M. le président. La parole est à Mme Nelly Tocqueville.
Mme Nelly Tocqueville. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre assemblée examine aujourd’hui la proposition de loi tendant à simplifier certaines obligations applicables aux collectivités territoriales dans le domaine du service public d’eau potable.
Elle a été déposée au Sénat le 1er août dernier par Bernard Delcros et notre ancien collègue René Vandierendonck, que je salue, ainsi que par les membres, auxquels je me suis associée, de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, ce qui témoigne du caractère transpartisan de ce texte.
Celui-ci est l’aboutissement de travaux menés en amont, au sein de la délégation, sur la simplification des normes. En effet, il s’inscrit dans la continuité de la signature, le 23 juin 2016, d’une charte de partenariat entre le Sénat et le Conseil national d’évaluation des normes, dont l’objectif principal est de mettre en œuvre une simplification des normes applicables aux collectivités territoriales, et notamment des dispositions législatives afférentes au service public d’eau potable.
C’est la raison pour laquelle le CNEN a saisi, le 1er février 2017, la délégation aux collectivités territoriales afin d’examiner l’origine des difficultés rencontrées par l’ensemble des acteurs, communes, EPCI, mais aussi agences de l’eau.
Cette proposition de loi est bien le fruit – nous pouvons le vérifier – d’un riche travail de concertation avec les acteurs concernés et le ministère de la transition écologique et solidaire.
Par ailleurs, une table ronde portant sur ce même objectif s’est tenue au Sénat le 20 juin dernier.
La difficulté majeure mise en avant par le CNEN résulte de « l’articulation de deux obligations » auxquelles sont assujetties les collectivités territoriales. Il s’agit, d’une part, de l’obligation pour celles-ci de renseigner les indicateurs de performance, comme le rendement du réseau ou encore la gestion du patrimoine, devant figurer dans la déclaration de la redevance pour l’usage « alimentation en eau potable » avant le 1er avril de l’année suivant celle où le montant est dû ; d’autre part, de l’obligation pour le maire d’une commune ou le président d’un EPCI de présenter un rapport annuel sur le prix et la qualité du service public d’eau potable devant le conseil municipal ou l’assemblée délibérante, pour consolider ces mêmes indicateurs avant le 30 septembre.
Le caractère précoce de la date du 1er avril peut, en effet, amener les collectivités à déclarer des données non consolidées, alors que le rapport rendu au 30 septembre permet, quant à lui, de renseigner des indicateurs de façon plus certaine.
En outre, il est nécessaire de signaler que cette situation oblige les collectivités à effectuer deux opérations de relevés d’informations, ce qui engendre des coûts supplémentaires.
La proposition de loi sénatoriale que nous examinons a pour objet de mettre en œuvre une « solution de simplification équilibrée et opérationnelle, répondant aux difficultés des collectivités territoriales sans désorganiser les agences de l’eau », afin que les collectivités n’aient plus à supporter de surcoûts.
Elle prévoit, par ailleurs, que le mécanisme de doublement de taux de la redevance pour une année n soit basé sur les indicateurs de performance de l’année n-2 et non pas de l’année n-1. Ainsi, on s’assure que ceux-ci sont bien consolidés.
Il faut également saluer la mesure visant à suspendre temporairement, de façon transitoire en attendant la mise en œuvre effective des dispositions prévues aux articles 1er et 2, la majoration du taux de la redevance « alimentation en eau potable » pour les prélèvements effectués en 2019 ainsi qu’en 2020, quand la présente loi entrera en vigueur.
Il est important de noter que le dispositif a reçu l’accord de tous les acteurs concernés, notamment les agences de l’eau, alors même que celles-ci subiront une légère baisse de leurs recettes.
En conséquence, notre groupe votera cette proposition de loi, adoptée, je le rappelle, à l’unanimité en commission, car elle va dans le bon sens et remplit pleinement l’objectif que nous nous sommes fixé de simplification des normes applicables aux collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché.
M. Alain Fouché. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, vous le savez, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRe, a entraîné une importante redistribution des compétences de nos collectivités territoriales. Les transferts ne se sont pas toujours faits sans douleur, à cause parfois d’un manque de concertation ainsi que d’une importante baisse des dotations afférentes aux compétences perdues.
Aujourd’hui de nombreuses collectivités sont surchargées par le poids de leurs nouvelles responsabilités, sans pour autant recevoir l’accompagnement financier correspondant à celles-ci.
S’agissant de la compétence « eau », exercée jusqu’ici par les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale, la loi NOTRe prévoyait son transfert obligatoire aux EPCI au plus tard le 1er janvier 2020. Le Sénat, à la demande des maires, avait rejeté cette obligation à l’unanimité en début d’année. Toutefois, l’Assemblée nationale renouvelée l’a réintégré il y a quelques jours. Une nouvelle fois, les territoires n’ont pas été écoutés !
La législation impose aux communes et EPCI le versement d’une redevance annuelle sur les prélèvements en eau de leur territoire. Cette situation entraîne un calcul par anticipation de la consommation des collectivités territoriales. Le caractère approximatif de ces estimations conduit les communes ou EPCI à être régulièrement soumis à des opérations de régularisation, voire à des pénalités financières imprévisibles et coûteuses pour leurs budgets.
Par ailleurs, le contexte financier des collectivités, que chacun de nous connaît, nous oblige plus que jamais à leur donner la visibilité nécessaire pour gérer les budgets communaux.
Soucieux d’accompagner nos communes et EPCI dans une simplification de leurs démarches et obligations administratives, le groupe Les Indépendants ne peut que s’associer à cette démarche de simplification des normes et d’assouplissement de la législation.
Mes chers collègues, nos territoires attendent des mesures fortes : écoutons-les ! J’avais à ce propos déposé, il y a plusieurs mois, une proposition de loi précisant qu’une norme nouvelle adoptée devait faire disparaître une norme existante. J’espère qu’elle finira par être discutée un jour ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Léonhardt. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. Olivier Léonhardt. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est tout d’abord comme sénateur nouvellement élu que je tenais à m’exprimer pour la première fois dans notre assemblée sur cette proposition de loi qui incarne parfaitement les actions de bon sens devant être engagées et portées par le Sénat.
Les initiatives de ce type, essentielles pour le quotidien de nos collectivités, doivent être multipliées pour renforcer l’efficacité et la crédibilité de notre action publique, et donc la vitalité démocratique de notre pays.
N’ayant pas pu participer aux travaux préparatoires sur ce texte, je tiens à saluer la démarche partenariale et le travail mené par mes collègues qui ont suivi ce processus pragmatique et transpartisan jusqu’à aujourd’hui.
On se focalise bien souvent sur le « trop de normes » en matière de simplification, mais ce texte est aussi l’occasion de rappeler l’enjeu de l’amélioration des normes existantes. Il reste beaucoup à faire !
Je ne reviendrai pas en détail sur le bien-fondé de chacune des dispositions prévues. Je souhaite, en revanche, insister sur les conséquences indirectes de cette mesure, qui pourrait apparaître au premier abord purement technique, et sur ses bienfaits concrets pour la gestion du bien public de l’eau.
J’ai moi-même, dans mes précédentes fonctions de maire de Sainte-Geneviève-des-Bois et de président de Cœur d’Essonne Agglomération, territoire de 200 000 habitants en région parisienne, conduit le passage d’une délégation de service public de dix communes avec dix contrats distincts vers une régie publique de distribution de l’eau potable. C’était non pas un choix idéologique, mais une décision pragmatique et transpartisane pour un territoire avec ses spécificités, afin d’assurer un service public qui garantisse aux usagers une eau de qualité optimale au juste coût.
Or, si nous agissons aujourd’hui pour que les redevances et les majorations appliquées par les agences de l’eau soient fondées sur des données consolidées, soulignons aussi que cette mesure participera indirectement à renforcer la connaissance des réseaux de distribution et donc à rationaliser les choix d’investissement pour éviter les pertes et le gâchis d’eau.
En simplifiant le fonctionnement du service public d’eau potable, nous encourageons nos collectivités à s’investir plus avant dans la gestion du quotidien, nous favorisons des investissements plus pertinents par une meilleure connaissance des réseaux et nous participons à diminuer les pertes d’eau. À cet égard, il faut être clair, les opérateurs qui vendent l’eau n’ont pas toujours eu intérêt à parfaire leurs connaissances des réseaux de distribution.
Il s’avère souvent difficile, voire impossible, de connaître avec précision le rendement des réseaux de distribution à l’échelle d’un territoire ou d’un secteur lorsque les bassins desservis par les producteurs d’eau s’étendent sur des surfaces bien plus vastes. C’est notamment le cas en région parisienne.
Il faut donc développer des outils de mesure précis du rendement des réseaux. La reprise de la distribution d’eau potable par des régies publiques doit s’accompagner de l’installation de compteurs sectoriels qui permettent des investissements optimisés, avec un impact certain sur le coût de l’eau, et par conséquent sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens.
Avec ce texte, au-delà de notre volonté de simplifier et de baser les majorations des agences de l’eau sur des indicateurs fiables, nous participons à la réduction de ces majorations par une meilleure gestion du bien public qu’est l’eau.
Le RDSE soutiendra évidemment la présente proposition de loi. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme. (M. Gérard Longuet applaudit.)
M. François Bonhomme. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, parler de l’eau est devenu une habitude pour nous. Transfert de compétence et délimitation de celle-ci, restauration des continuités écologiques, financement des agences de l’eau, composition des instances de bassin, sans oublier les inévitables fuites d’eau sur les réseaux d’eau potable ou même les contraintes d’autorisation de pompage : les occasions de nous saisir des questions afférentes à l’eau ont été nombreuses.
Malheureusement, face à l’instabilité législative et financière, face à la liberté d’interprétation que s’autorise parfois l’administration, les élus locaux se trouvent désemparés, et c’est souvent sur le Sénat qu’ils concentrent leurs espoirs. Cette proposition de loi est donc une nouvelle illustration du rôle et du devoir de notre assemblée : se porter au chevet des collectivités locales et des élus, qui ne comprennent pas toujours ce qui se passe « en haut ».
Je veux saluer le travail patient de nos collègues Bernard Delcros, Pierre Médevielle et Jean-Marie Bockel.
Certains considèrent que la portée de la proposition de loi est assez modeste, mais je préfère un petit pas à une idée générale qui produit une loi incolore et insipide. Cette simplification constitue une réponse concrète apportée aux syndicats des eaux et aux collectivités locales, qui éprouvent généralement les plus grandes difficultés à fournir des indicateurs de performance consolidés.
Il s’agit de faciliter la déclaration par les communes des éléments nécessaires au calcul de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau, laquelle est assise sur le volume d’eau prélevé au cours d’une année.
Si la transmission des éléments est effectuée au 1er avril de l’année suivante, alors même que la présentation du RPQS, le rapport annuel sur le prix et la qualité du service public d’eau potable, est exigible au 30 septembre de la même année, il n’y a rien d’étonnant à ce que les élus aient des difficultés à déclarer des données consolidées.
Le Conseil national d’évaluation des normes a évalué l’économie à 528 000 euros par an. C’est peut-être modeste, mais cela suffit à justifier l’intervention du législateur.
Je dirai un mot sur le financement des agences de l’eau. Madame la secrétaire d’État, vous le savez, l’État a pris la mauvaise habitude d’amputer chaque année le fonds de roulement des agences de l’eau. Cela représente 175 millions d’euros pour 2017. L’État le fait régulièrement depuis 2013, à hauteur d’environ 200 millions d’euros par an, afin de financer son propre budget. Ce prélèvement, ou plutôt cette captation, s’accompagne d’une diminution drastique et imposée des effectifs des agences de l’eau.
De ce point de vue, le prochain projet de loi de finances prévoit une fois de plus de piétiner le principe, que je croyais sacro-saint, selon lequel « l’eau paye l’eau » et qui est cher à notre ami Rémy Pointereau. Cela pénalisera inévitablement, par contrecoup, les collectivités locales et les syndicats avec qui les agences de l’eau travaillent, ce qui réduira par conséquent leurs capacités d’intervention.
S’agissant des contours de la compétence GEMAPI, relative à la gestion des milieux aquatiques et à la prévention des inondations, il conviendrait que le Gouvernement clarifie sa position sur le traitement des eaux pluviales. Selon le Conseil d’État et aux termes d’une récente circulaire, cette compétence relève du bloc GEMAPI, alors que le code général des collectivités territoriales prévoit le contraire.
Malgré ces perspectives difficiles, je me réjouis que le Sénat prenne ses responsabilités et que nous puissions adopter cette proposition de loi. J’espère que le Gouvernement assumera ses responsabilités et usera des outils dont lui seul dispose. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand.
M. Frédéric Marchand. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je suis ravi, moi qui suis aussi un jeune élu, de prendre la parole dans cet hémicycle pour défendre un texte réunissant presque toutes les formations politiques du Sénat. Il s’agit là, vous en conviendrez, d’une situation qu’il convient d’apprécier à sa juste valeur.
Ce texte, empreint de pragmatisme et de bon sens, formule une solution concrète à des difficultés administratives réelles que connaissent nos communes partout en France, en métropole, mais aussi chez nos amis ultramarins.
Au nom du groupe La République En Marche, je salue l’objectif de simplification porté par cette proposition de loi transpartisane, l’intense travail d’évaluation et de concertation réalisé ces derniers mois, ainsi que l’investissement des rédacteurs du texte et de notre rapporteur.
Vous le savez, la simplification est un combat de tous les jours, et ce sujet a d’ailleurs été évoqué lors du débat organisé hier ici même sur l’aménagement du territoire. Je suis persuadé que nous y reviendrons encore et encore. Cette simplification s’inscrit pleinement dans le cap fixé par le Président de la République lors de la Conférence nationale des territoires et par le Gouvernement. Nul doute qu’elle sera d’ailleurs, parmi d’autres sujets, au cœur du congrès de l’Association des maires de France de novembre prochain.
Avec cette proposition de loi que nous allons adopter ce soir, nous nous engageons bien volontiers sur cette voie et faisons ainsi figure de premiers de cordée.
J’en profite pour me féliciter également du partenariat signé entre le Sénat et le Conseil national d’évaluation des normes en 2016.
Partie du réel de nos territoires et de nos communes, cette proposition de loi permet de lutter concrètement contre une insécurité financière vécue – cela a été rappelé – par un grand nombre d’élus locaux. Cette mesure de bon sens supprimera le risque de majoration indue lié à l’obligation de transmettre des informations à une échéance trop précoce et réduira une charge administrative non négligeable pesant sur nos communes. Au plus proche des problématiques des territoires, le Sénat est ici pleinement dans son rôle de représentant des collectivités territoriales, et j’en suis heureux.
Je formule deux souhaits : d’abord, que la proposition de loi que nous allons adopter soit rapidement inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ; ensuite, que ce texte transpartisan en faveur de la simplification pour nos territoires et nos entreprises soit le premier d’une longue liste. Nous devons partir du réel pour tendre vers un idéal : l’efficacité au service des politiques publiques et de nos concitoyens.
Pour toutes ces raisons, le groupe La République En Marche votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la présente proposition de loi n’est pas seulement consensuelle ; elle est aussi technique. C’est un texte important, et je ne dis cela ni parce qu’il est inscrit dans l’espace réservé du groupe Union Centriste, auquel j’appartiens, ni parce que son auteur est notre collègue Bernard Delcros, que je félicite.
Si ce texte est important, c’est parce que la méthode ayant présidé à sa genèse devrait inspirer l’ensemble de nos travaux : une véritable concertation, une réelle démarche de simplification et un résultat transpartisan, le tout sous la houlette de notre délégation aux collectivités territoriales. C’est cela qui devrait être la marque de fabrique du Sénat.
Je ne m’étendrai pas longuement sur le fond. L’objet du texte a en effet été très bien exposé par notre collègue Pierre Médevielle, dont je salue, au nom du groupe Union Centriste, l’excellence du travail malgré des délais très contraints.
La proposition de loi simplifie les rapports entre les collectivités et les agences de l’eau dans le cadre de la redevance sur les prélèvements en eau, et ce sur deux points.
D’une part, pour déterminer le montant de la redevance due au titre d’une année, chaque collectivité doit aujourd’hui transmettre avant le 1er avril de l’année suivante les volumes prélevés, ainsi que plusieurs indicateurs de performance. Cette déclaration avant le 1er avril pose des difficultés à bon nombre de collectivités qui ne disposent pas de données stabilisées aussi tôt dans l’année. Pour remédier à ces difficultés, la proposition de loi prévoit que la transmission des indicateurs de performance pour une année n et l’application éventuelle de la majoration seront dorénavant effectuées non pas l’année n+1, mais l’année n+2.
D’autre part, le texte prévoit le préremplissage de la déclaration effectuée auprès de l’agence de l’eau avant le 1er avril.
Ces mesures constituent de véritables simplifications et sont souhaitées par toutes les parties prenantes.
Pour autant, lorsque l’on parle d’eau, tout n’est pas aussi consensuel.
Je rappelle le problème de la compétence « eau et assainissement », que la loi NOTRe fait remonter obligatoirement à l’intercommunalité d’ici à 2020.
Il y a aussi la question, évoquée par François Bonhomme, du véritable siphonnage du budget des agences de l’eau organisé par l’État depuis 2014. La première ponction de 210 millions d’euros devait être exceptionnelle. Elle a ensuite été fixée à 175 millions et poursuivie dans les budgets 2015, 2016 et 2017. La voici gravée dans le marbre dans le projet de loi de finances pour 2018 sous la forme d’un « plafond mordant », l’État s’autorisant à prélever les recettes dépassant le seuil de 2,1 milliards d’euros. Le prélèvement devrait atteindre de 175 millions à 200 millions d’euros.
Parallèlement, les agences de l’eau voient leurs compétences élargies au financement de l’Agence française pour la biodiversité pour 200 millions d’euros et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage pour 85 millions d’euros.
Au total, l’État va donc ponctionner près de 460 millions d’euros aux agences de l’eau, soit 20 % de leur budget. On est bien loin du principe « l’eau paye l’eau » !
Comme l’a fait remarquer l’Association des maires de France, « ces prélèvements se font au détriment direct des collectivités » puisque les agences de l’eau subventionnent les projets locaux, et cela à l’heure où il faut en plus mettre en œuvre la compétence GEMAPI !
Il ne s’agit pas là seulement de défendre les collectivités. Demain, les agences de l’eau auront-elles les moyens de remplir les obligations européennes en la matière ? Pourra-t-on satisfaire aux exigences de la directive-cadre sur l’eau qui impose à la France d’améliorer l’état écologique de nos masses d’eau ?
Madame la secrétaire d’État, la réponse à ces questions n’est pas des plus fluides... Néanmoins, le groupe Union Centriste votera la proposition de loi. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, dernier orateur inscrit, qui dispose seulement de deux petites minutes.
M. Gérard Longuet. Monsieur le président, ces deux minutes me suffiront largement, car mon objectif est simplement de rappeler à Mme la secrétaire d’État que les présidents des deux groupes majoritaires du Sénat ont déposé le 11 janvier 2017 une proposition de loi tendant à renoncer au caractère obligatoire du transfert de la compétence « eau et assainissement » aux intercommunalités. De mémoire, ce texte a été adopté par le Sénat le 23 février, sans scrutin public, mais sans opposition, c’est-à-dire à une très large majorité, car il répondait à une demande forte exprimée par les élus locaux.
Or, madame la secrétaire d'État, la nouvelle Assemblée nationale a voté le 12 octobre dernier une motion de renvoi en commission, ce qui est assez rare s’agissant d’une proposition parlementaire.
J’aimerais savoir si vous avez l’intention, comme l’article 39 de la Constitution vous le permet, d’utiliser votre maîtrise de l’ordre du jour pour sortir la proposition de loi de cet emprisonnement, de cet encellulement, afin qu’elle soit débattue de nouveau par l’Assemblée nationale.
Je comprends très bien qu’une assemblée composée en large majorité de nouveaux élus se soit donné le temps de la réflexion – ce n’est pas choquant. Mais le temps de la réflexion sur un sujet relativement simple a ses limites, et le Gouvernement a la faculté d’inscrire à l’ordre du jour une proposition de loi.
Je souhaite donc savoir, madame la secrétaire d’État, si telle est l’intention du Gouvernement. Mes deux minutes sont maintenant épuisées ! (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État. Monsieur Longuet, la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, ou loi MAPTAM, a créé une compétence ciblée et obligatoire relative à la GEMAPI, la gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations.
Cette compétence vise à mieux articuler l’aménagement du territoire et l’urbanisme avec la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations. Elle recouvre des missions d’aménagement des bassins, de gestion, de restauration des cours d’eau et des zones humides, ainsi que d’autres missions que je ne vais pas détailler ici.
La création de la compétence GEMAPI n’a pas donné lieu à l’attribution de nouvelles missions par rapport à celles qui étaient précédemment exercées de manière partagée par tous les échelons de collectivités territoriales.
La compétence GEMAPI regroupe donc au sein d’une même compétence plusieurs missions préexistantes et l’attribue, à titre obligatoire, aux EPCI à fiscalité propre.
M. François Bonhomme. C’est bien le problème !
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État. Par conséquent, le mécanisme de compensation des charges transférées entre l’État et les collectivités territoriales ne s’applique pas en matière de GEMAPI.
Pour l’exercice de cette compétence, une taxe facultative, prévue par l’article 1530 bis du code général des impôts, plafonnée à 40 euros par habitant résidant dans le périmètre et exclusivement affectée aux dépenses liées à son exercice, a été créée.
Le Gouvernement n’entend pas remettre en question cette compétence.
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi tendant à simplifier certaines obligations applicables aux collectivités territoriales dans le domaine du service public d’eau potable
Article 1er
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa de l’article L. 213-11, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau mentionnée à l’article L. 213-10-9 pour l’usage “alimentation en eau potable”, les éléments pris en compte pour l’application de la majoration prévue au V du même article L. 213-10-9 sont déclarés avant le 1er avril de la seconde année suivant celle au cours de laquelle ces éléments ont été constatés. » ;
2° Aux dixième et onzième alinéas du V de l’article L. 213-10-9, après le mot : « année », sont insérés les mots : « suivant celle ».
M. le président. L'amendement n° 2 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Les éléments cités à l’alinéa précédent sont reportés chaque année par les agences de l’eau dans la déclaration relative à cette redevance sur la base des éléments préalablement transmis au système d’information prévu à l’article L. 131-9 en application de l’article L. 2224-5 du code général des collectivités territoriales. » ;
…° Au deuxième alinéa de l’article L. 213-11, après la référence : « L. 213-10-11 », sont insérés les mots : « du présent code » ;
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Brune Poirson, secrétaire d'État. Le présent amendement, de nature rédactionnelle, vise à assurer une meilleure lisibilité des dispositions prévues aux deux premiers articles en les regroupant dans le chapitre du code de l’environnement dédié aux redevances des agences de l’eau, support qui semble mieux approprié que le code général des collectivités territoriales.