Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Chaillou.

M. Christophe Chaillou. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons une proposition de loi visant à supprimer dix-sept organismes dits Théodule, contre vingt-sept figurant dans la rédaction initiale. Selon son auteur, Nathalie Goulet, leur « utilité ne semble pas avérée ».

Nous reconnaissons l'intérêt légitime d'une telle démarche, que nous ne pouvons que soutenir dans son principe, ainsi que l'implication de notre collègue en la matière. Toutefois, lors de premiers échanges avec l'intéressée, j'ai pu faire part de ma perplexité sur le contenu même du texte, notamment sur les critères retenus pour déterminer les comités concernés. Ce sentiment s'est renforcé au fur et à mesure des débats qui ont eu lieu en commission.

D'après l'exposé des motifs, les partisans du maintien de ces organismes devraient déployer une certaine « imagination » pour justifier leur position. Ils en ont fait preuve ! En témoignent les nombreux amendements, y compris ceux qu'a déposés M. le rapporteur.

En effet, l'ensemble des comités mentionnés étant d'emblée qualifiés d'« inutiles », cette proposition de loi est dominée par une vision partiale. Vous reconnaissez d'ailleurs, madame Goulet, vous être essentiellement appuyée sur le jaune budgétaire de cette année, texte annexe au projet de loi de finances, pour proposer la suppression de ces organismes sur le seul fondement de la tenue ou non de réunions. Pourtant, certaines de ces structures – nous vous l'avons dit – ne se réunissent que sur demande, lorsqu'un motif le justifie !

En analysant attentivement les vingt-sept comités figurant dans la rédaction initiale de la proposition de loi, il est apparu rapidement que la situation était bien plus complexe que celle qui est décrite dans l'exposé des motifs. Nous ne pouvons pas juger de l'utilité d'un organisme à partir du seul critère du nombre de réunions organisées et sans mise en regard avec l'objectif et les missions qui lui sont fixés. Prenons l'exemple de la suppression de la Commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires, que vous avez donné vous-même. Cette mesure a provoqué à juste titre des réactions, que vous avez su pleinement entendre.

Nous reconnaissons tous que l'évaluation, la clarification et la simplification administrative sont des chantiers indispensables pour garantir l'efficacité des politiques publiques. Pour ce faire, il est indispensable d'aborder la question de façon objective, avec une méthode et des critères plus précis. À ce titre, je salue le travail de M. le rapporteur, lequel, au fil des débats en commission, s'est efforcé avec pragmatisme, ouverture et rigueur d'introduire un peu de discernement – le terme a été employé – au sein des propositions formulées.

Sont désormais exclus du texte plusieurs organismes. Je n'en citerai que quelques-uns.

Sont ainsi concernés le Conseil national des opérations funéraires, indispensable pour légiférer sur un secteur sujet à de nombreuses attentes, la commission d'évaluation de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, grâce à une mobilisation assez forte en faveur de son maintien, la Commission nationale de la coopération décentralisée (CNCD), qui a pour mission de favoriser le dialogue entre l'État et les collectivités territoriales et qui se réunit très régulièrement, notamment pour évoquer les enjeux essentiels de notre diplomatie.

Malgré ces évolutions, la proposition de loi demeure insatisfaisante en l'état. Le rapporteur suggère d'ailleurs de nouvelles suppressions d'articles, remettant ainsi en cause l'abrogation des structures qui y sont visées. Comme vous l'avez évoqué, madame la sénatrice, de telles modifications réduiraient singulièrement l'ambition de ce texte.

Certains articles suscitent toujours des interrogations, car ils visent à abolir des structures dont le travail est reconnu, considéré comme crucial du fait de ses effets, notamment sur la mise en œuvre des décisions au sein des domaines concernés. Permettez-moi de prendre deux exemples.

D'une part, le Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire (CSESS) apporte une contribution majeure à la coconstruction des politiques publiques. Son maintien est demandé par l'ensemble des acteurs.

D'autre part, la suppression du comité du secret statistique au profit du Conseil national de l'information statistique revêt un faible intérêt dans la mesure où elle conduirait ce dernier à créer en son sein une sous-commission pour exercer les mêmes missions. Quel progrès !

Nous pourrions également prendre l'exemple d'autres structures : l'Observatoire national de la politique de la ville (ONPV), le Haut Conseil de l'éducation artistique et culturelle, la commission nationale consultative de prévention des violences lors des manifestations sportives… L'ensemble de ces organismes ont connu une forte mobilisation en leur faveur.

Cette proposition de loi est un peu dans l'air du temps : même si nous sommes loin de l'Argentine, nous entendons beaucoup parler de tronçonneuse… Malheureusement, le texte est bien éloigné de l'ambition initiale. Il ne répond pas à l'objectif partagé d'une simplification, pourtant nécessaire, des commissions et des instances consultatives.

En ce sens, lors de l'examen de ce texte en commission, nous avons proposé la création d'un groupe de travail transpartisan. Celui-ci permettrait de mener sur l'ensemble des 313 comités une étude plus méthodique, non partiale, et de faire preuve de discernement. Nous pourrions d'ailleurs nous appuyer sur les critères que vous avez évoqués, monsieur le ministre. En effet, ceux-ci pourraient tout à fait servir de fondement à notre travail afin de garantir l'objectivité de l'examen des contributions des différents comités.

Ce type de dispositif a déjà été mis en place par le Sénat, notamment dans le cadre de l'examen de la loi tendant à améliorer la lisibilité du droit par l'abrogation de lois obsolètes, proposée par la mission Balai (Bureau d'abrogation des lois anciennes inutiles).

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Christophe Chaillou. Dans la mesure où il est nécessaire d'œuvrer avec plus de rigueur, il ne nous semble pas possible d'acter aujourd'hui la suppression des comités Théodule concernés.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie.

M. Marc Laménie. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à sincèrement remercier devant vous l'auteur de cette proposition de loi, Nathalie Goulet, ainsi que les membres de son groupe de cette initiative visant les structures, comités, conseils et commissions « Théodule ».

La semaine dernière, presque à la même heure, nous votions le projet de loi de finances pour 2025 après un lourd investissement de la Haute Assemblée. Malheureusement, tout débat est financier ! En effet, après plusieurs décennies d'accroissement de la dette, nos finances publiques ont connu un déficit majeur en 2024. Si la situation est préoccupante depuis plusieurs années, elle est devenue alarmante ces derniers mois.

Le gouvernement actuel envisage de limiter le déficit de 2025 à 5,4 % du PIB, toujours assez loin de la cible des 3 %. Le groupe Les Indépendants considère qu'une telle réduction ne peut pas passer par l'augmentation des impôts : ils sont déjà à des niveaux records. Il convient surtout de ne pas pénaliser les entreprises, afin de soutenir l'emploi, ni les particuliers.

Nous n'avons d'autre choix que de nous attaquer à l'hydre que représente la dépense publique dans notre pays, dont je rappelle qu'elle s'est élevée à 56,7 % du PIB en 2024. À ceux qui réclament toujours plus d'argent public et qui répètent que l'État n'en fait jamais assez, il faut répondre que le périmètre de ce dernier est trop étendu : à vouloir trop faire, il fait mal !

Cette suractivité étatique, observée lors de l'examen du budget, favorise aussi la prolifération de normes et comités. À ce titre, mon collègue des Ardennes, le maire de Charleville-Mézières Boris Ravignon, a travaillé à la simplification du millefeuille administratif territorial, un sujet d'actualité. En effet, nous en mesurons la complexité dans nos trois fonctions publiques – fonction publique d'État, fonction publique territoriale, fonction publique hospitalière.

De nombreuses procédures ont été mises en place afin de freiner la création de ces structures, voire d'en réduire le nombre. La profusion soulève toutefois des interrogations bien légitimes.

La proposition de loi de Nathalie Goulet a pour objet de lutter à son échelle contre cette tendance à la dispersion. C'est l'ensemble des membres du groupe Union Centriste qui, avec elle, nous invitent à supprimer quelques-uns des plus de 300 comités existants. En s'attaquant à vingt-sept d'entre eux, c'est moins de 10 % du stock qui est visé. Par le travail en commission et plusieurs amendements de séance, nos collègues entendent encore diminuer le nombre de structures en question.

Le faible montant des rémunérations ayant cours dans ces organismes laisse espérer que le pantouflage y est moindre qu'au sein des agences étatiques, comme les autorités indépendantes, sur lesquelles nous nous sommes penchés au cours de l'examen du projet de loi de finances pour 2025 ; elles représentent plus de 2 millions d'équivalents temps plein (ETP), ce qui n'est pas sans incidence sur le budget national. Certes, le nombre de postes est moindre dans ces comités, mais ces structures n'en restent pas moins le symptôme de l'éparpillement de l'action de l'État.

Benjamin Constant considérait que « la multiplicité des lois flatte dans les législateurs deux penchants naturels, le besoin d'agir et le plaisir de se croire nécessaires ». Hélas ! Ce qui est vrai pour les lois l'est aussi pour les comités consultatifs. Évidemment, certains parmi ces derniers sont utiles et nous devons nous garder de les supprimer trop hâtivement. Sans une étude précise de leur fonctionnement et de leur activité réelle, nous ne pourrons pas traiter efficacement le problème.

Une commission d'enquête sur les missions des agences, opérateurs et organismes consultatifs de l'État verra bientôt le jour. Nous sommes convaincus que les frais de fonctionnement, le nombre d'ETP ou encore les locaux que les agents occupent méritent d'être évalués par la représentation nationale.

Nous souhaitons que ce texte ouvre la voie à un travail exhaustif de rationalisation portant non pas seulement sur les comités, mais plus largement sur l'action publique. Nous devons mieux évaluer les conséquences des lois que nous votons.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires soutient l'important objectif qui nous est aujourd'hui soumis au travers de cette proposition de loi. C'est pourquoi il la votera. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Pauline Martin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Pauline Martin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Les Républicains salue l'intention vertueuse qui sous-tend cette proposition de loi. Dans le prolongement du discours sur la simplification de l'action publique tenu depuis plus de deux décennies, celle-ci vise à amorcer concrètement la rationalisation administrative et la réduction des dépenses.

Il s'agit là des prémices d'un long cheminement qui consistera non pas à tout faire disparaître, mais bien à évaluer, tous ensemble, l'efficience de telle ou telle structure, son utilité et la pertinence de maintenir son indépendance, de l'intégrer à son ministère de référence ou, tout simplement, de procéder à des suppressions afin d'éviter les superpositions d'expertises. Cette exigence résulte de la mission de contrôle parlementaire que doit exercer le Sénat.

Le document annexé au projet de loi de finances, dit jaune budgétaire, dresse la liste exhaustive des comités, conseils, commissions, observatoires et autres. Il permet ainsi de mesurer leur périmètre. Par exemple, nous trouvons près de quarante de ces structures auprès du ministère de l'économie et des finances, qui compte lui-même plus de 130 000 agents !

Le phénomène est le même au sein du ministère de la culture autour duquel gravitent presque le même nombre d'organisations. Il est donc légitime et nécessaire d'interroger leur utilité. Je me pose des questions notamment sur la commission de la rémunération équitable, qui compte trente-neuf membres : même si ces derniers ne se sont jamais réunis ces trois dernières années, la structure rémunère, en 2023, sa présidente à hauteur de plusieurs milliers d'euros !

Il aurait été pertinent d'aller encore plus loin. Ainsi, au sein du ministère de la transition écologique, près de soixante autres conseils disposent de budgets parfois importants. Que dire également du secteur agricole, déjà saturé d'agences et d'opérateurs publics ?

L'objectif n'est pas de remettre en question la bonne foi ou la compétence des personnes impliquées dans ces structures, bien qu'il soit parfois tentant d'examiner de plus près les liens entre les nommés et ceux qui les nomment... Il s'agit plutôt de rendre plus lisible l'action publique.

Toute période de grande mouvance ou de crise financière est propice aux interrogations. Nous devons, tout particulièrement dans ce contexte, la transparence aux Français, bien trop souvent mis devant le fait accompli. L'exemplarité leur est d'autant plus due que des efforts financiers leur sont réclamés. Monsieur le ministre, vous pourrez compter sur le Sénat dans les prochains mois pour scruter la moindre piste d'économies au sein de l'État !

Au-delà du bien-fondé de ces comités et de leur financement, il conviendrait aussi de s'interroger sur l'usage qui est fait de leurs productions. Si le nouveau sport national consiste à censurer le Gouvernement, rappelons qu'il en existe un plus ancestral : la démultiplication des rapports, bien trop souvent amenés à caler les armoires ! (Sourires.)

Une piste d'amélioration serait d'imposer des obligations de résultat plutôt que de moyens, en demandant aux organismes des propositions concrètes dans leur domaine de compétences. Par exemple, le Conseil de normalisation des comptes publics (CNOCP) pourrait fournir des recommandations d'économies directement exploitables par le ministre de l'économie et des finances.

Enfin, je tiens à souligner l'intérêt de procéder à un mouvement de rationalisation et de fusion plutôt qu'à des suppressions brutales. Je salue à cet instant le travail de la commission des lois et du rapporteur, Hervé Reynaud, lequel a su défendre une approche bienveillante afin de favoriser une gestion plus cohérente et efficace des ressources publiques.

Si des ajustements seront naturellement proposés en séance, mes chers collègues, serions-nous grâce à Nathalie Goulet sur la voie de la guérison ? Aurions-nous trouvé tout du moins le vaccin permettant de nous immuniser contre l'inutilité ou le « doublonnage » des actions, à en faire pâlir les complotistes les plus aguerris ?

Ces mesures vont dans le bon sens et constituent un premier pas vers la rationalisation des services de l'État, même s'il est nécessaire de pousser la réflexion bien au-delà de la suppression d'une quinzaine d'instances, dont accouchera probablement ce texte. Gardons en tête que le besoin d'exister de certains de ces comités se concrétise parfois par l'art de complexifier le quotidien de l'État ou des collectivités !

Vous l'aurez compris, mes chers collègues, les membres du groupe Les Républicains sont plutôt favorables à cette proposition de loi. Ils ont d'ores et déjà fait savoir qu'ils souhaitaient aller plus loin en utilisant leur droit de tirage pour créer une commission d'enquête sur les missions des agences, opérateurs et organismes consultatifs de l'État. Il s'agit de faire preuve de discernement dans le registre, bien souvent relégué au second plan, de l'évaluation des politiques publiques, sans pour autant faire n'importe quoi.

Restons donc pragmatiques et réalistes, avançons ensemble sans dogmatisme et avec bon sens. Nous aurons l'occasion d'en reparler, monsieur le ministre ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Nadège Havet. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Nadège Havet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons la proposition de loi tendant à supprimer des structures, comités, conseils et commissions « Théodule » dont l'utilité ne semble pas avérée. Nous partageons pleinement votre ambition, madame Goulet.

Cette démarche empreinte de lucidité s'inscrit dans un travail plus général de simplification de l'action publique, auquel le groupe RDPI est attaché. À ce titre, il a pu apporter sa contribution lors de l'examen du projet de loi de simplification de la vie économique, texte toujours en pleine navette parlementaire, ou lors du vote de la loi du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique, dite Asap.

La commission des lois a adopté, à l'unanimité, le texte qui nous est soumis cet après-midi. Sur l'initiative du rapporteur, certaines instances figurant dans la rédaction initiale ont été préservées, tandis que cinq nouvelles ont intégré la liste. Il est prévu de fusionner certaines d'entre elles avec des organismes déjà existants sans pour autant que les articles contiennent explicitement une telle disposition. Il est d'ailleurs suggéré dans l'exposé des motifs que le Gouvernement confie cette mission de rapprochement « à un parlementaire ou à une inspection générale ». Nous soutenons là encore cette démarche.

En 2008, le nombre de commissions consultatives s'élevait à 799. Grâce aux politiques de rationalisation mises en œuvre depuis lors, celui-ci est passé à 317 en 2025. L'effort est notable, l'enjeu réel.

Les gouvernements successifs ont soutenu cette politique. Récemment, à l'occasion de sa déclaration de politique générale, l'ancien Premier ministre Gabriel Attal a proposé la règle suivante, que vous avez rappelée, madame Goulet : la suppression de « tous les organes, organismes, comités ou autres, qui ne se sont pas réunis ces douze derniers mois ». Cela dit, malgré une trajectoire de baisse, le nombre d'instances ayant diminué de plus de 20 % entre 2019 et 2022, le coût de ces structures a augmenté de près de 16 %, pour un peu moins de 30 millions d'euros.

S'il souscrit pleinement, une fois encore, à l'objectif défendu, le groupe Les Républicains s'interroge sur plusieurs points.

La commission nationale d'autorisation d'exercice pour la profession de conseiller en génétique, dont la suppression est prévue à l'article 4, a pour objectif d'émettre un avis lorsque le ressortissant d'un État membre de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen non titulaire d'un diplôme français souhaite exercer la profession de conseiller en génétique sur notre sol. Cette structure tend à éclairer la décision du préfet de région sur la délivrance de cette habilitation à exercer.

Face aux progrès thérapeutiques et à la recherche médicale, en particulier sur le génome humain dans le cadre des très lourdes pathologies, ne faudrait-il par conserver ce filtre d'expertise ? Nous sommes sensibles à vos arguments à l'origine de l'amendement de suppression de cet article, madame Lassarade.

Dans le domaine sanitaire toujours, l'article 6 a pour objet la suppression de la commission de suivi et de propositions de la convention visant à améliorer l'accès à l'emprunt et à l'assurance des personnes présentant un risque aggravé de santé. Si elle ne saurait être justifiée par des raisons budgétaires – l'organisme n'entraîne aucun coût spécifique, ne disposant ni d'un budget propre ni de fonctionnaires mis à disposition –, sa suppression pourrait laisser un vide dans la protection des droits des personnes malades. Un tel sujet a récemment été porté à notre attention dans cet hémicycle.

Monsieur Lemoyne, je voterai en faveur de votre amendement de suppression de l'article 9, car l'abrogation de la commission d'examen des pratiques commerciales est contestée. Cette dernière se prononce sur toute question relative aux pratiques commerciales lui étant soumise, afin de contribuer à la résolution de conflits entre acteurs commerciaux dans un univers qui se complexifie. Elle assure également un travail de clarification normative à l'égard de l'ensemble des parties prenantes à la chaîne de production et de distribution, notamment en matière agricole. Il ne faudrait pas supprimer ce qui permet de simplifier !

À l'article 10, le Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire serait supprimé au moment même où nous approchons du Forum mondial de l'économie sociale et solidaire (ESS), accueilli en 2025 à Bordeaux. Pourtant, son coût de fonctionnement est presque nul.

À l'article 13, la suppression du Conseil national de la médiation paraît précipitée : sa mise en place n'a eu lieu au mois de juin 2023. L'objectif de cette structure est de favoriser le recours aux procédures amiables.

Par conséquent, si certaines structures n'ont pas démontré leur importance, d'autres méritent selon nous une évaluation plus substantielle. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'irai droit au but : malgré des intentions louables, ce texte ne me satisfait pas vraiment, au moins sur la méthode.

À titre liminaire, je tiens à affirmer l'attachement de l'ensemble du groupe RDSE à la maîtrise des dépenses et à la simplification de l'action publique. Ces objectifs sont importants pour nos concitoyens, car ils contribuent à renforcer le consentement à l'impôt, la lisibilité et parfois l'efficacité de l'action de l'État et des collectivités.

Je remercie mes collègues Nathalie Goulet et Hervé Reynaud de leur travail. Leur investissement nous permet de débattre de ce sujet aujourd'hui. Surtout, cette discussion est un appel à l'humilité, car elle nous conduira sûrement à supprimer des instances dont le législateur est à l'origine.

Je souligne d'ailleurs l'attachement tout particulier de Christian Bilhac à cette démarche, lui qui se bat contre le recours excessif aux agences dans la gestion publique. Bien que je ne souscrive pas personnellement aux amendements qu'il a déposés, ses propositions, dont l'irrecevabilité n'était pas si évidente, auraient eu le mérite d'appeler au débat.

J'en viens à ce qui suscite ma réticence.

Concernant la méthode, je tiens à exprimer ma perplexité sur la suppression d'une telle série d'organismes sans que cela s'inscrive dans une réforme globale des secteurs concernés. En effet, il n'est proposé ni solution de remplacement ni restructuration de la consultation ou de la délibération dans les domaines en question.

Bien que j'entende les arguments selon lesquels ces organes ont été sélectionnés selon des critères d'activité ou de chevauchement de compétences, il me semble que de telles décisions doivent faire l'objet d'une concertation plus complète pour garantir leur acceptabilité. La démarche ne doit pas être de nature à créer des tensions au sein des publics concernés.

Je me satisfais toutefois que le travail du rapporteur ait permis d'identifier des instances qui méritent de perdurer. Un tel résultat doit justement nous appeler à la prudence.

En ce sens, je défendrai un amendement qui me semble important pour un domaine œuvrant au quotidien à la promotion d'une démarche vertueuse dans la production des richesses : l'économie sociale et solidaire. La suppression du CSESS me paraît très préjudiciable. J'aurai l'occasion d'en dire davantage an cours de nos débats.

Vous l'aurez compris, ce texte me paraît une invitation pertinente à la discussion sur un sujet prégnant. Nous devons apporter une réponse à la hauteur de la situation budgétaire de notre pays et digne de l'appel de nos concitoyens à la simplification.

Que nous adoptions les dispositions proposées ou non, j'appelle à ce que ce premier travail soit suivi d'une évaluation méticuleuse qui permettra d'identifier les conséquences de la suppression comme du maintien d'une structure. Cette démarche me semble une obligation, au moins pédagogique. Elle servira d'appui à une éventuelle décision du Parlement sur le sujet.

Malgré les réserves que je viens d'évoquer, chacun des membres du RDSE se décidera individuellement, conformément à la liberté de vote qui caractérise mon groupe depuis toujours.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub.

Mme Nadia Sollogoub. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi est un test. En effet, mes chers collègues, elle représente un premier jalon ou un premier signal. Il s'agit de démontrer notre volonté de simplifier concrètement l'action publique en la rationalisant – et nous sommes attendus !

Ce texte, sur l'initiative de Nathalie Goulet, doit être le témoin de notre volonté de rendre l'administration plus efficace, plus lisible et mieux adaptée aux défis contemporains. Certes, des efforts ont déjà été accomplis : le nombre d'instances auprès du Gouvernement considérées comme inactives ou redondantes a été divisé par deux au cours des dernières décennies. Reste que nous sommes encore bien loin du compte.

Prenons un exemple concret : la commission nationale consultative de prévention des violences lors des manifestations sportives. Il convient de s'interroger sur le caractère très occasionnel, pour ne pas dire inexistant, des réunions de cette structure. En effet, une seule s'est tenue depuis 2023 et aucune en 2022. Sans nullement remettre en question l'objectif visé, la lutte contre toutes formes de violences dans le domaine du sport étant une préoccupation majeure, il semble possible de mutualiser ces missions et de les confier à une entité identifiée de tous et dont la compétence dans le domaine est reconnue, telle que l'Agence nationale du sport. Nous formulons une proposition en ce sens.

Nous avons conscience que la lisibilité de l'action publique conditionne directement la confiance que nos concitoyens placent dans nos institutions. Pour cette raison, maintenir ce type de commissions qui n'ont pas d'activité est simplement contre-productif. Nous ajoutons de la complexité et de l'opacité là où l'État doit, au contraire, simplifier, rationaliser et clarifier. Il y va de la crédibilité de nos institutions !

Soyons honnêtes : cette prolifération est tout à fait déraisonnable et ne peut qu'attirer, à juste titre, des regards circonspects, voire ironiques, ne serait-ce qu'en raison de l'intitulé de certains de ces « hauts » comités… En simplifiant le paysage administratif, nous démontrerons que l'État est capable de se remettre en question et de faire le tri entre ce qui est nécessaire et ce qui ne l'est pas.

Même si la méthode doit être affinée, inspirons-nous des actions des maires. Jusque dans les plus petites communes, ces élus adoptent chaque année des budgets en équilibre et subventionnent les seules associations qui font preuve de leur vitalité, refusant de le faire pour celles qui sont en sommeil.

Certes, la fréquence des réunions ne vous semble pas un critère pertinent, mes chers collègues ; pour autant, aucun d'entre nous n'aurait l'idée de cotiser à un organisme qui ne se réunit pas ou de s'abonner à une revue qui ne publie rien ! Nous ne trouverons pas là de miraculeuses économies – soyons lucides là-dessus ! – ; néanmoins, il s'agit de réintroduire du bon sens dans cette architecture.

Je le répète, ce texte représente un test ou, pour reprendre les mots de Nathalie Goulet, une « proposition martyre ». En actant par son adoption notre volonté de supprimer des structures devenues obsolètes qui mobilisent encore des ressources, même modestes, et qui ralentissent les processus décisionnels, nous ouvrons la voie de la rationalisation. Ce premier pas est essentiel, car promis par tous depuis longtemps !

N'oublions pas que, au-delà du stock, nous devons aussi être vigilants au flux. En d'autres termes, il ne faut pas que nous alimentions nous-mêmes la création de ces instances dans les propositions et projets de lois que nous examinons.

Je salue le travail de la commission des lois et de son rapporteur, M. Hervé Reynaud. Cependant, faisant écho aux propos tenus précédemment par Nathalie Goulet, je suis tout de même réservée quant au raisonnement privilégiant la « démonstration de l'inutilité » d'une structure pour accepter sa suppression plutôt que la preuve de son utilité pour justifier son maintien.

J'en profite, ici, pour faire un clin d'œil à mon collègue rapporteur, élu depuis moins longtemps que moi, et lui dire que Nathalie Goulet a souvent le tort d'avoir raison avant tout le monde ! (Sourires.)

Je me souviens d'un texte, également martyr, dont elle fut l'auteur en 2020, tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales. À l'époque, cette proposition fut traitée comme marginale et considérée comme d'une efficacité non avérée. C'était pourtant mettre un pied dans la porte. Aujourd'hui, la lutte contre la fraude sociale est une cause majeure et unanimement partagée.

Mes chers collègues, il me semble important de rappeler que cette proposition de loi n'est que le premier jalon d'une réforme nécessaire et attendue, qui se doit d'être bien plus vaste.

Si ce texte se concentre sur certaines instances nationales, un effort similaire devra être engagé à l'échelon local. Plus globalement, il s'agira de poursuivre le travail des gouvernements successifs sur les agences et opérateurs de l'État.

La commission d'enquête qui passera au crible dans les prochains mois le millier d'opérateurs et d'agences qui dépendent de l'État devra faire des coupes courageuses pour supprimer les doublons et les branches mortes.

Rappelons également que plusieurs commissions et comités ne sont pas du ressort du législateur : leur nature réglementaire les place sous la seule responsabilité de l'exécutif, qui devra, lui aussi, amorcer un travail de rationalisation systématique.

Notons, enfin, que, dans un rapport de 2021 sur les relations entre l'État et ses opérateurs, la Cour des comptes appelait le Gouvernement à s'interroger régulièrement sur la justification du recours à ce mode de gestion du service public.

En conclusion, mes chers collègues, soutenir ce texte, c'est affirmer une volonté politique claire : celle de bâtir un État qui n'hésite pas à se réformer pour mieux fonctionner. Nous avons aujourd'hui la possibilité d'ouvrir la voie à une véritable réflexion de fond sur l'efficacité de l'action publique.

Les sénateurs du groupe Union Centriste soutiendront, bien évidemment, cette démarche et voteront en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Marc Laménie applaudit également.)