M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le président, madame la ministre, ce ne sont pas mes amendements qui ont tant coûté (Rires.), puisqu’aucun d’entre eux, les chers pas plus que les moins chers, n’a été adopté !
Avec tout le respect que j’ai pour le Gouvernement et pour vous-même, madame la ministre, permettez-moi de vous faire observer, quand vous nous dites : « Rendez-vous compte de ce que vous avez voté ! », que nous sommes le Parlement !
Mme Laurence Cohen. Eh oui !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. Roger Karoutchi. Sauf changement constitutionnel imprévu, c’est encore le Parlement qui vote l’impôt et la loi. C’est lui qui décide. Le Gouvernement propose, le Parlement vote. Par conséquent, madame la ministre, il est peut-être très ennuyeux pour vous que le Parlement ait voté toutes ces mesures, mais dans le système constitutionnel français, c’est ainsi que fonctionne l’équilibre des pouvoirs.
On a peut-être une conception différente de cela dans le nouveau monde, mais ceux qui défendent le Parlement font en sorte que ce que celui-ci vote s’applique ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je parlerai avec moins de talent et d’humour que Roger Karoutchi, mais, madame la ministre, vous parvenez à un total de 700 millions d’euros de dépenses supplémentaires votées par le Sénat. Nous ne sommes pas d’accord sur le chiffre concernant les pompiers. Vous annoncez un coût de 100 millions d’euros, nous l’évaluons à 55 millions d’euros. Cela fait tout de même une différence.
Enlevons donc ces 100 millions d’euros et nous ne sommes plus qu’à 600 millions d’euros supplémentaires. Je vous rappelle que vous avez accordé deux fois 200 millions d’euros en plus à l’Assemblée nationale, soit 400 millions d’euros. Respectez, s’il vous plaît, les demandes du Parlement : 600 millions ici et 400 millions là, cela fait 1 milliard d’euros. Sait-on jamais, peut-être pourriez-vous mettre à contribution les organismes complémentaires d’assurance maladie, les OCAM ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je pourrais effectivement reprendre à mon compte les propos du président Milon ou de M. Karoutchi.
Madame la ministre, j’ai déjà entendu ce discours de la part du gouvernement précédent,…
M. Philippe Dallier. Et de tous les autres, également ! (Sourires.)
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. … des gouvernements précédents, d’une manière générale. (Sourires.)
À mon sens, ces propos sont graves, et dénotent un dévoiement de la lecture de nos institutions et de leur fonctionnement. Ce n’est pas le Gouvernement qui vote la loi, c’est le Parlement. Si le Gouvernement se concertait un peu plus avec les parlementaires et dépassait le seul périmètre de ses cabinets, il pourrait peut-être obtenir des votes moins généreux.
Mme Éliane Assassi. Tout à fait !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous avez l’impression que nous dépensons inconsidérément l’argent public, mais ce n’est pas le cas. En commission, nous avons cherché à équilibrer le budget. C’est le rôle du Parlement que d’envisager de le répartir différemment. Vous avez proposé un certain nombre de mesures, qui ne sont d’ailleurs pas forcément populaires, mais celles-ci n’ont pas obtenu notre approbation.
J’ai le sentiment que l’on marche sur la tête. Je vous respecte, mais je vous le dis comme je l’ai dit à vos prédécesseurs : on trouve dans ces travées du talent et de l’expérience, aussi bien à droite qu’à gauche. Je ne conteste en rien les compétences des membres des cabinets, mais ils ne bénéficient pas toujours de la connaissance du terrain qui est rassemblée ici. Selon moi, vous auriez tout intérêt à écouter et à partager nos réflexions. Nous n’y parviendrons pas à l’instant, dans l’émotion et dans la précipitation où nous nous trouvons parfois, cela requiert une construction progressive en amont de l’élaboration de votre budget – de notre budget, devrais-je dire.
Il serait opportun, pour le Gouvernement que vous représentez, de tenir compte de cela à l’avenir et de marquer ainsi, par ce progrès essentiel, une différence importante avec l’ancien monde que vous refusez, tout en proposant une lecture plus positive de la constitution de la Ve République, laquelle, je le rappelle tout de même, a toujours considéré que le Parlement faisait la loi ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – Mme Victoire Jasmin applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous invite à regarder le minuteur et à respecter le temps qui vous est imparti.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, vous avez présenté les choses avec humour, restons donc dans ce ton léger. Il est vrai que le Parlement a proposé un certain nombre de dépenses.
M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas ma faute ! (Sourires.)
Mme Laurence Cohen. C’est dommage pour vous, monsieur Karoutchi, mais vous n’êtes malheureusement pas le seul dont les amendements n’ont pas été couronnés de succès.
Le groupe communiste a fait des propositions de recettes nouvelles, mais aucun de ses amendements n’a été accepté non plus.
Madame la ministre, vous vous saisissez de votre règle à calcul et vous déplorez que le Sénat ait complètement déséquilibré le budget auquel vous avez travaillé dans votre ministère avec beaucoup de compétence et de sérieux, je n’en doute pas. Cela pourrait prêter à sourire si ce n’était pas si grave ! Le jeu parlementaire – qui n’en est pas un – consiste précisément à réfléchir sur le budget et à essayer de faire des propositions, voire des contre-propositions. Sinon, à quoi bon avoir un Parlement, une Assemblée nationale et un Sénat ? Il suffirait de les dissoudre, et vos budgets seraient toujours parfaits, il ne leur manquerait ni une virgule ni un centime ! Soyons sérieux, là n’est pas le débat.
Les amendements qui ont été défendus plutôt dans les travées de droite allaient dans votre sens et partageaient votre logique consistant à continuer à alléger les cotisations patronales. Nos propositions, en revanche, allaient en sens inverse. Vous les avez refusées, alors qu’elles permettaient de créer de nouvelles recettes.
Vous n’êtes pas allée chercher la fraude aux cotisations sociales patronales avec la même détermination que celle dont vous avez fait preuve à propos des exonérations, alors que son coût atteint tout de même 25 milliards d’euros ! Il en va de même en ce qui concerne les sanctions frappant le travail dissimulé.
Cela signifie donc que vous avez contribué à assécher les finances de la sécurité sociale à hauteur de plus 5 milliards d’euros, la privant ainsi des moyens d’agir. Vous nous demandez de l’argent pour compenser les nouvelles dépenses, voilà quelques exemples dont vous pouvez vous saisir en soutenant nos amendements !
Mme Éliane Assassi. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.
M. Michel Magras. Madame la ministre, vous avez évoqué les amendements votés l’autre soir à propos des outre-mer.
Je voudrais rappeler ici que, lorsque le Gouvernement a choisi de transformer le CICE en exonérations de charges, rien ne l’obligeait à revenir sur les dispositifs issus de la LODEOM, qui étaient en train de porter leurs fruits et dont les résultats étaient remarquables. Notre démarche, dès lors, avait pour unique objectif de nous rapprocher de l’existant, rien de plus.
Je rappelle que des études sérieuses ont prouvé que, par cette transformation, le Gouvernement a gentiment mis dans la poche de Bercy plus de 180 millions d’euros. Je sais que les amendements que nous avons adoptés l’autre soir ont un coût, mais celui-ci reste bien inférieur au coût réel des dispositions en vigueur jusqu’à l’an dernier.
S’il est vrai que nous avons augmenté les dépenses, en ce qui concerne l’outre-mer, celles-ci diminuent par rapport à l’année précédente. Il faut avoir le courage de le dire, c’est la réalité ! Vous alliez faire disparaître du budget des outre-mer des aides absolument fondamentales pour le développement économique de ces territoires, nous ne pouvions pas laisser passer cela.
Puisque l’occasion m’en est donnée et qu’il me reste encore quelques minutes,…
M. Michel Amiel. Quelques secondes…
M. Roger Karoutchi. … tout au plus !
M. Michel Magras. … je rappelle que le choix du Gouvernement d’orienter les aides nouvelles uniquement vers les bas salaires va à l’encontre du développement économique des outre-mer et risque de les « smicardiser ». Cette démarche prend le contre-pied de toutes les études qui prouvent que, pour sortir du chômage, construire une économie solide et équilibrer le budget de la sécurité sociale, il faut que les salaires augmentent. Ce constat n’est pas seulement valable pour l’outre-mer, mais également pour la France métropolitaine.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je soutiendrai l’amendement présenté par le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
Madame la ministre, vous avez fait valoir l’aridité des chiffres, en avançant que nous avions voté quelque 700 millions d’euros de dépenses supplémentaires. Il est vrai que nous votons toujours les recettes avant les dépenses. Cette somme résulte des réflexions de beaucoup de nos collègues, qui ont déposé des amendements tout à fait respectables, conformément à la mission du Sénat comme de l’Assemblée nationale.
La commission des affaires sociales a réalisé un travail de fond : les deux rapports produits sur ce projet de loi de financement de la sécurité sociale sont tout de même des pavés de près de 400 pages ! Cela requiert de l’expertise, celle que les élus siégeant à la commission partagent avec l’ensemble du personnel. J’ai pu le constater en participant modestement à ses travaux à mon arrivée au Sénat en 2007.
Plusieurs de nos collègues ont évoqué le rôle de législateur que notre Parlement bicaméral joue légitimement. Nous l’illustrons jour après jour. Certes, 700 millions d’euros, ce n’est pas rien, mais nous soutenons l’outre-mer comme la métropole.
Monsieur le président Magras, vous êtes venu il y a quelques semaines à Charleville-Mézières, dans les Ardennes, pour participer, avec notre collègue de Guadeloupe, notamment, aux assises des intercommunalités de l’outre-mer. Cela m’a permis de mesurer l’ampleur de votre tâche, et les contraintes géographiques, climatiques, mais aussi, nous le rappelions hier soir, numériques, que vous subissez.
Je voterai donc cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.
M. Michel Amiel. Monsieur Karoutchi, pour vous répondre avec le même humour, mais au fond très sérieusement, vous me paraissez plus fort en équilibre des pouvoirs qu’en équilibre des budgets… (Sourires.)
Pour ma part, je n’ai pas entendu Mme la ministre remettre en cause, de quelque manière, le rôle du Parlement. Bien entendu, le Sénat et l’Assemblée nationale sont là pour présenter des amendements.
Mme la ministre nous a présenté une addition, relativement lourde, au point de déséquilibrer le budget. Moyennant quoi, le Sénat est libre de voter ce qu’il veut. Revenons donc aux faits, en évitant les polémiques stériles.
J’ai l’impression qu’on balaie d’un revers de main deux données importantes : la disparition du déficit, une première, et l’apurement de la dette à l’horizon de 2024. Je pense que tous, sur ces travées, ou à peu près, nous sommes d’accord sur cela.
Mme Cohen, qui a parlé au nom de nos amis communistes, a au moins le mérite de la cohérence. Elle a souligné que, bien que l’ONDAM tendanciel – pour parler en termes techniques, même si je ne suis pas un financier – soit de 4,5 %, nous avons voté un ONDAM de 2,5 %.
L’écart est en effet important, mais, comme je l’ai expliqué plusieurs fois, l’année dernière, dans la discussion générale et ce matin encore, la seule suppression des actes inutiles ou redondants, y compris les hospitalisations, permettrait largement de revenir à 2,5 %, et ce sans faire d’économies inutiles.
Madame la ministre, je ne doute pas que vous nous présentiez l’année prochaine un beau projet de loi détaillant les mesures que vous proposez. En tout état de cause, nous ne ferons pas l’économie d’une réforme de structure de la santé. Cette réforme est indispensable : c’est à ce prix, à ce prix seulement, que nous pourrons être aussi bien soignés en ville qu’à l’hôpital, sans dépenses excessives !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Madame la ministre, vous annoncez un total de 700 millions d’euros, mais ce chiffre inclut toutes les taxes que vous imposez aux Français ! Quand on retire un certain nombre de dispositifs, on n’obtient pas tout à fait les mêmes chiffres – ou alors il y a eu, entre hier et aujourd’hui, une inflation extraordinaire…
Pour les pompiers, vous parliez de 500 millions d’euros – en fait, sur plusieurs années. Aujourd’hui, vous êtes plus raisonnable : 100 millions d’euros. Notre chiffrage est différent : si la mesure était appliquée intégralement, avec ces exonérations pour l’emploi de pompiers volontaires, qui répondent à une préoccupation des territoires, elle coûterait 52 millions d’euros. Il y a tout de même une différence !
Hier soir, nous avons longuement discuté de la suppression du dispositif TO-DE. Nous avons estimé le rétablissement de cette exonération à 39 millions d’euros, ce qui n’a pas été contesté par M. Darmanin. Et vous, cet après-midi, parlez de 50 millions d’euros !
S’agissant des exonérations pour les chambres consulaires, vous évaluez nos propositions à 40 millions d’euros. C’est important, mais ce n’est rien en comparaison des prélèvements que vous avez infligés à ces organismes l’an dernier, en tapant directement dans les caisses des chambres de commerce et d’industrie. En réalité, nous ne proposons qu’un retour léger par rapport à cette ponction importante.
En ce qui concerne les médecins, il s’agit d’un amendement d’appel, qui mérite d’être discuté. S’il faut 10 millions d’euros pour arriver au plafond de 90 000 euros dont nous avons parlé hier, en effet, cela interpelle. On peut en discuter.
Madame la ministre, nous vous donnons des pistes pour répondre aux préoccupations des Français et nous arrivons à un chiffre moindre. Essayez donc d’écouter ces propositions sénatoriales !
En fait, dans cette tuyauterie qu’est la sécurité sociale, nous avions des tuyaux percés – des déficits –, mais, maintenant, on a l’impression qu’il y a des tuyaux bouchés, avec, déjà, une régurgitation pour mesures non compensées, à hauteur de 2,6 milliards d’euros. Vos ponctions sont donc bien supérieures aux mesures que nous proposons : 700 millions d’euros pour les secondes, 2,6 milliards pour les premières !
Quant à l’article 44, madame la ministre, il y a une vraie divergence entre vos propositions et les nôtres, qui, me semble-t-il, répondent aux préoccupations des Français, s’agissant notamment du niveau de vie des retraités, que vous prévoyez, vous, d’accabler encore davantage.
Nous aurons l’occasion d’en discuter, mais, par pitié, révisez vos chiffres !
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. À la fin de votre intervention, madame la ministre, vous avez anticipé que votre propos susciterait des réactions. Vous voilà servie !
Je ne reviendrai pas sur les pouvoirs du Parlement, mais j’appuierai l’argument de mon collègue Savary. Si l’État compensait totalement à la sécurité sociale le coût des exonérations qu’il accorde, il n’y aurait pas de problème, et nous aurions encore de la marge.
Or, dans le schéma actuel – jusqu’à ce que l’on change les règles du jeu pour, peut-être, fusionner un jour le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale –, si la règle fondamentale avait été respectée, la question des 700 millions d’euros dont le Parlement a décidé ne se poserait même pas.
Madame la ministre, que le Gouvernement revienne donc aux anciennes pratiques ! Peut-être cela aurait-il, en faisant votre affaire, compliqué la tâche de votre collègue Darmanin dans le cadre du projet de loi de finances… Mais telle était la règle du jeu.
Parce que cela devient compliqué, on ne l’applique plus, on met en difficulté la sécurité sociale, pour, ensuite, reprocher au Parlement les 700 millions d’euros qu’il a décidés. Eh bien, non, madame la ministre. On peut envisager les choses différemment : que l’État trouve les moyens de compenser les exonérations qu’il accorde, et le problème sera réglé ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Éric Bocquet applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Je sens que j’ai touché une corde très sensible, en essayant simplement de faire un trait d’humour… (Exclamations amusées sur de nombreuses travées.)
M. René-Paul Savary. Nous aussi !
Mme Agnès Buzyn, ministre. Quand j’ai fait mon addition, mon propos n’était évidemment pas que nous nous mettions d’accord sur 700 ou 600, voire 500 millions d’euros. J’ai simplement dit que je sais la Haute Assemblée sensible au retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale. C’est la première fois depuis dix-huit ans, et nous pouvons tous nous en réjouir pour nos enfants.
Vous avez voté un certain nombre de mesures, et vous êtes plus que légitimes pour le faire. À aucun moment il ne viendrait à mon esprit ni à celui du Gouvernement de remettre en cause les pouvoirs des parlementaires que vous êtes.
Mon propos était qu’il est toujours plus facile, pour nous tous, de voter des mesures en plus. Mais, si nous voulons garantir l’équilibre des comptes, nous allons maintenant devoir passer aux économies.
J’ai fait un trait d’humour sur l’ONDAM, parce que je sais que nous tous, moi la première, sommes sensibles à cette question de l’ONDAM par rapport aux besoins. Il ne s’agissait vraiment pas, monsieur Karoutchi, d’une remise en cause de la séparation des pouvoirs ; je ne me permettrais pas de la remettre en cause.
Je n’ai pas la légitimité d’un élu : je viens avec ma compétence professionnelle, que vous connaissez, mais je n’ai pas la légitimité que vous avez face aux électeurs et que je reconnais.
J’ai fait une addition pour dire simplement : passons aux économies. En réalité, nous avons tous beaucoup plus de difficultés à voter des économies que des dépenses supplémentaires.
Monsieur Dallier, s’agissant de l’opposition permanente dont vous avez parlé entre le ministre des affaires sociales et le ministre des comptes publics, je suis d’accord avec Gérald Darmanin pour penser que les ressources publiques, qu’elles alimentent la sécurité sociale et les dépenses sociales ou les dépenses de l’État, servent les Français, des poches desquels elles viennent.
Vouloir établir une dichotomie absolue entre la dette de l’État et celle de la sécurité sociale, ou les dépenses sociales et les dépenses de l’État, n’a pas de sens quand on finance des routes ou des écoles comme l’AAH, l’ASPA, c’est-à-dire le minimum vieillesse, ou la prime d’activité – qui ne sont pas des dépenses assurantielles, mais des dépenses sociales – sur le budget de l’État.
Ainsi, il est fondé de penser la taxation des Français, la dette publique et les dépenses publiques de façon intégrée, parce que, au bout du compte, ce sont les mêmes Français qui paient. La dette, qu’elle soit sociale ou étatique, nous concerne tous.
Je n’ai donc pas d’opposition frontale avec Gérald Darmanin sur ce sujet : j’assume pleinement le fait que je cherche à réduire les déficits de la France en général, pour nos enfants, qu’il s’agisse de la dette de l’État ou de celle de la sécurité sociale.
Mon intention n’était pas de heurter les parlementaires que vous êtes et que je respecte. Je disais simplement avec humour : passons aux économies. Eh bien, je suis ravie que nous passions ensemble à l’examen des dépenses ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 26 et de l’annexe B, modifié.
(L’article 26 et l’annexe B sont adoptés.)
Vote sur l’ensemble de la troisième partie
M. le président. Mes chers collègues, je vais mettre aux voix la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.
Je vous rappelle que, lorsque le Sénat n’adopte pas les dispositions de cette partie, la quatrième partie du projet de loi est considérée comme rejetée.
Y a-t-il des demandes d’explication de vote ?…
Je mets aux voix l’ensemble de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 18 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 232 |
Contre | 111 |
Le Sénat a adopté.
QUATRIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2019
TITRE IER
TRANSFORMER LE SYSTÈME DE SOINS
Article 27
I. – L’article L. 162-23-15 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Après la référence : « 1° », est insérée la référence : « , 2° » ;
c) Les mots : « satisfont aux critères liés à l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, mesurés chaque année » sont remplacés par les mots : « atteignent des résultats évalués à l’aide d’indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins, mesurés tous les ans » ;
d) (nouveau) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Ces indicateurs prennent en compte les résultats et les expériences rapportés par les patients. » ;
2° Après le même premier alinéa, il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. – Pour certains des indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins mentionnés au I, un seuil minimal de résultats est requis. Ce seuil est fixé par indicateur en fonction de la répartition des résultats de l’ensemble des établissements concernés. Lorsqu’un établissement mentionné au même I n’atteint pas, pendant trois années consécutives, un tel seuil minimal pour un même indicateur, l’établissement concerné fait l’objet d’une pénalité financière notifiée par le directeur général de l’agence régionale de santé, après qu’il a été mis en demeure de présenter ses observations. Toutefois, le directeur général de l’agence régionale de santé peut estimer, par décision spécialement motivée, qu’il n’y a pas lieu à sanction au regard de circonstances particulières propres à l’établissement concerné.
« Le montant de la pénalité financière globale est apprécié en fonction du nombre d’indicateurs concernés et de la gravité des manquements constatés. La pénalité financière globale ne peut excéder un montant équivalent à 0,5 % des recettes annuelles d’assurance maladie de l’établissement.
« Lorsque, pour une année donnée, un établissement n’atteint pas le seuil minimal requis pour un indicateur, il en est alerté par le directeur général de l’agence régionale de santé qui lui indique la pénalité financière encourue en cas de manquement constaté pendant trois années consécutives.
« Cette pénalité s’accompagne d’un plan d’amélioration de la qualité présenté par l’établissement concerné. » ;
3° Le dernier alinéa est remplacé par un III ainsi rédigé :
« III. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités de détermination et de mise en œuvre de la dotation complémentaire et de la pénalité financière, les catégories des indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins recueillis annuellement par chaque établissement mentionné au premier alinéa du I et définit les modalités de détermination des seuils minimaux de résultats requis pour certains indicateurs.
« Avant le 31 décembre de chaque année, un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale dresse la liste des indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins, fixe les seuils minimaux de résultats requis pour certains indicateurs et prévoit les modalités de calcul de la dotation complémentaire et de la pénalité financière. »
II. – A. – Les 2° et 3° du I entrent en vigueur le 1er janvier 2020.
B. – Le b du 1° du I entre en vigueur le 1er janvier 2020.
La première année d’entrée en vigueur du même b est une année de recueil des indicateurs qui ne donne pas lieu au versement de la dotation complémentaire mentionnée au I de l’article L. 162-23-15 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la présente loi.
C (nouveau). – Le d du 1° du I entre en vigueur le 1er janvier 2020 pour les activités mentionnées au 4° de l’article L. 162-22 du code de la sécurité sociale ainsi que pour les structures d’hospitalisation à domicile, et le 1er janvier 2021 pour les activités mentionnées au 2° du même article L. 162-22.
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.
M. Bernard Jomier. L’article 27 porte sur le paiement des établissements de santé en fonction de la qualité des soins.
Madame la ministre, vous avez fixé à 300 millions d’euros pour 2019 la dotation reposant sur des indicateurs de qualité. À l’Assemblée nationale, le rapporteur général et vous-même avez précisé le dispositif : un développement des indicateurs après négociations en 2019, le recueil des indicateurs « à blanc », puis leur intégration au modèle de financement la première année, financement dont la première année est fixée à 2020 pour les établissements de soins de suite et pour l’hospitalisation à domicile et à 2021 pour la psychiatrie.
Avant d’entamer la discussion des amendements, il me paraît nécessaire que vous nous précisiez le calendrier : cette dépense importante de 300 millions d’euros étant conditionnée au recueil et à l’établissement des indicateurs, prévus pour 2019, la somme sera-t-elle réellement dépensée l’année prochaine ?
Par ailleurs, comment ce dispositif s’articulera-t-il avec l’actuel contrat d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins, ou CAQES, qui prévoit déjà une rémunération sur des objectifs de qualité et de permanence des soins, y compris un système de malus ?
Je le répète : ce sont 300 millions d’euros qui sont en jeu. Sauf à faire écho au débat précédent – vous auriez alors beaucoup anticipé… –, comment pourrez-vous, alors que l’établissement des indicateurs prendra du temps, mettre en place pleinement ce dispositif en 2019 ?