Mme Frédérique Vidal, ministre. Par cet amendement, nous proposons, sans modifier le fond de la mesure, d’en rendre la rédaction plus conforme à l’articulation instituée par la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

En effet, depuis l’adoption de cette loi et des ordonnances du 22 septembre 2017, les dispositions du code du travail sur la durée du travail et les congés sont organisées selon le triptyque suivant : d’abord, l’ordre public, auquel aucun accord ne peut déroger, sauf dans un sens plus favorable aux salariés, les clauses de l’accord de branche ou d’entreprise prévalant sur les dispositions légales si elles sont plus favorables aux salariés, mais pas si elles le sont moins ; ensuite, la négociation collective, c’est-à-dire ce qui peut être prévu par un accord d’entreprise ou de branche, avec primauté donnée à l’accord d’entreprise sur l’accord de branche en matière de congés spéciaux ; enfin, les dispositions supplétives applicables à défaut d’accord d’entreprise et de branche.

Les entreprises et les branches pourront ainsi se saisir au cours des discussions et négociations de la situation spécifique de leurs salariés chercheurs pour mettre en place une organisation adaptée au contexte et au fonctionnement propre des passerelles permises entre les activités de recherche privée et le monde de l’enseignement supérieur et de la recherche publique.

M. le président. L’amendement n° 116, présenté par M. Moga, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 6 à 11

Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 3142-125. – Le salarié qui souhaite dispenser à temps plein ou à temps partiel un enseignement technologique, professionnel ou supérieur en formation initiale ou continue, a droit, sous réserve d’une condition d’ancienneté et dans les conditions fixées à la présente section :

« 1° Soit à un congé ;

« 2° Soit à une période de travail à temps partiel.

« Art. L. 3142-126. – L’article L. 3142-125 s’applique également au salarié qui souhaite se livrer à une activité de recherche et d’innovation dans un établissement public de recherche, une collectivité territoriale, une entreprise publique ou privée, sauf si son employeur établit que l’exercice de ce droit par le salarié compromet directement la politique de recherche, d’innovation et de développement technologique de l’entreprise.

« Art. L. 3142-127. – Dans les entreprises de trois cents salariés et plus, l’employeur peut différer le départ en congé ou le début de la période de travail à temps partiel du salarié lorsque l’exercice de ce droit aurait pour effet de porter le pourcentage de salariés simultanément absents à ce titre à un niveau excessif au regard de l’effectif total de l’entreprise.

« Art. L. 3142-128. – Dans les entreprises de moins de trois cents salariés, l’employeur peut différer le départ en congé ou le début de la période de travail à temps partiel du salarié lorsque l’exercice de ce droit aurait pour effet de porter le nombre d’heures de congé demandées à un niveau excessif au regard nombre total d’heures travaillées dans l’année.

« Toutefois, le nombre d’heures de congé auquel un salarié a droit peut être, à sa demande, reporté d’une année sur l’autre, sans que le cumul des reports puisse dépasser quatre ans.

« Dans les entreprises de moins de trois cents salariés, l’employeur peut refuser le congé ou le passage à temps partiel s’il estime, après avis du comité social et économique, que ce congé ou cette activité à temps partiel aura des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise. L’employeur précise le motif de son refus et le porte à la connaissance du salarié. Ce refus peut être contesté par le salarié directement devant le conseil de prud’hommes, statuant selon la procédure accélérée au fond, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État.

II. – Alinéas 14 à 21

Remplacer ces alinéas par seize alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 3142-129. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-125, un accord collectif détermine :

« 1° La durée maximale du congé ou de la période de travail à temps partiel ;

« 2° Le nombre de renouvellements possibles de ce congé ou de cette période ;

« 3° La condition d’ancienneté requise pour avoir droit à ce congé ou à cette période ;

« 4° Les délais dans lesquels le salarié informe l’employeur de la date à laquelle il souhaite partir en congé ou, en cas de passage à temps partiel, de la date de début de la période de travail à temps partiel et de l’amplitude de la réduction souhaitée de son temps de travail, ainsi que de la durée envisagée de ce congé ou de cette période ;

« 5° Les conditions et délais de la demande de prolongation de ce congé ou de cette période de travail à temps partiel ;

« 6° Les conditions dans lesquelles le salarié informe l’employeur de son intention de poursuivre ou de rompre son contrat de travail à l’issue de son congé ou de sa période de travail à temps partiel ;

« 7° Les plafonds ou niveaux mentionnés aux articles L. 3142-127 et L. 3142-128 ;

« 8° Les conditions permettant le maintien d’un lien entre l’entreprise et le salarié pendant la durée du congé et, le cas échéant, les modalités d’accompagnement et de réadaptation professionnelle à son retour.

« Sous-section 3

« Dispositions supplétives

« Art. L. 3142-130. – À défaut de l’accord mentionné à l’article L. 3142-129, les dispositions suivantes sont applicables :

« 1° La durée maximale du congé ou de la période de travail à temps partiel est d’un an. Cette durée peut être prolongée sur demande du salarié par accord entre l’entreprise et l’organisme ou l’entreprise d’accueil ;

« 2° L’ancienneté requise pour ouvrir droit au congé ou à la période de travail à temps partiel est d’un an en cas d’accord de l’employeur et de vingt-quatre mois, consécutifs ou non, dans l’entreprise en cas de désaccord de ce dernier ;

« 3° Les conditions et délais d’information mentionnés aux 4° à 6° de l’article L. 3142-129 sont fixés par décret ;

« 4° Le niveau de salariés absents au titre du congé dans l’entreprise et de jours d’absence prévus au titre de ce congé, pour lequel l’employeur peut différer le départ ou le début de la période de travail à temps partiel, sont fixés par décret. »

IV. – Alinéa 23

Remplacer les mots :

et L. 3142-126

par les mots :

à L. 3142-130

La parole est à M. Jean-Pierre Moga.

M. Jean-Pierre Moga. Notre amendement est assez proche de celui du Gouvernement.

La commission a adopté un dispositif sur le congé pour enseignement ou travaux de recherche dans le double objectif de remettre la négociation collective au centre du dispositif et d’éviter de faire reposer des charges excessives sur les entreprises. Notre amendement vise à le compléter en insérant un volet supplétif applicable en l’absence d’accord collectif. Il présente toutefois trois différences avec celui du Gouvernement.

D’abord, dans les entreprises de moins de 300 salariés, les employeurs auraient la possibilité de s’opposer à une prise de congé qui entraînerait des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise.

Ensuite, la condition d’ancienneté supplétive serait d’un an seulement en cas d’accord de l’employeur. Cela ne change rien par rapport à ce qui se ferait.

Enfin, le seuil distinguant les deux régimes applicables serait maintenu à 300 salariés, afin de coller davantage au régime de congé pour création ou reprise d’entreprise.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. L’amendement n° 116 vise à réécrire le dispositif adopté en commission sur le congé pour enseignement ou travaux de recherche pour les salariés du privé en lui adjoignant un volet supplétif, c’est-à-dire applicable à défaut d’accord collectif.

Bien qu’il en soit proche, cet amendement n’est pas identique à celui du Gouvernement. En effet, ce dernier souhaite revenir sur certaines dispositions que nous avons adoptées en commission – sur l’initiative de la commission des affaires économiques – et qui visent à trouver un équilibre entre droits au congé et contraintes imposées aux entreprises dans le contexte actuel. Il propose ainsi de revenir sur la possibilité pour les employeurs d’entreprises de moins de 300 salariés de refuser le congé si celui-ci portait atteinte à la bonne marche de l’entreprise.

Toujours dans le souci de ne pas imposer des charges excessives, les auteurs de l’amendement n° 116 prévoient un délai minimal d’un an d’ancienneté si l’employeur est d’accord et de vingt-quatre mois, consécutifs ou non, en cas de désaccord.

Je propose de maintenir l’équilibre trouvé en commission, sauf à ce que la ministre nous convainque du bien-fondé de son amendement. C’est pourquoi j’émets un avis favorable sur l’amendement n° 116 et, par conséquent, un avis défavorable sur l’amendement n° 211.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. L’avis du Gouvernement est rigoureusement inverse. (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 211.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 116.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 14 bis, modifié.

(Larticle 14 bis est adopté.)

Article 14 bis
Dossier législatif : projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur
Article additionnel après l'article 15 - Amendements n° 77 rectifié bis et n° 170 rectifié

Article 15

I. – Le chapitre Ier du titre II du livre IV du code de la recherche est complété par un article L. 421-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 421-4. – Les chefs d’établissement des établissements publics à caractère scientifique et technologique sont responsables de l’attribution des primes aux personnels qui sont affectés dans l’établissement, en application des textes applicables et selon les principes de répartition définis par le conseil d’administration.

« Le conseil d’administration peut créer des dispositifs d’intéressement permettant d’améliorer la rémunération des personnels en tenant compte du principe d’égalité salariale entre les femmes et les hommes. Un dispositif d’intéressement ne peut se substituer aux régimes indemnitaires institués en application d’un texte législatif ou réglementaire. »

II. – L’article L. 954-2 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Le président est responsable de l’attribution des primes aux personnels qui sont affectés dans l’établissement, en application des textes applicables et selon les principes de répartition définis par le conseil d’administration. » ;

2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Un dispositif d’intéressement ne peut se substituer aux régimes indemnitaires institués en application d’un texte législatif ou réglementaire. »

M. le président. L’amendement n° 47 rectifié, présenté par Mmes Monier et S. Robert, MM. Kanner, Antiste et Assouline, Mme Lepage, MM. Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe, M. Montaugé, Mme Artigalas, MM. Devinaz, Gillé, P. Joly et Merillou, Mme Préville, MM. Redon-Sarrazy, Sueur, Kerrouche, Pla, Michau et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Mme Marie-Pierre Monier. L’article L. 954-2 du code de l’éducation autorise le versement de primes par le président de l’établissement au personnel selon des règles fixées par le conseil d’administration (CA). Son deuxième alinéa prévoit que le CA peut créer des dispositifs d’intéressement pour améliorer la situation des personnels.

Le même article indique également que la prime d’encadrement doctoral et de recherche est accordée après avis du conseil scientifique. Le code de la recherche ne prévoit aucun dispositif de la sorte.

L’article 15 modifie l’article L. 954-2 du code de l’éducation du code de l’éducation et introduit par parallélisme un article L. 421-4 dans le code de la recherche. Dans les deux cas, il reviendra aux présidents des établissements d’attribuer des primes selon des règles définies par les CA, en application des textes réglementaires. Après ce cadrage administratif très général, les CA n’auront plus voix au chapitre.

Une telle réforme pose problème. Le cas spécifique des primes d’encadrement doctoral n’est plus pris en compte. En conséquence, les avis de la commission de la recherche et du conseil académique sont supprimés. Les versements des primes seront donc soumis à la totale discrétion des chefs d’établissement.

On peut aussi s’interroger sur la généralisation d’un tel système de récompenses au mérite. Cela crée un esprit de compétition et d’individualisme au sein du service public faisant fi des considérations d’intérêt général qui doivent guider celui-ci.

C’est pourquoi nous préférons supprimer ce nouveau système discrétionnaire d’attribution de primes. Je le rappelle, celui-ci fait l’objet d’un vote négatif tant du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) que du comité technique ministériel de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. J’aimerais tant pouvoir donner satisfaction à notre collègue. Mais il ne me paraît absolument pas opportun de supprimer l’article 15.

D’abord, cet article élève enfin au rang législatif l’attribution des primes dans les établissements de recherche. Ce n’était pas le cas auparavant.

Ensuite, la répartition des compétences entre le conseil d’administration et le chef d’établissement me paraît pertinente : le conseil arrête les principes et le chef d’établissement est responsable de l’attribution.

Enfin, l’article précise clairement que les primes d’intéressement ne sauraient se substituer au régime indemnitaire. Cela constitue une garantie très attendue dans les établissements.

Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 47 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 120 rectifié, présenté par MM. Segouin et Calvet, Mmes Chain-Larché et Deromedi, MM. Regnard et Chatillon, Mme Paoli-Gagin, MM. Daubresse, Panunzi, Chevrollier, Lefèvre, Bonne et del Picchia, Mmes Gruny, Raimond-Pavero et F. Gerbaud, MM. B. Fournier et Bouchet, Mme Richer, MM. Bonhomme, Anglars, Pointereau et Belin, Mme Thomas et M. P. Martin, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le dispositif d’intéressement est destiné à valoriser le mérite et l’investissement personnel du personnel de recherche.

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Cet amendement a pour objet de corréler le dispositif d’intéressement tel qu’il peut être créé par le conseil d’administration aux notions de « mérite » et d’« investissement personnel » du chercheur au regard des recherches qu’il effectue au bénéfice de l’établissement pour lequel il travaille.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. Je tiens à le rappeler, l’intéressement est avant tout un dispositif collectif. Or le dispositif proposé vise plutôt à en faire le prolongement d’une prime individuelle, qu’il est par ailleurs possible d’instituer.

L’accord qui a été récemment signé avec les organisations représentatives prévoit une refonte de la part individuelle des primes des chercheurs, afin de mieux reconnaître leur investissement personnel.

Dès lors, l’amendement me paraît satisfait. J’en sollicite donc le retrait, faute de quoi l’avis de la commission serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission. Nous sommes justement en train de travailler sur les dispositifs d’intéressement. Le protocole d’accord qui a été signé récemment prévoit la possibilité de mettre en place un intéressement individuel, mais aussi un intéressement collectif. La recherche étant un travail collectif, il faut, me semble-t-il, n’oublier personne. C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à cet amendement.

M. le président. Madame Paoli-Gagin, l’amendement n° 120 rectifié est-il maintenu ?

Mme Vanina Paoli-Gagin. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 120 rectifié est retiré.

L’amendement n° 73 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Guerriau, Chasseing, Capus, A. Marc, Menonville, Wattebled et Decool, Mme Mélot et MM. Lagourgue et Malhuret, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« Le conseil d’administration peut créer des dispositifs de rattrapage visant à rétablir l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. »

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Cet amendement a pour objet de substituer aux dispositifs d’intéressement des dispositifs visant à établir l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. Les auteurs de cet amendement proposent de transformer substantiellement la vocation de la prime, pour en faire un outil au service de l’égalité salariale. Cela n’est pas pertinent.

Le combat pour l’égalité doit reposer non pas sur l’attribution de primes – cela pourrait laisser penser que le régime indemnitaire de base est inégalitaire –, mais plutôt sur les conditions dans lesquelles les chercheuses et les enseignantes peuvent mener leur carrière.

Je rappelle également que l’axe 3 de l’accord du 30 novembre 2018 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique prévoit déjà de supprimer les situations d’écarts de rémunération et de déroulement de carrière entre les hommes et les femmes.

Cet amendement me semble donc inutile, même si je suis convaincue de la bonne foi de ses auteurs. C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Avis défavorable.

M. le président. Madame Paoli-Gagin, l’amendement n° 73 rectifié est-il maintenu ?

Mme Vanina Paoli-Gagin. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 73 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 15.

(Larticle 15 est adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Roger Karoutchi.)

PRÉSIDENCE DE M. Roger Karoutchi

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Article 15
Dossier législatif : projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur
Article additionnel après l'article 15 - Amendements n° 76 rectifié bis et n° 169 rectifié

Articles additionnels après l’article 15

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 77 rectifié bis est présenté par Mmes Lepage et S. Robert, MM. Cardon, Lurel et Dagbert, Mmes Meunier et Préville, MM. Vaugrenard, Tissot, Redon-Sarrazy, Leconte et Temal et Mme Monier.

L’amendement n° 170 rectifié est présenté par MM. Fialaire, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre IV du titre Ier du livre V du code de la recherche est complété par un article L. 514-… ainsi rédigé :

« Art. L. 514-…. – Les titulaires d’une autorisation de mise sur le marché d’un produit de santé fournissent au ministre chargé de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation une liste, régulièrement actualisée, des droits de propriété industrielle couvrant ce produit de santé, son procédé d’obtention, ou son utilisation, dont ils disposent ou pour lesquels ils bénéficient d’une licence.

« Le ministre chargé de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation met à la disposition du public un répertoire, régulièrement actualisé, des listes qui lui ont été fournies en application du premier alinéa.

« Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret. »

La parole est à Mme Claudine Lepage, pour présenter l’amendement n° 77 rectifié bis.

Mme Claudine Lepage. Le présent amendement vise à répondre au besoin des acteurs de la santé publique. Ces derniers veulent avoir un accès simplifié à des informations précises concernant le statut des brevets sur les médicaments prioritaires pour les patientes et les patients, leur permettant de prendre des décisions éclairées et stratégiques, lorsque le moment est venu d’acheter et de fournir ces médicaments au système de santé publique français.

Accéder simplement à des informations précises sur le statut de ces brevets est une ressource de grande importance pour que l’État et la société française puissent veiller sur la qualité des brevets délivrés au niveau européen sur les produits thérapeutiques que l’assurance maladie cherche à rendre accessibles aux citoyens français.

En 2017, 27 % des brevets délivrés par l’Office européen des brevets (OEB) ont été révoqués grâce à des oppositions démontrant l’absence d’application de critères rigoureux ; 42 % ont été maintenus, mais amendés, c’est-à-dire qu’ils ont été modifiés pour mieux correspondre aux critères de brevetabilité. Près de 70 % de ces brevets ont donc été accordés, alors qu’ils n’auraient pas dû l’être. Une telle absence de rigueur de la part de l’OEB devient une menace dès lors qu’elle favorise la création de monopoles sur les biens de santé non soumis à l’exercice du contradictoire, potentiellement octroyés aux dépens des systèmes de santé et des personnes malades.

En permettant l’exercice du contradictoire, sous la forme d’un recours aux oppositions aux brevets, notamment par les citoyens et les citoyennes, le répertoire des brevets d’invention en santé prioritaire pour les patientes et les patients sera une importante ressource pour la soutenabilité du régime de l’assurance maladie.

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 170 rectifié.

Mme Maryse Carrère. Cet amendement présenté par notre collègue Bernard Fialaire a été très bien défendu par Mme Lepage.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. L’objet de ces amendements paraît tout à fait justifié, mais je me demande s’ils sont compatibles avec le secret des affaires, qui est très sensible en matière industrielle. Sur ce sujet, comme sur celui des conflits d’intérêts, je sollicite l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Les titres de brevets en vigueur sur un médicament sont disponibles et sont suivis, soit par l’Institut national de la propriété industrielle, l’INPI, qui dispose d’un service de recherche du même type, soit par l’Office européen des brevets avec Espacenet. Il me semble que la création d’une nouvelle base de suivi serait donc redondante avec les outils déjà existants.

De plus, comme l’a indiqué Mme la rapporteure, la publicité des contrats d’exploitation ne peut être imposée en raison du secret des affaires.

Le Gouvernement émettra donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est désormais l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 77 rectifié bis et 170 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 15 - Amendements n° 77 rectifié bis et n° 170 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur
Article 16

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 76 rectifié bis est présenté par Mme Lepage, MM. Cardon, Lurel et Dagbert, Mmes Meunier et Préville, MM. Vaugrenard, Tissot, Redon-Sarrazy, Leconte et Temal et Mme Monier.

L’amendement n° 169 rectifié est présenté par MM. Fialaire, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du titre Ier du livre VI du code de la propriété intellectuelle est complété par une section … ainsi rédigée :

« Section …

« Les droits de brevet sur les inventions réalisées avec l’aide d’un financement public

« Art. L. 613-. – L’organisme public de financement de la recherche, l’université publique ou l’institution de recherche publique ayant cédé ses droits de propriété intellectuelle ou concédé une licence sur des droits de propriété intellectuelle dans le cadre d’un accord de financement, d’un contrat de recherche, d’un contrat de collaboration, d’un contrat de cession ou d’un contrat de licence établi avec une entreprise commerciale ou une organisation à but non lucratif de droit privé ayant acquis un droit de propriété intellectuelle ou une licence sur un droit de propriété intellectuelle en vertu dudit accord ou contrat demande au contractant, au cessionnaire ou au licencié de ladite invention d’accorder une licence à un ou plusieurs demandeurs qualifiés.

« Dans les hypothèses mentionnées au premier alinéa, et si le contractant, le cessionnaire ou le licencié exclusif refuse une telle requête, l’organisme public de financement de la recherche, l’université publique ou l’institution de recherche publique demande au ministre chargé de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation la mise en œuvre de la licence d’office :

« a) Une action est nécessaire parce que le cessionnaire, le contractant ou le licencié exclusif n’a pas pris, ou n’est pas censé prendre, dans un délai raisonnable des mesures efficaces pour parvenir à une application pratique de l’invention concernée dans ce domaine d’utilisation ;

« b) Une action est nécessaire pour répondre à des besoins en matière de santé ou de sécurité qui ne sont pas raisonnablement satisfaits par le contractant, le cessionnaire ou le licencié exclusif, y compris les conditions établies à l’article L. 613-16 ;

« c) Une action est nécessaire pour répondre aux exigences d’utilisation publique spécifiées par les entités réglementaires et ces exigences ne sont pas satisfaites par le contractant, le cessionnaire ou le licencié exclusif.

« Les conditions relatives à l’exercice de ce droit par l’organisme public de financement de la recherche, l’université ou l’institution de recherche financée par des fonds publics sont fixées par décret. »

La parole est à Mme Claudine Lepage, pour présenter l’amendement n° 76 rectifié bis.