Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe UC.)

M. Pierre Ouzoulias. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il convient de remercier notre collègue Jean-François Rapin de nous permettre de débattre, au sein de cet hémicycle, du système des bourses de l’enseignement supérieur, à la suite de la publication du rapport d’information de Laurent Lafon sur l’accompagnement des étudiants.

La mission d’information, dont ce dernier avait été le rapporteur et votre serviteur le président, avait mis en évidence la complexité, le manque de progressivité et parfois l’inadéquation des aides apportées aux étudiants. La dégradation de leurs conditions de vie et d’étude, mise en lumière de façon dramatique au cours de la pandémie, rend d’autant plus indispensable une refonte complète de ce dispositif.

Madame la ministre, vous avez engagé ce processus et obtenu une augmentation très significative du volume des aides apportées aux étudiants. Un demi-milliard d’euros seront ainsi distribués, dès la rentrée prochaine, pour réévaluer le montant des bourses et corriger certaines inégalités d’attribution.

La seconde phase de ce vaste chantier de rénovation du système est en cours et la présente proposition de loi est l’occasion d’y contribuer, sous un angle original : elle vise à prendre en compte la situation des étudiants dont l’un des deux parents est en situation de handicap.

La proposition de loi de notre collègue Jean-François Rapin complète l’article L. 821-1 du code de l’éducation, qui prévoit que les conditions d’attribution des bourses sont déterminées par voie réglementaire. Notre rapporteure, Toine Bourrat, nous a finalement proposé d’ajouter un nouveau critère général dans la loi, dont les modalités d’application seront précisées par voie réglementaire.

Néanmoins, compte tenu des masses financières en jeu, nous devons nous demander si le Parlement ne devrait pas se saisir tous les ans, dans le cadre de la discussion budgétaire, du régime des bourses estudiantines. Il doit à tout le moins être informé sur ce sujet.

De même, il serait légitime que le Parlement votât, dans le même cadre, le montant des droits d’inscription dans les établissements de l’enseignement supérieur. Le Parlement traite indirectement de la contribution de vie étudiante et de campus en fixant son plafonnement dans la loi de finances. Il ne serait pas aberrant qu’il déterminât aussi le barème des droits d’inscription demandés aux étudiants. La présente incursion du législateur dans le domaine réglementaire appelle donc une réflexion plus large et plus profonde sur le rôle du Parlement dans la discussion du budget de l’enseignement supérieur.

En attendant, il n’est pas sans intérêt de s’interroger, par le biais du présent texte, sur la fonction et le statut des bourses. Le code de l’éducation, à son article L. 821-1, prévoit que la bourse est une « aide servie à l’étudiant sous condition de ressources afin de réduire les inégalités sociales ». La formule est vague et peu heureuse. Comme Laurent Lafon l’a montré dans son rapport d’information, la réussite pédagogique de l’étudiant ne peut être dissociée des conditions matérielles, psychiques et sanitaires dans lesquelles il effectue ses études.

La mission de l’État est alors de corriger matériellement ou financièrement les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur. En d’autres termes, il doit aider l’étudiant quand celui-ci est dans l’impossibilité de correctement se nourrir, se loger, se soigner, se déplacer pour s’instruire. Avec l’auteur de la présente proposition de loi, il convient de reconnaître que sa capacité à étudier peut être gravement affectée par l’assistance qu’il apporte à ses parents handicapés.

La bourse est une aide financière directe, efficace, si les étudiants peuvent accéder à des logements abordables, à des services des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) aisément disponibles et à des moyens de transport peu onéreux. Nous avons ensemble reconnu que ces impératifs étaient de plus en plus mal satisfaits dans les métropoles, dans lesquelles, pourtant, les demandes d’inscription augmentent.

Nous pensons, comme la Cour des comptes, qu’il est indispensable de réfléchir à une nouvelle organisation territoriale de l’offre d’études, afin de donner aux étudiants la possibilité d’étudier dans des établissements mieux répartis sur le territoire national. Il faut redire avec force que c’est dans les universités de taille humaine, installées dans des villes moyennes, que les étudiants ont globalement aujourd’hui les meilleures conditions de vie et d’études et que leur réussite est souvent la plus élevée.

La réforme des bourses doit donc être accompagnée d’un plan de développement et de renforcement du maillage universitaire national et des services de la vie étudiante. En attendant, nous voterons cette proposition de loi. (Applaudissements.)

Mme la présidente. Je mets aux voix, dans le texte de la commission, la proposition de loi visant à verser automatiquement une bourse d’études (échelon 7) aux étudiants dont au moins l’un des deux parents est porteur d’un handicap (dont le taux d’incapacité est supérieur à 80 %).

(La proposition de loi est adoptée.) – (Applaudissements.)

Mme la présidente. Je constate que la proposition de loi a été adoptée à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à tenir compte, dans l'attribution des bourses de l'enseignement supérieur, de la situation de l'étudiant, aidant d'un parent en situation de handicap
 

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Dossier législatif : proposition de loi visant à reconnaître et à soutenir les entrepreneurs français à l'étranger
Discussion générale (suite)

Reconnaître et soutenir les entrepreneurs français à l’étranger

Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe Les Républicains, de la proposition de loi visant à reconnaître et à soutenir les entrepreneurs français à l’étranger, présentée par Mme Évelyne Renaud-Garabedian, M. Jean-Pierre Bansard et plusieurs de leurs collègues (proposition n° 391, texte de la commission n° 632, rapport n° 631).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, auteur de la proposition de loi.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à reconnaître et à soutenir les entrepreneurs français à l'étranger
Article 1er

Mme Évelyne Renaud-Garabedian, auteur de la proposition de loi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le monde a changé. L’économie n’est plus la même qu’il y a cinquante ans, dix ans ou même un an.

La géographie s’est profondément transformée. Les distances ne sont plus un obstacle. La technologie, les échanges d’informations, les modes de production sont en évolution permanente.

Tous ces changements sont le fait d’hommes et de femmes vivant pleinement dans leur monde et dans leur siècle, et pour qui la mondialisation est non pas un concept, mais une réalité.

C’est le cas pour les 3,5 millions de Français qui vivent en dehors du territoire national et que nous représentons. Ils ne partent pas de France parce qu’il n’y aurait plus rien à y faire. Ils ne partent pas de France pour contourner le droit du travail, pour fuir le fisc ou, encore moins, parce qu’ils n’aiment plus leur pays.

Leur départ est lié, très souvent, à une rencontre amoureuse, à un voyage marquant, à une opportunité professionnelle à saisir ou à une expatriation de leur conjoint.

S’installer dans un pays dans lequel vous n’avez pas grandi vous conduit à vous poser un certain nombre de questions : que puis-je faire ? Quel est mon savoir-faire ? Quel est mon talent ? Quel est le tissu économique local ? Quelle activité pourrais-je y développer ?

Ce sont toutes ces interrogations qui poussent les Français à devoir inventer la raison de leur présence à l’étranger, à donner un sens à leur nouvelle vie, à oser, bref, à entreprendre.

Je parle ici du trentenaire, parti au Brésil, qui a rencontré sa femme à Rio de Janeiro et qui a décidé d’y rester pour ouvrir une boulangerie française.

Je parle de la guide de voyage, fascinée par les temples cambodgiens, qui se rend compte que personne n’est capable de faire visiter le pays à des francophones.

Je parle de l’aventurière arrivée en Afrique du Sud, qui a créé une entreprise de tourisme, devenue leader, et qui vend la destination France.

Je parle du cuisinier qui s’est installé en Chine et qui y fait découvrir la gastronomie française et nos produits du terroir.

Je parle de l’architecte formé dans les ateliers de Jean Nouvel, qui s’installe à l’étranger et qui développe les techniques architecturales françaises dans ses nouvelles réalisations.

Tous ces exemples nous montrent que ces entrepreneurs sont un atout précieux pour la France.

En effet, ils connaissent le tissu économique et les rouages administratifs mieux que personne et forment un réseau dont rêverait notre diplomatie. Ils se sentent profondément Français et sont connus comme tels dans leur pays de résidence, où ils sont particulièrement bien intégrés. Ils distribuent des produits et des services français ; ils emploient du personnel français. Ils deviennent les ambassadeurs du savoir-faire et du talent français, qui nous sont enviés dans le monde entier.

À une époque où nous nous questionnons en permanence sur la capacité de la France à rayonner économiquement, culturellement, diplomatiquement, où nous cherchons des solutions pour améliorer notre commerce extérieur, le levier que représentent ces entrepreneurs, les grands oubliés de la France – monsieur le ministre, je suis désolée de le dire –, doit impérativement être exploité.

C’est la raison pour laquelle il nous est apparu extrêmement urgent, à Jean-Pierre Bansard et à moi-même, de contribuer à faire prendre conscience au législateur, mais aussi aux pouvoirs publics et aux Français, de l’importance de ces entrepreneurs.

Ce texte est le fruit d’un travail profondément collectif. Les entrepreneurs locaux, les conseillers et les délégués des Français de l’étranger, la direction générale de CCI France International – le réseau des chambres de commerce et d’industrie françaises à l’international –, les conseillers du commerce extérieur de la France, notre ancienne collègue Jacky Deromedi, qui avait déjà rédigé une proposition de loi sur ce sujet,…

Mme Marie Mercier. Exactement !

Mme Évelyne Renaud-Garabedian. … les sénateurs Jean Hingray et Jean-Baptiste Lemoyne, respectivement auteur du rapport d’information relatif aux difficultés rencontrées par les PME et ETI françaises en matière de commerce extérieur et ancien ministre chargé de ces questions : tous ont enrichi notre réflexion de leurs retours d’expérience.

Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques, et Serge Babary, rapporteur de cette proposition de loi, président de la délégation sénatoriale aux entreprises, nous ont permis d’améliorer le dispositif lors de l’examen du texte en commission. Je les en remercie.

Enfin, Bruno Retailleau a su comprendre l’importance de cette proposition de loi. Sans lui, la présentation de ce texte n’aurait pas été possible.

Jean-Pierre Bansard et moi tenons à tous vous remercier.

La philosophie de notre proposition de loi est : définir, identifier, soutenir. Il s’agit de dire à nos entrepreneurs : nous vous connaissons et nous vous reconnaissons.

Jean-Pierre Bansard, fort de son expérience de créateur d’entreprises à l’international, voulait, avant tout et pour la première fois en droit, créer le statut d’entrepreneur français à l’étranger.

Toutes les entreprises, qui remplissent les conditions définies dans la proposition de loi, quel que soit leur secteur d’activité, leur forme juridique ou leur taille, pourront bénéficier de ce statut.

J’y insiste : cette proposition de loi s’applique exclusivement aux entrepreneurs français qui dirigent ou qui contrôlent leur entreprise de droit local à l’étranger et qui ne disposent d’aucun lien capitalistique avec la France. Elle ne concerne pas les filiales de grandes entreprises françaises installées à l’étranger et qui profitent de tous les outils financiers mis à leur disposition par l’État.

Mais donner une définition de ces entrepreneurs ne suffit pas. Il faut ensuite les recenser et mettre à la disposition de ceux qui le souhaitent des outils d’accompagnement : un label, gage de l’excellence française, et un répertoire, qui est un dispositif marketing.

Dans un premier temps, un comité sera chargé dans chaque pays d’identifier les entrepreneurs et de mettre en place les outils. Ses membres devront connaître le tissu économique local, la réalité entrepreneuriale, la communauté française et le pays de résidence.

La proposition de loi étant suffisamment large, elle rend possibles une adaptation à chaque situation locale et l’inclusion des membres des chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger, des conseillers du commerce extérieur de la France, des conseillers et des délégués des Français de l’étranger.

Pour autant, il ne s’agit pas de donner à ces comités d’identification un pouvoir arbitraire, puisqu’ils sont de toute façon liés par la définition des entrepreneurs et de leurs activités.

Dans un second temps, les prescripteurs pourront s’emparer de cette proposition de loi pour développer d’autres outils d’accompagnement destinés à ces entrepreneurs.

Cette proposition de loi n’a qu’un seul objectif, ambitieux : marquer un tournant pour notre diplomatie économique. Pour cela, utilisons nos forces existantes dans le monde ; utilisons le réseau de nos entrepreneurs ; cessons d’ignorer cette diplomatie économique parallèle.

Monsieur le ministre, ces entrepreneurs sont une chance et une richesse pour la France. Je sais que vous partagez cette conviction, comme en témoigne le travail que nous avons pu accomplir avec votre cabinet.

Aussi, indépendamment des dispositions que nous voterons aujourd’hui, nous espérons pouvoir compter sur vous, monsieur le ministre, pour mener cette proposition de loi jusqu’à l’Assemblée nationale, car la réussite de ces entrepreneurs, c’est la réussite de la France. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE et RDPI, ainsi quau banc des commissions.)

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Bravo !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Serge Babary, rapporteur de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous discutons aujourd’hui des entrepreneurs français à l’étranger. Nous les connaissons peu, nous évaluons d’ailleurs difficilement leur nombre. Environ 2,5 millions de Français sont établis dans 169 pays du monde. Parmi eux, plus de 130 000 seraient des entrepreneurs.

Voilà plus de deux ans, la délégation sénatoriale aux entreprises avait déjà mis en évidence l’absence de définition juridique de l’entrepreneur français à l’étranger ou de statistiques sur le sujet. Nous entendons aujourd’hui y remédier et formuler, pour la première fois en droit, une définition de l’entrepreneur français à l’étranger.

Ces entrepreneurs, ce sont des Français partis en Amérique du Sud, qui y ont ouvert un restaurant, d’autres partis en Asie pour y vendre des vins français, d’autres encore qui ont créé une société de conseil ou d’informatique en Afrique ou ailleurs.

Ces entrepreneurs contribuent, directement ou indirectement, à notre commerce extérieur. Ils concourent aussi au rayonnement de la France sur le plan international, en incitant tous les jours des milliers de personnes dans le monde à se rendre en France, à mieux connaître la culture française ou à consommer des produits français. Toutefois, leur valeur ajoutée est très difficile à quantifier si on ne sait pas ce qu’est exactement un entrepreneur français à l’étranger.

Pour continuer à mettre en valeur la France comme ils le font, ils ont besoin d’être reconnus, identifiés, et de disposer d’outils pour se valoriser. Ils ne sont pas à la tête de grandes entreprises connues du grand public. Dans plus de 70 % des cas, ils dirigent de petites structures, dont le chiffre d’affaires est inférieur à 2 millions d’euros par an. Nous devons donc les distinguer et leur donner la visibilité dont ils ont besoin.

Faute de reconnaissance, certains entrepreneurs pourraient être découragés de revenir en France et d’y investir, par exemple en y installant une filiale de leur entreprise créée à l’étranger.

En outre, il existe un intérêt économique, commercial, pour la France : mieux connaître ces entrepreneurs, c’est nous donner les moyens de mieux structurer les réseaux et les communautés d’affaires à l’étranger, au service du développement international de nos entreprises. Or, pour cela, il faut les recenser et, pour les recenser, il faut leur donner une existence juridique.

Tel est l’objet de cette proposition de loi : définir, recenser, valoriser.

L’article 1er du texte définit ce qu’est un entrepreneur français à l’étranger. Pour être considéré comme tel, il doit être un ressortissant français inscrit au registre des Français établis hors de France. La commission a maintenu ce critère essentiel, qui permet de témoigner d’un attachement à la France ou d’un engagement minimal envers elle.

Parmi les critères économiques, la commission a souhaité prendre en compte la diversité des situations professionnelles. Initialement, étaient considérés comme entrepreneurs français à l’étranger les Français ayant créé une entreprise de droit local et détenant plus de 50 % de ses parts. Or un entrepreneur peut créer une entreprise sans en être l’actionnaire majoritaire ; il peut aussi diriger une entreprise sans l’avoir créée, notamment en cas de reprise d’une société créée par un autre Français. Enfin, les Français qui permettent à d’autres d’entreprendre, en investissant dans une entreprise qu’ils n’ont pas créée, doivent aussi être pris en compte.

C’est pourquoi la commission a souhaité élargir cette définition : elle a adopté un amendement visant à inclure les Français inscrits au registre qui ont créé une entreprise de droit local, ou qui en exercent la direction générale, ou qui assurent le contrôle effectif de son capital.

Cet amendement tend aussi à réduire les risques d’effet de seuil liés à la mention de la détention de 50 % du capital. Grâce à la notion d’entreprise, et non de société, les entrepreneurs individuels ou leurs équivalents sont désormais également pris en compte.

Après avoir défini ce qu’est un entrepreneur français à l’étranger, il faut procéder à un recensement : tel est l’objet de l’article 2. La commission a souhaité confier cette mission en priorité aux acteurs locaux que sont les chambres de commerce et d’industrie (CCI) et les conseillers du commerce extérieur, et non pas directement aux services économiques des ambassades.

La commission a privilégié une rédaction qui permet au comité d’identification de s’organiser avec souplesse, éventuellement en sollicitant l’appui d’autres acteurs – je pense évidemment aux services économiques des ambassades, qui doivent naturellement être tenus au courant du recensement.

Enfin, à l’article 3, la commission a conservé le principe d’un label, tout en affinant son dispositif. Elle a souhaité ainsi parvenir à un équilibre entre élargissement de la définition de l’entrepreneur français à l’étranger à l’article 1er et resserrement du label à l’article 3.

En effet, tous les entrepreneurs n’ont pas la même valeur ajoutée pour la France. La commission a donc adopté un amendement visant à ne pas rendre automatique l’octroi de ce label et à conditionner sa délivrance à une activité professionnelle contribuant à la promotion d’un savoir-faire français, à la distribution de biens ou de services français ou encore au rayonnement international de la France.

Ces critères qualitatifs seront appréciés par le comité chargé du recensement. L’objectif est non pas de créer de nouvelles complexités, de nouvelles contraintes, mais encore une fois de laisser les acteurs les plus connaisseurs des économies locales s’organiser. Je leur fais confiance pour être attentifs à la préservation de la marque France.

Pour le nom du label, la commission a également souhaité privilégier la concertation entre les acteurs afin d’aboutir à un nom que tous puissent s’approprier. Elle a donc décidé de ne pas faire figurer le nom du label dans la proposition de loi, tout en étant assurée que le réseau des chambres de commerce et d’industrie et les conseillers du commerce extérieur de la France, très enthousiastes sur ce dossier, feront part de leurs propositions.

Enfin, la commission a adopté un amendement visant à conserver le principe d’un répertoire regroupant les noms des bénéficiaires du label, en supprimant la mention de son caractère unique, afin qu’il puisse être mis en œuvre dans chaque pays.

Tels sont, mes chers collègues, les éléments que je souhaitais porter à votre connaissance. Vous l’aurez compris, mon objectif est de créer un cadre qui donne l’impulsion nécessaire à une meilleure connaissance et reconnaissance des personnes qui contribuent à la valorisation de la France dans le monde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur, de lattractivité et des Français de létranger. Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nos entrepreneurs français à l’étranger sont d’importants acteurs de notre rayonnement à l’international et de notre influence économique. Ils participent activement à la diffusion et à la promotion des produits et savoir-faire français.

Dans presque chacun des trente-cinq pays que j’ai visités depuis mon entrée au Gouvernement, il y a bientôt onze mois, j’ai rencontré des entrepreneurs français et j’ai pu mesurer leur contribution aux succès de notre pays. Ils méritent notre reconnaissance.

Je sais aussi que, par les travaux que vous avez consacrés au présent texte, notamment grâce aux interventions des sénateurs des Français de l’étranger, la chambre haute les connaît désormais mieux. Le Gouvernement accueille donc avec bienveillance l’esprit de cette proposition de loi.

À cet égard, je tiens à remercier Mme Évelyne Renaud-Garabedian, qui est à l’origine de cette proposition de loi, et M. Serge Babary, président de la délégation sénatoriale aux entreprises, qui en est le rapporteur.

Directement ou indirectement, les entrepreneurs français de l’étranger soutiennent notre balance commerciale, que ce soit en maintenant un lien fort avec les entreprises françaises qui les fournissent ou en valorisant les produits français. Ils contribuent ainsi à l’image et à l’attractivité de notre pays.

Certains d’entre eux jouent ce rôle par leurs mandats de conseillers du commerce extérieur de la France ou d’adhérents de nos chambres de commerce et d’industrie françaises à l’international.

Je le répète : le Gouvernement se réjouit de l’esprit qui anime le présent texte et salue son caractère largement transpartisan. Cette proposition de loi rejoint d’ailleurs celle que vos collègues députés des Français de l’étranger Anne Genetet et Stéphane Vojetta ont déposée à l’Assemblée nationale le 21 mars dernier, « visant à la reconnaissance des entrepreneurs français à l’étranger ».

Madame Renaud-Garabedian, comme Mme Genetet et M. Vojetta, vous proposez d’identifier ces entrepreneurs, de définir des critères d’éligibilité et de créer un label afin de les valoriser.

Le sujet est évidemment complexe. S’il est important pour le Gouvernement de témoigner sa reconnaissance aux entrepreneurs français de l’étranger et de saluer leur grande contribution au rayonnement de la France, l’exercice peut se révéler délicat, reconnaissons-le. En effet, on ne saurait créer un dispositif risquant d’aboutir, à terme, à une confusion entre les entreprises de droit étranger et les entreprises françaises, soumises, elles, au cadre juridique et fiscal national.

Je sais que la complexité n’effraie pas le législateur : il prend même parfois plaisir à s’y attaquer pour mieux la dompter ensuite, fort de son appréhension fine des spécificités locales ou, en l’occurrence, nationales. (M. le rapporteur acquiesce.)

Nous souhaitons bien entendu valoriser les entrepreneurs français à l’étranger et mieux les identifier en élaborant une définition utile de leur statut ; mais nous n’oublions pas non plus les complexités qu’une telle législation peut soulever, qu’il s’agisse de dirigeants ou de détenteurs d’entreprises relevant d’un autre droit que le droit français. Là est, finalement, l’équilibre à trouver.

Le Gouvernement veut soutenir et accompagner les entrepreneurs français à l’étranger. À cette fin, il a d’ailleurs pris diverses mesures en leur faveur au cours des dernières années. Il les a ainsi aidés en tant que personnes tout au long de la crise sanitaire, via les aides sociales consulaires. Par ailleurs, nos ambassades et nos consulats les ont aidés en tant qu’entrepreneurs à accomplir les démarches pour bénéficier des plans de soutien dans les différents pays où ils étaient implantés.

De surcroît, le Gouvernement a répondu au souhait de nos entrepreneurs français de l’étranger de pouvoir disposer de jeunes volontaires internationaux en entreprise (VIE), en soutien aux équipes locales. Ainsi, avec l’appui de mes services, nous avons lancé en 2021 une expérimentation de portage de VIE par la structure française EFE International, créée par CCI France international et le Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France (CNCCEF).

Une fois recrutés par EFE International, les VIE peuvent être envoyés en mission auprès des entrepreneurs français de l’étranger, indépendamment de leur statut relevant du droit étranger. Au total, vingt-six VIE sont ainsi partis à l’étranger via EFE International.

J’ajoute que les entrepreneurs français à l’étranger ont accès à certains dispositifs d’aide au développement ciblés sur le secteur privé. Je pense notamment à l’initiative Choose Africa, menée par Proparco, qui, dès l’origine, avait vocation à bénéficier aux entreprises fondées par des entrepreneurs français à l’étranger.

Le Gouvernement est très attaché à la valorisation des entrepreneurs français à l’étranger. À cet égard, je remercie les parlementaires de s’être saisis de la question, en particulier Mme Renaud-Garabedian, MM. Bansard et Babary. Ils ont, ensemble, rédigé un texte qui cible les entrepreneurs français à l’étranger ayant un lien économique suffisant avec la France, afin de pouvoir les recenser et les labelliser.

Le Gouvernement accueille avec enthousiasme cette initiative parlementaire. Il s’en remettra néanmoins à la sagesse de la Haute Assemblée, en rappelant que la création par la loi d’un label qui repose sur un critère de nationalité pose question au regard du droit de l’Union européenne.

Il existe en effet un risque non négligeable de non-conformité de ce label, dès lors que l’État jouerait un rôle dans sa mise en œuvre : j’y reviendrai lors de la discussion des articles concernés. Dans sa jurisprudence, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a en effet considéré l’octroi d’un label de marque du terroir allemand à des produits fabriqués en Allemagne comme une restriction aux échanges intracommunautaires imputable aux autorités étatiques.

Le Gouvernement tient aussi à le souligner : il importe de respecter la liberté de choix des entrepreneurs français à l’étranger de bénéficier ou non de ce label. De même, on ne saurait procéder à un recensement automatique : un tel procédé contreviendrait à la protection de leurs données personnelles. Cela étant, je ne doute pas que, lors de nos échanges de ce jour comme dans la suite de la navette parlementaire, vous saurez tenir compte de ces difficultés juridiques pour compléter et enrichir encore cette proposition de loi.