seuls les coûts résultant des audits de sécurité ciblés puissent être pris en charge par l’entité assujettie, conformément à la directive.

Mme la présidente. L’amendement n° 13 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos et MM. Grand, Laménie, V. Louault, A. Marc et L. Vogel, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

et dont le siège social se situe dans un État membre de l’Union européenne

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Mes chers collègues, je vais vous demander d’être particulièrement attentifs à la défense de cet amendement.

Nous avons tous souligné la nécessité de nous doter d’un numérique européen. Le mécanisme de contrôle prévu à l’article 29 prévoit que l’Anssi peut déléguer les contrôles à des organismes indépendants. Eu égard au caractère tout à fait sensible de ces contrôles et des données récoltées, il est impératif de veiller à ce que ces organismes soient européens.

Mme la présidente. L’amendement n° 28, présenté par Mmes Linkenheld, Conway-Mouret et Blatrix Contat, M. Cardon, Mme Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

, ou lorsque l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information en décide autrement

La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.

Mme Florence Blatrix Contat. Nous proposons de conserver, comme c’était prévu dans le projet de loi initial, la possibilité pour l’Anssi de décider de ne pas faire supporter le coût des contrôles et audits réalisés par l’entité contrôlée, même en l’absence de respect des exigences fixées.

Cela permettrait à l’Anssi d’appliquer le principe de proportionnalité et de progressivité dans la mise en œuvre de la directive, en tenant compte, notamment, de la taille, des ressources et des efforts réalisés par l’entité contrôlée pour se mettre en conformité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. L’amendement n° 103 vise à clarifier les modalités de prise en charge du coût des contrôles, comme nous l’avions demandé en commission spéciale.

Le Gouvernement reprend d’ailleurs la rédaction que nous lui avions proposée en vue de l’examen du texte en commission spéciale, mais que nous n’avions pu présenter en raison des contraintes inhérentes à l’article 40 de la Constitution. Je me réjouis donc que le Gouvernement ait choisi de déposer cet amendement en séance publique.

Concrètement, seul le coût des audits de sécurité réguliers et ciblés réalisés par un organisme indépendant serait pris en charge par l’entité contrôlée, conformément aux prescriptions de la directive NIS 2, tandis que l’Anssi assumerait elle-même le coût des autres types de contrôle qu’elle diligente dans le cadre de sa mission de service public.

Le projet de loi initial était assez ambigu sur ce point. Or il n’est pas concevable que des entités auxquelles la loi imposera désormais le respect d’un certain nombre de normes en matière de cybersécurité doivent en plus supporter le coût des contrôles qui leur seront imposés pour s’assurer du respect des normes en question.

L’avis de la commission spéciale est donc favorable sur cet amendement du Gouvernement.

Les amendements nos 13 rectifié et 28 visent à limiter la prise en charge par l’entité contrôlée du coût du contrôle aux cas de manquement délibéré à ses obligations.

Outre qu’il est difficile, pour un contrôleur, de déterminer si l’entité contrôlée a délibérément commis un manquement ou non, il paraît préférable de modifier la rédaction de cet alinéa de façon à fixer le principe, posé par la directive NIS 2, de la prise en charge par la personne contrôlée des seuls audits de sécurité réguliers et ciblés réalisés par un organisme indépendant, comme le propose aujourd’hui le Gouvernement à notre demande.

L’avis de la commission spéciale est donc défavorable sur les amendements nos 13 rectifié et 28.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 13 rectifié et 28 ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même avis que la commission spéciale, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 103.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 13 rectifié et 28 n’ont plus d’objet n’ont plus d’objet.

L’amendement n° 12 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos et MM. Grand, Laménie, V. Louault, A. Marc et L. Vogel, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

L’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information communique chaque année au public, par tout moyen adapté, le montant total des coûts induits par les contrôles mis à la charge des personnes contrôlées.

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Il me semble anormal de ne pas faire peser sur l’autorité contrôlante le coût de ses propres décisions, selon le principe « qui décide paie ».

Étant donné qu’il n’est pas permis aux parlementaires, eu égard aux règles de recevabilité financière des amendements fixées par l’article 40 de la Constitution, d’imputer les coûts induits par les contrôles à l’autorité contrôlante plutôt qu’aux entreprises contrôlées, il est à défaut proposé d’obliger l’autorité à indiquer le montant total des coûts induits par les contrôles qu’elle décide pour les acteurs privés.

De la sorte, les pouvoirs exécutif et législatif pourraient mieux apprécier les conséquences du mode de financement retenu dans le texte initial du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir que l’Anssi publie chaque année le montant total des coûts induits par les contrôles mis à la charge des entités contrôlées.

Il s’agit évidemment d’un amendement d’appel visant à attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de ne pas faire reposer sur les entités contrôlées le coût des contrôles qu’elles subissent et qui relèvent de la mission de service public confiée à l’Anssi.

Toutefois, je crains que cette communication n’ait pas grande utilité et ne permette pas d’atteindre l’objectif légitime de notre collègue Vanina Paoli-Gagin.

La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Je tiens à le rappeler, l’Anssi communiquera bien ces informations sur les contrôles dans son rapport annuel.

J’émets donc le même avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Paoli-Gagin, l’amendement n° 12 rectifié est-il maintenu ?

Mme Vanina Paoli-Gagin. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 12 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 29, modifié.

(Larticle 29 est adopté.)

Article 29
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Article 31

Article 30

Les modalités d’application de la présente section sont fixées par décret en Conseil d’État.

Mme la présidente. L’amendement n° 29, présenté par Mmes Linkenheld, Conway-Mouret et Blatrix Contat, M. Cardon, Mme Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Ce décret fixe également un calendrier d’application progressif et différencié des mesures de contrôles en fonction du niveau de préparation des entités concernées et du niveau de priorité des exigences de mise en conformité.

La parole est à M. Rémi Cardon.

M. Rémi Cardon. Le projet de loi ne prévoit pas de date limite de mise en conformité, pas plus que de date d’entrée en vigueur des contrôles, donc des sanctions potentielles. L’Anssi a indiqué qu’elle laisserait le temps aux entités de se mettre en conformité avant d’engager les procédures de contrôle et de sanction.

La mise en œuvre de la directive NIS 2 doit obéir à une certaine souplesse pour permettre aux entités nouvellement concernées d’organiser leur montée en compétences et de renforcer progressivement leurs dispositifs de sécurité, sans risquer des pénalités immédiates. Cette souplesse permettrait notamment aux entités de s’organiser, de mutualiser leurs ressources et d’éviter le recours systématique à des prestataires spécialisés, avec ses coûts induits.

Pour améliorer la lisibilité du dispositif, nous proposons que le décret d’application prévu à l’article 30 fixe un calendrier d’application échelonnée et différenciée des mesures de contrôle en fonction du niveau de préparation des entités concernées et du niveau de priorité des exigences de mise en conformité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir que le décret en Conseil d’État censé déterminer les modalités d’application des dispositions relatives aux prérogatives de l’Anssi en matière de recherche et de constatation des manquements fixe également un calendrier de mise en œuvre progressive et différenciée de ces dispositions, en fonction du niveau de préparation des entités concernées et du niveau de priorité des exigences de mise en conformité.

Comme la directive, le projet de loi ne fixe pas de date d’entrée en vigueur de ces dispositions.

Néanmoins, il est prévu qu’elles soient appliquées de façon progressive. Certaines d’entre elles devraient, par exemple, être mises en œuvre dans l’année, tandis que, lors de leurs auditions devant la commission spéciale, Mme la ministre déléguée et M. le directeur général de l’Anssi se sont engagés à ce que les premiers contrôles découlant du cadre législatif que nous sommes en train de fixer ne soient pas diligentés avant au moins trois ans de façon effective.

Nous avons tenu à inscrire cet engagement dans le marbre de la loi. C’est la raison pour laquelle nous proposerons un amendement portant article additionnel après l’article 37 dont les dispositions iront dans ce sens.

Par conséquent, la commission spéciale émet un avis défavorable sur l’amendement n° 29, qui paraît satisfait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. J’ai eu l’occasion de m’exprimer sur ce sujet tout à l’heure.

Le Gouvernement a étudié avec le Conseil d’État différentes pistes pour permettre cette progressivité. Il a pris un engagement que le rapporteur, tout comme le directeur de l’Anssi, a rappelé, et qu’il tiendra. Même si celui-ci ne peut pas figurer dans la loi, il sera bien respecté : les entreprises ne seront pas exposées à des sanctions avant trois ans et, durant cette période, les contrôles menés auront une visée pédagogique et éducative, afin de permettre à chacune de monter en compétence.

Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Monsieur Cardon, l’amendement n° 29 est-il maintenu ?

M. Rémi Cardon. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 29 est retiré.

Je mets aux voix l’article 30.

(Larticle 30 est adopté.)

Section 2

Mesures consécutives aux contrôles

Article 30
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Article 32

Article 31

Lorsqu’un contrôle réalisé en application de la section 1 révèle un manquement aux obligations mentionnées à l’article 26, l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information peut ouvrir une procédure. Le cas échéant, elle en informe la personne contrôlée.

L’instruction est confiée à un ou plusieurs rapporteurs désignés parmi les agents et personnels mentionnés à l’article 26.

Lorsque les faits constatés ne justifient pas l’adoption d’une mesure d’exécution mentionnée aux 1° à 5° du présent article, l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information clôt la procédure et en informe la personne contrôlée.

Dans le cas contraire, l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information peut, après avoir mis la personne contrôlée en mesure de présenter ses observations :

1° Prononcer un avertissement à son encontre ;

2° Lui enjoindre de prendre les mesures nécessaires pour éviter un incident ou y remédier et d’en rendre compte dans un délai qu’elle détermine ;

3° Lui enjoindre de se mettre en conformité avec les obligations mentionnées à l’article 26 dans un délai qu’elle détermine et qui ne peut être inférieur à un mois, sauf en cas de manquement grave ou répété ;

4° Lui enjoindre d’informer les personnes physiques ou morales auxquelles elle fournit des services ou au profit desquelles elle exerce des activités susceptibles d’être affectés par une menace de nature à porter gravement atteinte à la sécurité des systèmes d’information de la nature de cette menace et de suggérer à ces personnes des mesures préventives ou réparatrices ;

5° Lui enjoindre de mettre en œuvre, dans un délai qu’elle détermine, les recommandations formulées à la suite d’un audit de sécurité.

La mesure d’exécution adoptée est notifiée à la personne contrôlée et peut être assortie d’une astreinte dont le montant ne peut excéder 5 000 euros par jour de retard.

L’astreinte journalière court à compter du jour suivant l’expiration du délai imparti à la personne contrôlée pour se mettre en conformité avec la mesure d’exécution notifiée. En cas d’inexécution totale ou partielle ou d’exécution tardive, la commission des sanctions mentionnée à l’article L. 1332-15 du code de la défense procède à la liquidation de l’astreinte.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 104, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

Lorsqu’un contrôle réalisé en application de la section 1 révèle un manquement aux obligations mentionnées à l’article 26

par les mots :

Au vu des résultats du contrôle réalisé en application des dispositions de la section 1

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Le premier alinéa de l’article 31 doit prévoir des conditions de déclenchement de la phase d’instruction compatibles avec la réalité opérationnelle des contrôles.

Si c’est effectivement le cas, lorsque, de manière évidente, les mesures de contrôle ont révélé un manquement, cela doit également être possible lorsque le constat de certains faits est susceptible de révéler un manquement qui n’est pas encore qualifié ou pleinement établi au moment de l’ouverture de l’instruction.

Dans certaines hypothèses, la qualification d’un manquement nécessitera des mesures d’instruction approfondies assorties de mesures de contrôle complémentaires, le cas échéant.

Ainsi, la phase d’instruction permettra la qualification de certains faits au regard des réglementations mentionnées à l’article 26, justement pour déterminer si des manquements peuvent être identifiés.

C’est pourquoi il paraît important de ne pas limiter l’ouverture de la phase d’instruction uniquement aux manquements constatés et qualifiés, dans le cadre des mesures de contrôle.

Mme la présidente. L’amendement n° 117, présenté par MM. Chaize, Saury et Canévet, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Alinéa 1, première phrase

Remplacer les mots :

Lorsqu’un contrôle réalisé en application de la section 1 révèle un manquement aux obligations mentionnées à l’article 26

par les mots :

Lorsqu’un manquement ou une suspicion de manquement aux obligations mentionnées à l’article 26 apparaît au terme d’un contrôle réalisé en application de la section 1

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission spéciale sur l’amendement n° 104.

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement vise à permettre l’ouverture d’une procédure à l’encontre de l’entité contrôlée lorsque le contrôle mené, sans aboutir à la constatation d’un manquement évident de la part de cette entité, révèle des éléments ou des faits éveillant une suspicion de manquement.

Les agents chargés de l’instruction devront alors vérifier si le manquement peut ou non être qualifié et déterminer si l’adoption d’une mesure d’exécution est requise ou non dans les circonstances de l’espèce.

En ce qui concerne l’amendement n° 104, il vise à rétablir la rédaction initiale du texte, afin de permettre l’ouverture par l’Anssi d’une procédure à l’encontre de l’entité contrôlée au vu des résultats du contrôle, sans davantage de précision.

De façon à encadrer l’ouverture d’une telle procédure, la commission spéciale a précisé, sur l’initiative des rapporteurs, que celle-ci ne pouvait être ouverte que lorsque le contrôle révélait un manquement.

Certes, dans certains cas, le contrôle n’aboutit pas à une telle constatation, mais révèle un certain nombre d’éléments ou de faits éveillant une suspicion de manquement. Il est alors nécessaire d’ouvrir une procédure pour que les agents chargés de l’instruction vérifient si le manquement peut ou non être qualifié de déterminant, si l’adoption d’une mesure d’exécution est requise ou non dans les circonstances de l’espèce.

C’est la raison pour laquelle la commission spéciale préfère que soit adopté son amendement, qui a pour objet de fixer un cadre plus clair et plus sécurisant pour les entités soumises au contrôle de l’Anssi, en précisant qu’une procédure peut être ouverte lorsqu’un manquement ou une suspicion de manquement apparaît au terme du contrôle.

Par conséquent, la commission spéciale émet un avis défavorable sur l’amendement du Gouvernement, au profit du sien.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 117 ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même si je comprends pleinement l’intention qui est à l’origine de cet amendement, dont les dispositions vont dans le même sens que celles de l’amendement n° 104, monsieur le rapporteur, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement de la commission spéciale, au profit du sien.

M. Patrick Chaize, rapporteur. Bataille ! (Sourires.)

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. En effet, le résultat des contrôles pourra correspondre à trois états : le manquement avéré, la suspicion de manquement ou l’absence avérée de manquement.

Cette troisième possibilité n’est pas qualifiable au regard des moyens mis en œuvre lors des contrôles visant à garantir plus qu’une simple conformité formelle. Dans un certain nombre de cas, des mesures complémentaires d’instruction seront nécessaires pour qualifier cette absence de manquement.

Dès lors, mentionner le manquement ou la suspicion de manquement comme fait générateur de l’ouverture de l’instruction n’apporte aucune garantie nouvelle à notre sens.

A contrario, cela risquerait d’envoyer à tort l’idée que la réglementation présente pourrait trouver une réponse purement formelle de la part des assujettis. Il nous semble qu’il convient de conserver une procédure plus souple permettant l’engagement d’une phase d’instruction sur le fondement d’éléments plus divers : manquement avéré, suspicion de manquement, mais également besoin d’une instruction complémentaire.

Il est d’ailleurs rappelé que la phase d’instruction cadre le dialogue avec l’Anssi et peut donc présenter certaines garanties pour l’entité assujettie.

Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement tient à préserver la rédaction initiale du premier alinéa de l’article 31 et sollicite le retrait de l’amendement n° 117.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 104.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 117.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 89 rectifié quinquies, présenté par MM. Bleunven, J.-M. Arnaud, Cambier et Henno, Mme Jacquemet et MM. Lafon, Parigi et Pillefer, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 7

Remplacer les mots :

et qui ne peut être inférieur à un mois, sauf en cas de manquement grave ou répété

par les mots :

. Sauf en cas de manquement grave ou répété, le délai ne peut être inférieur à un mois et doit être adapté à la gravité du manquement, à la taille et à la capacité opérationnelle de l’entité concernée ;

II. – Alinéa 9

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée

Les recommandations formulées sont adaptées à la taille et à la capacité opérationnelle de l’entité concernée.

La parole est à M. Paul Toussaint Parigi.

M. Paul Toussaint Parigi. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que le délai accordé à l’Anssi à une entité pour que celle-ci se mette en conformité avec ses obligations, d’une part, et les recommandations qu’elle peut lui enjoindre de mettre en œuvre, d’autre part, doivent être adaptées à la gravité du manquement, à la taille et à la capacité opérationnelle de l’entité.

Je rappelle que l’article 31 habilite l’Anssi à décider de cinq types de mesures d’exécution lorsqu’elle constate un manquement dans le cadre d’un contrôle. Elle pourra donc choisir celui qui correspond le mieux à la nature du manquement et aux caractéristiques de l’entité contrôlée. Elle pourra même clore la procédure sans adopter de mesures d’exécution lorsque la situation le justifiera.

La disposition proposée ne paraît donc pas nécessaire. C’est pourquoi la commission spéciale demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

M. Paul Toussaint Parigi. Je le retire, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 89 rectifié quinquies est retiré.

L’amendement n° 23 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Bilhac, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mmes Guillotin et Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Ruel, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ce montant ne peut excéder 100 euros par jour de retard pour les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics administratifs.

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. C’est le même type d’amendement que tout à l’heure.

Ce projet de loi impose des obligations lourdes. Bien que la modification apportée par la commission spéciale, qui remplace l’infraction pénale par une amende administrative, soit un progrès notoire, la question de la proportionnalité des sanctions aux collectivités demeure.

En effet, l’amende administrative, qui varie de 1 euro à 500 euros après deux notifications successives, permet toujours d’appliquer une majoration quotidienne en cas de retard dans la mise en conformité.

Ce projet de loi prévoit une astreinte de 5 000 euros par jour de retard. Cet amendement vise à réduire cette dernière à 100 euros par jour, pour des raisons de proportionnalité évidentes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement tend à abaisser de 5 000 à 100 euros par jour de retard le plafond de l’astreinte pouvant être décidée en parallèle d’une mesure d’exécution lorsque l’entité contrôlée est une collectivité territoriale, un groupement de collectivité ou un établissement public administratif appartenant à une collectivité.

Bien que je partage vos alarmes sur la situation financière des collectivités, ma chère collègue, une telle différenciation entre les différentes catégories d’entités paraît d’autant moins justifiée que la mise en œuvre dans le délai imparti de la mesure d’exécution adoptée par l’Anssi s’impose à toutes les entités sans distinction.

Je rappelle que l’objet d’une mesure d’exécution est non de sanctionner l’entité contrôlée, mais de mettre en terme à un manquement aux obligations qui s’imposent à elle, afin d’éviter de graves conséquences pour la sécurité de ces systèmes d’information. Le fait qu’il s’agisse d’une collectivité territoriale n’y change rien.

Il est donc nécessaire de prévoir une astreinte suffisamment incitative pour que ces mesures soient mises en œuvre le plus rapidement possible. Pour mémoire, il n’est pas prévu qu’une astreinte accompagne systématiquement une mesure d’exécution. Il appartiendra en effet à l’Anssi d’en décider en fonction des circonstances.

Par conséquent, la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Nous avons choisi de ne pas sanctionner les collectivités territoriales pour répondre à la situation que vous avez décrite, madame la sénatrice, et à laquelle le Gouvernement est pleinement attentif. Pour autant, il est important de prévoir un levier financier permettant l’effectivité de la mesure ; l’abaissement du montant que vous proposez – 100 euros par jour d’astreinte, contre les 5 000 euros prévus initialement – nous semble excessif.

Il faut absolument que les exigences de cybersécurité soient prises au sérieux. Même si nous pouvons prévoir que les collectivités ne soient pas soumises à des sanctions, une astreinte d’un montant substantiel paraît nécessaire, afin de s’assurer que tout le monde prend conscience des risques auxquels les collectivités sont exposées.

J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 23 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 61 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos et MM. Grand, Laménie, V. Louault, A. Marc, L. Vogel et Wattebled, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette mesure d’exécution ne peut être rendue publique par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information.

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Mes chers collègues, nous l’avons dit, nous ne souhaitons pas surtransposer ces directives dans ce projet de loi.

Cet amendement de précision vise à éviter toute surtransposition dans la pratique des sanctions, notamment la publicité des manquements. Ainsi, il s’agit de prévoir explicitement dans le texte que l’Anssi ne peut rendre les manquements publics.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement vise à interdire à l’Anssi de rendre publique la mesure d’exécution adoptée. Je rappelle que, sur notre initiative, la commission spéciale a supprimé la faculté accordée à l’Anssi de rendre publique la mesure d’exécution adoptée et d’enjoindre à la personne contrôlée de rendre public son manquement.

Seule la commission des sanctions est désormais habilitée à décider, dans l’intérêt du public, de publier sa décision ou un extrait de celle-ci.

Cet amendement paraissant satisfait, la commission spéciale demande son le retrait ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même avis.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Je le retire, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 61 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 31, modifié.

(Larticle 31 est adopté.)

Article 31
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Article 33

Article 32

(Supprimé)

Article 32
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Article 34

Article 33

Lorsque la personne contrôlée fournit des éléments montrant qu’elle s’est mise en conformité avec la mesure d’exécution notifiée en application de l’article 31 dans le délai imparti, l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information constate qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la procédure et en informe la personne contrôlée.

Dans le cas contraire, l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information notifie à la personne contrôlée les griefs retenus à son encontre et saisit la commission des sanctions mentionnée à l’article L. 1332-15 du code de la défense.

Lorsque la personne contrôlée est une entité essentielle au sens des articles 8 et 10 de la présente loi et qu’elle n’apporte pas la preuve qu’elle s’est mise en conformité avec les mesures d’exécution mentionnées aux 2°, 3° et 5° de l’article 31 de la présente loi dans le délai imparti, l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information peut suspendre une certification ou une autorisation concernant tout ou partie des services fournis ou des activités exercées par l’entité jusqu’à ce que celle-ci ait mis un terme au manquement. Lorsque cette certification ou cette autorisation a été délivrée par un organisme de certification ou d’autorisation tiers, l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information enjoint à cet organisme de la suspendre jusqu’à ce que l’entité ait mis un terme au manquement – (Adopté.)

Article 33
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Article 35

Article 34

Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de la procédure prévue à la présente section – (Adopté.)

Section 3

Des sanctions

Article 34
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Article 36

Article 35

Saisie par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information, la commission des sanctions mentionnée à l’article L. 1332-15 du code de la défense statue sur les manquements constatés aux obligations découlant de l’application des chapitres II et III du présent titre, dans les conditions prévues par la présente section – (Adopté.)

Article 35
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Article 37

Article 36

Lorsqu’elle est saisie par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information de manquements aux obligations découlant de l’application des chapitres II et III du présent titre, la commission des sanctions mentionnée à l’article L. 1332-15 du code de la défense est composée :

1° Des personnes mentionnées au 1° de l’article L. 1332-16 du même code ;

2° De trois personnalités qualifiées, nommées respectivement par le Premier ministre, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat en raison de leurs compétences dans le domaine de la sécurité des systèmes d’information. Ces personnalités qualifiées ne doivent pas avoir exercé de fonctions au sein de l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information depuis moins de cinq ans.

Mme la présidente. L’amendement n° 58 rectifié, présenté par MM. Cadic et Canévet, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° D’un représentant du ministère coordonnateur du secteur d’activité auquel appartient l’entité pour laquelle la commission est saisie ;

La parole est à M. Olivier Cadic.

M. Olivier Cadic. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. La commission des sanctions sera composée d’un membre du Conseil d’État, d’un membre de la Cour de cassation, d’un membre de la Cour des comptes et de trois personnalités qualifiées, nommées en raison de leurs compétences dans le domaine de la sécurité des systèmes d’information. Ces membres seront nommés pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois.

Ainsi composée, la commission des sanctions paraît équilibrée. Il serait a contrario excessivement complexe de prévoir que, pour chaque secteur d’activité différent – je rappelle que l’article 7 recense dix-huit secteurs hautement critiques… –, un membre différent émanant du ministère coordonnateur du secteur d’activité viendrait s’ajouter aux six membres permanents.

Par conséquent, la commission spéciale demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même avis.

M. Olivier Cadic. Je le retire, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 58 rectifié est retiré.

L’amendement n° 105, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 3, seconde phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Ces personnalités ne peuvent avoir exercé, au cours des trois années précédant leur nomination, une activité au sein de l’une des personnes mentionnées aux articles 8 et 9 ni au sein de l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Cet amendement vise à améliorer les garanties d’indépendance de la commission des sanctions – un sujet dont nous avons discuté avec la commission spéciale, qui lui accorde beaucoup d’importance –, ainsi que la prévention des conflits d’intérêts en son sein.

Il s’agit d’élargir aux entités assujetties la règle d’incompatibilité prévue pour l’Anssi et d’en abaisser la durée à trois ans, soit la durée de droit commun en la matière.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 105.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 36, modifié.

(Larticle 36 est adopté.)

Article 36
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Après l’article 37

Article 37

I. – En cas de manquement constaté aux obligations prévues au présent titre, la commission des sanctions peut prononcer :

1° À l’encontre des entités essentielles et des opérateurs mentionnés à l’article L. 1332-2 du code de la défense, à l’exception des administrations de l’État et de ses établissements publics administratifs, des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics administratifs, une amende administrative dont le montant, proportionné à la gravité du manquement, ne peut excéder 10 millions d’euros ou 2 % du chiffre d’affaires annuel mondial, hors taxes, de l’exercice précédent de l’entreprise à laquelle l’entité essentielle appartient, le montant le plus élevé étant retenu ;

2° À l’encontre des entités importantes, à l’exception des administrations de l’État et de ses établissements publics administratifs, des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics administratifs, une amende administrative dont le montant, proportionné à la gravité du manquement, ne peut excéder 7 millions d’euros ou 1,4 % du chiffre d’affaires annuel mondial total, hors taxes, de l’exercice précédent de l’entreprise à laquelle l’entité importante appartient, le montant le plus élevé étant retenu ;

3° À l’encontre des offices d’enregistrement et des bureaux d’enregistrement mentionnés à l’article 18 de la présente loi, à l’exception de ceux relevant des articles L. 45 à L. 45-8 du code des postes et des communications électroniques lorsqu’il s’agit d’un manquement aux obligations prévues à la section 3 du chapitre II de la présente loi, une amende administrative dont le montant, proportionné à la gravité du manquement, ne peut excéder 7 millions d’euros ou 1,4 % du chiffre d’affaires annuel mondial total, hors taxes, de l’exercice précédent. Cette amende peut se cumuler avec l’amende prévue au 1° prononcée à l’encontre d’un office d’enregistrement en cas de manquement aux obligations applicables aux entités essentielles.

Si les manquements relevés constituent également une violation du règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE, donnant lieu à une amende administrative prononcée par la Commission nationale de l’informatique et des libertés en application des articles 20 à 22-1 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, la commission des sanctions ne peut prononcer de sanction sous forme d’amende administrative.

II. – La commission des sanctions peut prononcer une amende administrative dont le montant, proportionné à la gravité du manquement, ne peut excéder 10 millions d’euros ou 2 % du chiffre d’affaires annuel mondial total, hors taxes, de l’exercice précédent, le montant le plus élevé étant retenu, à l’encontre :

1° Des fournisseurs de moyens d’identification électronique relevant des schémas d’identification électronique notifiés par l’État, des prestataires de services de confiance établis sur le territoire français, des fournisseurs de dispositifs de création de signature et de cachet électronique qualifié qu’elle certifie et des organismes d’évaluation de la conformité, à l’exception des administrations de l’État et de leurs établissements publics à caractère administratif, en cas de manquement constaté au règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 précité ;

2° Des organismes d’évaluation de la conformité sauf si l’organisme d’évaluation de la conformité est l’autorité nationale de certification de cybersécurité, des titulaires d’une déclaration de conformité aux exigences d’un schéma de certification européen et de cybersécurité, des titulaires d’un agrément, d’une qualification ou d’un certificat dans le domaine de la cybersécurité, en cas de manquement constaté au règlement (UE) n° 2019/881 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 précité ou aux exigences mentionnées au 4° et au 5° de l’article 26 de la présente loi.

III. – Lorsque la commission des sanctions envisage de prononcer l’amende prévue à l’article 28 à l’encontre de la même personne, le montant cumulé des sanctions ne peut excéder le montant maximum de l’amende prévue au I ou au II du présent article.

IV. – La commission des sanctions peut également prononcer à l’encontre des organismes d’évaluation de la conformité et des titulaires d’agréments, de qualifications ou de certificats en matière de cybersécurité, au titre du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 précité, du règlement (UE) 2019/881 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 précité ou des exigences de cybersécurité mentionnées au 5° de l’article 26 de la présente loi les mesures suivantes :

1° L’abrogation d’un agrément, d’une qualification ou d’un certificat ;

2° L’abrogation de l’autorisation, de l’agrément ou de l’habilitation délivré à l’organisme d’évaluation de la conformité, lorsque le manquement n’est pas corrigé dans le délai imparti par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information.

V. – La commission des sanctions peut, en dernier recours, si le manquement persiste après que l’amende administrative prévue au I ou au II du présent article a été prononcée, interdire à toute personne physique exerçant les fonctions de dirigeant dans l’entité essentielle d’exercer des responsabilités dirigeantes dans cette entité, jusqu’à ce que l’entité essentielle ait remédié au manquement. Ces dispositions ne s’appliquent pas aux administrations.

VI (nouveau). – Lorsque la commission des sanctions prononce l’une des sanctions prévues aux I à IV, elle peut exiger que l’entité concernée communique au public, par tout moyen adapté et à ses frais, le manquement constaté.

La commission des sanctions peut décider, dans l’intérêt du public, de rendre publique sa décision ou un extrait de celle-ci, selon des modalités qu’elle précise.

Mme la présidente. L’amendement n° 106, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 13, première phrase

Remplacer les mots :

en dernier recours, si le manquement persiste après que l’amende administrative prévue au I ou au II du présent article a été prononcée

par les mots :

si les mesures d’exécution prévues aux articles 25 et 31 sont inefficaces,

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Cet amendement a pour objet la mise en conformité à la directive NIS 2 qui ne conditionne pas l’interdiction d’exercer des dirigeants des entités essentielles à la persistance d’un manquement malgré l’imposition d’amendes pécuniaires.

En effet, l’article 32 de la directive NIS 2 prévoit une procédure en deux temps, lorsque les mesures d’exécution de son paragraphe 4 aux points a) à d) et au point f) imposées aux entités essentielles – mesures de police administrative reprises dans le projet de loi – sont inefficaces.

En premier lieu, l’entité essentielle est invitée, dans un délai imparti, à pallier les insuffisances ou à satisfaire aux exigences des mesures d’exécution.

En second lieu, si la mesure demandée n’est pas prise dans ce délai, l’autorité de supervision peut notamment prévoir une interdiction temporaire d’exercer pour les dirigeants, qui sont des personnes physiques, de ces entités essentielles.

De plus, conformément à l’article 34 de la directive NIS 2, les amendes administratives peuvent intervenir en complément de l’interdiction d’exercer.

Cet amendement vise donc à conditionner l’interdiction d’exercer des dirigeants à l’inefficacité des mesures de police administratives, afin de ne pas pénaliser outre mesure les dirigeants et d’avoir l’assurance qu’ils sont fidèles autant que possible à la directive.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. La sanction consistant à prévoir une interdiction d’exercice pour des dirigeants qui n’auraient pas rempli leurs obligations en matière de cybersécurité est très mal vécue par les représentants des entreprises entendues par la commission spéciale. Notre intention première était donc de la supprimer purement et simplement.

Nous avons toutefois été sensibles au fait que, cette sanction étant prévue par la directive, sa suppression aurait présenté un risque de sous-transposition manifeste.

Le compromis trouvé par la commission spéciale, à savoir que la sanction d’interdiction d’exercice peut être prononcée en dernier recours, si le manquement persiste après que l’amende administrative a été prononcée, paraît plus équilibré, quand bien même il comporterait un léger risque de sous-transposition.

C’est la raison pour laquelle la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 106.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 21 rectifié nonies est présenté par Mme Morin-Desailly, MM. Laugier et Duffourg, Mmes Patru et Billon, MM. Henno et Lafon, Mme Jacquemet, M. Chauvet, Mme Gacquerre et MM. Pillefer et P. Martin.

L’amendement n° 46 rectifié est présenté par Mmes Conway-Mouret, Linkenheld et Blatrix Contat, M. Cardon, Mme Narassiguin, MM. Ros, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 88 rectifié quinquies est présenté par MM. Bleunven, J.-M. Arnaud, Cambier et Henno, Mme Jacquemet, MM. Lafon, Parigi et Pillefer et Mme Saint-Pé.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

… . – Lorsque la commission des sanctions prononce l’une des sanctions prévues au présent article, elle prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur, notamment sa bonne foi, ainsi que ses ressources et ses charges.

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour présenter l’amendement n° 21 rectifié nonies.

Mme Catherine Morin-Desailly. Il a déjà été question de cet amendement, qui a pour objet de prendre en compte, dans le prononcé de la sanction, les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur, notamment sa bonne foi, ainsi que ses ressources et ses charges. Cela permettrait d’éviter toute mesure disproportionnée qui pourrait peser très lourdement sur les plus petites entités, notamment les TPE-PME.

Mme la présidente. La parole est à M. Rémi Cardon, pour présenter l’amendement n° 46 rectifié.

M. Rémi Cardon. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi, pour présenter l’amendement n° 88 rectifié quinquies.

M. Paul Toussaint Parigi. Il est également défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Même si je souscris à l’esprit de ces amendements identiques, il ne me paraît pas indispensable de prévoir explicitement dans la loi que la commission des sanctions doit prendre en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur, notamment sa bonne foi, ainsi que ses ressources et ses charges.

Il va en effet de soi que toutes ces données seront appréciées. C’est pour cette raison que l’article 37 prévoit uniquement les plafonds des amendes administratives susceptibles d’être imposées aux entités régulées qui ne respecteraient pas leurs obligations en matière de cybersécurité.

Pour autant, l’objet de cet amendement ne pose pas de difficulté. C’est pourquoi la commission spéciale émet un avis de sagesse favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 21 rectifié nonies, 46 rectifié et 88 rectifié quinquies.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 37, modifié.

(Larticle 37 est adopté.)

Article 37
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Article 38

Après l’article 37

Mme la présidente. L’amendement n° 118, présenté par MM. Chaize, Saury et Canévet, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Après l’article 37

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Pour les entités essentielles mentionnées aux articles 8 et 10, les dispositions du présent chapitre entrent en vigueur trois ans après la promulgation de la loi n° du relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité.

Pour les entités importantes mentionnées aux articles 9 et 10, les dispositions du présent chapitre entrent en vigueur quatre ans après la promulgation de la loi n° du relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Chaize, rapporteur. Cet amendement vise à accorder aux entreprises, aux administrations et aux collectivités territoriales les délais nécessaires pour se mettre en conformité avec les obligations prévues par la directive NIS 2, dont ce projet de loi assure la transposition.

Il s’agira en particulier pour les 15 000 entités désormais régulées de se mettre en conformité avec le référentiel prévu à l’article 14 qu’édictera l’Anssi, ce qui nécessitera des investissements importants, le recours à des prestataires spécialisées, l’embauche de personnel qualifié, etc.

Il faudra donc laisser le temps aux entités de s’organiser. C’est pourquoi il est important de prévoir des délais nécessaires avant la mise en œuvre de contrôles, a fortiori de sanctions. Dans un souci de proportionnalité, ce délai est fixé à trois ans pour les entités essentielles et à quatre ans pour les entités importantes, qui sont de plus petite taille et souvent moins bien outillées pour mettre en place leurs nouvelles obligations en matière de cybersécurité.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Nous avons eu l’occasion de nous exprimer sur ce point à plusieurs reprises.

Aucun délai d’entrée en vigueur autre que celui qui est relatif à la transposition par les États membres n’est prévu dans la directive. Des dispositions transitoires ou d’entrée en vigueur différée ne peuvent donc être retenues. Ce point a été confirmé par le Conseil d’État.

Pour ces raisons, le Gouvernement ne peut émettre un avis favorable sur cet amendement. Pour autant, je l’ai déjà mentionné, je m’engage à ce que cette logique de progressivité soit respectée. Elle se traduira par le délai de trois ans dont j’ai parlé tout à l’heure, au cours duquel les contrôles de l’Anssi ne seront que des contrôles blancs ayant une visée pédagogique et d’accompagnement.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrick Chaize, rapporteur. Dès lors que j’ai entendu l’explication de Mme la ministre, je retire cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 118 est retiré.

Chapitre IV

Dispositions diverses d’adaptation

Après l’article 37
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Article 39

Article 38

Le titre III de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique est ainsi modifié :

1° L’article 30 est ainsi modifié :

a) Au II, les mots : « la communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » ;

b) Le III est ainsi modifié :

– le premier alinéa est ainsi rédigé :

« III. – La fourniture, le transfert depuis ou vers un État membre de l’Union européenne, l’importation et l’exportation d’un moyen de cryptologie n’assurant pas exclusivement des fonctions d’authentification ou de contrôle d’intégrité sont soumis à une déclaration préalable auprès du Premier ministre, sauf dans les cas prévus au b du présent III et sans préjudice des exigences applicables aux biens à double usage intégrant un moyen de cryptologie. Un décret en Conseil d’État fixe : » ;

– au b, après le mot : « depuis », sont insérés les mots : « ou vers », les mots : « la communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » et, après le mot : « importation », sont ajoutés les mots : « ou exportation » ;

c) Le IV est abrogé ;

2° L’article 33 est abrogé ;

3° Le I de l’article 35 est ainsi rédigé :

« I. – Sans préjudice de l’application du code des douanes, le fait de ne pas satisfaire à l’obligation de déclaration prévue à l’article 30 en cas de fourniture, de transfert depuis ou vers un État membre de l’Union européenne, d’importation ou d’exportation d’un moyen de cryptologie est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. – (Adopté.)

Article 38
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Après l’article 39

Article 39

I. – Le chapitre Ier du titre II du livre III de la deuxième partie du code de la défense est ainsi modifié :

1° L’article L. 2321-2-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, la première occurrence du mot : « ou » est remplacée par le signe : « , » et les mots : « à l’article 5 de la loi n° 2018-133 du 26 février 2018 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité » sont remplacés par les mots : « des entités essentielles au sens des articles 8 et 10 de la loi n … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité » ;

b) Au quatrième alinéa, la première occurrence du mot : « ou » est remplacée par le signe : « , » et les mots : « à l’article 5 de la loi n° 2018-133 du 26 février 2018 précitée » sont remplacés par les mots : « des entités essentielles au sens des articles 8 et 10 de la loi n° … du … précitée » ;

2° L’article L. 2321-3 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « opérateurs mentionnés à l’article 5 de la loi n° 2018-133 du 26 février 2018 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité » sont remplacés par les mots : « entités essentielles au sens de la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité » ;

b) Au deuxième alinéa, la première occurrence du mot : « ou » est remplacée par le signe : « , » et les mots : « à l’article 5 de la loi n° 2018-133 du 26 février 2018 précitée » sont remplacés par les mots : « d’une entité essentielle au sens des articles 8 et 10 de la loi n° … du … précitée ».

II. – Le code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :

1° L’article L. 33-1 est ainsi modifié :

a) À la fin du a du I, les mots : « qui incluent des obligations de notification à l’autorité compétente des incidents de sécurité ayant eu un impact significatif sur leur fonctionnement » sont supprimés ;

b) Après le q du même I, il est inséré un r ainsi rédigé :

« r) Les prescriptions en matière de sécurité des systèmes d’information prévues par loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité. » ;

c) À l’avant-dernier alinéa dudit I, les mots : « n ter et o » sont remplacés par les mots : « n ter, o et r » ;

d) Après le 3° du VII, il est inséré un 4° ainsi rédigé :

« 4° Les dispositions du r du I sont applicables en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie dans leur rédaction issue de la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité. » ;

2° Après le deuxième alinéa de l’article L. 45, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque office d’enregistrement est responsable du fonctionnement technique du domaine de premier niveau qui lui est attribué, incluant notamment l’exploitation de ses serveurs de noms de domaine, la maintenance de ses bases de données d’enregistrement et la distribution des fichiers de zone du domaine de premier niveau sur les serveurs de noms de domaine, qu’il effectue lui-même ces opérations ou qu’elles soient sous-traitées. » ;

3° Au deuxième alinéa de l’article L. 45-3, après le mot : « territoire » sont insérés les mots : « de l’un des États membres » ;

4° L’article 45-4 est ainsi modifié :

a) La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « ainsi que par les agents agissant pour le compte de ces derniers » ;

b) À la seconde phrase du même premier alinéa, après le mot : « enregistrement », sont insérés les mots : « ni aux agents agissant pour le compte de ces derniers » ;

c) Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les bureaux d’enregistrement sont responsables vis-à-vis de l’office d’enregistrement du respect de ces règles par les agents agissant pour leur compte. » ;

d) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le décret en Conseil d’État prévu à l’article L. 45-7 précise les catégories d’agents pouvant agir pour le compte des bureaux d’enregistrement. » ;

5° L’article L. 45-5 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« Les offices d’enregistrement, par l’intermédiaire des bureaux d’enregistrement ainsi que des agents agissant pour le compte de ces derniers, collectent les données nécessaires à l’enregistrement des noms de domaine, notamment celles relatives à l’identification des personnes physiques ou morales titulaires de ces noms de domaine et des personnes chargées de leur gestion. Après l’enregistrement, et sans retard injustifié, les offices et les bureaux d’enregistrement rendent publiques, au moins quotidiennement, ces données dès lors qu’elles n’ont pas de caractère personnel. Ils tiennent ces bases de données à jour, en maintenant les données exactes et complètes, sans redondance de collecte, et sont responsables du traitement de ces données dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. » ;

b) À la première phrase du dernier alinéa, après le mot : « inexactes », sont insérés les mots : « ou incomplètes » ;

c) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les offices d’enregistrement et les bureaux d’enregistrement répondent aux demandes d’accès aux données d’enregistrement dans un délai n’excédant pas soixante-douze heures après réception de la demande.

« Le décret en Conseil d’État prévu à l’article L. 45-7 fixe la liste des données d’enregistrement devant être collectées. » ;

6° L’article L. 45-8 est complété par les mots : « dans leur rédaction issue de la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité ».

III. – Le titre Ier de la loi n° 2018-133 du 26 février 2018 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité est abrogé.

IV. – L’ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives est ainsi modifiée :

1° Les 2° et 3° du II de l’article 1er sont abrogés ;

2° Les articles 9 et 12 sont abrogés ;

3° Le I de l’article 14 est abrogé – (Adopté.)

Article 39
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Article 40

Après l’article 39

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 15 rectifié septies est présenté par Mme Morin-Desailly, M. Laugier, Mme Patru, M. Duffourg, Mmes Billon et Saint-Pé, MM. Henno et Lafon, Mme Jacquemet, M. Chauvet, Mme Gacquerre et MM. Pillefer et P. Martin.

L’amendement n° 44 est présenté par M. Cardon, Mmes Linkenheld, Blatrix Contat, Conway-Mouret et Narassiguin, MM. M. Vallet, Ros et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 39

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du premier alinéa de l’article L. 4121-3 du code du travail est complétée par les mots : « et dans la sécurisation des outils numériques ».

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour présenter l’amendement n° 15 rectifié septies.

Mme Catherine Morin-Desailly. Il s’agit de compléter le document unique d’évaluation des risques professionnels (Duerp).

Ce document, qui, comme vous le savez, mes chers collègues, est obligatoire dans toute entreprise dès l’embauche du premier salarié, présente le résultat de l’évaluation des risques pour la santé et la sécurité auxquels peuvent être exposés les salariés.

Face à la menace cyber, à laquelle sont soumises maintenant quasi quotidiennement toutes les entreprises, il semble aujourd’hui pertinent de reconnaître le risque cyber comme un risque professionnel.

Une cyberattaque a bien sûr des conséquences économiques pour une entreprise, mais elle a aussi des conséquences psychosociales sur l’ensemble de ses personnels. Elle crée pour ses équipes une surcharge exceptionnelle d’activité, un sentiment de sidération, parfois d’incompétence, voire de culpabilité, qui peuvent aussi entacher l’efficacité.

La mise en place de nouveaux réflexes cyber après attaque peut également causer une forme de stress supplémentaire pour l’ensemble des salariés.

Compléter le document unique d’évaluation des risques professionnels permettrait un engagement général de toutes les parties prenantes de l’entreprise sur cette question, puisque celles-ci devraient procéder à une évaluation commune du risque et mettre en place une politique adaptée.

Cette nouvelle obligation participerait également à l’acculturation collective au numérique du plus grand nombre, en faveur de laquelle le Sénat plaide depuis de nombreuses années.

Mme la présidente. La parole est à M. Rémi Cardon, pour présenter l’amendement n° 44.

M. Rémi Cardon. Il s’agit d’un amendement de bon sens, qui vise à intégrer les risques cyber dans le Duerp distribué à l’embauche. Plus encore, ce document invite le salarié à une prise de conscience des risques au sein de l’entreprise.

Intégrer le risque cyber permet de satisfaire à trois objectifs : tout d’abord, sensibiliser et responsabiliser le salarié, ensuite, protéger les salariés – mieux vaut en effet prévenir que guérir –, enfin, favoriser un engagement plus large et une dynamique collective au sein de l’entreprise.

Voilà une disposition qui ne coûte pas cher ! (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Je ne reviens pas sur l’objet de l’amendement. Néanmoins, je ne suis pas convaincu par le bénéfice qu’apporterait cette modification, qui figurerait dans un article du code du travail portant sur des sujets bien différents.

L’article a en effet trait à l’environnement de travail des travailleurs et à l’impact de ce dernier sur la santé physique et mentale des travailleurs, une question qui n’a que peu à voir avec la cybersécurité.

La commission spéciale émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Dans le cadre de la transposition de la directive NIS 2, nous avons l’obligation de respecter le plus fidèlement possible la directive et de ne pas surtransposer. Nous sommes pleinement conscients des risques que vous mentionnez et de l’importance d’embarquer les employés dans la compréhension des risques cyber et la préparation à ces risques.

Cependant, il nous semble qu’il s’agirait là d’une surtransposition qui ne plairait pas aux entités, parce que, nous le savons, il faut que le cadre européen reste le plus harmonisé possible ; nous ne devons pas tomber dans la disparité. L’harmonisation, telle est bien l’objectif de ce texte.

A contrario, cette disposition créerait pour les entités assujetties une obligation que la directive ne prévoit pas. Elle s’appliquerait par ailleurs au-delà du périmètre des organisations prévues dans la directive.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 15 rectifié septies et 44.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Après l’article 39
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Article 41

Article 40

I. – Le titre II de la présente loi, à l’exception de l’article 13 et des 2° à 6° du II de l’article 39, est applicable en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, sous réserve des adaptations suivantes :

1° En l’absence d’adaptation, les références faites par des dispositions du titre II applicables en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie à des dispositions qui n’y sont pas applicables sont remplacées par les références aux dispositions ayant le même objet applicables localement ;

2° En Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, les sanctions pécuniaires encourues en application du titre II sont prononcées en monnaie locale, compte tenu de la contre-valeur de l’euro dans cette monnaie.

bis (nouveau). – le titre II de la présente loi, à l’exception de l’article 13, est applicable dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises. Toutefois, dans les îles Wallis et Futuna les sanctions pécuniaires encourues en vertu du titre II de la présente loi sont prononcées en monnaie locale, compte tenu de la contre-valeur de l’euro dans cette monnaie.

II. – L’article 13 de la présente loi n’est pas applicable à Saint-Barthélemy et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

III. – Pour l’application du titre II à Saint-Barthélemy, à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, les références à la directive (UE) 2022/2555 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans l’ensemble de l’Union modifiant le règlement (UE) n° 910/2014 et la directive (UE) 2018/1972, et abrogeant la directive (UE) 2016/1148, au règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE, au règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive n° 1999/93/CE et au règlement (UE) n° 2019/881 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 relatif à l’ENISA (Agence de l’Union européenne pour la cybersécurité) et à la certification de cybersécurité des technologies de l’information et des communications, et abrogeant le règlement (UE) n° 526/2013 sont remplacées par la référence aux règles en vigueur en métropole en vertu de la même directive et des mêmes règlements.

IV. – Le I de l’article 57 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « 25 et 29 à 49 » sont remplacés par les mots : « 25, 29 à 31 et 37 à 49 » et les mots : « loi n° 2024-449 du 21 mai 2024 visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique » sont remplacés par les mots : « loi n … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité » ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « 25 et 29 à 49 » sont remplacés par les mots : « 25, 29 à 31 et 37 à 49 » et, après les mots : « Terres australes et antarctiques françaises », sont insérés les mots : « dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité » ;

3° Au troisième alinéa, les mots : « articles 35 à 38 » sont remplacés par les mots : « articles 37, 38 » et les mots : « 29 à 34, 39 et 40 » sont remplacés par les mots : « 29 à 31, 37, 39 et 40 ».

V. – Le I de l’article 24 de la loi n° 2018-133 du 26 février 2018 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité est ainsi rédigé :

« I. – Le titre V est applicable à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, dans sa rédaction résultant de la présente loi. »

VI. – L’article 16 de l’ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives est complété par les mots : « dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité » – (Adopté.)

Chapitre V

Dispositions relatives aux communications électroniques

Article 40
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Article 42

Article 41

L’article L. 39-1 du code des postes et des communications électroniques est ainsi rédigé :

« Art. L. 39-1. – I. – Est puni de six mois d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende le fait :

« 1° De maintenir un réseau indépendant en violation d’une décision de suspension ou de retrait du droit d’établir un tel réseau ;

« 2° D’utiliser une fréquence, un équipement ou une installation radioélectrique :

« a) Dans des conditions non conformes à l’article L. 34-9 ;

« b) Sans posséder l’autorisation prévue à l’article L. 41-1 ;

« c) En dehors des conditions de ladite autorisation lorsque celle-ci est requise ;

« d) Sans posséder le certificat d’opérateur prévu à l’article L. 42-4 ;

« e) En dehors des conditions réglementaires générales prévues à l’article L. 33-3 ;

« f) Sans l’accord ou l’avis mentionné au I de l’article L. 43 ou en dehors des caractéristiques déclarées lors de la demande de cet accord ou de cet avis.

« II. – Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende, sans préjudice de l’application de l’article 78 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le fait :

« 1° De perturber les émissions hertziennes d’un service autorisé en utilisant une fréquence, un équipement ou une installation radioélectrique :

« a) Dans des conditions non conformes à l’article L. 34-9 ;

« b) Sans posséder l’autorisation prévue à l’article L. 41-1 ;

« c) En dehors des conditions de ladite autorisation lorsque celle-ci est requise ;

« d) Sans posséder le certificat d’opérateur prévu à l’article L. 42-4 ;

« e) En dehors des conditions réglementaires générales prévues à l’article L. 33-3 ;

« f) Sans l’accord ou l’avis mentionné au I de l’article L. 43 ou en dehors des caractéristiques déclarées lors de la demande de cet accord ou de cet avis ;

« 2° De perturber les émissions hertziennes d’un service autorisé en utilisant un appareil, un équipement ou une installation, électrique ou électronique, dans des conditions non conformes à la réglementation régissant la compatibilité électromagnétique des équipements électriques et électroniques.

« III. – Est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende le fait :

« 1° D’avoir pratiqué l’une des activités prohibées par le I de l’article L. 33-3-1 en dehors des cas et conditions prévus au II du même article L. 33-3-1 ;

« 2° D’utiliser, sans l’autorisation prévue au premier alinéa de l’article L. 41-1, des fréquences attribuées par le Premier ministre en application de l’article L. 41 pour les besoins de la défense nationale et de la sécurité publique ou d’utiliser une installation radioélectrique, en vue d’assurer la réception de signaux transmis sur ces mêmes fréquences, sans l’autorisation prévue au deuxième alinéa de l’article L. 41-1. »

Mme la présidente. L’amendement n° 110, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Remplacer les mots :

sans préjudice

par les mots :

sous réserve

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 110.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 41, modifié.

(Larticle 41 est adopté.)

Article 41
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Article 43 A (nouveau)

Article 42

I. – L’article L. 97-2 du code des postes et communications électroniques est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Le second alinéa du 1 est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :

« L’Agence nationale des fréquences déclare, au nom de la France, l’assignation de fréquence correspondante à l’Union internationale des télécommunications et engage la procédure prévue par le règlement des radiocommunications.

« Cette déclaration est effectuée sous réserve :

« – de la conformité de l’assignation demandée avec le tableau national de répartition des bandes de fréquences et aux stipulations des instruments de l’Union internationale des télécommunications ;

« – de l’existence d’un intérêt économique ou d’un intérêt pour la défense nationale justifiant que la déclaration soit effectuée au nom de la France ;

« – que l’assignation soumise ne soit pas de nature à compromettre les intérêts de la sécurité nationale et le respect par la France de ses engagements internationaux. » ;

b) Le 2 est ainsi modifié :

– après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’autorisation est octroyée à une entité de droit français ou à un établissement immatriculé au registre du commerce et des sociétés en France. » ;

– au 1°, après le mot : « défense », il est inséré le mot : « nationale » et sont ajoutés les mots : « ainsi que le respect par la France de ses engagements internationaux » ;

– après le 4°, sont insérés des 5° et 6° ainsi rédigés :

« 5° Lorsque le demandeur ne peut démontrer que l’autorisation présente un intérêt économique pour la France ;

« 6° Lorsque le demandeur est dans l’incapacité technique ou financière de faire face durablement aux obligations qui seraient les siennes une fois l’autorisation obtenue. » ;

c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Elle peut être assortie, le cas échéant, de conditions visant à assurer que les activités prévues dans le cadre de l’exploitation de l’assignation autorisée ne porteront pas atteinte aux intérêts de la sécurité et de la défense nationale ou au respect par la France de ses engagements internationaux. » ;

2° Le second alinéa du III est remplacé par onze alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque le titulaire de l’autorisation ne se conforme pas, dans le délai imparti, à la mise en demeure qui lui a été adressée, le ministre chargé des communications électroniques peut lui notifier des griefs.

« Après que l’intéressé a reçu la notification des griefs et a été mis à même de consulter le dossier et de présenter ses observations écrites, le ministre chargé des communications électroniques procède, avant de prononcer une sanction, à son audition selon une procédure contradictoire.

« Le ministre chargé des communications électroniques peut, en outre, entendre toute personne dont l’audition lui paraît utile.

« Le ministre chargé des communications électroniques peut prononcer à l’encontre du titulaire de l’autorisation l’une des sanctions suivantes :

« 1° La suspension totale ou partielle, pour un mois au plus, de l’autorisation, la réduction de sa durée, dans la limite d’une année, ou son retrait ;

« 2° Une sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement et aux avantages qui en sont retirés, sans pouvoir excéder 3 % du chiffre d’affaires hors taxes du dernier exercice clos, ou 5 % de celui-ci en cas de nouvelle violation de la même obligation. À défaut d’activité permettant de déterminer ce plafond, le montant de la sanction ne peut excéder 150 000 euros, ou 375 000 euros en cas de nouvelle violation de la même obligation ;

« 3° L’interruption de la procédure engagée par la France auprès de l’Union internationale des télécommunications.

« Lorsque le manquement est constitutif d’une infraction pénale, le montant total des sanctions pécuniaires prononcées ne peut excéder le montant de la sanction encourue le plus élevé.

« Lorsque le ministre chargé des communications électroniques a prononcé une sanction pécuniaire devenue définitive avant que le juge pénal ait statué sur les mêmes faits ou des faits connexes, ce dernier peut ordonner que la sanction pécuniaire s’impute sur l’amende qu’il prononce.

« Les sanctions pécuniaires sont recouvrées comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine.

« Les décisions du ministre chargé des communications électroniques sont motivées et notifiées à l’intéressé. Elles peuvent être rendues publiques dans les publications, journaux ou services de communication au public par voie électronique choisis par lui, dans un format et pour une durée proportionnés à la sanction infligée. Elles peuvent faire l’objet d’un recours de pleine juridiction. » ;

3° Le VI est ainsi rédigé :

« VI. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. Il précise :

« 1° Les conditions dans lesquelles l’Agence nationale des fréquences déclare, au nom de la France, les assignations de fréquence à l’Union internationale des télécommunications ;

« 2° La procédure selon laquelle les autorisations sont délivrées ou retirées et selon laquelle leur caducité est constatée ;

« 3° Les conditions dont les autorisations d’exploitation peuvent être assorties ;

« 4° La durée et les conditions de modification et de renouvellement de l’autorisation ;

« 5° Les conditions de mise en service du système satellitaire ;

« 6° Les modalités d’établissement et de recouvrement de la redevance prévue au deuxième alinéa du 2 du I ;

« 7° Les modalités des procédures de mise en demeure et de sanction prévues au III. »

II. – À l’article L. 97-4 du code des postes et des communications électroniques, après la référence : « L. 97-2 », sont insérés les mots : « , dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité, ».

III. – Les dispositions du présent article s’appliquent à compter de l’entrée en vigueur du décret prévu au VI et au plus tard le 31 décembre 2025.

Mme la présidente. L’amendement n° 72, présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

L’ensemble des activités relevant de l’exploitation d’une fréquence, notamment la fourniture de services de communications électroniques qui en découle, est soumis aux mêmes obligations d’immatriculation et de droit.

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Cet amendement vise à poser une règle simple : lorsque l’on exploite une ressource publique, le spectre électromagnétique, et que l’on fait du commerce sur notre sol, on doit se plier aux mêmes exigences que n’importe quelle entreprise française.

Certes, nous ne disons pas que cette proposition est une solution miracle. Mais elle représente un premier pas.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Patrick Chaize, rapporteur. De nombreux acteurs internationaux font le choix de s’adresser à la France, afin de bénéficier d’une autorisation d’exploiter une assignation de fréquence déposée auprès de l’Union internationale des télécommunications (UIT), car l’Agence nationale des fréquences (ANFR) est tout à fait reconnue pour sa capacité à en obtenir.

Si cette situation témoigne de l’excellence de l’expertise française dans ce domaine, il paraît indispensable de s’assurer que les acteurs privés qui bénéficient de ce savoir-faire en matière de gestion de fréquences ne nuisent pas aux intérêts de la sécurité et de la défense nationale et contribuent au développement de l’économie française.

C’est pourquoi les évolutions prévues à l’article 42, qui visent à accorder plus de marge à l’ANFR et au ministre chargé des communications électroniques avant, durant et après la procédure d’autorisation d’assignation de fréquences relatives à un système satellitaire, sont particulièrement bienvenues. Je pense en particulier au fait de prévoir que l’autorisation d’exploiter une fréquence ne peut être octroyée qu’à une entité de droit français ou à un établissement immatriculé au registre du commerce et des sociétés en France.

Le savoir-faire de l’ANFR doit en effet bénéficier non à des entreprises étrangères sans lien avec la France et uniquement à la recherche de la juridiction la plus favorable à leurs intérêts, mais à des entreprises qui sont en mesure de faire valoir l’existence d’un intérêt économique ou d’un intérêt pour la défense nationale, justifiant que la déclaration soit effectuée au nom de la France.

Prévoir une obligation d’établissement en France pour l’emploi ultérieur de systèmes satellitaires à des fins de fourniture de services de communication électronique poserait en revanche un problème de compatibilité avec le droit de l’Union européenne, en particulier avec l’article 56 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, qui garantit la libre prestation de services.

Par conséquent, la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 72.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 42.

(Larticle 42 est adopté.)

Mme la présidente. Madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il est bientôt vingt heures. Nous allons entamer la discussion du titre III de ce projet de loi. Pensez-vous que nous pouvons examiner les 17 amendements qui lui sont rattachés en trente minutes ? (Marques dassentiment.)

Cela suppose que, tous, nous fassions preuve de concision.

TITRE III

RÉSILIENCE OPÉRATIONNELLE NUMÉRIQUE DU SECTEUR FINANCIER

Chapitre Ier

Dispositions modifiant le code monétaire et financier

Article 42
Dossier législatif : projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité
Après l’article 43 A

Article 43 A (nouveau)

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° La section 2 du chapitre Ier du livre Ier est complétée par un article L. 141-10 ainsi rédigé :

« Art. L. 141-10. – La Banque de France exerce les fonctions et missions prévues à l’article 19 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 pour les dépositaires centraux mentionnés à l’article L. 441-1. » ;

2° Après l’article L. 612-24, il est inséré un article L. 612-24-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 612-24-1. – L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution exerce les fonctions et missions prévues à l’article 19 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 pour les personnes mentionnées au A du I de l’article L. 612-2, à l’exception de celles mentionnées au b de son 2°. »

Mme la présidente. L’amendement n° 123, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 3

Remplacer les mots :

exerce les fonctions et missions prévues à l’article 19

par les mots :

veille au respect

II. - Alinéa 5

1° Remplacer les mots :

exerce les fonctions et missions prévues à l’article 19

par les mots :

veille au respect

2° Après les mots :

personnes mentionnées

Rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

aux I et II de l’article L. 612-2, à l’exception de celles mentionnées au b du 2° du A du I et du 8° du B du I.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Cet amendement vise à désigner la Banque de France, ainsi que l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), comme autorités compétentes au titre de l’application du règlement Dora.

Nous avons eu un certain nombre de discussions sur la nécessaire articulation entre l’application de la directive NIS 2 et celle du règlement Dora, notamment en ce qui concerne la notification des incidents. Celle-ci permet d’assurer l’assistance technique dont les entités concernées auront besoin de la part des équipes spécialisées dans la gestion des incidents de sécurité informatique, les Csirt.

Il nous semble que cette articulation est satisfaite par un autre amendement, qui tend à expliciter les incidents concernés. Dans le cadre de Dora, nous demandons que l’autorité compétente et l’Anssi soient notifiées des incidents, afin de répondre aux impératifs opérationnels.

Les entités financières peuvent être attaquées à tout moment, de jour comme de nuit, n’importe quel jour. Or l’autorité financière n’opère pas les week-ends. Il est donc essentiel de maintenir la notification auprès de l’Anssi, qui assure déjà, de manière opérationnelle, un rôle d’appui, de contrôle et de soutien à tout moment.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 124, présenté par M. Canévet, est ainsi libellé :

Amendement n° 123, alinéas 1 à 5 et 7 à 10

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Ce que la commission spéciale a cherché, c’est la simplification pour l’ensemble des opérateurs. Tel est le sens des améliorations du texte que nous avons proposées.

L’amendement n° 123, que le Gouvernement a d’ailleurs déposé très tardivement, vise à remettre en cause ce travail. J’ai donc déposé ce sous-amendement, qui vise à préserver le principe du guichet unique, afin d’éviter aux entreprises d’avoir à multiplier les démarches. Toutefois, je conserve une partie des dispositions gouvernementales, qui corrigent une erreur de référence et me semblent donc justifiées.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 124 ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Le processus que j’ai décrit nous semble approprié, car il permet de conserver une certaine simplicité en utilisant un même formulaire et un système efficace de partage d’informations entre les deux autorités.

M. le rapporteur et moi-même avons eu l’occasion d’échanger sur ce point à plusieurs reprises ; nous restons tous deux convaincus de nos positions respectives. En tout cas, il me paraît nécessaire de s’appuyer sur l’Anssi dans le cadre du règlement Dora.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 124.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 123, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 43 A, modifié.

(Larticle 43 A est adopté.)

Article 43 A (nouveau)
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Article 43

Après l’article 43 A

Mme la présidente. L’amendement n° 107 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 43 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 612-24 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 612-24-… ainsi rédigé :

« Art. L. 612-24-…. I. – En application du premier alinéa du paragraphe 1 de l’article 19 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier, les entités financières soumises à ce règlement qui relèvent de la compétence de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, à l’exception des personnes mentionnées au b) du 2° du A du I de l’article L. 612-2, adressent à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution leurs déclarations d’incidents majeurs liés aux technologies de l’information et de la communication.

« Lorsque ces entités sont également soumises en tant qu’entités essentielles ou importantes aux dispositions prévues au titre II de la loi n° X du X relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité, elles transmettent également à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information, en application du sixième alinéa du 1 de l’article 19 du règlement mentionné à l’alinéa précédent, leurs déclarations d’incidents majeurs liés aux technologies de l’information et de la communication.

« II. – En application du paragraphe 2 de l’article 19 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier, les entités financières mentionnées au premier alinéa du I peuvent adresser à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution leurs notifications de cybermenaces. Dans ce cas, elles transmettent également ces notifications à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information. »

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Cet amendement vise à définir une procédure qui évite aux entités de devoir adresser plusieurs déclarations identiques aux différentes autorités financières dont elles relèvent.

Une communication supplémentaire est toutefois prévue au bénéfice de l’Anssi, de manière obligatoire pour les entités assujetties à NIS 2 et sur une base volontaire pour les autres entités, afin de faciliter le partage rapide d’informations et le traitement des incidents et menaces par l’Anssi.

Je tiens à insister de nouveau sur ce point : nous disposons avec l’Anssi d’une autorité compétente sur ces questions. Il est essentiel de s’assurer qu’elle puisse accompagner au mieux les entités financières lorsque celles-ci sont ciblées par des attaques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Michel Canévet, rapporteur. La commission spéciale souhaitant simplifier la vie des entreprises, elle a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Nous aussi, nous visons un objectif de simplification. Mais il me semble que les entreprises peuvent tout de même renseigner un simple formulaire ! Ainsi, elles pourront accéder facilement au soutien qui leur est absolument nécessaire en cas de cyberattaque.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Canévet, rapporteur. Adopter cet amendement serait contradictoire avec la position que nous venons de prendre sur l’article précédent.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 107 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 43 A
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Article 44

Article 43

Au 7° du III de l’article L. 314-1 du code monétaire et financier, après les mots : « de l’information », sont insérés les mots : « et de la communication » – (Adopté.)

Article 43
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Article 45

Article 44

L’article L. 420-3 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « des systèmes, des procédures et des mécanismes efficaces assurant » sont remplacés par les mots : « et maintient sa résilience opérationnelle conformément aux exigences prévues au chapitre II du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 pour garantir » et le mot : « tension » est remplacé par les mots : « graves tensions » ;

b) À la deuxième phrase, après le mot : « tests », il est inséré le mot : « exhaustifs » et, à la fin, les mots : « dans des situations d’extrême volatilité des marchés » sont supprimés ;

c) À la troisième phrase, après le mot : « activités », sont insérés les mots : « , y compris une politique et des plans en matière de continuité des activités liées aux technologies de l’information et de la communication et des plans de réponse et de rétablissement des technologies de l’information et de la communication mis en place conformément à l’article 11 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 précitée afin d’assurer le maintien de ses services, » ;

2° Le III est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après la seconde occurrence du mot : « tests », sont insérés les mots : « conformément aux exigences fixées aux chapitres II et IV du règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 précitée » et les mots : « s’assurer » sont remplacés par le mot : « garantir » ;

b) Au deuxième alinéa, après le mot : « négociation, », il est inséré le mot : « afin » – (Adopté.)

Article 44
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Après l’article 45

Article 45

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° À l’article L. 421-4, les mots : « aux alinéas 2 et 4 » sont remplacés par les mots : « au 2 » ;

2° L’article L. 421-11 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi modifié :

– au 2, après le mot : « permettant », sont insérés les mots : « de gérer les risques auxquels elle est exposée, y compris les risques liés aux technologies de l’information et de la communication conformément au chapitre II du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011, » ;

– le 4 est abrogé ;

b) À la seconde phrase du premier alinéa du III, les mots : « aux 2 et 4 » sont remplacés par les mots : « au 2 » et sont ajoutés les mots : « du présent article » ;

c) À la seconde phrase du second alinéa du même III, les mots : « aux 2 et 4 » sont remplacés par les mots : « au 2 » et, après la référence : « II », sont insérés les mots : « du présent article » – (Adopté.)

Article 45
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Article 46

Après l’article 45

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 119, présenté par MM. Canévet, Chaize et Saury, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Après l’article 45

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° L’article L. 54-10-7 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – L’Autorité des marchés financiers exerce les fonctions et missions prévues à l’article 19 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 pour les prestataires agréés conformément au I, à l’exception de ceux visés à l’article L. 612-24-1. » ;

2° Après l’article L. 421-11, il est inséré un article L. 421-11-… ainsi rédigé :

« Art. L. 421-11- – L’Autorité des marchés financiers exerce les fonctions et missions prévues à l’article 19 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 pour l’entreprise de marché mentionnée à l’article L. 421-2. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Canévet, rapporteur. Cet amendement vise à désigner l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution comme institution de référence pour les entreprises de marché et pour les prestataires de cryptoactifs.

Mme la présidente. L’amendement n° 111 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 45

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 54-10-7 du code monétaire et financier est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« VI. En application du deuxième alinéa du paragraphe 1 de l’article 19 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier, les prestataires agréés conformément au I, à l’exception de ceux visés au I. de l’article L. 612-24-1 du code monétaire et financier, adressent à l’Autorité des marchés financiers leurs déclarations d’incidents majeurs liés aux technologies de l’information et de la communication.

« En application du premier alinéa du paragraphe 2 de l’article 19 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier, les prestataires agréés conformément au I, à l’exception de ceux visés au I de l’article L. 612-24-1 du code monétaire et financier peuvent adresser à l’Autorité des marchés financiers leurs notifications de cybermenaces. »

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Cet amendement vise à désigner l’Autorité des marchés financiers (AMF) comme destinataire des déclarations d’incidents des prestataires de services sur cryptoactifs agréés, conformément au règlement Dora.

Mme la présidente. L’amendement n° 112 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 45

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 421-11 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 421-11-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 421-11-1. – En application du deuxième alinéa du paragraphe 1 de l’article 19 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier, l’entreprise de marché adresse à l’Autorité des marchés financiers ses déclarations d’incidents majeurs liés aux technologies de l’information et de la communication.

« Lorsque l’entreprise de marché est également soumise en tant qu’entité essentielle ou importante aux dispositions prévues au titre II de la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité, elle transmet également à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information, en application du sixième alinéa du 1 de l’article 19 du règlement mentionné à l’alinéa précédent, leurs déclarations d’incidents majeurs liés aux technologies de l’information et de la communication.

« En application du premier alinéa du paragraphe 2 de l’article 19 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier, l’entreprise de marché peut adresser à l’Autorité des marchés financiers ses notifications de cybermenaces. Dans ce cas, elle transmet également ces notifications à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information. »

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Il s’agit d’une disposition similaire, mais pour les entreprises de marché.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale sur les amendements nos 111 rectifié et 112 rectifié ?

M. Michel Canévet, rapporteur. La commission spéciale émet un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 119 ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Nos deux amendements ont été travaillés avec l’AMF, et leur rédaction semble plus satisfaisante. Je sollicite donc le retrait de l’amendement n° 119 à leur profit.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 119.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 45, et les amendements nos 111 rectifié et 112 rectifié n’ont plus d’objet.

Après l’article 45
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Article 47

Article 46

L’article L. 511-41-1-B du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) Après le mot : « opérationnel », sont insérés les mots : « dont les risques liés aux technologies de l’information et de la communication au sens du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011, y compris ceux liés aux services de technologies de l’information et de la communication fournis par les prestataires tiers, » ;

b) Après le mot : « excessif », sont insérés les mots : « , les risques mis en évidence par des tests de résilience opérationnelle numérique conformément au chapitre IV du règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 précité » ;

2° Le cinquième alinéa est ainsi modifié :

a) Après le mot : « établir », sont insérés les mots : « des politiques et » ;

b) Après le mot : « activité », sont insérés les mots : « ainsi que des plans de réponse et de rétablissement des technologies de l’information et de la communication concernant les technologies qu’ils utilisent pour la communication d’informations » – (Adopté.)

Article 46
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Article 48

Article 47

Au premier alinéa de l’article L. 511-55 du code monétaire et financier, après le mot : « saines, » sont insérés les mots : « de réseaux et de systèmes d’information mis en place et gérés conformément au règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011, » – (Adopté.)

Article 47
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Article 49

Article 48

L’article L. 521-9 du code monétaire et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ils respectent en outre les exigences du chapitre II du règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 applicables aux prestataires de services de paiement définis au I de l’article L. 521-1. – (Adopté.)

Article 48
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Article 49 bis (nouveau)

Article 49

Les I et II de l’article L. 521-10 du code monétaire et financier sont ainsi rédigés :

« I. – Les prestataires de services de paiement déclarent à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution tout incident opérationnel ou de sécurité majeur lié au paiement. Les prestataires de services de paiement mentionnés au I et au c du II de l’article L. 521-10 réalisent cette déclaration conformément aux dispositions de l’article 23 du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) 2016/1011.

« Lorsque les prestataires de services de paiement déclarent ces incidents à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, ils le font dans les conditions prévues par l’article 19 de ce règlement, à l’exception des entités mentionnées aux a et b du II de l’article L. 521-1.

« L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution prend, au besoin, des mesures appropriées, conformément aux dispositions de l’article 22 dudit règlement, à l’exception des mesures relatives aux entités mentionnées aux a et b du II de l’article L. 521-1.

« En application de l’article L. 631-1, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution communique ces incidents et, le cas échéant, les mesures prises à la Banque de France aux fins de l’accomplissement par celle-ci de ses missions prévues à l’article L. 141-4.

« II. – La Banque de France évalue les incidents opérationnels ou de sécurité majeurs liés au paiement. Elle prend au besoin des mesures appropriées et en informe l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution en application de l’article L. 631-1. »

Mme la présidente. L’amendement n° 120, présenté par MM. Canévet, Chaize et Saury, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2, seconde phrase

1° Supprimer les mots :

et au c du II

2° Remplacer la référence :

L. 521-10

par la référence :

L. 521-1

II. – Alinéas 3 et 4

Remplacer les mots :

aux a et b du

par le mot :

au

III. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

…. – Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

«… – La Caisse des dépôts et consignations réalise les déclarations mentionnées au I, dans les conditions prévues par le décret mentionné à l’article L. 518-15-1. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Canévet, rapporteur. Cet amendement vise à prendre en compte la situation particulière de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), pour l’intégrer aux obligations déclaratives.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 120.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 49, modifié.

(Larticle 49 est adopté.)

Article 49
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Article 50

Article 49 bis (nouveau)

Le III de l’article L. 532-50 du code monétaire et financier est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) 2016/1011 s’appliquent aux succursales agréées conformément au I du présent article dans les conditions prévues pour les succursales d’établissement de crédit agréées conformément à l’article L. 511-10. – (Adopté.)

Article 49 bis (nouveau)
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Article 51

Article 50

Au premier alinéa de l’article L. 533-2 du code monétaire et financier, après le mot : « informatiques », sont insérés les mots : « , y compris des réseaux et des systèmes d’information mis en place et gérés conformément au règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011, » – (Adopté.)

Article 50
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Article 52

Article 51

L’article L. 533-10 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le I est complété par un 6° ainsi rédigé :

« 6° À l’exception de celles qui gèrent des fonds d’investissement alternatifs relevant du IV de l’article L. 532-9 ou des fonds d’investissement alternatifs relevant du I de l’article L. 214-167, mettent en place des procédures administratives et comptables saines, des dispositifs de contrôle et de sauvegarde dans le domaine du traitement électronique des données, y compris des réseaux et des systèmes d’information mis en place et gérés conformément au règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011. » ;

2° Le II est ainsi modifié :

a) À la première phrase du 4°, après le mot : « systèmes », sont insérés les mots : « appropriés et proportionnés, y compris des systèmes de technologies de l’information et de la communication mis en place et gérés conformément à l’article 7 du règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 précité » ;

b) Le 5° est ainsi modifié :

– après le mot : « garantir », sont insérés les mots : « , conformément au règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011, » ;

– après le mot : « information, », il est inséré le mot : « pour » ;

– après les mots : « autorisé et », il est inséré le mot : « pour » – (Adopté.)

Article 51
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Article 53

Article 52

L’article L. 533-10-4 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le a du 1° est complété par les mots : « , conformément aux exigences prévues au chapitre II du règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 » ;

2° Le 2° est ainsi modifié :

a) Le mot : « plans » est remplacé par le mot : « mécanismes » ;

b) Après le mot : « négociation, », sont insérés les mots : « y compris d’une politique et de plans en matière de continuité des activités liées aux technologies de l’information et de la communication et de plans de réponse et de rétablissement des technologies de l’information et de la communication mis en place conformément à l’article 11 du règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 précité » ;

c) Sont ajoutés les mots : « et aux chapitres II et IV du règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 précité » – (Adopté.)

Article 52
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Article 54

Article 53

(Supprimé)

Article 53
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Après l’article 54

Article 54

Le III de l’article L. 613-38 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Au 3°, après le mot : « continuité », sont insérés les mots : « et la résilience opérationnelle numérique » ;

2° Le 17° est complété par les mots : « , y compris des réseaux et des systèmes d’information mentionnés dans le règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 » – (Adopté.)

Article 54
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Article 55

Après l’article 54

Mme la présidente. L’amendement n° 73, présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 54

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 574-6 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 574-… ainsi rédigé :

« Art. L. 574-….- I. – Les entités mentionnées au sein du titre III de la loi n° du relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité, et relevant du champ d’application des chapitres II et IV du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) 2016/1011 recourent en priorité, pour l’externalisation de services de technologies de l’information et de la communication, à des prestataires remplissant les conditions suivantes :

« 1° Être titulaire d’un label de conformité délivré par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, la Banque de France, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ou l’Autorité des marchés financiers ;

« 2° Être assujetti en France à l’impôt sur les sociétés au sens de l’article 209 du code général des impôts ;

« II. – À titre dérogatoire, lorsqu’aucun prestataire ne satisfait pour le service recherché aux critères mentionnés au I, l’entité concernée peut recourir à un autre prestataire, sous réserve de l’obtention d’une autorisation expresse de l’Autorité de contrôle compétente et après démonstration documentée de l’absence d’offre disponible répondant aux critères susmentionnés. »

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Cet amendement tend à poser un principe de bon sens : lorsque les entités bancaires et financières externalisent des services numériques, elles doivent en priorité recourir à des prestataires qui respectent nos normes de cybersécurité, notre réglementation et notre fiscalité.

Si, dans un cas précis, aucune offre n’est disponible sur le territoire, une exception peut être faite.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Michel Canévet, rapporteur. Je comprends l’intention des auteurs de cet amendement. Ce sujet doit être examiné dans un cadre européen et la préférence conçue à ce niveau, car les institutions font appel à des opérateurs sur l’ensemble du continent.

La commission spéciale a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 73.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 54
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Article 56

Article 55

Le quatrième alinéa du II de l’article L. 631-1 du code monétaire et financier est ainsi rédigé :

« L’Autorité des marchés financiers, la Banque de France, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et l’autorité nationale en charge de la sécurité des systèmes d’information se communiquent sans délai les renseignements utiles à l’exercice de leurs missions respectives dans le domaine de la sécurité des systèmes d’information afin d’assurer, en particulier, le respect de la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité et du règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011. – (Adopté.)

Article 55
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Article 57

Article 56

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le I de l’article L. 712-7 est complété par un 14° ainsi rédigé :

« 14° Le règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) 2016/1011. » ;

2° La deuxième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 752-10, L. 753-10 et L. 754-8 est ainsi rédigée :

 

«

L. 314-1

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

» ;

 

3° (Supprimé)

4° La première ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 762-3, L. 763-3 et L. 764-3 est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 420-3

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

L. 420-4 et L. 420-5

l’ordonnance n° 2017-1107 du 22 juin 2017

» ;

 

5° Le tableau du second alinéa du I des articles L. 762-4, L. 763-4 et L. 764-4 est ainsi modifié :

a) La quatrième ligne est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 421-1 à L. 421-3

l’ordonnance n° 2016-827 du 23 juin 2016

L. 421-4

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

L. 421-5 à L. 421-7-2

l’ordonnance n° 2016-827 du 23 juin 2016

» ;

 

b) La dixième ligne est ainsi rédigée :

 

«

L. 421-11

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

 » ;

 

6° (Supprimé)

7° La neuvième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 773-5, L. 774-5 et L. 775-5 est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 511-41-1 B

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

L. 511 41-1 C

l’ordonnance n° 2020-1635 du 21 décembre 2020

 » ;

 

8° La septième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 773-6, L. 774-6 et L. 775-6 est ainsi rédigée :

 

«

L. 511-55

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

» ;

 

9° La dernière ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 773-21, L. 774-21 et L. 775-15 est ainsi rédigée :

 

«

L. 521-9 et L. 521-10

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

» ;

 

10° Le tableau du second alinéa du I des articles L. 773-30, L. 774-30 et L. 775-24 est ainsi modifié :

a) La troisième ligne est ainsi rédigée :

 

«

L. 533-2

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

» ;

 

b) La quatorzième ligne est ainsi rédigée :

 

«

L. 533-10

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

» ;

 

c) La seizième ligne est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 533-10-2 et L. 533-10-3

l’ordonnance n° 2016-827 du 23 juin 2016

L. 533-10-4

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

L. 533-10-5 à L. 533-10-8

l’ordonnance n° 2016-827 du 23 juin 2016

» ;

 

11° La vingt-deuxième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 783-2, L. 784-2 et L. 785-2 est ainsi rédigée :

 

«

L. 612-24, à l’exception de son huitième alinéa

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

» ;

 

12° La vingt et unième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 783-4, L. 784-4 et L. 785-3 est ainsi rédigée :

 

«

L. 613-38

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

» ;

 

13° La deuxième ligne du tableau du I des articles L. 783-13, L. 784-13 et L. 785-12 est ainsi rédigée :

 

«

L. 631-1

la loi n° … du … relative à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité

»

 

Mme la présidente. L’amendement n° 121, présenté par MM. Canévet, Chaize et Saury, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Alinéa 11, tableau, première colonne, première ligne

Supprimer les mots :

L. 421-1 à

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Canévet, rapporteur. Cet amendement tend à corriger une erreur de référence.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 121.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 56, modifié.

(Larticle 56 est adopté.)

Chapitre II

Dispositions modifiant le code des assurances

Article 57

L’article L. 354-1 du code des assurances est ainsi modifié :

1° À la fin de la première phrase du troisième alinéa, les mots : « à l’article L. 310-3 » sont remplacés par les mots : « au 13° de l’article L. 310-3 » ;

2° La seconde phrase du quatrième alinéa est complétée par les mots : « et, en particulier, mettent en place et gèrent des réseaux et des systèmes d’information conformément au règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 » – (Adopté.)

Après l’article 57

Mme la présidente. L’amendement n° 74 rectifié, présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 57

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le troisième alinéa de l’article L. 354-1 du code des assurances sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« 1° Les entreprises d’assurance et de réassurance recourent en priorité, pour l’externalisation de services de technologies de l’information et de la communication, à des prestataires remplissant les conditions suivantes :

« a) Être titulaire d’un label de conformité délivré par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, la Banque de France, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ou l’Autorité des marchés financiers ;

« b) Être assujetti en France à l’impôt sur les sociétés au sens de l’article 209 du code général des impôts ;

« 2° À titre dérogatoire, lorsqu’aucun prestataire ne satisfait pour le service recherché aux critères mentionnés au 1° , l’entité concernée peut recourir à un autre prestataire, sous réserve de l’obtention d’une autorisation expresse de l’Autorité de contrôle compétente et après démonstration documentée de l’absence d’offre disponible répondant aux critères susmentionnés. »

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Cet amendement vise à défendre une position claire : nous devons structurer un cadre qui donne aux acteurs français ou européens les moyens de peser. Cela implique des règles et de la planification. Le reste n’est que naïveté ou complaisance.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Michel Canévet, rapporteur. Pour les mêmes raisons que pour de précédents amendements, j’émets un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 74 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article 58

Le I de l’article L. 356-18 du code des assurances est ainsi modifié :

1° À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « à l’article L. 310-3 » sont remplacés par les mots : « au 13° de l’article L. 310-3 » ;

2° La seconde phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : « et, en particulier, mettent en place et gèrent des réseaux et des systèmes d’information conformément au règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 » – (Adopté.)

Après l’article 58

Mme la présidente. L’amendement n° 14 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos et MM. Grand, Laménie, V. Louault, A. Marc et L. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 58

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au second alinéa de l’article L. 121-8 du code des assurances, les mots : « ou de mouvements populaires » sont remplacés par les mots : « , de mouvements populaires ou d’attaques informatiques ».

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. En l’état actuel du droit, c’est à l’assuré victime d’une cyberattaque qu’il revient de prouver que le dommage subi n’est pas causé par un fait relevant d’une guerre étrangère.

Or, face à l’intensification et à la multiplication des cyberattaques, il est souvent quasiment impossible pour l’assuré d’en identifier officiellement l’auteur. Cette disposition, unique dans le droit des États membres, nuit au développement de l’assurance cyber en France et pousse les grands groupes français à souscrire des contrats à l’étranger.

Ailleurs en Europe, c’est à l’assureur qu’il revient de prouver qu’un dommage a été causé par un fait autre qu’une guerre étrangère. Afin de remédier à ce défaut d’attractivité de la France – tel est l’un des objets de ce texte – nous proposons d’inverser la charge de la preuve pour les cyberattaques.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Michel Canévet, rapporteur. La commission spéciale a émis un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Je comprends l’objectif de cet amendement, mais le problème qu’il vise à résoudre n’est pas suffisamment étayé par des éléments factuels montrant qu’un nombre significatif d’entreprises françaises choisirait de s’assurer à l’étranger pour éviter que la charge de la preuve ne leur incombe.

De plus, il reste à prouver qu’un assureur serait plus à même de démontrer que le sinistre de son assuré résulte d’une cyberattaque.

En faisant peser la charge de la preuve de la cyberguerre sur les assureurs, ceux-ci vont, pour se dérisquer, se désengager du marché de l’assurance cyber.

Or, dans toutes les discussions que j’ai pu avoir avec les différentes entités assujetties au texte, la question de l’assurance est cruciale. Il est impératif de soutenir le développement d’offres adaptées, et l’adoption de cet amendement risquerait d’être contre-productive à cet égard.

Enfin, la rédaction proposée vise toutes les attaques informatiques. J’en comprends l’esprit, mais elle aurait pour conséquence que, dès lors que l’assureur prouve que le sinistre résulte d’une attaque informatique, il n’aurait pas à indemniser les dommages subis par l’assuré.

Autrement dit, l’adoption de cet amendement pourrait offrir aux assureurs un blanc-seing pour ne pas couvrir les cyberattaques, ce qui nous éloignerait de l’objectif que nous visons.

J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 14 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 58.

Chapitre III

Dispositions modifiant le code de la mutualité

Article 59

La seconde phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 211-12 du code de la mutualité est complétée par les mots : « et, en particulier, mettent en place et gèrent des réseaux et des systèmes d’information conformément au règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 » – (Adopté.)

Article 60

Le deuxième alinéa de l’article L. 212-1 du code de la mutualité est complété par les mots : « du présent code, à l’exception de l’article L. 354-1 du code des assurances » – (Adopté.)

Après l’article 60

Mme la présidente. L’amendement n° 75 rectifié, présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 60

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le troisième alinéa de l’article L. 211-12 du code de la mutualité, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« Les mutuelles et unions mentionnées à l’article L. 211-10 recourent en priorité, pour l’externalisation de services de technologies de l’information et de la communication, à des prestataires remplissant les conditions suivantes :

« 1° Être titulaire d’un label de conformité délivré par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, la Banque de France, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ou l’Autorité des marchés financiers ;

« 2° Être assujetti en France à l’impôt sur les sociétés au sens de l’article 209 du code général des impôts ;

« À titre dérogatoire, lorsqu’aucun prestataire ne satisfait pour le service recherché aux critères mentionnés aux 1° et 2°, l’entité concernée peut recourir à un autre prestataire, sous réserve de l’obtention d’une autorisation expresse de l’Autorité de contrôle compétente et après démonstration documentée de l’absence d’offre disponible répondant aux critères susmentionnés. »

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Cet amendement a pour objet d’introduire un principe de préférence encadré, qui repose sur des critères objectifs, tout en ménageant une dérogation permettant d’éviter toute distorsion excessive dans l’accès aux services.

Néanmoins, je ne me fais pas d’illusion sur le sort qui lui sera réservé… (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Michel Canévet, rapporteur. Pour les mêmes raisons que celles invoquées au sujet des amendements précédents déposés par votre groupe, mon cher collègue, la commission spéciale a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 75 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Chapitre IV

Dispositions modifiant le code de la sécurité sociale

Article 61

La seconde phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 931-7 du code de la sécurité sociale est complétée par les mots : « et, en particulier, mettent en place et gèrent des réseaux et des systèmes d’information conformément au règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 » – (Adopté.)

Après l’article 61

Mme la présidente. L’amendement n° 77 rectifié bis, présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 61

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le troisième alinéa de l’article L. 931-7 du code de la sécurité sociale sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« Les institutions de prévoyance et unions mentionnées à l’article L. 931-6 recourent en priorité, pour l’externalisation de services de technologies de l’information et de la communication, à des prestataires remplissant les conditions suivantes :

« 1° Être titulaire d’un label de conformité délivré par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, la Banque de France, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ou l’Autorité des marchés financiers ;

« 2° Être assujetti en France à l’impôt sur les sociétés au sens de l’article 209 du code général des impôts ;

« À titre dérogatoire, lorsqu’aucun prestataire ne satisfait pour le service recherché aux conditions mentionnées aux 1° et 2°, l’entité concernée peut recourir à un autre prestataire, sous réserve de l’obtention d’une autorisation expresse de l’Autorité de contrôle compétente et après démonstration documentée de l’absence d’offre disponible répondant aux critères susmentionnés. »

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Cet amendement vise également à introduire un principe de préférence. Il en ira d’ailleurs de même des deux amendements suivants, que je considère donc d’ores et déjà comme défendus, madame la présidente. J’aurai plaidé de mon mieux ! (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Michel Canévet, rapporteur. La commission spéciale a émis un avis défavorable sur cet amendement, tout comme sur les deux amendements suivants.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. J’émets les mêmes avis défavorables, sur les trois amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 77 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 81 rectifié, présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 61

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Afin de garantir un niveau de protection des données à caractère personnel conforme aux exigences du Règlement général sur la protection des données (UE) 2016/679 et de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, les entités visées par le titre III de la présente loi doivent assurer l’hébergement et le traitement des données à caractère personnel collectées en France sur des infrastructures situées sur le territoire national.

À cette fin, ces données doivent être stockées soit :

1. Sur un service de cloud qualifié SecNumCloud par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) ;

2. Sur un système d’information interne, physiquement localisé en France et conforme aux exigences de sécurité définies par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI).

Toute externalisation de ces données vers un prestataire non qualifié SecNumCloud ou situé hors du territoire national est interdite, sauf dérogation expressément accordée par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI).

Les autorités de contrôle compétentes peuvent imposer des sanctions financières en cas de non-respect de cette obligation.

Cet amendement est déjà défendu.

Il a reçu un avis défavorable de la commission spéciale et du Gouvernement.

Je le mets aux voix.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 79, présenté par Mme Gréaume, M. Gay et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 61

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur le recours aux prestataires de services de technologies de l’information et de la communication par les entités visées au titre III de la présente loi. Ce rapport évalue notamment la part des entreprises extra-communautaires parmi ces prestataires, ainsi que les enjeux en matière de résilience et de souveraineté numérique.

Cet amendement est déjà défendu.

Il a reçu un avis défavorable de la commission spéciale et du Gouvernement.

Je le mets aux voix.

(Lamendement nest pas adopté.)

Chapitre V

Dispositions finales

Article 62 A (nouveau)

Les entités financières essentielles et importantes auxquelles s’applique le présent titre III et auxquelles s’impose, en application du règlement (UE) 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) 2016/1011, l’adoption de mesures de gestion des risques en matière de cybersécurité ou la notification d’incidents importants, ne sont pas tenues de se conformer aux exigences prévues par la directive (UE) 2022/1555 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans l’ensemble de l’Union, modifiant le règlement (UE) n° 910/2014 et la directive (UE) 2018/1972, et abrogeant la directive (UE) 2016/1148, y compris celles relatives à la supervision, dès lors que l’adoption de ces mesures et la notification de ces incidents ont un effet au moins équivalent à ces exigences – (Adopté.)

Article 62

Le présent titre entre en vigueur le lendemain de la promulgation de la présente loi. Toutefois, les articles 46, 47 et 54 sont applicables à compter du 1er janvier 2030 aux sociétés de financement.

Mme la présidente. L’amendement n° 109, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le présent titre entre en vigueur le lendemain de la promulgation de la présente loi. Toutefois, les dispositions des articles 46, 47 et 54 sont applicables aux sociétés de financement remplissant les conditions prévues au point 145 du paragraphe 1 de l’article 4 du règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 à compter du 17 janvier 2026.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je sais que nous essayons d’achever rapidement l’examen de ce texte. Cependant, je me permettrai de m’arrêter un instant sur cet amendement, car il est très important.

Il s’agit de rétablir le principe d’une entrée en application différenciée entre les plus grandes sociétés de financement et les autres entreprises de ce type.

Les plus grandes sociétés de financement exercent, pour certaines, des activités critiques pour le secteur financier français et devraient être assujetties dès la promulgation de la loi à des standards élevés en matière de résilience et de cybersécurité. Je sais que nous avons eu de nombreuses discussions sur ce sujet, mais il me semble essentiel que nous nous arrêtions un instant pour en débattre de nouveau.

Que dirons-nous lorsqu’une société de financement qui octroie des prêts immobiliers aux Françaises et aux Français sera attaquée – pas dans dix ans, mais bien demain, dans l’année qui vient ? Que répondrons-nous aux citoyens qui ont fait confiance à ces organismes, à nos infrastructures numériques, à la France pour protéger les activités essentielles à notre nation ?

Nous ne pouvons pas leur dire que nous n’avons pas suffisamment pris le temps de discuter de cet amendement. Il est essentiel, pour maintenir la confiance des citoyens dans nos institutions, que ces grandes sociétés de financement soient assujetties aux obligations qui sont les leurs en matière de cybersécurité dès à présent.

Par ailleurs, les autres sociétés de financement, de taille plus modeste, devraient bénéficier d’un report de l’entrée en application de ces exigences dans le cadre d’un calendrier de mise en conformité proportionné – sur ce point, je vous rejoins, monsieur le rapporteur.

Cet amendement vise donc à rétablir une date d’assujettissement des petites sociétés de financement dans des délais plus adaptés, afin que, à moyen terme, l’ensemble du secteur financier français applique un niveau d’exigences cohérent.

Le 1er janvier 2030 apparaît dans cette perspective comme un horizon trop lointain, compte tenu du développement de cette menace. En outre, l’ampleur de cette différenciation est inéquitable par rapport à d’autres acteurs du secteur financier distribuant des services comparables aux sociétés de financement.

Dans un souci d’équité, mais avant tout de confiance et de lutte contre la menace cyber, nous vous demandons, mesdames, messieurs les sénateurs, de revenir à la rédaction initiale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Michel Canévet, rapporteur. Le Sénat est attaché, d’une part, à simplifier la vie des acteurs économiques, et, d’autre part, à éviter toute surtransposition des textes européens.

Or, ici, nous sommes précisément face à un cas de surtransposition. C’est pourquoi la commission spéciale a proposé une échéance assez lointaine, afin d’éviter que les acteurs soumis à la concurrence internationale ne soient pénalisés sur le marché européen. Nous souhaitons reporter l’application des obligations aux sociétés de financement à 2030.

En ce qui concerne les petites sociétés de financement, la commission spéciale défend un principe de proportionnalité : celles-ci ne se verraient imposer que des démarches adaptées à leur taille réelle. Tel est l’objet de l’amendement que je présenterai ensuite.

En conséquence, la commission spéciale a émis un avis défavorable sur cet amendement du Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. Je me permets d’insister, car vous aurez compris que ce sujet nous tient particulièrement à cœur.

Le Gouvernement n’a pas la volonté d’aller au-delà des exigences européennes. Comme je l’ai déjà souligné à plusieurs reprises, nous avons pleinement intégré le principe de non-surtransposition et veillé à assurer une harmonisation au niveau européen.

Cependant, notre cadre juridique présente une spécificité : il inclut les sociétés de financement, une réalité qui n’existe pas dans d’autres États membres. Nous devons donc prendre en compte cette particularité avec pragmatisme.

Il s’agit avant tout de garantir une protection efficace de nos concitoyens, en cohérence avec l’objectif de résilience que nous visons au travers de ce texte.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 109.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 122, présenté par MM. Canévet, Chaize et Saury, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Lorsqu’elles remplissent les conditions prévues au point 145 du paragraphe 1 de l’article 4 du règlement (UE) n° 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) n° 648/2012, les sociétés de financement appliquent les règles énoncées aux chapitres II à IV et à la section 1 du chapitre V du règlement (UE) n° 2022/2554 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience opérationnelle numérique du secteur financier et modifiant les règlements (CE) n° 1060/2009, (UE) n° 648/2012, (UE) n° 600/2014, (UE) n° 909/2014 et (UE) n° 2016/1011 conformément au principe de proportionnalité énoncé à l’article 4 du même règlement (UE).

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Canévet, rapporteur. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clara Chappaz, ministre déléguée. J’espère que nous n’aurons pas à subir de telles cyberattaques et à les expliquer à nos concitoyens…

Le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 122.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 62, modifié.

(Larticle 62 est adopté.)

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. Je veux le souligner, nous avons ce soir la satisfaction de clore un cycle, celui de la transposition en droit français de plusieurs textes européens. Je pense notamment à la loi visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique, adoptée avant l’été, qui pose un cadre de régulation pour le marché et les services numériques.

Le texte que nous allons voter ce soir est fondamental, car il établit une véritable architecture de sécurité pour notre pays, nos entreprises, nos collectivités territoriales et nos entités critiques, auxquels il donne une forme de résilience.

Bien sûr, il reste beaucoup à faire, notamment sur le plan pratique et financier. Il faudra veiller à ce que des moyens accompagnent nos collectivités territoriales, y compris les plus petites, même si elles ne figurent pas directement dans le texte de loi. Il est essentiel que nous trouvions les voies et moyens pour cela.

Je veux insister sur deux points.

Tout d’abord, il faut conquérir notre autonomie stratégique et mener une véritable politique industrielle. Les rapports de MM. Draghi et Letta ont dressé un constat désastreux quant aux dernières années. Nous sommes à la croisée des chemins et, de toute façon, le contexte géopolitique actuel ne nous laisse plus le choix : nous devons réagir.

Ensuite, je veux saluer l’amendement de notre collègue Olivier Cadic, que j’ai eu le plaisir de cosigner et de défendre et qui a été adopté tout à l’heure. Je suis convaincue que ses dispositions sont au cœur même de ce texte. Désormais, la loi interdira l’implantation de portes dérobées, une pratique de toute façon inefficace et contre-productive.

Je conclurai en me référant à Bruce Schneier, l’un des plus grands cryptologues et experts en informatique au monde : le choix pour nous est non pas entre plus de sécurité et plus de liberté, mais entre plus ou moins de sécurité. Avec ce projet de loi, nous faisons clairement le choix d’une sécurité renforcée.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour explication de vote.

M. Gérard Lahellec. Madame la présidente, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, nous ne nions pas que ce texte pose des bases plus protectrices en matière de procédures, de suivi et de tests, ce qui est un point positif.

Cependant, des interrogations subsistent, comme l’ont révélé nos débats. Tout d’abord, sur la transposition pour les collectivités territoriales, un sujet sur lequel je ne reviendrai pas. Ensuite, sur l’absence d’une véritable logique de planification, un point sur lequel j’ai insisté en fin de débat.

Nous aspirons à une cybersécurité émancipatrice, fondée sur la réindustrialisation et encore plus protectrice et exigeante, au niveau tant européen que national.

C’est au regard de ces considérations que nous avons fait le choix de nous abstenir sur ce texte.

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission spéciale, modifié, l’ensemble du projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité.

(Le projet de loi est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures cinquante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. Didier Mandelli.)

PRÉSIDENCE DE M. Didier Mandelli

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

11

Trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux

Discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe Les Républicains, la discussion de la proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux, présentée par MM. Guislain Cambier, Jean Baptiste Blanc et plusieurs de leurs collègues (proposition n° 124, texte de la commission n° 373, rapport n° 372, avis n° 350).

La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Discussion générale

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. Guislain Cambier, auteur de la proposition de loi. (Applaudissements sur des travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)

M. Guislain Cambier, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, déposer une proposition de loi n’est pas un acte anodin. Avec les membres du groupe de suivi, avec Jean-Baptiste Blanc, j’en mesure la gravité.

La loi, c’est ce sur quoi une société s’accorde pour déterminer son futur commun. La loi unit ; elle ne divise pas. Elle incarne une vision et fait l’objet d’un consensus. Hélas, parfois, ce n’est pas le cas. Nous pouvons le regretter.

Notre rôle est surtout de corriger pour apaiser, rassembler les habitants et les projeter vers un avenir plus engageant.

Nous le savons, l’artificialisation est une nécessité et un défi. Depuis l’aube de l’humanité, l’homme transforme son environnement. Il l’aménage. Nous avons glorifié les voies romaines, célébré les civilisations urbaines, réparti les espaces entre rural et urbain en fonction de leur rapport à la communauté.

Parce que nous sommes les thuriféraires du progrès et non ses contempteurs, nous savons que la finalité, la nature et le nombre des aménagements évoluent. Nous devons donc poser une vision à long terme, sans nous enfermer dans des schémas. Nous devons rester pragmatiques.

Toutefois, pour que la loi soit l’expression de la volonté générale, elle doit reposer sur un diagnostic partagé. Oui, nous avons artificialisé de manière peu économe dans les dernières décennies, poussés par un système financier et fiscal faisant de la terre une denrée de peu de valeur. Peut-on continuer à ce rythme ? Non, car le sol, par nature, est précieux ; le protéger, c’est permettre à la population de bien vivre à l’avenir.

Ce diagnostic, les élus et les acteurs le partagent. Les auditions, les réponses aux sondages que nous avons menés de manière transpartisane et constructive le démontrent. Mieux, elles prouvent que ces mêmes élus locaux et acteurs n’artificialisent qu’avec raison et parcimonie. Le changement est à l’œuvre ; il faut s’en féliciter, l’encourager et non le morigéner comme des doctrinaires ou des prescripteurs de morale.

Nous vous proposons une loi de confiance, car responsabilité rime avec liberté, pas avec répression. Le discours de la méthode, c’est être rationnel et non passionnel. (Marques dironie sur les travées du groupe GEST.)

Sur les différentes travées de cet hémicycle, nous avons donc pris, ensemble, nos responsabilités.

Pour aider les territoires dans leur diversité à construire eux-mêmes le chemin du progrès, nous leur permettons de trouver ce difficile équilibre, ce chemin de crête, cette « trace » entre l’impérieuse nécessité de changer de modèle et la volonté inaliénable de se développer. Nous ne devons en exclure aucun.

C’est cela, la promesse républicaine : garantir à chacun l’accès au progrès. Cette loi est un chemin, non un terminus. Qui serions-nous pour édicter ce que seront la France et le monde en 2050 ?

Gardons l’humilité propre à notre nature humaine. Ce passage étroit est guidé par le respect de chaque habitant, quel que soit l’endroit où il réside. Afin d’éviter qu’il ne trébuche sur ce chemin, nous voulons lui donner un cap clair, sans codicille.

En temps de brouillard, comme de nos jours, les annexes obscures ne protègent que les initiés. Tremblons avant d’ajouter des exemptions, des références à des décrets ou à d’autres normes. Pour que tous les territoires puissent comprendre et appliquer la loi, il faut que celle-ci soit claire. C’est dans la clarté que nous pouvons bâtir l’idéal de notre République, pas dans les obscurs bureaux d’une administration hors-sol !

Mes chers collègues, nous vous proposons six articles. C’est peu, moins que le Décalogue… (Sourires.) Puissiez-vous en garder la simplicité. Vous allez évidemment échanger, afin de les affiner et de les enrichir : c’est la force du travail parlementaire de dialoguer au lieu d’imposer. Les membres du groupe de suivi, Jean-Baptiste Blanc et moi-même avons toute confiance en vous et en votre action.

Fruit de six mois de travail marqués par soixante-dix auditions, la visite de dizaines de départements et la consultation de plus de 2 200 élus locaux, la proposition de loi qui vous est présentée se veut ambitieuse, en gardant l’objectif chiffré pour 2050. Elle se veut surtout éclairante, aidante pour une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux (Trace).

Cette Trace doit désormais remplacer un acronyme qui, malgré ses ambitions initiales méritoires, était devenu un repoussoir pour trop d’élus locaux.

Mes chers collègues, ces six articles permettront tout simplement d’atteindre l’objectif partagé et nécessaire de la sobriété foncière : une comptabilité claire ; une trajectoire qui donne confiance ; un calendrier revu pour permettre une différenciation ; une conférence reposant sur le dialogue ; enfin, une territorialisation véritable.

Aurons-nous tout réglé ? Non. Il restera des chantiers à ouvrir sur l’équité territoriale, la ressource financière, la justice fiscale ou encore la santé des sols.

Mes chers collègues, lorsque vous en aurez terminé la ciselure, la proposition de loi continuera son chemin à l’Assemblée nationale. Certains, ici comme là-bas, voudront un trophée, un butin. Nos habitants, eux, attendent une loi claire, un socle républicain qui leur permette d’avoir, enfin, un avenir dégagé. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, auteur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions. – M. Vincent Louault applaudit également.)

M. Jean-Baptiste Blanc, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je me permets d’introduire mon propos par ces mots d’un auteur de mon pays, René Char : « Un poète doit laisser des traces de son passage, non des preuves. »

Ils traduisent, je crois, l’objectif auquel nous essayons tous de parvenir depuis plusieurs années quant à la sobriété foncière : éviter les bons sentiments et les effets d’annonce, pour préférer l’action utile, qui redonne de l’espoir et des moyens aux élus locaux.

Le Parlement est une nouvelle fois appelé à légiférer sur la lutte contre l’artificialisation. Il le fait une nouvelle fois sur l’initiative du Sénat, qui, depuis quatre ans, tente de corriger les effets de la loi Climat et Résilience.

Monsieur le ministre, voilà quatre ans que le Sénat se bat pour porter la voix des territoires, entre la condescendance de la haute administration, le mépris de certains préfets à l’égard de la volonté du législateur et les fausses pudeurs des gouvernements successifs vis-à-vis de l’écologie radicale.

Peut-être faudra-t-il écrire un jour l’histoire du zéro artificialisation nette (ZAN). Celle-ci commence en 2021, avec un objectif que nous partagions tous – nous y souscrivons encore – et qui devait être légitimé par une territorialisation concertée. Deux circulaires l’ont rappelé aux préfets, qui ont passé outre. S’est ensuivie la vassalisation des régions par l’État, trop heureux de pouvoir recentraliser à peu de frais l’aménagement du territoire et le développement urbain.

Le mépris a continué avec les déclarations d’une ministre annonçant fièrement la fin du modèle pavillonnaire à tous ces Français qui avaient le malheur d’être enfin propriétaires. Je pourrais encore évoquer les décrets d’application de la loi Climat et résilience, qui s’éloignaient à la fois de son esprit et de sa lettre et que l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) a contestés devant la justice. Ils ont fait l’objet d’une réécriture dans la douleur.

Depuis quatre ans, nous n’avons cessé de demander de territorialiser la sobriété foncière. Le Gouvernement a répondu en lançant les conférences des parties (COP) régionales et, cette semaine, en déclarant – cette annonce est importante, mais elle vient quelque peu perturber nos débats – que les 4 degrés du plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc) seraient opposables aux plans locaux d’urbanisme (PLU) ! Il faudra discuter de cette opposabilité le moment venu.

Le Sénat s’est donc une première fois mobilisé pour parer au plus urgent, en corrigeant les absurdités les plus manifestes du ZAN. C’est la loi de 2023, qui a permis de redonner un peu d’air aux élus, grâce notamment au droit à l’hectare.

Nous savions qu’une grosse partie du travail restait à accomplir. Au lieu de choisir la facilité, comme certains le recommandaient, et de clairement supprimer le ZAN, nous avons préféré consulter les élus. Plusieurs milliers d’entre eux ont adressé leurs doléances au Sénat. À titre personnel, je me suis rendu dans plus de quatre-vingts départements, tout comme mon collègue Guislain Cambier, pour faire œuvre de pédagogie, expliquer, écouter et proposer. J’étais encore lundi dernier en Corrèze.

Avec nombre d’entre vous, mes chers collègues – je pense notamment à Guislain Cambier, à Jean-Claude Anglars, à Amel Gacquerre et à Daniel Gueret –, nous avons considéré qu’il fallait traduire au sein d’une nouvelle proposition de loi les principales demandes de ces élus. C’est ce qui nous permet de vous présenter ce soir un texte légitimé par la signature de plus de 160 collègues. Celui-ci redonne un peu de souffle girondin à la sobriété foncière.

Sans, j’y insiste, revenir sur l’objectif de 2050,…

M. Ronan Dantec. C’est 2031 !

M. Jean-Baptiste Blanc. … nous proposons aux élus de décider eux-mêmes, en fonction des réalités locales, du rythme et de la pente de leur trajectoire de sobriété, grâce à un contrat – je dis bien : un contrat ! – qui prévoira toutes les clauses de rendez-vous nécessaires.

Nous souhaitons maintenir la comptabilisation en espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) après 2031 et laisser un peu plus de temps aux collectivités pour modifier leurs documents d’urbanisme. Nous faisons enfin le choix de renforcer le poids des communes au sein des conférences régionales.

Ce texte permet de placer chacun face à ses responsabilités. Son article 4 prévoit ainsi de sortir les fameux projets d’envergure nationale ou européenne (Pene) des enveloppes locales et de demander à l’État d’établir sa propre trajectoire de sobriété foncière.

Monsieur le ministre, vous décèlerez sans doute dans mes propos une pointe de lassitude et d’amertume. Vous n’êtes pas responsable des erreurs passées, et votre expérience d’élu local nous conduit à beaucoup espérer de votre action.

Votre regard bienveillant sur ce texte, malgré des désaccords qui persistent – c’est normal –, doit nous permettre d’avancer ensemble pour parvenir aux solutions les plus pertinentes, dans l’intérêt de la transition écologique. Celle-ci passe nécessairement par l’accompagnement des élus.

Je suis certain que vous aurez l’autorité nécessaire pour faire respecter un principe démocratique ancien. En 2025, l’administration doit obéir au pouvoir politique et à la volonté souveraine de la Nation que nous exprimons ici.

Mes chers collègues, le moment est donc venu de changer de méthode, c’est-à-dire de passer d’une planification descendante à une Trace que nous pourrons laisser dans nos territoires ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà quasiment deux ans jour pour jour, le 16 mars 2023, le Sénat adoptait la proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs du zéro artificialisation nette au cœur des territoires, sur l’initiative de notre collègue Jean-Baptiste Blanc.

Ce texte a permis des avancées certaines sur le traitement des grands projets, une meilleure concertation à l’échelon régional et, surtout, la garantie de développement communal, essentielle pour les petites communes rurales.

Malgré cela, deux ans plus tard, nous avons été obligés de remettre l’ouvrage sur le métier. Car, comme le pointait au mois d’octobre dernier le rapport du groupe de suivi sur l’artificialisation des sols, pour nos élus et pour nos collectivités, satisfaire aux obligations de réduction de l’artificialisation fixée par la loi Climat et résilience à droit constant relève véritablement de la quadrature du cercle.

Dans toutes les réunions d’élus, le ZAN est le sujet numéro un ! (Protestations sur les travées du groupe GEST.) Je remercie d’ailleurs l’ensemble de nos collègues, avec lesquels nous avons beaucoup échangé et qui nous ont aidés à prendre le pouls du terrain en temps réel.

Je voudrais plus particulièrement remercier Guislain Cambier, président du groupe de suivi, et Jean-Baptiste Blanc – j’ai assisté à beaucoup de réunions de ce groupe avec eux durant ces dernières années – d’avoir pris l’initiative de cette proposition de loi. Et je les félicite d’avoir effacé cet acronyme affreux de ZAN et proposé celui de Trace, plus positif, car il dit à nos élus qu’il existe un chemin autre que celui qui prévaut actuellement, c’est-à-dire celui du centralisme et de la contrainte, vers la sobriété foncière.

Lors de l’examen du texte, la commission des affaires économiques a cherché à rendre plus opérationnelles certaines dispositions du texte.

L’article 1er pérennise la mesure de l’artificialisation par l’intermédiaire de la consommation d’Enaf. Ce mode de comptabilisation est plus simple. Il a l’avantage de lever la contrainte sur les bâtiments agricoles. Dans ce cadre, la Commission a clarifié la notion de consommation d’Enaf, afin de donner aux élus davantage de visibilité sur la manière dont seront décomptées leurs consommations futures.

L’article 5 imaginait une grande conférence régionale des maires pour débattre des enveloppes foncières. Par souci de stabilité, nous avons finalement conservé les conférences régionales de gouvernance mises en place en 2023, mais en augmentant la proportion des représentants des élus.

La commission a également introduit un nouvel article qui aménage les modalités de mutualisation de la garantie de développement communal d’un hectare. Cette dernière a constitué une bouffée d’oxygène pour les communes rurales, qui étaient menacées par la loi Climat et Résilience de se voir privées de toute capacité de développement et d’être mises sous cloche. Mais les modalités d’application de cette garantie, élaborées dans l’urgence, aboutissaient dans certains territoires à des gels de foncier, préjudiciables pour d’autres collectivités.

Ainsi, la mutualisation pourra évidemment s’effectuer à l’échelon intercommunal, mais également, désormais, au-delà. J’y insiste, elle demeurera toujours conditionnée à l’accord du maire de la commune qui bénéficie de la garantie.

Enfin, la procédure de modification simplifiée pourra être utilisée pour inscrire concrètement dans les documents d’urbanisme les effets de cette garantie ou de sa mutualisation, y compris en cours de période.

J’aimerais vous faire part de ce qui se pratique en matière d’artificialisation des sols dans quatre pays de l’Union européenne, l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie et les Pays-Bas, dont certains ont des densités de population deux fois, voire cinq fois supérieures à celle de la France.

En Allemagne, il n’y a rien de contraignant. En Espagne, il n’y a rien de contraignant. En Italie, il n’y a rien de contraignant. Aux Pays-Bas, il n’y a rien de contraignant. Il n’y a qu’en France que nous avons un ZAN contraignant, à l’horizon 2050, aux termes d’une loi elle-même contraignante, la loi Climat et Résilience !

Décidément, nous, nous aimons surtransposer : c’est le cas en matière agricole, comme nous l’avons encore vu récemment ; c’est également le cas s’agissant du sujet qui nous préoccupe aujourd’hui. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)

Comme le disait tout à l’heure mon collègue et ami Jean-Baptiste Blanc, il est bon que l’on puisse laisser une trace de bon sens.

Je voudrais remercier Amel Gacquerre de notre excellente collaboration sur un sujet sensible et techniquement difficile, ainsi que Daniel Gueret, le rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, et, surtout, Mme la présidente de la commission des affaires économiques, qui nous a toujours prêté une oreille attentive. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Vincent Louault applaudit également.)

Mme Amel Gacquerre, rapporteure de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais à mon tour remercier Jean-Marc Boyer et Daniel Gueret des échanges fructueux que nous avons eus tout au long de nos travaux, ainsi que les deux auteurs du texte : nous avons tenu à les associer constamment à nos réflexions, et ils se sont montrés ouverts aux évolutions que nous avons proposées sur ce texte.

Je vous remercie également, monsieur le ministre, de votre écoute attentive et des échanges que nous avons d’ores et déjà pu avoir sur cette proposition de loi, tout d’abord lors de votre audition devant la commission au mois de janvier dernier, puis de manière plus informelle. Les points de convergence sont nombreux, et je ne doute pas que cette proposition de loi pourra aboutir très prochainement.

Le Gouvernement a d’ailleurs décidé d’engager la procédure accélérée sur ce texte, afin que celui-ci puisse être adopté et entrer en vigueur avant l’été. C’est indispensable compte tenu des délais limites de modification des documents de planification et d’urbanisme actuellement en vigueur, ainsi que de la date des prochaines échéances électorales.

Je souhaite également saluer l’engagement de nos collègues des différents groupes, qui ont, eux aussi, recherché le compromis. Je sais qu’ils l’ont fait dans un esprit de réalisme et de responsabilité, car ils constatent, comme nous, que la loi Climat et Résilience entraîne des blocages aux conséquences dommageables pour nos territoires. Si nous ne faisons rien, c’est toute une partie de la France périphérique, la France des campagnes, des bourgs et des sous-préfectures, que nous risquons de perdre.

M. Ronan Dantec. C’est tout l’inverse !

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Dans le cadre de l’examen de ce texte, nous avons cherché à être pragmatiques, en soutenant deux orientations.

Premièrement, la politique de sobriété foncière ne doit pas être un frein à la mise en œuvre de toutes les autres politiques publiques.

Bien entendu, 20 000 hectares artificialisés chaque année, c’est trop ! Nous aspirons tous à la préservation de nos terres agricoles et de notre biodiversité. Mais il faut aussi prendre en compte la réalité de nos territoires. À ce jour, le foncier économique, par exemple, manque déjà. Deux tiers des intercommunalités ont déjà dû refuser des implantations d’usines par manque de foncier. Aggraver la situation n’est pas acceptable, notamment lorsque l’on met la réindustrialisation en tête de l’agenda politique. C’est une question de cohérence.

C’est pourquoi, en commission, nous avons introduit des exemptions temporaires et ciblées pour l’industrie, le logement social pour les communes carencées dans le cadre de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) et les infrastructures de production d’énergies renouvelables. Car, pour ces trois secteurs, il y a une urgence économique, sociale et environnementale que nous ne pouvons ignorer.

Deuxièmement, le fameux objectif de -50 % à l’horizon 2031, sorti du chapeau – j’ai cherché sur la base de quel calcul le chiffre avait été retenu, et je n’ai pas trouvé… –, c’est, selon une expression que j’aime beaucoup, le péché originel du ZAN.

Nous souscrivons à l’objectif de zéro consommation d’espace en 2050, auquel – je le rappelle, et je le martèle – nous ne touchons pas. Mais nous souhaitons qu’il soit atteint de manière pragmatique, chacun à son rythme, et, surtout, en fonction des dynamiques territoriales.

C’est pourquoi nous demandons aux régions, en concertation avec les conférences régionales d’élus, que nous avons renforcées, de se fixer elles-mêmes une trajectoire permettant d’atteindre le zéro à horizon 2050. Car ce sont les territoires qui sont les mieux à même de définir leur propre trajectoire, compte tenu de leurs contraintes, de leurs projets et de leurs besoins.

Cette trajectoire devra être balisée par des objectifs intermédiaires chiffrés de réduction de la consommation foncière. Je dis bien « des objectifs », c’est-à-dire au moins deux objectifs intermédiaires d’ici à 2050. Cela nous paraissait suffisant pour assurer la crédibilité de cette trajectoire.

Pour autant, nous avons entendu les craintes d’une mise en œuvre du ZAN trop hétérogène, que certaines régions commenceraient trop tard. Nous vous proposerons donc, au nom de la commission des affaires économiques, un amendement tendant à fixer ce premier jalon à 2034 ; cette date semble consensuelle. Nous avons fait un grand pas.

En revanche, nous ne fixons pas d’objectif national chiffré à ce jalon. (Exclamations sur les travées du groupe GEST.)

M. Ronan Dantec. C’est sûr que c’est plus simple comme ça ! (Rires sur les mêmes travées.)

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Il est très important que le taux d’effort entre les régions continue d’être différencié, car les dynamiques ne sont pas les mêmes partout, et elles ne demeureront pas constantes d’ici à 2050.

Les discussions se poursuivront, ce soir, demain, puis à l’Assemblée nationale, mais une chose est sûre : nous avons le devoir d’avancer ensemble pour faire aboutir ce texte, car il ne peut y avoir de loi ZAN 4.

S’il y a une nouvelle loi relative à l’objectif ZAN, elle devra porter sur les dispositions budgétaires et fiscales qui inciteront les élus à aller vers plus de sobriété foncière. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDPI, INDEP et Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. Daniel Gueret, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la troisième fois en moins de quatre ans, nous voilà attelés à l’examen d’un texte ayant vocation à améliorer le cadre normatif de la sobriété foncière, faisant de ce sujet législatif un véritable travail de Pénélope.

Depuis que la loi Climat et Résilience a instauré, dès le lendemain de sa promulgation et sans période transitoire, une trajectoire prescriptive et une méthode descendante pour atteindre des objectifs qu’il est permis sans exagération de qualifier d’ambitieux, tous les parlementaires sont devenus, bon gré mal gré, des pédagogues du ZAN dans les territoires.

N’ayant pas été associés à la définition des cibles ni aux modalités pour y parvenir, les élus locaux ont bien souvent été perplexes, voire inquiets des conséquences de la mise en œuvre de cette stratégie en matière de développement local et d’attractivité.

Pour comprendre les réticences relatives au changement de dimension de la sobriété foncière, il est préférable d’invoquer Descartes, plutôt que Montesquieu : c’est le discours de la méthode qui est perfectible et à revoir, et aucunement l’esprit de la loi, qui fait d’ailleurs l’objet d’un large consensus quant à ses finalités. Il existe en effet d’impérieux arguments scientifiques en faveur du renforcement des efforts en matière de sobriété foncière ; on pourrait même dire qu’il s’agit d’une ardente obligation.

La gestion économe de l’espace n’est pas un luxe, non plus qu’une mode urbanistique ; c’est une nécessité dûment attestée par les études scientifiques, qui convergent toutes vers les mêmes constats. La préservation des sols se situe en effet à la convergence des trois principaux enjeux environnementaux : biodiversité, régulation du cycle de l’eau et atténuation climatique.

Plus l’on protège les fonctions écologiques, meilleurs et plus efficaces sont les services écosystémiques rendus, tout en maintenant leur potentiel agronomique. A contrario, en adoptant une approche négative, les effets directs et indirects induits par la dégradation des sols coûtent de plus en plus chers à la société : inondations, pollution du fait d’un ruissellement accru des eaux, baisse de la capacité de stockage de CO2 et fragmentation des espaces naturels qui concourt à l’érosion de la biodiversité, etc.

Aujourd’hui, nous n’avons pas le droit à l’erreur : nous devons renforcer et sécuriser notre trajectoire vers la sobriété foncière, car il s’agit de la condition sine qua non de la réussite de la transition écologique. Nous devons stabiliser le cadre normatif et mettre fin à l’insécurité juridique découlant de ce que le législateur n’a de cesse de remettre l’ouvrage sur le métier.

C’est précisément l’objet et la raison d’être de la proposition de loi Trace : réussir la sobriété foncière en associant plus étroitement les élus locaux à la répartition territoriale des efforts. Ce fil rouge a guidé l’approche de la commission des affaires économiques et la nôtre, celle de l’aménagement du territoire et du développement durable. Elle a conduit à travailler en étroite collaboration, pour assouplir sans dénaturer.

Dans le temps qui m’est imparti, je ne vous présenterai pas dans le détail les six articles de la proposition de loi, exercice auquel se sont brillamment livrés les rapporteurs au fond.

J’insisterai simplement sur le fait que notre commission a confirmé son attachement à l’ambition originelle figurant dans la loi Climat et Résilience, à savoir réduire graduellement le rythme national des consommations foncières, pour atteindre l’absence d’artificialisation en 2050.

Pour y parvenir, nous avons proposé, conjointement avec la commission des affaires économiques, des évolutions calibrées et des assouplissements encadrés permettant aux territoires de déterminer les trajectoires adaptées à leurs spécificités et à leur dynamisme, tout en veillant au réalisme du rythme fixé. Il s’agit d’un véritable acte de foi en la capacité des élus locaux de s’emparer de ces sujets et de promouvoir des modèles d’aménagement durable, plus sobres en foncier.

Nous nous sommes efforcés d’introduire des dispositions de mise en cohérence de nos politiques publiques, en veillant par exemple à ce que l’État s’astreigne lui aussi à la même rigueur foncière, en conservant la comptabilisation en Enaf, en évitant que la stratégie de sobriété foncière ne fasse obstacle à la réindustrialisation et à la relocalisation des activités souveraines, en reportant les dates butoirs de modification des documents d’urbanisme, en faisant évoluer les modalités de mutualisation de la surface minimale dont bénéficient les communes, tout en instaurant un dialogue territorial qui permet tout à la fois d’associer les élus et d’assurer la capacité décisionnaire de la conférence régionale.

Mes chers collègues, c’est en partant des territoires et en associant plus étroitement les élus locaux à la définition des cibles intermédiaires et à la territorialisation des objectifs que la sobriété foncière deviendra un objectif commun et partagé, et non plus une stratégie qui exaspère les collectivités, voire qui crée une concurrence territoriale aux effets délétères. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et INDEP, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. François Rebsamen, ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à vous remercier de votre accueil et à vous faire part de mon plaisir d’être parmi vous aujourd’hui pour examiner la proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux.

Je salue tout particulièrement le travail des sénateurs Blanc et Cambier.

Comme j’ai déjà pu vous l’indiquer, en commission, en audition ou encore lors des questions au Gouvernement, mon état d’esprit est clair : je souhaite que nous puissions ensemble tracer, si vous me permettez ce jeu de mots, le chemin vers un ZAN qui soit compris dans ses ambitions et assoupli dans ses conditions de mise en œuvre. Mon objectif est de rassurer l’ensemble des élus locaux sur l’adéquation de cet objectif avec la poursuite de stratégies d’aménagement du territoire durables et équilibrées.

Vous l’avez rappelé, le dispositif du ZAN a été adopté dans le cadre de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, qui a inscrit dans notre droit la nécessité de réduire l’artificialisation des sols.

Il faut le souligner, cette ambition trouve ses racines dans les engagements de la France pour répondre à l’urgence climatique et à la préservation de la biodiversité. Elle est issue des propositions formulées lors de la Convention citoyenne pour le climat.

Plus récemment, la loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux – vous en étiez le rapporteur, monsieur le sénateur Blanc – est venue apporter quelques clarifications et ajustements nécessaires, tout en réaffirmant notre engagement en faveur de cet objectif.

C’est ainsi, notamment, que la garantie communale d’un hectare a été attribuée, qu’un forfait national pour les Pene d’intérêt général majeur a été prévu, afin de ne pas grever les enveloppes régionales et locales, ou encore qu’un report des échéances de mise en compatibilité des documents d’urbanisme a été octroyé.

Ces textes traduisent une conviction forte. Certes, notre capacité à limiter l’artificialisation des sols est essentielle pour assurer notre souveraineté agricole et préserver la biodiversité et nos écosystèmes. Mais elle doit être applicable, et selon une méthode ascendante, et non descendante, comme c’était le cas depuis le début.

Cependant, il ne suffit pas de fixer des objectifs ambitieux. Encore faut-il se donner les moyens de les atteindre.

Dès mon arrivée au ministère, au mois de décembre dernier, j’ai eu plusieurs occasions de m’entretenir avec vous, avec les députés, avec les élus communaux, intercommunaux ou régionaux, mais également avec les acteurs de la vie économique et les représentants du monde agricole, sur les difficultés de déclinaison locale du ZAN, les incertitudes que cela suscite aujourd’hui encore, mais aussi – il est important de le dire – avec les nombreuses collectivités qui se sont d’ores et déjà engagées, parfois de manière ambitieuse, dans la mise en œuvre du ZAN.

Je le dis depuis le début, je considère qu’il faut repartir des territoires : il s’agit non pas d’imposer depuis Paris, mais bien de bâtir des solutions adaptées aux réalités, que vous connaissez tous, de chaque territoire.

La discussion s’engage donc autour de ce texte, dont l’objectif – vous l’avez rappelé à plusieurs reprises – est non pas de supprimer le ZAN, mais de construire ensemble une trajectoire pour honorer notre objectif de 2050. Le cap est fixé ; il n’a pas varié.

Les ajustements que vous suggérez ou que je proposerai permettront sans doute de mieux s’y préparer, mais nous devons veiller à ce que la trajectoire soit respectée, car elle est fondamentale, je le crois, pour l’avenir de notre pays. C’est un point sur lequel je reviendrai.

Sans faire de comparaison avec les autres États européens, je constate que nous consommons proportionnellement plus de terres agricoles qu’eux.

J’ai ainsi pu observer que le diagnostic et les enjeux de la sobriété foncière étaient globalement partagés par tous et que personne ne discutait sérieusement la nécessité de lutter contre l’artificialisation, surtout pas les élus locaux, qui la pratiquent depuis longtemps.

Je ne reviendrai donc pas devant vous sur l’impact de l’artificialisation des sols en matière agroécologique, la limitation du stockage de carbone, l’aggravation du risque d’inondations, le dérèglement du cycle de l’eau ou encore l’érosion de la biodiversité. Nous en constatons malheureusement les conséquences, toujours plus nombreuses et importantes, année après année.

Je soulignerai, en revanche, les conséquences de l’absence de sobriété foncière en matière économique. Vous le savez, l’étalement urbain pénalise nos centres-villes, accroît notre dépendance aux mobilités carbonées, éloigne nos concitoyens de l’accès aux services et aux équipements publics, et parfois même de l’emploi.

Aujourd’hui – je le redis devant le Sénat, parce que nous avons la volonté d’avancer ensemble –, les communes rurales, au sens de l’Insee, représentaient 65,5 % de la consommation d’espaces, entre 2014 et 2020, pour 21 % des nouveaux habitants et 29 % des nouveaux ménages. Le déséquilibre peut s’entendre au regard de la nécessité de pallier les difficultés réelles liées à l’isolement, mais nous ne pouvons nous satisfaire pleinement de ce constat.

Ce n’est pas à vous que je l’apprendrai : l’artificialisation mal maîtrisée contribue à la fragmentation des territoires et à l’éloignement de services essentiels, comme les écoles, les commerces ou les centres de santé. Elle creuse les écarts entre les territoires, laissant certaines zones rurales et urbaines enclavées ou délaissées.

Nous devons donc œuvrer contre l’éparpillement des activités et la désertification des cœurs de ville, en faveur de la cohésion et contre l’émiettement d’une part de notre tissu social et de l’attractivité économique des territoires.

Or, chaque année, 24 000 hectares d’espaces agricoles, naturels et forestiers sont consommés, en moyenne, en France. Cela correspond à un département de la petite couronne parisienne, à un quinzième du département du Vaucluse, à un vingt-quatrième du département du Nord, mais aussi, pour ceux qui s’intéressent au sport, à 1 430 terrains de football ! (Sourires.)

L’artificialisation, qui s’est accélérée au cours des cinquante dernières années, est complètement décorrélée de la progression démographique ; c’est d’ailleurs dommage.

Si nous sommes passés de 60 000 hectares artificialisés par an au cours de la décennie 1980-1990 à 30 000 hectares par an dans les années 2000, du fait des efforts réalisés en termes de sobriété foncière, cette consommation stagne aujourd’hui autour de 24 000 hectares par an, comme je viens de le rappeler. D’où la perspective d’aboutir à 12 500 hectares par an à mi-parcours, pour atteindre la marche zéro en 2050.

Ce mouvement d’artificialisation est plus important chez nous que chez nos voisins européens, rapporté à la population. En effet, les données de l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) montrent que l’Espagne et le Royaume-Uni ont des niveaux d’artificialisation relativement bas sur les dernières décennies, autour de 3 000 hectares par an, tandis que l’Italie artificialise autour de 6 000 hectares par an. Quant à l’Allemagne, elle approchait déjà en 2020 l’objectif de 20 000 hectares par an que, en France, nous nous sommes fixé à mi-parcours ; nous en reparlerons.

Au moment où nous entamons ce débat, je veux aussi vous rappeler que plusieurs travaux relatifs aux outils et à la mise en œuvre du ZAN sont en cours : une mission d’information de l’Assemblée nationale, qui devrait rendre ses conclusions à la fin du mois, et une mission d’inspection sur la fiscalité du ZAN, que je lancerai prochainement avec mes collègues Éric Lombard et Agnès Pannier-Runacher.

Il me paraît judicieux de prévoir de s’appuyer sur ses conclusions pour enrichir votre proposition de loi lorsqu’elle sera examinée à l’Assemblée nationale, c’est-à-dire avant l’été, comme j’en ai pris l’engagement après que cela m’eut été demandé.

L’esprit de responsabilité et le souci de dialogue sont constants au Sénat, je le sais. Ce texte en porte la marque, et je tiens à remercier toutes celles et tous ceux qui ont participé à son élaboration. Il témoigne de la convergence d’une grande partie de nos objectifs. Reste à trouver le chemin pour les atteindre de manière souple et proportionnée sans en affaiblir ou en affadir l’ambition initiale ; cela n’a pas été fait jusqu’à présent.

Avant de revenir sur les cinq articles de ce texte, je souhaite insister sur trois objectifs, qui sont essentiels pour le Gouvernement et que, je crois, nous partageons tous : réaffirmer notre confiance dans les élus locaux et les remettre au cœur du dispositif – cela a été évoqué ; rappeler l’objectif zéro artificialisation nette en 2050 ; assouplir le dispositif lorsque c’est possible – vous savez que j’y suis favorable –, afin de mieux répondre aux besoins et aux réalités des territoires, comme pour l’industrie notamment.

Ces assouplissements ne devront néanmoins pas obérer la nécessité d’un point d’étape à mi-parcours, que je propose de décaler à 2034 – j’ai entendu que cette proposition pourrait être reprise –, car il me semble indispensable d’évaluer objectivement cette avancée, d’identifier les éventuels écarts et de permettre à ceux qui seraient en retard d’atteindre l’objectif en 2050.

Il s’agit non pas de pointer du doigt ou de mettre en jugement les collectivités qui n’arriveraient pas à tenir cet objectif, qui pourra d’ailleurs s’apprécier avec discernement, mais d’identifier les territoires confrontés à des difficultés, pour les aider à les surmonter.

Mme et MM. les rapporteurs ont déposé un amendement visant à proposer une autre solution de jalon, en 2034. Je tiens à saluer, sincèrement, cette initiative ; je ne doute pas que nous aurons de riches discussions sur le sujet.

Ainsi, certaines des dispositions de cette proposition de loi ont notre assentiment total. C’est le cas de la prise en compte des projets industriels. En effet, la réindustrialisation de notre pays, surtout en ce moment, est au cœur des stratégies locales de développement territorial.

L’industrie, qui est à l’origine de 4,5 % à 5 % de l’artificialisation des sols chaque année, ne constitue pas, en soi, un enjeu majeur dans l’économie du ZAN. En revanche, ce sujet cristallise de nombreux enjeux. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire de faire évoluer le dispositif en préservant la logique de sobriété foncière.

C’est ainsi que je vous proposerai, en accord avec mon collègue Marc Ferracci, un dispositif dédié à ces implantations industrielles. Il s’agit de créer, pour une durée de cinq ans, une réserve nationale de 10 000 hectares destinée à répondre aux besoins identifiés dans le cadre de la réindustrialisation, en sus des Pene.

Ainsi, à compter de la date de promulgation de la présente loi, les projets industriels auront vocation à émarger prioritairement sur cette enveloppe, plutôt que sur l’enveloppe des Pene.

Cette réserve, dont la consommation foncière devrait être décomptée nationalement, et non dans la consommation des collectivités d’implantation, sera mutualisée entre les régions via leur schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet).

En outre, l’inscription des projets dans l’enveloppe nationale dédiée à l’industrie se fera selon une procédure simple et concomitante au dépôt des autorisations d’urbanisme. Nous voulons simplifier le plus possible : cette procédure, distincte de celle de l’inscription sur la liste des Pene, sera précisée par décret en Conseil d’État.

Enfin, pour garantir la transparence de l’action publique, la liste de ces projets sera rendue publique.

Par ailleurs, je partage la nécessité de revenir à une méthode de comptabilisation en espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) à l’issue du jalon intermédiaire, plutôt que d’en passer par une comptabilisation en artificialisation.

Cette évolution répond – je l’avais indiqué devant votre commission, madame la présidente Estrosi Sassone – à une préoccupation légitime des élus, qui avaient l’habitude de suivre leur consommation foncière en Enaf, mais elle conduit à renoncer à une appréciation plus fine des dynamiques d’occupation et d’usage des sols. Je n’ai pas déposé d’amendement, afin de permettre la discussion autour de vos propositions, mais je rejoins les rapporteurs sur ce point.

Je tiens par ailleurs à souligner que le retour à une comptabilisation en Enaf constitue déjà, en soi, un assouplissement important du ZAN, même s’il nous est difficile de le quantifier à ce stade.

Je prendrai un exemple, très concret, pour l’illustrer : si l’on construit une maison au sein d’un lotissement qui en compte déjà plusieurs, le retour à la comptabilisation en Enaf conduira à ce que cette nouvelle construction ne soit pas considérée comme de la consommation foncière supplémentaire, alors que, dans le schéma qui était prévu après 2031, ce nouveau bâtiment aurait été considéré comme de la consommation foncière.

Ainsi, pour faire la transition avec mon point suivant, ce retour aux Enaf permettra de ne plus comptabiliser les mobilisations de dents creuses en artificialisation et, ainsi, de favoriser des projets de densification heureuse, lesquels n’empêchent pas – j’ai pu le constater – la réélection des élus qui la pratiquent.

De même, je suis favorable à l’inscription dans la loi d’une forme de définition des zones périurbanisées, afin de traiter, notamment, des dents creuses. Pour ne pas rigidifier le dispositif et permettre une égalité de traitement sur l’ensemble du territoire, je propose de nous appuyer sur la notion de faisceau d’indices, issue de la jurisprudence. Cette différence de comptabilisation ne doit cependant pas altérer la définition de l’artificialisation ; j’y reviendrai.

J’entends également votre souhait de vous appuyer sur les conférences régionales de gouvernance, que vous avez lancées, pour replacer les élus locaux au cœur des stratégies territoriales d’atteinte du ZAN.

Il s’agit ici, sans renverser totalement la hiérarchie des normes introduite entre les Sraddet, les schémas de cohérence territoriale (Scot) et les plans locaux d’urbanisme intercommunal (PLUi), notamment pour sécuriser les collectivités qui ont d’ores et déjà engagé les travaux de révision de leurs documents d’urbanisme, lorsque ceux-ci n’ont pas encore été annulés par certains tribunaux administratifs – j’ai encore vu le cas récemment –, de permettre aux élus locaux de repenser le ZAN au regard des stratégies de développement portées à l’échelle des Scot, par exemple.

Je le dis de manière transparente : j’étais favorable à la fin de la prescriptibilité des Sraddet, mais je mesure toutes les difficultés qui en découleraient, notamment dans les régions où ce travail a été conduit.

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Elles sont au nombre de cinq !

M. François Rebsamen, ministre. C’est la raison pour laquelle nous devons discuter pour trouver une solution pertinente et préciser ces dispositions.

Je suis néanmoins attaché à ce que ces assouplissements n’aient pas un effet contre-productif, qui pourrait nous éloigner de l’objectif à horizon 2050.

Aussi, le compromis que je propose – décaler la période d’observation à 2034 – entraînera un assouplissement de la trajectoire d’environ 37 500 hectares, avec l’exemption des grands projets industriels, en faisant porter ces 10 000 hectares sur ce volume de 37 500 hectares.

En outre, je suis attaché à autoriser l’extension de la mutualisation de l’hectare octroyé par la garantie communale, soit à l’échelle des Scot, soit à l’échelle des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), si nécessaire, afin de permettre aux élus locaux de gérer plus finement ces hectares et de bâtir des stratégies d’aménagement à des échelles plus larges, en fonction des besoins de leur territoire. (M. André Reichardt sexclame.)

Ces ajustements de bon sens, auxquels je suis certain que vous souscrivez, mesdames, messieurs les sénateurs, nous semblent d’autant plus indispensables qu’ils préservent l’esprit du dispositif.

Le texte qui est soumis à votre examen comprend donc de nombreuses dispositions qui permettent d’assouplir le ZAN de manière progressive et qui facilitent sa nécessaire appropriation par les élus et les acteurs de l’aménagement. Cependant, certaines d’entre elles, tout comme les propositions qui vont nourrir le débat, présentent à mon sens un risque important de vider de leur substance les engagements auxquels nous sommes attachés.

Comme je vous l’ai dit précédemment, je ne suis pas favorable à la suppression de la définition des termes « artificialisation des sols » dans le code de l’urbanisme, dans la mesure où cette notion est également mobilisée dans d’autres dispositifs juridiques ; effectuer un tel changement serait donc très lourd.

De même, je ne suis pas favorable à la suppression du jalon intermédiaire 2021-2031 visant à maintenir une sorte d’évaluation de l’atteinte des objectifs et à ne pas réitérer les difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU).

En outre, je propose de décaler ce jalon à la période 2024-2034, pour neutraliser la période 2021-2023, durant laquelle les collectivités ne pouvaient pas réellement maîtriser – cela semble aujourd’hui évident – leur consommation foncière. Je le redis, ma proposition permet de détendre l’objectif initial de 37 500 hectares, qui pourront donc être mobilisés par les collectivités pour des projets d’aménagement.

Je ne suis pas non plus favorable au décalage des échéances de révision des Sraddet et des documents d’urbanisme, et cela pour deux raisons principales : d’une part, ce serait source d’insécurité juridique pour de nombreuses collectivités qui ont déjà entrepris ces travaux ; d’autre part, ce report réduirait d’autant la période à disposition des collectivités pour atteindre l’objectif ZAN à 2050, ce qui les obligerait à prendre des décisions drastiques, alors qu’un travail progressif permet d’en lisser les effets dans le temps.

En effet, il est nécessaire que l’évolution des documents d’urbanisme ait lieu pendant la période d’observation, afin de donner aux collectivités les moyens d’ajuster leur stratégie et de mettre en œuvre les orientations inscrites dans leur document d’urbanisme pendant cette période.

En conclusion, je crois que l’enjeu est ici de mieux faire comprendre le ZAN – son ambition, sa philosophie, ses objectifs –, pour une mise en œuvre progressive, souple et acceptée par l’ensemble des acteurs du territoire, et d’apporter les derniers ajustements nécessaires à son appropriation par les élus et les acteurs de l’aménagement, qui sont encore nombreux à se montrer dubitatifs quant à ses effets.

Cette proposition de loi ne doit donc pas venir interrompre la dynamique de sobriété foncière, laquelle est bien enclenchée – contrairement à ce que j’ai entendu dire – par les acteurs et les élus locaux. Cette dynamique est la seule qui permettra de réduire efficacement une consommation foncière susceptible, à terme, de mettre en péril notre agriculture et notre environnement, mais aussi d’accroître notre vulnérabilité aux risques climatiques.

Je suis convaincu que, grâce aux travaux du Parlement, ce texte sera un levier efficace pour la réussite de notre ambition collective de réduction concertée et acceptée de l’artificialisation des sols. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis. (M. François Patriat applaudit.)

M. Bernard Buis. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ZAN, ces trois lettres que nous avons tous identifiées continuent de susciter tantôt des critiques, tantôt des inquiétudes, parmi les élus locaux de France.

Si nous pouvons avoir le sentiment que ce concept existe depuis de nombreuses années, il fut un temps, pas si lointain, où nous parlions du sujet de l’artificialisation sans faire référence au ZAN. En réalité, mes chers collègues, la notion est apparue en 2018, à l’occasion du plan biodiversité lancé par le ministre Nicolas Hulot.

La notion fut ensuite reprise par la Convention citoyenne sur le climat, avant d’être inscrite dans la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat et Résilience, qui fixa l’objectif zéro artificialisation nette pour 2025.

Sur le papier, l’intention était louable, mais force est de constater que sa mise en place a été chaotique pour les élus.

Entre le manque de concertation avec les principaux acteurs concernés et des méthodes de comptabilisation plus que complexes, le ZAN s’est heurté à la réalité de nos territoires. Sans oublier la publication de décrets qui ne correspondaient pas à la lettre de la loi Climat et Résilience, ce qui n’a pas manqué de mettre le feu aux poudres…

À tel point que le Parlement, sur l’initiative du Sénat, adopta le 20 juillet 2023 une loi ZAN 2 – la loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux –, dont l’objectif était de renforcer l’accompagnement des élus locaux dans la mise en œuvre de la lutte contre l’artificialisation des sols et de répondre aux difficultés de mise en œuvre du ZAN sur le terrain.

Cette loi a certes apporté des assouplissements, mais sans lever pour autant tous les blocages. C’est la raison pour laquelle le Sénat a décidé de lancer un groupe de suivi des dispositions législatives et réglementaires relatives à la stratégie de réduction de l’artificialisation des sols.

Ce groupe de suivi, dont j’ai été membre, avait lancé en 2024 une concertation en ligne à destination des élus locaux.

Les résultats, publiés en juin 2024, sont sans appel : 75 % des répondants estiment que les critères de territorialisation des enveloppes d’artificialisation ne sont pas correctement pris en compte ; 77 % des répondants bénéficiaires de la garantie de développement communal ont l’intention de l’utiliser ; plus des deux tiers des répondants ont du mal à déterminer ce qui est classé comme consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers ; enfin, 81 % des répondants considèrent le changement de mode de comptabilisation de l’artificialisation en 2031 comme problématique… Autant de raisons qui justifient, mes chers collègues, de réajuster le ZAN.

Tel est le sens de cette proposition de loi : repenser le ZAN pour en faire un outil intelligent et adapté aux réalités locales.

Plutôt que d’avoir une logique verticale et descendante, je crois qu’il serait bénéfique pour tout le monde d’inverser la logique de territorialisation, en partant des besoins et des projets des collectivités territoriales.

Je trouve donc utile de pérenniser, au sein de l’article 1er, la mesure de l’artificialisation par le décompte de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers, les Enaf, comme c’est actuellement le cas jusqu’en 2031.

Ce mode de comptabilisation, connu et compris des élus locaux, permet aux collectivités de mieux piloter leur artificialisation au travers de leurs documents d’urbanisme et d’assurer un suivi en temps quasiment réel des consommations foncières.

La discussion du mode de calcul est justement l’occasion de réfléchir à la nature même des projets inclus dans la comptabilisation, laquelle fait régulièrement l’objet d’interpellations de la part de nos maires.

À ce propos, je salue l’adoption d’un sous-amendement que j’ai défendu en commission et dont le but est d’exempter du décompte de la consommation d’Enaf les énergies renouvelables jusqu’en 2036. En effet, la décarbonation du mix énergétique et la sobriété foncière ont les mêmes objectifs : lutter contre le dérèglement climatique et renforcer notre souveraineté énergétique. La mesure a été adoptée en commission – tant mieux !

Nos débats en commission ont également démontré la nécessité de revenir sur les dates butoirs s’agissant des documents d’urbanisme. En ce sens, le décalage de ces dates me semble bienvenu. Concrètement, il s’agit de repousser les dates butoirs de 2027 et 2028 avant lesquelles doit intervenir la modification des documents d’urbanisme, à 2031 pour les Scot et à 2036 pour les PLUi et les cartes communales.

J’ajoute que les régions pourront, en toute souplesse, décider ou non de modifier leur Sraddet, afin d’adopter un objectif régional de trajectoire foncière jusqu’au 22 août 2026.

Mes chers collègues, en conclusion, je crois que le Sénat peut, une fois encore, être la vigie attentive et soucieuse du quotidien des élus locaux. Il s’agit non pas de remettre en cause l’idée même du ZAN, mais simplement d’en faire un outil plus affûté, plus utile et plus adapté aux réalités locales.

C’est une nouvelle occasion de prouver le sérieux de notre assemblée et, ainsi, de démontrer que la démocratie représentative est bel et bien utile dans notre pays. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Philippe Grosvalet. Monsieur le Président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cinquante années ont suffi pour artificialiser davantage de terres qu’en cinq siècles. Ainsi, en Loire-Atlantique, on a consommé autant de terres en un siècle et demi que depuis les origines de l’humanité !

Pour enrayer cette fulgurante accélération, la loi Climat et Résilience de 2021 a introduit l’objectif zéro artificialisation nette à horizon 2050.

J’avais moi-même lancé cette nécessaire ambition dès 2017 dans mon département, en délivrant toutefois ce message aux maires : « N’attendez pas qu’une loi vienne vous dicter ce que vous devez faire. » J’étais, hélas ! visionnaire, tant cette loi a suscité rejet et défiance de la part de nos élus locaux.

La complexité du dispositif, la parole peu ou pas écoutée des acteurs de terrain et les inégales interprétations des services décentralisés de l’État ont transformé un impératif de sobriété foncière en une entrave supplémentaire dans la gestion et le développement de nos territoires.

Dès 2023, le législateur, ayant conscience de ces difficultés, y avait apporté des modifications via la loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux, notamment autour des projets d’envergure nationale ou européenne, les Pene, par l’instauration de la garantie rurale et l’installation des conférences régionales.

Néanmoins, cette initiative parlementaire bienvenue ainsi que les changements réglementaires qui ont suivi n’ont pas suffi à corriger tous les défauts d’un objectif initial mal conçu. Comment, dès lors, concilier sobriété foncière et développement du territoire, ces objectifs aujourd’hui compris et intégrés par nos communes ?

Il s’agit de trouver un point d’équilibre entre l’impératif moral de maintenir l’objectif ZAN pour garantir une terre vivable pour nos petits-enfants, l’absolue nécessité d’assurer un logement pour tous et de garantir les conditions de notre souveraineté industrielle, si cruciale actuellement, et la prise en compte des diversités et des différents besoins de nos territoires.

Dans ce contexte, le groupe RDSE aborde plutôt favorablement la discussion des articles 1er, 3, 4, 5 et 6, qui redonnent de la capacité aux élus locaux en assouplissant la définition de l’artificialisation, en les libérant des fortes contraintes calendaires autour des documents d’urbanisme, ou encore en renforçant le rôle de la conférence régionale de gouvernance de la sobriété foncière.

En revanche, nous estimons que l’article 2, qui vise à supprimer l’objectif intermédiaire, aujourd’hui fixé à 2031, n’est en aucune façon une mesure de souplesse, mais constitue au contraire une perte de repères.

Le marin que je suis sait combien les balises sont indispensables pour atteindre le port sans encombre quand la mer est mauvaise… Sans balise intermédiaire, sans point d’étape, nous plongeons nos collectivités dans le brouillard et nous prenons le risque d’une aggravation des disparités territoriales.

De plus, en proposant un point unique à 2050, cette disposition fausse en partie l’ambition du texte, qui parle, je le rappelle, de trajectoire… La trace n’est que le sillage que nous laissons derrière nous ; elle ne définit pas le chemin qui reste à parcourir !

Sans aucun point d’étape d’ici à 2050, comment ne pas craindre que certaines collectivités soient tentées de se mettre à la cape ? Quel héritage allons-nous léguer aux maires qui seront élus en 2044 ? D’autant que – nous le savons, car le ministre l’a dit – les dernières marches pour atteindre l’objectif ZAN seront les plus difficiles à gravir. Comment nous jugeront-ils alors ?

Par conséquent, le Sénat doit assumer pleinement son rôle de chambre des collectivités et répondre aux attentes de nos élus : maintenir un objectif très ambitieux, pour laisser une terre désirable aux générations à venir sans pour autant imposer des contraintes obérant leur pouvoir d’agir ; rendre l’objectif ZAN soutenable sans le vider de sa substance ou, comme je l’ai répété tout au long de nos débats, ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain ; fixer le cap, tracer la route, pour que chaque commune de France puisse dessiner sa trace et l’inscrire dans son livre de bord.

Voilà, mes chers collègues, ce à quoi je nous invite. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Franck Menonville. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier Guislain Cambier et Jean-Baptiste Blanc d’avoir déposé cette proposition de loi très attendue par nos élus, qui apporte des correctifs aux conditions d’application du ZAN dans nos territoires.

L’application uniforme de ce dispositif issu de la loi Climat et Résilience s’est avérée profondément inadaptée aux réalités et aux besoins de ces derniers.

Dans le département de la Meuse, comme ailleurs, les élus nous font part chaque semaine de leurs vives inquiétudes dans la mise en place du ZAN. Notre département, intégralement classé en zone France Ruralités Revitalisation (FRR) et qui n’a consommé que peu de foncier, serait condamné à l’immobilisme dans la version initiale du zéro artificialisation nette : c’est inacceptable.

Nos élus se retrouvent trop souvent contraints, voire bloqués dans le développement de leur offre de logements ou d’accueil d’entreprises, alors même que nous prônons la réindustrialisation de notre pays : autant d’injonctions contradictoires dont nos politiques publiques regorgent.

Je salue l’action de Valérie Létard, qui avait déjà, voilà quelques années, pointé les défaillances du dispositif. Elle s’était efforcée, au Sénat, d’assouplir le ZAN en apportant des correctifs à la loi. Mais il reste du chemin à faire.

Je salue le travail de nos deux collègues auteurs de la proposition de loi et des trois rapporteurs, qui dressent le même constat.

Soyons clairs, nous sommes tous conscients de l’importance de la sobriété foncière, qui est une nécessité, mais nous devons adopter une approche différenciée selon les territoires.

Il faut savoir faire preuve de souplesse et sortir du carcan dans lequel nous sommes pris. Chères Amel Gacquerre et Dominique Estrosi Sassone, alors que nous avons un sérieux problème de logement dans notre pays, nous limitons les nouvelles constructions.

Nous devons renforcer les moyens d’action pour accéder à la sobriété foncière et amoindrir une coercition contre-productive. Il faut octroyer davantage de libertés aux élus, seuls à même de connaître les enjeux et les besoins en termes d’aménagement de leurs territoires. La différenciation territoriale sera un gage d’acceptabilité et d’adhésion.

Les mesures de simplification et de réalisme présentées dans ce texte constituent de réelles avancées.

Pour ce qui est de la simplification, conserver la notion d’Enaf permet aux collectivités de ne pas changer leur mode de calcul. Sont également simplifiés la révision des documents d’urbanisme et le calendrier permettant aux conférences régionales de sobriété foncière de fixer les objectifs intermédiaires, ainsi que la conférence régionale du ZAN.

Ce texte fait aussi preuve de réalisme puisque les projets industriels et les logements sociaux ne seront pas comptabilisés jusqu’en 2036. Voilà une vraie réponse aux attentes des territoires.

La gestion des friches constitue un autre enjeu essentiel. Pour faire face à la désindustrialisation, il faut aider à la renaturation. Nous disposons d’un vrai gisement en la matière. Je ne m’étendrai pas davantage sur ce sujet, laissant mon collègue Yves Bleunven s’exprimer à ce propos.

Mes chers collègues, vous l’avez compris, le groupe Union Centriste votera en faveur de cette proposition de loi, dont je souhaite ardemment qu’elle soit examinée au plus vite à l’Assemblée nationale pour permettre à nos territoires de tracer leurs projets sur le chemin du bon sens et des libertés locales. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP.)

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question de l’artificialisation des sols ne date pas d’aujourd’hui. Cela a été rappelé, le zéro artificialisation nette constitue une préoccupation majeure des élus locaux et des maires depuis son entrée en vigueur dans la loi Climat et Résilience.

Chaque année, entre 20 000 et 30 000 hectares sont artificialisés, c’est un fait. Précisons immédiatement que de nombreuses collectivités font l’effort de réduire leur consommation de foncier, en densifiant quand c’est possible ou en renaturant l’espace public dans les zones les plus bétonnées.

Nous nous interrogeons d’ailleurs sur le déploiement des objectifs du zéro artificialisation nette, qui contraint davantage les collectivités ayant peu artificialisé, certes au bénéfice de l’intérêt général, alors que d’autres ont pu artificialiser avec davantage de liberté.

Le défi est donc le suivant : sans pouvoir reprendre l’ensemble de l’aménagement de notre territoire ni corriger les erreurs du passé, nous devons tenir compte des impératifs écologiques.

Comme nous, les maires souhaitent trouver un équilibre entre, d’une part, la préservation de la qualité de vie, celle de la biodiversité, des espaces naturels, agricoles et forestiers indispensables à la lutte contre le dérèglement climatique et, d’autre part, l’attractivité et le dynamisme de leur territoire, qui attirent et facilitent l’activité humaine.

Nous devrons, demain, accueillir des équipements publics, construire des écoles tout en ayant des îlots de fraîcheur pour nos enfants.

Nous devrons cultiver des terres agricoles, augmenter le nombre de surfaces et diversifier nos cultures, tout en accueillant des commerces.

Nous devrons aussi réindustrialiser pour réduire nos émissions et ne pas consommer de produits conçus à l’autre bout de la planète, tout en évitant de délocaliser et de vider les constructions de leurs activités.

De nombreux projets reposeront sur les enveloppes d’artificialisation de quelques collectivités, alors qu’ils profiteront aussi à celles et à ceux qui n’en paieront pas le coût foncier. C’est le cas de certains projets d’envergure nationale ou européenne, qu’il était important d’intégrer dans notre réflexion pour que la loi en tienne compte.

Dans cette équation difficile, je salue tout d’abord les auteurs de cette proposition de loi, Guislain Cambier et Jean-Baptiste Blanc, qui ont su trouver des solutions et des points d’équilibre sans remettre en cause le cap fixé pour 2050.

Oui, ce texte vise à ajuster le calendrier pour intégrer les difficultés des collectivités, notamment rurales, en matière d’urbanisme. Ne nous trompons pas : nous devrons très certainement continuer de travailler à d’autres améliorations législatives pour donner des ressources et soutenir les collectivités face à la raréfaction du foncier disponible.

C’est aussi pour répondre à cette équation que nous avons de nouveau souhaité aborder la question des friches. Ces espaces bâtis, mais délaissés, nuisent à la fois aux objectifs de réduction de l’artificialisation et à l’attractivité de nos territoires. Nous aurions donc tout intérêt à renforcer leur traitement.

Nous avions demandé, à l’article 10 de la loi relative à l’industrie verte, un rapport sur ce sujet. Il s’agit d’une réelle nécessité, monsieur le ministre ; j’y reviendrai durant la discussion des amendements.

Je souhaitais en effet consulter ce rapport pour préparer l’examen de ce texte : quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’ai demandé au Président du Sénat de nous le transmettre. Comment pouvais-je me douter que le Gouvernement n’aurait pas respecté ses obligations en la matière ? La réponse fut claire : ce rapport n’a jamais été réalisé ni transmis au Parlement.

M. Jacques Fernique. C’est vrai !

Mme Cécile Cukierman. C’est un vrai sujet, d’autant que c’est aussi par ce biais que nous surmonterons certaines difficultés et lèverons les contraintes qui pèsent sur nos territoires.

Plusieurs collectivités n’auront certainement pas besoin de s’appuyer sur ce texte pour réaliser les changements qu’elles ont déjà opérés dans leurs documents d’urbanisme : 5 % des Scot adoptés incluent déjà la trajectoire du ZAN.

La présente proposition de loi permettra à toutes les collectivités de changer de pratique, pour qu’il n’y ait pas les tenants du ZAN d’un côté et les réticents de l’autre.

J’en suis sûre, elle permettra à ceux qui ont déjà entamé leurs efforts de les poursuivre et elle donnera du temps et de la souplesse pour que tous atteignent leur objectif. C’est cette volonté qui a guidé les travaux du groupe de suivi dont est issue cette proposition de loi ; notre groupe en suivra la trace dans son vote final. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Ronan Dantec. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai également mon propos par une citation : « Nous jugeons que la proposition de loi Trace, en l’état, n’offre pas toutes les garanties nécessaires à la préservation des terres agricoles. Nous demandons donc que la proposition de loi soit retravaillée pour conserver des objectifs et des moyens ambitieux de préservation des terres agricoles. »

Tout est dit dans ce courrier d’alerte du 7 mars dernier, qui fait part de la grande inquiétude d’Arnaud Rousseau – vous le connaissez, mes chers collègues, c’est le président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA). (MM. Vincent Louault et Laurent Duplomb sexclament.)

J’aurais également pu citer les propos de Maxime Buizard-Blondeau, référent foncier du syndicat Jeunes Agriculteurs (JA), qui déclarait il y a quelques jours au média Contexte, de façon bien plus radicale : « Nous allons nous battre pour que la proposition de loi Trace n’aille pas au bout de son parcours. » (Sourires et applaudissements sur des travées du groupe GEST.)

Mes chers collègues, à quoi cela sert-il que Laurent Duplomb se décarcasse pour montrer que la droite sénatoriale est la grande amie du monde agricole si, quelques jours seulement après l’adoption de sa proposition de loi, vous piétinez allègrement vos propres éléments de langage sur la souveraineté alimentaire en présentant un texte qui constitue une attaque frontale contre le monde agricole et ses syndicats ? (Protestations sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

MM. Michel Canévet et Guislain Cambier. Non !

M. Ronan Dantec. À l’origine, la présente proposition de loi, dite ZAN 3, avait pour objet d’améliorer l’importante loi Climat et Résilience de 2021, qui constitue peut-être la dernière loi portant de véritables avancées environnementales, de par ses dispositions visant à réduire le gaspillage insensé et insoutenable dans la durée des espaces naturels, agricoles et forestiers.

Dans la loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux, dite ZAN 2, nous nous étions déjà attelés aux questions alors réelles résultant des difficultés d’application de l’objectif de réduire de 50 % nos consommations foncières d’ici à dix ans.

Par la création des projets d’envergure nationale ou européenne pour comptabiliser les projets de l’État, et en corrigeant les tares de la garantie rurale, le Sénat avait apporté ses propres réponses à la plupart des difficultés.

Le groupe écologiste a d’ailleurs toujours activement participé aux différents groupes de travail, dont l’objectif affiché était d’améliorer l’applicabilité de la loi. J’avais même à l’époque proposé de conserver le décompte des Enaf comme base de calcul de l’artificialisation jusqu’en 2050 et je note avec intérêt que cette proposition est retenue dans le présent texte.

M. Ronan Dantec. Pour le reste, comment est-on passé de l’amélioration de la loi à sa consciencieuse démolition ? La temporalité de ZAN 3 est assez étonnante : plus les territoires adoptaient des documents d’urbanisme intégrant clairement l’objectif de réduire de 50 % la consommation de foncier, souvent à l’unanimité, comme pour le Scot du pôle métropolitain Nantes-Saint-Nazaire, plus la droite sénatoriale se radicalisait dans ses attaques contre le ZAN.

C’est très surprenant. Je vous livre une hypothèse : il fallait sauver le soldat Wauquiez, sorti sabre au clair mener croisade contre le ZAN,… (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

Mme Cécile Cukierman. La droite sénatoriale ne l’a pas vraiment sauvé !

M. Ronan Dantec. … « va-t-en guerre » tout fier de clamer devant les élus de la République, à l’Alpe-d’Huez – j’y étais – qu’il ne respecterait pas la loi ! Il s’est tout de même vite retrouvé un peu seul, puisque ses plus proches camarades en politique, les Bertrand et Morin, ont sagement, et sans grande difficulté, choisi d’intégrer l’objectif de réduction de 50 % dans leurs schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Quel manque d’arguments !

M. Ronan Dantec. Pour ne pas laisser le pauvre Wauquiez seul face à ses surenchères populistes, il fallait que cet hémicycle lui-même lui redonne une légitimité en soutenant sa position. (Protestations amusées sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

Peu importe que presque tous les réseaux de collectivités auditionnés, à savoir Régions de France, Intercommunalités de France ou la Fédération nationale des Scot aient souligné, parfois au vitriol, leur désaccord : il fallait appuyer sur la gâchette, quitte à se prendre une balle dans le pied !

Le Gouvernement et les corapporteurs de la mission d’information de l’Assemblée nationale sur l’articulation des politiques publiques ayant un impact sur l’artificialisation des sols ont déjà fait part de leur hostilité à la remise en cause de l’objectif de diminution de 50 %. C’est heureux, mais cela reste encore à confirmer.

Monsieur le ministre, nous espérons que le Gouvernement prendra une position tout aussi claire contre les attaques, peut-être plus graves dans la durée, contre les lois de décentralisation de la gauche, qui ont fait des régions des collectivités de plein exercice, disposant de capacités réelles de planification.

Amoindrir le caractère prescriptif des Sraddet et permettre aux conférences régionales de gouvernance de donner des avis conformes sont des affaiblissements extrêmement préoccupants de la compétence de planification des régions, pourtant si nécessaire.

En définitive, quelles sont les principales mesures de cette proposition de loi de remise en cause de la lutte contre l’artificialisation ? La non-prise en compte de l’importance de la préservation des terres agricoles pour la souveraineté alimentaire, …

M. Ronan Dantec. … le refus de l’urgence de l’adaptation au changement climatique, alors que les espaces naturels et agricoles sont au cœur de la lutte contre les inondations.

C’est un cadeau fait aux territoires en développement, notamment aux métropoles, qui pourront continuer de s’étaler au détriment des territoires en difficulté, dont, mes chers collègues, vous vous faites pourtant volontiers les porte-parole. (Protestations sur les travées du groupe UC.)

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Ronan Dantec. C’est enfin une remise en cause des régions en tant qu’acteurs de la planification.

La liste n’est pas exhaustive, mais face à un tel bilan, s’opposer à cette proposition de loi me semble aller de soi ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Christian Redon-Sarrazy. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons tous, l’immense majorité des élus locaux sont aujourd’hui engagés dans une démarche de sobriété foncière.

Directement inspirée des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, la loi Climat et Résilience, adoptée en 2021 par la majorité sénatoriale, a fixé deux objectifs pour accélérer cette transition nécessaire : la réduction de moitié de l’artificialisation dans les années 2030 et le zéro artificialisation nette à l’échelle nationale en 2050.

Pour le groupe socialiste, la marche à suivre était claire dès le début et nous n’en avons jamais dévié. Dès 2021, nous soulignions la nécessité de territorialiser la mise en œuvre de ces objectifs et demandions au Gouvernement de la lisibilité, une concertation ascendante, une égalité de traitement entre les territoires et, surtout, des moyens d’accompagnement.

Or, quatre ans et deux propositions de loi plus tard, force est de constater que les blocages demeurent. Il y eut d’abord la loi d’initiative sénatoriale du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux.

Ce bel exemple de travail transpartisan, voté à l’unanimité par le groupe socialiste, avait déjà apporté des assouplissements : report des dates pour adapter les documents d’urbanisme, précision des critères de territorialisation, mutualisation à l’échelon national de l’enveloppe des Pene, prise en compte des friches.

Il semble que cela n’a pas été suffisant puisque vient aujourd’hui la proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux, dite Trace. Même si le point est subtil, on perçoit dès l’intitulé que les auteurs posent de mauvaises questions, ce que vient confirmer la lecture des dispositions de cette proposition de loi, qui n’apporte pas les bonnes réponses.

La plupart des régions ont déjà révisé leurs Sraddet. De nombreuses communes ont consacré du temps et engagé de considérables moyens financiers pour réviser leurs documents d’urbanisme en prenant en compte l’objectif de sobriété foncière. Mes chers collègues, voulez-vous les placer dans une situation d’insécurité juridique en rendant caduc tout leur travail ?

Imaginez les disparités que de telles remises en cause entraîneraient entre les régions qui ont respecté la trajectoire, celles qui devront remettre l’ouvrage sur le métier et celles qui n’ont pas encore avancé, sans jauge permettant de vérifier si l’objectif est bien respecté !

Nous ne pouvons accepter ce texte en l’état. Nos amendements s’emploieront donc à rétablir certaines dispositions que nous estimons indispensables.

Nous souhaitons un objectif intermédiaire commun de 50 % de réduction de terres artificialisées. Nous ferons différentes propositions en termes de jalons, afin de permettre aux territoires d’avancer à leur rythme.

Pour ne pas pénaliser les régions vertueuses ayant déjà fait l’effort d’inscrire dans leur Sraddet cette trajectoire ambitieuse à l’horizon de 2031 et souhaitant la conserver, nous proposons une dérogation. Dans un souci de cohérence, nous avons également déposé un amendement visant à ne pas obliger les régions ayant déjà modifié leur document de planification à faire évoluer celui-ci de nouveau.

Comme en 2023, nous proposons de nouveau d’expérimenter un dispositif de pondération au bénéfice des projets ne conduisant qu’à une faible artificialisation. Suivant l’idée de territorialisation que nous préconisons depuis quatre ans, cette mesure permettrait également de mieux intégrer la préservation des sols dans les politiques d’aménagement.

En outre, l’interprétation de la notion d’« espaces urbanisés en bordure de l’enveloppe urbaine » risque de varier d’une commune à l’autre et d’entraîner des conflits permanents, en sus de favoriser le mitage. Cette notion trop évasive ne peut être conservée.

Nous proposerons également de supprimer le double décompte imposé aux Scot pour le suivi du foncier, ce qui constitue une mesure de simplification cohérente.

Nous proposerons aux collectivités d’expérimenter un outil de diagnostic de la qualité et de la santé des sols, afin de les aider à mieux orienter leurs choix urbanistiques en ciblant l’artificialisation sur des sols aux performances agronomiques moindres, préservant ainsi les sols à fort potentiel.

Toujours dans la perspective d’aider les communes déjà engagées dans une trajectoire de réduction de la consommation foncière, nous souhaitons encourager les projets favorables à la neutralité climatique, afin que la territorialisation des enveloppes foncières n’empêche pas les communes de réaliser des projets favorisant la transition écologique.

Enfin, nous formulerons une proposition concernant la garantie rurale de 1 hectare, qui a rapidement été dévoyée. Nous avions déjà demandé au Gouvernement de l’époque des garanties sur la mise en œuvre de ce dispositif, dont tout le monde s’accorde aujourd’hui à reconnaître la complexité. Il rend l’application de certains critères de territorialisation difficile et entraîne parfois un gel du foncier, soit l’inverse de l’objectif visé.

Nous proposons donc une clause de revoyure, au plus tard en 2028, pour vérifier sa bonne articulation avec le dispositif de mutualisation et son incidence sur l’enveloppe foncière.

Mes chers collègues, la ligne du groupe socialiste est claire et n’a pas changé depuis 2021 : nous sommes favorables à l’objectif de zéro artificialisation nette en 2050, mais estimons nécessaire de définir un objectif intermédiaire et surtout de sanctuariser le travail déjà accompli par les collectivités territoriales.

M. le président. Il faut conclure !

M. Christian Redon-Sarrazy. J’espère que nos débats sauront être sereins, constructifs et intelligents, ce qui est le propre des débats du Sénat. Voilà qui apporterait un salutaire réconfort dans les temps politiques que nous vivons. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Mme Cécile Cukierman applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes appelés à nous prononcer sur une proposition de loi qui marque une avancée importante pour nos élus locaux.

Trop souvent, ces derniers sont considérés comme de simples exécutants de décisions prises à Paris, sans qu’on leur laisse réellement la possibilité d’adapter les règles aux réalités de leur territoire. Or qui mieux qu’un maire sait comment gérer l’urbanisation de sa commune ? Qui mieux qu’un élu de terrain peut juger des besoins de sa population en matière de logement, de services ou de développement économique ?

Ce texte permet enfin de remettre un peu de bon sens dans notre politique d’aménagement du territoire. Il prévoit une trajectoire plus réaliste et concertée de réduction de l’artificialisation des sols, en associant enfin les élus locaux aux décisions. Il clarifie des définitions floues, qui avaient jusqu’ici mené à des blocages injustifiés.

En cela, il répond aux nombreuses inquiétudes soulevées par les maires et les élus municipaux qui, depuis la loi Climat et Résilience, se retrouvent piégés par des règles incohérentes et inapplicables.

Le Rassemblement national soutient donc cette proposition de loi, car elle va dans le bon sens : celui d’un urbanisme équilibré, qui protège nos terres agricoles et naturelles tout en permettant aux communes de se développer harmonieusement.

Depuis longtemps, Marine Le Pen alerte sur les conséquences absurdes des politiques écologistes punitives imposées par la technocratie parisienne. Nous l’avons dit et répété : la loi Climat et Résilience, telle qu’elle a été pensée, est une machine à empêcher, qui bloque la construction de logements, asphyxie les communes rurales et renforce les fractures territoriales.

Cette proposition de loi corrige certaines erreurs et offre une bouffée d’oxygène aux collectivités. Mais nous devons rester lucides : si elle constitue une avancée, elle ne règle pas tout. Nous le savons, derrière sa volonté affichée de concertation, le Gouvernement poursuit sa politique de régionalisation à marche forcée.

Nous devons ici le dire clairement : la logique de transfert de compétences aux régions se fait au détriment des petites communes.

Le risque est évident : la centralisation se déplace non plus vers l’État, mais vers les métropoles, qui concentrent toujours plus de pouvoirs, de ressources et de décisions. À terme, ce sont encore nos villages et nos territoires ruraux qui en paieront le prix fort.

Ce que nous voulons, nous, c’est que les communes, grandes ou petites, aient réellement les moyens de décider de leur avenir tout en gardant un contrôle foncier, afin de protéger les terres agricoles.

Nous serons vigilants, car nous savons que l’avenir de nos territoires ne doit pas être dicté par des logiques bureaucratiques et technocratiques. Nous devons redonner aux maires la liberté d’agir, la liberté de construire et la liberté d’aménager leur territoire en fonction des réalités locales.

Le combat du Rassemblement national est celui de la proximité, de la souveraineté locale et du respect des élus, qui œuvrent au quotidien pour leurs concitoyens.

Cette proposition de loi va dans le bon sens, mais elle ne suffira pas à inverser la tendance si nous ne remettons pas en cause les grandes orientations imposées par le Gouvernement.

Parce que nous croyons en la France des territoires, nous voterons pour ce texte proposé par les sénateurs Guislain Cambier et Jean-Baptiste Blanc, mais nous continuerons de défendre une véritable politique d’aménagement du territoire qui ne sacrifie pas nos communes rurales et qui garantisse une réelle équité entre tous les Français, qu’ils vivent en ville ou à la campagne.

M. le président. La parole est à M. Cédric Chevalier. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Anne-Sophie Romagny et M. Guislain Cambier applaudissent également.)

M. Cédric Chevalier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à remercier très sincèrement les auteurs de la proposition de loi, Jean-Baptiste Blanc et – tout particulièrement – Guislain Cambier, lequel s’est rendu disponible à chaque fois que nous l’avons sollicité dans la Marne, pour écouter et échanger avec l’ensemble des élus et mieux leur expliquer ce texte.

Je remercie également les rapporteurs Amel Gacquerre, Jean-Marc Boyer et Daniel Gueret, qui ont organisé des temps d’échange pour construire et partager une vision apaisée sur cette proposition de loi.

Mes chers collègues, quelle que soit la taille de sa commune, il n’est pas un élu local qui ne m’ait exprimé son inquiétude sur la mise en place du ZAN. Il n’est pas non plus une séance de travail sur le Scot ou sur le plan local d’urbanisme intercommunal que je pilote dans le Grand Reims au cours de laquelle ce grand enjeu ne revienne.

Tout de go, je suis convaincu que nous aurons, quoi qu’il arrive, de très grandes difficultés à atteindre cet objectif en 2050, tant le sujet est complexe et tant son application, notamment en matière de compensation, est instable.

En moins de trois ans, le dispositif a fait l’objet de plusieurs retouches, ce qui démontre que, malgré l’objectif vertueux de préserver notre environnement, la biodiversité et nos ressources agricoles, sa rigidité et la complexité de son interprétation ne semblent pas du tout adaptées à la diversité de nos territoires.

La loi Climat et Résilience de 2021 avait posé les bases d’une réflexion indispensable pour améliorer la gestion du foncier, en montrant comment moins et mieux consommer. Toutefois, elle a introduit des mesures dont l’application a pu se révéler injuste. Je pense notamment au mode de calcul retenu, qui favorise les territoires ayant fortement consommé du foncier par le passé et pénalise ceux qui ont eu une politique vertueuse en la matière.

Mme Cécile Cukierman. Très bien !

M. Cédric Chevalier. Des contraintes frappent certains territoires, en particulier en ruralité. Une application uniforme crée des incohérences entre les territoires ruraux et les pôles urbanisés, qui ont la possibilité de reconstruire sur des surfaces déjà artificialisées.

En parallèle, et paradoxalement, notre pays doit répondre à des enjeux cruciaux – réindustrialisation, construction de logements, renforcement de notre souveraineté alimentaire et énergétique – qui peuvent donner lieu à de la consommation foncière.

Or, face à ces nécessités, les rigidités imposées par la loi de 2021 rendent toute évolution extrêmement complexe. Il ne s’agit pas non plus de tomber dans l’excès inverse et d’être trop permissif : nous devons trouver le juste équilibre.

Cet objectif ne pourra être atteint qu’avec les élus locaux, seuls à même de construire un projet pour leur territoire tout en intégrant les grands enjeux de préservation des ressources naturelles. Ils sont en première ligne et constituent les meilleurs relais vis-à-vis de ceux de nos concitoyens qui seront affectés.

Il faudra de la conviction et du dialogue pour expliquer à une famille ayant payé des droits de succession sur un terrain à bâtir que celui-ci n’est plus constructible à cause du ZAN : bon courage !

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Exactement !

M. Cédric Chevalier. C’est dans cette optique, pour redonner aux maires une véritable marge de manœuvre, que la philosophie de la proposition de loi Trace prend tout son sens. Il s’agit de leur offrir plus d’agilité pour leur permettre de prendre des décisions plus adaptées aux réalités du territoire.

C’est aussi l’occasion de leur redonner du temps, élément essentiel pour faciliter la réflexion, la projection et l’acceptation. Cela passe par des délais adaptés et cohérents pour les territoires ayant déjà engagé l’élaboration de leurs documents d’urbanisme, qu’il s’agisse des Sraddet, des Scot ou des PLUi.

Au cours de nos débats, il nous appartiendra de clarifier un certain nombre de définitions, mais aussi de bien maîtriser les exceptions. En cherchant la simplification et l’agilité, ne tombons pas dans le travers de ne trouver finalement que lourdeur et incompréhension.

Si cette proposition de loi était adoptée, nous devrions être très vigilants sur la mise en cohérence de ses dispositions avec les documents déjà en vigueur ayant intégré ces notions vertueuses de consommation, notamment ceux qui ont entraîné des travaux encore en cours. Il ne faudrait pas, en percutant les documents déjà adoptés, que cette proposition de loi ajoute davantage de confusion. (Marques dironie sur les travées du groupe GEST.)

M. Ronan Dantec. Vraiment ?

M. Cédric Chevalier. Mes chers collègues, quand le ZAN sera effectif, j’aurai 77 ans. Je ne suis pas certain d’être encore dans cet hémicycle à ce moment-là. (Mais si ! amusés sur plusieurs travées.)

Je forme toutefois le vœu que l’esprit de la loi Climat et Résilience, à savoir la préservation de la planète et de ses ressources, demeure.

En attendant, le groupe Les Indépendants – République et Territoires soutiendra bien évidemment cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Cécile Cukierman applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après l’adoption de la loi de juillet 2023, nous avions cru refermer le dossier du ZAN. Pourtant, force est de le constater, presque quatre ans après l’adoption de la loi Climat et Résilience, l’inquiétude des élus locaux ne faiblit pas – bien au contraire – et l’application de cette loi est devenue un enjeu central pour la compétitivité et la réindustrialisation de notre pays.

Les assouplissements permis par loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux, dite ZAN 2, dont je salue l’initiateur, Jean-Baptiste Blanc, n’ont pas été suffisants pour assurer une application apaisée de cette politique, dont nous partageons pourtant tous la philosophie générale.

Le groupe de suivi des dispositions législatives et réglementaires relatives à la stratégie de réduction de l’artificialisation des sols a dressé un constat sans appel de ces blocages persistants dans le rapport qu’il a publié à l’automne dernier. Qu’il s’agisse du secteur du logement ou de celui de l’industrie, de l’aménagement du territoire ou des services publics, chaque audition nous a fourni de nouveaux témoignages sur les difficultés causées par cette politique de réduction de l’artificialisation.

À cette situation, la proposition de loi de nos collègues Guislain Cambier et Jean-Baptiste Blanc apporte deux réponses structurantes : elle fait sauter le verrou de la réduction de 50 % de l’artificialisation des sols à l’horizon de 2031 et elle renforce le rôle des collectivités dans la définition des enveloppes foncières, à rebours de la logique descendante qui prévaut aujourd’hui.

Le groupe Les Républicains est bien sûr favorable à l’esprit et à la lettre de cette proposition de loi.

Nous soutenons d’abord le droit à la différenciation. Faire confiance aux territoires pour déterminer les meilleurs moyens d’atteindre l’objectif de zéro consommation nette d’espace en 2050 constitue bien évidemment la meilleure solution, une solution qui devrait transcender tous les groupes politiques.

C’est aussi dans cet esprit transpartisan que la majorité sénatoriale a constamment refusé depuis 2021 de remettre en cause l’objectif de neutralité foncière en 2050. Cette proposition de loi ne fait pas exception : pas un seul amendement n’a été déposé en ce sens. Toutefois, le ZAN ne saurait signifier « zéro avenir net » pour notre industrie, pour la ruralité et tout simplement pour notre pays. (Marques dapprobation sur les travées du groupe INDEP.)

La deuxième avancée de ce texte réside dans la simplification, d’abord pour les élus, via le maintien de la comptabilisation en espaces naturels, agricoles et forestiers, mais aussi pour les porteurs de projet. En ce qui concerne l’industrie, notamment, tous nous le disent, du patron de PMI au dirigeant de grand groupe : le manque de foncier est un problème majeur pour l’attractivité de notre pays.

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Absolument !

Mme Dominique Estrosi Sassone. Sortir l’industrie de la comptabilisation ne relève donc pas d’une lubie, c’est la réponse à un problème structurel, qui grève notre compétitivité.

Enfin, nous sommes particulièrement attentifs à ce que la politique de sobriété foncière n’affecte pas de manière disproportionnée nos territoires ruraux, qui ont souvent été vertueux en la matière par le passé.

La garantie de développement communal matérialise un « droit au projet » essentiel pour chaque commune : ses aménagements, qui rendent le dispositif plus opérationnel et permettent d’assurer sa pérennisation, sont tout à fait bienvenus, tout comme le maintien de la comptabilisation en consommation d’Enaf, qui permet de lever la contrainte sur les bâtiments agricoles, conformément à ce que nous avons décidé, cher Laurent Duplomb, dans le cadre du projet de loi d’orientation pour la souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations en agriculture.

Face à ces enjeux et à ces choix stratégiques, il nous fallait trouver une voie de passage. Je veux donc remercier tous ceux – notamment les auteurs de la proposition de loi et les rapporteurs, mais également d’autres collègues – qui ont œuvré pour trouver les compromis exigeants, entre nous et avec le Gouvernement, grâce auxquels, du fait de l’engagement de la procédure accélérée, nous pouvons envisager l’adoption définitive de ce texte avant la fin de la session.

J’y vois la confirmation qu’il est possible, dans le contexte politique que nous connaissons, sur le fondement d’une initiative et d’un travail approfondi du Sénat, de créer une majorité de projet autour d’un texte structurant pour l’avenir de notre pays.

C’est la voie de la responsabilité, celle que le groupe Les Républicains a choisie ; soyons toujours plus nombreux à suivre cette trace-là ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. Yves Bleunven. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Yves Bleunven. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voilà de nouveau rassemblés pour aborder un sujet qui n’en finit pas de cristalliser les tensions chez les élus : l’usine à gaz qu’est le ZAN.

La simplification est un thème qui me tient à cœur : simplification des normes pour nos entreprises, mais aussi simplification pour nos élus et nos concitoyens. La proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée – j’insiste sur ce dernier terme – avec les élus locaux s’inscrit totalement dans cette démarche.

Un aménagement durable plus économe en foncier est bien évidemment capital, mais nous ne devons pas pour autant altérer les dynamiques de nos territoires, que celles-ci soient liées à l’habitat ou au développement économique.

Le foncier économique est le parent pauvre du ZAN. En effet, d’un point de vue financier, la construction de logements est plus intéressante pour les communes – du reste, elles en ont besoin – et le développement d’entreprises et d’industries sur nos territoires est coûteux en foncier, surtout si l’on est contraint de choisir. Je salue donc les exceptions retenues à ce sujet par la commission à l’article 4 de la proposition de loi.

Je m’appuie également – pardonnez mon chauvinisme – sur un constat très breton : nos paysages sont amochés par de nombreuses friches de bâtiments agricoles amiantés et en ruine. Aujourd’hui, personne ne souhaite les récupérer et les renaturer. Les retraités agricoles ne peuvent financer la renaturation avec leurs petites pensions et est-ce vraiment rendre service à un jeune agriculteur que de lui transmettre un bâtiment amianté à réhabiliter ?

Devant cette situation, des élus locaux souhaitent mener, au sein de leur territoire, une expérimentation qui nous montrera, encore une fois, que l’intelligence collective peut nous permettre d’innover dans l’intérêt de tous. C’est d’ailleurs le sujet d’un amendement que j’ai déposé et qui vise à inciter à la renaturation de friches agricoles amiantées en échange de droits à construire dans les zones d’activité économique (ZAE). D’abord, cela permettra de rendre des terres renaturées aux agriculteurs ; ensuite, cela supprimera des verrues qui polluent visuellement nos paysages ; enfin, grâce à l’obtention d’un droit à construire octroyé en contrepartie, cette opération sera autofinancée, ce qui est précieux dans le contexte financier que nous connaissons.

Je souhaite étendre notre réflexion à la nécessité absolue de trouver des modèles économiques durables permettant de financer la réduction de l’artificialisation des sols tout en continuant d’investir pour nos territoires et pour notre souveraineté ; mon collègue Hervé Maurey pourrait vous en parler longuement…

Je souhaite également parler de l’attention que nous devons porter aux spécificités locales.

Prenons l’exemple de la configuration des communes bretonnes, qui sont constituées pour la plupart d’un centre-bourg et de petits hameaux, historiquement agricoles, dispersés dans la campagne alentour. À l’heure actuelle, un très grand nombre de ces hameaux ne sont pas considérés comme des secteurs déjà urbanisés, ce qui obère la possibilité de construire dans les dents creuses qui s’y trouvent. Or, vous en conviendrez, il serait bien plus logique de densifier l’existant que d’étendre les limites de l’urbanisation.

Pour ce faire, il nous faut prendre en compte les particularités de chaque territoire. Or la présente proposition de loi s’inscrit dans cette dynamique, en permettant la territorialisation des décisions plus importantes.

Pour ces raisons et pour celles qu’a évoquées mon collègue Franck Menonville, le groupe Union Centriste votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Sébastien Fagnen. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Sébastien Fagnen. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’automne dernier, trois de nos commissions permanentes étaient réunies pour adopter, dans un élan quasi œcuménique, le rapport d’information issu des travaux du groupe de suivi transpartisan sur la mise en œuvre du ZAN. Je salue d’ailleurs l’esprit de dialogue, entretenu par le président Guislain Cambier et le rapporteur Jean-Baptiste Blanc, qui a guidé les réflexions de ce groupe.

Aujourd’hui, la situation s’avère quelque peu différente et les raisons à cela ne manquent pas.

En effet, à l’aube de l’examen de cette proposition de loi dite Trace, nos sentiments oscillent entre une déception latente, des regrets face à des manques criants et une inquiétude majeure.

Une déception, disais-je, car, en dépit de l’étendue et de la richesse des auditions menées par le groupe de suivi, nous ne retrouvons pas dans cette proposition de loi l’exhaustivité des constats réalisés et surtout des préconisations émises en conclusion de nos travaux.

M. Grégory Blanc. Très juste !

M. Sébastien Fagnen. Ces préconisations ne manquent pourtant pas et elles permettraient d’embrasser toutes les facettes du ZAN, ses limites comme ses opportunités.

Ensuite, ce texte souffre d’absences criantes. Deux d’entre elles sont particulièrement dommageables.

La première concerne l’ingénierie. À l’occasion tant des auditions que d’enquêtes réalisées auprès des élus locaux, nous avons pu mesurer le besoin urgent, ressenti par les collectivités, d’outils permettant de mettre concrètement et aisément en application la sobriété foncière. Si les élus souscrivent majoritairement à cet objectif, mettre en œuvre le ZAN sans disposer d’une ingénierie digne de ce nom équivaut à gravir l’Everest muni seulement d’une paire de moufles…

Or une ingénierie digne de ce nom ne pourra voir le jour sans la massification de l’accompagnement des collectivités, notamment rurales, ce qui passera nécessairement par le renforcement des services déconcentrés de l’État dans les départements.

La deuxième absence, et ce n’est pas la moindre, concerne la fiscalité. Cette dernière, régulièrement évoquée, mais malheureusement non encore traitée à ce jour, malgré les travaux sénatoriaux de notre collègue Jean-Baptiste Blanc, constitue pourtant l’indispensable chemin vers un changement de modèle. En en faisant l’économie, nous faisons de la résorption des friches et de la rénovation du bâti vacant une course d’obstacles quasi infranchissables, alors même que cela représente un considérable gisement foncier.

Enfin, ce texte suscite une inquiétude manifeste liée à l’insécurité juridique dans laquelle se retrouvent les élus locaux, en raison de la suppression, un brin hypocrite, de l’objectif intermédiaire de réduction de moitié de la consommation des terres agricoles et naturelles.

En effet, si cette étape disparaît – c’est-à-dire si l’article 2 du texte est adopté en l’état –, l’objectif de zéro artificialisation nette d’ici à 2050 demeure. Dès lors, en l’absence de tout jalon intermédiaire et avec la suppression de l’enveloppe décennale de 125 000 hectares, comment juger du bon respect par les collectivités territoriales de la trajectoire de sobriété foncière, donc de l’atteinte finale de l’objectif du ZAN ?

En légiférant dans ce sens, nous risquons d’ouvrir une boîte de Pandore juridique, dans laquelle les conflits interprétatifs seront légion et dont les élus locaux seront assurément les premières victimes. Il s’agit là de l’une des nombreuses limites évoquées il y a quelques instants par notre collègue Christian Redon-Sarrazy.

Mes chers collègues, Edgard Pisani a écrit : « Aménager, c’est prendre conscience de l’espace français comme richesse et comme devoir. » La richesse de notre pays réside dans sa géographie à nulle autre pareille et dans des ressources naturelles incomparables. Toutefois, ses richesses portent en elles des fragilités, notamment la surconsommation foncière et l’appauvrissement des sols.

Face aux conséquences du changement climatique, notre devoir est de porter une vision durable de l’aménagement du territoire national, fondée sur la cohésion entre les villes et les campagnes, la sobriété dans l’usage des sols et l’audace d’une transition écologique ambitieuse. Hélas ! à ce stade, ce texte ne répond manifestement pas à cette ambition. Nous espérons donc que le débat qui s’ouvre ce soir permettra d’en combler les principales lacunes. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Claude Anglars. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un constat s’impose : si l’objectif de sobriété foncière suscite un consensus, la méthode retenue pour l’atteindre – le zéro artificialisation nette – pose de sérieux problèmes. Je remercie à cet égard Jean-Baptiste Blanc d’avoir rappelé les débats – ou les combats – menés depuis quatre ans sur ce terrain et je rends hommage aux auteurs de ce texte.

Le Sénat, conscient de ces difficultés, a mis en place une mission conjointe de contrôle chargée d’évaluer l’application du ZAN. En 2024, durant cinq mois, ce groupe de suivi a mené plus de soixante-dix auditions et une consultation des élus locaux. Son constat est clair : la mise en œuvre du ZAN est jugée trop rigide, trop technocratique et déconnectée des réalités locales.

Placés en première ligne, les maires éprouvent des difficultés face à l’accumulation de normes et à la rigidité des objectifs fixés sans réelle étude d’impact. Le ZAN est perçu comme une réforme technocratique imposée verticalement. Pis, certaines communes vertueuses, ayant déjà limité leur consommation foncière, se trouvent aujourd’hui pénalisées, d’où un sentiment d’injustice.

Face à ces constats, une réforme s’imposait : tel est l’objet de cette proposition de loi.

D’abord, celle-ci pérennise la mesure de l’artificialisation au travers de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers au-delà de 2031, ce qui évite un changement préjudiciable de métrique.

Ensuite, elle supprime l’objectif intermédiaire de réduction de moitié de l’artificialisation des sols d’ici à 2031, tout en maintenant celui de 2050. Toutefois, sans modification de la période de référence pour établir les objectifs de réduction, fixée à 2011-2021, l’effet de cette suppression restera limité. La réévaluation de cette base aurait été nécessaire pour mieux prendre en compte l’évolution des dynamiques territoriales.

Par ailleurs, elle reporte également les dates butoirs de mise à jour des documents d’urbanisme, offrant une respiration bienvenue. Elle prévoit en outre d’exclure les grands projets d’envergure nationale et européenne des enveloppes foncières locales, qui ne viendront plus pénaliser le développement des territoires ; nous avons entendu avec plaisir les propos tenus précédemment par M. le ministre à ce sujet.

Enfin, elle renforce la place des élus locaux du bloc communal au sein de la conférence régionale du ZAN, portant leur représentation à 75 %.

Ces ajustements sont nécessaires, mais sont-ils suffisants ?

Les débats que nous allons avoir en séance seront essentiels pour renforcer ce texte et répondre aux nombreuses critiques. Pour ma part, je crois nécessaire d’accentuer l’approche ascendante, afin de sortir de la logique descendante, en vertu de laquelle les décisions s’imposent sans véritable concertation. Pour renforcer l’acceptabilité du texte, il faudra aussi revenir sur le traitement des communes soumises au règlement national d’urbanisme (RNU), qui se trouvent dans une impasse. Nous devrons également garantir la protection des « coups partis », c’est-à-dire des projets engagés avant l’instauration du ZAN et qui sont aujourd’hui bloqués par la réglementation.

Pour assurer la prise en compte des spécificités locales, je crois également souhaitable de renforcer la représentation départementale au sein de la conférence régionale et d’éviter la mutualisation à l’échelle régionale du potentiel de développement des communes rurales, afin d’éviter son absorption par les zones urbaines.

Cela dit, l’enjeu le plus transversal reste la reconnaissance insuffisante de la diversité des territoires. Le recours à la grille de densité communale de l’Insee permettrait d’ajuster les règles aux réalités des territoires ruraux. Il ne peut y avoir une seule et même norme pour une métropole et pour un village de quelques dizaines ou quelques centaines d’habitants.

Cette différentiation peut d’ailleurs être déclinée…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Claude Anglars. … pour les communes peu denses et très peu denses à propos de la protection de la garantie communale. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Raymond Hugonet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2017, le Président de la République, Emmanuel Macron, tout à son bonheur légitime d’avoir balayé une classe politique affaiblie et rejetée, a cru pouvoir gouverner seul, secondé par quelques brillants éléments des élites de la technostructure et un bataillon de ministres redevables. (Sourires.) Tout cela n’a eu qu’un temps et le sujet qui nous occupe aujourd’hui en est la plus parfaite illustration.

En effet, la loi Climat et Résilience, promulguée le 22 août 2021, était censée marquer un tournant décisif dans la politique environnementale française. Ce texte ambitieux visait à accélérer la transition écologique du pays en s’attaquant aux principaux secteurs émetteurs de gaz à effet de serre. Des transports à l’agriculture, en passant par le logement et la consommation, rien ni personne ne pouvait échapper aux contours d’une société plus durable et résiliente face aux défis climatiques.

Et voilà que l’on nous invente une machine infernale, un sommet de planification bien de chez nous, un Gosplan à la française. Évidemment, tout cela se conçoit et s’écrit sans concertation, dans quelques cénacles autorisés, où l’on a la science infuse, puisque nous autres sénateurs sommes des ignorants rétrogrades. (Nouveaux sourires.) Évidemment, tout cela s’envisage sans aucune étude d’impact sérieuse et chiffrée, puisque nous sommes déjà entrés de plain-pied dans le « quoi qu’il en coûte ».

Pourtant, ce salmigondis de 305 articles impose, pour les années à venir, des changements profonds affectant brutalement le quotidien des Français, des entreprises et des collectivités. Au beau milieu de ce fatras, on a même introduit un objectif national de zéro artificialisation nette d’ici à 2050, avec un objectif intermédiaire de réduction de la consommation foncière d’ici à 2031.

Entendons-nous bien, si l’objectif de réduction de l’artificialisation des sols est unanimement partagé, il pose avant tout une question de modèle culturel. De quelle façon voit-on la France de demain ? Eh bien, ici, dans la chambre des territoires, que vous connaissez si bien, monsieur le ministre, nous ne voyons pas la France avec les lunettes de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, la funeste DHUP (Mêmes mouvements.), au sein du ministère de la transition écologique et solidaire. Nous ne voyons pas la France comme l’ineffable Mme Wargon, qui osait qualifier avec mépris les maisons individuelles de « non-sens écologique, économique et social ». (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Le chaos politique dans lequel nous a plongés cette démarche solitaire, aveugle et technocratique nous contraint désormais à nous rendre à l’évidence : croire que la politique peut s’improviser est une idée fondamentalement fausse. Bien sûr, il est difficile de faire avec l’« ancien monde », mais il est impossible de faire sans ! Les récents castings politiques ayant suivi la dissolution et la censure en sont le meilleur témoignage…

Cet ancien monde, Gérard Collomb – paix à son âme – en était l’une des incarnations, et vous étiez fort justement à ses côtés, monsieur le ministre, lorsqu’il s’est agi de dénoncer, par exemple, la loi sur le cumul des mandats, dont on mesure aujourd’hui les effets délétères. Souvenez-vous de ses derniers mots – presque un règlement de compte – lorsqu’il a claqué la porte : il a mis en garde publiquement contre la déconnexion à l’égard des territoires.

Aussi, monsieur le ministre, au regard de votre parcours, qui atteste merveilleusement de votre enracinement dans ces territoires de France, tempérez donc les ardeurs d’une administration devenue folle et laissez votre collègue Mme Pannier-Runacher à son « saut quantique », dont on connaît l’issue. Restez connecté avec la réalité de nos territoires, comme vous l’avez toujours été, en considérant le travail remarquable de l’ensemble de nos collègues qui n’ont pas ménagé leur peine – je pense en particulier à Jean-Baptiste Blanc et à Guislain Cambier – pour nous sortir du pétrin…

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Raymond Hugonet. … et limiter la casse, puisque c’est encore possible ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux

Avant l’article 1er

M. le président. Je suis saisi d’un amendement et d’un sous-amendement.

L’amendement n° 9 rectifié ter, présenté par Mme Romagny, MM. Pillefer, J.P. Vogel et Genet, Mmes Patru et Billon, M. Bouchet, Mmes Housseau et Devésa, MM. Somon, Maurey, J.M. Arnaud, Chevalier, Levi, Pernot, Fargeot et Khalifé, Mmes Josende, Perrot, P. Martin et F. Gerbaud, MM. Delcros, Laménie et Rochette et Mme Jacquemet, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme, il est inséré un article L. 101-… ainsi rédigé :

« Art. L. 101-… – Au sens de l’article L. 101-2-1, l’enveloppe urbaine est la délimitation des espaces urbanisés, contigus ou imperméabilisés d’une commune. Une commune peut compter plusieurs enveloppes urbaines.

« L’enveloppe urbaine est établie à 50 mètres à partir de la dernière construction ou du dernier aménagement et intègre les espaces vierges de toute construction, entourés complètement ou partiellement de bâtis.

« Ces espaces vierges sont définis par décision de l’autorité compétente pour le schéma de cohérence territoriale. »

La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny.

Mme Anne-Sophie Romagny. Plutôt que de recourir à la notion de faisceau d’indices tirée de la jurisprudence, je propose que l’on définisse clairement l’enveloppe urbaine.

Cette notion est citée dans plusieurs articles de cette proposition de loi ; elle est importante pour le calcul de l’artificialisation ; elle est une référence dans les documents d’urbanisme ; et elle permet de déterminer si l’urbanisation se fait en renouvellement urbain, en densification ou en extension urbaine.

Le présent amendement vise donc à en donner une définition générale et consensuelle. Pour cela, je me suis appuyée sur les travaux du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), je n’ai rien inventé.

Ainsi, selon cette définition, l’enveloppe urbaine pourrait être discontinue – village, hameau, zone d’activités –, contenir des dents creuses, ne pas correspondre nécessairement à la limite de la parcelle cadastrale, intégrer les surfaces imperméabilisées – parkings, places ou encore jardins publics – et son périmètre inclurait une certaine distance autour des bâtiments pour l’aménagement et la circulation. Je propose une distance de cinquante mètres, mais je suis prête à la fixer à trente ou même à vingt mètres ; l’idée est de ne pas se placer à l’aplomb du dernier mur de la commune…

M. le président. Le sous-amendement n° 184, présenté par M. Bleunven, est ainsi libellé :

Amendement n° 9, alinéa 4

Après les mots :

des espaces urbanisés

insérer les mots :

et hameaux intégrés à l’environnement

La parole est à M. Yves Bleunven.

M. Yves Bleunven. Ce sous-amendement vise à compléter la définition de l’enveloppe urbaine, afin d’y intégrer les hameaux.

La loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Élan, a marqué une avancée, en permettant l’urbanisation des secteurs déjà urbanisés, notamment pour faciliter le comblement des dents creuses. Toutefois, cette définition reste trop restrictive et exclut de nombreux territoires dans lesquels l’urbanisation s’est historiquement développée sous forme de hameaux dispersés – je l’évoquais en discussion générale, lorsque j’ai souligné la spécificité de la Bretagne à cet égard.

Dans ces territoires, les dents creuses situées au sein des hameaux constituent un foncier sous-exploité. L’incapacité des maires d’y autoriser des constructions freine le développement local, contribue à la rareté du foncier disponible et accentue la pression immobilière sur d’autres secteurs déjà saturés.

Il est donc nécessaire d’adapter les critères définissant les secteurs déjà urbanisés, en reconnaissant la spécificité des hameaux comme partie intégrante du tissu communal, afin de permettre leur densification maîtrisée et d’offrir des solutions de logement adaptées aux besoins locaux.

Cette évolution législative permettrait de résoudre des difficultés locales propres aux territoires à urbanisation diffuse, tout en garantissant une urbanisation cohérente et encadrée. À l’instar de la jurisprudence récente du Conseil d’État, qui a assoupli les critères de densité pour les secteurs déjà urbanisés, il conviendrait d’étendre cette approche aux hameaux, dès lors qu’ils disposent de voies de circulation, d’équipements et d’un raccordement aux réseaux publics.

En reconnaissant ces espaces comme éligibles à une densification progressive, on éviterait une artificialisation excessive tout en offrant aux communes un levier essentiel pour dynamiser leur territoire, favoriser l’installation de nouveaux habitants et préserver l’équilibre entre développement rural et préservation du paysage bocager.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 9 rectifié ter, nous avons inscrit dans la loi les critères qui permettent de définir un espace urbanisé en nous appuyant sur la jurisprudence. En effet, il nous avait été signalé que les élus avaient du mal à appréhender cette notion pourtant essentielle pour appréhender celle de consommation d’Enaf.

La définition de l’enveloppe urbaine correspond, de fait, à l’ensemble des espaces urbanisés en continuité, y compris les dents creuses. Cette notion paraît beaucoup moins difficile à appréhender ; du reste, les collectivités y recourent déjà.

En revanche, étendre l’enveloppe urbaine jusqu’à cinquante mètres au-delà de la dernière construction reviendrait à favoriser l’extension urbaine, alors que votre préoccupation concernant les dents creuses est satisfaite par la rédaction actuelle de l’article 1er.

Quant au sous-amendement n° 184, il a pour objet de considérer que tout hameau constitue une enveloppe urbaine. Or cela ne doit pas être automatique : selon leur configuration, notamment leur densité, certains hameaux pourront être qualifiés d’espaces urbanisés, donc former une enveloppe urbaine, et d’autres non. Il faut apprécier cette catégorisation au cas par cas.

La commission a donc émis un avis défavorable sur l’amendement n° 9 rectifié ter et sur le sous-amendement n° 184.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Je rejoins le rapporteur à cet égard.

En ce qui concerne l’amendement n° 9 rectifié ter de Mme Romagny, la volonté de reprendre les principes généraux du code de l’urbanisme, à savoir une définition très encadrée de l’enveloppe urbaine, procède de la volonté de faciliter l’appréciation par les acteurs locaux de ce qui peut être considéré ou non comme de la consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers.

Or la définition que vous proposez, madame la sénatrice, se voulant très générale, est au contraire trop rigide, puisqu’elle s’appuie sur un périmètre de cinquante mètres, identique partout. L’enjeu est au contraire de permettre une appréciation souple et adaptée – ce n’est pas vous qui me contredirez – aux spécificités locales. Ainsi, certains espaces naturels, agricoles ou forestiers situés au sein de l’enveloppe urbaine doivent être préservés comme, par exemple, les vignes situées dans les clos urbains de la ville de Reims.

Puisqu’il faut admettre qu’il est difficile et même impossible de donner une définition normative plus fine de l’enveloppe urbaine, nous faisons confiance aux élus locaux pour mettre en place des méthodes de décompte adaptées. Je considère qu’étendre partout cette enveloppe, jusqu’à cinquante mètres au-delà de la dernière construction, entraînera une consommation de très nombreux espaces urbains vierges et favorisera l’étalement urbain.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement.

Intégrer les hameaux à l’enveloppe urbaine permettrait de ne pas comptabiliser la consommation d’Enaf en leur sein. Cette proposition complexifie, à mon sens, la définition de l’enveloppe en introduisant une ancienne notion juridique de la loi relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite loi Littoral, qui a été supprimée par la loi Élan.

Par ailleurs, cet ajout ne permet pas de lever les difficultés que j’ai relevées concernant la rédaction de l’amendement.

Par conséquent, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur le sous-amendement.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour explication de vote.

Mme Anne-Sophie Romagny. Monsieur le ministre, cette définition est un préalable à nos travaux, nous n’arracherons pas d’hectares de vignes dans la Marne. (Sourires.)

Je ne veux pas que nous nous focalisions sur la distance retenue : au lieu de cinquante mètres, nous pouvons très bien en prévoir dix. L’idée est seulement de permettre la construction d’un carport ou d’une aire de retournement après la dernière construction.

J’ai suivi les travaux de MM. Cambier et Blanc, qui ont fait un travail remarquable de recherche, d’analyse et de pédagogie. Ils soulignent l’importance d’une définition de l’enveloppe urbaine, concept dont nous entendons parler depuis des décennies.

Cette absence de définition créant un vide, l’application du ZAN diverge selon les départements en fonction de l’interprétation des préfets, ce qui entraîne un problème d’équité dans les territoires.

Disposer d’une définition à laquelle se référer nous permettrait de parler de la même chose. De fait, quand la définition de l’enveloppe urbaine est à la main du préfet de département et que celui-ci l’entend différemment d’un autre, la comptabilisation par région peut révéler des iniquités territoriales au sein même de la région concernée.

L’idée est d’avoir un socle commun sur lequel nous mettre d’accord. J’y insiste, ne nous focalisons pas sur le critère des cinquante mètres, que je suis prête à modifier. Mon amendement vise essentiellement à établir une définition plaçant tout le monde sur un pied d’égalité.

M. le président. La parole est à Mme Muriel Jourda, pour explication de vote.

Mme Muriel Jourda. Je m’associe au sous-amendement de mon collègue morbihannais Yves Bleunven.

Il faut comprendre la situation telle qu’elle se présente dans nos territoires bretons et dans les territoires similaires. On y trouve beaucoup de villages…

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Comme en Auvergne.

Mme Muriel Jourda. … avec des parcelles de 500 ou de 800 mètres carrés qui ne seront jamais consacrées à l’agriculture. Or ce sont les services de l’État, et non pas les élus locaux, qui ont du mal à définir exactement ce que sont ces espaces.

Lesdits services refusent avec une grande constance de les considérer comme des parcelles constructibles, alors même que cela n’enlèverait rien à l’agriculture.

M. Bernard Pillefer. Tout à fait !

Mme Muriel Jourda. Dans certains de nos villages et de nos communes, les services de l’État, refusant l’urbanisation de ces parcelles, demandent aux maires de construire en pourtour de bourg sur des terres qui sont de bonnes terres agricoles.

Même si nous abordons assez peu cette notion, il y a de bonnes terres agricoles et de mauvaises terres agricoles. Par conséquent, alors que des réseaux existent sur des parcelles qui ne sont rien d’autre que des friches, dont personne ne s’occupera jamais, nous consommons de la bonne terre agricole ! Cette situation, à laquelle personne ne tente de remédier, est proprement inadmissible.

Aussi, pour ma part, je suivrai mon collègue.

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.

M. Michel Canévet. J’ai entendu tout à l’heure que la jurisprudence avait suffisamment défini les choses. Non ! Elle pose justement un certain nombre de problèmes que nous devons clarifier. C’est le sens de l’amendement et du sous-amendement qui viennent d’être défendus.

Pour ma part, comme Muriel Jourda, je souscris totalement au sous-amendement de notre collègue Yves Bleunven. Dans bien des territoires, en particulier littoraux, nous arrivons à des aberrations : ainsi, nous ne pouvons pas densifier les hameaux dans les zones urbanisées, au nom de l’ancienneté du concept ou de l’application du principe de précaution élaboré par la jurisprudence. Pourtant, il s’agit non pas de consommer des terres supplémentaires, mais de densifier un espace déjà urbanisé.

Monsieur le ministre, en raison de l’application particulièrement rigide des concepts par vos services, les maires ne s’en sortent pas ! Il est temps que le législateur remette du bon sens dans tout cela pour permettre aux élus de densifier ces hameaux.

Je soutiendrai donc cet amendement et ce sous-amendement.

M. le président. La parole est à M. Yves Bleunven, pour explication de vote.

M. Yves Bleunven. Je souhaiterais tout d’abord compléter les propos de mes deux collègues pour souligner une spécificité de notre territoire breton : il existe peu de régions où l’habitat est aussi diffus. Si, pour ma part, j’ai été le maire d’une commune de 5 000 habitants, 45 % de la population bretonne habite dans des villages.

Ensuite, je tiens à rappeler que chaque dent creuse représente un gaspillage foncier, puisque ces espaces ne reviendront jamais à l’agriculture. Il faut intégrer cette réalité au raisonnement.

M. le président. La parole est à M. Cédric Chevalier, pour explication de vote.

M. Cédric Chevalier. Alors que la plupart des élus locaux sont devant une situation nébuleuse, l’amendement de notre collègue, que je voterai, vise à clarifier les choses. C’est essentiel pour l’acceptation.

Même si je ne suis pas Breton, je comprends également le sens des dispositions du sous-amendement. Si nous considérons que les élus sont les mieux placés pour comprendre les réalités du terrain, il faut aller dans ce sens.

M. le président. La parole est à Mme Sonia de La Provôté, pour explication de vote.

Mme Sonia de La Provôté. Je souscris aussi à cette nécessité de définir plus précisément l’enveloppe urbaine.

Par exemple, je me pose des questions pour les communes nouvelles, parfois constituées d’une vingtaine de communes historiques et présentant une véritable discontinuité urbaine. Or la définition proposée permet précisément de prendre en compte les enjeux d’urbanisation en l’absence de continuité. Elle me paraît particulièrement adaptée à toutes les configurations urbaines de nos communes.

M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.

M. Vincent Louault. La première chose que font les communes qui élaborent un PLUi est de définir les hameaux. Ce n’est déjà pas facile : ils doivent avoir un caractère historique et figurer dans le cadastre antérieur à 1950. Il faut tenir compte de toute une série de paramètres. Et, à la fin, les services de l’État virent des décomptes 50 % de nos hameaux !

Par ailleurs, le mitage n’est jamais reconnu par les services de l’État dans les hameaux. Ils utilisent toutes les excuses possibles, de façon complètement déloyale, quitte à nier la réalité, pour retirer de nos décomptes des espaces qui, par exemple, ont été reliés à l’assainissement collectif. Voilà ce qui se passe sur le terrain quand vous élaborez un PLUi !

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Puisque l’heure est aux Bretons, j’interviens également ! (Sourires.)

Je peux vous assurer que, dans notre région, nous avons mené un travail exemplaire. Nous sommes parvenus à un équilibre grâce aux maires, qui se sont mis autour de la table en conférence des Scot et grâce au travail qui a été mené par la région dans le cadre du Sraddet. Une sorte d’harmonie s’est dégagée.

Je vais souvent à la rencontre des maires. Ils veulent que nous arrêtions de toucher à tout en changeant les règles sans arrêt. Or voilà que l’on nous propose de détricoter complètement le ZAN ! Puisqu’il faut – je l’entends – arrêter d’agir de manière descendante et que des régions se sont engagées et sont allées au bout de la démarche du ZAN, la première des choses est de respecter leur travail et de ne pas tout chambouler tous les quatre matins !

La Bretagne a un habitat diffus, il faut le reconnaître en tant que tel. Il existe aussi de nombreuses communes où nous avons vu les dégâts terribles du mitage : les réseaux, notamment les routes, coûtent très cher à entretenir.

Il faut tenir compte non seulement de cette situation, car nous avons des terres agricoles à préserver, mais aussi des finances publiques, parce que toute expansion entraîne de nouveaux coûts. Ce qui se dessine ici ne va pas dans le sens de la préservation du foncier dont il a été question dans le projet de loi d’orientation agricole.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. J’aime bien la Bretagne, mais je vous parlerai plutôt de l’Auvergne… (Sourires.) Dans ces deux territoires, les villages et hameaux se ressemblent beaucoup et sont tout aussi dispersés.

Selon nous, la proposition de loi permet de régler le problème des dents creuses. Pour autant, en permettre l’urbanisation ne donne pas autorisation d’urbaniser. C’est là qu’est la confusion.

Que ce soit en Bretagne, en Auvergne ou en Alsace, le problème est le même, car il me semble qu’il y a toujours des communes avec des villages et des hameaux… J’y insiste : cette proposition de loi ne donne pas une autorisation d’urbaniser les dents creuses.

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.

M. Laurent Somon. Je souscris aux dispositions de ces amendements.

La direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), quand vous faites un PLU ou un PLUi, vous donne une orientation : elle indique les zones à urbaniser (AU) dans chacun des villages ou des villes de votre territoire.

Puisque nous avons parlé de l’Ouest et du Centre, je vous parlerai du Nord !(Sourires.) Je pense à une commune de mon département, qui compte un village centre et un hameau, dans lesquels se trouvent des dents creuses. Or il est interdit de construire dans ces dernières,…

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Nous sommes d’accord, ne confondez pas les sujets !

M. Laurent Somon. … alors qu’une telle densification n’entraîne pas de consommation de terres agricoles. De toute façon, avec les zones de non-traitement et les autres impératifs, les zones entourant les terres agricoles deviennent presque inconstructibles.

Si nous ne voulons pas nous étendre sur les terrains en périphérie des villages, densifions les espaces qui se trouvent véritablement dans l’enveloppe urbaine.

J’ajouterai enfin que ce dernier concept ne veut rien dire. Dans les instructions données à l’occasion de demandes de permis de construire ou de documents d’urbanisme en lien avec le règlement national d’urbanisme, la DDTM de la Somme indique bien, à partir d’une cartographie, les zones AU.

Restons sur des notions qui existent officiellement plutôt que d’utiliser des termes comme « dents creuses », qui n’existent ni dans le code rural et de la pêche maritime ni dans aucun autre code, ce concept étant interprété de manière très aléatoire selon les DDTM et les départements, voire les villages.

M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet, pour explication de vote.

M. Philippe Grosvalet. L’avantage de la Loire-Atlantique, c’est que nous ne savons pas si nous sommes Bretons, ce qui me donne une grande liberté de parole. (Sourires.)

Comme l’indiquait M. le rapporteur, je ne pense pas que la situation soit spécifique à la Bretagne ou à la Loire-Atlantique. Les difficultés proviennent non pas des formes d’urbanisation dans nos campagnes, mais de la pression démographique.

Dans mon département, les hameaux ont été étouffés, comme envahis par de mauvaises herbes. Ce ne sont plus des hameaux, ce sont des zones pavillonnaires avec quelques belles pierres au milieu. C’est la démonstration qu’il faut non pas laisser faire, mais réglementer. Maîtrisons le foncier pour faire face à la fois à la démographie et à l’inflation foncière.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Cet amendement a un sens. De fait, même en territorialisant, en simplifiant et en apportant de la souplesse, le Sénat est là pour faire la loi et donc pour poser des règles, sans quoi nous pouvons tout arrêter et la loi de la jungle s’imposera.

Depuis le début, ce qui fait débat sur le ZAN, c’est que les communes qui ont anticipé les choses en adoptant une bonne trajectoire sont moins favorisées.

Autre difficulté : l’interprétation. Je ne remets pas en cause la lecture qu’en font les différents services, toute lecture est légitime et justifiable. Toutefois, si vous êtes dans une région comme Auvergne-Rhône-Alpes, par exemple, qui compte douze départements, les difficultés s’amplifient inévitablement si les interprétations divergent d’un endroit à l’autre.

Je rejoins ce que vient d’indiquer Daniel Salmon : les élus locaux ne veulent pas de changements permanents. Ils veulent un cadre pour savoir comment évoluer et pour se comparer, car nous leur demandons d’avancer collectivement pour répondre aux différents objectifs.

Cinquante mètres, vingt-cinq, trente… Ne jouons pas aux enchères : le problème de départ, c’est que nous n’avons pas de définition commune. Nous devons donc nous efforcer de tracer un chemin collectif pour notre pays.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Nous partageons le constat qui a été dressé, même si, bien évidemment, la Bretagne n’est pas la seule concernée, en particulier pour ce qui concerne les dents creuses : depuis de nombreuses années, en tant qu’élus locaux ou parlementaires, nous sommes tous confrontés à ces réalités.

Nous pouvons trouver des solutions pour accueillir les populations qui demandent à venir habiter chez nous tout en limitant la consommation foncière, qui parfois s’avère excessive. Puisqu’un certain nombre de parcelles ne retrouveront jamais une destination agricole, il faut que le bon sens l’emporte.

Pour autant, la solution juridique proposée au travers de cet amendement et de ce sous-amendement nous semble de nature à faire courir un risque de mitage. Elle pourrait être sujette à des interprétations excessives.

Pour cette raison, monsieur le ministre, nous nous tournons vers vous pour que l’État et son administration centrale envoient des consignes claires. (Mme Anne-Sophie Romagny sexclame.) En effet, à l’intérieur d’un même département, en fonction des communes, des PLU et des Scot, les décisions et jurisprudences – ce constat aussi nous remonte du terrain – ne sont pas les mêmes. Ce n’est pas possible, il faut que l’État assume sa fonction !

Pour notre part, nous souhaitons envoyer un signal en nous abstenant sur ces amendements. De cette manière, nous affirmons que nous partageons le même constat, mais que les solutions pour établir un cadre sont peut-être davantage d’ordre réglementaire. En tout état de cause, nous ne pouvons pas continuer ainsi, monsieur le ministre.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Je prends la parole en tant que Breton de Loire-Atlantique assumé… (Sourires.)

Nous avons un débat assez étrange, avant même de commencer l’examen du texte, totalement lié aux fantaisies de l’article 1er. Comme je le soulignais tout à l’heure, garder les Enaf comme base de calcul est le plus simple – ce point fait à peu près consensus. Mais les auteurs de la proposition de loi n’ont pas voulu s’en contenter : ils ont ainsi réintroduit la notion d’enveloppes urbaines – j’insiste sur le pluriel – pour un même territoire.

J’ai eu beau lire plusieurs fois l’article 1er, je me demande encore comment fonctionne le dispositif. Les auteurs de l’amendement et du sous-amendement se sont posé la même question et ont tenté de proposer une définition.

Pour ma part, je pense qu’il faut en rester à ce que beaucoup d’orateurs ont martelé lors de la discussion générale : la simplification.

Par conséquent, je vous propose très simplement de supprimer dans l’article 1er tous les alinéas faisant référence aux enveloppes urbaines, qui n’ont rien à faire là. Restons-en aux Enaf et cessons de passer du temps à définir un concept que nous n’arriverons pas, de toute manière, à définir.

Nous payons malheureusement le fait que les auteurs de la proposition de loi, avec tout le respect que je dois à leur travail, ont ajouté des notions peu définies dans l’article 1er.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Mes chers collègues, j’aimerais recentrer le débat. Je comprends tout à fait, car nous en avons nous-mêmes discuté au sein de la commission, la volonté de préciser les notions, notamment celle d’enveloppe urbaine, qui est source d’interrogations.

En premier lieu, l’état d’esprit qui préside à cette proposition de loi est celui de la simplification : nous souhaitons ne pas en rajouter et laisser plus de latitude aux élus et aux territoires. Continuons dans ce sens.

En second lieu, je vous alerte sur les effets de bord de cette définition. Connaissons-nous aujourd’hui les conséquences d’une adoption de cet amendement ? À titre personnel, je les ignore.

Un vrai travail reste à mener sur les règles d’urbanisme, mais ce n’est pas l’objet de cette proposition de loi. Une fois encore, ne nous trompons pas de débat.

Je n’entre pas dans les détails, car mon collègue a répondu sur chacun de vos points. Ne faisons pas ce que nous faisons peut-être trop souvent, à savoir voter des dispositions avant de nous rendre compte, après coup, que nous avons été un peu trop loin.

M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.

Mme Céline Brulin. Je comprends de cet amendement et de ce sous-amendement qu’il s’agit d’une tentative – j’espère que nos collègues ne prendront pas ombrage de ce terme – de définition de l’enveloppe urbaine.

L’amendement n° 9 rectifié ter tend à retenir une distance de cinquante mètres au-delà de la dernière construction, tandis que le sous-amendement n° 184 vise à tenir compte des hameaux dans le décompte de l’enveloppe. À titre personnel, je trouve la distance proposée excessive.

Pour autant, la définition nécessaire d’enveloppe urbaine ne relève pas forcément de la loi. Aussi, nous pourrions voter cet amendement pour poser un principe en attendant que le sujet soit traité de manière plus approfondie.

Définir l’enveloppe urbaine ne présage en rien de la suite à donner à la politique d’aménagement du territoire. Il s’agit simplement de partir d’une base indiscutable sur laquelle chacun des documents d’urbanisme pourra se fonder. Je trouve l’idée intéressante dans la mesure où nous pourrons, à partir de cette définition, déterminer des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre. Je ne prends pas la parole pour préciser que mon département, la Côte-d’Or, en Bourgogne-Franche-Comté, compte 700 communes et autant de hameaux. (Sourires.)

N’allons pas à cet instant refaire le code de l’urbanisme ; or il me semble que nous sommes bien partis pour en débattre… Ce n’est pas l’objet de la présente proposition de loi.

Soyons clairs : en retenant comme base de calcul la consommation d’Enaf, les dents creuses ne posent plus de problèmes. Il est toujours possible d’urbaniser.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Tout à fait !

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Exactement !

M. François Rebsamen, ministre. Par contre, si vous intégrez dans l’enveloppe urbaine cinquante mètres supplémentaires, vous permettrez l’artificialisation d’un grand nombre de territoires. Le constat me semble assez simple.

Si vous voulez refaire le code de l’urbanisme, j’ai déjà vu des propositions de loi de 120 ou 150 articles au début finir par en compter 330… Je me permets donc de vous mettre en garde.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Corbisez. Ayant présidé un Scot de 300 000 habitants, je pense qu’il ne faut pas confondre étalement urbain en forme d’étoile, c’est-à-dire bâtir après la dernière maison, et usage de dents creuses intra-muros, dans les villages, les villes ou les hameaux. Il s’agit de deux enjeux différents, auxquels les Scot peuvent déjà répondre, comme l’a souligné M. le ministre en évoquant le code de l’urbanisme.

Je déconseille fortement aux maires de faire croître leur commune ou leur hameau en étoile : d’abord, parce que les services de l’État ne valideront pas cette décision ; ensuite, parce que cela entraînerait des dépenses financières supplémentaires, par exemple en matière d’incendie ou d’éclairage public. Et ce faisant, on vient empiéter sur les terres agricoles.

Je souris un peu en pensant à une ministre, Mme Pompili, qui nous affirmait voilà quelques années qu’il fallait reverdir les dents creuses en ville. Mais le problème, c’est que l’on ne peut pas bâtir dessus dans les villages ! Il faut donc faire confiance aux élus locaux avec les PLUi et les Scot.

Pour être très clair, si la commune n’a pas d’argent, le propriétaire d’une friche agricole trouvera bien, à un moment donné – il ne faut pas se leurrer –, un constructeur privé pour faire un lotissement intra-muros. J’y insiste, laissons faire les élus locaux.

Le problème des dents creuses peut se régler, mais il ne faut pas valider des extensions en étoile dans les hameaux ou les villages, car les conséquences urbaines et financières peuvent être incalculables.

Je ne voterai pas cet amendement ni ce sous-amendement.

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 184.

(Le sous-amendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 9 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est presque minuit et demi. Avec l’accord de la commission et du Gouvernement, je vous propose d’ouvrir la nuit afin d’avancer l’examen de ce texte. Nous pourrions poursuivre nos travaux jusqu’à une heure trente.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

Article 1er

I. – Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :

1° Les neuvième à dernier alinéas de l’article L. 101-2-1 sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :

« L’artificialisation des sols est définie comme la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers. La consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers est définie comme la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés.

« La notion d’espace urbanisé s’apprécie au regard de la quantité, de la densité et de la continuité de l’urbanisation, de la structuration par des voies de circulation, des réseaux d’accès aux services publics de distribution d’eau potable, d’électricité, d’assainissement et de collecte de déchets et de la présence d’équipements ou de lieux collectifs publics et privés, ainsi que des types d’urbanisation et d’habitat locaux.

« La création ou l’extension effective d’espaces urbanisés au sein de l’enveloppe urbaine n’est pas considérée comme une consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers. N’est pas non plus considérée comme consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés en bordure de l’enveloppe urbaine, dès lors que l’espace concerné est majoritairement entouré d’espaces bâtis ou que son sol est imperméabilisé. Une commune peut comporter plusieurs enveloppes urbaines.

« La création ou l’extension effective d’espaces urbanisés s’apprécie à l’échelle de la parcelle cadastrale.

« La renaturation, ou désartificialisation, est définie comme la transformation effective d’espaces urbanisés ou construits en espaces naturels, agricoles et forestiers. » ;

2° Au dernier alinéa de l’article L. 123-1, après le mot : « sols », sont insérés les mots : « , au sens de l’article L. 101-2-1, » ;

2° bis (nouveau) Après le 2° de l’article L. 132-2, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° Le bilan détaillé et chiffré de leur consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers au cours des dix années précédant l’entrée en vigueur de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. » ;

3° Au 6° de l’article L. 141-8, les mots : « la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers ou » sont supprimés.

II. – La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets est ainsi modifiée :

1° L’article 191 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Au sens du présent chapitre III, l’artificialisation et la renaturation s’entendent telles que définies à l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme. » ;

2° L’article 194 est ainsi modifié :

a) Au début du 5° du III, la phrase et les mots : « Au sens du présent article, la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers est entendue comme la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés sur le territoire concerné. Sur ce même territoire » sont remplacés par les mots : « Dans le périmètre couvert par un document d’urbanisme » ;

b) Au III quater, les mots : « ou la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers » sont supprimés ;

c) Le IV est ainsi modifié :

– à la fin du premier alinéa, les mots : « et de réduction de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers » sont supprimés ;

– au troisième alinéa du 14°, les mots : « , au sens du 5° du III, » sont supprimés ;

3° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article 207, les mots : « l’artificialisation des sols » sont remplacés par les mots : « la consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers observée ».

III. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa de l’article L. 1111-9-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Au sens du présent article, l’artificialisation s’entend telle que définie à l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme. » ;

2° Au début du chapitre unique du titre III du livre II de la deuxième partie, il est ajouté un article L. 2231-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 2231-1 A. – Au sens du présent titre, l’artificialisation s’entend telle que définie à l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme. » ;

3° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 4251-1, après le mot : « sols », sont insérés les mots : « , au sens de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme » ;

4° (Supprimé)

5° La première phrase du troisième alinéa de l’article L. 4433-7 est complétée par les mots : « , au sens de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme ».

IV. – Au f du 2° du II de l’article L. 122-3 du code de l’environnement, les mots : « et la consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers » sont remplacés par les mots : « , au sens de l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme, ».

M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, sur l’article.

M. Yannick Jadot. Imaginons que, la semaine prochaine, le Gouvernement arrive avec un projet de loi de finances rectificative qu’il présenterait ainsi : « J’ai bien compris l’enjeu du budget. Je vous promets que, d’ici à vingt-cinq ans, nous serons à l’équilibre budgétaire. Pour ce faire, nous supprimerons évidemment l’objectif intermédiaire des 3 % de déficit, car il est contraignant et ne relève pas de la simplification. Nous ferons confiance aux ministères : chacun prendra en main son budget. Nous savons qu’ils seront responsables. Tous les ministères, se gérant seuls, feront preuve de responsabilité budgétaire sur la base du volontariat. À la fin, en décomptant l’ensemble des budgets, nous parviendrons à notre objectif, toutes et tous ensemble. »

Vous seriez les premiers à hurler à l’irresponsabilité !

Qu’est-ce qu’une politique se fixant un objectif à vingt-cinq ans sans objectif intermédiaire ? C’est le vide absolu ! D’ailleurs, il est assez amusant de constater que tout le monde ici évoque un consensus absolu sur la sobriété et sur le zéro artificialisation nette à horizon de 2050… S’il y a bel et bien consensus absolu, c’est que cet objectif ne veut plus rien dire ! Dans le cas contraire, nous ne serions pas d’accord entre nous et nous négocierions !

Vous cherchez en fait à abroger ce dispositif et à revenir à la situation antérieure à 2021, à savoir tenir compte des enjeux de sobriété foncière sans disposer d’aucune enveloppe, ni d’aucun objectif sérieux, ni d’aucun mécanisme de mutualisation et de sanction. Au regard de l’importance de ce sujet pour nos concitoyens et pour nos territoires, qui sont de plus en plus affectés par les inondations, notre responsabilité est justement de fixer un objectif intermédiaire sérieux !

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, sur l’article.

M. Laurent Duplomb. Pour répondre à M. Dantec, je dirai deux choses.

Le ZAN, du point de vue de la protection des terres agricoles, est un leurre ; il va même devenir, au fil du temps, un danger. Si aujourd’hui, sur cette question, vous comptez parmi vos alliés les Jeunes Agriculteurs, c’est tout simplement parce que nombre d’entre eux ne l’ont pas compris. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes GEST et SER.)

Je m’explique, comme je me suis expliqué avec le président des JA, que, du reste, vous n’avez pas nommé. Que m’a-t-il dit ? « Maintenant que tu m’expliques, je comprends ! » (Oh ! sur les travées du groupe GEST.)

Que va-t-il se passer ?

Lorsqu’on aura poussé jusqu’au bout la logique du zéro artificialisation nette, pour qu’un agriculteur puisse continuer d’agrandir son ou ses bâtiments, il faudra qu’il apporte la preuve qu’il a déconstruit. Autrement dit, il faudra qu’il ait déconstruit pour pouvoir reconstruire.

M. Christian Redon-Sarrazy. Oh non ! Vous n’allez pas nous refaire le coup !

M. Ronan Dantec. Ce n’est pas ça, le ZAN !

M. Laurent Duplomb. Vos agriculteurs ne construisent peut-être pas de bâtiments, mais ceux que je défends, moi – les vrais agriculteurs –, en construisent !

Je vous pose la question à vous, qui êtes les défenseurs du revenu des agriculteurs :…

M. Laurent Duplomb. … si, pour pouvoir construire un bâtiment, ils sont obligés de déconstruire un autre bâtiment, pensez-vous qu’ils y arriveront financièrement ? Non !

C’est pourquoi, dans le projet de loi d’orientation agricole, nous avons exclu les constructions agricoles du décompte des terres artificialisées.

M. Ronan Dantec. Alors il n’y a pas de problème !

M. Laurent Duplomb. Les autres problèmes liés au zéro artificialisation nette, en revanche, restent à traiter.

C’est pourquoi je suis d’accord avec M. Jadot : j’étais pour l’abrogation !

M. Yannick Jadot. Voilà, c’est clair !

M. Laurent Duplomb. Pourquoi ?

À partir du moment où vous allez obliger à déconstruire pour reconstruire, quel que soit le type de construction, et sans aucune règle protégeant les territoires ruraux par rapport aux territoires urbains, les premiers visés par cette obligation de déconstruire des bâtiments pour engranger un droit à construire seront les agriculteurs ! On les paiera pour qu’ils déconstruisent des bâtiments et le droit à construire ainsi obtenu sera exporté dans les villes ! Cela s’appelle un « ruralicide » !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez, sur l’article.

M. Jean-Pierre Corbisez. Monsieur le ministre, il est question de « clarifier », mais on voit bien que les choses commencent à coincer dès l’article 1er.

Le sujet est celui de la consommation des espaces ; mais de quel usage parlons-nous ?

S’il s’agit d’urbanisation, il faut compenser : pas de débat.

Pour ce qui est du développement industriel, je peux comprendre la proposition du Gouvernement de créer une réserve nationale de 10 000 hectares supplémentaires dédiée à cet usage ; j’y reviendrai lorsqu’elle nous sera présentée.

En revanche, en matière de développement artisanal, je me pose des questions qui concernent les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ruraux : comment vont-ils faire s’ils veulent aménager des zones artisanales et permettre à des artisans de s’agrandir ? Essaieront-ils de récupérer les enveloppes foncières de 1 hectare attribuées à chaque commune au titre de la garantie de développement communal, dont l’article 6 organise la mutualisation ?

Je souhaite bon courage au président d’EPCI qui tentera d’explorer cette voie ! Cela devrait lui prendre quelques années, à moins de compenser par ailleurs. Il pourra toujours aller plaider sa cause devant la conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l’artificialisation des sols…

Je reviens sur le volet développement industriel : monsieur le ministre, vous avez lancé il y a quelques semaines ce projet de réserve de 10 000 hectares. Je veux mettre en regard ce projet avec le fameux forfait national de 12 500 hectares dédié aux Pene, les projets d’envergure nationale ou européenne, dont la liste a été publiée l’année dernière en annexe d’un arrêté signé par M. Béchu.

Il y a de bonnes choses dans cet arrêté : y figurent, outre les zones industrielles importantes, les zones d’aménagement concerté (ZAC) destinées à l’habitat, qui avaient été créées en 2010-2015, et même jusqu’en 2018. C’est bien normal : on parle ici d’opérations qui seront achevées dans deux ou trois ans et pour lesquelles, à défaut d’inscription parmi les Pene, on demanderait aux aménageurs concernés de compenser les quelques derniers hectares qui vont être urbanisés d’ici à la fin des travaux. Ces opérations ont été reconnues d’intérêt national, et c’est tant mieux.

Mais dans cet arrêté, monsieur le ministre, sont également recensés, sur huit pages, des projets en cours, y compris industriels : faute de permis de construire et faute de décrets d’application, en la matière, on ne sait rien.

Allez-vous inclure ces projets supplémentaires validés l’année dernière dans l’enveloppe de 10 000 hectares que vous nous demandez de voter ? Ou sont-ils décomptés dans ce qui reste des 12 500 hectares des Pene ?

M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, sur l’article.

M. Grégory Blanc. À titre personnel, je ne doute en aucune manière de l’engagement de mon homonyme Jean-Baptiste Blanc et de Guislain Cambier : je suis convaincu que leur volonté est bel et bien que nous trouvions les moyens d’atterrir sur un zéro artificialisation nette à l’horizon de 2050.

En revanche, je ne comprends absolument pas leur proposition de loi. Cela a été dit tout à l’heure, et nous nous devons d’y insister : la mission d’information qui a été lancée sur le financement du ZAN n’a toujours pas rendu les conclusions qu’elle devait remettre. Un groupe de suivi a également été créé ; celui-ci a rendu un rapport d’information dans lequel il pointe une difficulté qui a été évoquée et sur laquelle chacun s’accorde de manière presque œcuménique, à savoir la défaillance de l’État dans ce dossier. Sont en cause notamment les modalités de publication – ou de non-publication – des décrets d’application, l’accompagnement des communes et la façon dont on outille nos territoires. Oui, en effet, changer de modèle nécessite aussi de modifier nos outils ! Or, de ce point de vue, on constate une défaillance.

Avec cette proposition de loi, corrige-t-on ce problème-là ? Non ! Elle n’aboutit, abstraction faite des articles 1er et 6, qu’à assouplir et à revoir les objectifs à la baisse. Le véritable enjeu consiste à pousser pour que l’État nous donne les moyens d’atterrir sur ce dossier du zéro artificialisation nette à l’horizon de 2050.

Je le redis, je ne comprends pas ce texte : il va à rebours des objectifs qui nous rassemblaient tous, du moins je le croyais.

L’article 1er et l’article 6 apportent un certain nombre de réponses aux questions posées. Tous les autres sont à rebours de l’histoire. Je regrette qu’entre les paroles et les actes, entre les objectifs affichés par nos collègues qui ont déposé cette proposition de loi et le contenu du texte même, il y ait un tel écart, une telle distorsion.

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, sur l’article.

M. Jean-Baptiste Blanc. Je vais répondre à mon homonyme Grégory Blanc, que je remercie d’avoir bien voulu recentrer le débat : le sujet se pose dans les termes qu’il a exposés.

Je veux bien répondre aussi à Yannick Jadot, mais c’est l’article 2 qu’il a évoqué ; or nous en sommes à l’article 1er

Mes chers collègues, j’ai beaucoup d’arguments précis, techniques à vous apporter sur la question que vous soulevez, qui est centrale, à savoir celle de la suppression du jalon d’une diminution de 50 % de l’artificialisation à l’horizon de 2031.

Ce qui nous anime, dans cette discussion, c’est la volonté de planifier l’évolution de la consommation d’espaces : nous sommes de ceux qui pensent que, pour y parvenir, il faut contractualiser.

Je remercie Grégory Blanc d’avoir rappelé quelle est notre intention : faire en sorte que l’objectif de réduction de l’artificialisation soit mis en œuvre par contractualisation, étant entendu que cela suppose d’écrire ensemble les contrats – telle est la suite logique de la discussion que nous aurons tous ensemble, avec les rapporteurs et le ministre. Or il n’est pas de contrat qui vaille sans rendez-vous et sans financement.

Nous menons en effet, Hervé Maurey et moi-même, au nom de la commission des finances, une mission d’information sur le financement du ZAN. Et, sur l’initiative du ministre Rebsamen, Matignon a accepté de nous aider à chiffrer les propositions que nous élaborons dans ce cadre – vous le savez parfaitement, mes chers collègues.

Une discussion est ouverte quant à savoir s’il eût fallu des dispositions financières dès le présent texte. Mais tel n’est pas le parti que nous avons pris : nous avons fait le choix d’un texte court, préférant procéder en plusieurs étapes. Réussissons la loi Trace ; ensuite nous parlerons de financement. Il y aura sans doute une proposition de loi sur le financement du ZAN assortie, peut-être, d’amendements budgétaires en projet de loi de finances.

Concomitamment, nous allons muscler les outils – je pense aux établissements publics fonciers (EPF). Mais je ne veux pas devancer tous les débats qui doivent avoir lieu dans l’hémicycle.

Voilà les termes du problème. Le financement va suivre. Nous en sommes au chiffrage de nos propositions. Matignon vient d’accepter que Bercy nous aide : nous allons donc reprendre nos travaux, affiner notre rapport et faire des propositions de financement du ZAN, c’est-à-dire de tout ce dont le ZAN est le nom : reconquête des friches, fabrique de la ville dense, renaturation, etc.

Je répondrai à M. Jadot lorsque nous examinerons l’article 2.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. La proposition de loi de nos collègues Guislain Cambier et Jean-Baptiste Blanc ne tombe pas du ciel : elle ne leur est pas venue d’un seul coup.

Depuis quatre ans, j’ai assisté avec eux aux auditions que nous avons menées sur le ZAN : nous avons entendu tout le monde ! Je dis bien : « tout le monde ». Sur la base de ces auditions, ils ont préparé cette proposition de loi visant à tracer un chemin, à instaurer une trajectoire, vers l’objectif de 0 % en 2050. Tout le monde est d’accord sur cet objectif ! (MM. Grégory Blanc et Ronan Dantec hochent la tête en signe de dénégation.)

Si, mes chers collègues ! J’ai assisté aux auditions, vous n’y étiez pas : je peux vous le dire, tout le monde a été d’accord sur cet objectif.

Mais que nous disent les élus sur le terrain ? Vous en avez vu, monsieur Jadot, des élus, sur le terrain ? Vous êtes allés voir des maires pour parler du ZAN ?

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Tous les élus de cette assemblée ont eu des échanges avec des maires à propos du ZAN. Ces maires sont-ils contents ? Non !

M. Yannick Jadot. Beaucoup ont fait le boulot !

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Ils ne sont pas contents !

Sur la base de toutes les auditions qui ont été organisées et de toutes les remarques qui y ont été faites, cette proposition de loi a été préparée et des dispositions vous sont soumises, mes chers collègues. S’il faut recommencer, nous le ferons. Mais je doute que nous ayons à examiner un énième texte sur le ZAN, ce serait ridicule !

M. Ronan Dantec. C’est pourtant ce que vient d’annoncer Jean-Baptiste Blanc…

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Aujourd’hui, des élus, sur le terrain, sont dans l’attente. C’est vrai, ils n’habitent pas dans le XVIe arrondissement de Paris : ils sont sur le terrain et ils gèrent, tous les jours, les problèmes d’urbanisme et les demandes de leurs concitoyens.

À leurs administrés qui les sollicitent en leur expliquant qu’ils avaient gardé un bout de terrain à construire pour leur fils ou leur petit-fils, répondront-ils : « Terminé ! Ce terrain n’est plus constructible » ? Vous irez leur expliquer !

Mme Ghislaine Senée. Celui qui porte un PLU doit l’assumer, c’est ainsi !

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, sur l’article.

M. Laurent Somon. J’aimerais que l’on ne caricature pas ce débat en comparant des choux et des carottes ou des pommes de terre. Monsieur Jadot, comparer les discussions budgétaires que nous pouvons avoir en PLF sur la réduction des déficits avec les échanges auxquels donne lieu le ZAN, franchement, ce n’est pas très sérieux !

Vous dites, monsieur Jadot, qu’il faut absolument un jalon intermédiaire.

M. Yannick Jadot. Eh oui !

M. Laurent Somon. Mais il n’en faut pas forcément.

M. Yannick Jadot. Ah bon ?

M. Laurent Somon. Vous oubliez une chose : c’est l’esprit de responsabilité dont font preuve, dans les territoires, les élus en général, qui consomment de moins en moins. En la matière, il y a une véritable prise de conscience.

La preuve en chiffres – je n’invente rien, ce n’est pas une vue de l’esprit : entre 2011 et 2022, selon le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), 31 000 hectares avaient été consommés en 2011, contre 20 000 hectares artificialisés en 2022, l’année suivant l’entrée en vigueur de la loi Climat et Résilience. La réduction de la consommation et la prise de conscience sont bel et bien là !

MM. Ronan Dantec et Yannick Jadot. Ça ne baisse plus ! Ces chiffres sont faux !

M. Laurent Somon. Laissez-moi terminer et laissez vos collègues s’exprimer ! Nous vous avons écoutés ; nous ne vociférons pas à chaque fois que vous parlez !

Vous voulez absolument imposer la réduction de l’artificialisation, dans les territoires, par la réglementation et par la contrainte ; nous arrivons au même résultat en optant pour la confiance et, comme l’a dit Jean-Baptiste Blanc, pour la contractualisation : il faut que les choses remontent des territoires, que des discussions aient lieu à chaque étape avec les services de l’État et qu’ainsi nous trouvions un chemin qui nous conduise aux objectifs fixés non pas en 2030, échéance extrêmement proche, mais en 2050.

Voici ce que nous disons aux élus locaux : il faut absolument arriver à consommer zéro en 2050, débrouillez-vous, par la révision régulière des contrats, pour trouver le chemin !

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, sur l’article.

M. Ronan Dantec. Je vais tâcher, tout de même, d’objectiver le débat.

Depuis le milieu des années 2010, le rythme de l’artificialisation ne baisse plus : on est toujours entre 20 000 et 24 000 hectares consommés chaque année. La loi ZAN n’est pas venue de rien : la consommation des espaces ne baisse pas. La main sur le cœur, les élus disent faire de la sobriété, mais les contraintes sont telles, sur l’ensemble du territoire, qu’au bout du compte on retrouve toujours, chaque année depuis bientôt dix ans, ce chiffre de 20 000 ou 25 000 hectares consommés.

Voilà les données chiffrées ! Il ne faut pas prendre 2011 comme année de référence : c’est depuis le milieu des années 2010 que ce chiffre ne bouge plus.

M. Laurent Somon. Ça a baissé en dix ans !

M. Ronan Dantec. Il faut débattre sur des bases objectives.

Laurent Duplomb a suggéré qu’il avait réussi à convaincre, difficilement, les Jeunes Agriculteurs, mais il n’a pas réussi à convaincre Arnaud Rousseau, qui construit de gros bâtiments ! Et cela n’a pas l’air de le gêner beaucoup d’écrire à la droite sénatoriale qu’elle fait une connerie ! C’est ce qu’a écrit Arnaud Rousseau ! Et je vous épargne le récit de l’audition que nous avons faite, pour notre part, de la Fédération nationale des Safer, les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, qui est tenue elle aussi par des adhérents de la FNSEA. C’était du vitriol condensé contre votre loi ZAN !

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Nous avons auditionné la FNSEA !

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Et ce n’est pas ce qu’elle dit !

M. Ronan Dantec. Voilà le message envoyé par le monde agricole, que vous êtes censés défendre ! Voilà la réalité du débat !

Nous ne connaîtrions pas les élus locaux, dites-vous – une fois de plus, vous nous faites le coup ! La semaine dernière, j’ai rencontré les élus de l’intercommunalité du Pays de Redon, territoire touché par les inondations du mois de janvier. Ils jouent le jeu du ZAN, qu’ils mettent en œuvre via le PLUi : ce faisant, ils se « pouillent », ici et là, pour 2 000 ou 3 000 mètres carrés. Et que nous disent-ils tous ? Je les cite : « Vous n’allez quand même pas revenir en arrière sur le ZAN et sur l’objectif intermédiaire de réduction de l’artificialisation ! »

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Nous ne revenons pas en arrière !

M. Ronan Dantec. Voilà ce qu’ils nous disent, et ce même s’ils ont un débat entre eux, entre maires, sur la répartition de l’effort.

Norbert Samama, par exemple, maire du Pouliguen, qui, vu le prix du mètre carré dans sa commune, n’est pas un maire LFI (Sourires.), est intervenu publiquement plusieurs fois pour tenir les propos que je viens de citer : « Vous n’allez quand même pas revenir en arrière sur le ZAN ! »

Le législateur ne peut pas travailler de manière sérieuse en revenant en arrière et en détricotant une fois sur deux l’ouvrage qu’il vient de construire. Voilà ce que nous disent aujourd’hui, sur le territoire, les maires de droite. Ce n’est pas du tout ce que vous dites ! Ils ont intégré le ZAN. Quelques difficultés demeurent, et la proposition de loi ZAN 3 aurait pu contribuer à les régler, mais telle n’est pas du tout la voie que nous empruntons, pour des raisons purement dogmatiques !

M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, sur l’article.

M. Guislain Cambier. Mes chers collègues, en ouverture de ce débat, lors de la discussion générale, chacun a pu s’exprimer et dire tout ce qu’il pensait. Cela étant posé, il ne faut pas jouer le match après le match : nous sommes là, tout simplement, pour réussir à livrer ensemble un texte pragmatique et utile aux élus locaux, quelle que soit leur volonté et quel que soit le rythme auquel ils artificialisent ou, au contraire, limitent l’artificialisation.

Nous sommes là aussi pour faire en sorte que les besoins des habitants soient satisfaits sur la base de documents d’urbanisme clairs, tenant la route sur le long terme.

En attendant, les propos que nous entendons depuis quelques minutes sont parfois caricaturaux ;…

M. François Rebsamen, ministre. C’est vrai…

M. Guislain Cambier. … des chiffres sont cités que nos collègues qui les brandissent sont les seuls à pouvoir vérifier… Or nous sommes en train d’examiner l’article 1er, qui a trait à la mesure de l’artificialisation par le décompte de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers. La question est la suivante : sommes-nous d’accord pour pérenniser ce compteur ? C’est tout !

Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Cédric Chevalier, sur l’article.

M. Cédric Chevalier. Pour participer en ce moment même à la révision du Scot et à l’élaboration du PLUi-H (plan local d’urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l’habitat) d’une communauté urbaine qui compte 143 communes, dont la plupart ont moins de 100 habitants, je peux vous dire que la majorité des maires ont déjà pris en compte la notion de non-consommation foncière.

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Exactement !

M. Cédric Chevalier. Elle a été consacrée il y a bien longtemps, au moment où l’on a « grenellisé » les PLU. Le principe d’une réduction de la consommation foncière ne date donc pas d’hier et s’est progressivement imposé.

Pour ce que j’en perçois, le problème auquel sont confrontés les maires, aujourd’hui, c’est plutôt celui du flou artistique qui entoure les règles. Ils ne sont pas rassurés. Certains nous disent qu’ils ne consommeront pas d’espaces ; d’autres, qui souhaitent au contraire en consommer, se demandent comment faire. On est dans le flou artistique.

Des exemples ont été donnés tout à l’heure à propos de terrains à bâtir. On rencontre tous les jours de tels cas, qui nous obligent à expliquer aux maires ce qu’ils peuvent et ce qu’ils ne peuvent pas faire.

Les élus locaux veulent que des règles précises soient édictées et que les décisions dont ils assument la responsabilité devant le conseil municipal soient sécurisées. C’est tout !

Nous demandons, à cet égard, que soient clarifiés un certain nombre d’articles et de dispositifs, car, précisément – pardonnez-moi, mes chers collègues –, le texte qui nous est soumis n’est pas toujours clair.

Faisons œuvre de clarté : alors, les élus locaux pourront prendre leurs responsabilités, faire avancer leurs projets et mettre en application les objectifs que nous fixons en matière de consommation foncière. Rien de plus simple…

M. le président. Je suis saisi de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 11, présenté par M. Pla, est ainsi libellé :

Alinéas 2 à 7

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

1° Les neuvième et dixième alinéas de l’article L. 101-2-1 sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :

« L’artificialisation est définie comme la transformation d’un sol à caractère agricole, naturel ou forestier par des actions d’aménagement, pouvant entraîner l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage et son imperméabilisation totale ou partielle.

« La renaturation, ou désartificialisation, consiste en des actions ou des opérations de restauration ou d’amélioration de la fonctionnalité d’un sol, comme la transformation effective d’espaces urbanisés ou construits en espaces naturels, agricoles et forestiers, aux fins de réduction de la fragmentation et de la vulnérabilité des habitats naturels et habitats d’espèces et de prise en compte leur déplacement dans le contexte du changement climatique, et, d’amélioration de la qualité et la diversité des paysages et productions agricoles. Elle conduit à identifier, préserver et relier les espaces importants pour la préservation de la biodiversité par des corridors écologiques définis à l’article L. 371-1 du code de l’environnement. » ;

La parole est à M. Sebastien Pla.

M. Sebastien Pla. Par cet amendement, je souhaite rétablir la définition de l’artificialisation posée à l’article 192 de la loi Climat et Résilience, en précisant qu’un sol a différentes fonctions – biologiques, hydriques et climatiques – ainsi qu’un éventuel potentiel agronomique.

L’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction actuelle, dispose que la lutte contre l’artificialisation des sols « résulte de l’équilibre » entre la nécessaire sobriété foncière et le tout aussi nécessaire renouvellement urbain.

S’interroger sur l’artificialisation des sols, c’est donc bien s’interroger sur l’équilibre à tenir entre la poursuite du projet urbain, la recherche de la sobriété foncière et la capacité à préserver les paysages, les habitats naturels et les fonctions productives des sols.

Réduire l’artificialisation des sols à la seule consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers conduirait ainsi à méconnaître les dynamiques urbaines et de résidentialisation.

L’article L. 371-1 du code de l’environnement précise d’ailleurs que les trames verte et bleue « ont pour objectif d’enrayer la perte de biodiversité en participant à la préservation, à la gestion et à la remise en bon état des milieux nécessaires aux continuités écologiques, tout en prenant en compte les activités humaines, et notamment agricoles, en milieu rural ».

Ces corridors de conservation contribuent de manière significative à la résilience des paysages en favorisant la croissance de la végétation, la biodiversité et la présence les pollinisateurs naturels, qui profitent aussi à l’agriculture.

À mesure que ces corridors s’étendent, ils deviennent de puissants puits de carbone, contribuant à atténuer les effets du changement climatique.

Tel devrait être l’objectif, afin de ne pas faire de la désartificialisation des sols un totem, mais bien d’encourager la renaturation, lorsque cela est possible, en optimisant la recherche de corridors écologiques.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 72 est présenté par MM. Dantec, Jadot et G. Blanc, Mme Senée, M. Benarroche, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel.

L’amendement n° 174 est présenté par M. Uzenat, Mmes S. Robert et Bonnefoy, M. M. Weber, Mme Briquet, MM. Raynal, Fagnen et Redon-Sarrazy, Mme Espagnac, M. Kanner, Mme Artigalas, M. Bouad, Mme Canalès, MM. Cardon, Chaillou, Cozic, Devinaz, Gillé et P. Joly, Mme Le Houerou, MM. Mérillou, Michau, Montaugé, Omar Oili, Ouizille et Pla, Mme Poumirol, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 4 à 6

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 72.

M. Ronan Dantec. Il y a ce que les auteurs et rapporteurs de la proposition de loi nous en disent et il y a ce qui est écrit. Or, ligne par ligne, ce qui est écrit signifie l’inverse de ce que disent nos collègues auteurs et rapporteurs.

Il faut simplifier ? Soit. On utilise donc la notion de consommation d’Enaf pour mesurer l’artificialisation. Je soutiens depuis longtemps cette mesure : je l’avais défendue au moment de l’examen de la proposition de loi ZAN 2.

Mais on a l’impression que les auteurs de la présente proposition de loi sont en définitive un peu épouvantés par la mesure qu’ils proposent eux-mêmes, en guise de simplification, à l’article 1er. Ils y ajoutent donc des alinéas, qui sont de surcroît assez étonnants. Avez-vous lu l’alinéa 5, mes chers collègues ? J’en rappelle les termes : « N’est […] plus considérée comme consommation d’Enaf la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés en bordure de l’enveloppe urbaine. »

Nous avons eu un débat sur la notion d’enveloppe urbaine, dont on ne sait pas très bien ce qu’elle veut dire. Mais, au surplus, on retire de la comptabilisation « Enaf » les espaces situés en bordure de cette enveloppe urbaine, qui reste par ailleurs non définie. Et, comme si cela ne suffisait pas, il est prévu – c’est la dernière phrase du même alinéa – qu’« une commune peut comporter plusieurs enveloppes urbaines ».

À ce stade, les choses deviennent carrément psychédéliques !

Comment pouvez-vous prétendre que vous faites une loi de simplification avec de tels alinéas, qui mènent tout droit, par quelque bout qu’on les prenne, au contentieux ?

Que vont se dire les maires ? S’ils veulent se soustraire à la comptabilisation Enaf, ils privilégieront les espaces situés « en bordure de l’enveloppe urbaine ». Aussi demanderont-ils à la direction départementale des territoires et de la mer et à l’État ce qu’est la définition de l’enveloppe urbaine. Et le législateur n’ayant pas défini cette notion, ils entreront, ce faisant, dans un gouffre d’incertitudes…

Voilà la réalité du texte que vous nous proposez, mes chers collègues ! Il s’agit bien, nous le savons tous, d’une loi de pur détricotage de l’idée même de ZAN. C’est clair et vous feriez mieux de l’assumer.

En tout état de cause, vous ne pouvez pas dire, la main sur le cœur, que vous voulez simplifier le dispositif pour les maires tout en écrivant cet alinéa 5, que je propose donc de supprimer, de même que les alinéas 4 et 6, qui lui sont connexes.

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour présenter l’amendement n° 174.

M. Simon Uzenat. Cet amendement est identique à celui qui vient d’être présenté : il s’agit de supprimer les alinéas 4 à 6 de l’article 1er, qui définissent la notion d’espace urbanisé. Nous avons bien vu, lors du débat sur l’amendement portant article additionnel avant l’article 1er, qu’en la matière régnait le flou intégral.

Nous pourrons bien chausser les lunettes de vue les plus correctrices, jamais nos efforts ne suffiront à rendre nette cette notion.

J’entends les auteurs et défenseurs de cette proposition de loi nous expliquer que leur objectif est de simplifier et de clarifier, mais c’est bien tout l’inverse qui ressort. Moi aussi, comme vous, j’ai rencontré beaucoup d’élus. Ce qu’ils attendent, c’est de la clarté et de la sécurité juridique. Or c’est tout l’inverse que nous produisons, j’y insiste, avec ces trois alinéas comme avec bien d’autres dispositions de ce texte. Au-delà même de l’insécurité juridique, des coûts supplémentaires seraient ainsi engendrés pour les collectivités, pour les élus.

Or ces derniers nous ont adjurés – c’est particulièrement vrai en Bretagne, où le travail a été très largement engagé –…

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Ah, les Bretons… (Sourires.)

M. Simon Uzenat. … de ne pas les conduire à défaire ce qu’ils ont fait : des dizaines, sinon des centaines de milliers d’euros mobilisés, un travail de fond accompli, des engagements pris, une dynamique créée… En l’espèce, le travail du Sénat va à l’encontre de ce que les élus appellent de leurs vœux – et je parle d’élus qui ne sont pas nécessairement de notre sensibilité.

Soyons clairs, soyons simples, soyons efficaces. Cela passe, à l’article 1er, par la suppression de ces trois alinéas.

M. le président. L’amendement n° 136 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 4 à 6

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« La notion d’espace urbanisé s’apprécie à l’aide d’un faisceau d’indices, au regard des caractéristiques du territoire, telles que le type d’urbanisation, sa continuité, la quantité et la densité des constructions, la structuration par des voies de circulation ou des réseaux, la présence d’équipements.

La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre. Tâchant de répondre aux questions soulevées, je propose, par cet amendement, d’inscrire parmi les principes généraux du code de l’urbanisme une définition juridique souple, mais sécurisante, des espaces urbanisés.

La jurisprudence donne une idée à la fois précise et souple de cette notion. Toutefois, au vu de nos échanges et eu égard aux travaux de la commission, j’ai compris tout l’intérêt qu’il y avait à la consolider. Il est essentiel – je l’ai dit tout à l’heure – d’en fonder la définition sur un faisceau d’indices, afin d’en permettre l’appréciation à une échelle très fine. Ainsi offrons-nous aux collectivités – c’est ce que vous souhaitez, mesdames, messieurs les sénateurs – une souplesse d’appropriation et, j’y insiste, une définition juridiquement sécurisante.

En effet, la mesure des espaces urbanisés se fait dans la maille de la subdivision fiscale, qui est plus petite, je le précise, que celle de la parcelle cadastrale. Or, bien que j’en comprenne l’intention, l’écriture proposée par la commission pose plusieurs difficultés.

La définition retenue à ce stade est trop rigide et trop proche de celle d’une autre notion, celle de « secteurs déjà urbanisés », propre à la loi Littoral et qui s’applique à une échelle plus large. Il est évidemment préférable de densifier au sein de l’enveloppe urbaine et d’éviter l’étalement urbain, tout le monde en convient. Mais cela ne veut pas dire qu’une telle densification se fera sans poser de conditions sur la nature des dents creuses, qui s’apprécie au cas par cas.

Par ailleurs, je ne peux soutenir la disparition complète de la notion d’artificialisation fondée sur les fonctions et la qualité des sols, sujet très important qui a été évoqué. Cette notion doit être maintenue : elle joue un rôle essentiel dans l’étude d’impact des projets. En la conservant, nous permettons aux collectivités qui le souhaitent de mener un travail qualitatif sur la préservation de leur potentiel agroéconomique et écologique – je pense à la gestion de l’eau par exemple.

Je propose donc une définition plus souple des espaces urbanisés visant à sécuriser les collectivités sans rigidifier l’appréciation d’un phénomène qui varie selon les territoires.

M. le président. L’amendement n° 94 rectifié bis, présenté par MM. Canévet, Delahaye, Longeot et J.M. Arnaud, Mme Devésa, M. Bleunven, Mme Saint-Pé et M. Duffourg, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La notion d’espace urbanisé s’apprécie, dans toutes les communes, au regard de l’urbanisation existante, délimitée par un périmètre reconnu. L’extension d’urbanisation au-delà de ce périmètre se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants identifiés par le schéma de cohérence territorial.

II. – Après l’alinéa 7

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

…° À l’article L. 112-10, chaque occurrence des mots : » secteurs déjà urbanisés » est remplacée par les mots : « espaces urbanisés » ;

… À la seconde phrase du second alinéa de l’article L. 121-3, les mots : » et autres secteurs déjà urbanisées prévus à l’article L. 121-8 » sont supprimés ;

…° Le deuxième alinéa de l’article L. 121-8 est ainsi modifié :

…) La première occurrence des mots : « secteurs déjà urbanisés » est remplacée par les mots « espaces urbanisés » ;

…) La seconde phrase est supprimée ;

III. – Après l’alinéa 11

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

…° Au premier alinéa de l’article L. 141-13, les mots : « et autres secteurs déjà urbanisées prévus à l’article L. 121-8 » sont supprimés ;

…° Au 2° de l’article L. 312-9, les mots : « des secteurs déjà urbanisés » sont remplacés par les mots : « d’espaces urbanisés » ;

…° À l’article L. 312-10, les mots : « secteurs déjà urbanisés » sont remplacés par les mots : « espaces urbanisés » ;

La parole est à M. Yves Bleunven.

M. Yves Bleunven. Au regard de l’insécurité juridique qu’a pu causer la notion de « secteurs déjà urbanisés » issue de la loi Élan et reprise dans la présente proposition de loi, cet amendement de mon collègue Michel Canévet vise à ce que la notion d’espace urbanisé, quelle que soit la taille dudit espace, s’apprécie par rapport à l’existant, c’est-à-dire par rapport aux constructions présentes dans un périmètre – l’enveloppe urbaine – constaté et reconnu, et ce dans toutes les communes : littoral, montagne, espace protégé, espace naturel sensible, etc. L’urbanisation ne pourrait s’étendre au-delà de ce périmètre, conformément à la démarche de non-consommation d’Enaf. Toutefois, au sein de ce périmètre, il serait possible de densifier, de modifier la destination des bâtiments, de renaturer.

L’objectif est ainsi de ne pas fixer de définition commune trop détaillée des espaces urbanisés, notre pays étant fait d’aménagements multiples et diversifiés.

M. le président. L’amendement n° 185, présenté par M. J.M. Boyer et Mme Gacquerre, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Remplacer les mots :

circulation, des

Par les mots :

circulation ou des

II. – Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Cet amendement est rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 157 rectifié, présenté par M. Bleunven, Mme Havet, M. Canévet, Mme M. Jourda, MM. Delcros et Klinger, Mme Dumont, M. Cigolotti, Mme Canayer, MM. Chevalier, Henno et Khalifé, Mme Sollogoub, MM. Naturel et Kern, Mme Guidez, M. J.M. Arnaud, Mmes Billon et F. Gerbaud, M. Pillefer, Mmes Jacquemet et Lermytte et MM. Levi et Fargeot, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Après les deux occurrences des mots :

d’espaces urbanisés

Insérer les mots :

ou hameaux intégrés à l’environnement

La parole est à M. Yves Bleunven.

M. Yves Bleunven. Il est défendu.

M. le président. L’amendement n° 163, présenté par MM. Redon-Sarrazy et Fagnen, Mme Espagnac, M. Kanner, Mmes Artigalas et Bonnefoy, M. Bouad, Mmes Briquet et Canalès, MM. Cardon, Chaillou, Cozic, Devinaz, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme Le Houerou, MM. Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Omar Oili, Ouizille et Pla, Mme Poumirol, M. Raynal, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Tissot, Uzenat, M. Weber et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5, deuxième phrase

Supprimer cette phrase.

II. – Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

M. Christian Redon-Sarrazy. Au-delà des réserves émises il y a quelques minutes par mon collègue Simon Uzenat, je souhaite revenir sur la disposition du texte qui permettrait de ne pas considérer la création d’espaces urbanisés en bordure de l’enveloppe urbaine comme une consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers.

En effet, l’extension d’espaces urbanisés dans cette zone répond bien à la définition même de l’urbanisation comme extension de l’enveloppe urbaine existante : il y va forcément d’une consommation d’Enaf.

Le texte de la commission précise également : « La création ou l’extension effective d’espaces urbanisés s’apprécie à l’échelle de la parcelle cadastrale. » Cette précision revient à considérer que l’urbanisation mise en œuvre en périphérie de l’enveloppe ne serait pas comptabilisée au titre de la consommation d’Enaf, ce qui n’a pas vraiment de sens.

Aussi proposons-nous à tout le moins de supprimer ces deux précisions.

M. le président. L’amendement n° 56 rectifié bis, présenté par MM. J.M. Arnaud et Delcros, Mmes Sollogoub et Saint-Pé, M. Pillefer, Mme Perrot, M. Levi, Mme Patru, MM. Cigolotti, Folliot et Delahaye, Mme Billon, MM. Fargeot, Rochette et Henno et Mme Bourcier, est ainsi libellé :

Alinéa 5, après la deuxième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Ne sont pas non plus considérés comme consommation d’espaces agricoles, naturels et forestiers les espaces interstitiels non construits entourés de parcelles bâties.

La parole est à M. Bernard Pillefer.

M. Bernard Pillefer. Cet amendement vise à exclure les dents creuses, réelle problématique urbanistique, du décompte de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers.

Il s’agit par là même, en les soustrayant du décompte Enaf, d’inscrire dans la loi une définition précise des dents creuses.

M. le président. L’amendement n° 8 rectifié quater, présenté par Mme Romagny, MM. Pillefer et J.P. Vogel, Mme Saint-Pé, M. Genet, Mme Billon, M. Bouchet, Mmes Housseau et Devésa, MM. Somon, J.M. Arnaud, Levi, Pernot, Fargeot et Khalifé, Mmes Josende, Perrot et P. Martin, MM. Delcros et Laménie, Mme Bourcier, M. Rochette, Mme Jacquemet et M. Bleunven, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

, au sein de laquelle un coefficient d’artificialisation de 0,5 est appliqué aux espaces perméables et végétaux nouvellement aménagés

La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny.

Mme Anne-Sophie Romagny. Cet amendement vise à atténuer le coefficient d’artificialisation des espaces perméables proches des nouveaux bâtiments, tels que les jardins.

En matière d’artificialisation des sols ou de bétonisation, un jardin ne peut être considéré de la même façon qu’une maison ou qu’un bâtiment. L’incidence sur la santé des sols, l’infiltration des eaux et la biodiversité est en effet différente.

C’est pourquoi il est envisagé de n’appliquer qu’un coefficient de 0,5 pour l’artificialisation d’un jardin contre un coefficient de 1 pour une cour ou un bâtiment, par exemple.

Si nous n’opérons pas cette distinction, l’aménagement économe qui prévoit des espaces verts et des jardins ne sera pas récompensé. Il s’agit ici d’encourager le développement de ces espaces durables.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. L’amendement n° 11 vise à revenir sur le maintien de la comptabilisation Enaf au-delà de 2031. Or le maintien de cette base de calcul, mieux appréhendée par les élus, paraît faire l’objet d’un consensus : avis défavorable.

Les amendements identiques nos 72 et 174 tendent à supprimer la définition de la notion d’espace urbanisé et l’exclusion explicite des dents creuses de la consommation d’Enaf. La commission est également défavorable à ces deux amendements identiques.

L’amendement n° 136 rectifié du Gouvernement vise à aménager la définition des espaces urbanisés, ce à quoi nous pourrions souscrire. Toutefois, la rédaction proposée fait disparaître l’alinéa sur les dents creuses, sans rétablir la notion d’artificialisation, raison pour laquelle la commission y est défavorable.

L’amendement n° 94 rectifié bis a pour objet de définir la notion d’espace urbanisé « au regard de l’urbanisation existante » sans clarifier ce que cette notion recouvre : il faut donc absolument conserver les critères que nous avons inscrits à l’alinéa 4 : avis défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 163, exclure de la non-comptabilisation de la consommation d’Enaf les parcelles en bordure d’enveloppe urbaine lorsqu’elles sont majoritairement entourées d’espaces bâtis ou lorsque le sol est déjà imperméabilisé semble contre-productif. En effet, cette précision permet de s’assurer qu’il sera plus avantageux, du point de vue du décompte de la consommation d’Enaf, de construire dans des parcelles vides en bordure de l’enveloppe urbaine, plutôt qu’en extension ou par mitage, ce qui encouragera la densification : avis défavorable.

L’amendement n° 56 rectifié bis, qui concerne les dents creuses, est entièrement satisfait par la rédaction actuelle. La commission en sollicite donc le retrait.

La commission est défavorable à l’amendement n° 157 rectifié, pour les mêmes raisons que sur le sous-amendement n° 184.

J’en viens au coefficient que tend à instaurer l’amendement n° 8 rectifié quater. La notion de consommation d’Enaf est binaire. Même si l’idée d’un coefficient peut sembler séduisante sur le papier, elle n’est pas cohérente avec ce mode de comptabilisation et irait à rebours de la simplification. Comment comptabiliser une parcelle composée d’un pavillon et d’un jardin ? Nous retomberions dans les difficultés de comptabilisation qui crispent les élus. Je vous demande donc, ma chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. L’amendement n° 11 vise à rétablir une définition de l’artificialisation et de la renaturation faisant référence aux fonctions des sols.

Il me paraît crucial de réintroduire la notion de qualité des sols dans les principes généraux du code de l’urbanisme, pour confirmer notre engagement pour la souveraineté alimentaire et la biodiversité.

Toutefois, la réintégration, telle que vous la proposez, se fait aux dépens de l’inscription de la définition de la consommation d’Enaf dans les principes généraux du code de l’urbanisme, que je défends au travers de l’amendement n° 136 rectifié.

Cette définition sera utile, alors que la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers sera désormais l’étalon de la politique de sobriété foncière. Aussi, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement au profit de l’amendement n° 136 rectifié du Gouvernement ; à défaut, j’y serai défavorable.

Les amendements identiques nos 72 et 174 ont pour objet de supprimer la définition des espaces urbanisés et de consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers que la commission a souhaité inscrire dans les principes généraux du code de l’urbanisme.

Je partage une fois encore votre volonté de mettre en place une définition souple, facilement appropriable par les collectivités et fondée sur un faisceau d’indices.

M. Ronan Dantec. Très bien !

M. François Rebsamen, ministre. C’est l’objet de l’amendement que le Gouvernement a déposé sur l’article 1er pour rétablir un faisceau d’indices à la fois lisible, sécurisant juridiquement et assez souple pour que les élus puissent s’en emparer. Je demande donc le retrait de ces deux amendements au profit de celui du Gouvernement ; à défaut, j’y serai également défavorable.

L’amendement n° 94 rectifié bis tend à proposer une définition des espaces urbanisés différente de celle qu’a adoptée la commission. Je partage votre préoccupation de trouver des définitions claires et lisibles. Je souhaite en effet faciliter l’appropriation par tous d’une définition de la consommation d’Enaf suffisamment sécurisée et souple pour s’adapter aux réalités territoriales.

Chaque territoire doit pouvoir s’appuyer sur un faisceau d’indices tenant compte de caractéristiques spécifiques, telles que le type d’urbanisation, sa continuité, la quantité et la densité des constructions, la structuration par des voies de circulation ou par des réseaux ou encore la présence d’équipements. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a déposé un amendement en ce sens.

Votre amendement va bien plus loin en fusionnant la notion d’espaces urbanisés avec celle de secteurs déjà urbanisés – notion juridique propre introduite depuis 2018 dans la loi Littoral. Or ces deux notions n’ont pas les mêmes objets ni les mêmes effets. Leur assimilation serait source de confusion et de complexité, ce qui ne paraît ni pertinent ni opportun. En outre, elle remettrait en cause les règles d’urbanisme applicables à la protection du littoral, sujet qui est sans lien avec l’objet de la présente proposition de loi.

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

L’amendement n° 185 a pour objet de préciser la définition des espaces urbanisés et de rectifier une erreur en supprimant une modification de l’article L. 123-1 du code de l’urbanisme, que l’article 2 vient par ailleurs modifier par la suite.

C’est un amendement purement rédactionnel pour lequel le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

L’amendement n° 157 rectifié vise à inclure la notion de « hameaux intégrés à l’environnement » dans la définition de la consommation d’Enaf. Cet ajout aurait pour effet de complexifier inutilement la définition proposée.

Le texte de la commission définit la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers comme la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés. En pratique, cet amendement est donc déjà satisfait par la rédaction actuelle, raison pour laquelle j’y suis défavorable.

L’amendement n° 163 vise à revenir sur la proposition de la commission, selon laquelle l’étalement urbain en bordure de l’enveloppe urbaine ne doit pas être comptabilisé comme une consommation d’Enaf.

Le texte adopté en commission a pour effet d’inciter à l’étalement urbain en continuité de l’enveloppe urbaine, ce qui est contraire à toute politique de sobriété foncière.

Par ailleurs, la consommation d’espace peut avoir lieu à une échelle inférieure à celle de la parcelle. Les outils de mesure de la consommation de l’espace naturel mis à disposition par le Cerema sont d’ailleurs à une maille infraparcellaire. Je suis donc favorable à cet amendement.

L’amendement n° 56 rectifié bis tend à exclure de la comptabilisation de la consommation d’Enaf la construction dans les dents creuses. De façon générale, le texte adopté en commission a pour ambition de faciliter l’intégration des constructions au sein de l’enveloppe urbaine, en considérant qu’il ne s’agit pas de consommation d’Enaf. Je partage la volonté des auteurs de cet amendement de privilégier la densification au sein de l’enveloppe urbaine, dès lors qu’elle évite l’étalement urbain.

Néanmoins, tous les espaces interstitiels dans l’enveloppe urbaine ne se valent pas. La jurisprudence fait souvent valoir des critères de taille. Les petites parcelles sont par exemple considérées comme des dents creuses.

La disposition que vous proposez pose en revanche un problème, car elle n’est pas conditionnée par la nature des projets ni par celle de l’espace sur lequel ceux-ci s’implantent. Cela va donc au-delà de la dent creuse. L’espace qui serait ainsi consommé pourrait bien sûr jouer un rôle écologique ou agronomique – j’ai déjà évoqué l’exemple des vignes dans des clos urbains à Reims. Mais dans le cadre actuel, les acteurs locaux ont déjà la possibilité de construire dans les dents creuses, tant que les Enaf restent préservés, ainsi que de porter des projets qualitatifs.

Pour ces raisons, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’y serai défavorable.

Enfin, les auteurs de l’amendement n° 8 rectifié quater proposent de créer un système de pondération dans le calcul des Enaf en fonction de la surface urbanisée, selon qu’elle est imperméabilisée ou non. Je comprends l’intention d’apprécier différemment les surfaces imperméabilisées et les surfaces non bâties dans le calcul de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers sur un territoire.

En revanche, il me semble indispensable de conserver une appréciation souple de la consommation des Enaf. Il est essentiel que la définition retenue permette aux élus locaux de répondre le plus finement possible aux besoins de leur territoire. Or l’introduction de coefficients nuirait à cette souplesse et entraînerait une plus grande complexité, ce qui serait dommageable à l’appropriation et à la mise en œuvre de la réforme.

Par conséquent, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour explication de vote.

Mme Anne-Sophie Romagny. J’ai bien entendu les arguments de la commission et du Gouvernement.

Monsieur le ministre, je suis prête à retirer mon amendement si vous vous engagez à entamer une réflexion sur la pondération.

Les coefficients proposés ne sont peut-être pas adéquats, mais la méthode me semble juste. C’est d’ailleurs celle qui est adoptée en Allemagne. On ne peut considérer toutes les parcelles de la même manière, qu’elles soient bâties ou non.

Il serait intéressant de se pencher sur la question, même si le moment n’est peut-être pas propice. Pourrions-nous prévoir d’en débattre ultérieurement ? Cette disposition me semble digne d’intérêt, ne serait-ce qu’au regard de l’exemple allemand.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Je m’en veux d’être quelque peu désagréable quant à la qualité rédactionnelle de cette proposition de loi, car nous avons souvent très bien travaillé avec nos collègues Jean-Baptiste Blanc et Guislain Cambier, mais j’ai cette fois bien du mal à les reconnaître dans ce texte.

Comme l’a souligné M. le rapporteur, la notion d’Enaf est binaire. Il a raison : soit on consomme des Enaf, soit on n’en consomme pas ! C’est précisément la simplification que vous espérez.

De même, le rapporteur a affirmé que les élus locaux – Dieu sait que je suis d’accord avec lui ! – sont tout à fait responsables et qu’ils feront preuve de bon sens. S’ils ont le choix entre plusieurs terrains à urbaniser, ils sauront se montrer intelligents et choisir des espaces enchâssés dans l’enveloppe urbaine, déjà plus ou moins desservis par les transports ou les différents réseaux, plutôt qu’un champ à l’écart.

Soudainement, vous paraissez douter que les élus sauront comprendre d’eux-mêmes que certains terrains doivent être préférés à d’autres. Vous proposez donc d’exclure ces terrains des Enaf, pour inciter les élus à les choisir pour les opérations d’aménagement. Encore une fois, la contradiction est flagrante entre le discours et la rédaction proposée.

L’alinéa 5 doit absolument disparaître. Tout ce qui le permettra est bon à prendre, y compris l’amendement du Gouvernement. Cependant, la notion d’Enaf étant déjà précisée, est-il pertinent de revenir, à cet endroit du texte, sur la définition des espaces urbanisés ? J’en doute, mais l’exonération des Enaf doit être supprimée à tout prix, car elle n’a rien à faire dans cette proposition de loi.

M. le président. Mes chers collègues, je vous précise qu’il est près d’une heure et quart et que nous devons lever la séance à une heure et demie si nous ne voulons pas retarder l’ouverture de nos débats demain matin. Dix amendements doivent encore être votés ; je vous invite donc à faire preuve de concision dans vos interventions.

La parole est à M. Yves Bleunven, pour explication de vote.

M. Yves Bleunven. Monsieur le président, je retire mon amendement n° 157 rectifié.

M. le président. L’amendement n° 157 rectifié est retiré.

La parole est à M. Simon Uzenat, pour explication de vote.

M. Simon Uzenat. Monsieur le ministre, je n’ai pas bien compris votre position. Au début de nos échanges, vous avez annoncé que nous n’étions pas là pour parler du code de l’urbanisme. Vous l’avez pourtant largement mentionné dans vos propos…

En outre, la rédaction de l’amendement n° 136 rectifié est de nature à bien des choses, sauf à sécuriser les élus. Ceux-ci peuvent bien utiliser le faisceau d’indices, mais, vous le reconnaissez vous-même, en dernier ressort, ce sont les services de l’État qui rendent les avis, lesquels sont souvent contradictoires au sein d’un même département.

Vous êtes ministre de la décentralisation : vous faites confiance aux élus locaux – vous en êtes un vous-même. Pour autant, par la définition que vous proposez, au travers de ce faisceau d’indices notamment, vous laissez le dernier mot aux administrations déconcentrées de l’État et non aux élus locaux, sans apporter de clarification. De notre point de vue, cette posture pose bien plus de questions qu’elle n’apporte de réponses.

M. le président. La parole est à M. Sebastien Pla, pour explication de vote.

M. Sebastien Pla. Je retire mon amendement n° 11, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 11 est retiré.

La parole est à M. Bernard Pillefer, pour explication de vote.

M. Bernard Pillefer. Monsieur le président, l’amendement n° 56 rectifié bis est retiré.

M. le président. L’amendement n° 56 rectifié bis est retiré.

La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen, ministre. Madame Romagny, si vous retirez l’amendement n° 8 rectifié quater, je suis prêt à réexaminer la question dans le cadre de la navette.

M. le président. Madame Romagny, l’amendement n° 8 rectifié quater est-il maintenu ?

Mme Anne-Sophie Romagny. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 8 rectifié quater est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 72 et 174.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 136 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 94 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 185.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 163.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 25 rectifié, présenté par MM. Gold, Bilhac, Cabanel et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. Il établit notamment une nomenclature des sols artificialisés fondée sur un gradient d’artificialisation, qui intègre la qualité des sols, ainsi que l’échelle à laquelle l’artificialisation des sols doit être appréciée dans les documents de planification et d’urbanisme. »

La parole est à M. Philippe Grosvalet.

M. Philippe Grosvalet. Cet amendement de M. Gold vise à adopter une approche moins binaire du suivi de l’artificialisation des sols.

Dans sa version actuelle, la nomenclature définie par le décret du 29 avril 2022 établit une dichotomie stricte entre les surfaces artificialisées ou non, qui ne tient pas compte du potentiel de renaturation des sols construits.

Par cet amendement, nous proposons d’établir par décret une nomenclature des sols artificialisés fondée sur un gradient d’artificialisation associé, pour chaque niveau, à un coefficient intégrant la qualité des sols. Cette nouvelle matrice permettrait une gestion des sols à la fois plus fine et plus flexible à l’échelle de chaque territoire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. Dès lors que nous maintenons la comptabilisation en consommation en Enaf, l’établissement d’une nomenclature des sols artificialisés n’a plus de sens.

Au contraire, c’est pour échapper à cette nomenclature complexe et mal comprise des élus, qui nous a valu tant de débats avec les précédents gouvernements, que nous voulions en revenir aux Enaf, notion que les acteurs locaux connaissent et maîtrisent.

Par conséquent, l’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet, pour explication de vote.

M. Philippe Grosvalet. Monsieur le président, je retire cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 25 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 126 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Corbisez et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 166 est présenté par MM. Redon-Sarrazy et Fagnen, Mme Espagnac, MM. Montaugé, Tissot et Kanner, Mmes Artigalas et Bonnefoy, M. Bouad, Mmes Briquet et Canalès, MM. Cardon, Chaillou, Cozic, Devinaz, Gillé, Jacquin et P. Joly, Mme Le Houerou, MM. Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Omar Oili, Ouizille et Pla, Mme Poumirol, M. Raynal, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Uzenat, M. Weber et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 11

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Le 4° de l’article L. 141-15 est ainsi rédigé :

« 4° L’analyse de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers conformément à la trajectoire prévue dans l’article 194 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets et la justification des objectifs chiffrés de limitation de cette consommation définis dans le document d’orientation et d’objectifs ; ».

La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 126 rectifié.

Mme Céline Brulin. Cet amendement, qui est en partie issu d’une alerte de la Fédération nationale des Scot, vise à simplifier les procédures en évitant certains doublons.

Vous le savez, le code général de l’urbanisme prévoit un suivi de la consommation foncière, qui doit être intégré au schéma de cohérence territoriale. Or il ne nous semble pas utile que ce comptage de la consommation foncière soit doublé avec celui de l’artificialisation prévu par la loi Climat et Résilience.

Nous proposons donc d’adopter le décompte prévu par cette dernière loi au sein du code de l’urbanisme afin de comptabiliser en même temps artificialisation et consommation foncière.

Cette proposition tombe sous le sens : elle serait source d’une grande simplification, permettant ainsi de gagner en lisibilité et de dégager du temps pour élaborer les politiques et les choix stratégiques, en évitant un doublon inutile.

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 166.

M. Christian Redon-Sarrazy. Ma collègue a déjà défendu cet amendement, mais j’insiste sur ce besoin de simplification concernant ce double décompte foncier.

Depuis la loi Climat et Résilience, le bilan de la consommation de la période 2011-2021 sert de base pour définir les objectifs de réduction pour 2024-2034, indépendamment de la date d’arrêt d’un Scot.

Aussi, dans un souci de simplification, je vous invite à voter ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marc Boyer, rapporteur. L’objectif de simplification visé par les auteurs de ces amendements est compréhensible et même séduisant, mais il ne s’agit pas d’une double comptabilisation.

D’une part, la consommation sur la période 2011-2021 est évaluée une bonne fois pour toutes.

D’autre part, au moment de modifier un Scot, il est nécessaire d’évaluer les espaces consommés lors des dix dernières années.

Ce bilan est particulièrement pertinent : pour fixer des objectifs de réduction pour l’avenir, il est essentiel de connaître la consommation d’espaces depuis le début de la période. En effet, les modifications des Scot n’interviendront pas forcément au moment des jalons de référence fixés par la loi ou au niveau régional. Un Scot qui sera modifié l’an prochain a bel et bien besoin de savoir où il en est de sa consommation depuis 2021.

J’ajoute que la loi Climat et Résilience ne fixe aucune obligation d’analyse de la consommation des Enaf pour les Scot, contrairement aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale, qui doivent établir un bilan triennal.

En réalité, le bilan prévu à l’article L. 141-15 du code de l’urbanisme est bien plus fin. Il ne s’agit pas uniquement d’un bilan chiffré, mais aussi qualitatif.

Pour ces raisons, la commission est défavorable à ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Rebsamen, ministre. Vous proposez de simplifier les modalités de réalisation du bilan de consommation des Enaf dans les Scot.

En l’état actuel du droit, les Scot et les plans locaux d’urbanisme sont amenés à faire l’objet d’un double bilan de leur consommation foncière, car deux périodes s’imposent actuellement : les dix ans qui précèdent l’arrêt du projet du plan local d’urbanisme ou du Scot et la décennie 2011-2021, dans le cadre de la loi Climat et Résilience.

Je partage votre préoccupation de mettre en cohérence la disposition du droit afin de faciliter la tâche des collectivités. Néanmoins, je souhaite élargir cette rationalisation au PLU, qui n’est pas couvert par votre amendement, et maintenir le bilan sur les années précédant directement l’arrêt du projet pour permettre aux collectivités de tenir compte des coups partis.

Je suis donc favorable à ces amendements et je proposerai d’élargir le dispositif aux PLU et PLUi lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 126 rectifié et 166.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 15 amendements au cours de la soirée ; il en reste 140 à examiner sur ce texte.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

12

Mises au point au sujet de votes

M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet.

M. Philippe Grosvalet. Lors du scrutin public n° 220 sur l’article 1er de la proposition de loi visant à renforcer la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal, mon collègue Raphaël Daubet souhaitait voter contre.

M. le président. Acte est donné est de cette mise au point, mon cher collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.

La parole est à M. Laurent Somon.

M. Laurent Somon. Lors du scrutin n° 220, qui portait sur l’article 1er de la proposition de loi visant à renforcer la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal, souhaitait voter pour M. Jean-Luc Ruelle, souhaitaient voter contre MM. Jean Bacci, Étienne Blanc, Guillaume Chevrollier, Mmes Sabine Drexler, Dominique Estrosi Sassone, Frédérique Gerbaud, Béatrice Gosselin, Sylvie Goy-Chavent, MM. Daniel Gremillet, Daniel Gueret, Alain Houpert, Jean-François Husson, Mme Corinne Imbert, MM. Alain Joyandet, Dominique de Legge, Mme Vivette Lopez, M. Didier Mandelli, Mme Pauline Martin, MM. Albéric de Montgolfier, Philippe Mouiller, Georges Naturel, Mme Anne-Marie Nédélec, MM. Clément Pernot, Cédric Perrin, Olivier Rietmann, Bruno Rojouan, Hugues Saury, Bruno Sido et Jean Sol, souhaitaient s’abstenir Mmes Martine Berthet, Alexandra Borchio Fontimp, M. Mathieu Darnaud, Mmes Else Joseph, Christine Lavarde, MM. Claude Nougein, Philippe Paul et Mme Anne Ventalon.

Lors du scrutin n° 226, qui portait sur l’ensemble de la proposition de loi organique visant à harmoniser le mode de scrutin aux élections municipales afin de garantir la vitalité démocratique, la cohésion municipale et la parité, souhaitaient voter pour MM. Jean-Claude Anglars, Jean Bacci, Bruno Belin, Jean-Baptiste Blanc, François Bonhomme, Michel Bonnus, Gilbert Bouchet, Jean-Marc Boyer, Mme Valérie Boyer, MM. Max Brisson, Christian Cambon, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Catherine Dumas, M. Éric Dumoulin, Mme Agnès Evren, MM. Gilbert Favreau, Christophe-André Frassa, Fabien Genet, Mmes Brigitte Hybert, Lauriane Josende, Muriel Jourda, MM. Roger Karoutchi, Khalifé Khalifé, Mmes Florence Lassarade, Christine Lavarde, MM. Ronan Le Gleut, Henri Leroy, Mme Viviane Malet, MM. David Margueritte, Thierry Meignen, Mme Marie Mercier, M. Louis-Jean de Nicolaÿ, Mme Sylviane Noël, M. Cyril Pellevat, Mme Annick Petrus, MM. Stéphane Piednoir, Rémy Pointereau, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, M. Hervé Reynaud, Mme Marie-Pierre Richer, MM. Jean-Luc Ruelle, Stéphane Sautarel et Michel Savin, souhaitait voter contre M. Cédric Vial, souhaitaient s’abstenir Mmes Martine Berthet, Alexandra Borchio Fontimp, M. Marc-Philippe Daubresse, Mme Françoise Dumont, MM. Stéphane Le Rudulier, Damien Michallet, Claude Nougein, Philippe Paul, André Reichardt et Mme Anne Ventalon, et souhaitait ne pas prendre part au vote Mme Sylvie Valente Le Hir.

M. le président. Mes chers collègues, acte est donné de ces mises au point.

13

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 13 mars 2025 :

À dix heures trente, l’après-midi et le soir :

Suite de la proposition de loi visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux, présentée par MM. Guislain Cambier, Jean-Baptiste Blanc et plusieurs de leurs collègues (procédure accélérée ; texte de la commission n° 373, 2024-2025).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le jeudi 13 mars 2025, à une heure trente.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER