Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Bruno Retailleau, ministre d'État. Même avis : toutes les mesures favorisant la transparence et la traçabilité sont les bienvenues !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 194.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 12.

TITRE V

MESURES DE PROCÉDURE PÉNALE ET FACILITATION DE L'UTILISATION DES TECHNIQUES SPÉCIALES D'ENQUÊTE

Article 13

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° A (nouveau) Après l'article 242, il est inséré un article 242-1 ainsi rédigé :

« Art. 242-1. – Sans préjudice du titre XVI du livre IV, pour le jugement des crimes commis en bande organisée et du crime d'association de malfaiteurs en vue de commettre de tels crimes, les règles relatives à la composition et au fonctionnement de la cour d'assises sont fixées par l'article 698-6.

« Pour le jugement des accusés mineurs âgés de seize ans au moins, et hors le cas prévu à l'article L. 121-7 du code de la justice pénale des mineurs, les règles relatives à la composition et au fonctionnement de la cour d'assises des mineurs sont également fixées par ces dispositions, deux des assesseurs étant désignés parmi les juges des enfants du ressort de la cour d'appel, conformément à l'article L. 231-10 du même code. Les articles L. 513-2, L. 513-4 et L. 522-1 dudit code sont également applicables. » ;

1° L'article 706-26 est ainsi modifié :

a) Les mots : « le délit » sont remplacés par les mots : « les crimes et délits » ;

b) Le mot : « prévu » est remplacé par le mot : « prévus » ;

c) Les mots : « il a » sont remplacés par les mots : « ils ont » ;

d) (Supprimé)

(Supprimé)

3° L'article 712-2 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Parmi ces magistrats, certains sont spécialement désignés pour être en charge de l'application des peines prononcées en cas d'une condamnation pour une infraction mentionnée à l'article 706-73 ; ils sont les seuls autorisés à statuer sur la situation des personnes concernées. » ;

b) Au début du deuxième alinéa, les mots : « Ces magistrats » sont remplacés par les mots : « Les juges de l'application des peines ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 223, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 11 à 13

Remplacer ces alinéas par quatorze alinéas ainsi rédigés :

3° Après l'article 706-75-6, il est inséré un article 706-75-7 ainsi rédigé :

« Art. 706-75-7. – Par dérogation aux dispositions de l'article 712-10, les décisions concernant les personnes condamnées pour une infraction entrant dans le champ d'application des articles 706-73, à l'exception du 11° , du 11° bis et du 18° , 706-73-1, à l'exception du 11° , et 706-74, relèvent de la compétence du juge de l'application des peines du tribunal judiciaire de Paris, du tribunal de l'application des peines de Paris et de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Paris :

« 1° de manière exclusive, lorsque ces personnes ont été condamnées par les juridictions de jugement de Paris statuant en application de l'article 706-75, quel que soit le lieu de détention ou de résidence du condamné ;

« 2° de manière concurrente, lorsque ces personnes ont été condamnées dans des procédures pour lesquelles n'a pas été exercée la compétence prévue par l'article 706-75.

« Ces décisions sont prises après avis du juge de l'application des peines compétent en application de l'article 712-10.

« Pour l'exercice de leurs attributions, les magistrats des juridictions mentionnées au premier alinéa peuvent se déplacer sur l'ensemble du territoire national, sans préjudice de l'application des dispositions de l'article 706-71 sur l'utilisation de moyens de télécommunication.

« Le ministère public auprès des juridictions du premier degré de Paris compétentes en application du présent article est représenté par le procureur de la République anticriminalité organisée en personne ou par ses substituts. » ;

4° Après l'article 706-76-4, il est inséré un article 706-76-5 ainsi rédigé :

« Art. 706-76-5. – Par dérogation aux dispositions de l'article 712-10, les décisions concernant les personnes condamnées pour une infraction entrant dans le champ d'application des articles 706-73, à l'exception du 11° , du 11° bis et du 18° , 706-73-1, à l'exception du 11° , et 706-74, relèvent de la compétence du juge de l'application des peines du tribunal judiciaire mentionné à l'article 706-76 dans le ressort duquel est situé soit l'établissement pénitentiaire dans lequel le condamné est écroué, soit, si le condamné est libre, la résidence habituelle de celui-ci, ou, s'il n'a pas en France de résidence habituelle, du tribunal judiciaire ayant prononcé la condamnation :

« 1° de manière exclusive, lorsque ces personnes ont été condamnées par les juridictions de jugement statuant en application de l'article 706-76 ;

« 2° de manière concurrente, lorsque ces personnes ont été condamnées dans des procédures pour lesquelles n'a pas été exercée la compétence prévue par l'article 706-76.

« Il en va de même pour la détermination du tribunal de l'application des peines et de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel territorialement compétent.

« Ces décisions sont prises après avis du juge de l'application des peines compétent en application de l'article 712-10.

« Pour l'exercice de leurs attributions, les magistrats des juridictions mentionnées au premier alinéa peuvent se déplacer sur l'ensemble du territoire interrégional, sans préjudice de l'application des dispositions de l'article 706-71 sur l'utilisation de moyens de télécommunication. »

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure à la tribune, le parquet est spécialisé, mais il ne doit pas être le seul à l'être : le ministère de l'intérieur, le chef de file et les juges d'application des peines (JAP) doivent l'être également. Nous souhaitons prévoir des JAP spécialisés par région, afin qu'ils travaillent à 360 degrés, et non selon le statut des prévenus.

Une telle spécialisation serait très utile pour lutter contre le narcotrafic comme nous luttons contre le terrorisme.

Mme la présidente. L'amendement n° 253, présenté par Mme M. Jourda et M. Durain, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Remplacer la première occurrence du mot :

à

par les mots :

aux 1° à 6° et 12° à 15° de

La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 223.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Nous sommes d'accord pour spécialiser une chaîne pénale. Mais nous ne sommes pas d'accord sur les critères à retenir.

Nous estimons que la spécialisation ne peut exister pour l'ensemble du champ des infractions à la législation sur les stupéfiants, qui n'ont pas toutes le même degré de gravité. Nous souhaitons spécialiser les JAP sur les infractions qui présentent un certain degré de gravité. Tel est l'objet de cet amendement.

Le Gouvernement veut lier cette spécialisation au fait que les dossiers soient traités par les juridictions interrégionales spécialisées (Jirs). Mais celles-ci ne sont pas saisies parce que les infractions sont les plus graves ; elles le sont en fonction d'un critère de complexité de l'infraction. Les parquets locaux peuvent parfaitement traiter des dossiers plus graves que les Jirs.

Le critère de gravité est donc le plus pertinent pour apprécier la nécessité de la spécialisation, me semble-t-il. Par conséquent, il faut se référer à l'infraction elle-même et non à la juridiction saisie.

La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 223.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 253 ?

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Il s'agit là d'un point très important.

Avant tout, nous sommes d'accord avec la commission pour spécialiser les JAP, ce qui est positif.

Toutefois, si l'amendement de la commission est adopté, nous aurons un problème. En effet, ce qui compte, ce n'est pas l'infraction. C'est de disposer d'une juridiction spécialisée, avec un parquet spécialisé, qui puisse procéder à une application des peines spécialisée et, en même temps, de prévoir un régime de détention spécial pour les narcotrafiquants.

Si l'on ne prend en compte que l'infraction, il y aura partout en France, dans toutes les juridictions, dans tous les parquets, des JAP spécialisés, avec des cibles trop nombreuses, alors que l'objectif est bien de cibler les affaires les plus importantes. Nous voulons des JAP spécialisés selon la juridiction : il ne s'agit pas de les multiplier dans toutes les juridictions de France, car ce serait une énorme déperdition de moyens.

Nous évoquions la révolution carcérale. Ce que j'essaie de proposer est nouveau en France. Dans les processus d'isolement à l'italienne que nous construisons dans les prisons de haute sécurité, il s'agit de juger les personnes détenues non pas selon le type d'infraction qu'on leur reproche, mais selon leur dangerosité pour la Nation.

Il y a dans les prisons une forme de mixité. Certes, on distingue les personnes en détention provisoire, en attente de jugement, des détenus condamnés. Mais on trouve en détention provisoire des personnes plus dangereuses que certains détenus déjà condamnés.

Il suffit de penser à l'âge : un détenu octogénaire ou nonagénaire peut avoir été un grand criminel, mais il est aujourd'hui moins dangereux. Carlos, par exemple, à la centrale de Poissy, est moins dangereux pour la société que certains jeunes qui ont simplement fait des tentatives d'homicide et qui sont en détention provisoire dans nos maisons d'arrêt.

Nous souhaitons donc une spécialisation tout au long du parcours pénal. L'amendement de la commission, lui, tend à instaurer une spécialisation par infraction dans chacune des juridictions. C'est impossible, évidemment, et ce serait tout à fait inefficace.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous appelle donc à respecter un parallélisme avec la lutte contre le terrorisme. Du chef de filat à la détention, en passant par le parquet et par les JAP spécialisés, tout doit être organisé par juridiction, non par infraction.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Nous sommes au moins d'accord sur la spécialisation de toute la chaîne pénale, y compris des JAP, et sur le fait que c'est la gravité de l'infraction qui doit déclencher la saisine du juge spécialisé.

Toutefois, je persiste, ce n'est pas dans les Jirs que l'on trouve les infractions les plus graves. Mohamed Amra n'a pas été jugé par une Jirs, parce que l'infraction commise était grave, mais non complexe, alors que tel est le critère de saisie des Jirs.

J'ai conscience que ce débat est quelque peu technique, mais je persiste à dire que notre amendement est plus réaliste. Mes chers collègues, pour une fois, donnez raison à votre commission ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Pardonnez-moi de reprendre la parole, mais l'application des peines pour les narcotrafiquants mérite quelques minutes de débat.

L'exemple pris par Mme Jourda est révélateur. M. Amra n'était pas suivi par une Jirs, parce que l'infraction n'était pas complexe, dit-elle. Or, si notre disposition avait été en vigueur, M. Amra aurait été considéré comme quelqu'un de dangereux ayant commis des délits complexes ; en effet, il était impliqué dans une affaire à Lille, une à Marseille et une à Évreux, mais les services concernés ne se parlaient pas.

Avec un parquet spécialisé et avec de la coordination, comme il y aura un travail centralisé avec la police judiciaire, les futurs MM. Amra seront mieux suivis. D'ailleurs, ce détenu a pu se libérer dans des conditions très professionnelles. Ce n'était donc pas un petit délinquant, et nous l'avons très mal évalué.

J'y insiste, prévoir des JAP selon l'infraction ne serait pas conforme au parallélisme que nous essayons de respecter avec la lutte contre le terrorisme.

Mme la présidente. La parole est à M. Francis Szpiner, pour explication de vote.

M. Francis Szpiner. Je suis désolé de faire de la peine à mes collègues de la commission, mais, dès lors qu'il est question de JAP, nous parlons de personnes qui ont été condamnées.

Nous ne devons donc pas nous intéresser aux poursuites, mais à l'exécution de la peine. Et celle-ci sera détachée de la juridiction qui aura prononcé la condamnation, d'après les projets de la Chancellerie.

Carlos, que je connais bien, a changé régulièrement de prison pour des raisons de sécurité. Après la condamnation, la personne concernée est donc trimballée de juridiction en juridiction. Ce n'est pas le JAP de la maison de Clairvaux, par exemple, qui pourra prendre des décisions utiles, simplement parce qu'il aura eu le condamné pendant six mois dans sa juridiction.

Nous devons donc conserver des JAP spécialisés. La nature même de l'exécution de la peine fait que, d'habitude, on s'en tient au lieu d'exécution, mais que l'on ne conserve jamais longtemps les gens dangereux dans la même prison, pour éviter qu'ils n'acquièrent des complicités ou de mauvaises habitudes. Si ce n'est pas le juge d'application locale, ce qui serait dû au hasard des affectations, il faut bien un JAP centralisé à Paris.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 223.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 253 n'a plus d'objet.

Je mets aux voix l'article 13, modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, il est minuit. Si vous en êtes d'accord, je vous propose de prolonger la séance jusqu'à une heure du matin. (Murmures.)

Y a-t-il des observations ?…

Il en est ainsi décidé.

Article 14

I. – Le code pénal est ainsi modifié :

1° A (nouveau) L'article 132-78 est ainsi modifié :

a) Les deux premiers alinéas sont ainsi rédigés :

« La personne qui a tenté de commettre un crime ou un délit est, dans les cas prévus par la loi, exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction ou de mettre fin à sa préparation.

« Dans les cas prévus par la loi, la durée de la peine privative de liberté encourue par une personne ayant commis un crime ou un délit est réduite si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis de faire cesser la réalisation de l'infraction, d'éviter ou de limiter les dommages qu'elle a produits ou d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. » ;

b) Au troisième alinéa, les mots : « de l'alinéa précédent » sont remplacés par les mots : « du deuxième alinéa » ;

1° Après le même article 132-78, il est inséré un article 132-78-1 ainsi rédigé :

« Art. 132-78-1. – Le bénéfice d'une exemption ou d'une réduction de peine prévue au présent code est subordonné à la présence dans le dossier de la procédure du rapport mentionné à l'article 706-63-1 A du code de procédure pénale et de la convention prévue au cinquième alinéa de l'article 706-63-1 du même code, sauf si la personne a effectué des déclarations au cours de l'audience de jugement.

« Les modalités par lesquelles la juridiction se prononce sur la peine et fixe la durée maximale de l'emprisonnement encouru par le condamné pendant le délai de prescription de la peine sont définies au même article 706-63-1.

« Les personnes ayant bénéficié d'une réduction de peine en application du présent article peuvent bénéficier d'une libération conditionnelle lorsque la durée de la peine accomplie est au moins égale au tiers de la peine prononcée par la juridiction de jugement.

« La procédure prévue aux quatrième à septième alinéas est également applicable aux personnes ayant averti les autorités administratives ou judiciaires dans les conditions mentionnées aux articles 222-43 et 222-43-1. » ;

2° L'article 221-5-3 est ainsi rédigé :

« Art. 221-5-3. – Toute personne qui a tenté de commettre les crimes d'assassinat ou d'empoisonnement est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la mort de la victime.

« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis d'éviter la répétition de l'infraction ou d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. » ;

3° Après les mots : « faire cesser les agissements incriminés et d'identifier, le cas échéant, les autres coupables », la fin de la première phrase de l'article 222-43 est ainsi rédigée : « faire cesser la réalisation de l'infraction, d'éviter ou de limiter les dommages qu'elle a produits ou d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. » ;

4° L'article 222-43-1 est ainsi modifié :

a) (nouveau) Après les mots : « l'infraction », la fin est ainsi rédigée : « ou de mettre fin à sa préparation. » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice de l'une des infractions prévues par la présente section est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser la réalisation de l'infraction, de mettre fin à sa préparation, d'éviter ou de limiter les dommages qu'elle a produits ou d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. » ;

4° bis (nouveau) Après l'article 222-67, il est inséré un article 222-67-1 ainsi rédigé :

« Art. 222-67-1. – Toute personne qui a tenté de commettre les infractions prévues par la présente section est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter leur réalisation ou de mettre fin à leur préparation.

« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice de l'une des infractions prévues par la présente section est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser la réalisation de l'infraction, d'éviter ou de limiter les dommages qu'elle a produits ou d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. » ;

5° L'article 450-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La peine privative de liberté encourue par une personne ayant participé au groupement ou à l'entente définis au même article 450-1 est réduite de moitié si elle a, après l'engagement de poursuites, permis l'identification des autres participants. »

II. – Le titre XXI bis du livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° A (nouveau) L'intitulé est ainsi rédigé : « Des collaborateurs de justice » ;

1° Au début, sont ajoutés des articles 706-63-1 A à 706-63-1 D ainsi rédigés :

« Art. 706-63-1 A. – I. – Les personnes susceptibles de bénéficier d'une exemption ou d'une réduction de peine en application du code pénal et qui expriment, au cours de l'enquête ou de l'instruction, la volonté de collaborer avec la justice aux fins d'éviter la réalisation d'une infraction, de mettre fin à sa commission ou à sa préparation, d'éviter ou de limiter les dommages qu'elle a produits ou d'en identifier les auteurs ou complices peuvent se voir octroyer le statut de collaborateur de justice dans les conditions prévues au présent article.

« II. – Lorsqu'une personne mentionnée au I exprime sa volonté de collaborer avec la justice, le procureur de la République ou le juge d'instruction, après avis du procureur de la République, requiert un service figurant sur une liste fixée par décret en Conseil d'État, aux fins d'évaluer la personnalité et l'environnement de cette personne. Après réception de cette évaluation, le procureur de la République ou le juge d'instruction après avis du procureur de la République recueille les déclarations ou fait procéder à ce recueil par procès-verbal séparé lorsqu'il existe des raisons sérieuses de penser qu'elles sont déterminantes pour la manifestation de la vérité.

« Le procureur de la République ou le juge d'instruction procède à l'évaluation du caractère sincère, complet et déterminant des déclarations recueillies sur procès-verbal.

« Après avoir recueilli l'avis de la commission mentionnée à l'article 706-63-1, si le procureur de la République ou le juge d'instruction l'estime opportun au regard de la complexité ou de la gravité de l'affaire, il octroie à la personne concernée le statut de collaborateur de justice. Les procès-verbaux de déclaration et l'avis de la commission sont joints à la décision. Lorsque la commission a rendu un avis défavorable, le magistrat indique les éléments qui lui semblent justifier de passer outre cet avis.

« Les procès-verbaux de déclaration ne peuvent être versés en procédure.

« III. – Les personnes mentionnées au I du présent article disposent d'un délai de cent quatre-vingts jours pour communiquer toutes les informations utiles en leur possession.

« Leurs déclarations sont consignées dans un rapport établi par les officiers de police judiciaire sous le contrôle du juge d'instruction ou du procureur de la République. Les mesures de protection mentionnées à l'article 706-63-1 ne peuvent être accordées aux personnes qui n'ont pas communiqué toutes les informations dans le délai prescrit ; elles peuvent également être révoquées en cas de violation des engagements contenus dans la convention conclue en application de l'article 706-63-1 C.

« Lorsque la collaboration d'une personne avec la justice concerne l'une des infractions mentionnées à l'article 706-74-1, le recueil et la consignation des informations sont assurés par le procureur de la République national anti-criminalité organisée.

« Art. 706-63-1 B (nouveau). – I. – À titre exceptionnel et dans l'intérêt de la justice, lorsque les déclarations de la personne concernée sont d'une importance déterminante pour la manifestation de la vérité, notamment lorsqu'elles permettent l'identification d'un grand nombre d'autres auteurs ou de complices ou lorsqu'elles permettent de faire cesser ou d'éviter la commission ou la répétition d'une infraction d'une particulière gravité, le procureur de la République national anti-criminalité organisée, le procureur de la République près d'un des tribunaux judiciaires dont la compétence territoriale a été étendue au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel en application de l'article 706-75 ou le juge d'instruction appartenant à la formation spécialisée de l'instruction des tribunaux judiciaires précités peut octroyer à une personne ayant collaboré avec la justice une immunité de poursuites dans les conditions prévues au présent article.

« II. – Dans le cas où, après avoir recueilli les déclarations d'une personne entrant dans les prévisions du I de l'article 706-63-1 A et après avoir accompli les formalités prévues aux II et III du même article 706-63-1 A, le magistrat compétent envisage de lui proposer une immunité de poursuites, totale ou partielle, il requiert, au moins trente jours avant la conclusion de la convention mentionnée au III du présent article, l'avis de la commission mentionnée à l'article 706-63-1. Celle-ci se prononce dans un délai maximal de quatorze jours ; seules peuvent se voir accorder l'immunité de poursuites, les personnes dont le dossier a fait l'objet d'un avis favorable de la commission. Cette dernière peut, pour former son avis, saisir à nouveau le service mentionné au premier alinéa du II de l'article 706-63-1 A, qui se prononce alors dans le délai qu'elle fixe.

« III. – Lorsque la commission mentionnée à l'article 706-63-1 a donné un avis favorable à l'octroi d'une immunité de poursuites, le magistrat compétent rédige une convention qui comporte, outre les éléments mentionnés à l'article 706-63-1 C :

« 1° La liste précise des infractions commises pour lesquelles l'immunité est applicable ;

« 2° Les mesures de protection et de réinsertion accordées à la personne concernée et à ses proches ;

« 3° La liste des engagements auxquels la personne concernée est tenue et la durée de chacun de ces engagements ;

« 4° Le cas échéant, les conditions dans lesquelles l'immunité prend fin.

« IV. – Le délai de prescription de la peine encourue pour les infractions pour lesquelles une immunité a été accordée est réputé commencer à courir à la date de la conclusion de la convention mentionnée au III du présent article.

« Pendant la durée de prescription, s'il survient des éléments nouveaux faisant apparaître que la personne concernée a effectué des déclarations volontairement inexactes ou incomplètes, ou si elle commet une nouvelle infraction ou viole l'un des engagements pris dans le cadre de la convention qu'elle a conclue avec l'autorité judiciaire, l'immunité accordée prend fin de plein droit. La constatation de la fin de l'immunité est faite, sur réquisition du procureur de la République, par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris.

« V. – Lorsqu'une immunité de poursuites a été accordée en application du présent article, les déclarations du collaborateur de justice sur l'infraction concernée ne peuvent en aucun cas être invoquées contre lui dans une procédure juridictionnelle, de quelque nature qu'elle soit. L'immunité accordée en application du présent article est valable devant toutes les juridictions françaises sans limitation de durée, sauf lorsque le statut de collaborateur de justice est révoqué dans les conditions prévues au IV du présent article.

« Aucune immunité ne peut être accordée pour des infractions dont la commission n'aurait pas cessé ou débuté à la date de conclusion de la convention mentionnée au III du présent article.

« Art. 706-63-1 C (nouveau). – La personne bénéficiant d'une immunité de poursuites, d'une exemption ou d'une réduction de peine ou de mesures de protection et de réinsertion en application des articles 706-63-1 A, 706-63-1 B ou 706-63-1 s'engage par le biais d'une convention conclue avec le juge d'instruction ou avec le procureur de la République à respecter les règles de sécurité prescrites, à collaborer au bon déroulement de l'enquête, à garder secrètes les informations transmises à la justice, à s'abstenir de tout contact avec les autres auteurs ou complices de l'infraction et à indemniser les victimes, ainsi qu'à respecter toute autre mesure prévue par la convention.

« Lorsqu'elle est conclue en application de l'article 706-63-1 A, la convention comporte également la mention de l'exemption ou de la réduction de peine demandée par le juge d'instruction ou par le procureur de la République.

« Lorsqu'elle est saisie, et sauf décision spécialement motivée, la juridiction de jugement est tenue d'octroyer au collaborateur de justice le bénéfice des exemptions ou réductions de peine prévues par la convention. Elle fixe également la durée maximale de l'emprisonnement encouru par le condamné s'il survient, pendant le délai de prescription de la peine, des éléments nouveaux faisant apparaître qu'il a effectué des déclarations volontairement inexactes ou incomplètes, s'il commet une nouvelle infraction ou s'il viole l'un des engagements pris dans le cadre de la convention qu'elle a conclue avec l'autorité judiciaire. Dans l'une de ces hypothèses, le tribunal de l'application des peines peut, sur réquisitions du procureur de la République et par décision motivée rendue après un débat contradictoire, ordonner la mise à exécution, en tout ou partie, de l'emprisonnement prévu par la juridiction de jugement.

« Art. 706-63-1 D (nouveau). – Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement de déclarations recueillies dans les conditions prévues aux articles 706-63-1 A et 706-63-1 B. » ;

2° L'article 706-63-1 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est supprimé ;

a bis) (nouveau) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le fait de révéler qu'une personne a sollicité des mesures de protection ou de réinsertion en application du présent article ou que cette personne et, le cas échéant, ses proches bénéficient de telles mesures est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. » ;

b) Avant le dernier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les décisions octroyant, refusant ou révoquant des mesures de protection ou de réinsertion sont motivées et notifiées aux personnes faisant l'objet de telles mesures, au procureur de la République et, le cas échéant, au juge d'instruction. Le président de la chambre de l'instruction connaît des recours formés par le procureur de la République, la personne concernée ou, le cas échéant, le juge d'instruction contre ces décisions ; le débat a lieu et ce magistrat statue en audience de cabinet. Sa décision n'est pas publiée.

« En cas de nécessité, la commission nationale peut autoriser le collaborateur de justice à faire usage d'une identité d'emprunt ou à modifier son état civil à titre définitif lorsque cette dernière mesure apparaît indispensable au regard de la gravité de la menace encourue. Cette faculté s'applique également aux proches de la personne concernée. » ;

(nouveau) L'article 706-63-2 est ainsi rédigé :

« Art. 706-63-2. – Sur la requête du juge d'instruction ou du procureur de la République, la chambre de l'instruction peut ordonner, à tous les stades de la procédure, l'audition ou la comparution des collaborateurs de justice ou des personnes mentionnées au premier alinéa de l'article 706-63-1 dans des conditions de nature à préserver leur anonymat, y compris en bénéficiant du dispositif technique mentionné à l'article 706-61 ou de tout dispositif permettant d'altérer ou de transformer leur voix ou leur apparence physique. »