M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour répondre à M. le secrétaire d’État.
M. Michel Amiel. Monsieur le secrétaire d’État, nous partageons le même diagnostic. J’espère que les indications thérapeutiques que vous préconisez seront bien au rendez-vous.
fermeture de classes dans l’oise
M. le président. La parole est à M. Édouard Courtial, auteur de la question n° 639, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Édouard Courtial. Monsieur le secrétaire d’État, s’il y a un principe qui me semble fondamental concernant l’école de la République et sur lequel, j’en suis sûr, nous pouvons nous entendre, c’est bien celui d’une égalité des chances entre les écoliers de l’école des villes et ceux de l’école des campagnes.
Si la première a des difficultés réelles et sérieuses, la seconde a, elle aussi, de nombreux défis à relever, parmi lesquels, notamment, le recrutement des professeurs, les difficultés de financement par les communes, confrontées à la fois aux baisses des dotations et à des classes parfois surchargées.
Or, comme pour la rentrée 2018, sur les cinquante fermetures de classes annoncées dans l’Oise pour la rentrée 2019, une grande majorité concerne des écoles rurales tandis que les ouvertures se situent, pour une large part, dans les villes.
Vous ne manquerez pas de nous indiquer que le taux d’encadrement augmente, mais il cache, en réalité, une grande disparité territoriale et permet, surtout, d’assurer le dédoublement des classes de CP et de CE1 dans les REP et les REP+.
Aussi, afin d’éviter une rupture d’égalité et pour tirer l’école de la République vers le haut au bénéfice de tous les élèves, où qu’ils résident sur le territoire, je vous invite à vous saisir de la proposition de loi que j’ai déposée, qui crée des « REP ruraux » et permet aux élus de se faire entendre sur ce sujet.
Cette mesure vise non pas à opposer les écoles, ce qui serait une erreur, mais, au contraire, à prendre en compte les spécificités de « l’école des champs » afin que la politique éducative ne soit pas une réplique des vases communicants, où ce que l’on donne à l’un on le prend à l’autre.
Elle a également l’avantage de mettre à bas la logique démographique purement comptable, qui ne permettra plus, demain, à nos campagnes d’attirer des familles et empêchera celles qui y vivent d’y rester, faute d’école.
Enfin, ce dispositif récompense les investissements parfois très importants que les communes ont consentis pour maintenir l’école ou créer un regroupement pédagogique intercommunal.
Comme ancien maire, je sais ce que représente une école dans un village : un gage d’avenir !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Courtial, vous avez raison, cette question de l’école, notamment de l’école rurale, est absolument centrale dans le pacte républicain. Une école, c’est souvent ce qui anime aujourd’hui un village. On le sait, une classe ou une école qui ferme, même si le cas est heureusement assez rare, cela peut avoir un impact sur tout un bassin de vie. C’est la raison pour laquelle nous portons, comme vous l’avez dit, une attention extrêmement particulière sur la question du taux d’encadrement.
Compte tenu du fait démographique, un certain nombre de territoires perdent des élèves quand d’autres en gagnent, ce qui impose d’adapter l’encadrement en fonction de cette réalité. Pour autant, Jean-Michel Blanquer et moi-même avons refusé de l’adapter de manière strictement statistique et comptable.
Alors que la baisse démographique s’est traduite par une baisse de 35 000 élèves dans le premier degré public à la rentrée 2018, dans le même temps, nous avons créé 3 881 emplois de professeurs des écoles. Alors qu’une stricte application de la baisse démographique aurait conduit à supprimer 1 438 postes, nous avons choisi, au contraire, d’en créer. Le taux d’encadrement s’améliore et est aujourd’hui en progression partout sur le territoire. Dans les territoires les plus ruraux, il reste nettement supérieur à celui qui est appliqué en zone urbaine.
Vous l’avez dit, la définition de cette politique pose un enjeu et des questions. Je peux y répondre en vous proposant deux perspectives. D’abord, le grand débat national, au cours duquel ce sujet de l’école dans la ruralité est remonté très fortement. J’imagine que tel était aussi le cas dans l’Oise où j’étais, hier, en déplacement et où j’ai pu rencontrer un certain nombre d’acteurs.
Ensuite, la mission que nous avons confiée à Mme Ariane Azéma, inspectrice générale de l’éducation nationale, et à M. Pierre Mathiot, professeur des universités, pour étudier cette question « École et territoires » et se demander comment redéfinir nos politiques scolaires en fonction des différences entre territoires. Cette mission rendra ses conclusions avant l’été 2019. Je pense que nous pourrons nous en inspirer pour prendre un certain nombre de décisions afin d’adapter notre politique en la matière.
M. le président. La parole est à M. Édouard Courtial, pour répondre à M. le secrétaire d’État.
M. Édouard Courtial. Monsieur le secrétaire d’État, je vous ai entendu évoquer l’amélioration du taux d’encadrement ; je m’y attendais et l’avais annoncé en posant ma question. Je veux redire que les disparités territoriales s’accentuent. C’est d’ailleurs, vous l’avez noté, l’un des grands sujets qui remontent régulièrement à l’occasion du débat national.
Je vous renvoie à ce que disait le Président de la République en juillet 2017 : « Les territoires ruraux ne peuvent plus être la variable d’ajustement, il n’y aura plus aucune fermeture de classe dans les zones rurales ».
J’espère que des actes suivront bientôt la parole !
avenir de l’orientation dans l’aisne
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, auteur de la question n° 665, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Yves Daudigny. Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur l’avenir de l’orientation dans l’Aisne.
Hétérogène, la carte des centres d’information et d’orientation, les CIO, dans l’Aisne est le fruit de l’histoire locale, de partenariats noués, d’engagements passés forts du conseil général.
Cinq des six CIO étaient ainsi hébergés dans les locaux propriétés du département. Aujourd’hui, des menaces pèsent sur les deux derniers CIO encore dans cette situation, ceux de Tergnier et Hirson. Le premier devrait être ventilé dans les établissements scolaires du secteur et rattaché à Saint-Quentin. Le second dessert, à partir d’Hirson, où il est implanté, sept collèges publics, un lycée général, un lycée professionnel, un lycée agricole, une maison familiale rurale, les établissements privés de Thiérache.
En moyenne annuelle, ce CIO d’Hirson conseille et accompagne 800 personnes. Il réalise une quarantaine de validations des acquis de l’expérience et travaille avec un peu moins d’une centaine de décrocheurs, dont 30 % ont repris des études, 18 % bénéficient du programme Compétences+ et autant ont trouvé une solution auprès de la mission locale.
Sur ce territoire rural, en fragilité économique et sociale, et ce malgré les engagements forts des collectivités locales, la proximité répond au récurrent problème d’absence de mobilité. Le démantèlement du CIO d’Hirson, par ailleurs ouvert durant les vacances, marquerait une rupture supplémentaire avec l’égalité territoriale. Il est donc essentiel de maintenir à Hirson les services d’information et d’orientation dans un point d’accueil physiquement indépendant des établissements scolaires.
Monsieur le secrétaire d’État, la question est donc posée de la confirmation, à Hirson, de ce point d’accueil indépendant, de l’avenir des agents concernés, de la prise en charge des frais assumés jusque-là par le conseil départemental. L’enjeu est bien le maintien d’un service public dont chacun s’accorde à saluer la nécessité et l’efficacité.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Yves Daudigny, vous l’avez dit, l’orientation est un sujet majeur. Elle a en effet été trop longtemps un facteur d’inégalités, notamment sociales, qui frappent des jeunes pas forcément munis du « capital familial » ou de l’environnement apte à leur dispenser les bons conseils en matière d’orientation.
Notre volonté est d’être plus efficace. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité transformer l’orientation afin que chaque élève puisse réussir et s’insérer dans le monde professionnel et la société en ayant accès à la même information, une information claire et assortie d’un accompagnement personnalisé.
Cet objectif passe par un nouveau partage de compétences entre l’État et les régions pour une meilleure éducation à l’orientation dès le collège. Ce partage a été défini par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel : les régions, qui sont au contact du tissu économique et des opportunités de l’avenir, ont désormais la responsabilité d’organiser des actions d’information auprès des élèves sur les métiers et les formations. L’État conserve, quant à lui, une compétence pleine et entière dans la définition, au niveau national, de la politique d’orientation des élèves et des étudiants. Il continue de prendre les décisions d’orientation et d’affecter les élèves.
Dans ce contexte, notre objectif prioritaire est que l’État concentre son action dans les établissements scolaires pour renforcer l’accompagnement de proximité des élèves et des équipes pédagogiques, et parvenir à un maillage territorial plus fin.
Certains constats témoignent d’une dynamique déjà enclenchée en faveur d’un investissement plus important des personnels dans les établissements. Ainsi, le public scolaire et étudiant est majoritairement reçu en établissement – à hauteur de 76,2 % pour la période 2016-2017. De plus, près de 75 % de l’activité des psychologues de l’éducation nationale, les PsyEN, se déroulent dans les établissements publics du second degré.
La nouvelle responsabilité des régions en matière d’information sur les formations et les métiers ainsi que l’objectif de renforcer l’accompagnement de proximité dans les établissements scolaires impliquent un resserrement progressif de la carte des CIO.
Il y a une situation dont nous avons en quelque sorte hérité. Après le désengagement financier de certains conseils départementaux, un tel resserrement est déjà enclenché depuis 2013. L’État s’est engagé, en 2016, à prendre à sa charge 373 implantations au niveau national, dont 12 pour l’académie d’Amiens, soit 4 CIO pour chaque département qui compose l’académie.
Ainsi, dans le département de l’Aisne, 4 CIO sont pris en charge par l’État : Château-Thierry, Soissons, Saint-Quentin et Laon. Ce maillage s’appuie sur le nombre d’élèves scolarisés par CIO sur les bassins d’emploi et de formation. Il tient compte des contraintes de transport et de distance. Il permet de conserver des structures d’accueil ouvertes à tous et d’assurer la prise en charge des publics spécifiques – les élèves nouvellement arrivés en France, les jeunes décrocheurs, les apprentis, les élèves de l’enseignement agricole ou privé, autant de catégories qui ne sont pas forcément scolarisées dans les établissements bénéficiant de cet accompagnement personnalisé.
Au-delà des implantations financées par l’État, que j’ai énumérées pour ce qui concerne le département de l’Aisne, la carte peut évidemment intégrer des implantations supplémentaires, sous forme de points d’accueil – vous avez mentionné celui d’Hirson – financés par une ou plusieurs collectivités locales afin d’accroître le maillage territorial.
C’est la responsabilité des collectivités locales. Pour sa part, l’État s’engage sur les 4 CIO à sa charge. À partir de là, nous souhaitons que les collectivités locales continuent de s’impliquer fortement dans ces questions d’orientation.
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour répondre à M. le secrétaire d’État.
M. Yves Daudigny. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de cette réponse très complète, mais pas totalement rassurante.
Je veux rappeler que le Président de la République a signé, le 7 novembre 2018, à Sars-Poteries, un pacte incluant de nombreuses mesures touchant l’éducation pour la réussite de la Sambre-Avesnois-Thiérache, territoire aujourd’hui très fragile.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous entends souvent vous exprimer à la télévision avec beaucoup de conviction. Je souhaite que vous mesuriez combien ce sujet du CIO d’Hirson, qui, certes, n’est pas un grand sujet, participe tout de même, d’une certaine façon, à la déstructuration de la proximité et à la mutilation des territoires.
scolarité obligatoire à trois ans
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Lherbier, auteur de la question n° 677, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Mme Brigitte Lherbier. Monsieur le secrétaire d’État, le projet de loi, intitulé « pour une école de la confiance », qui vient d’être débattu à l’Assemblée nationale, va rendre obligatoire l’école dès l’âge de 3 ans. Il soulève de nombreuses questions chez les parents, dans le corps enseignant et parmi les maires.
Dans ma ville de Tourcoing – où vous êtes venu récemment, monsieur le secrétaire d’État –, de nombreux enfants sont scolarisés tardivement pour la première fois. Cette scolarisation d’enfants avancés en âge pose évidemment des difficultés d’adaptation.
Le cadre éducatif de ces enfants est souvent dépourvu de stimulants intellectuels, limités à la sphère de l’appartement de zone urbaine, n’ayant que la télévision pour seul horizon.
Nous comprenons parfaitement l’intention louable de scolariser les enfants très jeunes, pour qu’une fois arrivés au CP ceux-ci disposent du savoir-être nécessaire à l’assimilation des apprentissages et éviter le décrochage scolaire si fréquent dans les secteurs économiquement difficiles.
Cependant, cette scolarisation obligatoire dès 3 ans doit se faire en respectant l’horloge biologique des enfants. On ne peut pas faire subir à un enfant de 3 ans le même rythme qu’à un enfant de 6 ans. De très nombreux parents choisissent de garder leurs enfants l’après-midi : ces derniers vont à l’école maternelle le matin et font la sieste à la maison l’après-midi. Si l’école devient obligatoire à 3 ans, il est plus que nécessaire de l’adapter aux tout-petits.
Vous fermez des classes en milieu rural. Les maires de nos circonscriptions sont inquiets des restrictions budgétaires de votre ministère.
La scolarisation dès 3 ans a un coût pour assurer de bonnes conditions matérielles d’accueil, telles qu’un local adéquat ou une adaptation des locaux et un équipement en matériel spécifique pour la sieste, définies en accord avec la collectivité compétente.
Les coûts liés à cette nouvelle obligation devraient être pris en charge par les communes dès la rentrée 2019, lesquelles vont logiquement devoir mettre la main à la poche. Les gouvernements précédents ont grevé lourdement leur budget en se désengageant. Le Gouvernement a supprimé leur autonomie budgétaire en faisant disparaître la taxe d’habitation. Dans ce contexte, rendre l’instruction obligatoire dès 3 ans risque d’avoir un effet direct et important sur le financement des écoles privées par les communes.
Monsieur le secrétaire d’État, l’école obligatoire à 3 ans ne sera un succès qu’à la double condition de mettre les moyens nécessaires pour pouvoir accueillir dignement les enfants tout en s’adaptant à leur rythme et de tolérer une assiduité adaptée au jeune âge de l’enfant.
Pouvez-vous nous dire quelles sont les intentions du Gouvernement à ce sujet ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Brigitte Lherbier, vous posez une question extrêmement importante, celle de l’instruction à l’âge de 3 ans, mesure qui a été votée. Pour vous avoir rencontrée dans votre département du Nord, je sais votre mobilisation sur ces sujets d’éducation.
On peut d’abord s’accorder sur le fait que c’est un grand progrès d’abaisser l’instruction obligatoire à l’âge de 3 ans, un progrès qui s’inscrit dans la lignée des mesures républicaines successives prises en faveur de l’école depuis la fin du XIXe siècle, afin de garantir à chaque enfant un égal droit d’accès à l’instruction.
L’article 2 du projet de loi pour une école de la confiance, qui viendra prochainement en discussion devant le Sénat, vise donc à rendre l’instruction obligatoire dès 3 ans. C’est la concrétisation de notre ambition pour l’école et d’un engagement de campagne du Président de la République visant à élever le niveau général des élèves et à améliorer la justice sociale.
L’école maternelle est le lieu où épanouissement et premiers apprentissages font alliance.
La qualité de vie de l’enfant à l’école – quel que soit le nombre d’heures qu’il y passe – est un sujet essentiel, d’ores et déjà consacré par le code de l’éducation dans ses grands principes. L’école maternelle sait s’adapter aux possibilités cognitives des élèves et à leurs besoins physiologiques afin de créer les meilleures conditions d’apprentissage. Les emplois du temps des élèves sont pensés par les équipes enseignantes dans une progression qui ménage les temps de repos et les temps d’apprentissage et rend ainsi possible une fréquentation de tous les élèves sur la totalité du temps scolaire dès 3 ans.
Dans de nombreuses écoles, l’organisation de la sieste se fait déjà avec toute la souplesse nécessaire à la prise en compte des besoins de chaque enfant. Des aménagements seront prévus dans l’organisation de la scolarité, pour répondre à votre préoccupation.
La formation des professeurs des écoles sera renforcée pour une meilleure prise en compte des besoins des élèves à l’école maternelle, notamment avec la mise en place de conditions scolaires sécurisantes, si nécessaires à leur épanouissement.
Les conditions de l’abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire sont donc réunies afin d’accueillir, dans les meilleures conditions, chaque enfant de la République.
Vous posez également la question du coût pour les collectivités locales.
L’abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire à 3 ans correspond à une extension de compétence des collectivités territoriales. En vertu de l’article 72-2 de la Constitution, une telle extension doit faire l’objet d’un accompagnement financier de l’État, dont les modalités seront prochainement précisées par un décret en Conseil d’État.
Pour les communes qui connaîtront une augmentation de leurs charges au titre de l’enseignement primaire pour l’année scolaire 2019-2020, les dépenses supplémentaires qui auront été générées par la présente mesure et qui seront constatées à l’issue de la rentrée scolaire feront l’objet d’un accompagnement financier de l’État avec un versement annuel pérenne.
Il sera versé, selon les situations locales, soit à la commune, soit à un syndicat intercommunal ou à une intercommunalité, à qui la compétence de scolarisation a été confiée. J’espère vous avoir rassurée sur ce point.
scolarisation des élèves handicapés dans le premier degré
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, auteur de la question n° 601, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
M. Philippe Bas. Monsieur le secrétaire d’État, ma question intéresse l’intégration des enfants handicapés à l’école de la République.
Depuis la loi de 2005, les enfants handicapés vont, par exception, dans l’éducation spéciale et, par principe, plutôt dans les écoles que fréquentent tous les autres enfants.
J’ai constaté que, dans la manière de décompter le nombre d’élèves d’une école pour attribuer les postes d’enseignant l’année suivante, on ne compte pas les enfants handicapés inscrits dans des classes appelées ULIS, pour Unités localisées pour l’inclusion scolaire, qui sont des classes d’intégration. Cela emporte des conséquences : le fait de ne pas les compter, alors que le nombre d’élèves dans le monde rural est un petit peu juste, a pour effet de diminuer le nombre d’enseignants dans des écoles qui ont, par ailleurs, une ULIS, comme cela limite les possibilités d’intégrer les enfants handicapés dans les différentes classes de l’école de la République.
C’est la raison pour laquelle je voulais vous demander si des instructions pourraient être données pour faire en sorte de tenir compte des enfants handicapés des ULIS dans le décompte des élèves de nos écoles primaires afin d’améliorer la qualité de leur encadrement.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Philippe Bas, comme vous l’avez dit, c’est la mission de l’école d’accueillir tous les élèves, sans aucune distinction.
Le très bel article L.111-1 du code de l’éducation prévoit que « le service public de l’éducation […] contribue à l’égalité des chances et à lutter contre les inégalités sociales et territoriales en matière de réussite scolaire et éducative. […] Il veille à l’inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction. »
Le Gouvernement est particulièrement mobilisé sur la question. Sophie Cluzel, qui était au banc du Gouvernement il y a quelques instants, l’aurait affirmé, comme je le fais. Elle est elle aussi très mobilisée. Quand on parle de « service public du handicap », qui sont des mots très forts, cela a un impact très important sur les ambitions de l’éducation nationale.
L’Unité localisée pour l’inclusion scolaire, cette fameuse ULIS, offre aux élèves en situation de handicap la possibilité de poursuivre en inclusion dans les autres classes des apprentissages adaptés à leurs potentialités et à leurs besoins, et d’acquérir des compétences sociales et scolaires.
Il s’agit d’un dispositif dont l’organisation pédagogique est adaptée aux besoins des élèves qui en bénéficient. Cette organisation permet de mettre en œuvre le projet personnalisé de scolarisation de chaque élève.
Dans le premier degré, l’effectif d’une ULIS est limité à 12 élèves, qui sont inscrits dans une classe de référence correspondant au plus près de leur classe d’âge. Ces élèves sont tous pris en compte dans les effectifs globaux de l’école.
Jusqu’à présent, les élèves bénéficiant d’une ULIS n’étaient pas comptabilisés dans les effectifs de leur classe de référence, car l’ULIS était considérée comme une classe à part entière.
Cela permettait de prendre en compte la spécificité des écoles concernées dans le régime de décharge dont bénéficiait le directeur. C’était donc une mesure plus favorable permettant au directeur de consacrer plus de temps à l’établissement.
Désormais, l’ULIS est considérée comme un « dispositif» et les élèves sont donc « répartis » comptablement dans les classes ordinaires. Depuis la rentrée scolaire 2018-2019, l’évolution du système d’information, ONDE, permet en effet la prise en compte des élèves d’ULIS-école dans leur classe de référence.
Pour répondre à votre question, les rectrices et recteurs s’assurent évidemment que les directeurs académiques des services de l’éducation nationale portent une attention particulière aux écoles dans lesquelles sont implantés des dispositifs ULIS lors des opérations de carte scolaire. La prise en compte de ces élèves dans l’évolution de la carte scolaire prend ainsi pleinement en compte les objectifs d’éducation inclusive.
Nous sommes tout à fait attentifs aux difficultés que vous avez évoquées, qui pourraient survenir dans la prise en compte, dans la carte scolaire, de ces classes ULIS, afin que les élèves soient véritablement comptabilisés pour éviter un impact sur les établissements concernés.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour répondre à M. le secrétaire d’État
M. Philippe Bas. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Je pense que, à partir de ce rappel très opportun des nécessités de bien prendre en compte les élèves handicapés de nos ULIS dans le décompte de l’ensemble des élèves de l’école, on arrivera à maintenir le nombre d’enseignants permettant le bon accueil de tous les élèves.
pièces d’identité autorisées pour voter
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 655, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur l’arrêté du 16 novembre dernier modifiant la liste des pièces d’identité qui peuvent être présentées pour voter.
Dorénavant, non seulement les passeports et cartes d’identité devront être périmés depuis moins de cinq ans, mais en outre seuls les nouveaux permis de conduire, au format « Union européenne », seront acceptés, alors que la plupart des Français n’utilisent que le permis rose à trois volets, pour le remplacement duquel, d’ailleurs, on leur permet d’attendre 2032.
Que comptez-vous faire pour informer rapidement les citoyens, les élus et les bénévoles, très nombreux, qui tiennent les 70 000 bureaux de vote ?
Surtout, allez-vous prendre des dispositions spécifiques pour les personnes âgées ? Un grand nombre d’entre elles ne voient pas l’utilité de remplacer leur carte d’identité et manipulent très mal internet, où se prennent les rendez-vous. Sans parler de celles qui vivent en Ehpad, pour lesquelles il est quasiment impossible, en tout cas financièrement, de faire réaliser une photographie sécurisée.
Enfin, s’agissant des cartes nationales d’identité, le délai de cinq ans court-il à compter de la date d’expiration portée sur la carte ou de la fin de la période de validité, désormais allongée de cinq ans ?
Je m’étonne de cette décision prise à quelques mois des élections européennes et de manière unilatérale : monsieur le secrétaire d’État, par quels motifs est-elle justifiée ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice Catherine Procaccia, vous soulevez une question effectivement très importante ; élu local moi aussi – je l’ai été avant d’être député –, ancien assesseur dans des bureaux de vote, je mesure l’importance de l’enjeu, s’agissant notamment des personnes âgées, ainsi que la nécessité de règles claires et d’une bonne communication, notamment en direction des élus locaux.
La mise en place du répertoire électoral unique nécessitait une révision de l’arrêté du 12 décembre 2013 précisant les pièces permettant de justifier de son identité au moment du vote, ainsi que celles qui sont admises pour l’inscription sur les listes électorales.
S’agissant de la pièce justificative de l’identité de l’électeur, il a été jugé essentiel que le titre traditionnellement autorisé comporte une photographie, afin de permettre un contrôle effectif par le président du bureau de vote.
Le même objectif de lutte contre la fraude a conduit à fixer à cinq ans la limite de péremption des cartes nationales d’identité et des passeports, suivant la règle qui prévaut généralement pour les réglementations édictées par le ministère de l’intérieur.
Pourront donc voter les électeurs munis d’une carte d’identité délivrée, au plus, vingt ans avant le scrutin, ou d’un passeport délivré, au plus, quinze ans plus tôt. Il sera toutefois demandé aux maires d’appliquer cette règle avec discernement, notamment lorsque les traits de la personne figurant sur le document d’identité sont aisément reconnaissables.
En ce qui concerne le permis de conduire, l’arrêté se borne à reprendre la terminologie européenne prévue par le décret du 9 novembre 2011 transposant la directive européenne du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire. Au moment du vote, l’électeur pourra continuer de présenter un permis de conduire en carton rose jusqu’en 2033 – ce qui laisse un peu de marge…
Ces précisions figureront expressément dans la circulaire qui sera prochainement diffusée aux maires en vue de l’organisation des élections européennes.
Ainsi, ces nouvelles dispositions ne remettent pas en cause l’équilibre visant à offrir à l’électeur un nombre important de moyens de justifier de son identité, dans le but de favoriser sa participation, tout en garantissant un juste contrôle de cette identité, afin de limiter les risques de fraude en matière électorale.
De plus, le décret paru le 16 novembre dernier, en même temps que le corpus réglementaire nécessaire à la mise en œuvre du répertoire électoral unique, laisse à tous les acteurs du processus électoral un temps d’adaptation raisonnable.
Madame la sénatrice, j’espère vous avoir apporté les précisions que vous souhaitiez de la manière la plus claire possible.