Mme Françoise Gatel, rapporteur. Cet amendement tend à réintroduire un article qui avait pour objet d’obliger les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les consulats de France à l’étranger à mettre à la disposition des parlementaires des moyens pour accueillir leurs électeurs.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement à la quasi-unanimité, considérant que les sénateurs et députés ont déjà des permanences, financées à partir de l’IRFM. Il ne nous a donc pas semblé utile d’instaurer des charges supplémentaires pour les collectivités territoriales. En outre, des accords de principe peuvent déjà être passés avec les consulats pour la mise à disposition de locaux.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Kanner, ministre. Je prendrai l’exemple de mes deux départements de cœur : le Nord compte onze sénateurs et vingt et un députés ; le Pas-de-Calais compte sept sénateurs et douze députés. Imaginez la difficulté que l’adoption d’une telle mesure poserait dans ces départements très peuplés.
En outre, sur le plan juridique, une telle mesure risquerait d’entraîner une rupture d’égalité entre les candidats aux élections politiques si l’avantage que constitue la mise à disposition de moyens ou de locaux lors des campagnes électorales n’était pas équivalent pour tous.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour explication de vote.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. J’ai bien entendu les arguments de la commission et du Gouvernement, mais ils ne concernent absolument pas les Français de l’étranger, bien au contraire.
Je le répète, les élus des Français de l’étranger ont des circonscriptions extrêmement vastes. L’adoption de cet amendement permettrait de leur offrir les moyens, sans aucun surcoût, de répondre à l’attente de leurs concitoyens. La circonscription d’un député, par exemple, peut couvrir quarante-neuf pays. Les sénateurs et les députés ne peuvent absolument pas louer une permanence avec leur IRFM dans chaque pays.
Les consulats pourraient permettre de renforcer le lien entre les expatriés et les élus, ce qui serait un moyen d’éviter l’abstention galopante. Sachez que beaucoup de Français de l’étranger ignorent le nom de leurs élus consulaires, parce que ces circonscriptions sont bien trop grandes.
J’aurais presque envie de rectifier mon amendement pour ne viser que les Français de l’étranger ; je sais néanmoins que le sort ne lui serait pas favorable.
M. Roger Karoutchi. Pas forcément…
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 349 rectifié ter.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. En conséquence, l’article 15 undecies demeure supprimé.
Chapitre II
Accompagner les jeunes dans leur parcours vers l’autonomie
Article 16 A
(Supprimé)
Article 16
I. – (Supprimé)
II. – La section 2 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la sixième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° L’article L. 6111-3 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
a bis) Le troisième alinéa est complété par les mots : « et garantissent à tous les jeunes l’accès à une information généraliste, objective, fiable et de qualité ayant trait à tous les aspects de leur vie quotidienne » ;
b) Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – La région coordonne également, de manière complémentaire avec le service public régional de l’orientation et sous réserve des missions de l’État, les initiatives des structures d’information des jeunes labellisées par l’État dans des conditions prévues par décret. Ces structures visent à garantir à tous les jeunes l’accès à une information généraliste, objective, fiable et de qualité touchant tous les domaines de leur vie quotidienne. » ;
2° L’article L. 6111-5 est ainsi modifié :
a) Le 2° devient le 3° ;
b) Le 2° est ainsi rétabli :
« 2° S’agissant des jeunes de seize ans à trente ans, de disposer d’une information sur l’accès aux droits sociaux et aux loisirs ; ».
III. – (Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 248, présenté par Mme Prunaud, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Rétablir le III dans la rédaction suivante :
III. – Les politiques publiques en faveur de la jeunesse menées par l’État, les régions, les départements, les communes et les collectivités territoriales à statut particulier font l’objet d’un processus annuel de dialogue structuré entre les jeunes, les représentants de la société civile et les pouvoirs publics coordonnés au sein de la conférence territoriale de l’action publique mentionnée à l’article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales. Ce débat porte notamment sur l’établissement d’orientations stratégiques et sur l’articulation et la coordination de ces stratégies entre les différents niveaux de collectivités territoriales et l’État.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Cet amendement vise à réintroduire, dans le cadre des conférences territoriales de l’action publique, la phase de concertation entre chaque échelon territorial et les associations de jeunesse.
L’organisation de ces débats, supprimée par la commission spéciale, représente un enjeu fondamental, tant pour les élus territoriaux que pour les organisations. Cet objectif de concertation est d’autant plus important qu’un nombre toujours plus élevé de Français ne croient plus en la politique – nous avons abordé ce thème précédemment – et considèrent souvent les élus comme une caste isolée des citoyens, peu en phase avec leurs aspirations. Si ce dialogue n’est certes pas la solution idéale pour le rapprochement entre citoyens et politiques, il reste à même d’y contribuer.
Par ailleurs, ces discussions constituent un atout pour les élus locaux dans la poursuite d’une politique locale dédiée, en ce qu’elles permettent la réunion en un lieu et en un temps donnés de toutes les organisations représentatives de jeunesse.
Nous ne pouvons que regretter la suppression de cette disposition, compte tenu du contexte politique difficile, dans un projet de loi fondé sur l’ambition de rénover, du moins de renforcer notre modèle citoyen. En effet, la méfiance que ressentent de plus en plus les citoyens, particulièrement les jeunes, à l’égard des élus pourrait se trouver amoindrie par la multiplication de ces dispositifs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Dans la loi NOTRe, que nous avons adoptée voilà quelque temps, nous avons prévu une conférence territoriale de l’action publique. Ne complexifions pas le dispositif. Il nous semble préférable de laisser les collectivités territoriales et l’État déterminer les instances et les modalités de dialogue. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Kanner, ministre. Le Gouvernement est favorable, par principe, au dialogue à tous les niveaux entre les jeunes et les pouvoirs publics. Cet amendement va dans ce sens. Toutefois, comme à l’Assemblée nationale, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée, car l’absence de définition juridique du dialogue structuré mérite, disons, plus de recherche.
M. le président. Je mets aux voix l'article 16.
(L'article 16 est adopté.)
Article 16 bis
La section 2 du chapitre II du titre unique du livre Ier de la première partie du code général des collectivités territoriales est complétée par un article L. 1112-22-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1112-22-1. – Une collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale peut créer un conseil de jeunes pour émettre un avis sur les décisions relevant notamment de la politique de jeunesse. Cette instance peut formuler des propositions d’actions.
« Elle est composée de jeunes de moins de vingt-trois ans domiciliés sur le territoire de la collectivité ou de l’établissement ou qui suivent un enseignement annuel de niveau secondaire ou post-baccalauréat dans un établissement d’enseignement situé sur ce même territoire.
« Ses modalités de fonctionnement et sa composition sont fixées par délibération de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale. »
M. le président. L'amendement n° 3 rectifié quater, présenté par M. Kaltenbach, Mme Yonnet, MM. Marie, Patriat et Sutour, Mme Khiari, M. Botrel, Mmes Féret et Tocqueville, M. Courteau et Mme Bataille, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le chapitre II du titre III du livre Ier de la quatrième partie du code général des collectivités territoriales est complété par une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Le conseil régional des jeunes
« Art. L. 4132-… – Un conseil régional des jeunes est instauré dans chaque région.
« Le conseil régional des jeunes fait connaître au conseil régional ses propositions pour la jeunesse dans les domaines qui relèvent de la compétence des régions. Il formule des projets de délibérations qui sont mis à l’ordre du jour du conseil régional.
« Le conseil régional des jeunes est composé de membres tirés au sort pour deux ans sur une liste de candidats volontaires âgés de quinze à vingt-trois ans. Leur nombre correspond aux deux tiers du nombre de conseillers régionaux.
« Ses membres ne sont pas rémunérés et aucun frais lié au fonctionnement du conseil régional des jeunes ne peut être pris en charge par une personne publique.
« Un décret fixe les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Philippe Kaltenbach.
M. Philippe Kaltenbach. Cet amendement vise à rendre obligatoire dans les treize grandes régions un conseil régional des jeunes. Composé de membres âgés de quinze à vingt-trois ans au moment de l’élection, désignés par tirage au sort parmi les candidats, son rôle consisterait à formuler des propositions sur les politiques régionales.
Pourquoi instaurer une telle instance dans le cadre des conseils régionaux ? Parce que les régions sont des collectivités importantes qui mènent, entre autres politiques, des actions directement tournées vers la jeunesse. Je pense à l’apprentissage, aux lycées, à la vie universitaire ou aux politiques en matière de transports.
L’idée est de favoriser la participation des jeunes à la vie politique. Sur toutes les travées, nous constatons en effet une désaffection très importante de la jeunesse à l’égard de la vie politique. Lors du premier tour des élections régionales, 75 % des jeunes de dix-huit à vingt-quatre ans se sont malheureusement abstenus.
Nous souhaitons tous que les jeunes s’impliquent dans la vie politique locale. En rendant obligatoire la création de ces conseils régionaux des jeunes, nous apporterons notre pierre à l’édifice. Ce ne sera pas la solution miracle, mais, ayant été vice-président de la région d’Île-de-France, qui a créé un conseil régional des jeunes, j’ai pu constater que cela avait favorisé la participation de jeunes à la vie politique régionale.
J’ai bien noté que le projet de loi comprend un dispositif visant à rappeler que les collectivités territoriales peuvent créer des conseils de jeunes. C’est en effet déjà le cas. Cette incitation est intéressante, mais il faut aller plus loin et prévoir, pour certaines grandes collectivités – les régions au travers de cet amendement et les communes de plus de 100 000 habitants dans un autre amendement –, de rendre ces conseils des jeunes obligatoires. Les jeunes doivent entendre ce message : nous souhaitons leur donner la parole, entendre leurs propositions ; nous leur faisons confiance et voulons les associer pleinement aux politiques menées par les collectivités territoriales.
Certains ont fait valoir qu’il ne fallait pas imposer une telle mesure, en opposant la libre administration des collectivités locales. Or je rappelle que nous avons oublié la libre administration des collectivités locales lorsque nous avons imposé des conseils de quartier aux communes de plus de 80 000 habitants ou des conseils de développement durable aux agglomérations de plus de 100 000 habitants. Par conséquent, sur des sujets aussi importants que la vie de quartier ou le développement durable, on a imposé aux collectivités locales la création de conseils permettant l’expression de citoyens et leur association.
M. le président. Mon cher collègue, il vous faut conclure !
M. Philippe Kaltenbach. Pour les jeunes, c’est au moins aussi important. Le Sénat s’honorerait de créer des conseils régionaux des jeunes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Je ne pense pas déshonorer le Sénat en émettant un avis défavorable, d’autant que votre intervention contient déjà ma réponse : tout cela est déjà possible. Or je crois plus à la conviction et à l’adhésion qu’à l’obligation.
En outre, si cette disposition est si utile, pourquoi ne figure-t-elle pas dans la loi NOTRe ?
Enfin, cher collègue, vous ouvririez la voie à une longue liste de conseils : conseil de sages, conseil de jeunes… Au final, la démocratie participative risquerait de prendre plus d’importance que la démocratie représentative. Voilà pourquoi je dis : prudence !
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi « Égalité et citoyenneté ». Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Kanner, ministre. Je n’opposerai pas démocratie participative et démocratie représentative, madame la rapporteur, car les deux sont complémentaires si l’on veut que nos concitoyens s’engagent dans le débat public. Je partage néanmoins votre réserve sur l’obligation imposée aux collectivités territoriales, en l’occurrence les régions, de créer des conseils des jeunes.
Ces conseils présentent une valeur éducative, car c’est le moyen de « mettre dans le coup » les jeunes – permettez-moi l’expression –, de les aider à entrer dans le débat démocratique. Notre expérience d’élu local nous montre que leur réussite repose en grande partie sur la volonté politique de celles et de ceux qui président aux destinées de ces collectivités ; leur installation et leur animation doivent s’inscrire dans une logique volontariste. Nombre de régions sont déjà engagées dans cette voie ; il convient de les encourager et non de les forcer. Créer une obligation n’est pas le souhait du Gouvernement et risquerait, je le crois, de produire des effets contraires à ce que nous visons.
M. Gérard Longuet. Très bien !
M. Patrick Kanner, ministre. En conséquence, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Kaltenbach, l'amendement n° 3 rectifié quater est-il maintenu ?
M. Philippe Kaltenbach. Oui, je le maintiens, parce qu’il faut aller plus loin que la simple incitation.
Je ne peux pas adhérer au discours que je viens d’entendre. Les conseils de quartier sont obligatoires dans les communes de plus de 80 000 habitants et les conseils de développement durable dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants. En cherchant bien, je suis sûr qu’on trouvera encore d’autres conseils dont la création a été rendue obligatoire parce que s’il s’était simplement agi de s’en remettre au volontariat l’effet n’aurait pas été le même.
Pourquoi ces conseils seraient-ils obligatoires dans certains cas mais pas pour les jeunes, qui représentent l’avenir et dont tout le monde dit qu’il est essentiel qu’ils participent à la vie locale ? En obligeant les collectivités importantes à créer des conseils des jeunes, on enverrait un message clair en direction des jeunes, pour leur témoigner notre confiance, leur dire que leur avis et leur participation sont importants pour nous.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.
M. Yves Détraigne. Je voudrais donner un argument contre la généralisation de ces conseils.
De tels conseils peuvent être créés sur la base du volontariat. D’ailleurs, nombre de nos communes ont des conseils municipaux de jeunes. Mais si on les généralise, si l’on impose leur création, je crains qu’on n’affaiblisse la légitimité du conseil municipal, pour ne prendre que l’exemple de la commune.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Absolument !
M. Yves Détraigne. On laisserait à penser que le conseil municipal n’est pas représentatif de l’ensemble de la population et que les personnes âgées, les jeunes ou les chefs d’entreprise doivent donner leur avis sur les questions qui les concernent. Cette solution constituerait plus à mes yeux une remise en cause de la démocratie telle qu’elle fonctionne aujourd’hui dans notre pays qu’un encouragement.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Tout à fait !
M. Yves Détraigne. J’y suis donc tout à fait défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié quater.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 691, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer le mot :
vingt-trois
par le mot :
trente
La parole est à M. le ministre.
M. Patrick Kanner, ministre. Comme aurait pu le dire M. Longuet, la jeunesse n’est pas un bien durable… C’est pourquoi je vous propose de fixer à trente ans l’âge maximum pour participer à un conseil de jeunes, âge qui a été ramené à vingt-trois ans par la commission spéciale.
Je comprends la raison qui pousse à limiter à dix-huit ans ou à vingt-trois ans l’âge auquel on peut participer à un conseil de jeunes. Dans un monde idéal, les conseils de jeunes seraient l’espace d’attente de jeunes mineurs avant – pourquoi pas ? – de pouvoir progressivement les amener à des fonctions électives. Mais, dans le monde qui est le nôtre, accéder à de telles fonctions n’est pas aisé pour eux. Il nous revient donc d’encourager la participation des jeunes à la vie démocratique.
En outre, une limite d’âge trop basse exclurait, de fait, les expériences intéressantes menées en France de manière volontariste par diverses collectivités.
Trente ans, c’est, nous semble-t-il, la limite d’âge optimale pour participer à ces conseils. Ce n’est pas une lubie du Gouvernement : c’est le seuil retenu non seulement par l’INSEE, mais aussi par l’Union européenne pour désigner la jeunesse. Nous ne faisons donc que nous mettre en phase avec la pratique habituelle, qui tient compte du vieillissement démographique. Cela nous laisse plein d’espoir pour l’avenir.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Je ne pense pas qu’un conseil de jeunes soit une salle d’attente pour d’autres fonctions. Si nous avons choisi le seuil de vingt-trois ans, c’est par cohérence avec la mission éducative de ces conseils, que vous avez vous-même évoquée. Il s’agit de permettre à des jeunes qui n’ont pas le droit de vote et qui ne sont pas éligibles de pouvoir s’engager dans la vie collective.
Pourquoi fixer l’âge à vingt-trois ans ? Tout simplement parce qu’un jeune de vingt-sept ou vingt-huit ans a le droit de vote depuis longtemps et aura déjà eu l’occasion de s’engager.
Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. René Danesi, pour explication de vote.
M. René Danesi. L’article 16 bis du projet de loi d’origine prévoyait la possibilité pour les collectivités territoriales et les EPCI de créer un conseil de jeunes comprenant des représentants âgés de moins de trente ans. J’ai présenté un amendement en commission visant à abaisser cet âge à vingt-trois ans.
Cet amendement a été adopté à l’unanimité, selon le raisonnement suivant : un conseil de jeunes se justifie s’il est un espace de discussion et de concertation avec une population qui ne peut pas s’exprimer par la voie classique de l’élection. En toute logique, il s’agit des personnes âgées de moins de dix-huit ans le jour de l’élection. Au terme du mandat auquel ces jeunes n’auront pas pu accéder, ils ont alors au maximum vingt-trois ans révolus.
Aller au-delà de cet âge reviendrait à reconnaître une qualité spécifique aux jeunes qui conduirait à leur « surreprésentation ». Dans ce cas, il faudrait également prévoir un conseil des aînés obligatoire pour bénéficier de leur sagesse, de même qu’un conseil des actifs pour leurs capacités contributives, etc.
Fixer l’âge limite à vingt-trois ans vise à permettre au conseil de jeunes de représenter ceux qui ne peuvent pas encore se présenter au suffrage universel et ceux qui n’ont pas pu se présenter aux dernières élections. Le conseil de jeunes est et doit rester une école de la citoyenneté et une incitation à s’engager pour le bien commun.
Je constate que le Gouvernement persiste et signe avec un amendement qui reprend l’âge limite de trente ans avec des arguments pour le moins curieux, tels que les critères de l’INSEE. Je ne voterai donc pas cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi « Égalité et citoyenneté ». Actuellement, une exposition très intéressante à Paris célèbre l’œuvre d’Hergé, ce dessinateur belge. Je rappelle que les albums de Tintin s’adressent aux jeunes de sept à soixante-dix-sept ans. Adoptons un « amendement Tintin », et tout le monde sera content ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 486, présenté par Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L’organe délibérant veille à ce que l’écart entre le nombre des hommes et des femmes siégeant dans ce conseil ne soit pas supérieur à un et que sa composition reflète la population visée dans sa diversité de catégories socioprofessionnelles et de lieux de résidence.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. La concrétisation par la loi de la possibilité pour les collectivités territoriales d’instaurer un conseil de jeunes est un élément appréciable. Elle laisse espérer une multiplication de ces initiatives, pour le moment encore trop rares, permettant d’impliquer davantage les jeunes dans les affaires locales et de les éduquer à la citoyenneté.
Il semble toutefois essentiel de formaliser dans la loi que ces conseils ont vocation à représenter la jeunesse dans toute sa diversité. Cet amendement a donc pour objet de prendre en compte dans leur composition les critères de la catégorie socioprofessionnelle et du lieu de résidence, qui sont de nature à permettre une représentation équitable de la jeunesse dans sa diversité. Il s’agit, par exemple, de garantir une représentation équitable aux jeunes sans activité, résidant le plus souvent en banlieue, voire en milieu périurbain ou rural. Les deux critères proposés se recoupent en effet largement.
Si l’on souhaite faire de ces conseils un levier d’accès à une citoyenneté pleine et entière, il faut s’assurer qu’ils ne soient pas l’apanage de ceux qui, résidant souvent dans les grands centres urbains, disposent du capital culturel et sont déjà sensibilisés au débat public.
Au-delà d’une exigence de représentativité, c’est aussi un impératif de cohérence qui justifie cet amendement. La politique de la jeunesse est indissociable des problématiques d’égalité des chances et d’insertion. Un conseil qui a vocation à s’exprimer en la matière doit donc représenter la population visée dans sa diversité.
Enfin, la problématique de l’égalité des sexes ne doit pas être laissée de côté, non seulement parce qu’elle est voisine de celles d’égale représentation, d’égalité des chances et d’insertion, mais aussi parce qu’elle est, légitimement, une préoccupation majeure de nos sociétés modernes. C’est pourquoi cet amendement vise également à introduire une exigence de parité dans la composition de ces conseils.
Par la diversité et la parité, cet amendement tend donc non seulement à rendre ces conseils représentatifs de la jeunesse, mais aussi à leur permettre de jouer efficacement leur rôle de levier d’accès à la citoyenneté et de conseiller des élus locaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Nous sommes aussi très attentifs à la parité, mon cher collègue, puisque, vous l’aurez remarqué, cet après-midi, nous étions trois femmes au banc de la commission.
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission spéciale. Avant que je n’arrive !
Mme Françoise Gatel, rapporteur. En fait, nous devrions peut-être présenter nos excuses, car nous n’avons pas tout à fait respecté la parité. (Sourires.)
Cela étant, votre amendement me gêne beaucoup. Je rappelle que ces conseils sont composés de jeunes qui sont volontaires. Imaginez les difficultés dans lesquelles vous allez mettre les collectivités si vous leur imposez des quotas. Nous sommes d’accord pour encourager les collectivités à mettre en place ces structures, mais nous préférons les laisser libres de les composer à leur souhait.
L’adoption de cet amendement aboutirait à créer des contraintes très difficiles à mettre en œuvre. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Patrick Kanner, ministre. Le Gouvernement est, comme vous, monsieur le sénateur, attentif à la mixité sociale et à la parité des instances de dialogue. Pour autant, une telle mesure pourrait être contre-productive. En tout cas, elle est prématurée. Il faut avant tout convaincre.
Trop de contraintes risquent de décourager les collectivités locales à mettre en place ce type de structure. Il faut d’abord expérimenter, développer les structures, sans forcer le trait.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement n’est pas favorable à votre amendement.
M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.
M. Joël Guerriau. J’ai l’honneur d’être maire d’une ville qui a été la première, en région des Pays de la Loire, à instaurer un conseil de jeunes, plus tard élargi à d’autres tranches d’âges. Or, même en laissant la porte largement ouverte à toutes les bonnes volontés, je me suis rendu compte combien il était difficile de mobiliser les jeunes au quotidien et de les intéresser à des dossiers qui n’ont rien à voir avec ce qui les préoccupe dans leur vie culturelle, sportive et leurs choix de vie. C’est pourquoi il faut être très souple et veiller à ne pas être péremptoires en posant des règles trop strictes.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Je voudrais juste dire quelques mots dans le même esprit.
Nous qui sommes les représentants des collectivités territoriales, nous rencontrons tous les jours les maires de nos départements. Or que nous demandent-ils ? Ils nous demandent de la simplicité, d’arrêter de complexifier les choses et de les embêter.
Je comprends l’esprit de cet amendement, qui vise à favoriser la mixité, mais cette mesure serait extrêmement complexe à mettre en œuvre. Si l’une des deux chambres du Parlement pouvait être assez sympathique pour laisser les maires tranquilles et arrêter de leur complexifier la vie, c’est bien la nôtre !