Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi relative à l’adoption
TITRE Ier
FACILITER ET SÉCURISER L’ADOPTION CONFORMÉMENT À L’INTÉRÊT DE L’ENFANT
Avant l’article 1er
Mme la présidente. L’amendement n° 45 rectifié, présenté par M. Requier, Mme M. Carrère, MM. Artano et Bilhac, Mme N. Delattre et MM. Fialaire, Gold, Guérini, Guiol et Roux, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 21 du code civil est complété par un mot et une phrase ainsi rédigée : « majeur. Lorsqu’il est mineur au moment de l’initiation de la procédure d’adoption, l’adopté en forme simple reçoit la nationalité française dans les mêmes conditions que l’adopté en forme plénière ».
La parole est à M. Bernard Fialaire.
M. Bernard Fialaire. Cet amendement vise à permettre l’attribution de la nationalité française au mineur adopté en forme simple dans les mêmes conditions que celles prévues pour l’adoption plénière, afin de simplifier les démarches des parents adoptifs.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Il faut rappeler que l’adoption simple maintient les liens avec la famille d’origine, de sorte que l’on ne peut automatiquement supprimer la nationalité provenant de ladite famille.
J’ajoute qu’il existe pour les enfants concernés par une adoption simple une procédure assez aisée permettant d’acquérir la nationalité française.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. L’avis est défavorable, pour les mêmes raisons que celles exposées par Mme la rapporteure.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 45 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 1er
(Non modifié)
Le premier alinéa de l’article 364 du code civil est ainsi rédigé :
« L’adoption simple confère à l’adopté une filiation qui s’ajoute à sa filiation d’origine. L’adopté conserve ses droits dans sa famille d’origine. »
Mme la présidente. L’amendement n° 16 rectifié ter, présenté par MM. Favreau, Pellevat, D. Laurent, Laménie et Klinger, Mme Lassarade, M. Belin et Mme Joseph, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Else Joseph.
Mme Else Joseph. L’article 1er a pour objectif de valoriser davantage l’adoption simple, par une nouvelle rédaction de l’article 364 du code civil. Or la modification prévue par cet article, qui inscrit l’enfant dans une double filiation, ne semble pas revêtir d’intérêt particulier pour l’enfant et risque de créer des difficultés supplémentaires.
En effet, ledit article aboutit potentiellement à limiter à deux parents les parents d’un enfant adopté, alors qu’aujourd’hui l’enfant peut avoir trois, voire quatre parents.
Par exemple, dans la pratique, une enfant recueillie pendant sa petite enfance par sa grand-tante et qui, à sa majorité, est adoptée par sa tante et l’épouse de celle-ci par adoption simple possède un triple lien de filiation, tout en conservant ses droits dans sa famille d’origine.
C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Le texte, tel qu’il était rédigé initialement, ne prévoyait effectivement qu’une double filiation, mais il ne vous aura pas échappé qu’il a été modifié.
L’amendement étant satisfait, j’en demande le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Joseph, l’amendement n° 16 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Else Joseph. Non, madame la présidente, je le retire.
Mme la présidente. L’amendement n° 16 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
Le code civil est ainsi modifié :
1° L’article 343 est ainsi rédigé :
« Art. 343. – L’adoption peut être demandée par un couple marié non séparé de corps, deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou deux concubins.
« Les adoptants doivent être en mesure d’apporter la preuve d’une communauté de vie d’au moins deux ans ou être âgés l’un et l’autre de plus de vingt-huit ans. » ;
2° L’article 343-1 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Le second alinéa est ainsi modifié :
– après le mot : « corps », sont insérés les mots : « ou lié par un pacte civil de solidarité » ;
– les mots : « son conjoint » sont remplacés par les mots : « l’autre membre du couple » et les mots : « ce conjoint » sont remplacés par le mot : « celui-ci » ;
3° L’article 343-2 est complété par les mots : « , du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin » ;
4° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article 344, après le mot : « conjoint, », sont insérés les mots : « partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin, » ;
5° L’article 345-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « conjoint, », sont insérés les mots : « du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin » ;
b) Le 1° est complété par les mots : « , partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin » ;
c) Au 1° bis, après le mot : « conjoint, », sont insérés les mots : « partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin, » ;
d) Aux 2° et 3°, après le mot : « conjoint, », sont insérés les mots : « partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin, » ;
6° L’article 346 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par les mots : « , deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou deux concubins » ;
b) Au second alinéa, après les mots : « conjoint », sont insérés les mots : « , partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin » ;
7° À l’article 348-5, après le mot : « adopté », sont insérés les mots : « ou dans les situations d’adoption de l’enfant du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin » ;
8° Le premier alinéa de l’article 353-1 est ainsi rédigé :
« Dans tous les cas où l’agrément est requis, le tribunal vérifie avant de prononcer l’adoption que le ou les requérants ont obtenu cet agrément ou en ont été dispensés. » ;
9° Le second alinéa de l’article 356 est ainsi rédigé :
« Toutefois, l’adoption de l’enfant du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin laisse subsister sa filiation d’origine à l’égard de cette personne et de sa famille. Elle produit, pour le surplus, les effets d’une adoption par les deux membres du couple. » ;
10° Le deuxième alinéa de l’article 357 est ainsi rédigé :
« En cas d’adoption de l’enfant du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin ou d’adoption d’un enfant par deux personnes, l’adoptant et l’autre membre du couple ou les adoptants choisissent, par déclaration conjointe, le nom de famille dévolu à l’enfant : soit le nom de l’un d’eux, soit leurs deux noms accolés dans l’ordre choisi par eux, dans la limite d’un nom de famille pour chacun d’eux. » ;
11° Au troisième alinéa de l’article 360, après le mot : « conjoint », sont insérés les mots : « , le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin » ;
12° L’article 363 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du troisième alinéa, après le mot : « époux, », sont insérés les mots : « partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou concubins, » ;
b) À la première phrase du dernier alinéa, après le mot : « conjoint, », sont insérés les mots : « du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du concubin, » et, à la deuxième phrase du même dernier alinéa, le mot : « époux » est remplacé par le mot : « personnes » ;
13° Le premier alinéa de l’article 365 est ainsi modifié :
a) Après la première occurrence du mot : « conjoint », sont insérés les mots : « , le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin » ;
a bis) Les mots : « du père ou de la mère » sont remplacés par les mots : « de l’un des parents » ;
b) Après la seconde occurrence du mot : « conjoint, », sont insérés les mots : « son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin, » ;
14° L’article 366 est ainsi modifié :
a) Au 2°, après les deux occurrences du mot : « conjoint », sont insérés les mots : « ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité » ;
b) Au dernier alinéa, après le mot : « alliance », sont insérés les mots : « ou qui était liée par un pacte civil de solidarité » ;
15° Le premier alinéa de l’article 370-3 est ainsi rédigé :
« Les conditions de l’adoption sont soumises à la loi nationale de l’adoptant ou, en cas d’adoption par un couple, à la loi qui régit les effets de leur mariage, de leur partenariat enregistré ou de leur concubinage. L’adoption ne peut toutefois être prononcée si la loi nationale des deux membres du couple la prohibe. »
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, sur l’article.
M. Jean-Yves Leconte. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article 2, qui a pour objet d’autoriser l’adoption pour les personnes liées par un pacte civil de solidarité (PACS) et pour les concubins, est le bienvenu. Il représente un réel progrès au regard du droit en vigueur, qui ne permet l’adoption conjointe que pour les couples mariés, celle de l’enfant du conjoint et l’adoption par une personne seule.
La perspective de l’adoption de cet article avait servi de prétexte au Gouvernement, lors des débats sur la loi relative à la bioéthique, pour justifier l’adoption de l’article 4 bis dudit texte, devenu son article 7, qui bouleverse complètement les règles de reconnaissance en France de l’ensemble des actes de l’état civil dressés à l’étranger, ce que j’avais alors eu l’occasion de contester.
Le Gouvernement affirmait alors que la proposition de loi dont nous discutons ce soir rendrait possible l’adoption intraconjugale pour tous les enfants nés par gestation pour autrui (GPA) à l’étranger, procédure qu’il souhaitait imposer à la place de la transcription intégrale des actes d’état civil étrangers.
En effet, au prétexte de vouloir empêcher la transcription intégrale, et en aucun cas automatique, car forcément encadrée, des actes de naissance des enfants nés à l’étranger d’une GPA, la loi bioéthique a porté atteinte à la rédaction de l’article 47 de notre code civil et à la force probante de tous les actes de l’état civil dressés à l’étranger.
Cette réforme a été votée au mépris de nombreuses condamnations de la France par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) qui, dans l’intérêt de l’enfant, impose la reconnaissance d’une filiation intégrale à l’égard des parents légalement indiqués à l’acte de naissance étranger de l’enfant, valablement dressé par les autorités locales. La CEDH a indiqué que cela devait se faire par une procédure qui assure l’effectivité et la célérité de la filiation.
Il m’avait alors été rétorqué que l’article 2 de la présente proposition de loi viendrait remédier aux difficultés, puisqu’il devait permettre l’obtention d’une filiation complète via l’adoption intrafamiliale de l’enfant, élargie aux concubins et aux partenaires pacsés.
Il n’en est rien : les femmes seules, veuves ou séparées, mères d’intention qui figurent pourtant sur l’acte de naissance étranger des enfants nés d’une GPA seront dans l’impossibilité d’adopter leur propre enfant, alors même que les hommes qui sont pères dans une situation similaire pourront figurer sur l’acte français transcrit.
Il s’agit d’une discrimination inacceptable et il appartiendra aux services du ministère de la justice d’adopter des instructions précises pour assurer la conformité de notre droit avec la jurisprudence de la CEDH, puisque nous ne corrigeons pas ces difficultés.
Mme la présidente. L’amendement n° 1, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Aucune discrimination ne peut avoir lieu en raison de l’orientation sexuelle, du statut matrimonial, de l’identité de genre de l’un des membres du couple ou du couple et du mode de conception de l’enfant.
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. L’article que nous examinons constitue la proposition phare de ce texte. Il vise à ouvrir le droit à l’adoption pour les concubins et les partenaires liés par un PACS. Je l’ai dit précédemment, notre groupe salue cette avancée. Cette reconnaissance se calque sur les identités plurielles des schémas familiaux qui existent déjà, de toute façon, en France.
Mais, nous le savons, l’adoption homoparentale est aujourd’hui semée d’embûches. Pour ce qui est de l’adoption internationale, les couples homosexuels doivent composer avec un nombre restreint de pays et, actuellement, seuls quelques États autorisent l’adoption pour des couples de même sexe.
Pour ce qui est de l’adoption sur le territoire français, certains conseils départementaux acceptent moins que d’autres – nous le savons également – les dossiers des couples de même sexe. Il existe de grandes disparités selon les territoires. Parfois, pour faire accélérer leur dossier, il est conseillé aux couples homosexuels d’adopter des enfants à particularités qui seraient « moins demandés » par les couples hétérosexuels ou par les célibataires. Ces discriminations sont intolérables.
Le présent amendement vise simplement à faire figurer dans la loi le principe de non-discrimination en raison de l’orientation sexuelle, du statut matrimonial, de l’identité de genre de l’un des membres du groupe ou du couple, et tend à inscrire au sein de notre droit commun un principe de non-discrimination en raison du mode de conception de l’enfant.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Le principe de non-discrimination existe et l’article 2, tel qu’il est rédigé, contribue très largement à le renforcer, puisqu’il ouvre l’adoption à tout type de couple et d’union. Je ne parle pas là, bien sûr, des couples homosexuels, qui peuvent d’ores et déjà adopter depuis la loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe.
J’ajoute que le non-respect du principe de non-discrimination est même pénalement répréhensible, lorsque la discrimination est avérée, ainsi que le prévoient les articles 225–1 et 225–2 du code pénal.
Je ne vois donc pas ce que cet amendement ajoute au texte. L’avis est défavorable.
M. Stéphane Le Rudulier. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Cet amendement nous semble satisfait, puisque le principe de non-discrimination est un principe général qui s’applique également en matière de filiation et d’adoption.
Je le rappelle, à la suite d’une affaire dans laquelle était impliqué le service adoption de Seine-Maritime, j’avais saisi l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) afin qu’elle mène une mission sur le sujet, ainsi que le Comité consultatif national d’éthique (CCNE). Cela a été dit lors de la discussion générale, l’existence d’une pratique discriminatoire avait bien été reconnue, mais aucun système général de discrimination n’avait été identifié, que ce soit au niveau de ce département ou globalement dans notre pays.
Pour autant, sur la recommandation de l’IGAS et du CCNE, j’avais demandé à ce que soit rédigée une charte nationale d’éthique que les préfets, dans chaque département, ont fait signer à chacun des membres des conseils de famille. Je tenais simplement à rappeler le droit, ni plus ni moins. Encore récemment, un certain nombre d’acteurs territoriaux m’ont confirmé qu’il avait été utile de faire signer cette charte et de rappeler ces principes.
Pour ces raisons et parce que j’ai bon espoir que le Sénat restaure, à l’article 14, la présence d’une personnalité qualifiée en matière de non-discrimination au sein du conseil de famille, je vous demande, madame la sénatrice, de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Madame Vogel, l’amendement n° 1 est-il maintenu ?
Mme Mélanie Vogel. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 3, présenté par Mme M. Vogel, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
1° Remplacer les mots :
deux ans
par les mots :
un an
2° Remplacer le mot :
vingt-huit
par le mot :
vingt-cinq
II. – Alinéa 6
Rétablir le a dans la rédaction suivante :
a) Au premier alinéa, le mot : « vingt-huit » est remplacé par le mot : « vingt-cinq » ;
La parole est à Mme Mélanie Vogel.
Mme Mélanie Vogel. Le présent amendement a pour objet d’abaisser l’âge minimum requis de la part des futurs adoptants de 28 à 25 ans, ainsi que, dans le cas de l’adoption par un couple, la durée minimale de communauté de vie de deux à un an.
Nous regrettons le choix de la rapporteure d’avoir proposé de supprimer l’abaissement d’âge qui était prévu. La philosophie de cet amendement est simplement de coller le plus possible à la réalité des couples hétérosexuels, qui peuvent procréer biologiquement et avoir un enfant au bout de neuf mois, parfois dès l’âge de 25 ans…
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je note cette volonté de « coller à la réalité » des couples hétérosexuels. Mais il s’avère que le lien de filiation qui existe, lorsque l’on fait un enfant, et celui qui existe, lorsque l’on adopte un enfant, sont tout à fait différents et les pédopsychiatres l’expliquent assez aisément. Dans l’adoption, le lien de filiation est plus difficile à construire, et il l’est de plus en plus, parce qu’il y a beaucoup d’enfants – on l’a dit, répété, et chacun le sait – à besoins spécifiques.
Il ne s’agit donc pas de « coller à la réalité », puisque nous ne parlons pas de la même réalité.
L’article 2 prévoit un âge minimum requis de 28 ans ou la justification de deux ans de vie commune, disposition que l’Assemblée nationale avait effectivement modifiée. Nous y sommes revenus en commission : cet âge et ce délai paraissent plus raisonnables pour assurer la stabilité et la sécurité, qui sont nécessaires lorsqu’un lien de filiation adoptive doit s’établir.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. À l’Assemblée nationale, les débats ont été assez longs, à la fois sur la durée de vie commune et sur l’âge minimal requis. Je m’étais alors opposé au groupe majoritaire – ce sont des choses qui arrivent dans la vie d’un membre du Gouvernement… Je ne comprenais pas les raisons pour lesquelles nous devions modifier ces dispositions.
Je n’étais pas présent, lorsque la commission des lois du Sénat a décidé de rétablir le droit actuel, c’est-à-dire d’en rester au texte initial. Pour cette raison, je m’en remets à la sagesse du Sénat, en le laissant choisir quelle disposition approuver.
Mme la présidente. L’amendement n° 20 rectifié, présenté par MM. Marseille et Levi, Mmes Tetuanui et Dindar, MM. Laugier, Louault, Henno et Bonnecarrère, Mme Loisier, M. Cadic, Mmes Vermeillet, Sollogoub, Doineau et Férat, MM. Cigolotti, Vanlerenberghe et Kern, Mme de La Provôté, M. Moga, Mmes Devésa, Saint-Pé et Perrot, MM. Duffourg, Cazabonne, Le Nay et Lafon, Mme Billon et MM. Hingray et Longeot, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :
b) Le deuxième alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, une nouvelle adoption peut être prononcée :
« 1° Soit après le décès de l’adoptant, ou des deux adoptants, soit encore après le décès de l’un des deux adoptants, si la demande est présentée par le nouveau conjoint, partenaire d’un pacte civil de solidarité ou concubin, du survivant d’entre eux ;
« 2° Soit après le divorce ou la séparation des adoptants, si la demande en adoption simple est présentée par le nouveau conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin, de l’un ou de l’autre des adoptants ;
« 3° Soit après le divorce ou la séparation des parents, si la demande en adoption simple est présentée par le nouveau conjoint, partenaire d’un pacte civil de solidarité ou concubin, de l’un des parents alors que l’enfant a déjà fait l’objet d’une première adoption simple vis-à-vis du nouveau conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin, de son autre parent. » ;
La parole est à Mme Brigitte Devésa.
Mme Brigitte Devésa. Cet amendement a pour objet de lever l’autre obstacle qui s’oppose à l’adoption simple d’un enfant ayant déjà bénéficié d’une adoption plénière : la prohibition des adoptions successives résultant de l’article 346 du code civil.
Le premier alinéa de cet article énonce l’interdiction des adoptions successives, tout en préservant la possibilité d’une adoption conjugale.
Le second alinéa de ce texte consacre un tempérament à cette interdiction, qui vise spécifiquement le cas du décès du ou des adoptants.
Pour que ce texte ne soit plus un obstacle à l’adoption simple d’un enfant adopté en la forme plénière par le nouveau conjoint de l’un des adoptants, un deuxième tempérament, prenant en compte la rupture du couple parental adoptif du vivant des adoptants, doit être associé à ce premier tempérament.
La Cour de cassation considère que cet article du code s’oppose à ce que l’enfant ayant déjà fait l’objet d’une adoption simple de la part du nouveau conjoint de l’un de ses auteurs puisse de nouveau faire l’objet d’une adoption simple de la part du nouveau conjoint de son autre auteur.
Pour que cet enfant dont la filiation résulte d’un lien biologique puisse, à la suite de la séparation de ses parents, être adopté en la forme simple par chacun des nouveaux conjoints de ses auteurs, l’amendement prévoit d’admettre que l’adoption d’un enfant ayant déjà bénéficié d’une première adoption simple par le nouveau conjoint de l’un de ses auteurs biologiques puisse faire l’objet d’une seconde adoption simple de la part du nouveau conjoint de son autre auteur.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Voilà un amendement assez technique ! (Sourires.)
Nous parlons de la situation dans laquelle un couple a adopté un enfant par adoption plénière. Ce couple se sépare et l’enfant est élevé par le nouveau conjoint d’un des deux membres du couple, voire par le nouveau conjoint de chaque membre du couple.
Il est demandé au travers de cet amendement que le nouveau conjoint puisse adopter cet enfant, qui a déjà fait l’objet d’une adoption plénière. La difficulté est que l’autre conjoint pourrait faire de même. Nous nous heurtons alors à un texte en vigueur interdisant que plus de deux « époux » – c’est le terme qui est encore utilisé, mais il faudra le changer pour l’élargir aux partenaires et aux concubins – puissent adopter l’enfant de cette façon.
Or personne, le Gouvernement pas plus que d’autres, n’a voulu, à ce stade, modifier ledit texte. La commission souhaite donc connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le droit en vigueur permet, lorsque l’un des adoptants décède, que le nouveau conjoint du survivant puisse adopter l’enfant en la forme simple ou plénière.
L’amendement vise à étendre cette règle en cas de divorce ou de séparation des adoptants. Or suivre ce raisonnement reviendrait à permettre in fine qu’un même enfant puisse être adopté successivement par toutes les personnes qui seraient en couple avec ses premiers parents adoptifs.
Il ne sous semble pas être dans l’intérêt de l’enfant de multiplier ainsi les liens de filiation, potentiellement à l’infini ou presque. Son intérêt est en effet d’avoir, autant que faire se peut, des repères familiaux structurants et stables.
Le Gouvernement, dont vous souhaitiez connaître l’avis avant de vous prononcer, madame la rapporteure, est défavorable à cette extension des possibles…
Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 63, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 21 et 22
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme le rapporteur.