M. le président. La parole est à Mme Patricia Bordas.
Mme Patricia Bordas. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, par ma voix, c’est la Corrèze qui s’adresse à vous. Ce ne sont ni les Alpes ni les Pyrénées, mais ce département représente aussi beaucoup…
M. Jean Desessard. L’un de ses hommes est au sommet ! (Sourires.)
Mme Patricia Bordas. Historiquement, la France a un rapport quasi affectif avec le ski. Notre pays est avantagé par une géographie généreuse, puisque près d’un quart de son territoire est composé de zones montagneuses ; il est baigné par quatre mers et dominé par les cimes de six massifs.
Dans les années trente, la France vit éclore une méthode révolutionnaire pour l’apprentissage du ski : celle d’Émile Allais, de Paul Gignoux et de Toni Seelos. Avec les excellents résultats des sportifs français lors des compétitions internationales, la renommée de l’Hexagone en ce domaine devint mondiale.
Pour autant, il est fondamental de ne pas oublier que cette réputation n’est pas le fruit du hasard : venant en complément des nombreux investissements infrastructurels réalisés en matière d’aménagement des pistes et de développement des complexes touristiques et hôteliers, la création de l’École du ski français en 1937 a permis la formation de nombre de moniteurs passionnés et compétents, qui ont directement participé à cette notoriété.
Ainsi, l’objet de la présente proposition de loi est de préserver cet heureux investissement en capital humain, qui est primordial pour l’économie de ces territoires montagneux et, plus globalement, pour celle du pays, ainsi que pour les moniteurs eux-mêmes.
À cet égard, il est probant de souligner que le tourisme blanc représente 15 % du chiffre annuel du tourisme français, quand le chiffre d’affaires global de l’activité touristique hivernale est estimé à 7 milliards d’euros.
Par ailleurs, selon l’Agence de développement touristique de la France, le tourisme blanc emploie près de 8 % des salariés dans les Alpes, plus de 12 % dans les Pyrénées, et génère 120 000 emplois au total.
M. Jean Desessard. Voilà !
Mme Patricia Bordas. Autrement dit, pérenniser le dispositif relatif à l’exercice de la profession de moniteur de ski, qui a fait ses preuves depuis 1963, se révèle essentiel non seulement pour l’économie locale des territoires montagneux, mais aussi pour l’économie nationale, étant donné les revenus substantiels issus du tourisme blanc.
Plus précisément, ce dispositif est fondé sur une solidarité intergénérationnelle, qui implique un partage équitable, l’assentiment de tous et des garanties en termes d’emploi et de retraite, eu égard au caractère singulier de cette profession saisonnière.
Concrètement, le Syndicat national des moniteurs du ski français, le SNMSF, a mis en place un mécanisme de réduction d’activité des moniteurs les plus anciens qui, au fil de l’eau, ont bien souvent constitué leur propre clientèle, au profit des jeunes moniteurs diplômés.
Ce mécanisme s’apparente à un instrument de régulation d’un marché du travail sectoriel, qui ne peut fonctionner qu’en jouant sur la complémentarité des moniteurs de ski, et en l’absence de toute mesure coercitive.
Il ne saurait être question d’opposer jeunes et anciens moniteurs de ski, sous peine de voir le dispositif s’écrouler ; a contrario, il s’agit de les réunir autour d’un projet fédérateur auquel ils souscrivent, qui leur assure un emploi à long terme, un revenu décent et, surtout, l’effectivité de leurs droits à l’assurance vieillesse.
Il est indispensable de le marteler : l’emploi n’est pas un gâteau que l’on partage !
M. Jean Desessard. Si !
Mme Patricia Bordas. Cependant, l’exemple de la fluidification du marché de cette profession libérale, qui présente la particularité d’être grandement organisée, témoigne de la possibilité de penser concomitamment et efficacement des stratégies d’insertion professionnelle et de maintien dans l’emploi.
J’en veux pour preuve ce que nous a déclaré le directeur de l’École nationale des sports de montagne, à savoir que tous les nouveaux diplômés sont embauchés, alors même que le taux d’activité des moniteurs de ski en fin de carrière est très élevé : 82 % à 60 ans et 56 % à 70 ans.
Ces chiffres sont à comparer avec le taux d’activité général des 60-64 ans, qui est extrêmement faible et inquiétant en France, puisqu’il plafonne à un accablant 23,1 %. Cette spécificité est notre talon d’Achille, comme en témoigne le taux d’emploi des 60-64 ans à l’échelle de l’Union européenne, supérieur de près de 10 points au nôtre.
Or une étude plus fine des données statistiques démontre qu’il n’existe aucune fatalité quant à l’emploi des seniors. En effet, plusieurs de nos partenaires européens présentent des résultats probants, parvenant à obtenir un taux d’emploi proche de 50 % pour les 60-64 ans, taux qui atteint même 61 % en Suède !
Malheureusement, le drame de l’emploi des seniors se conjugue à la tragédie du chômage de la jeunesse. Certes, la France est dans la moyenne de l’UE avec près d’un jeune de 15 à 24 ans sur quatre sans emploi. Nous sommes bien mieux lotis que certains États qui doivent faire face à une jeunesse tentée par l’exil ou menacée par la décomposition, près d’un jeune sur deux étant au chômage, mais nous n’en sommes pas moins menacés par ce fléau, qui ravage déjà certains de nos territoires confrontés à un taux de chômage des jeunes accablant.
Comme l’éducation, l’emploi est devenu un facteur d’aggravation de la fracture territoriale, qui est pernicieuse et dangereuse pour la cohésion sociale.
En outre, à la veille des élections européennes, il convient de mettre en exergue les efforts de l’Union afin d’endiguer le chômage des jeunes et des seniors. Sur ce point, la stratégie « Europe 2020 » vise notamment à porter à 75 % le taux d’emploi de la population âgée de 20 à 64 ans, en mettant l’accent sur la lutte contre le chômage des jeunes et des seniors.
De manière analogue, l’initiative pour l’emploi des jeunes, proposée par la Commission européenne et validée par le Conseil européen des 7 et 8 février 2013, est salutaire, car elle a principalement pour objet d’aider les jeunes sans emploi qui ne suivent pas de cursus scolaire ni de formation dans les régions où le taux de chômage de ces derniers est supérieur à 25 %.
Rappelons que, en France, les contrats d’avenir, ardemment défendus par la majorité présidentielle et parlementaire, ont été non pas un gadget, mais bel et bien un outil d’insertion professionnelle pour près de 100 000 jeunes en 2013. La montée en charge du dispositif doit se poursuivre, et l’objectif de 150 000 emplois d’avenir d’ici à la fin de l’année apparaît réaliste.
Enfin, la mise en place de la « garantie jeunes » par le décret du 2 octobre 2013 se révèle primordiale, dans la mesure où elle focalise les efforts sur l’accompagnement, pierre angulaire de la stratégie de lutte contre le chômage, comme le confirment les réussites scandinaves.
Mes chers collègues, cette brève analyse fait d’autant mieux ressortir le mérite du dispositif instauré par le SNMSF, lequel a permis non seulement aux jeunes de s’insérer parfaitement sur le marché du travail, mais aussi aux plus âgés de conserver un emploi. En somme, il contribue à remédier, dans ce secteur d’activité précis, aux maux qui affectent le marché du travail français en général.
D'ailleurs, de par son esprit, ce mécanisme est une anticipation, lointaine il est vrai, des contrats de génération façonnés par le Président de la République, qui ont trouvé leur traduction dans la loi du 1er mars 2013.
Par-delà la logique économique qui leur est inhérente, l’idée d’échange, de transmission, entre un senior et un jeune, d’aptitudes, d’un savoir, d’une expérience, en un mot d’un vécu, doit être préservée.
Cet archétype philosophique est allègrement plus qu’un symbole ; il est inexorablement de nature à recréer du lien social entre les individus et, par ce truchement, à enrayer la « société de défiance » décrite par Yann Algan, qui aboutit à la peur du changement, à la hantise de la réforme et, in fine, à l’inertie.
C’est pourquoi, il est nécessaire d’aménager, de mieux faire connaître et comprendre, les contrats de générations aux différents acteurs, afin qu’ils y aient davantage recours. Pour ce faire, les entreprises doivent y avoir accès plus aisément, et le recrutement des seniors doit être facilité.
Dans cette perspective, des incitations peuvent être envisagées. Néanmoins, comme l’ont rappelé plusieurs de mes collègues, le dispositif en faveur de l’emploi des moniteurs de ski est aujourd’hui contesté.
Sans entrer dans le récit judiciaire du contentieux toujours d’actualité, il est devenu indispensable que le législateur intervienne pour sécuriser juridiquement le mécanisme de régulation élaboré dans les années 1960.
Cependant, cette intervention doit tenir compte de la directive européenne portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail et des motivations des diverses décisions de justice, comme cela a été souligné au sujet des avis de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la HALDE, du 29 novembre 2010 et du Défenseur des droits du 2 mai 2014.
De ces impératifs, il résulte une proposition de loi équilibrée et aboutie. D’une part, elle reprend l’architecture du pacte intergénérationnel, fondé sur la solidarité, qui a été gage d’un haut niveau d’emploi pour les moniteurs de ski, génération après génération. D’autre part, elle érige un cadre plus draconien, en apportant des garanties sur la mise en œuvre du dispositif.
Par cet intermédiaire, l’objectif est de répondre aux exigences juridiques qui découlent en particulier de nos engagements européens et d’écarter ainsi les griefs portés à l’encontre du pacte intergénérationnel.
Parmi les avancées manifestes de ce texte, il paraît significatif de relever tout d’abord la condition d’âge fixée par l’article 1er, disposant que « la redistribution d’activité générée par la mise en œuvre [du] dispositif bénéficie exclusivement aux moniteurs âgés de moins de trente ans et exerçant en continuité sur la saison ».
S’y ajoute l’établissement d’un filet de sécurité qui consiste à permettre aux jeunes, comme aux moniteurs âgés de 62 à 67 ans, de valider au moins deux trimestres d’assurance vieillesse par an.
Enfin, le caractère facultatif, cela a été souligné, du dispositif, qui ne devra pas être imposé verticalement aux écoles de ski. En ce sens, les écoles de ski peuvent être assurées de la vigilance à la fois des élus locaux, des parlementaires, et du Gouvernement en ce qui concerne l’application de cette future loi. Latitude et liberté de choix doivent être laissées aux centres de formation.
Dans le cas contraire, l’obligation de souscrire au pacte intergénérationnel présenterait le risque d’affaiblir, voire de détruire, l’accord quasi unanime sur sa légitimité et son efficacité.
Mes chers collègues, si vous me le permettez, je citerai François Ponsard, écrivain et poète du XIXe siècle, qui soulignait que « tout conseil est mauvais quand il est imposé ».
Enfin, j’aimerais insister, même si cela a déjà été souligné par mon collègue Georges Labazée, sur la situation délicate dans laquelle se trouve un nombre considérable de moniteurs de ski. En effet, avant l’obligation légale d’affiliation au régime de base et au régime complémentaire d’assurance vieillesse des professions libérales, plusieurs d’entre eux ont cotisé à perte, entre 1963 et 1978, au fonds de prévoyance par répartition créé par le syndicat des moniteurs de ski.
Aujourd’hui, il s’ensuit que certains moniteurs qui ont déjà atteint, ou qui sont sur le point d’atteindre, l’âge ouvrant le droit à l’assurance vieillesse n’ont pas tous les trimestres requis pour disposer d’une pension à taux plein. Dès lors, ils sont incités à poursuivre leur activité pour éviter de subir une décote.
L’enjeu se révèle donc double : au premier chef, réparer l’injustice dont ils sont victimes en permettant à ces moniteurs de bénéficier d’une pension de retraite équivalente au nombre de trimestres qui auraient dû être effectivement validés entre 1963 et 1978 ; en second lieu, d’un point de vue systémique, éviter « l’effet congestion » qui pourrait mettre en danger la viabilité du pacte intergénérationnel, reposant sur la fluidité du marché du travail des moniteurs de ski.
En conséquence, à l’instar de notre rapporteur, je souhaiterais appeler le Gouvernement à réfléchir, dans le cadre de la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, à la possibilité de remédier à la situation inique dans laquelle se trouvent ces moniteurs de ski. Il s’agit là exclusivement d’une question de justice sociale.
En conclusion, cette proposition de loi sécurise le dispositif en lui conférant une base légale, ce qui est dans l’intérêt des moniteurs de ski. Si vous me permettez, mes chers collègues, je terminerai par une note d’humour : j’espère que ce texte glissera paisiblement et ne déclenchera aucune avalanche dans les travées de notre périlleuse piste noire. (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. Jean Desessard. Si, une avalanche d’applaudissements ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, sans vouloir être trop long, puisque l’essentiel a déjà été dit, je me permettrai, en tant que représentant d’un département pour qui le sport d’hiver représente, dans le secteur du tourisme, plus de 50 % du PIB de son économie, d’ajouter quelques mots à la discussion.
Le Sénat est saisi d’une proposition de loi dont l’identité des projets présentés et le consensus trouvé dans les deux assemblées montrent la particularité, mais aussi la dimension. De fait, ce texte ne doit pas être réduit à ses aspects techniques.
Cette proposition de loi dite « disposition de réduction d’activité des moniteurs de ski » se trouve en réalité au cœur d’une économie, d’une profession et d’un environnement social singuliers, dont la modernité mérite une attention particulière.
Au plan économique, il convient tout d'abord de rappeler la position de leader mondial qu’occupe la France, devant les États-Unis, avec environ 58 millions de journées de ski en 2013 et, cela a été souligné, 7 millions de skieurs, dont 2 millions d’étrangers, avec une activité encore en progression par rapport à 2012.
Cette activité concerne plus de 350 stations de sport d’hiver et 120 000 emplois, avec un secteur industriel, je me permets de le souligner, largement exportateur de nos technologies et savoir-faire.
C’est donc dans cette économie singulière, puisqu’elle est éminemment saisonnière, que l’activité des moniteurs de ski a pris sa place, avec une organisation dont l’exigence et le professionnalisme se sont rapidement imposés.
Le nom d’Émile Allais a été évoqué à l’instant. C’est effectivement lui qui, en tant que médaillé olympique, a fondé en 1937 la première école de ski. Celle-ci a posé la méthode d’un enseignement français, qui s’est imposé rapidement et a été reconnu pour son excellence et sa rigueur, mais aussi pour son organisation originale : les fameux « pulls rouges » de l’école de ski français.
Il faut également souligner le nombre important de moniteurs de ski, qui s’élève aujourd’hui à 19 000 professionnels exerçant à 90 % dans les écoles de ski français, connues de tous sous l’appellation « ESF ». La profession s’est organisée rapidement au sein d’un puissant Syndicat national des moniteurs du ski français, ou SNMSF, présidé par Gilles Chabert, présent aujourd'hui dans nos tribunes.
L’équation entre école de ski et syndicat des moniteurs de ski est le socle d’une activité exercée à titre de profession libérale par des personnes disposant du très convoité et exigeant diplôme d’État de moniteur de ski.
La profession de moniteur de ski est donc une profession libérale, relevant du régime des travailleurs indépendants, dont l’école de ski assure le lien, le portage et l’organisation de l’activité, avec la clientèle du domaine skiable.
On peut considérer qu’il était naturel pour le syndicat des moniteurs de ski de se saisir très tôt de la gestion des ressources humaines de ses professionnels, au regard du renouvellement de la sortie d’activité et de la nécessité de répondre à un marché en progression, mais aussi face au développement de pratiques imposant des capacités physiques de haut niveau.
C’est donc pour répondre à cette double préoccupation – exigences d’un marché et solidarité entre moniteurs seniors et moniteurs juniors – qu’un principe original a été élaboré, celui du pacte intergénérationnel.
Cette solidarité intergénérationnelle a conduit à poser, dès 1963, une réduction et un aménagement d’activités selon l’âge : 55, 58 et 61 ans.
Selon le principe posé, les moniteurs avaient un statut de permanent à 55 ans, qu’ils perdaient ensuite pour servir en renfort durant les vacances scolaires. En 1996, cette limite est repoussée à 58 ans, et à 61 ans en 2007. Ce principe a été adopté à chaque fois très massivement par le Congrès national des moniteurs de ski.
En fait, même si cela a fait l’objet d’actions limitées, cette prise en compte de l’âge s’est trouvée contestée et remise en cause au regard du principe de discrimination par rapport à l’âge posé par la HALDE et par la loi de 2008, elle-même transposition d’une directive européenne du 27 novembre 2000.
Le tribunal administratif devait d’ailleurs consacrer cette lecture en déclarant illicite le dispositif adopté en 2007. Face à cette décision, le SNMSF convoquait de nouveau un Congrès national pour prendre en compte les griefs formulés.
Le pacte intergénérationnel de 2012, élaboré avec le Défenseur des droits, qui a voulu prendre en compte les observations relatives à la discrimination pour se trouver en conformité à ces principes, s’est trouvé, malgré tout, confronté à un nouveau contentieux. Cette proposition de loi cherche donc à mettre un terme à l’incertitude d’un pacte qui, comme il convient de le souligner, a tenu à prendre en compte également la nécessaire garantie des droits des moniteurs de ski au regard de leur régime de retraite, un point qui a été largement développé par le précédent orateur.
En effet, au-delà de l’adaptation d’une sortie progressive d’activité en fin de carrière, le dispositif s’efforce de répondre à une autre préoccupation : permettre aux moniteurs de ski qui ne disposent pas des trimestres suffisants de leur régime de retraite de base d’y pourvoir.
C’est pour ces raisons que le groupe auquel j’appartiens apportera son soutien à cette proposition de loi, qui entend conforter à un dispositif adopté à plusieurs reprises par le Syndicat national des moniteurs du ski français en lui donnant une base législative. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Thierry Braillard, secrétaire d’État. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie d’avoir exprimé la volonté du Sénat de voter cette proposition de loi déjà adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale.
Madame Férat, vous avez eu raison de rappeler le caractère facultatif du dispositif. En effet, les stations connaissent des situations variées et il faut leur laisser une liberté d’appréciation. Je vous remercie donc d’avoir su si bien le souligner, madame la sénatrice, alors que, dans votre département, on est plus habitué aux bulles qu’aux flocons ! (Rires.)
Monsieur Carle, ce texte concerne l’ensemble des moniteurs de ski et non pas seulement ceux qui sont membres du SNMSF : la loi a une portée générale et ne saurait viser les seuls membres d’un syndicat.
Puisque j’évoque ce syndicat, je me permets de regretter, madame la présidente de la commission des affaires sociales, l’abstention du groupe CRC. En effet, lors de la discussion du projet de loi transposant l’Accord national interprofessionnel, les élus communistes ont motivé leur refus de l’adopter par le fait que certaines organisations représentatives n’avaient pas ratifié l’accord en question. Or, dans le cas qui nous occupe aujourd'hui, bien que le syndicat catégoriel qui représente 94 % de la profession soit favorable à cette proposition de loi, votre groupe s’abstient ! Il faudra m’expliquer la logique de votre position…
Je regrette d’autant plus votre abstention que ce texte vise avant tout à améliorer la situation de l’emploi – je remercie d’ailleurs Mme Bordas de l’avoir rappelé. C’est évidemment un point essentiel, et il me semble que le souci de l’emploi doit être partagé sur toutes les travées de cette assemblée. En l’absence du dispositif qu’il vous est demandé d’approuver, de nombreux jeunes risqueraient de se trouver sans activité ou, dans certaines stations, précarisés. À défaut d’une répartition équitable des cours au sein des écoles du ski français, un certain nombre de jeunes moniteurs ne seraient plus en mesure de vivre de leur profession ni de valider les trimestres nécessaires pour l’obtention d’une pension de retraite.
Tel est le véritable objet de cette proposition de loi et c’est la raison pour laquelle je m’attendais à ce que le Sénat l’adopte à l’unanimité. Je regrette donc l’abstention du groupe communiste, tout en respectant la décision de ses membres.
M. Dominique Watrin. Nous attendons vos réponses !
M. Thierry Braillard, secrétaire d’État. Monsieur Desessard, j’ai apprécié votre propos, même si je pense que l’emploi n’est pas comparable à un gâteau que l’on pourrait partager. Si le débat sur la croissance et la décroissance est propice à l’expression de réflexions philosophiques, il faut bien, à un moment ou à un autre, revenir à la réalité : nous nous rendons bien compte aujourd’hui que, sans croissance, notre pays ne crée pas d’emplois. Le pacte de responsabilité et de solidarité mis en place par le Gouvernement a pour principal but de permettre à notre pays de retrouver la croissance afin de créer à nouveau des emplois.
M. Jean Desessard. On verra cela !
M. Thierry Braillard, secrétaire d’État. Eh bien oui, nous verrons quels seront les résultats ! Mais je me permets tout de même de vous rappeler que, il y a encore deux ans, vous faisiez partie de la majorité, me semble-t-il…
M. Jean Desessard. Nous faisions notre possible !
M. Thierry Braillard, secrétaire d’État. J’espère donc que nous pourrons faire ce constat ensemble !
Enfin, je voulais féliciter Jean-Michel Baylet. Tout le monde connaît le pragmatisme cher aux radicaux ainsi que leur volonté de toujours rechercher le dialogue et le consensus. Cette proposition de loi fait l’objet d’un tel consensus que les radicaux ne pouvaient que l’approuver !
Enfin, je tiens à dire que j’ai été très attentif à la question relative à la durée des trimestres de cotisation des moniteurs de ski dans la période allant de 1963 à 1978. Je prends devant vous l’engagement de transmettre dès ce soir cette question à ma collègue Marisol Touraine, afin qu’elle ait connaissance de votre interpellation et puisse vous indiquer éventuellement quelle solution elle entend apporter au problème que vous avez soulevé.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs les éléments de réponse que je souhaitais vous livrer à l’issue de cette discussion générale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, de l’UMP et de l’UDI-UC.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à mettre en place un dispositif de réduction d’activité des moniteurs de ski ayant atteint l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite, afin de favoriser l’activité des nouveaux moniteurs
Article 1er
(Non modifié)
Les écoles de ski réunissant des moniteurs de ski exerçant à titre indépendant peuvent instituer un dispositif de réduction d’activité des moniteurs ayant atteint l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite en application de l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale, afin de favoriser l’insertion professionnelle des jeunes moniteurs de ski diplômés.
La redistribution d’activité résultant de la mise en œuvre de ce dispositif bénéficie exclusivement aux moniteurs âgés de moins de trente ans exerçant en continuité sur la saison.
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Article 2
(Non modifié)
I. – Le dispositif mentionné à l’article 1er doit respecter les règles suivantes :
1° Pour les moniteurs ayant atteint l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite souhaitant poursuivre leur activité, la réduction ne peut excéder, pendant une période initiale de trois années, 30 % de l’activité à laquelle ils pourraient normalement prétendre en fonction des règles de répartition établies par l’école de ski ;
2° Pour les moniteurs ayant exercé leur activité durant trois années au-delà de l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite souhaitant poursuivre leur activité, la réduction ne peut excéder, pendant les deux années suivantes, 50 % de l’activité à laquelle ils pourraient normalement prétendre ;
3° Le dispositif de réduction d’activité garantit aux moniteurs mentionnés aux 1° et 2° un nombre d’heures d’activité qui leur permette de valider au moins deux trimestres d’assurance vieillesse par an dans leur régime de retraite de base ;
4° La redistribution d’activité garantit aux moniteurs âgés de moins de trente ans un nombre d’heures d’activité qui leur permette de valider au moins deux trimestres d’assurance vieillesse par an dans leur régime de retraite de base ;
5° En tant que de besoin, il peut être fait appel aux moniteurs ayant exercé leur activité durant cinq années au-delà de l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite souhaitant poursuivre leur activité.
II. – Aucune réduction ne s’applique à l’activité des moniteurs de ski faisant suite à une sollicitation à titre personnel par la clientèle soit directement, soit par l’intermédiaire de l’école de ski à laquelle ils appartiennent.
M. le président. L’amendement n° 2, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 2.
(L’article 2 est adopté.)
Article 3
(Non modifié)
Jusqu’au 1er janvier 2017 :
1° Pour l’application du premier alinéa de l’article 1er, les mots : « d’ouverture du droit à une pension de retraite en application de l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale » sont remplacés par les mots : « de 62 ans » ;
2° Pour l’application des 1°, 2° et 5° du I de l’article 2, les mots : « d’ouverture du droit à une pension de retraite » sont remplacés par les mots : « de 62 ans » – (Adopté.)