Mme la présidente. L’amendement n° 241, présenté par M. Bonnecarrère et Mme Canayer, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Amendement de correction.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 241.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 242, présenté par M. Bonnecarrère et Mme Canayer, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer les mots :

et règlementaires

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Amendement de correction.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 242.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 243, présenté par M. Bonnecarrère et Mme Canayer, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Après le mot :

demande

insérer le mot :

ou

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 243.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 201, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 23

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° L’article 696-11 est ainsi rédigé :

« Art. 696-11. – Les signalements prévus aux 1 à 3 et au 5 de l’article 24 du règlement (UE) 2017/1939 du Conseil du 12 octobre 2017 mettant en œuvre une coopération renforcée concernant la création du Parquet européen sont directement adressés au procureur européen délégué par les autorités nationales compétentes visées aux articles 19, 40 second alinéa et 80 du présent code, qui en informent alors simultanément le procureur de la République spécialisé compétent. Ces signalements peuvent aussi être adressés au procureur européen délégué par le procureur de la République spécialisé compétent, lorsque celui-ci a été informé par les autorités nationales compétentes susvisées. » ;

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Cet amendement vise à simplifier les dispositions de l’article 696-11 du code de procédure pénale concernant les signalements adressés par les autorités nationales au procureur européen délégué sur les affaires portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne susceptibles de relever de sa compétence.

Cet article 696-11, résultant de la loi du 24 décembre 2020, a en effet prévu des signalements indirects, passant par l’intermédiaire des procureurs de la République spécialisés, sans permettre des signalements directs, notamment par les autorités visées à l’article 40 du code de procédure pénale.

Même si ce dispositif est totalement conforme aux exigences du règlement constitutif du Parquet européen, il est cependant souhaitable, dans un souci d’efficacité, comme le demandent le Parquet européen et la Commission européenne, de permettre également des signalements directs, avec simplement une information des procureurs nationaux spécialisés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Mes chers collègues, vous vous souvenez du travail que vous avez réalisé dans le cadre de la transposition de la création du Parquet européen dans notre droit, avec des modalités empreintes de beaucoup de finesse.

Nous pensions avoir terminé ce travail. Des discussions ont eu lieu entre la Commission européenne et d’autres gouvernements quant aux conditions de cette transposition. La proposition qui vous est faite par le Gouvernement vise à permettre la transmission des signalements directement de nos autorités nationales au Parquet européen sans passer par le filtre des parquets.

Une telle modification paraît acceptable sous réserve de solder les discussions avec la Commission. Je suppose que les négociations qui ont été menées entre la Chancellerie et la Commission le permettent. Puisse l’adoption de cet amendement permettre de conclure la préparation du fonctionnement du Parquet européen, qui, vous le savez, est maintenant opérationnel : son installation est intervenue voilà quelques semaines.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 201.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 32 B, modifié.

(Larticle 32 B est adopté.)

Article 32 B (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans l'institution judiciaire
Article additionnel après l'article 32 - Amendement n° 154 rectifié

Article 32

Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi qui sont nécessaires :

1° et 2° (Supprimés)

3° Pour transposer la directive (UE) 2019/884 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 modifiant la décision-cadre 2009/3115/JAI du Conseil en ce qui concerne les échanges d’informations relatives aux ressortissants de pays tiers ainsi que le système européen d’information sur les casiers judiciaires (ECRIS), et remplaçant la décision 2009/316/JAI du Conseil, et pour prendre les mesures d’adaptation nécessaires à l’application du règlement (UE) 2019/816 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 portant création d’un système centralisé permettant d’identifier les États membres détenant des informations relatives aux condamnations concernant des ressortissants de pays tiers et des apatrides (ECRIS-TCN), qui vise à compléter le système européen d’information sur les casiers judiciaires, et modifiant le règlement (UE) 2018/1726, tout en permettant l’enregistrement dans le casier judiciaire national automatisé des empreintes digitales des personnes condamnées.

Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chacune des ordonnances prévues au présent article.

Mme la présidente. L’amendement n° 140, présenté par M. Bourgi, Mme de La Gontrie, MM. Durain et Kanner, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline et J. Bigot, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, M. Cardon, Mmes Carlotti, Conconne et Conway-Mouret, MM. Cozic, Dagbert, Devinaz et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, M. Fichet, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. Jeansannetas, P. Joly et Jomier, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lepage, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel, Magner et Mérillou, Mme Meunier, M. Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mmes Poumirol et Préville, MM. Raynal et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, Todeschini, M. Vallet et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Hussein Bourgi.

M. Hussein Bourgi. C’est une position de principe que notre groupe rappelle chaque fois qu’il est question d’ordonnances. Avec en moyenne trois ordonnances et demie par mois adoptées par l’actuel gouvernement, les ministres s’attribuent des pouvoirs exorbitants sur des sujets qui nécessitent toute l’attention et l’implication des parlementaires.

C’est le cas concernant la mise en place de l’interconnexion des casiers judiciaires nationaux par l’article 32 du projet de loi. Cette disposition est loin d’être anodine dont la mise en application est particulièrement délicate et sensible. Nous refusons que les parlementaires soient dessaisis de leurs prérogatives.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. La commission des lois est par principe réservée sur le recours aux ordonnances. Nous avons, par coordination, réduit le champ de l’habilitation prévue à l’article 32 du projet de loi.

Pour autant, nous ne sommes pas favorables à la suppression complète de l’article eu égard à la nature technique des dispositions envisagées. Concernant le système européen d’information sur les casiers judiciaires, ou Ecris, il s’agit de dispositions très techniques, sur lequel nous sommes de toute manière contraints par les termes de la directive. Nous ne voyons pas d’obstacle majeur à ce que, ainsi limité, le Gouvernement puisse agir par ordonnances.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 140.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 32.

(Larticle 32 est adopté.)

Article 32
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans l'institution judiciaire
Article additionnel après l'article 32 - Amendement n° 196 rectifié

Articles additionnels après l’article 32

Mme la présidente. L’amendement n° 154 rectifié, présenté par MM. H. Leroy et Duplomb, Mme Thomas, MM. Bonhomme, Frassa et Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Laménie et Gremillet, Mme Bonfanti-Dossat, M. Daubresse, Mme Demas, MM. A. Marc, Guerriau, Charon, Meurant, Sido, Hingray et Genet et Mme Gosselin, est ainsi libellé :

Après l’article 32

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au premier alinéa de l’article L. 77-11-2 du code de justice administrative, les mots : « ou un syndicat représentatif de magistrats de l’ordre judiciaire » sont supprimés.

II. – Au 3° du IV de l’article 37 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, les mots : « ou les syndicats représentatifs de magistrats de l’ordre judiciaire » sont supprimés.

La parole est à M. Henri Leroy.

M. Henri Leroy. Ce qui est présenté tambour battant comme une révolution est en fait une réforme de coulisses. On attendait que M. Éric Dupond-Moretti garde des sceaux se souvienne des longs réquisitoires que M. Éric Dupond-Moretti avocat dressait contre le système. Le souffle n’est plus le même !

Quelles sont les attentes des Français qui leur permettront de croire de nouveau dans leur justice ? Elles se résument en deux mots : efficacité et impartialité.

Pour ce qui est de l’efficacité, il faudrait revoir la copie ! La réforme dont nous débattons n’est pas celle du grand soir ni des lendemains qui chantent.

Et je vous propose, via cet amendement, de donner une consistance à l’impartialité.

Monsieur le garde des sceaux, réveillez l’avocat qui sommeille en vous et soutenez cet amendement pour interdire à un magistrat de se syndiquer !

Souvenez-vous de ce terrible épisode du « mur des cons » ! Quel spectacle pitoyable d’un syndicat, le Syndicat de la magistrature, qui se revendique clairement comme organisation de combat ! Hélas ! Ce n’est pas le seul. Il considère la justice et le droit comme des leviers utiles pour obtenir un changement radical de la société. Faute de réaction des autorités politiques de l’époque, cette conception dévoyée du syndicalisme s’est propagée, ce qui a largement participé à saper la confiance des Français dans leur justice.

Mes chers collègues, l’incompatibilité avec le statut de magistrat de l’exercice du droit syndical est une nécessité. Elle devrait être aussi naturelle, sinon davantage, que celle des militaires. Ils servent l’intérêt général supérieur, et ils n’ont pas à y opposer quelques intérêts particuliers.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Notre collègue veut calquer le statut des magistrats sur celui des militaires et leur interdire d’adhérer à un syndicat. Cette décision serait très lourde de conséquences et ne peut pas, à notre avis, être abordée dans le cadre d’un simple amendement. Une telle mesure nécessite une réflexion beaucoup plus approfondie et des débats.

La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.

M. Hussein Bourgi. La liberté syndicale fait partie des droits fondamentaux qui existent dans notre pays.

Aujourd’hui, depuis quelques années, un débat a lieu en France pour autoriser les militaires à se syndiquer. Nous sommes favorables à la syndicalisation des militaires qui le souhaitent. Il faut des organisations qui permettent de porter les revendications légitimes de toutes les professions et de tous les corps de métiers. Les militaires ont le droit, comme les autres, de se syndiquer.

Par conséquent, nous voterons contre cet amendement et nous présenterons dès que nous en aurons l’occasion une proposition pour que les militaires puissent se syndiquer.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 154 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 32 - Amendement n° 154 rectifié
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Article 33

Mme la présidente. L’amendement n° 196 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 32

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 111-12 du code de l’organisation judiciaire, il est inséré un article L. 111-12-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 111-12-1. – Sans préjudice du code de la santé publique et du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et par dérogation à l’article L. 111-12 du présent code, le président de la formation de jugement peut, devant les juridictions statuant en matière non pénale, pour un motif légitime, autoriser une partie, un témoin, un expert ou toute autre personne convoquée et qui en a fait expressément la demande, à être entendu par un moyen de communication audiovisuelle au cours de l’audience ou de l’audition.

« Les modalités d’application du présent article, notamment les conditions de sécurité et de confidentialité des échanges, sont fixées par décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Le présent amendement vise à rendre possible, lorsqu’une partie le demande, un nouveau dispositif de visioconférence visant à faciliter la tenue d’audiences en matière civile.

La crise sanitaire a conduit à mettre en œuvre de nouvelles modalités de tenue des audiences. Je pense à l’accueil des justiciables, qui étaient parfois empilés dans la même salle. Aujourd’hui, ils sont accueillis séparément, crise sanitaire oblige. Je pense à certaines convocations que l’on a inventées, par exemple sur le téléphone portable.

Naturellement, la crise sanitaire nous a contraints à développer la visioconférence.

Un étudiant ayant terminé ses études dans une ville et déménagé demande en justice la restitution du dépôt de garantie de sa location immobilière ? Visioconférence ! Un créancier qui habite à 1 000 kilomètres est convoqué à une audience de vérification des créances devant le tribunal de commerce en matière de procédures collectives ? Visioconférence ! Une personne qui sollicite l’ouverture d’une mesure de tutelle au profit d’un parent domicilié dans un autre département est convoquée pour être entendue par le juge des contentieux de la protection ? Visioconférence !

C’est plus fluide, plus proche, et c’est utile ; c’est de la justice de proximité. Cet amendement me semble donc aller dans le bon sens.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. La commission est favorable à cette possibilité très encadrée et limitée aux juridictions judiciaires, et non aux juridictions pénales. Cela permettra de faciliter l’accès à la justice et d’accélérer la confiance dans l’institution judiciaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 196 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 32.

Article additionnel après l'article 32 - Amendement n° 196 rectifié
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Article 34

Article 33

(Non modifié)

À la fin de la première phrase de l’article L. 124-2 du code de l’organisation judiciaire, les mots : « dans le ressort d’une juridiction limitrophe » sont remplacés par les mots : « soit dans le ressort d’une juridiction limitrophe, soit dans le ressort de la même cour d’appel ». – (Adopté.)

Article 33
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Article 35

Article 34

La sous-section 2 de la section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre II du code de l’organisation judiciaire est complétée par un article L. 211-21 ainsi rédigé :

« Art. L. 211-21. – Un tribunal judiciaire spécialement désigné connaît des actions relatives au devoir de vigilance fondées sur les articles L. 225-102-4 et L. 225-102-5 du code de commerce. »

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 49 est présenté par MM. Gontard, Benarroche, Labbé, Dantec, Dossus et Fernique, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

L’amendement n° 146 est présenté par M. Bourgi, Mme de La Gontrie, MM. Durain et Kanner, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline et J. Bigot, Mmes Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mme Briquet, M. Cardon, Mmes Carlotti, Conconne et Conway-Mouret, MM. Cozic, Dagbert, Devinaz et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, M. Fichet, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. Jeansannetas, P. Joly et Jomier, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lepage, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel, Magner et Mérillou, Mme Meunier, M. Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mmes Poumirol et Préville, MM. Raynal et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, Todeschini, M. Vallet et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

Un tribunal judiciaire spécialement désigné connaît

par les mots :

Un ou plusieurs tribunaux judiciaires spécialement désignés connaissent

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 49.

M. Guillaume Gontard. Nous souhaitons par cet amendement revenir au texte du projet de loi tel qu’il avait été adopté à l’Assemblée nationale, et ce pour plusieurs raisons.

D’abord, la formulation adoptée par la commission présente le risque d’un engorgement que permettrait d’éviter la désignation de plusieurs tribunaux judiciaires, en l’occurrence deux : celui de Paris et celui de Nanterre.

Surtout, nous sommes très inquiets des conséquences que pourraient avoir les amendements ayant pour objet la désignation d’un tribunal de commerce dans les affaires relevant du devoir de vigilance.

Notre premier point d’inquiétude vient du fait que la définition du devoir de vigilance n’est pas la même selon les juridictions. Les tribunaux de commerce en ont une vision bien plus restrictive.

Adopter ces amendements reviendrait à considérer que le devoir de vigilance relève du droit du commerce, donc de litiges relatifs à la gestion interne des entreprises, par exemple sur des enjeux commerciaux entre une entreprise et ses fournisseurs ou, dans ce cas, sur la bonne information par les entreprises de leurs actionnaires sur les risques que présentent leurs activités.

Cela reviendrait donc à vider de son sens la loi de 2017 sur le devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d’ordre. Puisqu’il semble utile de le rappeler dans cet hémicycle, celle-ci a pour objet d’éviter les violations des droits humains, les préjudices écologiques ou la destruction de l’environnement, et non d’assurer la bonne information des actionnaires sur les risques que présentent leurs investissements.

Afin de préserver ce mécanisme indispensable qu’est le devoir de vigilance, il est donc inconcevable que les affaires en relevant ne soient pas de la compétence de tribunaux judiciaires. Ces derniers sont les seuls tribunaux à même de juger les entreprises dont la responsabilité pénale est engagée pour de possibles violations de droits fondamentaux.

Notre deuxième point d’alerte concerne le fait que l’appel est non suspensif dans les tribunaux de commerce.

Si les affaires étaient de la compétence initiale des tribunaux commerciaux, leur renvoi en appel dénué de caractère suspensif ouvrirait donc la voie à la poursuite, pendant des mois, d’activités entraînant des violations graves des droits humains ou des destructions de l’environnement.

Dès lors que ces affaires relèvent de la compétence des tribunaux judiciaires, elles entraînent la suspension des activités de l’entreprise, permettant d’éviter des conséquences dramatiques.

Ne serait-ce que pour des raisons de cohérence de la loi, nous vous invitons donc à voter cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour présenter l’amendement n° 146.

M. Hussein Bourgi. Dans le prolongement de ce que vient de souligner notre collègue, je souhaite indiquer que réduire le devoir de vigilance à un acte de gestion de l’entreprise à la charge des juges consulaires serait un recul intolérable tant en matière de respect des droits humains que de protection de l’environnement.

Les organismes chargés de représenter les intérêts des entreprises, les chambres de commerce et d’industrie par exemple, reconnaissent que les tribunaux judiciaires sont mieux équipés pour juger des litiges liés à l’intérêt général.

Enfin, nous refusons de nous faire les porte-voix d’entreprises comme Total qui ne respectent pas la loi et tentent de la détricoter en leur faveur.

Au contraire, nous proposons de fixer clairement dans la loi le principe selon lequel plusieurs tribunaux judiciaires sont compétents pour juger de ces affaires. Cela constitue un garde-fou indispensable pour assurer l’effectivité du droit de vigilance pour deux raisons : d’une part, cela évite l’engorgement d’une juridiction qui serait unique ; d’autre part, cela met fin aux multiples renvois de compétences entre juges qui allongent les délais de jugement, et ce toujours au détriment des populations gravement touchées par les infractions en cause.

Mme la présidente. L’amendement n° 7 rectifié bis, présenté par MM. Babary, Retailleau et Burgoa, Mme Chauvin, MM. Charon, Bouloux, Pellevat, Rapin et B. Fournier, Mme Gosselin, MM. Panunzi, J.-P. Vogel, Pointereau, Gremillet, Lefèvre, Bonhomme et Paccaud, Mme Raimond-Pavero, M. Belin, Mme Lherbier, MM. E. Blanc et Rojouan, Mme Berthet et M. H. Leroy, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

Un tribunal judiciaire spécialement désigné

par les mots :

Le tribunal de commerce de Paris

La parole est à M. Serge Babary.

M. Serge Babary. Mon propos n’ira pas du tout dans le même sens que celui des orateurs précédents.

Le présent amendement vise à rendre le tribunal de commerce de Paris compétent pour connaître des actions engagées à l’encontre des entreprises qui méconnaîtraient leurs obligations au titre la loi dite « vigilance », car son expertise et son organisation en font la juridiction la plus compétente pour appréhender une telle mission.

La loi du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre a créé un devoir de vigilance. Il se matérialise notamment par l’obligation pour les sociétés françaises de plus de 5 000 salariés en France ou de 10 000 salariés en France et à l’étranger de réaliser un plan de vigilance.

Cette loi dite « vigilance » ne précise cependant pas quel est le tribunal compétent pour connaître des actions engagées à l’encontre des entreprises qui méconnaîtraient leurs obligations.

Tel est donc l’objet de l’article 34 du projet de loi, qui vise à attribuer le contentieux du devoir de vigilance à un tribunal judiciaire spécialement désigné.

Si la spécialisation des tribunaux s’inscrit dans l’objectif de bonne administration de la justice, il est important de ne pas se tromper de tribunal. Juridiction dotée de compétences en matière économique, mais également de solides connaissances du fonctionnement de l’entreprise, le tribunal de commerce apparaît le mieux placé pour connaître des actions en matière de devoir de vigilance.

En effet, conformément aux dispositions de l’article L. 721-3 du code de commerce, le tribunal de commerce connaît des contestations relatives à un certain nombre d’engagements.

Selon la Cour de cassation, les tribunaux de commerce sont ainsi compétents pour connaître des litiges présentant un « lien direct avec la gestion » et connaissent donc déjà des actions en responsabilité civile à l’encontre du dirigeant d’une société.

Le plan de vigilance étant inclus dans le rapport de gestion, il est logique que les tribunaux de commerce aient aussi à connaître des actions fondées sur les dispositions des articles L. 225-102-4 et L. 225-102-5 du code de commerce relatives au devoir de vigilance.

Confirmant cette analyse, la cour d’appel de Versailles a, dans un arrêt du 10 décembre dernier, reconnu la compétence du tribunal de commerce au motif qu’était « caractérisée l’existence d’un lien direct entre le plan de vigilance, son établissement et sa mise en œuvre, et la gestion de la société commerciale dans son fonctionnement ».

Compte tenu de leur faible nombre et de leur spécificité, il est souhaitable que de tels litiges soient attribués à la compétence du tribunal de commerce de Paris. Celui-ci, qui est doté d’une chambre internationale, traite déjà des litiges de nature économique et commerciale de dimension internationale.

Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié, présenté par Mme Dumas, MM. Belin, Bonhomme, Bouchet, Burgoa, Cadec, Calvet, Cambon, Canévet, Chatillon, Gremillet, Karoutchi, Lefèvre, Mouiller, Paccaud, Panunzi et J.P. Vogel et Mmes V. Boyer, Demas, Dumont, Gosselin, Gruny, Joseph, Lassarade, Lavarde et Paoli-Gagin, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer le mot :

judiciaire

par les mots :

de commerce

La parole est à M. Philippe Mouiller.

M. Philippe Mouiller. Les arguments en faveur de cet amendement sont quasiment identiques à ceux qui viennent d’être développés par mon collègue Serge Babary. La seule différence est que cet amendement vise à élargir les compétences à l’ensemble des tribunaux de commerce, et pas simplement au tribunal de Paris.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. La question du devoir de vigilance suscite de vraies interrogations et de vraies réflexions, notamment pour l’attribution du contentieux.

Au sein de la commission des lois, nous avons une certitude. Au regard de sa spécificité définie par la cour d’appel de Versailles le 10 décembre dernier, le contentieux, qui est un acte faisant partie intégrante de la stratégie d’entreprise en matière de gestion des risques, nécessite d’être traité par une juridiction spécialisée, à savoir par une juridiction compétente connaissant le fonctionnement des entreprises – les entreprises mères, les entreprises donneurs d’ordre – et ayant la compétence et la qualification pour apprécier ce contentieux.

Nous avions pensé au départ que cette spécialisation pouvait relever d’un tribunal judiciaire. Mais, après réflexion et échanges avec nos collègues et de nombreux représentants, nous pensons qu’il est effectivement plus judicieux de conférer cette compétence au tribunal de commerce, et notamment à un tribunal de commerce particulièrement spécialisé en la matière, celui de Paris. Au demeurant, ce dernier dispose d’une chambre internationale qui vient d’être créée. Il est donc en toute logique nécessaire de lui confier la compétence pour traiter de ce contentieux du devoir de vigilance, dont les enjeux dépassent parfois largement nos frontières.

C’est d’autant plus cohérent pour nous aujourd’hui qu’une telle proposition correspond à la position que défend la commission des lois d’unifier le contentieux économique au sein du tribunal des affaires économiques. Cette position a été défendue dans un récent rapport de nos collègues Thani Mohamed Soilihi et François Bonhomme.

La commission est donc défavorable aux amendements identiques nos 49 et 146 et favorable à l’amendement n° 7 rectifié bis, au profit duquel elle sollicite le retrait de l’amendement n° 3 rectifié.