M. le président. En conséquence, l’article 14 bis demeure supprimé.
Article 14 ter
(Supprimé)
Article 15
(Suppression maintenue)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Dominique Théophile, pour explication de vote.
M. Dominique Théophile. Nous nous abstiendrons, sans grande surprise, sur cette proposition de loi. Nous le regrettons, il faut le dire, mais le texte que le Sénat s’apprête à voter est très éloigné du texte initial et de ses objectifs.
Je ne vais pas refaire le discours que j’ai tenu hier à la tribune ; j’ai eu l’occasion d’y revenir à plusieurs reprises. Quelques mots seulement pour déplorer que ce texte, qui était jugé, de manière quasi unanime, peu ambitieux, ait été amputé de mesures qui nous semblaient intéressantes. Je pense évidemment aux auxiliaires médicaux en pratique avancée, à la poursuite de l’intégration des GHT et à la lutte contre les abus de l’intérim médical – certes, nous avons voté un amendement à ce sujet, mais le Sénat a ensuite rejeté l’article…
Pour autant, il serait malhonnête de rejeter en bloc le travail du Sénat, de la commission des affaires sociales et, bien sûr, de notre collègue rapporteur. Il serait dommage également de s’opposer à un texte, même modifié, qui va globalement dans le bon sens.
C’est pourquoi le groupe RDPI s’abstiendra, à regret, sur cette proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Le groupe Les Républicains soutiendra ce texte, qui a été largement réécrit grâce à des propositions fort intéressantes de la commission.
La proposition de loi qui nous est parvenue était tout de même singulière, puisque son premier article prévoyait la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement – je n’avais jamais vu cela !
Les avis donnés par le Gouvernement sur les amendements ont eux aussi été singuliers. Hier soir, nous avons pu découvrir une technique gouvernementale consistant à soutenir des amendements qui ne lui convenaient pas pour faire en sorte de supprimer des parties de textes qui ne lui convenaient pas non plus, plutôt que de les réécrire. C’est une nouvelle pratique gouvernementale pour ne pas donner suite aux propositions du Sénat. Dont acte !
L’intitulé de la proposition de loi est assez pompeux. Il évoque une ambition de simplification et de clarification, mais les résultats sont relativement modestes. Ce texte risque donc de créer beaucoup de déceptions.
En ce qui nous concerne, nous avons choisi de refuser les motions de procédure afin de débattre. Il ne faut rien regretter, parce que nous avons eu des discussions tout à fait intéressantes dans certains domaines. Nos débats permettront peut-être à la commission mixte paritaire d’améliorer certains dispositifs, mais ils resteront nécessairement modestes par rapport à ce que l’on est en droit d’attendre d’une loi consacrée à la santé.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Nous arrivons au terme d’un débat qui a été intéressant, notamment lorsqu’était présent M. le ministre des solidarités et de la santé – je veux d’ailleurs le remercier de la qualité des réponses qu’il nous a apportées.
Vous le saviez, dès le départ, nous étions hostiles à cette proposition de loi. Nous avons d’ailleurs déposé une motion tendant à opposer la question préalable, car c’est en fait la logique même de ce texte qui ne convient pas : elle ne convient d’ailleurs ni aux patients ni aux personnels de santé, parce qu’elle ne répond pas aux difficultés de notre système de santé public et qu’elle continue d’obéir à une logique libérale, en encourageant toujours plus les recettes qui ont cours dans le privé. Je pense notamment à tout ce qui a trait à la logique managériale et à la mise en concurrence entre les services – ce sont des mesures qui n’ont rien de positif.
En outre, ce texte renforce les groupements hospitaliers de territoire, sans en avoir évalué l’impact sur l’offre de soins dans nos territoires. Continuer de les renforcer sans bilan ni évaluation ne va pas dans le bon sens.
Monsieur le ministre, il existe une véritable attente de la part des personnels de santé ; ils l’expriment depuis de longs mois. Ils ont déjà été très déçus par le Ségur et ils vont de nouveau vivre une grande frustration avec ce texte.
Malheureusement, même avec un débat nourri, les amendements que le groupe communiste républicain citoyen et écologiste a portés n’ont pas été adoptés. Pourtant, ils étaient de nature à améliorer cette proposition de loi et à répondre aux attentes des personnels.
Aussi, nous craignons que médecins et autres professionnels continuent de quitter en nombre l’hôpital ; ce sont souvent des départs sur la pointe des pieds, mais ils sont révélateurs de conditions de travail de plus en plus difficiles.
Enfin, la grande absente de ce texte, c’est la démocratie sanitaire. Même s’il y a eu un effort vis-à-vis des chefs de service, les pôles ont été maintenus, ce qui est combattu par l’ensemble des personnels, et aucune redistribution des pouvoirs de décision n’a été actée.
Pour l’ensemble de ces raisons, nous voterons contre cette proposition de loi.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Je remercie également le ministre pour les échanges que nous avons eus au début et à la fin de ce texte. Sur le reste, nous n’avons pas vraiment pu échanger avec le Gouvernement et je le regrette.
Ce texte reste marqué des défauts que nous pointions dans la discussion générale, au premier rang desquels l’instabilité juridique. C’est tout à fait net sur la question des protocoles de coopération. Nous restons convaincus que ce texte aurait dû repartir en commission pour nous donner quelques semaines de plus, le temps de prendre connaissance de l’ordonnance qui sera publiée sur la question au mois de mars. Nous aurions alors pu légiférer avec une meilleure visibilité.
Ensuite, nous restons sur l’idée que cette proposition de loi a toutes les caractéristiques d’un projet de loi et qu’un avis du Conseil d’État aurait été nécessaire. Les discussions que nous avons eues ont parfois montré une difficulté à appréhender de façon systémique les réformes qui nous sont proposées. Cette confusion s’est entendue à certains moments de nos débats, révélant des conditions de travail qui ne sont pas satisfaisantes.
Sur le fond, quel est le sens d’une proposition de loi ayant pour ambition de décliner des mesures du Ségur de la santé, mais qui en fait n’en décline que très peu – dont acte ! – et qui introduit un ensemble d’autres dispositions, dont certaines par voie d’amendements déposés par le Gouvernement en cours de débat ?
Cela nous a d’ailleurs valu, en commission, des discussions compliquées sur le périmètre de l’article 45 de la Constitution. Des amendements ont été frappés d’irrecevabilité à ce titre, ce qui était, dans certains cas, tout bonnement incompréhensible. Cela a clairement démontré l’imperfection du périmètre de la délibération qui nous était proposée.
À mes yeux, si le Gouvernement veut s’attaquer à une modification de notre système de santé, c’est avant tout en tirant les leçons de l’épidémie qui nous frappe et qui a mis en lumière les défauts de notre système de santé public. Or on ne trouve aucune réponse dans ce texte. Est-ce trop tôt ? Non ! Il est temps, même s’il faut aussi prendre son temps pour un certain nombre de dispositions.
Finalement, la procédure accélérée qui a été décidée par le Gouvernement est particulièrement dommageable, car, nous l’avons vu ce matin, un peu de temps et de maturation nous aurait probablement permis d’arriver à un texte plus satisfaisant.
En tout cas, nous ne pouvons pas approuver cette proposition de loi en l’état.
M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, nous avons eu l’occasion de nous exprimer sur la nature de ce texte. Ce n’est pas un texte global sur la santé ni un big-bang, mais c’est un texte d’ajustement et nous le voterons.
Nous saluons le travail qui a été réalisé par la commission et le rapporteur.
Au total, même si nous avons effleuré un certain nombre de sujets que nous aimerions étudier à l’avenir de manière plus approfondie, je crois que nous avons quand même eu un beau débat parlementaire – il a été nourri et pas bradé.
Nous avons abordé un certain nombre de questions essentielles : la réorganisation des soins ; les groupements hospitaliers de territoire qui, nous le voyons dans nos départements, s’imposent difficilement, même si chacun sent bien qu’il est nécessaire d’aller vers plus de mutualisation ; la gouvernance des hôpitaux et la démocratie. Nous n’avons pas bousculé les organisations et ce sont des débats qui ne sont pas près d’être clos.
Nous avons également abordé le sujet du recrutement. Il nous faut régler la question de l’intérim et de la surchauffe inflationniste, qui est à la source du déficit des hôpitaux. Nous devons aussi nous occuper de la question des études de médecine ; nous sommes, à cet égard, dans une période intermédiaire.
Peut-être ne fallait-il pas trop attendre de ce texte – c’était notre position de départ. In fine, grâce au travail du rapporteur et à la présence du ministre, que nous remercions, nous avons quand même eu un beau débat.
Nous voterons cette proposition de loi.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Les Indépendants votera cette proposition de loi qui complète et précise les propositions faites pour la gestion de l’hôpital lors du Ségur de la santé. Celui-ci a offert au personnel hospitalier une meilleure rémunération et des perspectives ont été ouvertes pour les hôpitaux, dont les investissements devraient être pris en charge de manière très importante.
À l’occasion de l’examen de ce texte, le déficit en médecins qui est consécutif au numerus clausus a été de nouveau mis en avant, mais M. le ministre a su quelque peu nous rassurer en ce qui concerne les étudiants en médecine – ils doivent être plus nombreux !
Nous manquons de personnel dans les Ehpad comme à l’hôpital ; il faut former beaucoup plus de gens, faute de quoi les établissements continueront de recourir à l’intérim. Même si le problème du recours abusif à l’intérim sera sans doute réglé par un accord entre sénateurs et députés lors de la commission mixte paritaire, il faudra former davantage de monde, si l’on ne veut pas qu’il se renouvelle.
Cette proposition de loi contient des avancées, par exemple pour les infirmières en pratique avancée ou les sages-femmes, mais surtout pour le management hospitalier au travers de la revalorisation de la place des chefs de service et du rôle important donné à la commission médico-soignante. La lutte contre le recours abusif à l’intérim est aussi extrêmement importante, tout comme la création d’une plateforme à destination des personnes handicapées, dont je souhaite qu’elle soit déclinée à l’échelon départemental.
J’aurais souhaité avoir des éclaircissements sur les groupements hospitaliers de territoire, notamment sur la possibilité de créer des GHT départementaux, quand le potentiel existe et en fonction du désir des élus et des commissions médicales d’établissement ; j’espère que cela pourra se réaliser à l’avenir.
Cela dit, nous voterons cette proposition de loi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Je tiens à remercier M. le ministre de sa présence, ainsi que Mme Bourguignon qui était hier soir et ce matin au banc du Gouvernement. Sur ces sujets relatifs à la santé, il est important que vous soyez ici, monsieur le ministre, pour que nous puissions débattre de façon un peu plus développée.
Je remercie aussi, bien sûr, tous les membres de la commission des affaires sociales et son rapporteur, Alain Milon : ils se sont tous beaucoup impliqués sur ce texte. Je remercie également les administrateurs de notre commission, toujours très performants, et tous les sénateurs qui ont participé à ce débat.
Je prends acte, monsieur le ministre, de votre proposition de venir nous présenter les ordonnances, quand elles seront prêtes.
D’ici à la réunion de la commission mixte paritaire, nous travaillerons à trouver un terrain d’entente avec l’Assemblée nationale, étant entendu que chacun doit faire un pas vers l’autre.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. Je veux à mon tour remercier l’ensemble des sénateurs pour le travail qui a été réalisé et l’adoption de cette proposition de loi. Je le redis : il s’agit d’une démarche parlementaire, de sa genèse à aujourd’hui. Je souhaite que cela soit le cas jusqu’au bout : la commission mixte paritaire sera donc évidemment libre et souveraine pour déterminer, si les conditions d’un accord sont réunies.
Pour ma part, je suis confiant ! Il m’est arrivé, en tant que député, d’arriver en commission mixte paritaire sans autre espoir que de passer une demi-heure ensemble ; honnêtement, il me semble que, cette fois, le jeu en vaut la chandelle, car chaque jour, chaque semaine que l’on pourra gagner pour la mise en application de ces dispositions sera précieux pour l’hôpital et l’ensemble des soignants, qui attendent vraiment qu’on fasse bouger les choses.
Merci encore une fois pour l’ambiance dans laquelle ce travail s’est déroulé ; je suis vraiment ravi d’avoir pu y participer autant que possible.
M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Pascale Gruny.)
PRÉSIDENCE DE Mme Pascale Gruny
vice-président
Mme le président. La séance est reprise.
5
Justice de proximité et réponse pénale
Discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission
Mme le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, améliorant l’efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale (proposition n° 161, texte de la commission n° 353, rapport n° 352).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le garde des sceaux.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la présidente, je me suis laissé dire que c’était aujourd’hui votre anniversaire ; permettez-moi de vous adresser mes vœux les plus chaleureux ! (Applaudissements.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous le savez, la proximité guide mon action depuis juillet dernier ; je sais que nous avons cela en partage.
Il est indispensable de rendre la justice plus accessible, plus lisible et plus efficace. Nombre de territoires sont aujourd’hui marqués par la petite délinquance, qui altère la tranquillité publique, dégrade les conditions de vie et donne le sentiment d’une impunité faute d’une réponse judiciaire rapide et immédiatement visible. Les dégradations, les insultes, les rodéos urbains et les petits trafics en tous genres affectent le quotidien des Français et génèrent leur exaspération. Afin de lutter contre ces incivilités et ce sentiment d’impuissance chez les victimes, le Gouvernement s’est engagé dans une politique visant à renforcer la justice de proximité.
Le Premier ministre l’a rappelé lors de son discours de politique générale : les Français veulent une justice au cœur des territoires, des villes et de leurs quartiers. Elle doit être rendue au plus près de nos concitoyens.
La réponse à ce besoin de protection et de sécurité passe d’abord par des moyens supplémentaires.
Le budget important que j’ai décidé de consacrer au renforcement de la justice de proximité est à la hauteur des enjeux.
Les frais de justice ont été augmentés de 127 millions d’euros. Ils permettront notamment de mobiliser davantage les délégués du procureur, qui sont au plus près des justiciables et des victimes.
Une somme de 13 millions d’euros permettra de recourir plus largement à des magistrats honoraires et à des magistrats à titre temporaire et 20 millions d’euros seront investis au profit du milieu associatif de la protection judiciaire de la jeunesse, pour renforcer la prise en charge rapide des délits du quotidien.
Enfin, 1 100 emplois de contractuels, parmi lesquels 950 ont d’ores et déjà été recrutés, sont progressivement affectés dans les tribunaux et services déconcentrés de la justice.
Mais la justice de proximité passe également par une politique pénale qui prend en compte les litiges de basse intensité et qui accompagne nos concitoyens les plus démunis.
Dans une circulaire de politique générale du 15 décembre 2020, j’ai décliné les actions que je souhaitais voir rapidement mises en œuvre pour faciliter l’accès au service public de la justice et apporter une réponse pénale crédible, effective et rapide qui prenne en compte les victimes, bien sûr, tout en assurant la réinsertion des auteurs.
J’ai demandé un renforcement des audiences foraines et des permanences dans les lieux d’accès au droit, aujourd’hui appelés « points justice ». Je souhaite tout particulièrement accroître le périmètre d’intervention des délégués du procureur, qui font un travail indispensable et qui apportent, en lien étroit avec les parquets, une réponse pénale de proximité et de grande qualité. J’ai demandé aux procureurs de la République de veiller à leur forte mobilisation sur l’ensemble du territoire, afin d’être plus proche de nos concitoyens. J’ai d’ailleurs pris, le 21 décembre 2020, un décret qui précise les missions des délégués et leur donne la possibilité, pour l’exercice de leurs missions, de tenir des permanences délocalisées.
L’autorité judiciaire doit par ailleurs être plus réactive face aux incivilités. De sa rapidité dépend l’efficacité de son action. J’ai souhaité que les parquets maîtrisent davantage les délais de réponse pénale et qu’ils créent, dans les services d’une certaine importance, des filières dédiées au traitement des infractions du quotidien.
La justice doit également être plus proche des acteurs locaux, en réaffirmant des relations partenariales avec les collectivités, les élus, le tissu associatif et les acteurs de terrain, pour apporter des réponses plus réactives face aux incivilités.
L’amélioration de la justice de proximité passe enfin par des dispositions pénales plus efficaces pour lutter contre la petite délinquance qui parasite la vie de nos concitoyens. Pour les délits de faible gravité, il faut des réponses rapides et constructives.
C’est l’objet de la proposition de loi que vous examinez.
Je tiens à souligner la qualité des travaux de votre commission, qui apporte à ce texte des avancées très significatives. Je tiens à saluer tout particulièrement le travail approfondi de votre rapporteur, M. Alain Marc, notamment son amendement n° 16, qui a pour objet de favoriser, dans le cadre d’une transaction, le recours au travail non rémunéré par les maires face aux incivilités commises sur leurs communes. Il s’agit là d’une belle avancée ; j’y suis, à ce titre, très favorable.
Cette proposition de loi simplifie par ailleurs les modalités d’exécution du travail d’intérêt général (TIG).
Ce volet est essentiel, car cette réponse pénale, très pédagogique, n’a de sens que si elle est rapide. Or, aujourd’hui, le délai moyen d’exécution d’un TIG est de quatorze mois, ce qui est incompréhensible et totalement inefficace. Nous disposons de vingt mille postes de travail d’intérêt général et nous continuons à les développer. Nous avons des lieux d’accueil et des référents dans les collectivités. Il nous faut maintenant réduire impérativement le délai d’exécution de cette peine. La déjudiciarisation et la simplification des modalités de mise en œuvre du TIG, que nous soutenons, vont largement y contribuer.
Ce texte complète par ailleurs les mesures alternatives aux poursuites déjà prévues par le code de procédure pénale. Le procureur de la République pourra ainsi demander au délinquant de remettre en état les lieux ou les objets dégradés, ou le contraindre à verser une contribution citoyenne à une association d’aide aux victimes. Ces sanctions à la fois punitives et éducatives vont dans le bon sens. S’agissant notamment des jeunes ou des primo-délinquants, elles sont les mieux à même de prévenir la récidive.
La justice de proximité doit répondre au défi de réconcilier la justice du quotidien avec ses usagers. Un budget important, une politique pénale adaptée aux territoires, des dispositions plus efficaces : voilà la justice qui protège ! La proposition de loi que vous examinez y participe significativement, en renforçant la proximité, l’efficacité et la rapidité de la réponse pénale. Le Gouvernement lui est en conséquence favorable. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Philippe Bonnecarrère applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Marc, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à doter les juridictions de nouveaux outils juridiques afin de les aider à rendre la justice au plus près de nos concitoyens et à répondre sans délai aux petits délits du quotidien. Elle répond ainsi aux objectifs que le Premier ministre Jean Castex avait assignés au ministère de la justice dans son discours de politique générale.
Cette proposition de loi fait suite à une circulaire de la chancellerie, en date du 15 décembre 2020, qui incite les chefs de juridiction à prendre différentes initiatives pour se rapprocher du terrain, tout en prenant mieux en charge les victimes. En allouant des moyens nouveaux au recrutement de magistrats à titre temporaire, de magistrats honoraires ou de délégués du procureur, le budget de la justice devrait faciliter la mise en œuvre de ces mesures.
Le texte dont nous sommes saisis résulte d’une initiative parlementaire, puisqu’il a été déposé par nos collègues députés du groupe Agir ensemble. Il présente néanmoins un caractère assez technique et plusieurs dispositions qu’il contient sont très ponctuelles.
Cette proposition de loi contient des dispositions de quatre catégories : des mesures qui concernent les alternatives aux poursuites et la composition pénale ; la mise en œuvre des peines de travail d’intérêt général ; le recouvrement des contraventions ; enfin, des mesures de simplification des procédures concernant l’appel des jugements d’assises et les pourvois en cassation.
Sur le premier volet, relatif aux alternatives aux poursuites et à la composition pénale, rappelons que ces deux procédures sont mises en œuvre par le parquet dans le but d’apporter une réponse pénale à des infractions de faible ou de moyenne gravité sans passer par une juridiction de jugement, ce qui évite d’engorger les tribunaux. Ces procédures représentent aujourd’hui une part considérable de l’activité des parquets, de l’ordre de 40 %. La composition pénale est entourée d’un plus grand formalisme, puisqu’elle est soumise, sauf exception, à la validation d’un juge du siège.
La présente proposition de loi complète et précise la liste des mesures pouvant être mises en œuvre par le parquet. Concernant les alternatives aux poursuites, elle précise que l’auteur des faits pourra être amené à se dessaisir au profit de l’État de biens qui ont servi à commettre l’infraction ou qui en sont le produit. Elle introduit également des interdictions d’entrer en contact avec la victime ou avec des complices.
Elle crée enfin – c’est sans doute la mesure la plus innovante – une contribution citoyenne, d’un montant maximal de 3 000 euros, que l’auteur des faits serait obligé de verser à une association d’aide aux victimes. La commission a été sensible à l’intérêt pédagogique de cette contribution – l’ancien conseiller pédagogique que je suis y est particulièrement attaché ! – qui aidera l’auteur des faits à prendre conscience des conséquences de ses actes, tout en exprimant une forme de reconnaissance pour le travail remarquable accompli par ces associations auprès des victimes d’infractions.
Concernant la composition pénale, le texte prévoit de porter de soixante à cent le nombre maximal d’heures de travail non rémunéré (TNR) pouvant être effectuées et il ouvre la possibilité de suivre un stage de responsabilité parentale. Il prévoit également de supprimer l’obligation de validation par un juge du siège des compositions conclues en matière contraventionnelle.
En ce qui concerne le travail non rémunéré, la commission a adopté un amendement afin de l’inclure dans le champ de l’expérimentation prévue par la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.
Cette expérimentation vise à évaluer dans quelle mesure le secteur de l’économie sociale et solidaire peut participer à l’accueil des personnes condamnées à une peine de travail d’intérêt général. Il nous paraît intéressant que le secteur de l’économie sociale et solidaire puisse, lui aussi, accueillir des travaux non rémunérés. Au moment de dresser le bilan de l’expérimentation, il serait ainsi possible de croiser le regard du parquet et celui du juge de l’application des peines afin de disposer d’une évaluation plus complète.
Je remercie le Gouvernement d’avoir accueilli favorablement notre suggestion de modifier le code de la sécurité sociale afin que les personnes qui effectuent un travail non rémunéré dans le cadre d’une transaction conclue avec le maire puissent être indemnisées en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle. Cette modification permettra de combler une lacune qui compliquait la vie de nos communes.
Sur une proposition d’Alain Richard et d’autres collègues du groupe RDPI, la commission a également souhaité autoriser l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc) à mettre des biens immobiliers saisis dans le cadre d’une procédure pénale à la disposition d’associations ou de fondations reconnues d’utilité publique ou d’organismes participant à la politique du logement.
Cette mesure a déjà été adoptée par le Sénat et par l’Assemblée nationale à l’occasion de l’examen de la proposition de loi relative à l’amélioration de la trésorerie des associations ; comme nous ne savons pas quand ce texte sera inscrit à l’ordre du jour, c’est pour nous l’occasion d’avancer…
Le deuxième volet du texte vise à fluidifier l’exécution des peines de travail d’intérêt général (TIG). Ces dernières présentent un réel intérêt pour prévenir la récidive et favoriser la réinsertion sociale et professionnelle des condamnés. L’Agence du travail d’intérêt général et de l’insertion professionnelle des personnes placées sous main de justice (Atigip) a été créée à la fin de l’année 2018 pour prospecter de manière plus systématique les employeurs susceptibles de proposer des TIG.
Deux mesures complémentaires sont envisagées par le texte.
Premièrement, il est proposé de confier aux directeurs des services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) certaines tâches actuellement dévolues au juge de l’application des peines (JAP). Ainsi, les directeurs de SPIP deviendraient compétents pour fixer les modalités d’exécution de la peine et seraient chargés d’instruire les demandes des employeurs désireux de proposer des TIG. Responsable de la bonne exécution des peines, le JAP conserverait toutefois la possibilité de statuer lui-même, lorsque cela lui paraît justifié.
Dans une large mesure, ces dispositions ne font qu’entériner la pratique constatée sur le terrain : dans les faits, c’est bien le directeur du SPIP qui assume ces missions, tandis que le JAP se contente, sauf exception, de valider les décisions qui lui sont soumises.
Deuxièmement, il est prévu de supprimer l’obligation de l’examen médical préalable à l’accomplissement d’un TIG. Il serait toutefois maintenu dans certaines hypothèses, précisées par décret et justifiées par la nature des travaux à accomplir ou par les caractéristiques du condamné, par exemple s’il s’agit d’un mineur.
Sur ce volet du texte, la commission s’est surtout attachée à clarifier les interventions respectives du directeur du SPIP et du JAP. Les directeurs de SPIP effectuent un travail remarquable qui n’est pas toujours apprécié à sa juste valeur. Il me paraît donc important de souligner, à l’occasion de l’examen de ce texte, les responsabilités éminentes qu’ils assument.
Le troisième volet de la proposition de loi concerne les amendes forfaitaires, l’objectif étant d’en améliorer le taux de recouvrement. Le dispositif de l’amende forfaitaire a fait la preuve de son efficacité pour sanctionner des infractions « de masse », sans engorger les tribunaux. Il autorise une verbalisation immédiate et automatique de certaines infractions contraventionnelles, mais aussi de quelques infractions délictuelles, telles que la conduite sans permis ou sans assurance et l’usage illicite de stupéfiants.
Afin d’accélérer leur recouvrement, la loi a prévu que le montant de l’amende forfaitaire due au titre de certaines infractions routières peut être minoré, si l’amende est réglée au moment de la constatation de l’infraction ou au plus tard dans un délai de quinze jours. Le contrevenant est ainsi incité financièrement à s’acquitter rapidement du montant de l’amende. Il est proposé d’élargir le mécanisme de l’amende forfaitaire minorée, en l’appliquant aux contraventions de la cinquième classe et en autorisant le pouvoir réglementaire à l’étendre à d’autres catégories de contraventions.
Une autre disposition, plus ponctuelle, vise à éviter que les auteurs de certaines infractions routières échappent à une sanction, notamment à un retrait de points, parce que leur véhicule aurait été immatriculé, par erreur, sous le nom d’une personne morale.
J’en viens enfin au dernier volet du texte, qui s’inspire de suggestions formulées par la Cour de cassation dans son rapport annuel et qui présente un caractère assez technique.
Il tend à simplifier le désistement de l’accusé ayant interjeté appel d’une décision de cour d’assises, à harmoniser le délai accordé au demandeur en cassation pour déposer un mémoire et à autoriser le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation à désigner le magistrat chargé de rapporter une affaire après le dépôt des mémoires des avocats, de manière qu’il soit plus facile de sélectionner le rapporteur le mieux à même de traiter le dossier.
La commission a approuvé sans modification ces trois dispositions ponctuelles.
Vous le voyez, mes chers collègues, ce texte cherche à parfaire des dispositifs existants qui sont déjà largement utilisés sur le terrain ou gagneraient à être développés.
La commission des lois vous demande donc de l’approuver, tout en soulignant que d’autres mesures seront nécessaires pour faire vivre la promesse d’une justice de proximité : des mesures d’organisation, bien sûr, mais aussi l’allocation de moyens adaptés pour maintenir sur l’ensemble de notre territoire, notamment dans les territoires ruraux, des lieux de justice en nombre suffisant. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Philippe Bonnecarrère applaudit également.)