M. le président. L’amendement n° 3, présenté par Mme Margaté, MM. Gay et Lahellec, Mme Corbière Naminzo, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Supprimer les mots :
À titre expérimental et pour une durée de cinq ans
II. – Après l’alinéa 1
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
Le I de l’article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « À titre expérimental et pour une durée de huit ans » sont supprimés ;
2° Le huitième alinéa est ainsi rédigé :
« Chaque année, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation sur l’encadrement des loyers » ;
3° Au neuvième alinéa, le mot : « expérimentation » est remplacé par le mot : « mesure ».
III. – Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Marianne Margaté.
Mme Marianne Margaté. Nous souhaiterions profiter de cette très bonne initiative de nos collègues socialistes pour rappeler que, dans la loi, l’encadrement des loyers est toujours considéré comme une expérimentation.
Pourtant, depuis son entrée en vigueur, cette mesure convainc partout où elle est mise en œuvre. Ce n’est certes pas une solution miracle ; il s’agit plutôt d’un dispositif de bon sens, qui permet aux élus locaux de tenir les marchés lorsque les prix s’envolent.
En bloquant les loyers au-delà de 20 % du loyer médian, cette mesure fait ce qu’elle dit, d’autant plus lorsque les collectivités ont les moyens de faire appliquer un tel encadrement, notamment via des sanctions. Il est prévu que l’expérimentation prenne fin en novembre 2026. À ce jour, le dispositif s’applique dans 69 communes et a vocation à s’étendre, non à s’éteindre…
La proposition de loi dont nous débattons en est la preuve : les départements et régions d’outre-mer pourront bientôt mettre en application cet encadrement des loyers et, ainsi, faciliter l’accès au logement de nombreux ménages ou, au moins, éviter que leurs difficultés ne s’accroissent.
Avec ce texte, la crise du logement est aujourd’hui à notre ordre du jour au travers de la situation particulièrement préoccupante des outre-mer.
Nous ne savons pas quand nous aurons l’occasion de parler de nouveau du droit au logement, lequel ne semble pas être une priorité du Premier ministre. Nous nous saisissons donc de l’occasion qui nous est offerte ce soir pour proposer dès à présent la pérennisation de l’encadrement des loyers.
Nous le faisons à un an des élections municipales, dans la mesure où cette mesure contribuera à renforcer le pouvoir des maires, un objectif auquel, je le sais, nous sommes nombreux à être sensibles dans cet hémicycle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. L’expérimentation actuelle de l’encadrement des loyers arrivera à échéance en 2026. Elle est en cours d’évaluation par le Gouvernement. Or il n’est pas souhaitable de la pérenniser avant de disposer d’un bilan global.
En commission, nous étions convenus avec l’auteure de la proposition de loi, Mme Bélim, de ne pas rouvrir le débat sur l’expérimentation mise en œuvre dans l’Hexagone.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement. Cet amendement vise à pérenniser l’encadrement des loyers, y compris dans l’Hexagone.
Comme vous le savez, madame Margaté, l’article 140 de la loi Élan a prévu une expérimentation de l’encadrement des loyers jusqu’à la fin de 2026, afin que les collectivités qui le souhaitent puissent s’en saisir.
Il est évidemment essentiel de disposer d’un bilan de cette expérimentation, afin d’avoir une meilleure compréhension des effets de cette mesure sur le marché locatif, notamment de ses effets de bord éventuels, préalablement à toute décision de pérennisation du dispositif.
Ce bilan fera l’objet d’un rapport du Gouvernement au Parlement six mois avant la fin de l’expérimentation. J’ai d’ores et déjà signé l’ordre de mission qui permettra de s’assurer que nous disposerons bel et bien d’une analyse fine de la situation et d’éléments objectifs pour nous faire une idée.
Les collectivités dans les départements et régions d’outre-mer n’ont pu postuler à cette expérimentation nationale lors de son lancement, compte tenu du niveau des loyers observés dans certains territoires ultramarins et de leurs particularités. L’article 1er offre désormais la possibilité d’y expérimenter de manière spécifique l’encadrement des loyers.
Pour les mêmes raisons que pour le dispositif national, une pérennisation n’est pas souhaitable sans que ses effets aient été observés au préalable.
C’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 5, présenté par Mme Bélim, MM. Kanner, Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot, Stanzione et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…. – Par dérogation au cinquième alinéa du B du III du même article 140, aucun complément de loyer ne peut être appliqué lorsque le logement n’est pas décent conformément à l’article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement tend à mettre en cohérence avec nos spécificités ultramarines la transposition par l’article 1er du présent texte de l’expérimentation prévue par la loi Élan. En effet, les critères de décence prévus par le dispositif, pensés initialement pour l’Hexagone, ne sont malheureusement pas adaptés aux départements et régions d’outre-mer.
Il est par conséquent proposé de renvoyer, pour les conditions d’application d’un complément de loyer, aux règles de décence spécifiques à nos territoires, actuellement fixées par l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989, qui prévoit déjà un calendrier propre aux collectivités d’outre-mer pour ce qui est de la décence énergétique.
Cette solution présenterait l’avantage de la simplicité et aurait pour conséquence de garantir que l’on ne pourra pas appliquer un complément de loyer pour un logement non décent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Je partage votre intention, ma chère collègue, de ne pas appliquer les règles relatives au diagnostic de performance énergétique de l’Hexagone pour cette expérimentation dans les outre-mer. Mais je sais également que les règles de décence des logements dans les outre-mer sont différentes de celles qui prévalent dans l’Hexagone.
Ici, nous parlons de compléments de loyer. Est-il vraiment souhaitable de faire référence à ces critères de décence, qui sont moins-disants que dans l’Hexagone ? Cela aurait pour effet d’offrir la possibilité à un propriétaire de fixer un loyer allant au-delà des loyers encadrés, alors que l’on souhaite précisément encadrer ces derniers pour lutter contre la hausse du coût de la vie.
Un logement indécent ne devrait même pas être loué. Avec un tel amendement, on autoriserait par exemple un propriétaire à appliquer un complément de loyer, alors même que les toilettes sont situées en dehors du logement. C’est interdit dans l’Hexagone : au nom de quel principe cela devrait-il être autorisé dans les outre-mer ?
De même, la fourniture d’eau chaude n’est pas obligatoire pour qu’un logement soit considéré comme décent dans les outre-mer. Cela se justifie au titre des spécificités ultramarines. Pour autant, un logement sans eau chaude doit-il pouvoir faire l’objet d’un complément de loyer, même dans les outre-mer ?
Même s’ils sont considérés comme décents, quelque 22 000 logements sont jugés comme précaires à La Réunion et 9 % du parc de logements ne disposent pas d’eau chaude sanitaire.
C’est ce que je mettais en évidence en 2022 avec Victorin Lurel et Guillaume Gontard dans notre rapport sur la politique du logement dans les outre-mer. C’est également ce que soulignait le ministre tout à l’heure lors de la discussion générale.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre. Les critères qui permettent à un bailleur d’appliquer un complément de loyer dans les zones soumises à encadrement des loyers sont définis par la loi Élan.
Il s’agit de critères qui avaient été initialement pensés pour le territoire hexagonal, le seul concerné jusqu’à présent par l’expérimentation, et qui sont manifestement inadaptés aux territoires d’outre-mer.
Parmi les critères actuellement prévus par la loi Élan, on trouve les signes d’humidité sur certains murs, des fenêtres qui laissent anormalement passer l’air, hors grille de ventilation, ou encore une mauvaise exposition de la pièce principale.
Ainsi, sans le présent amendement, en outre-mer, toute construction qui présenterait des signes d’humidité sur certains murs, ce qui est fréquent compte tenu des conditions climatiques locales, ou qui disposerait d’un dispositif de ventilation naturelle, ce qui est de bonne pratique, ne pourrait paradoxalement pas donner lieu à un complément de loyer.
Il est nécessaire aujourd’hui d’adapter les critères de la loi Élan à l’outre-mer et d’autoriser l’application d’un complément de loyer lorsque les caractéristiques du logement le justifient raisonnablement.
Le présent amendement vise, à juste titre, à adapter à l’outre-mer les critères de déclenchement du complément de loyer, en renvoyant aux critères généraux de décence prévus par la loi du 6 juillet 1989. Il s’agit notamment de l’absence de risque manifeste pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, de l’absence de toute infestation d’espèces nuisibles et parasites et d’un niveau de performance énergétique adapté à l’outre-mer.
Cet amendement tend plus particulièrement à conserver pour l’application de la décence énergétique en outre-mer le bénéfice d’un calendrier spécifique, décalé par rapport à celui qui s’applique pour le territoire métropolitain.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
M. Lucien Stanzione. Bravo !
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 2, présenté par Mme Margaté, MM. Gay et Lahellec, Mme Corbière Naminzo, M. Xowie et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
À l’avant-dernier alinéa du I de l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, après les mots : « collectivités d’outre-mer », sont insérés les mots : « , sans que cela soit restrictif en termes d’accès, ».
La parole est à Mme Marianne Margaté.
Mme Marianne Margaté. Notre amendement vise tout simplement au rétablissement de l’article 2 dans sa rédaction initiale, c’est-à-dire tel qu’il figurait dans le texte avant qu’il ne soit supprimé en commission.
Nous souhaitons notamment souligner la nécessité de soutenir certaines collectivités au titre de leurs nombreux quartiers, au-delà des critères de priorité prévus par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine de 2014, dite loi Lamy.
Nous entendons les arguments selon lesquels le nombre des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) a augmenté, puisqu’il est passé de 218 à 247 au 1er janvier 2025. Cependant, les QPV étaient au nombre de 330 avant la première réforme de la géographie prioritaire.
Les critères d’éligibilité retenus en matière de revenus et de densité ne nous semblent pas coller à la réalité des outre-mer, ni permettre à nos concitoyens ultramarins de faire face aux difficultés du quotidien, notamment en matière d’habitat et de cadre de vie.
J’en profite pour vous alerter, madame la ministre, sur le manque de moyens alloués à la politique de la ville dans le projet de loi de finances pour 2025, un budget encore moins élevé que celui de l’exercice 2024, ainsi que sur la suppression annoncée des 5 000 postes d’adultes-relais, tant dans les communes ultramarines que dans l’ensemble des communes de l’Hexagone. Le constat est alarmant.
Il convient de faciliter les interventions de l’État et des collectivités, là où l’on reconnaît qu’elles doivent être prioritaires, particulièrement dans les outre-mer. Il faut s’en donner les moyens budgétaires et humains, et cela commence par l’élargissement des critères d’éligibilité et d’accès aux aides de l’État pour les collectivités qui en ont le plus besoin.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Comme nous l’avons souligné en commission, en accord avec l’auteure de la proposition de loi, l’objectif recherché au travers de cet amendement est satisfait par la dernière actualisation de la géographie prioritaire de la politique de la ville.
En outre, toute modification des critères de délimitation de la géographie prioritaire de la ville nécessite un calibrage fin. Les critères de délimitation des QPV dans les outre-mer sont spécifiques à ces territoires et ne se superposent pas à ceux qui sont utilisés dans l’Hexagone.
La rédaction actuelle de la loi Lamy, n’induit donc pas un accès plus restrictif des territoires ultramarins à la politique de la ville : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre. Cet amendement vise à rétablir l’article 2, qui a été supprimé en commission, afin de préciser que les critères utilisés pour la délimitation des QPV dans les territoires ultramarins ne doivent pas être restrictifs en termes d’accès.
Si je comprends l’intention des auteurs de l’amendement, je me joins à Mme la rapporteure pour souligner que les critères de délimitation des QPV dans les outre-mer ont été rendus moins restrictifs par un décret du 27 décembre 2024, lequel a également permis d’harmoniser les méthodologies entre les différents territoires ultramarins. Depuis l’entrée en vigueur de cette mesure le 1er janvier 2025, le nombre de QPV ultramarins est passé de 218 à 247.
Par ailleurs, en cas de difficulté, le préfet peut ajuster les périmètres à la marge. C’est un élément important eu égard aux spécificités à prendre en considération à l’échelle de chaque site ultramarin. Un dialogue doit donc être établi avec les préfets lorsque des problèmes se font jour aux limites des QPV.
En tout état de cause, un gros travail a été fait pour élargir les périmètres. La suite appartient désormais aux élus et aux préfets des différents territoires ultramarins.
À son tour, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. En conséquence, l’article 2 demeure supprimé.
Article 3
(Supprimé)
Après l’article 3
M. le président. L’amendement n° 4 rectifié bis, présenté par Mme Bélim, MM. Kanner, Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot, Stanzione et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et à Saint-Martin, les modalités de mise en œuvre de l’exemption au règlement (UE) 2024/3110 établissant des règles harmonisées de commercialisation pour les produits de construction et abrogeant le règlement (UE) n° 305/2011 sont précisées par décret.
Le représentant de l’État dans le bassin géographique constitue des comités référentiels construction, compétents sur des zones géographiques précisées par le décret précité afin de contribuer à la mise en œuvre de cette exemption et de contribuer à la définition de référentiels de construction en tenant compte des besoins de la production locale, des spécificités et contraintes locales.
Les règles d’organisation, de fonctionnement et de contrôle de ces comités sont fixées par décret.
Les comités sont éligibles aux financements publics et peuvent mener des travaux avec les instances nationales ou internationales, ainsi que des collectivités françaises ultramarines ne relevant pas de l’article 349 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne.
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à créer des comités référentiels construction, dont la mission sera d’appliquer l’exemption de marquage CE, de soutenir l’innovation locale et de définir des référentiels de construction adaptés à nos spécificités et aux besoins de la production locale. Ces comités devront intégrer en leur sein des acteurs locaux – représentants des filières de construction, scientifiques, experts… –, garants de leur pertinence et de leur efficacité.
La rédaction que je vous propose procède d’une concertation avec les cabinets de Manuel Valls et de Valérie Létard, France Assureurs, l’Agence Qualité Construction et la Fédération des entreprises d’outre-mer. En outre, elle est soutenue par le Bureau de normalisation des techniques et équipements de la construction du bâtiment et par le Conseil national de l’ordre des architectes.
À l’issue de longs échanges, nous avons abouti à une rédaction faisant consensus, preuve que toutes les parties sont prêtes à avancer sur le sujet. L’adaptation des normes n’est plus une option, c’est une nécessité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Micheline Jacques, rapporteur. Chère Audrey Bélim, je l’ai déjà fait lors de mon intervention en discussion générale, mais je tiens à saluer une fois encore votre engagement, que je sais sincère, pour que nous aboutissions rapidement à une solution sur ce sujet de l’adaptation des normes.
Cet engagement est aussi le mien, et il ne date pas d’hier. J’ai déjà eu l’occasion de rappeler l’implication de la délégation sénatoriale aux outre-mer dans l’élaboration du rapport d’information sur la politique du logement dans les outre-mer en 2021, du livre blanc de la construction durable en outre-mer, à la fin de 2024, ou encore de la proposition de résolution européenne sur l’intégration régionale des régions ultrapériphériques (RUP) de l’Union européenne. Je n’ai donc pas de problème a priori pour que nous légiférions en la matière, bien au contraire.
Toutefois, le long et patient travail mené par la délégation depuis des années montre que le sujet est très complexe. Cette question fait intervenir de nombreux acteurs et exige encore de faire émerger des consensus de manière à maintenir la confiance.
Dans cet esprit, nous nous sommes mis d’accord pour supprimer l’article 3 et poursuivre la réflexion sur la méthode la plus appropriée pour faire enfin aboutir les initiatives visant à adapter les normes, en nous appuyant sur les évolutions récentes du droit européen.
Votre proposition n’en demeure pas moins intéressante, ma chère collègue, même si elle tend à cranter les choses, alors même que les études conduites par le Gouvernement ne sont pas terminées et que la concertation entre les parties prenantes ne fait que commencer.
Par ailleurs, il ne me semble pas que l’Agence française de normalisation (Afnor), qui est le principal organisme d’organisation et de gestion des normes, soutienne votre démarche.
En outre, il nous faut veiller à ne pas créer un énième comité qui travaillerait en silo, sous l’égide de l’État, comme souvent, dans le seul domaine de la construction, alors que le besoin d’adaptation des normes est beaucoup plus vaste.
Je rappelle également que le traitement des déchets de l’amiante est très dispendieux : la destruction des tours Gabarre, en Guadeloupe, a coûté 10 millions d’euros. La gestion des déchets est également un point important de la régionalisation.
Cela étant dit, je comprends le sens de cet amendement, dont la rédaction constituera une base de travail pour les textes à venir.
Pour ces raisons, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Létard, ministre. Comme l’a souligné Mme la rapporteure, cet amendement vise à instaurer des comités référentiels construction dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et à Saint-Martin.
Lesdits comités auraient pour mission de contribuer à mettre en œuvre l’exemption aux règlements sur les produits de construction et de définir des référentiels de construction adaptés aux spécificités locales.
Il s’agit de mettre en application une dérogation obtenue de haute lutte à Bruxelles, l’année dernière, grâce à une importante mobilisation du gouvernement français et des élus ultramarins, qui ont été nombreux à se manifester sur ce sujet.
Le Gouvernement est favorable à ce premier pas vers une adaptation des normes. J’en profite pour saluer la présidente de la délégation sénatoriale aux outre-mer, qui travaille sur ce sujet depuis longtemps, ainsi que l’auteure de ce texte.
Madame Bélim, vous vous êtes fortement impliquée sur ce sujet particulier, sur lequel il ne faut plus perdre de temps. Cet amendement découle d’un travail considérable réalisé au sein de la délégation et tend à poser une première brique. Il conviendra de la consolider collectivement et d’aller plus loin dans cette adaptation des normes, qui est essentielle pour lutter contre la vie chère et aboutir à des solutions adaptées.
Je remercie sincèrement la délégation de son travail sur ce sujet, que je sais sensible et épineux. Madame la rapporteure, madame la présidente de la commission des affaires économiques, je vous félicite d’avoir une nouvelle fois su dégager un consensus.
Le Gouvernement remercie l’ensemble des acteurs qui ont fait un pas les uns vers les autres pour avancer dans la bonne direction et poursuivre le travail engagé et émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 3.
Article 4
Les conséquences financières résultant pour l’État de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Après les drames humains et matériels que nous avons connus en Nouvelle-Calédonie au mois de mai de l’année dernière, après le passage des cyclones Chido à Mayotte et Garance à La Réunion, le très grand consensus qui s’est dégagé au cours de cet espace réservé au groupe Socialiste, Écologiste et Républicain est particulièrement rassurant. Nous envoyons un formidable message, très positif, à nos 2,2 millions de concitoyens vivant dans les outre-mer.
Je remercie Victorin Lurel, Audrey Bélim et Mme la rapporteure pour ce travail très constructif, qui nous montre bien le rôle utile que peut jouer le Sénat – que Valérie Létard connaît bien – pour nos territoires.
Madame la ministre, je salue votre engagement et je tiens également à dire le plaisir que nous avons eu à travailler avec celui qui vous a précédé cet après-midi au banc des ministres, Manuel Valls, qui a pris toute sa part dans le succès des propositions de loi de cette niche parlementaire, qui connaîtront manifestement toutes deux une issue favorable.
Il s’agit d’une bonne nouvelle pour le Sénat, pour les outre-mer, mais aussi pour la démocratie dans notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guillaume Gontard. Je remercie Audrey Bélim et l’ensemble du groupe socialiste d’avoir défendu cette proposition de loi, qui constitue une avancée importante.
Je remercie également la présidente de la délégation sénatoriale aux outre-mer, Micheline Jacques, et Victorin Lurel, avec qui j’ai élaboré en 2021 un rapport d’information sur la politique du logement dans les outre-mer.
Ce rapport, tout comme les travaux de la délégation, montre l’importance non seulement d’encadrer les loyers, mais aussi d’adapter les normes aux réalités locales pour construire et reconstruire en utilisant des matériaux et des savoir-faire locaux.
Si nous voulons avancer sur ce sujet, qui est éminemment d’actualité, il nous faut agir sur la question de la normalisation. À cet égard, la dérogation au label CE permise en 2024 par l’Union européenne a constitué une avancée importante. S’il reste beaucoup de travail, ce texte inscrira dans la loi de réelles avancées.
Nous avons récemment eu l’occasion de constater l’intérêt, y compris économique, d’utiliser des matériaux et des savoir-faire locaux, notamment la terre crue à Mayotte.
Pour toutes ces raisons, le groupe écologiste votera en faveur de ce texte. Encore une fois, je remercie tous ceux qui ont travaillé à son élaboration. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.)
M. le président. Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi expérimentant l’encadrement des loyers et améliorant l’habitat dans les outre-mer.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. Mes chers collègues, je constate que la proposition de loi a été adopté à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)
L’ordre du jour de cette après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures quinze, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de Mme Sylvie Robert.)