M. Jean-Baptiste Lemoyne. Eh oui !
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Pour autant, ce pacte peut évidemment être amélioré, et le rôle des collectivités dans cet effort pourrait se manifester autrement. Je suis ouverte au dialogue et je compte sur la sagesse du Sénat pour formuler des propositions.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour la réplique.
Mme Cécile Cukierman. Madame la ministre, personne ne connaît ici les conditions dans lesquelles la discussion du projet de loi de finances s’achèvera. Je forme le vœu, à mon tour, que vous entendiez ce que dira le Sénat au sujet des collectivités territoriales.
Aujourd’hui, je le répète, nous avons besoin d’un véritable pacte de confiance, et certainement pas d’un 49.3 à l’encontre des territoires ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Martin. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Pascal Martin. Madame la ministre, lors du séminaire gouvernemental de rentrée, la Première ministre a fixé une feuille de route pour chaque ministre. Sur celle qui s’adresse à votre ministère, on peut lire que le Gouvernement entend « repenser et simplifier le millefeuille territorial par la mise en place du conseiller territorial ».
Chacun sait ici de quoi il est question : certains d’entre nous parce qu’ils étaient déjà sénateurs en 2010, lors de l’examen de la loi de réforme des collectivités territoriales, dite RCT, acte de naissance du conseiller territorial, d’autres – c’est mon cas –, parce qu’ils étaient alors élus locaux, donc concernés par cette réforme.
En 2022, le conseiller territorial que le Gouvernement souhaite ressusciter sera-t-il le même qu’en 2010 ? C’est très peu probable, car, entre-temps, la réforme de la carte régionale est passée par là. Fut-elle bonne ou mauvaise ? Alsaciens et Normands n’apporteraient sans doute pas la même réponse à cette question,…
Mme Nathalie Goulet. C’est sûr !
M. Pascal Martin. … laquelle ne se pose plus véritablement : nous devons seulement faire avec.
Or la taille des régions a son importance dans la mise en place d’un élu ayant vocation à siéger à la fois au conseil départemental et au conseil régional.
La région Normandie, qui m’est particulièrement chère, ne compte pas moins de 262 élus départementaux. Avec le conseiller territorial version 2023, ces 262 élus constitueraient-ils le nouvel effectif du conseil régional, qui n’a aujourd’hui que 102 membres ? Ce sont des questions de cet ordre qui se posent aujourd’hui lorsque l’on évoque le conseiller territorial, et je n’aborde même pas le sujet essentiel du mode de scrutin.
Mes questions sont donc simples, madame la ministre. À quoi ressemblerait concrètement le conseiller territorial que vous appelez de vos vœux ? À quelle échéance envisagez-vous une telle réforme ? Enfin, la Première ministre évoque l’idée de « simplifier le millefeuille territorial ». Ce nouveau conseiller territorial annonce-t-il la disparition à terme d’un niveau de collectivité, comme certains le craignaient en 2010 ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Pascal Martin, vous m’interrogez sur le conseiller territorial.
J’ai malheureusement participé à la fin du projet mis en place durant le mandat de Nicolas Sarkozy. Sans revenir trop longuement sur l’histoire de cette réforme, il est vrai que le Président de la République l’a retenue comme l’un des leviers en vue d’une meilleure organisation territoriale, ainsi que d’une meilleure lisibilité des interlocuteurs de nos concitoyens au sein des assemblées.
Votre question contient presque une partie de sa réponse : vous admettez avec moi que les évolutions territoriales que l’on connaît depuis 2014 ont considérablement modifié le paysage institutionnel de notre pays.
Il me semble nécessaire, en conservant le principe d’un conseiller unique partagé entre le département et la région, de réévaluer le format de conseiller l’aune de cette nouvelle donne. Nous n’aurons pas le choix. Cette question sera le sujet des concertations qui sont annoncées pour 2023 et dont l’organisation et le calendrier seront précisés prochainement.
Rassurez-vous : si votre crainte porte sur l’avenir des conseillers départementaux, le conseiller territorial ne marquera pas la fin des départements. Notre ambition est au contraire de permettre au territoire de recevoir de meilleurs services publics de la part des collectivités départementales et régionales et aux élus d’être des liens mieux identifiés par leurs concitoyens.
Notre projet fera l’objet de réflexions et de discussions avec les élus, et je ne doute pas que le Sénat aura à cœur de participer à cette mission. Là encore, je compte sur vos propositions.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier.
M. Stéphane Ravier. Madame la ministre, pour les collectivités territoriales, la crise n’est pas une surprise. Elles subissent les erreurs des gouvernements dans la politique énergétique, leur soumission aux diktats de l’Union européenne et leur incapacité à miser sur une décentralisation effective.
Arrêt programmé des centrales nucléaires, obligation pour EDF de racheter plus cher l’électricité qu’elle a vendue, sanctions contre la Russie mettant en difficulté les ménages français : à la roulette de l’idéologie, c’est le Gouvernement qui joue et les collectivités qui perdent et qui paient.
Les maires ne font plus de choix ; ils sont contraints en tout et cherchent des solutions de sauve-qui-peut. Ils ne veulent pas augmenter les impôts et sont dès lors obligés de geler leurs investissements et de réduire leurs dépenses de fonctionnement.
Dans les Bouches-du-Rhône, on ferme les piscines à Cabriès ; à Salon-de-Provence, les bassins extérieurs, ainsi que les serres municipales et le musée pour l’hiver. Le choix est fait d’éteindre l’éclairage public au cœur de la nuit dans de nombreuses communes ; c’est un blackout communal contraint, avant qu’il ne soit subi et soudain.
À Sénas, les crèches, la gestion des espaces vert et les cantines sont en régie municipale, et l’on réfléchit à ne pas conserver la totalité du personnel. Les autres échelons de collectivités étant aussi touchés, les communes ne peuvent plus compter sur leur concours. Par exemple, en Provence-Alpes-Côte d’Azur, il n’y a plus assez d’aides de la région pour financer des équipements et des constructions, car la facture du chauffage des lycées est passée de 17 millions d’euros à 100 millions d’euros.
Les solutions se trouveront dans une décentralisation de la fiscalité et dans un retour du consentement à l’impôt par la démocratie de proximité. Cette crise est un révélateur de la traversée du désert des collectivités depuis des années, comme la crise du covid-19 a mis à nu un hôpital rongé par l’austérité unilatérale.
Je n’ai rien entendu dans vos propos, madame la ministre, qui annoncerait une prise de conscience de l’État : rien sur le retour à une souveraineté nationale qui protège, rien sur une baisse des coûteuses et inutiles dépenses publiques de l’État.
Aussi, quelle est votre stratégie à moyen terme pour permettre l’autonomie fiscale des collectivités et pour sauver les services de proximité par une véritable décentralisation ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, de nombreuses avancées prouvent que, si des difficultés se font en effet jour, des réponses ont été apportées par le Gouvernement. Par exemple, notre majorité a augmenté la DGF de 320 millions d’euros – du jamais vu depuis treize ans, j’y insiste. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je pourrais également évoquer les différents mécanismes de soutien face à l’inflation, l’amélioration du dispositif de compensation de la CVAE, d’ailleurs à la demande des associations d’élus, ou encore le renforcement de la dotation de biodiversité.
Toutes les collectivités seront éligibles à l’amortisseur électricité annoncé par la Première ministre, et 1 milliard d’euros seront pris en charge par l’État à ce titre. Les collectivités les plus fragiles pourront bénéficier du filet de sécurité sur leurs dépenses d’énergie, représentant une aide de 1,5 milliard d’euros assumée par l’État, en plus des 430 millions d’euros de 2022.
Enfin, les marges préservées devront permettre aux collectivités d’investir. Là aussi, l’État est présent à leurs côtés avec une dotation classique de 2 milliards d’euros pour les investissements, qui est doublée grâce aux 2 milliards d’euros du fonds vert.
Quant au nouvel acte de décentralisation, le Président de la République a fixé son cap le 10 octobre dernier. Sa volonté est claire : allier compétences, moyens et responsabilités.
Le format et le calendrier des réflexions et de la nécessaire concertation seront précisés. Un cadre existe déjà pour échanger sur les sujets structurants de notre action commune, à savoir le Conseil national de la refondation (CNR). Ce rôle sera également assumé par la commission transpartisane sur les institutions, annoncée par le Président de la République.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux.
M. Jean-Yves Roux. Madame la ministre, beaucoup d’entre nous connaissent l’adage : « Là où l’on trouve de grands pouvoirs, on trouve de grandes responsabilités ». L’inverse est-il vrai ? Là où se trouvent de grandes responsabilités, trouve-t-on de grands pouvoirs ?
L’adaptation au changement climatique et la sécurisation des populations face à ces risques répétés et mortifères constituent l’un des plus grands défis auxquels nos collectivités devront faire face ensemble.
Dans ce contexte, les communautés de communes rurales et de montagne qui disposent de nombreux linéaires d’eau susceptibles de déborder ont, depuis le 1er janvier 2018, la grande responsabilité de la prévention des inondations en exerçant la compétence de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi).
Ces établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) sont, comme toutes les collectivités locales, touchés de plein fouet par l’inflation. Ils prennent en charge l’augmentation du point d’indice de nos fonctionnaires et font face à des factures énergétiques salées.
Or les plus petites d’entre elles ne disposent pas d’une surface financière suffisante pour assumer pleinement la responsabilité de la compétence Gemapi, alors que les investissements nécessaires sont immenses et croissants. La taxe Gemapi, instaurée par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite Maptam, repose sur ces seules collectivités, quand l’ensemble du bassin bénéficie de l’entretien des cours d’eau en amont.
Madame la ministre, l’entretien nécessaire des ouvrages et la sécurisation des personnes et des biens passent aujourd’hui au second plan, faute de capacités d’investissement de ces EPCI. Pis encore, le risque est aujourd’hui certainement minoré.
Rappelons que l’article 56 de la loi Maptam prévoit le transfert dès 2024 de l’entretien des ouvrages de prévention des inondations aux autorités « gemapiennes ».
Le rapport de la Cour des comptes sur les finances locales et la situation financière des intercommunalités du 26 octobre dernier est éclairant. Il promeut une meilleure répartition des ressources entre les collectivités, notamment au travers d’un renforcement de la péréquation horizontale.
La loi 3DS, a ouvert le champ de la différenciation territoriale. Il est temps d’y ajouter celui de la solidarité.
Madame la ministre, quand allez-vous proposer une réforme du financement du risque d’inondation lié aux cours d’eau prévoyant un véritable partage de la responsabilité ? Comptez-vous repousser le transfert de responsabilité prévu pour 2024 par la loi Maptam ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, depuis 2018, les EPCI à fiscalité propre exercent la compétence Gemapi et doivent, à ce titre, gérer les ouvrages de protection contre les inondations.
Dans une période transitoire, qui doit donner aux acteurs le temps de s’organiser, l’État gère certains ouvrages jusqu’en 2024. Le transfert prévu représentera indéniablement un investissement important pour les collectivités, mais plusieurs outils financiers sont déployés pour accompagner ces dernières.
Ainsi, le fonds de prévention des risques naturels majeurs appuie jusqu’en 2027 les études et les travaux sur les anciennes digues de l’État. La taxe Gemapi permet en outre de prélever jusqu’à 40 euros par habitant.
Ensuite, 2 milliards d’euros sont disponibles au titre des financements des agences de l’eau et du dispositif Aqua Prêt, géré par la Caisse des dépôts.
Enfin, la loi 3DS rend possible une expérimentation destinée à mieux associer les établissements publics territoriaux de bassin à cette politique par des financements dédiés ; elle permet en outre aux EPCI de se regrouper dans des structures dédiées, afin d’atteindre la bonne échelle de gestion hydrographique.
L’État accompagne donc les collectivités dans ce transfert de compétence. Les moyens et les capacités financières ouvertes à cet effet sont importants, tout comme les leviers de gouvernance.
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Madame la ministre, conformément à l’article 24 de la Constitution, nous sommes les représentants des collectivités territoriales.
Aussi, soucieux de respecter la Constitution, je me fais l’écho de nos territoires, particulièrement de nos communes, et, en l’espèce, de celles de mon département. En effet, elles sont nombreuses à avoir récemment délibéré sur les conséquences de la crise financière et économique, qui fragilise leur budget, et je partage bien évidemment leurs inquiétudes.
Je me propose de vous présenter quelques-unes de leurs revendications, qui vous paraîtront peut-être mineures, mais qui sont importantes, dans l’espoir que vous les entendiez et que vous leur apportiez des solutions.
Elles demandent ainsi de repousser après le vote du budget primitif la date limite de candidature à la DETR et à la DSIL. Cela permettrait aux communes et aux intercommunalités de disposer de plus de temps pour échanger avec les services de l’État et, d’une certaine manière, pour appréhender l’ensemble des projets éligibles. Je souhaite avoir votre avis sur ce sujet.
Ces communes réclament également, et je souscris pleinement à cette requête, l’instauration d’une commission d’élus pour la DSIL, calquée sur celle qui existe pour la DETR. Pouvez-vous faire droit à cette demande ?
Quant au fonds vert, on est tenté de dire, en lisant la présentation de ce dispositif : « Ne tirez pas sur le pianiste, il fait de son mieux » (Sourires.), mais le fonctionnement de ce fonds suscite des interrogations. L’enveloppe de 1,5 milliard d’euros a-t-elle été constituée pour une période de plusieurs années ou s’agit-il d’un montant annuel ? Peut-on espérer que ce fonds soit fléché vers les contrats de transition écologique et vers les projets liés à l’eau et à l’assainissement ?
Enfin, nos communes cherchent à comprendre le changement de calcul de la DSR. Naguère encore, on tenait compte du nombre de kilomètres de voirie pour la déterminer, mais ce n’est plus le cas. Pourquoi ?
Voilà des questions claires et pragmatiques. J’attends des réponses du même calibre ! (M. Franck Menonville applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Rémy Pointereau, votre intervention comporte beaucoup de questions. Je vais essayer d’y répondre au mieux, dans le temps qui m’est imparti.
Je suis défavorable à l’institution d’une commission pour la DSIL calquée sur le modèle de celle de la DETR. Contrairement à cette dernière, dont la gouvernance est largement décentralisée, la DSIL finance des priorités nationales. Décentraliser la gouvernance de cette dotation conduirait donc à diluer la cohérence et l’efficacité des politiques publiques sous-jacentes.
Par ailleurs, depuis 2018, les efforts importants consentis par le Gouvernement pour améliorer la transparence de la DSIL ont largement renforcé la capacité du Parlement à assurer sa mission de contrôle.
Le calendrier de dépôt des candidatures pour obtenir une subvention au titre de la DETR relève de l’organisation locale. Les préfets sont les mieux à même d’adapter aux circonstances locales les procédures d’appel à projets, en lien avec les commissions DETR, qui sont consultées sur les règlements départementaux.
Quant au fonds vert, il bénéficiera d’une gestion souple, proche des territoires, sans appel à projets ni à manifestation d’intérêt. Les crédits seront délégués au préfet du département, les enveloppes seront fongibles et les financements orientés vers des projets locaux soutenus par les élus. Le Fonds pourra financer un certain nombre de politiques publiques, notamment la rénovation énergétique des bâtiments ou encore le renouvellement de l’éclairage public.
Il me semble que j’ai répondu à toutes vos interrogations, monsieur le sénateur.
M. Rémy Pointereau. Mais quid de la DSR ?
M. le président. Il faudra revenir, mon cher collègue, car le temps de parole de Mme la ministre déléguée est épuisé.
Mme Nathalie Goulet. Faites une question orale, monsieur Pointereau !
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville.
M. Franck Menonville. La flambée des prix de l’énergie inquiète beaucoup les élus locaux. Ces derniers me prennent chaque jour à témoin de leurs difficultés à respecter leur budget et à garantir le bon fonctionnement des services publics.
En effet, partout en France, depuis le début de la crise, les élus rivalisent d’ingéniosité pour trouver de nouvelles solutions leur permettant d’éviter d’augmenter les impôts tout en maintenant les investissements. Certains ont d’ores et déjà réduit l’éclairage public et les plages horaires d’ouverture des bâtiments communaux, immobilisé une partie de leur parc de véhicules destiné aux agents ou diminué certains services. Néanmoins, les solutions commencent à manquer, et nombre de collectivités vertueuses se retrouvent aujourd’hui dans une situation grave.
Voilà trois semaines, il a été annoncé un déblocage de 2,5 milliards d’euros au profit des collectivités. Toutefois, des questions demeurent quant à son application et à son articulation avec les dispositifs existants.
À titre d’exemple, dans le département dont je suis élu, pour la commune de Verdun, dont le marché de fournitures arrive à échéance le 31 décembre prochain, le prix du mégawattheure passerait, selon les dernières simulations, de 49 euros à 400 euros. L’augmentation de la facture énergétique qui en résulterait s’élèverait à plus de 3 millions d’euros.
Pour Bar-le-Duc et son agglomération, cela représenterait plus de 2 millions d’euros. Toutes les collectivités sont concernées, cela a été dit, et l’ensemble du bloc communal est fortement affecté. C’est intenable !
Les communes doivent fournir un service public de proximité. Elles ont également un rôle crucial en matière de développement économique, puisqu’elles assument plus de 70 % des investissements publics dans notre pays. Cette capacité d’investissement, si précieuse pour les entreprises de nos territoires, est aujourd’hui menacée.
Madame la ministre, pouvez-vous rassurer les élus et nous-mêmes, en précisant vos ambitions et votre calendrier en matière d’accompagnement des collectivités qui sont exclues de l’actuel bouclier tarifaire ?
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Franck Menonville. Je souhaite vivement que vos dispositifs soient simples d’accès.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Franck Menonville, vous m’interrogez sur le soutien de l’État face à la hausse des prix de l’énergie pour les collectivités qui ne bénéficient pas du bouclier tarifaire.
La hausse du tarif d’électricité pour les communes qui relèvent du tarif réglementé de vente – cela concerne celles dont le budget ne dépasse pas 2 millions d’euros et dont le personnel n’excède pas 10 agents – est plafonnée à 15 %.
Pour les autres, le Gouvernement instaure, au travers du PLF pour 2023, un amortisseur électricité. De quoi s’agira-t-il concrètement ? L’État prendra en charge la moitié de la facture des collectivités, sans condition de richesse, quand le tarif appliqué, hors accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh), sera supérieur à 325 euros par mégawattheure, jusqu’à un plafond de 800 euros par mégawattheure. Cela devrait résoudre, je pense, le problème de la collectivité que vous avez mentionnée, dont le tarif s’élevait à 400 euros.
Ensuite, pour les collectivités fragilisées par cette hausse, le filet de sécurité sera reconduit en 2023. Concrètement, si l’épargne brute de la collectivité se dégrade et si la hausse attendue des recettes fiscales ne permet pas d’absorber la hausse des dépenses d’énergies, l’État versera une compensation à la collectivité.
Le coût combiné de l’amortisseur et du filet est estimé à 2,5 milliards d’euros.
Enfin, la dotation globale de fonctionnement augmentera, pour la première fois depuis treize ans, ce qui maintiendra ou accroîtra les dotations de 95 % des communes.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Depuis mon élection au Sénat, j’ai pris toute la mesure de la place de notre chambre, représentante des territoires, au sein des institutions.
La situation des collectivités est au cœur de notre contrôle de l’action gouvernementale, que ce soit au travers de ce débat ou de la délégation aux collectivités territoriales, dont je salue la présidente Françoise Gatel, ou encore lors de l’étude de chaque proposition ou projet de loi.
Toutefois, madame la ministre, qu’en est-il de votre gouvernement, qui met souvent en avant la concertation et la coconstruction avec notre chambre, représentative des territoires ?
La loi 3DS, défendue par l’exécutif lors du précédent quinquennat, est si peu novatrice, particulièrement pour ce qui a trait à la démocratie participative, que le Gouvernement nous annonce, de nouveau, pour l’année prochaine – mais cette fois, c’est la bonne, promis-craché, pour de vrai ! –, une réelle refonte de la territorialisation administrative de notre pays.
Vous connaissez les demandes : ramener les compétences au plus près du terrain et réviser les pouvoirs réglementaires des maires – besoin maintes fois exprimé, même avant la crise des « gilets jaunes » –, qui aspirent à une plus grande liberté dans l’exercice de ces compétences.
Ces demandes restent parfois, et même souvent, trop peu entendues. Je pense particulièrement à la volonté des édiles, élus préférés de nos concitoyens, que soit garantie leur capacité à financer leurs compétences sans dépendre de tours de table interminables avec les autres collectivités et en ayant une vision dépassant l’année à venir.
La demande simple consistant à appliquer le principe « qui commande paie » n’est malheureusement pas satisfaite à ce jour, pour tout un tas de raisons. La redondance des couches administratives, la politisation des moyens financiers alloués, l’inadéquation constante des dotations de l’État et la baisse des ressources fiscales locales limitent tous les jours la capacité de bonne gestion de nos communes.
Je souhaite donc savoir si, enfin, dans l’organisation territoriale administrative à venir, des éléments de réflexion ou de concertation sont sur la table, programmés ou prévus, afin de progresser vers une plus grande autonomie de financement des compétences propres, actuelles ou à venir, des collectivités.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Guy Benarroche, vous m’interrogez sur la pérennité du financement des compétences nouvellement exercées par les collectivités et sur le modèle des finances locales, en lien avec le récent rapport de la Cour des comptes, transmis au Sénat.
Vous le savez, le transfert de compétences de l’État vers les collectivités territoriales s’accompagne de ressources pérennes équivalentes ; c’est une obligation constitutionnelle.
Le transfert de ressources fiscales dynamiques, comme la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), est souvent privilégié. C’est également ce choix qui a été réalisé lors de la suppression d’impôts locaux : la suppression de la taxe d’habitation communale a été accompagnée du transfert du même montant de taxe foncière ; la suppression de la CVAE s’accompagnera d’un transfert de TVA dynamique.
Vous le voyez, nous avons la volonté de laisser aux collectivités des marges financières et de garantir leur autonomie.
Fallait-il aller plus loin et revoir substantiellement le financement des collectivités territoriales ? Le rapport de la Cour des comptes propose plusieurs scénarios à cet égard. L’un d’entre eux consiste à pousser le curseur du financement par les subventions au maximum ; un autre consiste à faire l’inverse.
Je reste donc évidemment à l’écoute des propositions du Sénat, qui seront sans aucun doute nourries de ce rapport.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour la réplique.
M. Guy Benarroche. On peut constater, dans le PLF qui va arriver au Sénat, une disparité flagrante entre les services demandés aux communes et les compensations qui leur sont accordées, comme la dotation forfaitaire titres sécurisés. Celle-ci, quoiqu’elle soit en augmentation en n+1, ne reflète pas le coût de la mise en œuvre du service liée à la hausse des demandes des usagers.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger.