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Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire
Mme la présidente. Mes chers collègues, j’ai le plaisir de saluer, dans la tribune d’honneur, une délégation de la Chambre des représentants de la République de Chypre, conduite par son président, M. Giórgos Lillíkas. (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.) Elle est accompagnée par notre collègue Nelly Tocqueville, présidente du groupe d’amitié France-Chypre.
La délégation est à Paris pour évoquer tant la partition de l’île que les questions énergétiques. Elle s’entretiendra avec nos collègues Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, et Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes.
Le Sénat entretient d’excellentes relations avec la Chambre des représentants chypriote, et la France en est un partenaire étroit, comme en témoignent les contacts fréquents entre nos deux pays.
Mes chers collègues, permettez-moi de souhaiter, en votre nom à tous, la plus cordiale bienvenue et un fructueux séjour à nos homologues de la Chambre des représentants de Chypre. (Applaudissements.)
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Clarification et actualisation du règlement du Sénat
Suite de la discussion et adoption d’une proposition de résolution dans le texte de la commission modifié
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion de la proposition de résolution visant à clarifier et actualiser le règlement du Sénat.
Article 8 (suite)
Mme la présidente. L’amendement n° 6, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« … . – Les auditions des commissions d’enquêtes sont publiques, sauf délibération contraire de la commission.
« Les travaux de la commission, à l’exclusion des auditions, ne sont pas publics, sauf délibération contraire de la commission.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement vise à préciser que les auditions des commissions d’enquête sont publiques, sauf délibération contraire de la commission elle-même, évidemment.
Lors d’une récente commission d’enquête, dont vous vous souvenez quelque peu, monsieur le président Philippe Bas, nous avions eu des débats avant d’entamer les auditions pour savoir s’il était opportun que celles-ci fussent publiques ou non. Nous avons décidé qu’il était mieux qu’elles le fussent. D’ailleurs, nous nous sommes opposés à une demande de huis clos qui avait été formulée. Nous aurions pu l’accepter – tout dépend des motivations –, mais nous avons pensé que, en l’espèce, il valait mieux que ce fût ainsi.
Personne ne comprendrait, aujourd’hui, que nous revenions en arrière. Depuis ladite commission d’enquête – mais ce n’est pas la seule ; il y en a eu beaucoup d’autres –, chacun comprend que, dans une démocratie digne de ce nom, il faut un contrôle parlementaire. Ces commissions d’enquête parlementaires sont véritablement indispensables et doivent pouvoir travailler en toute transparence. Cette proposition me paraît donc légitime et opportune.
Bien entendu, il est précisé que, hormis les auditions, les travaux de la commission ne sont pas publics, sauf délibération contraire de cette dernière.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, rapporteur. Cette question est très intéressante, mais complexe.
Il faut d’abord savoir que, s’agissant des commissions d’enquête proprement dites, les règles applicables relèvent de la loi, et non du règlement. C’est ainsi, nous n’y pouvons rien !
Tout cela est le fruit de la révision constitutionnelle de 2008 : l’article sur les commissions d’enquête introduit dans la Constitution renvoie, pour son application, à la loi, et non aux règlements de nos assemblées. Il serait donc inconstitutionnel d’inscrire de telles dispositions dans le règlement.
Mais M. Jean-Pierre Sueur ne saurait avoir fait la moindre confusion entre commissions d’enquête et commissions permanentes agissant, parce que le Sénat leur a conféré de tels pouvoirs, avec les pouvoirs d’une commission d’enquête. Je vais donc dire un mot sur ce dernier cas, notre collègue ayant d’ailleurs fait référence à une pratique que nous avons notamment fait vivre l’an dernier.
S’agissant des commissions permanentes, donc, le principe est que les auditions ne sont pas publiques.
Toutefois, la commission peut décider du contraire et il existe toute une gamme de possibilités en matière de publicité de ces réunions, la plus simple étant d’élaborer un procès-verbal rendu public – autrement dit, un document écrit – et la plus ample, la plus transparente, consistant à autoriser l’accès de la presse à la salle des auditions. C’est ce que nous avons fait pour les auditions de la commission des lois, détentrice des pouvoirs d’une commission d’enquête, auxquelles, monsieur Sueur, vous avez fait référence à l’instant.
En résumé, on ne peut pas modifier via le règlement ce qui concerne les commissions d’enquête proprement dites, la loi prévoyant déjà que les auditions, dans ce cadre, sont publiques. Pour les commissions permanentes, en revanche, il faut selon moi nous en tenir à la règle que nous avons appliquée, mais ce n’est pas ce qui est visé par le présent amendement.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 10 rectifié ter, présenté par MM. Karoutchi, Cambon, Maurey et Éblé, Mme Morin-Desailly, MM. Bizet, Pointereau, Bascher et Bazin, Mmes Benbassa, Billon et Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonne, Mme Bories, MM. Bouchet, J.M. Boyer et Brisson, Mme Bruguière, MM. Capo-Canellas et Cazabonne, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mme Chauvin, MM. Dallier et Dantec, Mme L. Darcos, M. Darnaud, Mmes de Cidrac et de la Provôté, MM. de Nicolaÿ et Decool, Mmes Deromedi et Deseyne, M. Détraigne, Mmes Dindar et Dumas, M. Duplomb, Mmes Duranton et Férat, M. Fouché, Mme C. Fournier, M. Frassa, Mmes Garriaud-Maylam et Gatel, MM. Gattolin et Genest, Mme N. Goulet, MM. Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Guérini, Guerriau, Houpert et Huré, Mme Imbert, MM. Janssens, P. Joly, Kennel, Kern et Lagourgue, Mme Lassarade, MM. Laugier et D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Le Gleut, Lefèvre, Léonhardt, Lévrier, Longeot, Longuet, Luche et Magras, Mme Malet, MM. Mandelli, A. Marc et Mayet, Mmes Mélot, Micouleau, Morhet-Richaud et Noël, MM. Panunzi, Pemezec, Perrin, Piednoir, Pierre et Poniatowski, Mmes Procaccia, Puissat et Raimond-Pavero, MM. Raison, Rapin et Regnard, Mme Renaud-Garabedian, MM. Requier, Revet, Savary et Savin, Mme Schillinger, MM. Segouin et Sido, Mmes Sollogoub et Thomas, M. Vaugrenard, Mme Vermeillet, M. Vogel et Mme Vullien, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le rapporteur peut être assisté, en sa présence uniquement, par l’un de ses collaborateurs ou par un collaborateur de son groupe politique d’appartenance. » ;
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Cet amendement, mes chers collègues, est quasiment révolutionnaire ! (Sourires.) Mais oui !
Rendez-vous compte, il tend à prévoir qu’un sénateur ou une sénatrice rapporteur d’un texte – de toute nature, par exemple sur une mission budgétaire dans le cadre de la commission des finances – puisse demander, naturellement avec l’accord du président de la commission, que son collaborateur parlementaire assiste à la séance au cours de laquelle se déroulent des auditions concernant le rapport en question.
J’entends bien que cela ne correspond pas à la pratique du Sénat. Cela se fait au Parlement européen, et dans d’autres assemblées, mais cela ne se fait pas au Sénat.
Il n’est pas question pour moi de remettre en cause la qualité des administrateurs des commissions ou des administrateurs en général.
Je dis simplement que nous nous trouvons dans la plus parfaite contradiction, dans la plus complète hypocrisie. L’auteur d’un rapport, pour peu qu’il s’implique un peu dans son élaboration, travaille dans son bureau, avec le collaborateur parlementaire qu’il a choisi et qui, de par son contrat, est tenu aux mêmes exigences de discrétion, de confiance, de fidélité, de loyauté. Or ce collaborateur ne sait rien des auditions menées en vue de l’établissement du rapport.
En clair, mes chers collègues, si, en tant que rapporteur, vous voulez associer votre collaborateur à l’élaboration de votre rapport, c’est vous qui lui servez de collaborateur ! Vous devez lui répéter ce que vous avez entendu pour qu’il puisse éventuellement l’utiliser dans la rédaction commune que vous allez établir. On sombre dans le non-dit, pour ne pas dire dans le ridicule !
Ce matin, le président de la commission des lois m’a expliqué que l’allusion au fait que le collaborateur « assiste » le sénateur pose quelques complexités.
Peut-être doit-on trouver une autre formulation. Mais, dans mon esprit, il s’agit d’une disposition ne pouvant être prise, bien entendu, qu’avec l’accord du président de la commission et, par définition, uniquement pour un texte ou un rapport concernant le sénateur qui formule la demande. Cela ne me paraît pas franchement atteindre aux droits ou aux pouvoirs de qui que ce soit. En revanche, cela permettrait peut-être à tout le monde de travailler mieux, en pleine confiance, et de donner un peu de sens à l’activité de nos collaborateurs parlementaires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. André Gattolin applaudit également.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Je veux tout d’abord remercier M. Karoutchi, et l’ensemble de nos collègues qui se sont associés à son amendement, de l’hommage qu’ils veulent ainsi rendre au travail de nos collaborateurs. Nous avons toutes les raisons, en effet, d’exprimer notre reconnaissance pour le travail que ces derniers accomplissent à nos côtés.
C’est nous qui définissons, en fonction de ce que nous sommes et de ce qu’est notre besoin, le travail de nos collaborateurs. Certains, d’ailleurs ne participent aucunement au travail législatif ; ils nous assistent dans nos relations avec les forces vives et les élus de nos circonscriptions ; d’autres prennent en charge l’organisation de notre agenda, les questions d’actualité, les questions écrites ; enfin, certains d’entre eux nous assistent dans l’élaboration de nos amendements.
Une minorité d’assistants parlementaires peuvent également nous apporter leur concours lorsque nous sommes rapporteurs d’un texte et ils le font généralement – vous avez raison de le souligner, monsieur Karoutchi – avec beaucoup d’efficacité, ce que nous avons toutes raisons de louer.
Cela étant, mes chers collègues, je voudrais vous livrer l’analyse juridique qu’appelle l’amendement de notre collègue, et j’ai effectivement eu l’occasion de m’en entretenir avec lui.
Cet amendement ne vise pas simplement à autoriser la présence éventuelle d’un de nos collaborateurs lorsque nous procédons à des auditions parce que nous avons été désignés comme rapporteur. Il va beaucoup plus loin, puisqu’il tend à prévoir que, pendant les auditions et les travaux de la commission, nous allons pouvoir être « assistés » par notre collaborateur.
Que recouvre une telle « assistance » pendant les auditions et la présentation de notre rapport devant la commission ? Il y a là une ambiguïté.
Si cela signifie que le collaborateur est assis à côté du sénateur ayant été désigné rapporteur, par exemple pendant que celui-ci présente son avis sur des projets d’amendements, il s’agit là d’un empiètement sur le rôle des administrateurs. Or chacun – les administrateurs comme les assistants – a son rôle et il importe véritablement de ne pas mélanger ces rôles.
Il faut faire en sorte que personne ne se trompe sur ce qu’il a à faire pour le bon service du sénateur. Car l’un de nos collègues l’a indiqué à la tribune, et je souscris à cette affirmation : celle ou celui qui doit être au centre de tout, c’est la sénatrice ou le sénateur dans son travail, chacune et chacun d’entre vous, mes chers collègues.
En tous les cas, il n’est pas envisageable de prévoir qu’au moment où nous faisons notre rapport s’assoie à nos côtés un assistant parlementaire, plutôt qu’un administrateur, pour nous éclairer sur le sens de la réponse qui nous a été préparée en vue d’émettre un avis favorable ou défavorable à un amendement examiné en commission.
Cher collègue Roger Karoutchi, je pense que nous pourrions avancer sur ce point, car la demande est tout à fait légitime si elle vise uniquement à permettre au collaborateur, silencieusement, tel un témoin muet, mais qui sera ainsi parfaitement informé de ce qui se passe dans la préparation du rapport, d’être présent – non pas assister le sénateur, parce que les verbes ont un sens – aux auditions ou aux réunions.
M. André Gattolin. Donc qu’il assiste aux réunions !
M. Philippe Bas, rapporteur. Puisque vous me prenez à partie, mon cher collègue, permettez que je relève ce que vous me soufflez. Lisez l’amendement : il est question, non pas d’assister aux auditions ou aux réunions de commission, mais d’assister le sénateur, qui a été désigné rapporteur. Ce n’est pas la même chose !
Cela étant, nous pourrions faire en sorte, cela n’existe pas actuellement, d’accepter à l’avenir, bien sûr sur autorisation du président de la commission – notre collègue Roger Karoutchi le mentionne dans son intervention, mais ce n’est écrit nulle part dans son amendement –, la présence du collaborateur du sénateur-rapporteur, qui va l’aider, tant aux auditions qu’aux travaux de commission.
Cela me paraît raisonnable, mais je ne voudrais pas que nous nous engagions dans cette voie sans avoir mené un travail de concertation suffisant.
Comme vous le savez, mes chers collègues, nous avons créé, à la suite de la loi de 2017 pour la confiance dans la vie politique, plusieurs instances de dialogue social. Je me suis entretenu de ce sujet avec le président du Sénat, auteur de notre proposition de résolution, et ce dernier m’a autorisé à vous dire qu’il prenait l’engagement d’ouvrir une concertation sur les bases que je viens de définir et sur lesquelles il m’a donné son accord.
Cela nous permettrait d’avancer, mais dans le bon ordre, pour aboutir au résultat que notre collègue Roger Karoutchi et l’ensemble des cosignataires de cet amendement cherchent à atteindre.
C’est la raison pour laquelle, cher collègue et ami Roger Karoutchi, je me tourne vers vous et vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, fort de l’engagement que je prends devant vous, au nom du président du Sénat, d’ouvrir la concertation sur le sujet que vous avez abordé et pour lequel je suis davantage d’accord avec le propos que vous venez de tenir publiquement qu’avec le texte même de l’amendement. De mon point de vue, celui-ci ne reflète pas exactement ce que vous nous avez dit.
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Je comprends parfaitement que, surtout dans cette Haute Assemblée, tout ce qui doit être décidé le soit avec la lenteur nécessaire pour que l’on n’imagine pas être en train de se précipiter ! (Sourires. – Mme Élisabeth Doineau applaudit.)
Mais tout de même ! Ma collègue Catherine Procaccia indiquait ce matin, en réunion de groupe, que cela fait dix ans que cette proposition est discutée dans les réunions de l’Association pour la gestion des assistants de sénateurs, l’AGAS, et ailleurs.
M. Laurent Duplomb. Absolument !
M. Roger Karoutchi. Dix ans ! Franchement, dix ans pour qu’un collaborateur puisse prendre une chaise, s’installer derrière son sénateur, désigné rapporteur par la commission, et assister à la réunion : je suis certain qu’après un tel laps de temps on peut considérer la décision comme mature.
Pour ma part, si le président Philippe Bas en convenait – et je ne pense pas faire la révolution avec cette proposition –, je suggérerais que la commission, comme elle a tout loisir de le faire, sous-amende ma proposition. On pourrait retenir une rédaction telle que « le rapporteur peut être accompagné comme observateur, en sa présence uniquement, par l’un de ses collaborateurs ou par un collaborateur de son groupe politique d’appartenance, en accord avec le président de la commission ».
Plus personne ne pourrait alors penser que ce collaborateur assiste le sénateur, s’assoit à ses côtés ou intervient : il est témoin, muet du sérail, mais, au moins, il sait ce qui s’est dit sur le rapport concernant son sénateur.
Je fais toute confiance au président Larcher. Cela étant, faut-il, pour une disposition aussi simple que de permettre à un collaborateur d’être un simple observateur, débattre encore et encore ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – MM. André Gattolin et Jean-Yves Roux applaudissent également.)
J’ai bien étudié ce que sera l’instance de dialogue social, et je me réjouis de sa création. Mais celle-ci traitera surtout du statut et du fonctionnement des collaborateurs parlementaires, non de la possibilité qui leur serait offerte d’être présents en commission. Elle ne pourra en rien décider de cela ; là où ce point pourrait être statué, c’est éventuellement au niveau de l’instruction générale du bureau du Sénat, qui, dans son article IX bis, évoque la présence des collaborateurs de groupes – pas des collaborateurs de sénateurs – dans les réunions.
Franchement, monsieur le président-rapporteur, je ne pense pas que l’adoption d’un tel amendement, sous-amendé dans le sens que j’ai évoqué, puisse choquer qui que ce soit, ni le corps – remarquable – des administrateurs du Sénat, ni ceux qui œuvrent au fonctionnement des commissions, ni les présidents de commission. Et cela donnerait peut-être à nos collaborateurs parlementaires le sentiment que nous travaillons ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche. – Mme Michelle Meunier applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Bas, rapporteur. J’apprécie la démarche de notre collègue Roger Karoutchi. J’apprécie également qu’il ait mentionné l’instruction générale du bureau.
En effet, mon cher collègue, vous saisissez l’occasion que représente cette proposition de modification du règlement, dont nous avons abondamment répété qu’elle se faisait à droit constant, pour évoquer une règle relevant de l’instruction générale du bureau, dont vous avez cité l’article IX bis. La question des personnes habilitées à assister aux réunions des instances réglementaires du Sénat est bien traitée dans le cadre de cette instruction générale du bureau.
Néanmoins, je ne veux pas rejeter la main tendue. Je vais donc vous demander une interruption de séance, madame le président, afin que je puisse réunir la commission des lois pour débattre de la manière la plus opportune de régler ce problème. Je proposerai en outre à Roger Karoutchi, qui n’est pas membre de la commission, que nous ayons un échange avant la reprise de séance sur la décision retenue.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures cinquante-cinq.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Je suis saisie d’un amendement n° 40, présenté par M. Bas, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Après l’alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le Bureau du Sénat détermine les catégories de collaborateurs dont chaque président peut autoriser la présence en commission et lors des auditions des rapporteurs, ainsi que les obligations qui leur sont applicables. » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Bas, rapporteur. La commission, que je viens de réunir, a délibéré et propose un amendement, qui, je crois, permet d’atteindre les objectifs visés par l’amendement n° 10 rectifié ter, tout en respectant l’impératif de voir la règle figurer dans l’instruction générale du bureau, notre collègue Roger Karoutchi ayant lui-même souligné que la liste des personnes habilitées à assister à nos travaux est déterminée dans ce cadre.
Je me suis entretenu également avec le président du Sénat, auteur de cette proposition de résolution. Ce dernier, mes chers collègues, m’a autorisé à vous faire part de son engagement à mener à bien le travail que vous pourriez confier au Bureau en adoptant le présent amendement.
Celui-ci tend effectivement à prévoir que le Bureau détermine les catégories de collaborateurs, collaborateurs de groupes et assistants parlementaires, qui peuvent être autorisés par le président de chaque commission à être présents lors des travaux de cette dernière, qu’il s’agisse des auditions ou des travaux liés à la présentation du rapport.
Sont également évoquées les obligations de ces collaborateurs. Il a été utilement rappelé que nos assistants parlementaires sont assujettis à un devoir de discrétion ; le Bureau aura à examiner quelles obligations seront applicables aux collaborateurs participant aux réunions.
Cet amendement présente un autre avantage : il permet, si le Bureau le décide, que les collaborateurs d’auteurs de propositions de loi souhaitant participer aux auditions organisées par le rapporteur ou aux séances de commission puissent le faire. À cet égard, il est plus large que l’amendement n° 10 rectifié ter, cosigné par beaucoup d’entre vous.
Nous pouvons, je crois, atteindre le résultat recherché dans un délai rapide, fort de l’engagement du président du Sénat.
Le Bureau peut se mettre à la tâche très rapidement et entendre non seulement les présidents de groupe et les présidents de commission, comme cela se fait lorsqu’il s’agit de réviser le règlement du Sénat, mais aussi les représentants des différentes associations de nos collaborateurs ainsi que les représentants des administrateurs pour trouver le bon réglage.
Mes chers collègues, l’objectif n’est pas de procurer une satisfaction personnelle à nos collaborateurs. Il s’agit non pas de cela, mais de permettre à chacune et à chacun d’entre vous de vous faire accompagner dans les travaux qui vous tiennent à cœur par quelqu’un en qui vous avez une confiance personnelle, parce qu’il suit votre activité au quotidien.
Madame le président, dans la mesure où l’amendement que j’ai rédigé ne peut prendre la forme d’un sous-amendement, comme je l’aurais souhaité, je demande qu’il soit examiné en priorité.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’une demande de priorité de la commission portant sur l’amendement n° 40.
Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la priorité est de droit.
La priorité est ordonnée.
La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Par définition, le travail mené au Parlement, et il en est de même de l’élaboration de notre règlement intérieur, est fondé sur une seule notion : la confiance.
Si la confiance n’existe pas, il n’est pas possible de travailler. On peut ne pas être d’accord sur bien des sujets, on peut appartenir à différents groupes, mais, sans confiance, ce n’est même pas la peine de discuter et des textes de loi et du règlement.
Je le dis clairement : je vois bien ce que sous-tend la proposition du président-rapporteur et je goûte peu la demande de priorité qu’il a formulée sur son amendement. Peut-être eût-il mieux valu me demander d’abord ce que j’en pensais ; mais peu importe…
Certes, le dispositif de l’amendement de la commission constitue une avancée par rapport à l’existant. Néanmoins, par définition, s’il était adopté, il ne serait pas d’application immédiate, contrairement au mien, qui s’appliquerait tout de suite puisqu’il serait inscrit dans le règlement intérieur.
Je ne sais pas à quel moment le Bureau se réunira pour prendre une décision, ni dans quelles conditions. Ne va-t-on pas nous dire que mieux vaut d’abord mettre en place une structure de concertation et que l’on reporte tout d’un an ? Autant dire qu’un problème de confiance se pose.
Le président-rapporteur nous invite à choisir son amendement, selon lui plus large et mieux rédigé, en nous assurant que la question sera résolue dans des délais assez brefs. Si tout cela ne devait servir qu’à organiser un enterrement de première classe, je considérerais que la confiance que je fais au président de la commission des lois et au président du Sénat n’a plus lieu d’être. Je le dis de la manière la plus claire.
J’accepte de retirer mon amendement, à la seule condition que la confiance ne soit pas rompue.
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.
M. Bruno Retailleau. Bien évidemment, la confiance constitue le socle de nos travaux.
Mes chers collègues, nous sommes en train de délibérer pour modifier le règlement du Sénat, ce que nous avons toujours fait dans un esprit très consensuel, autour du président du Sénat, de l’ensemble des présidents de groupe et, la plupart du temps, des présidents de commission.
Or, sur ce point précis, nous ne l’avons pas fait. Je ne souhaite pas qu’il s’agisse d’un enterrement de première classe : pour en avoir discuté encore ce matin avec le président Gérard Larcher, nous considérons qu’un pas doit être fait en direction de nos assistants.
Toutefois, mes chers collègues, plusieurs catégories de coopérateurs nous assistent aujourd’hui dans nos travaux : on trouve d’abord, au sein de l’institution, les administrateurs, qui ont un statut et qui obéissent à un code de déontologie, avec des droits et des devoirs…
M. André Gattolin. Oui et non !
M. Bruno Retailleau. Monsieur Gattolin, j’espère tout de même que vous ne doutez pas de l’existence du code de déontologie des administrateurs du Sénat ?
M. André Gattolin. Pas du tout ! C’est même moi qui l’ai réclamé !
M. Bruno Retailleau. Viennent ensuite les collaborateurs de groupe, lesquels sont soumis à un certain nombre de règles.
Nous souhaitons, pour la plupart d’entre nous, que nos assistants parlementaires puissent prendre part à nos travaux. Très bien ! Mais je pense que cette possibilité s’accompagne d’un certain nombre de règles, dont il faut discuter, puisqu’ils seront amenés, par exemple – et c’est là que se trouve une différence entre l’exposé des motifs et la rédaction de l’amendement –, à assister aux délibérations, normalement secrètes, des commissions.
Je souhaite donc qu’un travail soit mené dans le cadre du Bureau, comme le propose la commission des lois. Il s’agit, cher Roger Karoutchi, non pas d’assister à un enterrement, mais de poser le jeu et d’impliquer aussi, au-delà du Bureau, l’ensemble des présidents de groupe et de commission.
Ce n’est qu’après ce travail de concertation que nous pourrons poser les règles d’une coopération accrue avec nos assistants, dont les nouveaux droits s’accompagneront aussi de nouveaux devoirs. Tout cela me paraît absolument naturel, raison pour laquelle je voterai le dispositif proposé par la commission des lois.