M. Olivier Becht, ministre délégué. Nous le faisons par fidélité à nos valeurs, à notre histoire, et par amitié avec le peuple arménien. C’est notre devoir, notre honneur, notre fierté. C’est aussi notre combat pour la paix.

Je puis vous assurer que nous poursuivrons nos efforts de médiation jusqu’à l’instauration d’une paix durable. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Joël Bigot applaudit également.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous allons procéder au vote sur la proposition de résolution.

proposition de résolution visant à appliquer des sanctions à l’encontre de l’azerbaïdjan et exiger son retrait immédiat du territoire arménien, à faire respecter l’accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020, et favoriser toute initiative visant à établir une paix durable entre les deux pays

Le Sénat,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu la Charte des Nations unies du 26 juin 1945,

Vu le traité de l’Atlantique Nord du 4 avril 1949,

Vu la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 4 janvier 1969,

Vu la résolution 60/1 de l’Assemblée générale des Nations unies du 16 septembre 2005 sur la responsabilité de protéger,

Vu l’accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020,

Vu la résolution (2020-2021) n° 26 portant sur la nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabagh adoptée par le Sénat le 25 novembre 2020,

Considérant que les agressions répétées des forces militaires azéries au Haut-Karabagh et dans les régions du Sud et Sud-Est de l’Arménie constituent une violation de la souveraineté de cet État et des accords de cessez-le-feu conclus entre les deux parties ;

Considérant que les rapports de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) du Conseil de l’Europe et du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale de l’ONU (CERD) attestent de l’impossibilité des populations arméniennes à vivre librement en Azerbaïdjan ;

Considérant que la sécurité et la liberté des populations arméniennes vivant dans le Haut-Karabagh ne sont pas garanties par la République d’Azerbaïdjan ;

Considérant que le conflit du Haut-Karabagh et celui entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie se déroulent dans une région particulièrement instable, proche de l’Union européenne, et comportent un risque d’escalade impliquant potentiellement des puissances régionales ;

Considérant que les pourparlers de paix sous l’égide de l’Union européenne subissent les conséquences du conflit entre la Russie et l’Ukraine et des enjeux stratégiques liés à l’autonomie énergétique de l’Union européenne ;

Considérant les efforts déployés depuis 1994 par la France, dans le cadre du Groupe de Minsk dont elle assure la co-présidence aux côtés de la Russie et des États-Unis, pour aboutir à une solution pacifique dans le conflit du Haut-Karabagh ; considérant l’impact du conflit ukrainien sur la faculté du Groupe de Minsk à remplir sa mission ; considérant par ailleurs que ce processus est durablement entravé par le recours de l’Azerbaïdjan à la solution militaire ;

Considérant les condamnations de la communauté internationale et la réunion en urgence du Conseil de Sécurité de l’Organisation des Nations unies à la demande de la France qui le préside ;

Condamne fermement les nouvelles agressions militaires de l’Azerbaïdjan perpétrées au début du mois d’août 2022 dans le couloir de Latchin reliant l’Arménie à la capitale du Haut-Karabagh, Stepanakert, et réitérées les 13 et 14 septembre 2022 contre les régions Sud et Sud-Est du territoire de la République d’Arménie, en violation de sa souveraineté, des accords internationaux et de la Charte des Nations unies ;

Demande le retrait immédiat et inconditionnel, sur leurs positions initiales, des forces azéries et de leurs alliés du territoire souverain de l’Arménie et du couloir de Latchin, dont la sécurité et le statut inchangé doivent être assurés, selon les termes de l’accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020 ;

Demande, pour l’avenir, le respect par les autorités azéries et l’ensemble de leurs partenaires dans la région, en particulier la Turquie, de l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Arménie en accord avec leurs obligations et engagements internationaux ;

Appelle à la libération et au rapatriement immédiats et inconditionnels de tous les prisonniers de guerre arméniens ;

Condamne les violations par l’Azerbaïdjan de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 4 janvier 1969 et demande le respect par les autorités azéries des accords et conventions internationales visant à assurer la sécurité des populations arméniennes et leur droit à vivre en paix et en liberté, le droit au retour des populations déplacées ainsi que la préservation du patrimoine culturel et religieux arménien ;

Invite le Gouvernement à œuvrer avec détermination pour que le Conseil de Sécurité de l’Organisation des Nations unies saisisse la Cour pénale internationale au sujet de l’agression de l’Azerbaïdjan sur le territoire souverain de la République d’Arménie, y compris pour enquêter sur les crimes de masses et les crimes de guerre ;

Invite le Gouvernement à tirer toutes les conséquences diplomatiques et économiques de ces nouvelles agressions, et à envisager, avec ses partenaires européens, les réponses les plus fermes appropriées – y compris la saisie des avoirs des dirigeants azerbaïdjanais et un embargo sur les importations de gaz et de pétrole d’Azerbaïdjan – pour sanctionner l’agression militaire menée par les forces azéries sur le territoire de la République d’Arménie, en violation de sa souveraineté ;

Invite le Gouvernement à envisager la mise en place d’un bureau humanitaire au Haut-Karabagh ;

Invite le Gouvernement à manifester par tous moyens le soutien de la France à l’Arménie, en envisageant en particulier le renforcement des capacités de défense de l’Arménie en vue d’assurer son intégrité territoriale ;

Invite le Gouvernement à prendre sans délai toute initiative permettant de garantir la sécurité des populations arméniennes et de l’Arménie, dans ses frontières internationalement reconnues, et à demander à cette fin le déploiement d’une force d’interposition placée sous l’égide de la communauté internationale ;

Réaffirme la nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabagh et à faire de cette reconnaissance un instrument de négociations en vue de l’établissement d’une paix durable ;

Invite le Gouvernement à tout mettre en œuvre pour que l’Azerbaïdjan s’engage instamment et pacifiquement dans un processus de négociation par la voie diplomatique, afin d’aboutir à l’établissement d’une paix durable dans le Caucase Sud.

Vote sur l’ensemble

M. le président. Mes chers collègues, je rappelle que la conférence des présidents a décidé que les interventions des orateurs valaient explication de vote.

Je mets aux voix la proposition de résolution.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 52 :

Nombre de votants 332
Nombre de suffrages exprimés 296
Pour l’adoption 295
Contre 1

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur des travées des groupes LR, UC, RDPI, INDEP et SER.)

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante.)

M. le président. La séance est reprise.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de résolution en application de l'article 34-1 de la Constitution, visant à appliquer des sanctions à l'encontre de l'Azerbaïdjan et exiger son retrait immédiat du territoire arménien, à faire respecter l'accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020, et favoriser toute initiative visant à établir une paix durable entre les deux pays
 

4

Mise au point au sujet d’un vote

M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros.

M. Bernard Delcros. Lors du scrutin public n° 48 sur l’amendement n° 102 rectifié, j’ai été enregistré comme ayant voté pour, alors que je souhaitais voter contre.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

5

Situation et perspectives des collectivités territoriales

Débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Les Républicains, sur la situation et les perspectives des collectivités territoriales.

Nous allons procéder au débat sous la forme d’une série de questions-réponses, dont les modalités ont été fixées par la conférence des présidents.

Je rappelle que l’auteur de la demande dispose d’un temps de parole de huit minutes, puis le Gouvernement répond pour une durée équivalente.

À l’issue du débat, le groupe auteur de la demande dispose d’un droit de conclusion pour une durée de cinq minutes.

Dans le débat, la parole à M. Mathieu Darnaud, pour le groupe auteur de la demande. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. Mathieu Darnaud, pour le groupe Les Républicains. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « je souhaite accompagner, encourager les initiatives, supprimer les verrous encore trop nombreux qui contraignent les territoires dans leur souhait de s’organiser mieux, en vue d’une action publique plus efficace.

« Cette liberté sera laissée aux élus locaux, en lien avec les représentants de l’État aussi, pour expérimenter de nouvelles politiques publiques, de nouvelles organisations des services publics, mais aussi pour innover en matière d’aménagement du territoire, d’urbanisme et pour définir notre territoire de demain. »

Ces propos, madame la ministre, je les emprunte au Président de la République. Ils datent d’il y a cinq ans. Ils ont été prononcés ici même, au Sénat, lors du lancement de la Conférence nationale des territoires. La suite, malheureusement, nous la connaissons…

Six mois plus tard, on nous soumettait les premiers contrats de Cahors. Un an plus tard, nous constations avec un grand désarroi la fin de la Conférence nationale des territoires, fruit de l’ire des élus locaux, des maires, des présidents de département ou de région.

Examinons à présent le bilan législatif. Il se compose essentiellement de deux textes : la loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, qui, selon les dires du ministre Sébastien Lecornu lui-même, visait à corriger les irritants de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), et la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (3DS), dont l’ambition décentralisatrice reste, de l’avis de tous, très modeste.

Vous conviendrez que le vent de liberté et de décentralisation que ces deux textes ont fait souffler n’a pas de quoi nous décoiffer…

Vous pourrez juger mes propos excessifs. Ils le seraient si le Sénat, dans son ensemble, n’avait pas été, tout au long de cette période, force de proposition. Il a ainsi formulé cinquante propositions sous l’égide du président Gérard Larcher, voté certains textes, comme la loi relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes, alerté sur les difficultés budgétaires de nos collectivités. Récemment, nous vous avons sensibilisé, lors de son examen, sur les contraintes que la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets allait faire peser sur l’ensemble de nos communes, quand bien même nous pouvions partager certains de ses objectifs.

Madame la ministre, le début de ce quinquennat, comme celui du précédent, nous laissait espérer des lendemains plus heureux. Les premières déclarations du Président de la République, réaffirmant une volonté décentralisatrice, les mots que Mme la Première ministre a tenus ici même à cette tribune, nous rappelant qu’il était nécessaire d’engager un combat pour les territoires afin de mieux entendre la voix des départements, des régions et de l’ensemble des élus locaux, sont malheureusement, après quelques semaines, restés lettre morte.

Il semble que les lendemains que l’on nous annonçait chantants seront finalement plus douloureux que prévu…

Ainsi, voilà encore quelques semaines, après que nous eûmes tous répété à l’envi que nous pouvions être fiers des 35 000 maires de France, qui n’ont cessé de tenir la barre durant la période compliquée du covid-19, qui ont permis de juguler l’épidémie et de dépasser ce qui nous a d’abord paru indépassable, ces maires auxquels nous devons beaucoup, nous avons entendu Mme la Première ministre réaffirmer le besoin de renforcer le lien entre les présidents d’intercommunalité et les préfets… Si nous soutenons ici la dynamique intercommunale, nous considérons que c’est tout de même faire offense à ces maires, qui n’ont jamais cessé d’œuvrer et à qui nous devons tant, mes chers collègues ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

C’est aussi rester sourd et muet face à nos préoccupations. J’ai interrogé le ministre Christophe Béchu il y a une semaine sur ce qu’il pensait du récent rapport de la Cour des comptes, qui préconise de verser la dotation globale de fonctionnement aux intercommunalités. J’espère, madame la ministre, que vous aurez l’occasion de répondre à cette question, parce qu’elle suscite de véritables inquiétudes sur l’ensemble des travées de cet hémicycle !

Que devons-nous faire ? Malheureusement, nous ne sommes pas non plus rassurés par ce qui se profile dans le projet de loi de finances. Je pense au filet de sécurité, dans lequel beaucoup de maires se sont déjà pris les pieds, considérant qu’il n’apportera qu’une aide très partielle et sommaire, voire qu’il contient des dispositifs bien trop complexes et pas du tout à la hauteur des enjeux financiers. Je pense encore aux amortisseurs sur l’énergie, dont tout le monde a encore convenu, lors de l’audition de Christophe Béchu la semaine dernière, qu’ils étaient bien compliqués compte tenu des enjeux et des montagnes qui se dressent désormais devant l’ensemble des maires de France.

Madame la ministre, une urgence absolue frappe nos territoires. Cette augmentation du coût des énergies et cette situation financière que constate chacun des 35 000 maires de France deviennent des inquiétudes majeures pour nos collectivités et, plus encore, pour le pays tout entier.

Nous le savons, sans la commande publique, l’année 2023 et les années suivantes seront douloureuses pour notre pays. Il faut impérativement agir, et d’abord sur les problèmes financiers. La suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), les aides limitées, une certaine manière de rogner sur les marges des collectivités, le retour des contrats de Cahors : tout cela n’est pas de nature à nous rassurer.

Le Sénat, en responsabilité, prendra toute sa part de cette démarche pour faire œuvre utile. Nous avancerons des propositions concrètes, comme nous le ferons dans le cadre du groupe de travail sur la décentralisation. Nous serons au rendez-vous des territoires, au rendez-vous de ceux qui président aux destinées de nos communes. En effet, il nous faut les entendre, plus que jamais, si nous souhaitons que nos territoires ne connaissent pas le pire d’ici à quelques semaines ou à quelques mois.

Nous nous mobiliserons dans le cadre de ce projet de loi de finances pour garantir que les dispositifs tels que le filet de sécurité et l’amortisseur sur l’énergie apportent une aide réelle et ne rendent pas plus complexe, une fois de plus, un système qui l’est déjà bien assez.

Nous prendrons nos responsabilités, mais nous attendons, madame la ministre, que le Gouvernement prenne enfin les siennes, en se mettant à la hauteur des enjeux auxquels nos collectivités sont confrontées.

Je le dis avec gravité et solennité : ce débat, que je remercie le groupe Les Républicains d’avoir inscrit à l’ordre du jour du Sénat, marque le commencement d’un processus qui se poursuivra lors de l’examen du projet de loi de finances. Je forme le vœu qu’il permette enfin d’aborder, durant ce quinquennat, les questions de décentralisation et de déconcentration.

Nous avons besoin de l’État territorial, mais aussi de la différenciation, car les situations diffèrent dans notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Yves Détraigne et Franck Menonville, ainsi que Mme Cécile Cukierman, applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Mathieu Darnaud, je suis heureuse d’être parmi vous aujourd’hui pour prendre part à ce débat sur la situation et les perspectives des collectivités territoriales dans notre pays, débat organisé à la demande du groupe Les Républicains.

Je ne vous apprends rien : les collectivités traversent un moment déterminant, parce que notre politique à destination des territoires pour ce nouveau mandat se dessine maintenant et parce qu’elles doivent affronter des défis inédits en raison de l’inflation à 5,5 %, selon l’Insee, et de la hausse du coût de l’énergie.

Face à cette situation, notre gouvernement a agi sans tarder, pour les aider dans l’urgence, mais aussi pour qu’elles maintiennent leurs capacités d’investissement, en particulier en faveur de la transition écologique.

Nous n’avons pas construit ces mesures dans un exercice solitaire. Conformément à notre engagement, nous n’avons cessé d’échanger avec les associations d’élus, pour tenir compte de leurs remontées de terrain et de leurs propositions. L’État est donc au rendez-vous en termes de moyens comme de méthode.

Je présenterai notre action au service des collectivités tout d’abord sur le plan financier, ensuite pour ce qui a trait aux projets d’aménagement de ces dernières et enfin en matière de protection et de valorisation du statut des élus locaux.

Sur le plan financier, pour apprécier l’engagement que porte le projet de loi de finances pour 2023, je mettrai en avant trois volets de mesures.

Le premier volet est l’aide concrète apportée aux collectivités face à l’inflation. Grâce au filet de sécurité, 1,5 milliard d’euros sont mobilisés pour l’ensemble des collectivités fragilisées par l’augmentation des dépenses d’énergies. Il faut ajouter à ce montant les moyens dédiés au bouclier tarifaire, ainsi qu’à « l’amortisseur électricité », soit plus de 1 milliard d’euros, qui conduiront à alléger les charges liées à la hausse de l’électricité pour toutes les collectivités.

Le deuxième volet est la hausse inédite depuis treize ans de la dotation globale de fonctionnement (DGF), d’un montant de 320 millions d’euros, dont 200 millions d’euros pour la dotation de solidarité rurale (DSR). Cela permet à 95 % des communes de voir leurs dotations maintenues ou augmentées.

Ce renforcement de la DGF est couplé à la pérennisation de l’ensemble des dotations d’investissement – dotation de soutien à l’investissement local (DSIL), dotation de soutien à l’investissement des départements (DSID), dotation politique de la ville (DPV) et dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) –, qui atteignent un montant de près de 2 milliards d’euros, comme l’année précédente.

Enfin, le troisième volet de mesures est la mobilisation du fonds vert de 2 milliards d’euros, intégralement dédié aux projets de transition portés par les élus locaux.

Ces dispositifs ont été amendés, modifiés et perfectionnés à l’Assemblée nationale pour être adaptés aux besoins des collectivités. Vous aurez l’occasion de les améliorer encore dans le cadre de votre examen du texte, j’imagine. Notre volonté de dialogue est sincère.

Parmi les perspectives des collectivités territoriales se trouvent également les programmes d’appui que nous mettons en œuvre depuis le précédent quinquennat. Nous poursuivrons en ce sens. J’ai en particulier à l’esprit Action cœur de ville et Petites Villes de demain, qui permettent de redynamiser les centres urbains des villes moyennes et des petites villes lauréates et pour lesquels 6 milliards d’euros ont déjà été mobilisés.

Je viens de finaliser l’acte II d’Action cœur de ville, pour accentuer encore son élan, avec la volonté de soutenir davantage des projets de valorisation liés à la transition écologique.

J’ai réuni il y a quelques semaines l’ensemble des partenaires financiers – Action Logement, la Banque des territoires et l’Agence nationale de l’habitat (Anah) –, lesquels seront bien sûr au rendez-vous. Ils se sont déjà d’ores et déjà engagés sur des montants aussi élevés que ceux qu’ils avaient consacrés à la première phase. Nous aurons donc l’occasion d’annoncer plus en détail dans les prochains jours le lancement de cette nouvelle étape.

S’agissant de Petites Villes de demain, j’ai missionné les équipes de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), pour qu’elles préparent une feuille de route enrichie, afin de rendre ce programme plus opérationnel et de l’orienter davantage vers la transition énergétique. Notre objectif est aussi d’élargir encore le cercle de nos partenaires.

Plus largement, nous poursuivrons dans la dynamique de l’agenda rural, au sein duquel s’inscrivent ces deux mesures. Celui-ci a permis d’améliorer concrètement la qualité de vie de nos concitoyens dans les communes rurales, en particulier en matière de proximité des services publics, avec les espaces France Services. Il en existe déjà plus de 2 400 dans tout le pays ; il y en aura 2 600 à la fin de l’année.

Pour accentuer encore cette couverture, Stanislas Guerini et moi-même avons annoncé le lancement d’une nouvelle une vague de labellisations, avec l’objectif de créer 140 nouveaux espaces en 2023. En outre, le Président de la République a annoncé la réouverture de six sous-préfectures.

Cette liste de programmes d’appui n’est pas exhaustive, mais il me semble important de souligner la continuité de notre action, ainsi que notre exigence de méthode.

Dans l’ensemble de ces dispositifs, l’État se fait en effet accompagnateur et non prescripteur, au service des projets portés par les élus locaux, car notre but est une plus grande efficacité au bénéfice de tous. Nous les améliorons à la lumière des retours d’expérience, et vous êtes d’ailleurs nombreux à contribuer à cette démarche.

Mesdames, messieurs les sénateurs, les élus locaux, ces fins connaisseurs de nos territoires, placés au plus près de nos concitoyens, doivent être soutenus. Ils sont les premiers acteurs de nos politiques publiques. C’est pourquoi nous défendons de nombreuses mesures visant à faciliter leur action.

Ainsi, concernant la délivrance des titres sécurisés, le projet de loi de finances inclut un nouveau plan d’urgence d’un coût total de 20 millions d’euros. Il s’agit, tout d’abord, d’inciter à la connexion à des plateformes numériques de prise de rendez-vous, pour limiter les rendez-vous multiples. Ensuite, nous augmentons la part forfaitaire de 8 500 euros à 9 000 euros pour encourager l’installation de nouveaux dispositifs de recueil. Enfin, nous instaurons deux tranches de part variable, afin de favoriser la performance ; ainsi, cette part atteindrait 12 000 euros par dispositif de recueil.

Nous mettons également en place le remboursement forfaitisé des frais de garde des élus, une mesure qui facilitera grandement la vie quotidienne des intéressés. Il leur suffira de déposer un dossier de remboursement des frais réels.

Plus largement, nous poursuivons l’application de la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite 3DS, avec, par exemple, la décentralisation de 10 000 kilomètres de routes nationales confiées aux départements, aux métropoles et, à titre expérimental, aux régions.

Je termine en saluant la proposition de loi déposée par la sénatrice Delattre et rapportée par la sénatrice Di Folco, qui sera examinée tout à l’heure. Ce texte permettra de renforcer considérablement la protection des élus locaux en donnant aux différentes associations d’élus le droit de se constituer partie civile. Il s’agit d’une avancée supplémentaire pour garantir aux élus locaux un exercice serein de leur mandat.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le voyez, le Gouvernement s’engage résolument aux côtés des élus locaux et des collectivités.

Débat interactif

M. le président. Nous allons maintenant procéder au débat interactif.

Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes au maximum pour présenter sa question et son éventuelle réplique.

Le Gouvernement dispose pour répondre d’une durée équivalente. Il aura la faculté, s’il le juge nécessaire, de répondre à la réplique pendant une minute supplémentaire. L’auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répondre pendant une minute.

Dans le débat interactif, la parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Madame la ministre, ce qui motive ma question peut être résumé par ces mots : « Vous avez rejeté les contrats de Cahors ? Eh bien, vous en aurez encore ! »

En utilisant le 49.3, vous vous permettez d’imposer de façon cavalière, sans discussion préalable, l’encadrement renforcé des dépenses de fonctionnement pour un certain nombre de collectivités territoriales.

Cet encadrement des dépenses de fonctionnement porte atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales et le remet en cause.

La saison 2 de ces contrats de Cahors, dont nous avions tous appelé à sortir, vise en réalité à rendre ces dispositifs plus contraignants et à cibler davantage de collectivités territoriales.

Pourtant, cet été – ce n’est pas si loin ! –, le Sénat avait rejeté à la quasi-unanimité, après l’intervention des différents groupes, un tel rétablissement. Ma collègue Céline Brulin avait alors évoqué un « pacte de défiance », que vous vouliez imposer aux élus locaux.

Madame la ministre, souhaitez-vous ordonner la conclusion de ces nouveaux contrats ou, au contraire, instaurer un véritable dialogue pour construire les réponses indispensables pour aujourd’hui comme pour demain et, ainsi, développer les territoires de notre République ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Savin. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de lintérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Madame la sénatrice Cécile Cukierman, il est vrai que le Gouvernement a fait le choix de réintroduire ce pacte de confiance dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2023, sous la forme d’un rapport au Parlement.

Néanmoins, ce n’est en rien comparable au pacte de Cahors (M. Mathieu Darnaud proteste.), auquel je m’étais, moi aussi, opposée.

Il s’agit simplement d’un dispositif qui concerne les groupes de collectivités par strates – régions, départements, communes – et qui joue la confiance. Pour autant, si quelque collectivité venait à déraper, il reviendrait au préfet d’appeler son attention. Il n’est donc pas question de faire signer ou d’engager chaque collectivité nominativement, comme cela avait été fait durant le précédent quinquennat.

Pourquoi avons-nous fait ce choix ? Les acteurs publics – l’État comme les collectivités territoriales – doivent participer à l’effort commun pour rétablir les comptes de la Nation. Il y va de la crédibilité de notre pays vis-à-vis de l’Union européenne et des institutions qui achètent la dette française.

Il est donc nécessaire que le Gouvernement et le Parlement montrent clairement qu’ils font cet effort. C’est le sens des trajectoires budgétaires qui sont inscrites en loi de programmation des finances publiques.

Le pacte de confiance est-il le meilleur outil pour cela ? Il est, à mon sens, bien plus responsabilisant pour les collectivités que les mécanismes précédents. Je rappelle, à ce titre, que sous le mandat de François Hollande l’État avait autoritairement baissé la DGF de plus de 11 milliards d’euros en guise de trajectoire.