Mme Christine Prunaud. Notre amendement a un objet semblable à celui de Mme Benbassa. Je confirme que la notion de demande telle que définie à l’article R. 733-16 est à prendre avec beaucoup de précautions ; nous la considérons pour notre part plutôt comme une restriction.
Je rappelle que la France a rendu une série d’ordonnances scandaleuses dans des dossiers dignes de foi, qui lui ont valu plusieurs sanctions de la Cour européenne des droits de l’homme. Il convient donc de souligner l’importance de l’oralité des débats dans la procédure devant la CNDA et le droit à un recours effectif en matière d’asile, garanti et protégé par le droit européen.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Ces amendements tendent à mettre un terme à la faculté qu’a la CNDA de statuer par ordonnance. Ils visent tout particulièrement les ordonnances dites « nouvelles », qui permettent à un magistrat désigné à cet effet de rejeter les recours ne présentant aucun élément sérieux susceptible de remettre en cause les motifs de la décision de l’OFPRA. Les dispositions de l’article R. 733-4 du CESEDA précisent pourtant que « l’ordonnance ne peut être prise qu’après que le requérant a été mis en mesure de prendre connaissance des pièces du dossier et après examen de l’affaire par un rapporteur ».
Ces ordonnances permettent à la Cour de ne pas perdre de temps sur des recours qui ont peu de chances, voire aucune, de prospérer. Il convient donc de conserver cette disposition extrêmement utile. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme George Pau-Langevin, ministre. Nous partageons bien évidemment la volonté des auteurs de ces amendements d’assurer toutes les garanties aux demandeurs d’asile. Précisément, l’idée est de trier les dossiers qui n’ont manifestement aucune chance de prospérer faute d’éléments sérieux et les autres, qui font l’objet d’un examen approfondi.
En l’espèce, la possibilité pour un magistrat d’écarter par ordonnance des procédures qui n’ont aucune chance de prospérer, dans certains cas à la suite d’un désistement, d’incompétence de la juridiction ou d’irrecevabilité manifeste, est une manière de gagner du temps pour examiner sérieusement les recours qui méritent de l’être.
Par conséquent, je ne peux être que défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 202, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 33 et 34
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. La CNDA juge en plein contentieux depuis l’arrêt Aldana Barrena du 8 janvier 1982 et a, depuis lors, refusé d’examiner les moyens dits « de légalité externe », en particulier sur les conditions d’instruction de l’OFPRA. Cependant, un revirement jurisprudentiel s’est récemment opéré par une série de décisions du Conseil d’État et de la CNDA qui a ouvert la possibilité d’une annulation lorsqu’une garantie essentielle d’examen n’a pas été respectée.
Le projet de loi limite les possibilités d’annulation aux seuls cas de l’absence d’examen particulier et de l’absence d’audition hors des cas prévus par la loi.
Or la réforme donne compétence à la Cour pour statuer sur la légalité de la mise en œuvre de la procédure accélérée décidée sur le constat de l’autorité administrative, sur les litiges liés à la mise en œuvre de la procédure adaptée, sur l’examen médical prévu par l’article L. 723-5, sur les conditions de l’audition et sur l’irrecevabilité des demandes de réfugiés dans un autre pays.
Limiter ainsi les possibilités d’annulation à quelques hypothèses conduit à réduire le caractère effectif du recours et, à notre connaissance, va à l’encontre de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne. Il nous semble qu’il serait plus simple de laisser à la CNDA, sous le contrôle du Conseil d’État, bien sûr, le soin de définir son office.
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :
Alinéa 33
Remplacer les mots :
l'office a pris cette décision sans procéder à un examen individuel de la demande ou en se dispensant, en dehors des cas prévus par la loi, d'un entretien personnel avec le demandeur
par les mots :
l’examen de la demande a été entaché d’un vice de procédure grave et qu'il ressort des pièces du dossier que ce vice de procédure a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé le demandeur d'une garantie
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Aux termes du projet de loi, la Cour ne peut annuler une décision de l’Office et lui renvoyer l’examen de la demande d’asile que lorsqu’elle juge que l’Office a pris cette décision sans procéder à un examen individuel de la demande ou en se dispensant, en dehors des cas prévus par la loi, d’un entretien personnel avec le demandeur.
Notre amendement vise à préciser, en conformité avec les jurisprudences du Conseil d’État et de la CNDA, notamment l’arrêt Danthony, que l’annulation de la décision du directeur général de l’Office et le renvoi de l’examen de la demande d’asile doivent advenir dans le cas où la méconnaissance d’une garantie essentielle d’examen a privé le demandeur d’une garantie.
Les garanties procédurales ne sont pas que celles qui touchent à la tenue d’un entretien personnel ou de l’examen individuel de la demande ; le respect du principe du contradictoire doit impérativement avoir été respecté.
Cet amendement vise ainsi très simplement à élargir la rédaction de cet article pour le rendre compatible avec l’exercice des droits du demandeur d’asile.
M. le président. L'amendement n° 132, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 33
Supprimer les mots :
, en dehors des cas prévus par la loi,
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Nous considérons que tous les demandeurs d’asile doivent bénéficier d’une chance d’être entendus par l’organe de détermination de la qualité de réfugié. En France, il s’agit de l’OFPRA.
Il est donc nécessaire que la CNDA puisse renvoyer devant l’OFPRA tout dossier de demande d’asile qui n’aurait pas fait l’objet d’un entretien personnalisé portant sur le fond de la demande.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Les amendements nos 202 et 16 tendent à supprimer ou à limiter l’encadrement des renvois de la CNDA à l’OFPRA. La Cour étant un juge de plein contentieux, elle ne peut annuler de décisions de l’OFPRA sans leur substituer sa propre décision, sauf dans des cas précis reconnus par la jurisprudence.
Le renvoi de la Cour vers l’Office contribuant à rallonger l’instruction des demandes d’asile, le projet de loi l’encadre dans le respect de cette jurisprudence. C'est la raison pour laquelle l’avis de la commission est défavorable sur ces deux amendements.
L’avis est également défavorable sur l’amendement n° 132, car la disposition du texte est conforme à la jurisprudence du Conseil d’État : la Cour « ne saurait, sans erreur de droit, enjoindre à titre de mesure d’instruction à l’Office de procéder à l’audition du demandeur d’asile ». Il s’agissait d’un cas dans lequel la CNDA avait statué alors même qu’il n’y avait pas eu d’entretien personnel au sein de l’OFPRA.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme George Pau-Langevin, ministre. L’amendement n° 202 a pour objet de supprimer tout encadrement et l’amendement n° 16 vise à élargir les possibilités de renvoi à l’OFPRA en cas de vice de procédure grave.
Nous ne pouvons pas être favorables à ces amendements.
Tout d’abord, le juge de l’asile est un juge de plein contentieux. Par conséquent, il ne contrôle pas la procédure suivie devant l’OFPRA, mais il lui appartient de juger directement du bien-fondé de la demande d’asile. Autrement dit, il substitue sa propre décision à celle de l’Office. La jurisprudence la plus récente du Conseil d’État vient de rappeler cet office du juge de l’asile et le présent projet de loi le consacre.
Ensuite, le projet de loi consacre la jurisprudence la plus récente du Conseil d’État et de la CNDA, qui n’admet l’annulation de la décision de l’OFPRA et le renvoi à l’Office qu’en cas de méconnaissance des garanties essentielles que sont l’examen particulier de chaque demande et l’entretien personnel mené avec le demandeur. Ainsi, le projet de loi encadre l’office du juge afin de circonscrire les possibilités de contrôle aux garanties essentielles déjà reconnues dans l’intérêt des demandeurs et d’une bonne administration de la justice. Ne pas enserrer les possibilités de renvoi des affaires de la CNDA à l’OFPRA aurait un impact très dommageable sur l’ensemble des délais de traitement de la demande d’asile.
Enfin, permettez-moi de relever que, si tout demandeur a droit à un recours effectif devant une juridiction contre une décision lui refusant l’asile, le droit de l’Union européenne et, en particulier, la directive Procédures de 2013 reconnaissent l’autonomie procédurale des États membres. Par conséquent, chaque État membre peut définir les voies de recours ouvertes contre les décisions en matière d’asile.
J’en viens à l’amendement n° 132, ayant pour objet de permettre à la Cour de renvoyer à l’OFPRA l’examen d’une demande dès lors, notamment, que celui-ci n’aurait pas mené un entretien personnel avec le demandeur. Mme Benbassa indique, à juste titre d'ailleurs, que tous les demandeurs devraient bénéficier d’un entretien.
Pour quelles raisons le Gouvernement n’est-il pas favorable à cet amendement ? Comme le permet la directive Procédures, le projet de loi généralise le principe de l’entretien personnel mais prévoit trois cas spécifiques dans lesquels l’OFPRA peut s’en dispenser : si l’Office s’apprête à prendre une décision reconnaissant la qualité de réfugié, ce qui est plutôt positif pour le demandeur ; si des raisons médicales interdisent de procéder à l’entretien ; et dans le cadre de l’examen préliminaire d’une demande de réexamen.
Ces cas sont strictement limités, autorisés par la directive et parfaitement légitimes. Il est donc normal que l’article 10 consacre la jurisprudence en la matière et qu’il prévoie l’annulation de la décision attaquée et le renvoi à l’Office, lorsque celui-ci s’est dispensé de mener un entretien personnel. Il serait donc incohérent de supprimer cette mention.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. La CNDA non seulement évalue la décision de l’OFPRA, mais peut aussi accorder une protection au demandeur. Elle a même le devoir de le faire si elle estime que celui-ci en a besoin sans en renvoyer, pour des raisons de procédure, la responsabilité à l’OFPRA. À défaut, cela reviendrait à nier complètement le rôle de la CNDA, qui est un juge de plein contentieux et qui a donc vocation à accorder une protection à un demandeur le plus rapidement possible, dès lors que la procédure devant l’OFPRA n’a pas permis de faire reconnaître ce droit. Voilà pourquoi il ne faut pas élargir les cas dans lesquels la CNDA peut renvoyer un dossier à l’OFPRA.
J’appelle aussi l’attention sur le fait qu’il est important que l’OFPRA tienne compte de la jurisprudence de la CNDA, afin de ne pas répéter les mêmes erreurs.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 199 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 43
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. 9-4.- Le bénéfice de l’aide juridictionnelle peut être demandé dans le délai de recours contentieux ou dans le délai d’un mois à compter de la réception par le requérant de l’avis de réception de son recours. » ;
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. Par cet amendement, nous souhaitons rétablir le texte adopté par l’Assemblée nationale et accorder un délai raisonnable aux demandeurs d’asile pour pouvoir bénéficier de l’aide juridictionnelle.
M. le président. L'amendement n° 236, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 43
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. 9-4. – Devant la Cour nationale du droit d'asile, le bénéfice de l’aide juridictionnelle est de plein droit, sauf si le recours est manifestement irrecevable. Si l’aide juridictionnelle est sollicitée en vue d’introduire le recours devant la cour, elle doit être demandée dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision de l’office. Dans le cas contraire, l'aide juridictionnelle peut être demandée lors de l’introduction du recours, exercé dans le délai. » ;
La parole est à Mme la ministre.
Mme George Pau-Langevin, ministre. Cet amendement vise à encadrer le délai dans lequel une demande d’aide juridictionnelle peut être présentée aux fins d’exercer un recours devant la CNDA. Je rappelle que le Gouvernement avait proposé, dans son texte initial, que l’aide juridictionnelle soit accordée de plein droit devant la CNDA.
Nous proposons de distinguer deux cas : si l’aide juridictionnelle est sollicitée en vue d’introduire le recours devant la CNDA, elle doit être demandée dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision de l’OFPRA ; si le requérant a pu former son recours, seul ou avec l’aide d’un conseil, l’aide juridictionnelle peut être demandée au plus tard lors de l’introduction du recours exercé dans le délai de recours contentieux.
Cet amendement apporte une clarification qui nous semble utile.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’adoption de l’amendement n° 199 rectifié supprimerait le bénéfice de plein droit de l’aide juridictionnelle pour le demandeur, ce que la commission n’estime pas souhaitable.
Quant à l’amendement du Gouvernement, il vise à réduire à quinze jours le délai pendant lequel la demande d’aide juridictionnelle doit être faite. La commission des lois souhaite maintenir le principe selon lequel la demande d’aide juridictionnelle peut être faite pendant la période du recours, lequel est d’un mois. L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l'amendement n° 199 rectifié ?
Mme George Pau-Langevin, ministre. Nous estimons que la demande d’aide juridictionnelle doit être formulée le plus rapidement possible. Par conséquent, nous ne sommes pas favorables à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 10 bis (nouveau)
Après l’article L. 512-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article L. 512-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 512-1-1 (nouveau). – Ne peut être invoqué devant le tribunal administratif saisi en application de l’article L. 512-1 un moyen fondé sur le risque encouru par l’étranger, en cas d’éloignement dans son pays d’origine, d’y voir sa vie ou sa liberté menacée ou d’y être soumis à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants si la Cour nationale du droit d’asile s’est préalablement prononcée définitivement sur une demande de protection et s’il n’est invoqué à l’appui de ce moyen aucun changement dans la situation personnelle ou dans le pays d’origine intervenu depuis que la Cour a statué. »
M. le président. L'amendement n° 71, présenté par M. Leconte, Mme Tasca, M. Sueur, Mme Jourda et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. L’amendement a pour objet de supprimer l’article 10 bis, introduit par la commission des lois, qui a pour objet de rendre inopérant le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 3 de la convention européenne des droits de l’homme devant le juge administratif de droit commun de l’éloignement, sauf exceptions.
La commission ayant finalement émis un avis favorable sur notre amendement, je limiterai mon argumentaire à trois points.
Premièrement, la disposition adoptée par la commission est partielle et donc inopérante, d’une part, parce qu’elle est limitée au tribunal administratif, ce qui exclut les cours administratives d’appel et le Conseil d’État, et aux mesures d’éloignement relevant du champ de l’article L. 512-1 du CESEDA et, d’autre part, parce que le dispositif prévu n’est pas cohérent avec les délais de jugement imposés au juge de l’éloignement par ce même article. Cela risque de rendre le dispositif inapplicable dès lors que l’obligation de quitter le territoire français et le jugement du tribunal administratif peuvent intervenir très rapidement après la décision négative de la CNDA.
Deuxièmement, le dispositif envisagé procède d’une confusion entre l’office du juge de l’asile, la CNDA, qui statue au regard des critères d’octroi de l’asile, et la protection résultant des exigences de l’article 3 de la convention européenne des droits de l’homme, lequel a un champ beaucoup plus large.
Troisièmement, la problématique d’une « discordance de jurisprudence » soulevée par le rapporteur doit être amplement relativisée.
Le juge administratif de droit commun de l’éloignement se fonde régulièrement, en pratique, sur ce qu’a jugé la CNDA pour apprécier le bien-fondé du moyen tiré de la violation de l’article 3 de la convention européenne des droits de l’homme. En tout état de cause, il peut en tenir compte, même s’il n’est pas lié par l’appréciation portée par la CNDA. De fait, les discordances d’appréciation entre le juge de droit commun et le juge de l’asile sont rares. En outre, dans le cas où, exceptionnellement, le juge de droit commun annule, pour violation de l’article 3 de la convention européenne des droits de l’homme, après un rejet de la CNDA, la décision fixant le pays de renvoi qui assortit l’obligation de quitter le territoire français, la jurisprudence du Conseil d’État prévoit l’articulation à faire entre cette annulation et l’office du juge de l’asile.
Une décision du juge de l’éloignement ne s’impose pas avec l’autorité absolue de la chose jugée à la CNDA, eu égard à ses compétences propres et à son office. En revanche, cette décision implique que la CNDA procède à un réexamen de l’ensemble des faits soumis à son appréciation. La cohérence entre les deux juges est donc déjà assurée par la jurisprudence. C'est la raison pour laquelle nous proposons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Sans surprise, puisque M. Leconte l’a déjà annoncé, l’avis est favorable. C’est l’examen de l’amendement de notre collègue en début de semaine qui nous a fait revenir sur la position que nous avions initialement adoptée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme George Pau-Langevin, ministre. Cet amendement nous paraît tout à fait fondé. Le Gouvernement y est favorable.
M. le président. En conséquence, l'article 10 bis est supprimé.
Chapitre IV
Dispositions relatives à l’accès à la procédure d’asile et à l’accueil des demandeurs
Article 11
(Non modifié)
L’intitulé du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigé : « Accès à la procédure et conditions d’accueil des demandeurs d’asile ». – (Adopté.)
Article 12
Le chapitre Ier du titre IV du livre VII du même code est ainsi rédigé :
« CHAPITRE IER
« Enregistrement de la demande d’asile
« Art. L. 741-1. – Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l’asile se présente en personne à l’autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou d’engagements identiques à ceux prévus par ledit règlement, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« L’enregistrement a lieu au plus tard trois jours ouvrés après la présentation de la demande à l’autorité administrative compétente. Toutefois ce délai peut être porté à dix jours ouvrés lorsqu’un nombre élevé d’étrangers demandent l’asile simultanément.
« L’étranger est tenu de coopérer avec l’autorité administrative compétente en vue d’établir son identité, sa ou ses nationalités, sa situation familiale, son parcours depuis son pays d’origine ainsi que, le cas échéant, ses demandes d’asile antérieures. Il présente tous documents d’identité ou de voyage dont il dispose.
« Lorsque l’enregistrement de sa demande d’asile a été effectué, l’étranger se voit remettre une attestation de demande d’asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d’État. La durée de validité de l’attestation est fixée par arrêté du ministre chargé de l’asile.
« La délivrance de cette attestation ne peut être refusée au motif que l’étranger est démuni des documents et visas mentionnés à l’article L. 211-1. Elle ne peut être refusée que dans les cas prévus à l’article L. 743-2.
« Cette attestation n’est pas délivrée à l’étranger qui demande l’asile à la frontière ou en rétention.
« Art. L. 741-2. – Lorsque l’examen de la demande d’asile relève de la compétence de la France, l’étranger introduit sa demande auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides dans un délai fixé par décret en Conseil d’État. L’autorité administrative compétente informe immédiatement l’office de l’enregistrement de la demande et de la remise de l’attestation de demande d’asile.
« L’office ne peut être saisi d’une demande d’asile que si celle-ci a été préalablement enregistrée par l’autorité administrative compétente et si l’attestation de demande d’asile a été remise à l’intéressé.
« Art. L. 741-3. – Lorsque la demande d’asile est présentée par un mineur sans représentant légal sur le territoire français, le procureur de la République, avisé immédiatement par l’autorité administrative, lui désigne sans délai un administrateur ad hoc. Celui-ci assiste le mineur et assure sa représentation dans le cadre des procédures administratives et juridictionnelles relatives à la demande d’asile.
« L’administrateur ad hoc est désigné par le procureur de la République compétent sur une liste de personnes morales ou physiques dont les modalités de constitution sont fixées par décret en Conseil d’État. Ce décret précise également les conditions de leur indemnisation.
« La mission de l’administrateur ad hoc prend fin dès le prononcé d’une mesure de tutelle.
« Le président du conseil départemental est immédiatement informé, en application de l’article L. 226-2-1 du code de l’action sociale et des familles, afin de lui permettre d’évaluer la situation du mineur sans représentant légal et de déterminer les actions de protection et d’aide dont ce mineur a besoin.
« Art. L. 741-4 (nouveau). – Dès que possible après la présentation d’une demande d’asile par un mineur non accompagné, l’autorité administrative procède à la recherche des membres de sa famille. Dans les cas où la vie ou l’intégrité physique d’un mineur ou de ses parents proches pourraient être menacées, cette recherche est menée de manière confidentielle. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 36 rectifié bis est présenté par Mme Létard, MM. Guerriau et Bonnecarrère, Mme Loisier, MM. Delahaye, Médevielle, Longeot, L. Hervé et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 158 est présenté par M. Leconte, Mme Tasca, M. Sueur, Mme Jourda et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
sans condition préalable de domiciliation
La parole est à Mme Valérie Létard, pour présenter l’amendement n° 36 rectifié bis.
Mme Valérie Létard. La question d’une condition préalable de domiciliation a fait l’objet de nombreux débats dans le cadre de la concertation sur l’asile. À l’heure actuelle, l’obligation de disposer d’une adresse de domiciliation pour déposer un dossier d’admission au séjour en tant que demandeur d’asile est un facteur de ralentissement de l’entrée dans la procédure de l’asile.
La simplification apportée par l’article 12 est donc bienvenue pour supprimer certains « délais cachés », lesquels sont l’un des problèmes que la réforme du droit d’asile a entrepris de faire disparaître, afin que les délais de procédure d’examen d’une demande d’asile puissent respecter le cadre fixé par la directive Procédures.
Ce préalable peut d’autant mieux être levé que la réforme prévoit que le demandeur entre dans un schéma directif d’hébergement dans lequel ce dernier ne sera pas assuré de rester dans la région lui ayant servi de point d’entrée sur notre territoire. Dans ces conditions, notre rapport avait même envisagé des modalités alternatives, telles que la fourniture d’un numéro de téléphone portable ou d’une adresse de messagerie électronique.
L’absence de condition préalable de domiciliation, bien que relevant du domaine réglementaire, est l’un des points forts de la réforme en matière de raccourcissement des délais. C’est pourquoi cet amendement prévoit de maintenir cette précision dans la rédaction de la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 741-1.