compte rendu intégral

Présidence de Mme Hélène Conway-Mouret

vice-présidente

Secrétaires :

Mme Mireille Jouve,

M. Victorin Lurel.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à onze heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Article 1er bis (nouveau) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation des mobilités
Article 2 (début)

Orientation des mobilités

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, modifié par lettre rectificative, d’orientation des mobilités (projet n° 157 rectifié, texte de la commission n° 369, rapport n° 368, tomes I et II, avis n° 347, rapport d’information n° 350).

La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre Ier, à l’article 2.

TITRE Ier (suite)

AMÉLIORER LA GOUVERNANCE EN MATIÈRE DE MOBILITÉS POUR MIEUX RÉPONDRE AUX BESOINS QUOTIDIENS DES CITOYENS, DES TERRITOIRES ET DES ENTREPRISES

Chapitre Ier (suite)

Organisation plus efficace des mobilités dans chaque partie du territoire

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi d'orientation des mobilités
Article 2 (interruption de la discussion)

Article 2

I. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L’intitulé de la section 8 du chapitre III du titre III du livre III de la deuxième partie est ainsi rédigé : « Versement destiné au financement des services de mobilité » ;

2° Au premier alinéa du I de l’article L. 2333-64, les mots : « transports en commun » sont remplacés par les mots : « services de mobilité » ;

3° L’article L. 2333-66 est ainsi rédigé :

« Art. L. 2333-66. – Le versement destiné au financement des services de mobilité est institué par délibération du conseil municipal ou de l’organe compétent de l’établissement public qui organise au moins un des services mentionnés au I de l’article L. 1231-1-1 du code des transports. La délibération énumère les services de mobilité, mis en place ou prévus, qui justifient le taux du versement. » ;

4° Le I de l’article L. 2333-67 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, la mention : « I. – » est supprimée ;

b) Au même premier alinéa, après le mot : « public », sont insérés les mots : « qui est l’autorité organisatrice de la mobilité au sens de l’article L. 1231-1 du code des transports, » ;

b bis) (nouveau) Au deuxième alinéa, après la référence : « L. 2333-65 », sont insérés les mots : « du présent code » ;

c) À la première phrase des troisième et cinquième alinéas ainsi qu’au quatorzième alinéa, les mots : « ou des transports urbains » sont supprimés ;

d) (Supprimé)

d bis) (nouveau) Après le quatorzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l’autorité organisatrice de la mobilité n’organise pas un service régulier de transport public de personnes, le taux de versement est fixé dans la limite de 0,3 % des salaires définis à l’article L. 2333-65. » ;

e) Aux première et dernière phrases du quinzième alinéa, les mots : « transports en commun » sont remplacés par les mots : « services de mobilité » ;

f) À la première phrase du dix-septième alinéa, les mots : « ou de transports urbains » sont supprimés ;

g) À la seconde phrase du troisième alinéa, à la deuxième phrase du cinquième alinéa et à la première phrase du quinzième alinéa, les mots « versement de transport » sont remplacés par les mots : « versement destiné au financement des mobilités » ;

5° L’article L. 2333-68 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « de l’agglomération » sont remplacés par les mots : « du territoire » ;

b) À la seconde phrase, les mots : « au financement des opérations visant à améliorer l’intermodalité transports en commun-vélo ainsi qu’ » sont supprimés et les références : « L. 1231-1, L. 1231-8 et L.1231-14 à L. 1231-16 » sont remplacées par les références : « L. 1231-1 et L. 1231-1-1 » ;

6° Au premier alinéa du II de l’article L. 2333-70 et au premier alinéa du II de l’article L. 2531-6, les mots : « versement transport » sont remplacés par les mots : « versement destiné au financement des services de mobilité » ;

7° À la première phrase de l’article L. 2333-65 et à l’article L. 2333-73, les mots : « versement de transport » sont remplacés par les mots : « versement destiné au financement des services de mobilité » ;

7° bis (nouveau) L’intitulé de la section 1 du chapitre unique du titre III du livre V de la deuxième partie est ainsi rédigé : « Versement destiné au financement des services de mobilité » ;

8° Au premier alinéa du I de l’article L. 2531-2, à la première phrase de l’article L. 2531-3 et à l’article L. 2531-9, les mots : « versement de transport » sont remplacés par les mots : « versement destiné au financement des services de mobilité » ;

9° À la fin du troisième alinéa de l’article L. 2531-5, les mots : « mentionnée à l’article 1er de l’ordonnance n° 59-151 du 7 janvier 1959 relative à l’organisation des transports de voyageurs en Île-de-France » sont remplacés par les mots : « applicable aux services mentionnés au 1° du I de l’article L. 1241-1 du code des transports » ;

10° À la fin du quatrième alinéa du même article L. 2531-5, les mots : « au sens des articles L. 1231-1, L. 1231-8 et L. 1231-14 à L. 1231-16 du code des transports » sont remplacés par les mots : « au sens de l’article L. 1241-1 du même code » ;

10° bis (nouveau) Au premier alinéa du II de l’article L. 2531-6, les mots : « versement transport » sont remplacés par les mots : « versement destiné au financement des services de mobilité » ;

11° L’article L. 5722-7 est ainsi modifié :

a) La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « Le syndicat mixte mentionné à l’article L. 1231-10 du code des transports peut prélever un versement destiné au financement des services de mobilité dans une aire urbaine d’au moins 50 000 habitants et dans les communes dites multipolarisées des grandes aires urbaines, au sens de l’Institut national de la statistique et des études économiques, dès lors que ce syndicat associe au moins la principale autorité compétente pour l’organisation de la mobilité. » ;

a bis) (nouveau) La seconde phrase du même premier alinéa est complétée par les mots : « du présent code » ;

b) À la seconde phrase du second alinéa, après le mot : « échéant, », sont insérés les mots : « porté à zéro ou » et, à la fin, les mots : « l’espace à dominante urbaine concerné par le prélèvement du syndicat » sont remplacés par les mots : « l’aire urbaine et les communes multipolarisées concernées par le prélèvement du syndicat » ;

c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le syndicat mixte mentionné à l’article L. 1231-10 du code des transports peut, en outre, par décision motivée, réduire ou porter à zéro le taux du versement, sur les périmètres des établissements publics de coopération intercommunale qui le composent, selon un critère qu’il détermine à partir de la densité de la population et du potentiel fiscal défini à l’article L. 2334-4 du présent code. La réduction du taux est en rapport avec l’écart constaté, sur ce critère, entre les différents périmètres des établissements composant le syndicat. » ;

12° L’article L. 5722-7-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa et à la première phrase des deuxième et troisième alinéas, les mots : « destiné au financement des transports » sont remplacés par les mots : « destiné au financement des services de mobilité » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les syndicats mixtes mentionnés aux articles L. 5711-1 et L. 5721-2 du présent code et compétents en matière de mobilité peuvent, par décision motivée, réduire ou porter à zéro le taux du versement, sur les périmètres des établissements publics de coopération intercommunale qui les composent, selon un critère qu’ils déterminent à partir de la densité de la population et du potentiel fiscal défini l’article L. 2334-4. La réduction du taux est en rapport avec l’écart constaté, sur ce critère, entre les différents périmètres d’établissement public composant le syndicat. »

II. – La première phrase du premier alinéa de l’article L. 5722-7 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant du a du 11° du I du présent article, ne s’applique aux syndicats mixtes mentionnés à l’article L. 1231-10 du code des transports existant à la date de publication de la présente loi qu’à compter du 1er janvier 2021.

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, sur l’article.

Mme Éliane Assassi. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le versement transport devient donc le versement mobilité : ce simple changement sémantique ne s’accompagnait initialement d’aucune autre évolution, puisque seules les autorités organisatrices de transport proposant déjà des transports collectifs pouvaient instituer le nouveau versement, avec des contours identiques à ceux du précédent.

L’adoption en commission d’un amendement de M. le rapporteur, assez proche de celui que nous proposions, ouvre la voie à la création d’un versement mobilité dans les zones où il n’existe pas de transports collectifs, ce qui permettra aux autorités organisatrices de disposer d’une manne financière au service de l’offre de transport qu’elles définissent : transports en commun, covoiturage, soutien au vélo, notamment.

Cette évolution est positive, mais à nos yeux insuffisante dans certains territoires, en particulier là où il existe déjà une offre de transports collectifs. En effet, faute de financements nouveaux, cet élargissement des compétences aux mobilités dites actives ou partagées pourra se traduire par une baisse du financement des transports collectifs, ce qui n’est pas acceptable.

Aussi avons-nous proposé un certain nombre de financements nouveaux.

Là où le transport collectif existe déjà, nous proposons de rehausser les plafonds et d’instaurer le versement mobilité dès le premier salarié, une proposition malheureusement déclarée irrecevable.

Pour l’Île-de-France, dont la spécificité n’est plus à démontrer, en termes tant d’infrastructures que de potentialités de financement, il est maintenant urgent d’augmenter les taux dans les territoires les plus riches, où les entreprises bénéficient de bonnes conditions de mobilité. Nous demandons cette évolution depuis longtemps, et l’arrivée du Grand Paris Express, avec l’accroissement de l’offre de transport, devrait la rendre plus facile. Malheureusement, là encore, notre amendement a été déclaré irrecevable.

Enfin, nous proposons l’instauration au niveau régional d’un versement transport permettant de répondre aux enjeux de maintien de l’offre de TER, donc de lignes de vie, de mobilité du quotidien, comme vous aimez les appeler, madame la ministre.

Sans oublier notre proposition, réitérée, de ramener la TVA sur les transports au niveau de celle sur les produits de première nécessité.

On nous a opposé en commission que les régions n’étaient pas demandeuses. Cela n’a pas toujours été le cas : des régions, lorsqu’elles n’étaient pas gouvernées par la droite, ont exprimé le souhait qu’un versement transport régional soit instauré.

Au demeurant, mes chers collègues, les législateurs que nous sommes ne doivent pas s’interdire d’avoir des idées innovantes. Les marges de manœuvre sont déjà suffisamment restreintes, donc n’en rajoutons pas en la matière… En tout cas, ce n’est pas ma conception, ni celle de mon groupe, du débat démocratique dans un État de droit ! (Mme Michelle Gréaume opine.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de présenter quelques observations au moment où nous entamons l’examen de l’article 2.

Cet article sanctuarise le versement transport, qui devient un versement mobilité, comme ressource fiscale des autorités organisatrices de la mobilité, bénéficiant à l’ensemble des compétences de celles-ci. Je voudrais, à cet égard, insister sur quelques éléments de contexte.

Le versement transport a augmenté de 50 % en dix ans : en d’autres termes, le prélèvement sur les entreprises est passé de 6 à 9 milliards d’euros. Dans le même temps, la part payée par les usagers a baissé de 1 % par an.

Les augmentations régulières des taux, le manque de dialogue avec les employeurs sur l’utilisation du versement transport, notamment sur la prise en compte des besoins des entreprises, et l’instauration de la gratuité décidée par certaines collectivités territoriales sans concertation avec les entreprises fragilisent l’acceptabilité de cet impôt.

Je suis convaincue que, pour préserver cette ressource, il faut être à la fois exigeant et raisonnable.

Il faut être exigeant, notamment, en matière de transparence et d’utilisation de cet impôt. Le projet de loi introduit plusieurs dispositions en ce sens. En particulier, toute instauration ou modification du taux du versement transport sera soumise à l’avis d’un comité des partenaires : prévu à l’article 4, ce comité associera les employeurs sur chaque territoire. Toute instauration devra également être accompagnée de la liste des services justifiant le taux.

Il convient également d’être raisonnable. À cet égard, plusieurs amendements déposés en vue de la séance visent à revoir à la hausse le taux plafond du versement mobilité ou à élargir l’assiette de celui-ci. Le Gouvernement est défavorable à ces mesures, qui se traduiraient par une pression fiscale accrue sur les employeurs. Il me paraît important de maintenir un équilibre entre les différentes sources de financement des transports en France, dont les usagers et les collectivités territoriales.

La commission a introduit un versement mobilité réduit à 0,3 % pour les autorités organisatrices qui n’organisent pas de services de transport réguliers. Elle a prévu également un mécanisme de solidarité, via la TICPE – la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques –, pour les territoires dont le versement mobilité aurait un rendement trop faible.

Clairement, la question des moyens est essentielle. Il est normal, bien sûr, d’être attentif à l’existence de ressources pour les collectivités territoriales. Toujours est-il que le versement mobilité, outre les évolutions que je viens de rappeler, est un impôt complexe, pour les entreprises comme pour les autorités organisatrices, qui ne comprennent pas toujours les montants qu’elles reçoivent. Cette complexité interroge sur l’opportunité d’activer cet impôt avec un taux réduit : est-ce la meilleure option ?

C’est pourquoi une réflexion est engagée sur les mesures qui permettraient de dégager les mêmes ressources avec des modalités de perception plus simples. Cette réflexion doit nécessairement s’articuler avec les réflexions en cours sur la fiscalité locale, à la suite de la suppression de la taxe d’habitation.

Dans le cadre de cette réflexion sur la fiscalité locale, je serai attentive à ce qu’une réponse soit apportée s’agissant d’une mesure de solidarité en faveur des collectivités territoriales dont le potentiel fiscal est trop faible.

Au début de l’examen de cet article, je renouvelle l’engagement du Gouvernement à donner aux autorités organisatrices de la mobilité les moyens de développer des services dans chaque territoire : c’est une condition et un objectif que je partage avec vous. Mais, en attendant la fin des réflexions en cours, je proposerai la suppression des deux mesures de financement introduites par la commission.

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb, sur l’article.

M. Laurent Duplomb. Avec tout ce que l’on vit depuis des semaines et ce que l’on voit au niveau de l’économie française, je ne comprends pas qu’on puisse continuer à vouloir sans cesse augmenter les taxes sur les entreprises. C’est une vue de l’esprit qu’il faut abandonner !

Nos entreprises sont de moins en moins compétitives, parce que, avec les normes et les réglementations, on leur met sans arrêt des boulets aux pieds. Elles sont de moins en moins compétitives, parce qu’on augmente sans cesse les taxes et les impôts. Résultat : la balance commerciale française est en déficit de près de 70 milliards d’euros, quand celle de l’Allemagne présente un excédent de 170 milliards d’euros…

Et on continuerait à en rajouter sans cesse, sans chercher à savoir comment on peut préserver nos entreprises, et donc l’emploi ? Pour ma part, je voterai contre tous les amendements visant à augmenter les taxes ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. L’amendement n° 684 rectifié bis, présenté par M. P. Dominati, Mmes Boulay-Espéronnier et Chain-Larché, MM. Cuypers et Daubresse, Mmes Deromedi et Garriaud-Maylam, MM. Husson, Laménie, H. Leroy et Magras, Mme Micouleau, M. Panunzi, Mme Puissat et M. Reichardt, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 3

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Le même I est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les employeurs qui ont conclu un accord de télétravail sont exonérés de 50 % du montant du versement transport pour les employés concernés par l’exercice de leur activité professionnelle à distance, dans des conditions fixées par voie réglementaire. » ;

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

…. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Je partage les propos de notre éminent collègue Laurent Duplomb sur l’augmentation des taxes, mais je reviendrai sur le mode de financement des transports un peu plus tard.

Le présent amendement tend à favoriser le développement du télétravail et de la numérisation – bref, le travail à domicile. Il faut promouvoir cette possibilité, qui se développe dans un grand nombre de pays.

Évidemment, les entreprises qui pratiquent ce mode de travail ne doivent pas être pénalisées par le versement transport et les taxes qui alourdissent les charges des entreprises. Nous proposons donc de donner un avantage fiscal aux entreprises développant le télétravail, en les exonérant d’une partie de la taxe sur le versement transport.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1022 rectifié, présenté par Mme Lavarde, MM. Guerriau et Regnard, Mme Berthet, M. Bascher, Mme Noël, MM. Chaize, Henno, Rapin, Bonhomme, Gremillet, Mouiller, Karoutchi, Lefèvre, Savary et Chasseing et Mme Gruny, est ainsi libellé :

I. – Amendement 684, alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les employeurs qui ont conclu un accord de télétravail sont exonérés du montant du versement transport pour les employés concernés par cet accord à due concurrence de la part du volume horaire effectué à distance. » ;

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet amendement par deux paragraphes ainsi rédigés :

…. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales de l’alinéa 4 est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

…. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Christine Lavarde.

Mme Christine Lavarde. En plein accord avec la philosophie de l’amendement de M. Dominati, ce sous-amendement vise à corriger ce qui aurait pu être un effet d’aubaine pour les entreprises.

L’amendement tend à instaurer une réduction de 50 % du versement transport pour les entreprises ayant mis en place un accord de télétravail. Or la proportion du travail effectué à distance peut être bien inférieure à 50 %. En effet, un salarié peut pratiquer le télétravail uniquement une journée par mois.

Avec le dispositif que nous proposons, la réduction accordée aux entreprises serait équivalente à la part du travail accompli par les salariés depuis leur domicile.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Mandelli, rapporteur de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. La proposition de Philippe Dominati est intéressante, même si ses modalités de mise en œuvre devront être complétées pour qu’elle soit pleinement applicable et contrôlable. Le sous-amendement répond en partie à ce besoin s’agissant de la part de la masse salariale concernée par le télétravail.

Renforcer le lien entre télétravail et mobilité est un enjeu majeur pour le traitement des questions de déplacement quotidien, notamment pour lutter contre la congestion et réduire le temps passé par les salariés dans les transports, en particulier dans les territoires denses.

Une vraie dynamique en faveur du télétravail doit être soutenue. La commission est donc favorable à l’adoption de cet amendement, qui incitera les employeurs à s’engager dans cette révolution sociétale. La suite de la navette parlementaire permettra bien sûr d’affiner le dispositif.

Le sous-amendement vise à préciser que cette exonération est accordée à concurrence de la part du volume horaire effectué à distance. C’est un complément intéressant, qui permettra de mieux lier à la part de télétravail le niveau de l’exonération du versement mobilité. Le sous-amendement n’a pas été examiné par la commission, mais, à titre personnel, j’émets un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Je suis tout à fait favorable au développement du télétravail : comme vous le savez, les ordonnances prises au début de ce quinquennat visent justement à encourager cette forme de travail.

Pour autant, la corrélation proposée entre le télétravail et le versement mobilité ne me paraît pas adaptée. D’une part, comme il a été souligné, les salariés qui font du télétravail de façon ponctuelle doivent bien se rendre sur leur lieu de travail régulièrement. D’autre part, la proratisation proposée du versement transport en fonction du temps passé en télétravail ne ferait qu’ajouter à la complexité déjà extrême du calcul de ce versement.

L’avis est donc défavorable sur le sous-amendement et l’amendement.

Oui, il faut être vigilant pour ne pas créer de nouvelles taxes ; mais il faut l’être aussi pour ne pas créer des usines à gaz administratives, dont nos entreprises souffrent déjà !

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. Je comprends bien la logique de l’amendement et du sous-amendement, mais je suis très dubitatif sur le résultat qu’aurait leur adoption, qui risque de laisser entier le problème du financement des mobilités. J’ai peur qu’on affaiblisse le montant consacré au déploiement des investissements. Il faut encourager le télétravail, mais est-ce le bon dispositif ? Personnellement, je ne le soutiendrai pas.

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour explication de vote.

M. Frédéric Marchand. Si la question du télétravail est en effet importante, pour la qualité de vie de celles et ceux qui en usent comme pour la décongestion, et si la mesure proposée par les auteurs de l’amendement est intéressante, je pense qu’on oublie une donnée essentielle : la concertation et la négociation. Avant toute chose, il me paraît capital de pousser plus loin la réflexion sur le dispositif, dans la concertation avec les acteurs concernés. À ce stade, donc, nous voterons contre l’amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. De notre part, le dispositif proposé appelle plus que des interrogations…

Il faudrait que ses défenseurs nous fassent la démonstration que le télétravail est un coût supplémentaire pour les entreprises. Dès lors qu’on propose une exonération, il faut prouver qu’il y a un coût supplémentaire ! Je le dis aussi à Mme la ministre, qui a parlé de souffrance des entreprises ; de la souffrance dans les entreprises, des difficultés, il y en a, incontestablement.

Par ailleurs, si le télétravail facilite en effet la vie, monsieur Marchand, c’est parce que le législateur a fait son travail, en décidant que ce serait un droit pour les salariés, qui ferait l’objet d’une négociation entre le salarié et l’employeur.

Cette question mérite vraiment qu’on l’instruise, qu’on la décortique en quelque sorte, pour savoir précisément ce que nous allons voter.

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

M. Jérôme Bascher. Je n’ai pas cosigné l’amendement de notre excellent collègue Philippe Dominati, mais je trouve que, modifié par le sous-amendement, il sera positif – et tout à fait conforme à son esprit originel.

À un moment, il faudra savoir à quoi sert le versement transport. Le versement transport, au point de départ, sert à transporter les salariés qui ont besoin des transports en commun pour se rendre au travail.

Si l’on ne se rend plus à son travail, parce qu’on travaille depuis chez soi, il paraît assez logique que la fiscalité pesant sur les entreprises soit légèrement allégée.

C’est peut-être complexe, madame la ministre ; votre argument à cet égard est tout à fait audible. Simplement, il faut aussi préparer l’avenir. Je vois cet amendement comme un amendement d’appel à inciter davantage au développement du télétravail. Je ne sais pas ce qu’il adviendra de ce dispositif, mais je voterai le sous-amendement et l’amendement.