Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Vous dites que la politique du Gouvernement est la bonne : on n’est jamais mieux servi que par soi-même ! J’émets un avis de sagesse sur ce nouvel amendement sous-marin, dont la profondeur est de 300 mètres. (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur le secrétaire d’État, acceptez-vous de lever le gage ?
Mme la présidente. Il s’agit donc de l’amendement n° I-951 rectifié.
Je le mets aux voix.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 18.
L’amendement n° I-1139 rectifié bis, présenté par M. Jacquin, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À compter du 1er janvier 2020, toute entreprise qui bénéficie d’une prestation de transport commercialisée ou organisée par un prestataire au sens de l’article L. 1431-3 du code des transports, ou qui réalise des livraisons pour son propre compte, est assujettie à une éco-contribution due à raison des gaz à effet de serre émis par le ou les modes de transport utilisés pour réaliser cette prestation.
II. – Cette éco-contribution est assise sur la quantité de gaz à effet de serre (GES) émise pour réaliser les prestations de transport décrites au I, selon les modalités de calcul définies au deuxième alinéa l’article L. 1431-3 du code des transports. Dans le cadre d’un transport international, l’éco-contribution est due sur la partie de la prestation de transport réalisée sur le territoire français.
III. – Lorsque la personne morale recourt à un transporteur routier de marchandises ou à un commissionnaire de transport, ce dernier est tenu de faire apparaître le volume des émissions de GES de l’opération sur la facture de transport.
IV. – La valeur et la progression de l’éco-contribution sont identiques à celles fixées à la taxe intérieure de consommation pour les produits énergétiques (TICPE) mentionnée à l’article 265 du code des douanes.
V. – Pour cette éco-contribution, le redevable est tenu de faire une déclaration auprès du service des impôts dont il dépend, selon une périodicité fixée réglementairement. Les règles, conditions, garanties et sanctions prévues en matière de taxe sur la valeur ajoutée s’appliquent à cette contribution.
VI. – Le produit de l’éco-contribution est versé à un organisme de l’État en charge de la transition écologique et énergétique du transport.
VII. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article.
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. L’article 19 prévoit une taxe supplémentaire de 2 centimes d’euro sur le gasoil pour le transport routier. Une telle mesure provoquera une distorsion de concurrence manifeste, puisque la diminution du remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) concernera les transporteurs routiers français faisant le plein en France.
Cet amendement vise à reporter cette taxe sur le donneur d’ordres ou le chargeur. Le dispositif, assez simple, constituerait une véritable contribution écologique et permettrait d’appliquer le principe pollueur-payeur au transport routier tout en favorisant le report modal. Cela s’inscrit pleinement dans la transition énergétique.
Nous proposons d’ailleurs de reprendre un dispositif existant. Depuis le Grenelle de l’environnement, les transporteurs sont contraints d’informer les chargeurs ou les donneurs d’ordre du coût carbone de leur transport. L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) vient de réactualiser un calculateur, disponible en ligne gratuitement, permettant de déterminer ce coût carbone.
Pour remplacer les 2 centimes d’euros de diminution prévus à l’article 19 affectés au budget de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), nous proposons de fixer à 6,30 euros le prix d’une tonne de carbone.
L’assiette de la taxe serait ainsi plus large et le dispositif, pédagogique, garantirait un financement pérenne. Il toucherait de plus l’ensemble du trafic européen en partance ou à destination de la France.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement a été travaillé avec l’Organisation des transporteurs routiers européens (OTRE), instance dont j’ignorais l’existence.
La commission propose la suppression pure et simple de l’article 19, car, dans les faits, cette taxe ne pèsera que sur les transporteurs français. Un transporteur voyageant depuis l’Espagne jusqu’aux pays du Nord peut en effet traverser la France sans verser un centime de contribution : il lui suffit d’emprunter les routes départementales et nationales après avoir fait le plein à la frontière espagnole et de faire un nouveau plein à la frontière luxembourgeoise ou à la frontière belge. Le différentiel, d’environ 10 euros par hectolitre pour les transporteurs français, ne manquera pas de pénaliser ces derniers. Telles seront les conséquences concrètes de l’article 19.
Faut-il pour autant prévoir un dispositif tel que celui que propose M. Jacquin ? Si l’idée est intéressante, j’avoue que nous n’avons pas eu le temps d’examiner la version rectifiée de cet amendement qui a été déposée il y a seulement une heure. Pour bien faire, il faudrait le réexaminer en commission, mais, si l’on faisait cela pour tous les amendements rectifiés, nous ne pourrions jamais examiner la première partie du projet de loi de finances en moins d’une semaine !
Compte tenu de ces modifications relativement lourdes que nous n’avons pas eu le temps d’expertiser, je demande le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État. J’ai eu l’occasion de discuter avec M. Jacquin de cet amendement, issu d’un dialogue avec les différentes organisations patronales des transporteurs routiers, notamment l’OTRE.
La disposition prévue présente deux défauts : elle ne prend en compte ni les transporteurs étrangers ni les transporteurs en compte propre.
Par ailleurs, la semaine prochaine, le Conseil européen présentera sa position sur l’Eurovignette. Il est probable que les discussions aboutissent à l’instauration d’une redevance au kilomètre, qui est d’ailleurs demandée par l’ensemble des associations professionnelles des transporteurs routiers de marchandises.
Pour cette raison, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement a en effet été travaillé avec un syndicat de transporteurs, l’OTRE.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez indiqué que le dispositif proposé ne toucherait pas les transporteurs étrangers. J’espère avoir mal entendu, car votre dispositif défavorisera les Français et, de ce fait, favorisera les étrangers !
Vous avez toutefois partiellement raison : un poids lourd traversant ne sera pas touché par le dispositif que je propose. En revanche, il sera favorisé avec le dispositif que vous proposez ! J’habite à côté du Luxembourg, près de l’une des plus grandes stations à essence du monde, Berchem. Les transporteurs dotés de camions ayant des réservoirs de 600, 800, voire 1 000 litres qui y font le plein avant de traverser notre pays et de se réapprovisionner, par exemple en Andorre, ne payent pas la taxe française.
Le dispositif que je propose permet de toucher les transports qui ont pour point d’origine ou d’arrivée la France. Par exemple, un transporteur parti de Pologne à destination de la France sera touché par le dispositif pour la partie française du transport.
Au fond, c’est une mécanique assez simple, pour peu que l’on veuille bien l’examiner. De même qu’il fait ses décomptes de TVA, le donneur d’ordre ou le chargeur renseignera dans une ligne dédiée le nombre de tonnes qui lui ont été remontées par les transporteurs. Il suffira ensuite d’appliquer la taxe.
Le mécanisme serait un peu le même que celui dit d’auto-liquidation de la TVA, qui permet de taxer des prestataires étrangers qui travaillent en France.
Ce système mériterait d’être examiné de manière plus approfondie. J’espérais, monsieur le secrétaire d’État, qu’à la suite de nos discussions vous y porteriez un regard plus attentif. Je constate que ce n’est pas le cas.
Monsieur le rapporteur général, vous proposez de supprimer la diminution du remboursement partiel de la TICPE de 2 centimes. Certains proposeront un dispositif, que vous jugez plus simple, consistant à taxer mécaniquement le prix de transport. Toutefois, cela ne permettra pas d’inclure le transport routier dans le principe du pollueur-payeur et dans la transition énergétique.
Le débat ne fera que se répéter.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-1139 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 19 (précédemment réservé)
I. – Au septième alinéa de l’article 265 septies du code des douanes, le montant : « 43,19 euros » est remplacé par le montant : « 45,19 euros ».
II. – Le I s’applique aux carburants acquis à compter du 1er janvier 2020.
III (nouveau). – À compter de 2020, l’affectation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, prévue au III de l’article 36 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, intègre le montant des recettes issues de la baisse du remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques prévue au I du présent article.
IV (nouveau). – La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II de la troisième partie du code des transports est complétée par un article L. 3221-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3221-2-1. – La facture de transport fait apparaître le montant de l’augmentation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques dû au titre de la facture, affecté au financement de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France en application du III de l’article 19 de la loi n° … du … de finances pour 2020.
« Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie et des transports fixe les modalités de cette mention. »
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis, sur l’article.
M. Jean-François Longeot, rapporteur pour avis. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, depuis les l’ouverture des Assises nationales de la mobilité, voilà plus de deux ans, une question fait débat : comment faire contribuer les poids lourds étrangers qui transitent par la France à l’entretien des infrastructures de transport ?
L’une des pistes régulièrement évoquée par le Gouvernement au cours des derniers mois est la mise en place d’une vignette obligatoire pour les poids lourds. Or la solution finalement retenue à l’article 19, qui consiste à augmenter la taxe sur les carburants due par le transporteur routier de marchandises reposera essentiellement, comme l’a dit le rapporteur général, sur les entreprises françaises et non sur les transporteurs étrangers, puisque ceux-ci s’approvisionnent en carburant en dehors de la France. Par conséquent, ils continueront à utiliser et à dégrader les infrastructures sans contribuer à leur entretien. Il y a donc tromperie sur la marchandise.
On peut également regretter que cette hausse de la fiscalité soit uniquement conçue dans une logique de rendement budgétaire visant à pallier le manque de moyens de l’État pour financer les infrastructures de transport et qu’elle ne s’inscrive pas dans une réflexion de plus long terme sur la transformation de ces secteurs pour les accompagner à réaliser leur transition énergétique en s’orientant vers des alternatives moins émettrices de gaz à effet de serre.
C’est pourtant ce que demandent les transporteurs : avoir de la visibilité sur l’évolution du cadre fiscal et réglementaire, et bénéficier d’un accompagnement pour réduire leurs émissions de CO2 à travers un véritable contrat de filière.
Le secteur a par ailleurs fait une proposition alternative intéressante, qui consiste à taxer les chargeurs qui recourent à une prestation de transport plutôt que les entreprises qui l’exécutent, en mettant en place une éco-contribution.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous poserai donc trois questions très simples. Pourquoi avoir renoncé à l’ambition de faire contribuer les poids lourds étrangers à l’entretien de nos infrastructures de transport ? Que répondez-vous aux transporteurs qui demandent de la visibilité et un accompagnement pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre ? Pourquoi avoir refusé de reprendre leurs propositions alternatives visant à taxer les chargeurs plutôt que les transporteurs ?
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, sur l’article.
M. Olivier Jacquin. M. le rapporteur général a annoncé que l’article 19 serait supprimé. J’estime que c’est une bonne chose pour le transport routier tant je pense du mal de ces 2 centimes d’euros de taxe supplémentaires auxquels serait soumis un secteur fragile et sujet à une concurrence internationale forte.
Comme je l’ai dit, le dispositif prévu à l’article 19 revient à tirer une balle – certes de faible calibre – dans le pied des transporteurs français par rapport aux concurrents étrangers. Ce n’est pas acceptable. C’est pourquoi, monsieur le rapporteur général, je salue votre initiative de supprimer cette taxe.
Permettez-moi de vous interroger, mes chers collègues, sur un principe de cohérence. Lors de l’examen du projet de loi d’orientation des mobilités (LOM), nous vous avons proposé de nombreux dispositifs pour tenter d’inscrire le secteur des transports dans la transition énergétique et dans le principe du pollueur-payeur.
Le rapporteur Didier Mandelli, qui avait accompli par ailleurs un excellent travail, a systématiquement émis des avis défavorables sur nos amendements au motif que nous ne cherchions qu’à inventer des taxes diverses et variées. La seule mesure qui valait à ses yeux, unanimement proposée pour financer les petites collectivités, consistait dans un taux réduit de versement mobilité accompagné d’un peu de TICPE fléchée. Pour le reste, il était prévu que la TICPE financerait aussi les infrastructures.
En supprimant l’article 19, vous supprimez aussi des financements de l’Afitf. Or, lorsque nous avons débattu de la LOM, le financement de l’Afitf était l’une de nos priorités.
Un certain nombre d’amendements ont pour objet d’inventer une nouvelle taxe, qui, à la différence du dispositif que j’ai proposé, revient à assujettir les donneurs d’ordre à un nouvel impôt. On crée de nouvelles taxes, d’un côté, on supprime des financements à l’Afitf, de l’autre : La cohérence m’échappe et me pose question.
Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, sur l’article.
M. Pascal Savoldelli. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous devrions pouvoir nous accorder sur un principe commun : de même que les entreprises ferroviaires contribuent à l’entretien des infrastructures ferroviaires, il faut que les usagers des infrastructures routières participent financièrement à l’entretien des infrastructures routières.
Or une grande partie des voiries utilisées pour le transport routier relèvent de la responsabilité des collectivités territoriales. Chacun sait bien que les véhicules automobiles routiers d’usage personnel ne dégradent pas la voirie de la même manière qu’un camion de gros tonnage.
M. le secrétaire d’État me corrigera si je me trompe, l’article 19 rapportera 140 millions d’euros à l’Afitf. Nous devons garder en tête le débat que nous avons eu l’année dernière sur cette question.
Le Sénat ayant des idées et une pratique de travail pluraliste, mon groupe serait favorable à la constitution d’un groupe de travail qui aurait pour mission de formuler des propositions d’évolutions juridiques sérieuses et financées sur un nouveau mécanisme d’écotaxe réellement efficient et permettant d’abonder plus largement l’Afitf.
On avance souvent un problème d’incompatibilité avec le droit européen. En l’occurrence, la directive Eurovignette permet d’avoir la même législation sur l’ensemble du territoire européen.
Concrètement, il faut que le transporteur routier participe au paiement et à l’entretien des infrastructures routières, qu’il soit français ou issu d’un pays européen.
La concurrence est actuellement aveugle et exacerbée. Les transporteurs routiers vont manifester pour dénoncer cette situation qui suscite un conflit avec leurs homologues des territoires frontaliers qui sont pourtant nos amis européens.
Le Sénat a les moyens de réaliser ce travail financier et juridique. Il nous permettra de résoudre cette crise qui remonte déjà au budget précédent.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-105 est présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.
L’amendement n° I-1165 rectifié est présenté par M. Gremillet, Mmes Primas et Estrosi Sassone, M. Regnard, Mme Micouleau, MM. Morisset et Brisson, Mme Richer, M. D. Laurent, Mmes Puissat, Bruguière et Gruny, M. Piednoir, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Pellevat, de Nicolaÿ et Vaspart, Mmes Morhet-Richaud, Deromedi et Ramond, MM. Charon, Lefèvre, Bizet et Houpert, Mmes Sittler, Lassarade, Dumas et L. Darcos, MM. B. Fournier et Karoutchi, Mme Malet, MM. de Legge, Pierre, Savin, Raison, Perrin, Milon, Laménie, Cuypers et Bouchet, Mmes M. Mercier et Chauvin, MM. Kennel, Longuet, Bonne, Courtial et Daubresse, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Longeot, Babary, Bouloux, Calvet, Duplomb et Rapin, Mmes Duranton et Joissains, MM. Chatillon, P. Martin et Decool, Mmes Lamure et Billon et MM. Darnaud et Tissot.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° I-105.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à supprimer l’article 19.
Pour convaincre ceux qui hésiteraient, je citerai deux chiffres : en France, 40 % du trafic routier est assuré par des entreprises sous pavillon étranger ; 75 % des poids lourds étrangers qui circulent en France – les trois quarts ! – ne s’approvisionnent pas en carburant en France. En effet, non seulement la capacité des réservoirs le permet, mais, comme cela a été dit, le différentiel est d’à peu près 10 euros en moins par hectolitre en Espagne ou en Belgique.
Le vote de cet article entraînerait une perte de compétitivité pour le pavillon français qui a déjà perdu l’essentiel du marché. N’accroissons pas cette perte de compétitivité par un vote inconsidéré.
Concernant le financement, la solution existait ; elle a été votée à plusieurs reprises par la majorité sénatoriale : il s’agit de l’écotaxe. Celle-ci permettant de moduler les tarifs en fonction des régions, il aurait été possible de résoudre la question relative à la Bretagne en fixant à zéro le tarif de cette région.
C’est pourquoi j’ai très mal vécu en commission des finances la suppression par Mme Royal de ce dispositif qui nous a coûté un milliard d’euros, nous privant de recettes récurrentes.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° I-1165 rectifié.
M. Daniel Gremillet. Si l’on voulait faire disparaître ce qui reste de l’activité de transport routier, on ne s’y prendrait pas autrement ! C’est pourquoi je propose également la suppression de cet article.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d’État. Vous vous en doutez, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
Permettez-moi de vous faire part des conclusions des réunions qui ont eu lieu avec l’ensemble de la filière il y a un peu plus d’un mois et demi. L’engagement a été pris d’affecter l’ensemble des ressources à l’Afitf et cela a été inscrit dans la loi.
Pour plus de transparence, une mesure d’information en pied de facture a été proposée à la filière.
Plusieurs propositions alternatives ont été formulées, notamment la vôtre, monsieur Jacquin. Permettez-moi de préciser que je parlais bien des poids lourds en transit, et non pas étrangers, qui viendraient en France – vous avez eu raison de le préciser.
Par ailleurs, nous avons proposé à la filière, qui l’a accepté dans son principe, l’élaboration d’un contrat de transition énergétique afin d’assurer une forme de stabilité fiscale dans le temps. Nous travaillerons d’ailleurs avec Bercy au raccourcissement des délais de remboursement de la TICPE, comme cela a été fait pour la filière agricole.
Enfin, nous partageons l’ambition de mettre un terme au dumping fiscal et social qui s’exerce dans le secteur du transport routier de marchandises au travers d’une norme européenne. C’est tout l’objet de la position de la Commission européenne, qui sera débattue la semaine prochaine en conseil des ministres des transports de l’Union européenne. Soyez assuré que la France défendra ardemment cette position.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. La suppression de l’article 19 est une décision radicale et définitive. Hop, plus d’article !
Or un certain nombre d’amendements intéressants, visant notamment à convertir les 2 centimes en une taxe payée par les donneurs d’ordre, ont été déposés à cet article et acceptés par la filière des transports.
Ce système était à mon avis intéressant. Certes, il n’était pas suffisamment vertueux – je m’en suis expliqué –, car il ne tenait pas compte du principe pollueur-payeur, mais il aurait au moins permis d’amorcer le travail de responsabilisation de toute la chaîne des transports.
En supprimant l’article, nous nous privons de débat. Je le regrette d’autant plus, monsieur le rapporteur général, que comme je l’ai déjà dit, cela soulève un problème de cohérence politique : on ne peut pas supprimer les financements dédiés aux infrastructures aujourd’hui alors qu’au moment des débats sur le projet de loi d’orientation des mobilités, nous tenions à financer ces mêmes infrastructures.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-105 et I-1165 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l’article 19 est supprimé, et les amendements nos I-185 rectifié, I-233 rectifié bis, I-352 rectifié, I-413 rectifié quater, I-443 rectifié bis et I-444 rectifié deviennent sans objet.
Articles additionnels après l’article 19 (précédemment réservés)
Mme la présidente. L’amendement n° I-604, présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat, Raynal, Kanner, Éblé et Joël Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Botrel, Carcenac et Dagbert, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte, P. Joly, Lalande et Lurel, Mmes Préville, Taillé-Polian et Tocqueville, M. Antiste, Mme Artigalas, M. Assouline, Mme Blondin, M. M. Bourquin, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Daudigny, Devinaz et Fichet, Mmes Grelet-Certenais, Harribey et Jasmin, M. Jomier, Mme G. Jourda, MM. Kerrouche et Leconte, Mme Lepage, M. Marie, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mme Perol-Dumont, MM. Sueur et Temal, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par une section … ainsi rédigée :
« Section …
« Contribution des chargeurs à la transition énergétique
« Art. 235 ter …. – Les entreprises qui font appel à un service de livraison afin d’expédier la marchandise qui leur a été commandée sont soumises, selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, à une taxe sur la livraison de biens à destination de toute personne physique ou morale.
« La taxe est acquittée par l’entreprise qui fait appel au service de livraison. Elle est assise sur la volumétrie carbone du transport, selon les modalités fixées par la section 1 du chapitre Ier du titre III du livre IV de la première partie réglementaire du code des transports. »
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Je ne voudrais pas vous infliger à nouveau le débat que nous venons d’avoir. Il est donc défendu, madame la présidente. (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° I-606, présenté par MM. Bérit-Débat, Jacquin, Raynal, Kanner, Éblé et Joël Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Botrel, Carcenac et Dagbert, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte, P. Joly, Lalande et Lurel, Mmes Préville, Taillé-Polian et Tocqueville, M. Antiste, Mme Artigalas, M. Assouline, Mme Blondin, M. M. Bourquin, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Daudigny, Devinaz et Fichet, Mmes Grelet-Certenais, Harribey et Jasmin, M. Jomier, Mme G. Jourda, MM. Kerrouche et Leconte, Mme Lepage, M. Marie, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mme Perol-Dumont, MM. Sueur et Temal, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Le titre II du code de la voirie routière est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« Redevance kilométrique poids lourds
« Art. L. 124-1. – Les véhicules qui empruntent le réseau routier national non concédé et des voies des collectivités territoriales susceptibles de subir un report de trafic, et dont le poids total autorisé en charge est supérieur ou égal à 3,5 tonnes, sont soumis, selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État, à une redevance pour service rendu, appelée redevance kilométrique poids lourds, ayant pour objet de couvrir les coûts de service d’entretien structurel des chaussées du domaine public routier national. Le montant de la taxe est progressif en fonction du nombre total de kilomètres parcourus entre le point de départ et le remisage du véhicule.
« Art. L. 124-2. – La redevance mentionnée à l’article L. 124-1 est due par le propriétaire du véhicule. Toutefois, lorsque le véhicule fait l’objet d’un contrat de crédit-bail, d’un contrat de location ou de tout autre type de contrat de mise à disposition de l’usage de véhicule, la redevance due par l’utilisateur désigné dans ce contrat. Le bailleur demeure solidairement responsable du paiement de la redevance ainsi que, le cas échéant, de la majoration de retard applicable.
« Art. L. 124-3. – Le réseau soumis à la redevance prévue à l’article L. 124-1 est constitué d’axes du réseau routier national défini à l’article L. 121-1, dont la liste est déterminée par décret en Conseil d’État. Cette liste ne comprend pas les sections d’autoroutes et routes du réseau routier national soumises à péages.
« Art. L. 124-4. – Le montant de la redevance est proportionné à la distance d’utilisation du réseau routier défini à l’article L. 124-3. Son montant est modulé en fonction des caractéristiques des véhicules, en particulier des dommages causés aux infrastructures. »
II. Le paiement de la taxe mentionnée au chapitre IV du code de la voirie routière ouvre droit à une bonification du remboursement des taxes sur les carburants prévue par l’article 265 septies du code des douanes selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État.
III. Les articles 284 à 284 sexies bis du code des douanes sont abrogés.
IV – La perte de recettes résultant pour l’État des II et III est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à la taxe prévue par l’article 235 ter ZD du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Jacquin.