Mme Françoise Gatel. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. La forêt, c’est du temps long, c’est vrai, mais on a pris du retard ! Plus vite on donnera de nouvelles orientations, plus vite on avancera. Oui, c’est pour les générations futures !
La forêt mosaïque est le souhait de toutes et de tous. La formulation que nous avons choisie – « mélange d’essences à l’échelle de la parcelle » – permettrait de s’assurer que, pour s’adapter à cette diversification des essences, on ne plante pas en majeure partie des résineux monospécifiques sur un massif forestier de cent hectares, laissant une toute petite surface, à la marge, à la régénération naturelle. À défaut, cela viderait de son sens la notion de diversité d’essences.
Le Sénat va enrichir le texte quoi qu’il arrive. C’est une fierté ! Une autre fierté est la qualité du travail du groupe d’études Forêt et filière bois. Si nous maintenons nos amendements, c’est parce que nous sommes exigeants, mais, en fin de compte, nous sommes plutôt satisfaits.
M. le président. Mes chers collègues, dans la mesure où je suis saisi de plusieurs demandes de scrutin public, il me semble plus raisonnable de suspendre la séance maintenant. (Marques d’approbation au banc des commissions.)
3
Candidatures à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales ont été publiées. Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures quinze, est reprise à quatorze heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
Candidatures à une mission d’information
M. le président. L’ordre du jour appelle la nomination des membres de la mission d’information sur le thème : « Uberisation de la société : quel impact des plateformes numériques sur les métiers et l’emploi ? »
Conformément à l’article 8 du règlement, les listes des candidats remises par les groupes politiques ont été publiées. Elles seront ratifiées s’il n’y a pas d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
5
Lutte contre le dérèglement climatique
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen de l’article 19 bis D.
Article 19 bis D (suite)
M. le président. Au sein de l’article 19 bis D, nous en sommes parvenus au vote sur neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Je mets aux voix l’amendement n° 1878.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 816 rectifié, 1879 et 1880 n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 1420.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 267 rectifié, présenté par MM. Gold, Cabanel, Corbisez et Bilhac, Mmes N. Delattre et Guillotin, MM. Guiol, Requier et Roux, Mme M. Carrère, M. Guérini et Mme Pantel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Le 2° est complété par les mots : « en particulier dans les forêts primaires et matures » ;
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Les forêts primaires et les forêts matures jouent un rôle crucial dans le stockage du carbone et abritent la biodiversité la plus dense, avec des milliers d’espèces, souvent rares ou menacées. Elles sont, de surcroît, plus résistantes aux aléas climatiques que les forêts secondaires. Or nous constatons une régression préoccupante des forêts primaires et matures.
S’il n’existe plus de forêt primaire en métropole, la Guyane dispose de la plus vaste forêt primaire de France et de l’Union européenne, s’étendant sur 80 000 kilomètres carrés.
La protection de ces forêts constitue une priorité identifiée dans le cadre de la stratégie européenne pour la biodiversité, notamment en raison de leur rôle de puits majeur de carbone. Il est prévu de définir, cartographier, surveiller et protéger strictement les forêts primaires et anciennes encore présentes dans l’Union européenne.
Le présent amendement vise à inscrire les forêts primaires et matures parmi les ressources forestières reconnues d’intérêt général.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Je comprends la volonté des auteurs de cet amendement, mais celui-ci nous semble tout de même inapproprié : la biodiversité est un enjeu crucial dans toutes les forêts, et pas seulement dans les forêts primaires ou matures. Les jeunes forêts, par exemple, constituent un enjeu majeur de biodiversité pour les années à venir.
Par ailleurs, cet amendement est partiellement satisfait, puisqu’il s’avère qu’une grande partie des surfaces, notamment en Guyane, seront bientôt classées en aires protégées. Elles bénéficieront donc de toute la protection nécessaire.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. La rédaction actuelle du code forestier est volontairement généraliste, afin de préserver la biodiversité quel que soit le type de forêt concerné.
Existe, en outre, la stratégie pour les aires protégées, avec un renforcement de la protection des écosystèmes, notamment pour certaines forêts qui présentent un caractère subnaturel ou permettant l’expression complète du cycle forestier. J’ajoute, en clin d’œil, la création prochaine de la réserve intégrale de près de 3 000 hectares au sein du parc national de forêts.
Je souhaite appeler votre attention sur le fait que les termes « forêt primaire » et « forêt mature » ne font pas, à ce jour, l’objet d’une définition consensuelle et partagée.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur Cabanel, l’amendement n° 267 rectifié est-il maintenu ?
M. Henri Cabanel. Non, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 267 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2109, présenté par MM. Rambaud, Lévrier et Marchand et Mmes Schillinger et Havet, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 4° La protection ainsi que la fixation des sols par la forêt, notamment en zone de montagne, et la préservation de la qualité des sols forestiers, notamment au regard des enjeux de biodiversité ; »
II. – Alinéa 5
Remplacer les mots :
les deux occurrences
par les mots :
la seconde occurrence
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Cet amendement vise à élargir la rédaction issue de l’examen en commission, pour ne pas se limiter aux enjeux de biodiversité. La préservation de la qualité des sols forestiers doit être considérée suivant de nombreuses problématiques : perte de matière organique et de biodiversité du sol, érosion, salinisation…
M. le président. L’amendement n° 1824, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
au regard de la biodiversité
par les mots :
, notamment au regard des enjeux de biodiversité,
II. – Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
b) Au 5°, après la deuxième occurrence du mot : « les », sont insérés les mots : « sols forestiers, » ;
La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission des affaires économiques sur l’amendement n° 2109.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Les deux amendements ont le même objet : la préservation de la qualité des sols forestiers. La commission des affaires économiques du Sénat l’a ancrée dans la loi, en en faisant une véritable priorité.
Madame Schillinger, je vous demande de bien vouloir privilégier l’amendement de la commission, tout en saluant l’effort qui est réalisé au travers de l’amendement que vous avez présenté pour contribuer à la dynamique en faveur des sols forestiers. C’est la raison pour laquelle l’avis est défavorable sur l’amendement n° 2109.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Ces deux amendements visent à élargir la rédaction issue du texte de la commission, pour ne pas limiter la protection des sols forestiers aux seuls enjeux de biodiversité. Les deux rédactions étant, somme toute, extrêmement proches, le Gouvernement a émis un avis favorable sur les deux amendements.
Mme Patricia Schillinger. Je retire mon amendement au profit de celui de la commission !
M. le président. L’amendement n° 2109 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 1824.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 815, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Remplacer les mots :
économique, écologique et sociale
par les mots :
écologique, sociale et économique
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Nous saluons le travail de la rapporteure pour avis, Mme Anne-Catherine Loisier, qui a su renforcer la place de la forêt dans ce projet de loi.
Par cet amendement, nous souhaitons hiérarchiser les objectifs de la politique forestière de l’État et de la gestion des propriétaires privés inscrits à l’article 19 bis D, afin de mieux intégrer les objectifs de lutte contre le dérèglement climatique.
Pour conforter le principe d’une gestion durable et multifonctionnelle de toutes les forêts, il convient de concilier – dans cet ordre – les logiques écologique, sociale et économique. C’est à ce rééquilibrage que tend cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Il s’agit d’une précision purement symbolique, à laquelle la commission a souhaité donner un avis favorable. Néanmoins, j’insiste sur le fait qu’il n’y a pas de hiérarchisation, puisque nous nous inscrivons dans le principe de la multifonctionnalité, qui place au même niveau les enjeux écologique, économique et social.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. Je rejoins Mme la rapporteure pour avis : il n’est pas question de hiérarchiser ces enjeux. D’ailleurs, dans de nombreux textes, nous trouvons ces trois piliers du développement durable. Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. L’amendement n° 1828, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
… Au second alinéa de l’article L. 175-4, les mots : « sage gestion économique » sont remplacés par les mots « gestion durable et multifonctionnelle ».
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Il s’agit d’un amendement de coordination, qui vise à ce que ces dispositions s’appliquent à Mayotte comme dans le reste du territoire français.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 19 bis D, modifié.
(L’article 19 bis D est adopté.)
Articles additionnels après l’article 19 bis D
M. le président. L’amendement n° 1637, présenté par Mmes Rossignol et M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° de l’article L. 112-1 du nouveau code forestier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … Le reboisement d’essences d’arbres variées afin d’éviter l’enrésinement. »
La parole est à M. Joël Bigot.
M. Joël Bigot. Depuis la seconde moitié du XXe siècle, la France mène de vastes travaux de reboisement des forêts, qui ont connu une incroyable expansion, atteignant plus de 16 millions d’hectares sur notre territoire. Or, sur les 30 millions de plants plantés par an aujourd’hui, 20 millions sont des résineux. Ces essences d’arbres connues pour leur capacité à pousser très vite ont des effets nocifs sur l’écosystème des forêts.
Alors qu’il est plus que nécessaire de reboiser avec des essences capables de s’adapter aux changements climatiques, les résineux ont une capacité d’absorption du dioxyde de carbone très faible, ce qui rend les forêts de plus en plus vulnérables. Ainsi, cet amendement, proposé par Déclic et Greenlobby, vise à intégrer dans le nouveau code forestier cette nécessité de reboiser nos forêts de manière variée, afin de les adapter au mieux aux bouleversements climatiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis. Cet amendement est déjà satisfait par l’intégration de la mention « diversification des essences » à l’article 19 bis D, sur laquelle nous avons beaucoup insisté.
En outre, la référence à la lutte contre l’enrésinement nous pose souci, puisque la loi doit viser un équilibre forestier général, lequel passe par un mélange d’essences et, donc, par des résineux. Je rappelle que nous avons besoin de ces résineux pour atteindre l’objectif de la stratégie nationale bas-carbone en matière de construction et de matériaux bois. J’ajoute qu’il existe de très belles forêts de résineux avec un mélange d’espèces, en régénération naturelle et en forêt irrégulière.
Aussi, cet amendement me paraît satisfait pour une part et inopportun pour l’autre. La commission en demande donc le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État. La diversification des essences et leur adaptation aux conditions climatiques font effectivement encore l’objet d’incertitudes, mais il n’est pas souhaitable d’opposer les résineux et les feuillus. Tous deux font partie intégrante de la nature, et nous aurons besoin de la diversité des ressources végétales adaptées au climat futur pour garantir la pérennité de nos écosystèmes.
Naturellement, il s’agit d’être vigilant sur le choix des essences qui se retrouvent dans les documents d’encadrement des pratiques sylvicoles en cours de révision, notamment pour les forêts privées. Ces documents d’encadrement sont des outils précieux.
Le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur Bigot, l’amendement n° 1637 est-il maintenu ?
M. Joël Bigot. Oui, je le maintiens.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 813 rectifié est présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 936 rectifié est présenté par MM. S. Demilly, Moga et les membres du groupe Union Centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code forestier est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 121-1, il est inséré un article L. 121-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-…. – Pour répondre à l’urgence écologique et climatique et atteindre l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 énoncé à l’article L. 100-4 du code de l’énergie, la politique forestière nationale a pour objectif de conserver et, le cas échéant, de renforcer le puits de carbone forestier conformément à l’article 5 de l’Accord de Paris adopté le 12 décembre 2015, signé par la France à New York le 22 avril 2016, et au d du 1 de l’article 4 de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, conclue à New York le 9 mai 1992 et signée par la France le 13 juin 1992. » ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 121-2-2 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Les objectifs de ce programme permettent la conservation, voire le renforcement, du puits de carbone forestier en veillant au respect des fonctions écologiques, sociales et économiques des forêts. Ces objectifs prévoient de plafonner le niveau de prélèvement global à celui de l’année 2019 en veillant à la répartition équilibrée des prélèvements entre les territoires ainsi qu’entre les différents types et statuts de bois et forêts. »
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 813 rectifié.
Mme Laurence Cohen. Nous le savons, la forêt est un des puits de carbone de notre planète, avec l’océan. Or, selon une étude récente, la forêt amazonienne commence à émettre plus de gaz à effet de serre qu’elle n’en stocke, du fait de la déforestation, des incendies de forêt et de l’élevage. Le groupe d’amitié France-Brésil, que j’ai l’honneur de présider, y est particulièrement sensible.
L’urgence est donc non seulement climatique, mais, plus largement, environnementale, car climat et biodiversité sont étroitement liés. Cette urgence impose des actions fortes et rapides. Surtout, cette urgence est mondiale ; elle concerne tous les pays et tous les habitants de la planète. Chaque État est responsable ; dans ce contexte, la France peut et doit montrer l’exemple. Les générations futures s’en souviendront.
Le présent amendement vise à inscrire, dans le code forestier, les objectifs de conservation et de renforcement du puits de carbone forestier, pour atteindre les objectifs de neutralité carbone de la France à l’horizon de 2050. En effet, comme le souligne l’association Canopée, l’engagement de la France pour tenir les objectifs de l’accord de Paris doit apparaître dans le code forestier, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Cet état de fait conduit à une lacune absolument considérable : cet engagement n’est pas suffisamment pris en compte dans la politique nationale forestière retranscrite dans le programme national de la forêt et du bois. Or, pour atteindre les objectifs de neutralité carbone que nous nous sommes fixés, il est essentiel de renforcer le puits de carbone forestier, ce qui doit se traduire concrètement par un plafonnement du niveau de prélèvements.
Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour présenter l’amendement n° 936 rectifié.
M. Jean-Pierre Moga. L’objet de cet amendement est également d’inscrire, dans le code forestier, les objectifs de conservation, voire de renforcement du puits de carbone forestier, indispensable pour atteindre les objectifs de neutralité carbone de la France à horizon de 2050. Cet engagement de la France au titre de l’accord de Paris n’apparaît pas, actuellement, dans le code forestier. Il n’est, de ce fait, pas pris en compte à la hauteur des enjeux dans la politique nationale forestière retranscrite dans le programme national de la forêt et du bois.
Pour atteindre les objectifs de neutralité carbone, il est essentiel de préserver, voire de renforcer le puits de carbone forestier, ce qui doit se traduire concrètement par un plafonnement au niveau des prélèvements dans les objectifs de la politique nationale forestière retranscrite dans le programme national de la forêt et du bois.
Selon le rapport annuel 2019 du Haut Conseil pour le climat, pour la période 2015-2018, le puits net de carbone du secteur des terres a diminué de 2,1 % par an en moyenne, du fait des forêts. Pourtant, la trajectoire de la stratégie nationale bas-carbone anticipait un accroissement annuel de 11 %. Le rapport annuel 2020 indique que cette tendance se poursuit.
Les études françaises récentes sur le bilan carbone des scénarios d’augmentation de la récolte confirment les résultats à l’échelle européenne : une augmentation massive de la récolte augmentera les émissions de CO2 pendant au moins trois décennies. De leur côté, les climatologues estiment que seule une diminution totale, d’ici à 2030-2050, peut nous permettre de rester sous le seuil de 1,5 degré de réchauffement ciblé par les accords de Paris.
M. le président. L’amendement n° 1885, présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code forestier est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 121-1, il est inséré un article L. 121-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-1-…. – Pour répondre à l’urgence écologique et climatique et atteindre l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 énoncé à l’article L. 100-4 du code de l’énergie, la politique forestière nationale a pour objectif de conserver et, le cas échéant, renforcer le puits de carbone forestier. »
2° Le premier alinéa de l’article L. 121-2-2 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Les objectifs du programme national de la forêt et du bois permettent la conservation, voire le renforcement du puits de carbone forestier en veillant au respect des fonctions écologiques, sociales et économiques des forêts. Ces objectifs prévoient de plafonner le niveau de prélèvement global à celui de l’année 2019 en veillant à leur répartition équilibrée sur le territoire et entre les différents statuts et types de bois et forêts. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. En complément des arguments de mon collègue Jean-Pierre Moga, je tiens à préciser que les prélèvements forestiers dégagent du carbone via leur impact sur le sol et, lorsqu’il s’agit de bois énergie, leur combustion. Ces émissions ne sont compensées par la repousse des arbres et la restauration du sol que des dizaines, voire des centaines d’années plus tard. Or c’est maintenant, dans les décennies à venir, qu’il nous faut réduire notre impact carbone.
Le plafonnement proposé par cet amendement est essentiel pour atteindre les objectifs climatiques de la France. Il correspond, par ailleurs, aux propositions de la Convention citoyenne pour le climat.
Si une confusion est entretenue à ce sujet, permettez-moi de dire que ce sont bien les vieilles forêts, et non les forêts jeunes, qui stockent le plus de carbone, notamment du fait du stockage dans les sols forestiers. En forêt tempérée, les sols stockent plus de carbone que la partie aérienne de l’arbre.
En France, 79 % des arbres ont moins de cent ans et, donc, sont jeunes. Accélérer les prélèvements ne fera qu’accentuer la perte de stockage de CO2 par les forêts. De plus, une augmentation des prélèvements dégraderait la fertilité et la biodiversité des écosystèmes forestiers, hypothéquant ainsi nos chances de restaurer un bon état écologique des forêts françaises.
M. le président. L’amendement n° 1424, présenté par Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, Montaugé et Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Devinaz, Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy et Tissot, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 19 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 121-2-2 du code forestier est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il vise à préserver et le cas échéant, à renforcer le rôle de puits de carbone de la forêt afin de contribuer à l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 énoncé à l’article L. 100-4 du code de l’énergie. »
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Comme cela a été souligné par les intervenants précédents, les écosystèmes terrestres français constituent actuellement un puits net de carbone très significatif, estimé à près de 20 % des émissions françaises. Ce puits est principalement constitué des écosystèmes forestiers, qui, en plus de fournir le bois nécessaire à la transition bas-carbone, séquestrent près de 87 millions de tonnes de CO2 par an, soit l’équivalent de 19 % des émissions annuelles françaises.
Le rôle de puits de carbone de la forêt a été inscrit par d’autres dispositions au sein de notre politique forestière nationale. Nous proposons, par souci de cohérence, d’intégrer cette dimension dans les objectifs du programme national de la forêt et du bois, afin de contribuer à l’objectif de neutralité carbone à l’horizon de 2050.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?