M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Dans sa rédaction actuelle, l’article 16 de l’ordonnance présente une ambiguïté : elle peut laisser croire que seules les Comue préexistantes peuvent faire évoluer leur statut. C’est cette ambiguïté que j’ai souhaité lever.
En réalité, deux hypothèses se font jour.
La première est celle d’une Comue préexistante souhaitant devenir une Comue expérimentale. Une telle transformation entre bien dans le champ de l’expérimentation et impose une modification des dispositions statutaires, ce qui nécessite, en général, la consultation des établissements membres. Cela n’est possible que si le périmètre de la Comue expérimentale est strictement le même que celui de la Comue préexistante.
La seconde est celle d’une Comue expérimentale créée ab initio. Cette création entre directement dans le champ de l’expérimentation et doit respecter les trois premiers alinéas de l’article : elle doit donc suivre la procédure prévue par la loi de 2013.
De fait, les transformations dont il s’agit sont soumises aux instances des établissements membres : j’émets un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, ma contestation porte sur le fond. Des expérimentations sont nécessairement temporaires : on ne saurait les transformer en mesures dérogatoires permanentes par le biais d’ordonnances, comme vous nous le proposez. Le Parlement doit en débattre dans le cadre d’un projet de loi !
M. le président. Je mets aux voix l’article 21.
(L’article 21 est adopté.)
Article 22
I. – Dans les conditions définies à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi visant à :
1° Organiser la dévolution des droits de propriété intellectuelle sur les actifs obtenus par des auteurs de logiciels ou inventeurs accueillis au sein d’une entité réalisant de la recherche et qui ne sont ni des salariés ni des agents publics ;
2° Simplifier, dans le respect de la directive n° 2009/41/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 mai 2009 relative à l’utilisation confinée de micro-organismes génétiquement modifiés, la procédure applicable aux utilisations confinées de risque nul ou négligeable d’organismes génétiquement modifiés ;
3° (Supprimé)
4° Modifier le code de l’environnement, le code rural et de la pêche maritime et le code de la consommation afin de prévoir les modalités de traçabilité et les conditions de l’utilisation des semences des variétés rendues tolérantes aux herbicides et des produits issus ;
5° Assurer la cohérence du code de l’éducation et du code de la recherche avec les lois non codifiées et avec les dispositions de la présente loi, abroger les dispositions obsolètes ou devenues sans objet de ces mêmes codes et supprimer les dispositions relatives à la carte des formations supérieures ;
6° Étendre l’application des dispositions de la présente loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, le cas échéant avec les adaptations nécessaires.
II et II bis. – (Supprimés)
III. – Les ordonnances prévues au I sont prises dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi. Les ordonnances prévues aux II et II bis sont prises dans un délai de dix-huit mois à compter de cette publication.
IV. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de chaque ordonnance.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 32 rectifié est présenté par Mmes S. Robert et Monier, MM. Kanner, Antiste et Assouline, Mme Lepage, MM. Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe, M. Montaugé, Mme Artigalas, MM. Devinaz, Gillé, P. Joly et Merillou, Mme Préville, MM. Redon-Sarrazy, Sueur, Kerrouche, Pla, Michau et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 193 est présenté par Mme de Marco, MM. Dossus et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Sylvie Robert, pour présenter l’amendement n° 32 rectifié.
Mme Sylvie Robert. Une nouvelle fois, on nous demande de nous dessaisir de notre compétence de législateur.
Madame la ministre, vous le savez, nous n’aimons pas les ordonnances. Nous y sommes même opposés, surtout lorsque la demande d’habilitation est si large ! Il est parfaitement inadmissible que le Parlement soit dessaisi de l’examen de textes encadrant des domaines aussi variés et de si grande importance que la simplification des différentes procédures applicables aux utilisations confinées des OGM et de semences tolérantes aux herbicides ou la redéfinition des modalités de rendus d’avis sur les biotechnologies, sans compter de nombreuses modifications du code de l’éducation.
Je me félicite que l’examen du projet de loi en commission ait déjà permis de retirer du champ de l’ordonnance certains de ces sujets, comme l’enseignement supérieur privé, le spatial ou les biotechnologies. Mais d’autres domaines, et non des moindres, y ont malheureusement été maintenus.
Aussi, nous demandons la suppression de cet article.
M. Thomas Dossus. Cet article 22 du projet de loi autorise donc le Gouvernement à légiférer sur de nombreux sujets par ordonnance : le droit de la propriété intellectuelle, l’usage des OGM en environnement confiné, la modification du code de l’environnement pour l’usage de semences tolérantes aux herbicides. Le lien entre l’intitulé du projet de loi et ces ordonnances nous semble bien ténu.
Sur le fond, nous considérons que les sujets concernés par cette habilitation méritent un débat parlementaire de fond, car ils sont sensibles et la représentation nationale doit avoir son mot à dire. Il n’est pas concevable de légiférer sur ces questions dans la discrétion des cabinets ministériels, la Nation et ses représentants doivent s’en saisir ; c’est pourquoi nous proposons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. La commission a déjà procédé à la suppression des trois ordonnances les plus significatives de cet article, sur la question des biotechnologies, de l’enseignement supérieur privé et de la politique spatiale.
Les sujets qui restent à traiter – j’avoue humblement ne pas en être une spécialiste avertie – me paraissent plus mineurs, si j’en crois nos collègues de la commission des affaires économiques qui les ont examinés.
En conséquence, je suis défavorable à cette suppression, tout en souhaitant, bien entendu, que la ministre apporte toutes les garanties et toutes les explications nécessaires sur les habilitations maintenues dans le texte.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. L’avis du Gouvernement est évidemment défavorable.
Il s’agit de sujets techniques, qui relèvent, en général, de la transposition dans le droit français d’un certain nombre de directives européennes ou dont le caractère d’urgence appelle cette procédure.
Mon ministère n’utilise pas particulièrement les ordonnances et chacune de celles qui sont présentées dans cet article 22 nous paraît totalement justifiée. C’est la raison pour laquelle l’avis est défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 32 rectifié et 193.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 194, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Thomas Dossus.
M. Thomas Dossus. Dans la droite ligne de notre amendement précédent, nous vous proposons deux amendements de repli s’attachant aux dispositions les plus sensibles de ces habilitations données au Gouvernement.
Cet amendement concerne l’alinéa 3, qui prévoit de simplifier la procédure applicable aux utilisations confinées de risque nul ou négligeable d’organismes génétiquement modifiés.
Simplifier, mais de quelle manière ? Les manipulations en milieu confiné sont des opérations durant lesquelles les OGM sont cultivés, mis en œuvre, stockés, transportés, détruits, éliminés ou utilisés de manière à limiter leurs contacts avec l’environnement et la population.
Cette dernière condition s’explique par le danger sous- jacent de dissémination des OGM. Il ne s’agit donc pas d’un sujet anodin, technique ou anecdotique, mais d’une question centrale, à l’intersection entre l’écologie, l’éthique et la vision que nous avons de l’avenir et de notre rapport au vivant.
Ces thèmes sont trop importants pour être placés dans les mains du seul Gouvernement ; c’est pourquoi nous proposons la suppression de cet alinéa.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Le sujet traité par cette habilitation est très technique. Je me lance !
La procédure actuelle concernant l’utilisation confinée d’OGM à risque nul ou négligeable est particulièrement complexe et va au-delà des exigences de la directive du 6 mai 2009 relative à l’utilisation confinée des micro-organismes génétiquement modifiés.
En particulier, chaque usage doit faire l’objet d’une déclaration transmise au Haut Conseil des biotechnologies (HCB), ce qui constitue une contrainte administrative très lourde.
Le projet d’ordonnance viserait donc à aligner strictement la procédure française sur les standards européens, avec mise à disposition d’une évaluation des risques.
Il me semble donc que, dans le cadre de la lutte menée par le Sénat contre les surtranspositions, cette ordonnance pourrait être utile.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Je confirme que cette ordonnance respectera strictement la directive européenne, de manière à ne pas soumettre nos chercheurs à des contraintes réglementaires plus lourdes que celles qui s’appliquent à leurs collègues européens.
Il s’agit également de permettre aux agents chargés du contrôle des utilisations d’OGM de se concentrer sur les utilisations relevant des classes de confinement de deux à quatre.
Quant au choix de recourir à une ordonnance pour cette mesure, il s’explique par la complexité des dispositions du code de l’environnement qu’il faut amender, qui nous aurait amenés à alourdir inutilement de nombreuses mesures techniques ce projet de loi.
Le sens des évolutions que nous nous proposons d’adopter par voie d’ordonnance, si vous nous y autorisez, est clairement annoncé. C’est pourquoi l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. L’amendement n° 216, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :
3° Redéfinir les modalités selon lesquelles les avis et recommandations relatifs aux biotechnologies sont élaborés, dans une organisation qui s’appuiera notamment, pour les missions d’évaluation des risques et l’analyse socio-économique, sur l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, et qui visera par ailleurs à améliorer les conditions de mise en œuvre du débat public ainsi que la prise en compte des questions éthiques ;
La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Cet amendement vise à restaurer une habilitation à légiférer par ordonnance supprimée en commission et que le Gouvernement considère comme essentielle. Il propose une clarification de la forme et une explicitation du propos.
Le Haut Conseil des biotechnologies est chargé d’éclairer le Gouvernement sur les questions relatives à l’usage des biotechnologies et d’émettre des avis en matière d’évaluation des risques pour l’environnement et la santé publique que peuvent présenter, par exemple, l’utilisation confinée ou la dissémination d’OGM.
Cette structure a montré des difficultés importantes à fonctionner depuis sa création, et notamment à conduire sereinement les débats entre parties prenantes. Des vagues de démissions ont, à plusieurs reprises, entraîné le blocage de son comité économique, éthique et social et ont fragilisé son comité scientifique.
Pour consolider et pérenniser les fonctions d’évaluation indispensables à l’éclairage de la décision publique sur les biotechnologies, il est nécessaire de s’assurer d’une évaluation des risques rigoureuse, indépendante et de qualité, de confier à des experts une analyse économique des bénéfices sociaux des biotechnologies amenées à être développées, d’aborder avec compétence les questions éthiques et de donner sa place à un vrai débat public dans le cadre duquel toutes les composantes de la société pourraient s’exprimer.
Le Gouvernement envisage donc de transférer les missions actuelles du Haut Conseil des biotechnologies à différentes instances déjà existantes, robustes et reconnues, qui seront capables d’intégrer ces nouvelles missions dans leur fonctionnement.
C’est le cas de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, qui se verra confier la mission d’évaluation des risques environnementaux liés à la dissémination d’OGM. Cette agence possède une forte expertise dans les domaines environnementaux, sanitaires et agronomiques, et sa pratique de l’évaluation des risques est confirmée et reconnue, puisqu’elle délivre déjà des avis sur les risques sanitaires liés à cette même dissémination d’OGM.
L’Anses se verra également confier la mission d’analyse socio-économique et mettra en place, à ce titre, un nouveau comité d’experts spécialisés dans ce domaine.
De plus, le Gouvernement envisage de transférer au ministère chargé de la recherche la mission d’évaluation des dossiers de demande d’utilisation confinée d’organismes génétiquement modifiés, en plus des missions de délivrance de ces autorisations et de contrôle qu’il exerce déjà.
Enfin, le Gouvernement examine la possibilité de faire du Conseil économique social et environnemental le siège du débat public sur les biotechnologies et de confier au Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé l’examen des questions éthiques qui leur sont relatives.
L’objectif de cet amendement est de faciliter cette réorganisation pour assurer la nécessaire continuité de l’expertise sur les biotechnologies ; le recours à une ordonnance est lié à la technicité de ce sujet et à la nécessité de disposer néanmoins d’une expertise scientifique qualifiée et indépendante le plus rapidement possible.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Cet amendement tend à revenir sur un vote clair exprimé en commission sur un amendement de la commission des affaires économiques. Il me paraît important de bien marquer l’opposition du Sénat à la multiplication des ordonnances.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Moga, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, la rédaction de l’habilitation proposée par le Gouvernement est effectivement plus précise et son objet détaille mieux l’ambition du Gouvernement : l’expertise scientifique reviendrait à l’Anses et au ministère de la recherche et les débats éthiques seraient partagés entre le CESE et le CCNE.
En revanche, cet amendement ne permet pas de savoir comment seront traités les sujets plus précis, comme la recherche sur les médicaments de thérapie génique ou les applications en matière de défense nationale.
Pour autant, c’est un progrès.
Il aura tout de même fallu une suppression de l’habilitation pour que le Gouvernement nous donne officiellement plus d’informations sur son projet et veuille bien préciser le champ de l’habilitation.
Ces explications sont bienvenues, mais notre position de principe reste, sur les sujets qui ne sont pas purement techniques, la suppression.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Notre collègue Pierre Ouzoulias a évoqué de nombreuses fois l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, dans le cadre duquel nous avons travaillé sur les biotechnologies en produisant plusieurs rapports sur ce sujet et sur le HCB.
À l’occasion du dernier d’entre eux, concernant les biotechnologies et les Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats (CRISPR), il s’est avéré que le HCB connaissait en effet de vrais problèmes de fonctionnement et qu’il était nécessaire de revoir celui-ci.
Pour autant, faut-il le faire par ordonnance, même si ce que vous venez nous dire, madame la ministre, nous donne un peu plus de lisibilité, en répartissant ses missions entre différents organismes, dont l’Anses, qui me paraît déjà surchargée de nombreux dossiers ?
Comme Pierre Ouzoulias, j’aurais aimé que l’on demande l’avis motivé de cet exceptionnel Office parlementaire français, partagé entre l’Assemblée nationale et le Sénat, que nous vous aurions remis.
M. le président. L’amendement n° 195, présenté par Mme de Marco, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. Nous proposons la suppression de l’alinéa 5, lequel autorise le Gouvernement à modifier le code de l’environnement, le code rural et de la pêche maritime et le code de la consommation afin de prévoir les modalités de traçabilité et les conditions de l’utilisation des semences de variétés rendues tolérantes aux herbicides (VrTH) et des produits qui en sont issus.
Ces variétés ont été rendues tolérantes aux herbicides par des techniques conventionnelles, par la sélection traditionnelle ou transgénique. Ces semences posent un certain nombre de problèmes, notamment le développement de résistance des adventices, c’est-à-dire des mauvaises herbes, aux herbicides et l’augmentation de l’utilisation d’herbicides par rapport à des cultures classiques, entraînant, in fine, la contamination des milieux.
Encore une fois, ce débat ne doit pas être pris à la légère. Personne ne s’étonnera de voir des écologistes se saisir de ce dossier, et nous estimons que toute la représentation nationale doit l’examiner, en discuter et se prononcer, en un mot, légiférer.
C’est pourquoi nous proposons de retirer l’autorisation donnée au Gouvernement de décider seul en la matière.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Là encore, le sujet est technique, et la ministre pourra certainement compléter mon propos.
L’avis de l’Anses du 26 novembre 2019 juge nécessaire l’instauration d’un suivi des variétés rendues tolérantes aux herbicides. Par un arrêt du 7 février 2020, le Conseil d’État a estimé que ce suivi était nécessaire.
L’ordonnance a pour objet de modifier le code de l’environnement, le code rural et de la pêche maritime et le code de la consommation afin de le rendre possible.
Il me semble donc que cette ordonnance technique peut s’avérer utile, dans la mesure où elle met en conformité la loi avec un avis de l’Anses et un arrêt du Conseil d’État.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.
M. Thomas Dossus. J’ajoute que la représentation nationale est capable d’avoir des discussions politiques sur des sujets techniques : mardi, nous avons discuté des néonicotinoïdes, un sujet éminemment technique, pour aboutir à un avis politique, c’est-à-dire que nous avons tenu un débat politique sur un sujet technique.
Cette façon d’exclure les sujets techniques du débat me semble un peu douteuse.
M. le président. L’amendement n° 217, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Rétablir le II dans la rédaction suivante :
II. – Dans les conditions définies à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances les mesures relevant du domaine de la loi ayant pour objet de modifier le code de l’éducation afin de :
1° Clarifier les notions de cours et d’établissements d’enseignement supérieur privés, harmoniser les conditions d’ouverture et de contrôle des établissements d’enseignement supérieur privés, au regard du régime résultant de la loi n° 2018-266 du 13 avril 2018 visant à simplifier et mieux encadrer le régime d’ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat, notamment en ce qui concerne les conditions exigées des déclarants et personnels d’enseignement et de direction, dans un objectif de lutte contre les fraudes et les atteintes à l’ordre public, et définir les conditions dans lesquelles ces établissements peuvent délivrer un enseignement à distance ;
2° Substituer à la procédure de reconnaissance par l’État des établissements d’enseignement supérieur technique privés la possibilité pour les établissements d’enseignement supérieur privés et les organismes d’enseignement à distance de délivrer des diplômes visés par l’État ou conférant un grade universitaire, sous réserve d’une évaluation périodique par une instance nationale, le cas échéant spécialisée, dans le respect du monopole de l’État sur la collation des titres et des grades universitaires ;
3° Redéfinir les modalités d’habilitation des cours et établissements d’enseignement supérieur privés à recevoir des boursiers de l’enseignement supérieur, afin de subordonner cette habilitation à la qualité de la formation dispensée, périodiquement évaluée.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Cet amendement vise à rétablir l’habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures relevant du domaine de la loi concernant l’enseignement supérieur privé.
Il vise à mieux expliciter les finalités de cette habilitation concernant l’ouverture des établissements d’enseignement supérieur et la délivrance des diplômes.
En ce qui concerne le régime d’ouverture, dans un souci de clarification et de simplification, il s’inspirera du régime prévu par la loi n° 2018-266 du 13 avril 2018 visant à simplifier et à mieux encadrer le régime d’ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat.
Pour la délivrance des diplômes, dans le respect du monopole de l’État sur la collation des titres et des grades universitaires, l’attention portera sur la formation évaluée périodiquement par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres) ou une instance spécialisée, comme la commission des titres d’ingénieur (CTI) ou la commission d’évaluation des formations et diplômes de gestion, plutôt que sur le type d’établissement, la reconnaissance par l’État des établissements d’enseignement supérieur technique étant supprimée.
Je vous rappelle les dispositions en vigueur : la reconnaissance d’établissements d’enseignement supérieur technique, lesquels, une fois qu’ils sont reconnus, ne demandent plus rien à personne, si je puis dire, ou d’établissements qui restent en lien avec le ministère pour la délivrance de titres ou de grades.
Nous proposons de ramener l’ensemble des établissements concernés dans ce dernier périmètre, de manière à être en mesure de vérifier les titres et travaux des personnes qui enseignent dans ces établissements, mais aussi de garantir la meilleure information possible aux parents, lorsque ceux-ci inscrivent leurs enfants dans des établissements sur lesquels nous n’avons pas de contrôle quant à la qualité des diplômes qu’ils délivrent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Madame la ministre, ce sujet est trop important pour être traité par ordonnance. Nous maintenons donc l’avis défavorable que la commission avait émis.
M. le président. L’amendement n° 233, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Rétablir le II bis dans la rédaction suivante :
II bis. – Dans les conditions définies à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnances toute mesure relevant du domaine de la loi nécessaire pour moderniser le régime applicable aux opérations et activités spatiales, afin notamment de favoriser la recherche et développement en matière spatiale, de tenir compte des évolutions technologiques, d’adapter les règles de recueil et de diffusion des données d’origine spatiale, de définir les conditions dans lesquelles l’État peut agir en qualité d’opérateur spatial et de garantir les intérêts de la défense nationale.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Je tente ma chance pour la troisième fois…
Le présent amendement a pour objet de rétablir l’habilitation à légiférer par voie d’ordonnance sollicitée par le Gouvernement en matière spatiale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Mme Parly a appelé plusieurs d’entre nous, jusqu’au président de la commission, mais ce n’est toujours pas très clair, même si j’ai bien compris que les satellites militaires étaient en question.
En tout état de cause, nous restons sur la position de notre commission concernant la suppression de cette habilitation à légiférer par ordonnance.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Je rappelle simplement à Mme la ministre, comme à ses prédécesseurs, que je m’étonne de l’absence du mot « spatial » à côté des mots « enseignement supérieur, recherche et innovation » dans l’intitulé de son ministère, même s’il est vrai que cette disparition remonte à de nombreuses années.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Moga, rapporteur pour avis. Nous avons supprimé cette habilitation en commission et nous avons demandé davantage d’informations ; nous avons obtenu une courte note sur les enjeux de défense. Il s’agirait de permettre au ministère des armées d’opérer des dispositifs spatiaux sans intermédiaire et de revoir le régime de déclaration préalable à l’utilisation de données spatiales afin de rendre crédibles les stratégies spatiales de défense.
Toutefois, en l’état, l’habilitation permet d’aller beaucoup plus loin et de procéder à une refonte globale de la loi sur les opérations spatiales, qui mérite un vrai débat, surtout sur des sujets aussi importants que l’encadrement des mégaconstellations et des activités industrielles dans l’espace.
Un groupe de travail a formulé quarante-sept propositions sur quatorze thématiques, dont nous n’avons pas connaissance en l’état.
Malheureusement, l’objet de l’amendement ne nous éclaire pas plus. Nous ne pouvons donc accorder au Gouvernement un tel blanc-seing au vu des informations que vous nous avez communiquées.
La ministre des armées a, certes, ouvert la voie à un compromis que nous pourrions étudier et qui consisterait à restreindre le champ d’habilitation au seul volet défense. C’est un peu tard, mais si elle nous fait une proposition, sous le contrôle de Mme la rapporteure au fond et avec la commission des affaires économiques, nous pourrions l’étudier.