M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour répondre à M. le secrétaire d’État.

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le secrétaire d’État, vous parlez d’une nouvelle circulaire : pourquoi ne pas abroger l’ancienne ?

Par ailleurs, vous dites : nous aurons le temps. Mais savez-vous combien de temps il faut pour obtenir une pièce d’identité ? En région parisienne, parfois un mois, voire un mois et demi !

Pour ce qui est des personnes âgées, vous ne m’avez pas répondu, si bien que je m’interroge : ces dispositions prises sans que l’on sache pourquoi ne sont-elles pas destinées à « éliminer » un certain nombre de personnes âgées, très mécontentes des décisions du Gouvernement, notamment au sujet de la CSG ? (M. le secrétaire dÉtat sexclame.)

En matière d’information, des villes, comme Saint-Maur-des-Fossés, diffusent déjà des renseignements pratiques.

Vous parlez de vingt ans, mais, dans la circulaire, il est question de cinq ans : la confusion est totale… Quant à laisser le président du bureau de vote décider si la photographie représente bien l’électeur ou non, c’est discriminatoire : ce sera le droit de vote à la tête du client !

enlèvement des épaves en l’absence de fourrière

M. le président. La parole est à M. Alain Cazabonne, auteur de la question n° 600, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

M. Alain Cazabonne. Monsieur le secrétaire d’État, ma question vient du désarroi qu’éprouvent, en Gironde, les maires de centaines de villes semi-rurales devant des véhicules qui devraient être éliminés : en l’absence de fourrière, ces maires font face à de grandes difficultés administratives et réglementaires.

En particulier, ils ne peuvent pas obtenir l’accord du propriétaire ni la carte grise, pourtant nécessaires pour détruire le véhicule.

Que doivent-ils faire, et sur quoi peuvent-ils s’appuyer pour éliminer ces véhicules, qui non seulement occupent de la place, mais peuvent également être dangereux ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Gabriel Attal, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Alain Cazabonne, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur, qui m’a chargé de vous répondre.

En matière de véhicules abandonnés, le maire peut rencontrer trois cas de figure.

S’agissant d’abord des véhicules en voie d’épavisation, s’ils sont privés d’éléments indispensables à leur utilisation normale et ne peuvent être immédiatement réparés, ils peuvent être mis en fourrière et livrés à la destruction à la demande du maire ou de l’officier de police judiciaire territorialement compétent. Si la commune ne dispose pas de fourrière, ces véhicules terminent dans une fourrière gérée par l’État. Si le propriétaire du véhicule est connu, il doit rembourser les frais d’enlèvement, ainsi que les frais de garde en fourrière ; s’il est inconnu, ces frais incombent à l’autorité de fourrière.

Il y a ensuite le cas des épaves : lorsqu’il est constaté qu’un véhicule stocké sur la voie ou le domaine public semble privé des éléments indispensables à son utilisation normale et ne peut être immédiatement réparé, le maire enjoint le titulaire du certificat d’immatriculation de ce véhicule de le remettre en état de circuler ou de le transférer dans un centre de véhicules hors d’usage agréé, dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours, sauf en cas d’urgence.

Si la personne ne respecte pas le délai imparti, le maire a recours à un expert en automobile pour déterminer, aux frais du titulaire du certificat d’immatriculation lorsqu’il est connu, si le véhicule est techniquement réparable : si c’est le cas, le maire procède à la mise en fourrière du véhicule ; dans le cas contraire, il procède à l’évacuation d’office du véhicule vers un centre de véhicules hors d’usage agréé, aux frais du titulaire du certificat d’immatriculation.

Enfin, certains véhicules peuvent constituer des déchets au sens de l’article L. 541-1-1 du code de l’environnement. Face à cette situation, le maire peut mettre en demeure le dernier propriétaire connu de prendre les mesures nécessaires pour que l’épave soit retirée.

À l’issue d’un délai d’un mois, si l’épave n’a pas été enlevée, le maire peut faire procéder d’office à l’enlèvement du véhicule et à son transfert dans un centre de véhicules hors d’usage agréé. Cette opération est toutefois réalisée aux frais de la commune, en l’absence de propriétaire connu.

Telles sont, monsieur le sénateur, les précisions que le ministre de l’intérieur m’a demandé de vous communiquer.

M. le président. La parole est à M. Alain Cazabonne, pour répondre à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Cazabonne. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, pour cette réponse extrêmement détaillée – et néanmoins brève, ce qui nous fait gagner un peu de temps, monsieur le président !

M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, mon cher collègue, je vous en sais gré !

sécurisation des établissements scolaires

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, auteure de la question n° 631, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous interroger sur l’avenir du fonds interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation, le FIPDR.

L’article 5 de la loi du 5 mars 2007 a créé ce fonds afin de « financer la réalisation d’actions dans le cadre des plans de prévention de la délinquance et dans le cadre de la contractualisation mise en œuvre entre l’État et les collectivités territoriales en matière de politique de la ville ».

Dans les faits, une partie substantielle de ce fonds a été consacrée à la sécurisation d’établissements scolaires, ne relevant souvent pas de la politique de la ville.

C’est la circulaire commune des ministres de l’éducation nationale et de l’intérieur du 29 septembre 2016, complétée par l’instruction du 5 avril 2017 et prolongée en 2018, qui a mis en place l’utilisation d’une partie du FIPDR pour financer la sécurisation des écoles. Les demandes de financement ont été arbitrées par les préfets de région, dans le cadre d’une enveloppe régionale de crédits dédiée.

Ainsi, les collectivités territoriales, associations, sociétés ou organismes propriétaires d’établissements scolaires publics ou d’établissements privés sous contrat ont pu se voir attribuer une aide au financement de la sécurisation périmétrique des bâtiments – vidéoprotection, portail, barrière, clôture, notamment – ou de la sécurisation volumétrique de ceux-ci, à hauteur de 20 % à 80 % du montant des opérations réalisées.

De tels investissements s’appuient directement sur le plan particulier de mise en sécurité des écoles concernées ou sur le diagnostic de sûreté dressé par les référents ad hoc de la police ou de la gendarmerie.

En 2018, ce volet du fonds interministériel a été rapidement épuisé, tant et si bien qu’un très grand nombre de communes candidates n’a pu se voir attribuer une telle subvention. Aujourd’hui, certains services de l’État proposent aux maires de monter des dossiers pour 2019, en attendant la circulaire nationale du ministre de l’intérieur.

Monsieur le secrétaire d’État, cette circulaire est-elle en préparation ? Quel montant de crédits allez-vous y consacrer ? Allez-vous compenser la sous-évaluation de l’enveloppe 2018 et ainsi répondre aux demandes plus que légitimes des communes ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Gabriel Attal, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Nathalie Delattre, je vous sais particulièrement mobilisée sur les questions scolaires ; vous étiez d’ailleurs au côté de Jean-Michel Blanquer dans votre département vendredi dernier.

En 2016, dans un contexte de menace terroriste, le ministre de l’intérieur et la ministre de l’éducation nationale d’alors ont décidé de mobiliser un abondement exceptionnel de 50 millions d’euros sur le fonds interministériel de prévention de la délinquance pour la sécurisation des écoles et des établissements scolaires.

Dans ce cadre, 10 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 3 millions d’euros de crédits de paiement ont été ouverts par la loi de finances rectificative du 29 décembre 2016, sous la forme d’un report sur la gestion 2017. La loi de finances initiale pour 2017 a ouvert 25 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 15 millions d’euros de crédits de paiement. Dans le cadre de la programmation initiale pour 2018, 6,9 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 10,8 millions d’euros de crédits de paiement ont été prévus.

Depuis 2016, ce sont ainsi 38,02 millions d’euros qui ont été engagés, et 32,22 millions d’euros effectivement payés. Cet effort exceptionnel a permis de financer 6 504 établissements : l’ensemble des départements métropolitains ont été concernés, à l’exception des Hautes-Alpes et du Loiret ; outre-mer, 88 établissements ont été aidés, en Guadeloupe, à la Martinique et à La Réunion.

Sur ces 6 504 établissements, 5 728 sont publics – 5 283 écoles maternelles et primaires, 402 collèges et 43 lycées – et 776 sont des écoles privées, dont 742 écoles catholiques, 26 écoles juives et 8 écoles musulmanes.

Madame la sénatrice, le ministre de l’intérieur m’a chargé de vous annoncer qu’un effort particulier était prévu cette année : le montant de la dotation sera porté à 12 millions d’euros, ce qui permettra de clore l’engagement annoncé à l’été 2016.

Nous restons particulièrement mobilisés sur cet enjeu majeur. Ainsi, un plan interministériel de lutte contre les violences scolaires, comportant un versant sur la sécurisation des établissements, sera prochainement présenté par les ministres, dans le sillage des annonces faites en décembre dernier par Jean-Michel Blanquer.

nombre record de cambriolages en 2017

M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, auteure de la question n° 560, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

Mme Catherine Dumas. Monsieur le secrétaire d’État, lorsque j’ai déposé, à la fin de l’année dernière, cette question orale destinée à interpeller le Gouvernement sur les chiffres de la délinquance à Paris, nous ne savions pas que ceux-ci seraient aggravés par le spectacle affligeant et regrettable auquel nous assistons chaque samedi dans la capitale – je pense notamment à ce qui s’est produit le week-end dernier sur les Champs-Élysées. Nous reviendrons sur cette actualité cet après-midi, lors des auditions des ministres de l’intérieur et de l’économie, convoqués par notre assemblée.

Ce matin, je me concentrerai sur les inquiétudes nées du bilan annuel de l’enquête dite de victimisation de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, qui fait apparaître une très forte remontée des cambriolages.

Selon les dernières statistiques de la délinquance en France, 569 000 ménages victimes d’un cambriolage ou d’une tentative de cambriolage ont été recensés en 2017. Il s’agit d’un pic inédit et d’une augmentation importante, de 21 %, par rapport à l’année précédente, qui avait déjà vu 470 000 cambriolages et tentatives. Plus de 2 % des ménages français ont été concernés par cette problématique en 2017 ! Fort heureusement, le taux d’échec est resté stable, à 49 %.

J’observe que la région parisienne et les grandes villes de plus de 100 000 habitants, comme Paris, sont davantage concernées, et que les mois d’été et le mois de décembre, lors desquels les personnes s’absentent de leur domicile, sont les plus touchés. Il faut remarquer aussi que, dans un tiers des cas, une personne était présente au domicile lors de l’effraction.

Quelle interprétation le ministre de l’intérieur fait-il de cette situation inquiétante, et quelles mesures pourrait-on mettre en place pour y remédier, notamment à Paris ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Gabriel Attal, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Catherine Dumas, la lutte contre les cambriolages est l’une des priorités de la préfecture de police et de la direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne.

En la matière, commençons par nous réjouir collectivement des bonnes nouvelles. Le bilan pour 2017 sur l’agglomération parisienne fait apparaître une augmentation de 18 % du nombre de faits élucidés : grâce au travail exceptionnel des services de la préfecture de police de Paris, 600 cambriolages de plus ont été élucidés en 2017 par rapport à l’année précédente.

Il faut évidemment poursuivre et intensifier ces efforts. Je pense aux outils cartographiques, qui permettent un déploiement intelligent des patrouilles de voie publique et des brigades anticriminalité : grâce à ces outils, le volume des mises en cause pour faits de cambriolages a augmenté de 32 % depuis janvier 2018.

Le taux de déplacement de la police technique et scientifique sur les lieux de cambriolage afin de relever les traces et indices augmente également.

Les services de la préfecture de police analysent et centralisent les informations recueillies sur les lieux de cambriolage pour permettre aux enquêteurs d’imputer des faits et de diffuser des signalements.

La préfecture de police mène aussi des actions de prévention en direction des professionnels et des particuliers. Dans ce cadre, elle met à la disposition des commerçants, des entreprises et des professions libérales un service d’information et de conseil. Des policiers spécialisés prodiguent régulièrement des conseils personnalisés, doublés parfois d’une visite du bien immobilier du professionnel ou du bailleur qui en fait la demande.

Dans le cadre de l’opération Tranquillité vacances, les forces de police réalisent des visites régulières de domiciles de particuliers et de commerces dont les occupants sont temporairement absents. Les services de prévention des directions territoriales de sécurité de proximité suivent avec attention l’activité des dispositifs de participation citoyenne, qu’il faut saluer.

Enfin, des supports de communication sont diffusés par la préfecture de police en vue d’informer sur la manière d’agir pour protéger ses biens de valeur du risque de cambriolage en cas d’absence de son domicile ou de son commerce.

Les résultats encourageants sur l’élucidation des cambriolages et, en 2018, sur le nombre de mises en cause nous incitent à poursuivre et à intensifier notre action dans les directions que je viens de présenter.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, pour répondre à M. le secrétaire d’État.

Mme Catherine Dumas. Merci, monsieur le secrétaire d’État, de votre réponse. Je me félicite, bien sûr, des résultats en matière d’élucidation et des actions menées sur le plan de la prévention. Je vous rappelle toutefois que, l’année dernière, ce sont 12 000 logements parisiens qui ont été visités, soit 1 700 de plus qu’en 2017 : c’est comme si l’ensemble du parc immobilier du premier arrondissement avait été cambriolé en un an… Cela fait encore beaucoup !

M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

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Salut à une délégation parlementaire

M. le président. Madame la ministre chargée des transports, mes chers collègues, j’ai le plaisir et l’honneur de saluer la présence dans notre tribune officielle d’une délégation du Bundesrat, conduite par son président, M. Daniel Günther, ministre-président du Schleswig-Holstein. Il est accompagné de ministres-présidents et de membres du Bundesrat, notamment du président de la commission des questions de l’Union européenne.

Cette visite est pour moi l’occasion de manifester l’attachement du Sénat à l’amitié franco-allemande et à son rôle irremplaçable au sein de l’Union européenne. Cette amitié, qui a été forgée après des siècles d’affrontements, a été scellée par le traité de l’Élysée, signé en 1963 – nous avons en mémoire cette page de l’histoire – entre le général de Gaulle et le Chancelier Adenauer, et réaffirmée, le 22 janvier dernier, par le traité d’Aix-la-Chapelle, signé par la Chancelière Angela Merkel et le Président de la République française Emmanuel Macron.

C’est grâce à la solidité du couple franco-allemand que nous avons réussi à construire une Europe qui symbolise la paix et la prospérité et à surmonter les crises. Nous ne devons pas l’oublier ! Aujourd’hui, face aux nombreux défis auxquels l’Europe est confrontée, la France et l’Allemagne doivent, plus que jamais, se montrer unies et raisonner en termes de communautés de destin.

Comme en témoigne votre visite, le Sénat et le Bundesrat sont des acteurs engagés de cette relation. Je tiens d’ailleurs à saluer l’action de nos deux présidents de groupes d’amitié, Mme Catherine Troendlé et M. Tobias Hans, ainsi que les membres des deux groupes d’amitié, qui ne cessent de conforter l’amitié franco-allemande.

Aujourd’hui, nous avons signé une déclaration commune, élaborée sur la base des travaux conduits par les présidents des commissions des affaires européennes de nos deux assemblées, nos collègues Guido Wolf et Jean Bizet, que je tiens à remercier. Cette déclaration commune traduit notre volonté de renforcer la coopération et les échanges entre le Sénat et le Bundesrat et de contribuer ainsi au nouvel élan qui doit être donné à la relation franco-allemande.

Malgré les différences existant entre le bicamérisme en Allemagne et en France, notamment en matière législative ou de contrôle de l’exécutif – sur cette question, nous ne renonçons naturellement à rien ! –, nos deux assemblées partagent en effet un intérêt commun pour les questions européennes, pour la coopération décentralisée et transfrontalière et pour la subsidiarité, ce principe souvent méconnu dans notre pays, qui est pourtant gage de démocratie, de proximité et d’efficacité.

Alors que l’Europe est trop souvent perçue comme éloignée des citoyens, j’ai la conviction que les parlements nationaux, et les chambres hautes en particulier, ont un rôle essentiel à jouer, notamment en tant que gardiens de la subsidiarité et pour lancer des initiatives communes, afin de rapprocher l’Europe des citoyens.

Nous nous retrouverons du 13 au 15 juin à Paris, puisque nous recevrons ensemble les présidents des secondes chambres membres de l’Association des Sénats d’Europe. Nous rencontrerons à cette occasion les présidents de plusieurs Sénats du continent africain afin de dialoguer ensemble et d’apporter des réponses communes aux défis du développement, du climat, des migrations et de la paix.

Je formule le vœu, monsieur le président, que votre visite contribue au renforcement de nos relations d’amitié.

Le général de Gaulle déclarait : « L’avenir de nos deux pays, la base sur laquelle peut et doit se construire l’union de l’Europe, le plus solide atout de la liberté du monde, c’est l’estime, la confiance, l’amitié mutuelles du peuple français et du peuple allemand. »

Monsieur le président, mes chers collègues, depuis l’hémicycle du Sénat, je dis : vive le Bundesrat ! (Mmes et MM. les sénateurs ainsi que Mme la ministre chargée des transports se lèvent et applaudissent longuement.)

Je constate que la longueur des applaudissements témoigne de cette amitié.

Je vais maintenant céder mon fauteuil à Mme Létard, qui va présider nos travaux sur le projet de loi d’orientation des mobilités, une question que nous avons abordée ce matin, madame la ministre, pour ce qui concerne la France et l’Allemagne. Je viendrai vous écouter dès que j’aurai reconduit le président du Bundesrat.

(Mme Valérie Létard remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard

vice-présidente

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Célébration de la francophonie

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous célébrons tout au long de cette semaine la francophonie, dont la Journée internationale se tiendra demain.

Le drapeau de la francophonie et celui de l’Assemblée parlementaire de la francophonie que vous voyez dans notre hémicycle participent de cette célébration à laquelle s’associent les autres parlements des pays de la grande famille francophone.

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Dossier législatif : projet de loi d'orientation des mobilités
Discussion générale (suite)

Orientation des mobilités

Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi d'orientation des mobilités
Question préalable

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, modifié par lettre rectificative, d’orientation des mobilités (projet n° 157 rectifié, texte de la commission n° 369, rapport n° 368, tomes I et II, avis n° 347, rapport d’information n° 350).

La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Madame la présidente, monsieur le président de la commission, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, il y a un an, je présentais le projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire. Cette réforme répondait à une ambition forte : remettre sur pied notre système ferroviaire et lui donner les moyens de jouer pleinement son rôle de colonne vertébrale de nos transports. C’était une étape essentielle dans la refonte de notre politique de mobilité voulue par le Président de la République et le Premier ministre ; je me souviens que le Sénat avait été au rendez-vous.

Trente ans après la LOTI, le projet de loi d’orientation des mobilités que j’ai l’honneur de présenter devant la Haute Assemblée est une deuxième étape.

Les exigences de cette refondation n’ont pas changé : exigence d’efficacité, d’abord, pour remettre en état notre système de transport aujourd’hui menacé par des décennies de sous-investissement ; exigence de justice sociale et territoriale, ensuite, afin qu’aucun de nos concitoyens, dans aucun de nos territoires, ne soit entravé dans sa mobilité et assigné à résidence ; exigence environnementale, enfin, avec la ferme volonté d’accélérer notre transition vers une mobilité plus durable, plus sobre et plus propre.

Au terme du grand débat national, cette triple exigence résonne aujourd’hui avec une particulière acuité.

Sur les ronds-points, dans les cahiers de doléances, au cours des réunions d’initiatives locales ou au travers des contributions se sont exprimées des colères, des attentes, des propositions. Ce sont celles auxquelles font face les élus locaux depuis des années. Ce sont celles que j’ai entendues dans le cadre du grand débat en Côte-d’Or, dans le Tarn, dans le Morbihan ou ailleurs, et je les partage. Ce sont celles d’une France à deux vitesses : d’une France qui a offert toujours plus de vitesse aux uns et la galère de trains trop lents, trop bondés ou trop rares aux d’autres ; d’une France où il faut presque autant de temps pour rejoindre Bordeaux depuis Massas à seulement quarante kilomètres que depuis Paris par le TGV ; d’une France dans laquelle l’absence d’alternative à la voiture individuelle enferme celles et ceux qui sont trop jeunes, trop âgés ou qui n’ont tout simplement pas ou plus les moyens d’avoir une voiture.

La crise des « gilets jaunes » a rappelé sans détour ce diagnostic, reflet des fractures sociales et territoriales qui minent notre pays depuis des décennies.

Le projet de loi que je vous propose entend être une réponse structurelle à ces fractures. Il est le fruit d’un dialogue exigeant, constructif et sincère depuis bientôt deux ans avec les collectivités, les associations et les entreprises pour apporter des solutions concrètes et efficaces à chacun de nos concitoyens. Ce dialogue, engagé à l’occasion des Assises nationales de la mobilité, n’a eu de cesse de se poursuivre à chaque étape de la construction du texte.

Au-delà de la méthode, qui me semble la bonne, ce dialogue était indispensable, car, en matière de mobilité, ce n’est pas l’État seul, et encore moins depuis Paris, qui est l’échelon compétent ou le plus pertinent.

Ce n’est pas l’État qui conçoit des solutions avec des véhicules en libre-service à Charleville-Mézières et ses alentours, c’est Ardenne Métropole.

Ce n’est pas l’État qui s’assure que les offres de mobilité à l’échelle de la Bretagne sont bien coordonnées, c’est la région.

Ce n’est pas l’État qui propose la meilleure solution aux salariés d’une zone d’activité en Cœur de Beauce, c’est la communauté de communes en liaison avec les employeurs.

C’est l’une des attentes qui s’est exprimée avec force dans le cadre du grand débat, à savoir plus de proximité dans les décisions et l’action publiques. Ce n’est pas pour autant moins d’État qui nous est demandé et que je vous propose, car son rôle est fondamental dans cette nouvelle architecture. Il revient à l’État de fixer un cap clair ; à l’État de donner les outils et les moyens pour apporter les meilleures réponses au meilleur niveau ; à l’État de lever les freins pour libérer l’innovation ; à l’État de rendre crédibles ses engagements.

C’est dans cette logique que s’inscrit le projet de loi que je vous propose. Dans ce contexte, la première mission du législateur est de veiller à ce qu’il y ait à chaque niveau un interlocuteur identifié.

Aujourd’hui, il existe des « zones blanches » de la mobilité. Cette faille structurelle a des conséquences très directes pour nos concitoyens. Dans 80 % du territoire, il n’y a pas de solution proposée par une autorité organisatrice « dédiée » à la mobilité. Cette situation n’est plus acceptable. C’est pourquoi la loi a pour objectif prioritaire de simplifier l’exercice de la compétence mobilité par les collectivités, notamment par les communautés de communes, afin que celles-ci puissent mettre en place des solutions de proximité, simples et adaptées aux besoins. La commission a souhaité ajouter un délai de six mois pour cette prise de compétence. Je n’y suis pas opposée, dès lors que les collectivités concernées sont d’accord. En effet, je rappelle que les mesures contenues dans le volet « gouvernance » ont toutes été prises en étroite concertation avec les collectivités et leurs associations. Il me semble donc important de maintenir les grands équilibres trouvés dans la concertation.

Le bon niveau de réponse aux questions de mobilité, c’est le bassin de mobilité, avec un rôle de coordination de la région.

Vous avez proposé la mise en place de contrats opérationnels de mobilité et le renforcement de la concertation entre la région et les collectivités. J’y suis bien évidemment favorable, puisque c’est la même logique qui soutient la création du comité des partenaires pour associer les usagers et les employeurs à la définition des offres.

Répondre au plus près des besoins, c’est aussi se donner les moyens d’apporter des réponses spécifiques à nos concitoyens les plus fragiles. Le projet de loi prévoit donc la possibilité, pour les autorités organisatrices, d’apporter des aides et des services spécifiques à ces publics, avec un souci de coordination avec tous les acteurs qui les accompagnent. C’est dans cette logique que je vous propose la mise en place de plans d’action communs en faveur de la mobilité solidaire, élaborés à l’échelle d’un bassin de mobilité, pour permettre à chacun d’accéder plus facilement à l’emploi, à la formation ou aux services publics.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai eu l’occasion de le dire, ce projet de loi est une boîte à outils, pensée avec et pour les collectivités ainsi que tous les acteurs de la mobilité. À cet égard, je veux vous rassurer : cette boîte contient bien des outils, mais aussi des financements existants ou à venir pour les rendre opérants.