Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Votre commission a supprimé l’article 2 ter qui prévoyait d’inscrire dans le code de la sécurité intérieure que toute personne ayant fait l’objet d’une ordonnance de protection était interdite de port et de détention d’armes, même si le juge aux affaires familiales ne l’avait pas ordonné, car cela était excessif.
Cet amendement vise non pas à rétablir les dispositions supprimées, mais à les remplacer par d’autres prévoyant l’inscription dans le fichier national des interdits d’acquisition et de détention d’armes (Finiada), institué par l’article L. 312-16 de ce même code, des personnes visées par une interdiction de port ou de détention d’arme décidée par le JAF.
Ce fichier peut être consulté par différentes administrations comme la police, la gendarmerie, les douanes, mais également par la Fédération nationale des chasseurs, les fédérations de tir sportif et les armuriers.
Cet amendement permet donc de rendre effectives les interdictions qui ont été prononcées par le juge aux affaires familiales. Je précise, pour répondre à des interrogations qui ont été formulées ce matin en commission par Mme la rapporteur et qui expliquent – j’anticipe peut-être un peu ce que va dire Mme la rapporteur – l’avis de sagesse de la commission, que cet amendement respecte la logique interne du code de la sécurité intérieure.
C’est pourquoi, au lieu de compléter simplement l’article L. 312-16 de ce code, qui énumère les mentions figurant dans le Finiada, pour citer les interdictions prononcées par le JAF, il vise à insérer dans ce même code un nouvel article L. 312-3-2 rappelant l’existence de ces interdictions. Quant à l’article L. 312-16, il renvoie lui- même à ce nouvel article.
Compte tenu de ces précisions, j’espère que l’avis de sagesse de la commission se transformera en avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Effectivement, la commission a adopté ce matin un avis de sagesse, car elle a eu peu de temps pour examiner l’amendement. Elle s’est interrogée sur la rédaction retenue, qui ne paraît pas optimale.
Pour autant, les échanges que nous avons eus cet après-midi avec vos services, madame la ministre, et les explications que vous venez de nous donner m’ont personnellement convaincue. J’émets donc à titre personnel un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. En conséquence, l’article 2 ter est rétabli dans cette rédaction.
Article additionnel après l’article 2 ter
M. le président. L’amendement n° 124 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article 227-4-2 du code pénal est complété par les mots : « est puni des mêmes peines le fait, par cette personne, lorsqu’a été ordonné le port d’un dispositif électronique mobile anti-rapprochement en application de l’article 515-11-1 de ce même code, de se rapprocher de la victime à une distance inférieure à celle fixée par l’ordonnance ».
La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Cet amendement vise à faire en sorte que le non-respect par l’auteur des violences des conditions de mise en œuvre du dispositif électronique mobile anti-rapprochement, qui est prononcé dans le cadre d’une ordonnance de protection, constitue bien un délit de violation de cette ordonnance prévue par l’article 227-4-2 du code pénal.
Cette pénalisation est en effet absolument indispensable pour assurer l’efficacité de la réforme. À défaut, les forces de l’ordre ne disposeraient d’aucune base légale pour intervenir si l’auteur des violences se rapproche de la victime à moins d’une certaine distance fixée par le JAF, tant qu’il ne sera pas en contact avec cette dernière. Elles ne pourront que rester passives lorsque le dispositif générera des alertes. Ces dernières auraient ainsi pour seule conséquence d’informer la victime que l’auteur des violences se rapproche d’elle et qu’elle doit se mettre en sécurité, ce qui n’est pas, vous en conviendrez, l’objectif recherché.
L’existence d’une infraction est donc juridiquement nécessaire pour permettre aux forces de l’ordre d’intervenir dans le cadre de l’enquête de flagrance, afin d’interpeller l’auteur et de le placer en garde à vue, avant que le procureur ne se prononce sur d’éventuelles poursuites. Le but n’est évidemment pas d’emprisonner la personne, mais de l’empêcher de se rapprocher de la victime.
La situation justifie par conséquent de préciser la rédaction des dispositions de l’article 227-4-2 du code pénal, ce qui fait l’objet du présent amendement. Je précise que ce dernier a été rectifié, afin d’être plus précis que la version initialement déposée et ayant reçu ce matin un avis défavorable de la commission en raison justement de son imprécision.
Les nouvelles dispositions tendent donc à réprimer uniquement le non-respect de la distance de sécurité qui sera fixée par le JAF dans son ordonnance de protection. J’espère que cette rectification conduira la rapporteur à émettre un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. La commission n’ayant pu examiner ce matin cet amendement, j’émettrai un avis personnel.
Effectivement, sa rédaction est plus précise et plus claire que la rédaction initiale, ce qui constitue un progrès. Toutefois, nous sommes réservés sur la mesure proposée, qui semble instituer une interdiction de rapprochement ordonnée par le JAF. Or il n’est pas prévu de donner au JAF une telle prérogative.
Par conséquent, par manque de temps pour expertiser la mesure et en raison des doutes que je viens d’exprimer, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Madame la rapporteur, puisque vous maintenez vos interrogations et votre avis défavorable sur cet amendement, je veux vous apporter quelques précisions complémentaires.
Certes, l’article 2 quater, ajouté par la commission, prévoit le dispositif du bracelet électronique anti-rapprochement dans le cadre d’une ordonnance de protection qui s’appliquera jusqu’au 31 décembre 2022, et que le Parlement devra à cette date pérenniser ou non. Pour autant, il paraît nécessaire d’en pénaliser la violation.
En effet, même si le dispositif est adopté de façon temporaire par le Parlement, il doit bien évidemment être efficace. Or, si vous ne prévoyez pas de pénalisation, tel ne sera pas le cas. Je le répète, si on ne crée pas un délit de non-respect de la distance, les forces de l’ordre ne pourront pas intervenir lorsque l’auteur de la violence se rapprochera de la victime, tant qu’il ne sera pas en contact avec elle.
Il me semble qu’il ne sert à rien d’instituer un dispositif anti-rapprochement si celui-ci ne permet pas d’empêcher effectivement ce rapprochement. S’il permet uniquement de prévenir la victime que l’auteur des violences se rapproche, que penseront les victimes du dispositif adopté par le Parlement ?
Le but, je le répète, est de permettre aux forces de l’ordre d’intervenir et d’intercepter la personne avant qu’elle n’entre en contact avec la victime. C’est la raison pour laquelle, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous demande de faire preuve de cohérence et de responsabilité en adoptant cet amendement, dans l’intérêt des victimes.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 124.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 2 quater (nouveau)
L’article 515-11-1 du code civil, dans sa rédaction résultant de l’article 2 de la présente loi, est applicable jusqu’au 31 décembre 2022.
Au plus tard six mois avant cette date, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport détaillé de son application. – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 2 quater
M. le président. L’amendement n° 4 rectifié sexies, présenté par Mmes Billon, Eustache-Brinio, Puissat et L. Darcos, M. Brisson, Mmes Bonfanti-Dossat, Malet, Vérien et Kauffmann, M. Laménie, Mmes Blondin, A.M. Bertrand, Létard et Rossignol, MM. L. Hervé et Courteau et Mme Meunier, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code civil est ainsi modifié :
1° L’article 205 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette obligation ne s’applique pas aux enfants dont le père ou la mère a été condamné pour le meurtre ou l’assassinat de l’autre parent. » ;
2° L’article 206 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette obligation ne s’applique pas dans le cas prévu au second alinéa de l’article 205. » ;
3° Au second alinéa de l’article 379, les mots : « , sauf disposition contraire dans le jugement de retrait » sont supprimés ;
4° Après l’article 381, est insérée une section ainsi rédigée :
« Section …
« Des conséquences des morts violentes au sein des couples sur l’autorité parentale du parent condamné et sur l’obligation d’aliment des enfants à l’égard de celui-ci
« Art. …. – La demande en restitution prévue à l’article 381 est irrecevable en cas de condamnation pour le meurtre ou l’assassinat de l’autre parent. »
La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. Lorsque l’autorité parentale a été retirée à un parent pour cause de violences envers son conjoint, il paraît nécessaire de prévoir des dispositions visant à protéger les descendants.
Cet amendement vise à modifier le code civil pour prévoir, à l’article 379, la dispense de l’obligation d’aliment pour l’enfant en cas de retrait total de l’autorité parentale ; rendre irrecevable la demande de restitution de l’autorité parentale prévue à l’article 381 du code précité, quand le parent qui en fait la demande a été condamné pour le meurtre ou l’assassinat de l’autre parent ; exclure l’obligation d’aliment des enfants à l’égard de leurs ascendants, définie par l’article 205 du même code, en cas de condamnation pour le meurtre ou l’assassinat de l’autre parent ; et, dans la même logique, exonérer de l’obligation d’aliment les gendres et belles-filles.
Ces mesures rejoignent les conclusions établies à l’occasion du Grenelle des violences faites aux femmes, un peu anticipées. Il s’agit d’une évolution imparable et, a priori, consensuelle. Il serait dommage que le Sénat ne s’en empare pas ce soir. Je compte sur vous, mes chers collègues, pour anticiper la date du 25 novembre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. À l’heure actuelle, le juge peut faire application de l’article 207 du code civil et décharger l’enfant des aliments qu’il doit à son père en tout ou partie lorsque celui-ci a gravement manqué à ses obligations envers lui, ce qui semble évident s’il a tué sa mère.
Mais cela suppose une action en justice, et le dispositif pourrait effectivement être amélioré.
Cet amendement va plus loin qu’une simple suppression de l’obligation alimentaire. Outre la suppression de l’obligation d’aliment des enfants vis-à-vis des parents lorsque l’un d’entre eux a été condamné pour meurtre ou assassinat de son conjoint et la décharge des gendres et des belles-filles dans ce cas, il vise à supprimer la possibilité pour le juge de maintenir une obligation d’aliment lorsqu’il prononce un retrait total d’autorité parentale.
Or le retrait total d’autorité parentale couvre bien d’autres cas que les violences conjugales, tels que l’alcoolisme du parent ou le défaut de soins.
Il n’y a donc pas de raison de supprimer cette souplesse, sachant de surcroît qu’en cas de meurtre ou de violence sur l’autre parent, le juge ne fera pas usage de cette possibilité.
Par ailleurs, cet amendement tend à supprimer la possibilité pour le parent dont l’autorité parentale a été retirée d’en demander le rétablissement en cas de condamnation pour meurtre ou assassinat sur l’autre parent. Une telle disposition inclurait toute possibilité pour un juge de réexaminer la situation, à la demande du parent, en prenant en compte l’intérêt de l’enfant, étant précisé qu’une telle requête n’est plus recevable lorsque l’enfant a été placé en vue d’adoption.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié sexies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 48 rectifié, présenté par M. Grand, Mme Duranton, MM. Houpert, Cambon et Regnard, Mmes Lopez et Giudicelli, MM. Sido, Laménie, Lefèvre, Duplomb, Charon et B. Fournier, Mmes Bories et Berthet et MM. Bonne et Priou, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la première phrase de l’article 221-5-5 du code pénal, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Elle se prononce également sur le maintien ou non de l’obligation alimentaire en application de l’article 205 du code civil. »
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Jean-Pierre Grand. Dans les restitutions du groupe de travail « justice » du Grenelle des violences conjugales, il est proposé de décharger les enfants de l’obligation alimentaire envers le parent condamné pour homicide volontaire sur l’autre parent.
Le code civil prévoit que les enfants doivent des aliments à leur père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin. En cas d’atteinte volontaire à la vie par le conjoint, il est proposé de permettre aux juges de dégager le ou les enfants de leur obligation alimentaire vis-à-vis de leur parent survivant, auteur des faits.
Dans ce cas, madame la rapporteur, le juge aura complètement la main sur la décision.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Votre amendement, mon cher collègue, ne vise pas à modifier le code civil, mais tend à compléter l’article 221-5-5 du code pénal qui prévoit qu’en cas de meurtre ou assassinat d’un parent par l’autre, la juridiction se prononce sur le retrait total ou partiel de l’autorité parentale du meurtrier.
Il s’agit d’ajouter que la juridiction pénale se prononce également sur le maintien ou non de l’obligation alimentaire de l’enfant vis-à-vis du parent criminel survivant.
Cet ajout semble inutile, car, en cas de meurtre, le retrait prononcé est total, ce qui entraîne automatiquement une dispense de l’obligation alimentaire en application de l’article 379 du code civil.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Grand. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 48 rectifié est retiré.
L’amendement n° 104 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell, Artano, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gold, Guérini et Labbé, Mme Laborde et MM. Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 229-2 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° L’un des conjoints a bénéficié d’une ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales en application du titre XIV du présent livre. »
La parole est à Mme Josiane Costes.
Mme Josiane Costes. La dernière réforme du divorce a introduit le divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée, afin de désengorger les tribunaux pour les divorces non conflictuels. Celui-ci n’a pas vocation à s’appliquer lorsque l’un des deux époux bénéficie d’une ordonnance de protection contre l’autre.
Cet amendement vise donc à exclure explicitement cette possibilité dans la loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Cette exclusion priverait la personne bénéficiant d’une ordonnance de protection de tout divorce par consentement mutuel, même par consentement mutuel judiciaire.
Cela pourrait avoir un effet contre-productif, en conduisant cette femme à renoncer à recourir aux mesures d’urgence de l’ordonnance de protection, de peur de se fermer la voie d’un divorce rapide.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, d’autant que, dans le cadre du divorce par consentement mutuel, les parties doivent prendre chacune un avocat, ce qui me paraît renforcer la protection de la victime.
Mme Josiane Costes. Je retire mon amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 104 rectifié est retiré.
Les amendements nos 89 rectifié ter et 69 rectifié bis ne sont pas soutenus.
L’amendement n° 113 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Artano, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme Costes et MM. Gold, Guérini, Labbé, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article 373-2 du code civil est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « , sauf en cas de violences conjugales ou intra familiales, c’est-à-dire, tous les actes de violence physique, sexuelle, psychologique ou économique qui surviennent au sein de la famille ou du foyer ou entre des anciens ou actuels conjoints ou partenaires, indépendamment du fait que l’auteur de l’infraction partage ou a partagé le même domicile que la victime et ses enfants. Dans ce cas, le juge ne permet pas l’information du parent violent concernant l’adresse du nouvel établissement scolaire de l’enfant. »
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Comme je n’ai pas réussi à entrer par la grande porte, j’ai essayé de passer par la petite porte, c’est-à-dire par le biais d’un article additionnel, pour évoquer de nouveau l’autorité parentale.
Au vu du succès rencontré, je considère cet amendement comme défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 70 rectifié bis n’est pas soutenu.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les amendements nos 32 rectifié et 71 rectifié bis ne sont pas soutenus.
L’amendement n° 114 rectifié, présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Artano, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre et MM. Gold, Guérini, Labbé, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article 373-2-1 du code civil, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de violences conjugales ou intra familiales, le juge confie l’exercice exclusif de l’autorité parentale au parent victime de ces violences. Le parent auteur des violences ne peut pas exercer de droit de visite, ni de droit d’hébergement, quelles qu’en soient les modalités, pendant une période probatoire laissée à l’appréciation du juge et reconductible. »
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Cet amendement est défendu, monsieur le président, dans la mesure où il concerne également l’autorité parentale.
M. le président. L’amendement n° 26 rectifié bis, présenté par Mme Cartron et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article 378-1 du code civil, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’exercice de l’autorité parentale est suspendu de plein droit lorsque l’un des deux parents est décédé des suites d’un homicide volontaire, dont les faits font l’objet d’une enquête pénale mettant en cause l’autre parent, ou d’une information judiciaire ouverte à l’encontre de celui-ci. Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer ce retrait total, notamment lorsque l’intérêt de l’enfant le commande. »
La parole est à Mme Françoise Cartron.
Mme Françoise Cartron. Cet amendement a pour objet de suspendre l’exercice de l’autorité parentale en cas d’homicide volontaire par le conjoint, sans qu’il soit besoin d’une décision du juge, et ce dès la phase d’enquête ou d’instruction. Toutefois, la juridiction pourra, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer ce retrait total, notamment lorsque l’intérêt de l’enfant le commande.
Comme le Grenelle des violences conjugales nous y invite, cette rédaction vise ainsi à indexer notre droit sur le réel : lorsqu’un père commet des violences sur la mère de ses enfants, la plupart du temps en face de ces derniers, on peut légitimement supposer que la relation qui les lie est fortement dégradée, au moins le temps du jugement de la procédure.
Ainsi, maintenir envers et contre tout le lien physique entre un enfant et son père ne semble raisonnable ni pour l’enfant ni pour la mère, qui est mise en péril dès qu’elle exerce son droit de visite.
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié quinquies, présenté par Mmes Billon, Puissat, Eustache-Brinio et L. Darcos, M. Brisson, Mmes Bonfanti-Dossat, Malet, Vérien et Kauffmann, MM. Laménie et A. Bertrand, Mmes Létard, Rossignol et Meunier et M. Courteau, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi un rapport sur les conséquences du maintien de l’autorité parentale de l’auteur de violences intrafamiliales et sur la possibilité d’envisager la suspension, voire le retrait de l’autorité parentale en cas de condamnation pour violences intrafamiliales, a fortiori quand l’auteur de violences a été condamné pour le meurtre ou l’assassinat de l’autre parent.
La parole est à Mme Annick Billon.
Mme Annick Billon. Cet amendement traduit une recommandation formulée par la délégation aux droits des femmes dans plusieurs de ses travaux sur les violences faites aux femmes.
Il vise à favoriser un changement de regard sur la question de l’autorité parentale, afin de rendre plus évidente la suspension, voire le retrait de l’autorité parentale, par le juge civil ou pénal, du parent condamné pour violences intrafamiliales, que la victime soit le conjoint ou un enfant.
De nombreuses femmes sont tuées par leur conjoint à l’occasion des droits de visite et d’hébergement des enfants. Il est donc urgent de favoriser la réflexion sur un aménagement facilité de l’autorité parentale en cas de condamnation pour violences intrafamiliales, comme l’a d’ailleurs annoncé le Premier ministre dans le cadre du lancement du Grenelle des violences conjugales, le 3 septembre 2019.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 114 rectifié, l’idée de forcer la main du juge en rendant automatique ce qui peut être assimilé à une peine soulève des questions d’ordre constitutionnel.
Les choses peuvent évidemment être améliorées, mais dans le cas d’une réforme plus globale, afin de mettre en cohérence les régimes de l’autorité parentale.
En l’état des textes, le juge a déjà la possibilité de décider l’exercice exclusif de l’autorité parentale, si l’intérêt de l’enfant le commande, et de priver le parent violent des droits de visite et d’hébergement, en cas de motifs graves.
La commission est par conséquent défavorable à cet amendement.
Quant à l’amendement n° 26 rectifié bis, il ne semble pas tout à fait abouti, puisqu’il mélange les notions de suspension et de retrait, ce qui montre que les frontières sont floues. La suspension n’est pas un mécanisme du droit existant. Il faudrait donc créer un régime propre pour en déterminer les conséquences pour l’enfant : à qui l’enfant sera-t-il confié et sous quel statut ?
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
S’agissant de l’amendement n° 6 rectifié quinquies, la commission des lois et le Sénat en général ne sont pas favorables aux demandes de rapports, qui restent souvent lettre morte. Toutefois, la question de l’autorité parentale et de son maintien en cas de violence intrafamiliale est au cœur de nos débats. C’est une préoccupation vive, qui a fait l’objet d’annonces du Premier ministre et du Gouvernement depuis quelques mois. Le travail est en cours, et le rapport permettra au Parlement d’en être utilement tenu informé et de connaître quelles pistes sont explorées.
La commission est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable, comme la commission, aux amendements nos 114 rectifié et 26 rectifié bis. Mais elle est également défavorable à l’amendement n° 6 rectifié quinquies.
Mme Annick Billon. C’est dommage !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2 quater.
L’amendement n° 65 rectifié bis n’est pas soutenu.
L’amendement n° 116 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell, Artano, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gold, Guérini et Labbé, Mme Laborde et MM. Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 81 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Hors les cas de mort naturelle évidente ou survenue à l’occasion d’un accident de la circulation, l’inhumation d’un mineur de moins d’un an ne peut avoir lieu sans l’établissement d’un procès-verbal dans les conditions prévues au premier alinéa. »
La parole est à Mme Françoise Laborde.