M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote sur l’amendement n° 64.
M. Thierry Foucaud. Je souhaiterais que M. le rapporteur général me démontre, s’il le peut, que les petits possesseurs d’assurance vie paieront plus cher si notre amendement est adopté. Peut-être pourrait-il également nous rappeler quelle sera la perte pour le budget de l’État si nos amendements ne sont pas adoptés. Nous l’avions estimée, me semble-t-il, entre 1,7 milliard et 5,1 milliards d’euros.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La question soulevée par M. Foucaud est tout à fait légitime. Pour apporter un élément d’appréciation complémentaire, je prendrai un exemple chiffré : la part taxable d’un bénéficiaire qui reçoit 1 million d’euros augmenterait d’environ 10 %, alors que la part taxable de celui qui reçoit 200 000 euros serait plus que triplée, ce qui démontre très clairement l’influence sensiblement plus importante de cette mesure pour un petit contrat.
En outre, le bénéficiaire qui reçoit un capital se situant juste au niveau du seuil d’exonération serait désormais imposé sur 102 500 euros, soit un prélèvement passant de zéro à plus de 20 000 euros.
L’adoption de cet amendement nuirait ainsi gravement à la progressivité de la taxation, c’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable. Tels sont les quelques éléments additionnels que je souhaitais vous soumettre, mon cher collègue. Je ne sais s’ils suffiront à vous convaincre…
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l’amendement n° 63.
Mme Marie-France Beaufils. Nous avons pris note de la réponse du rapporteur général à la question de Thierry Foucaud.
Je voudrais tout de même rappeler que le montant épargné cumulé de 90 % des 17 millions des souscripteurs est inférieur à 50 000 euros. Vous avez évoqué un contrat d’un montant de 200 000 euros : soyons clairs, les souscripteurs concernés ne font pas partie de ces 90 % !
M. le président. L’amendement n° 115, présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
Alinéas 24 à 26
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« 2. Bénéficient de l’abattement proportionnel de 20 % mentionné au premier alinéa du I, les sommes, valeurs ou rentes issues des contrats définis au 1 du présent I bis et qui sont investies notamment en titres d’organismes de placement collectif mentionnés aux a à c dudit 1 dont l’actif est constitué notamment par :
La parole est à M. Francis Delattre.
M. Francis Delattre. Le Gouvernement suggère d’orienter les détenteurs de patrimoines importants vers des placements risqués grâce à un abattement de 20 %.
Ce texte identifie certains secteurs prioritaires de l’économie, ce que nous comprenons. Toutefois, nous pensons qu’il faut absolument privilégier les PME et les entreprises de taille intermédiaire – les ETI – et ne pas s’écarter vers l’économie sociale et solidaire. En effet, s’agissant de financements plus ou moins indéterminés, cette extension risquerait d’atténuer la pertinence du dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La production de logements est un secteur prioritaire de l’économie. À ce titre, nous ne comprenons pas pourquoi il faudrait exclure le logement social ou intermédiaire, ainsi que l’économie sociale et solidaire, du quota d’investissement.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Pierre Moscovici, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Je voudrais rappeler au sénateur Delattre que l’économie sociale et solidaire est une vraie priorité du Gouvernement et, de surcroît, une véritable économie. Ne faisons pas comme s’il s’agissait d’une économie à part ou de second rang. Il s’agit d’une priorité gouvernementale et d’un secteur économique tout à fait décisif. Je ne comprends donc pas cette discrimination.
Par ailleurs, je souscris aux propos du rapporteur général sur le logement intermédiaire.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.
M. Philippe Marini. La question est de savoir, monsieur le ministre, si l’on conçoit ici un produit financier ou un mode de fléchage de l’épargne, en d’autres termes une sorte de nouvelle niche fiscale.
Or nous sommes bien ici dans le domaine de l’assurance vie, c’est-à-dire celui de capitaux qu’il convient de placer et dont les détenteurs attendent un certain rendement. L’assurance vie, rappelons-le, est le produit financier préféré des Français. Or je crains que le caractère très composite des actifs du produit proposé, ou « recalibré », ne perturbe les anticipations et ne nuise à son succès.
J’y reviendrai tout à l’heure en évoquant les mesures fiscales qui, à mon avis, contrarient également le succès et l’émergence de vos contrats « euro-croissance ».
Je m’associe bien volontiers à l’initiative de mon collègue Delattre en considérant que le Gouvernement, une nouvelle fois, veut faire beaucoup de choses en un même mouvement – ici avec un seul produit financier – et que les contradictions qui en résultent nuiront à la crédibilité dudit produit.
M. le président. L’amendement n° 2, présenté par M. Marc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 50
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – À la première phrase du I de l’article 1er de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie, après les mots : "mentionnés au", est insérée, deux fois, la référence : « 1° du ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement de coordination, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 7, modifié.
(L’article 7 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 7
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 66, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l’article 125-OA du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le c du 1° est complété par les mots : « et à six ans à compter du 1er janvier 2014 » ;
2° Le d du 1° est abrogé.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai également l’amendement n° 70 rectifié.
M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 70 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au d du 1° du II de l’article 125-0 A du code général des impôts, le taux : « 7,5 % » est remplacé par le taux « 10 % ».
Veuillez poursuivre, madame Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. La dépense fiscale liée à l’imposition, sur option et à taux libératoires privilégiés, des sommes capitalisées sur les contrats d’assurance vie constitue une charge budgétaire assez significative.
Elle s’élève, selon l’évaluation des voies et moyens, à 2 milliards et 80 millions d’euros auxquels s’ajoutent 10 millions d’euros pour les contrats investis en actions, ce qui constitue une puissante incitation en faveur de leur souscription.
Toutefois, lorsqu’il est question, d’une part, d’une durée de détention et, d’autre part, d’un niveau plus ou moins élevé de capital détenu, l’opération est grandement profitable pour celui qui détient beaucoup, le plus longtemps possible.
Or cela ne se passe évidemment pas de la même manière pour un particulier partant en retraite et souhaitant « dénouer » un contrat d’assurance vie de 50 000 euros – il n’a d’ailleurs aucun intérêt à opter pour le prélèvement libératoire et doit plutôt demander l’application du système du quotient – et pour un autre dont la valeur du contrat atteint 2 millions d’euros...
Comme nous l’avons indiqué, l’optimisation fiscale est déterminante au moment d’investir en assurance vie, des éléments de patrimoine taxables au titre de l’ISF pouvant être apportés dans un tel contrat. Il est donc évident qu’il convient de limiter cette optimisation autant que faire se peut.
Nos deux amendements, le second étant un amendement de repli, visent donc à alourdir la fiscalité de l’assurance vie en mettant un peu plus à contribution les contrats les plus importants.
En effet, eu égard à l’allocation des ressources de l’assurance vie, la défiscalisation qui l’entoure contribue, d’une certaine manière, à l’alourdissement du service de la dette publique, car il y a tout lieu de penser que la plupart des détenteurs de gros contrats d’assurance vie sont aussi ceux qui ont tiré pleinement parti, depuis une trentaine d’années, des baisses successives du taux marginal d’imposition des revenus, l’une des sources de développement de la dette publique.
Voilà donc pourquoi nous vous proposons ces deux amendements, dont l’adoption permettrait d’instaurer une participation citoyenne au rétablissement des comptes publics.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission est défavorable à ces deux amendements.
S’agissant de l’amendement n° 66, nous avons le sentiment que le fait de repousser de quatre à six ans la durée de détention d’un contrat d’assurance vie à partir de laquelle le taux du prélèvement libératoire s’établit à 15 %, tout en supprimant le taux de 7,5 %, découragerait l’épargne de long terme qui est la plus utile au financement de l’économie.
En effet, le bénéfice du taux de prélèvement libératoire le plus avantageux serait ouvert au bout de six ans et non plus de huit ans, comme c’est le cas actuellement. Un tel dispositif ne semble pas aller dans le sens de l’investissement de long terme.
L’amendement n° 70 rectifié, quant à lui, tend à alourdir la fiscalité de contrats détenus par des millions de Français, toutes catégories de revenus confondues, et auxquels nos concitoyens sont très attachés.
Autant la mise au barème des revenus patrimoniaux était juste, car elle établissait une distinction entre les plus aisés et les moins aisés, autant l’augmentation proposée, qui vise un taux forfaitaire, concernerait l’ensemble des épargnants, riches ou pauvres. Une telle augmentation ne serait donc pas opportune.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Pierre Moscovici, ministre. Je souscris aux arguments de François Marc : le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. J’ai bien entendu la réponse qui m’a été apportée.
Nous ne pensons pas que la réforme proposée soit l’outil idoine pour inciter aux investissements en faveur des entreprises. En présentant l’amendement n° 66, nous restons donc cohérents avec nos positions.
Comme nous l’avons rappelé, les petits épargnants n’ont aucun intérêt à utiliser une autre formule que l’intégration dans leur impôt sur le revenu des sommes versées lors du dénouement de leur contrat. Ils n’ont aucun intérêt au prélèvement libératoire et ne seraient donc pas concernés, me semble-t-il, par le dispositif de l’amendement n° 70 rectifié.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 70 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 7 bis (nouveau)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après les mots : « l’administration », la fin du IV de l’article 806 est ainsi rédigée : « des impôts le dénouement mentionné au I de l’article 1649 ter. » ;
2° L’article 1649 ter est ainsi rétabli :
« Art. 1649 ter. – I. – Les entreprises d’assurance, les institutions de prévoyance et les unions mentionnées au I de l’article L. 132-9-3 du code des assurances, ainsi que les mutuelles ou unions mentionnées à l’article L. 223-10-2 du code de la mutualité et les organismes assimilés, établis en France déclarent la souscription et le dénouement des contrats de capitalisation ou des placements de même nature, notamment des contrats d’assurance-vie.
« II. – Les entreprises, personnes morales, institutions et organismes mentionnés au I déclarent également chaque année au titre de ces contrats :
« 1° Pour les contrats d’assurance-vie non rachetables souscrits depuis le 20 novembre 1991, le montant cumulé des primes versées entre le soixante-dixième anniversaire du souscripteur et le 1er janvier de l’année de la déclaration ;
« 2° Pour les autres contrats, quelle que soit leur date de souscription, le montant cumulé des primes versées au 1er janvier de l’année de la déclaration et la valeur de rachat ou le montant du capital garanti, y compris sous forme de rente, à la même date.
« III. – Les déclarations prévues aux I et II s’effectuent dans les conditions et délais fixés par décret en Conseil d’État. » ;
3° La première phrase du premier alinéa de l’article 1649 AA est ainsi rédigée :
« Lorsque des contrats de capitalisation ou des placements de même nature, notamment des contrats d’assurance-vie, sont souscrits auprès d’organismes mentionnés au I de l’article 1649 ter qui sont établis hors de France, les souscripteurs sont tenus de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus, les références des contrats ou placements concernés, la date d’effet et la durée de ces contrats ou placements, les opérations de remboursement et de versement des primes effectuées au cours de l’année précédente et, le cas échéant, la valeur de rachat ou le montant du capital garanti, y compris sous forme de rente, au 1er janvier de l’année de la déclaration. » ;
4° Après le VI de l’article 1736, il est inséré un VI bis ainsi rédigé :
« VI bis. – Les infractions à l’article 1649 ter sont passibles d’une amende de 1 500 € par absence de dépôt de déclaration et, dans la limite de 10 000 € par déclaration, de 150 € par omission ou inexactitude déclarative. »
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2016. Les contrats souscrits avant cette date et non dénoués à cette même date doivent être déclarés conformément aux I et III de l’article 1649 ter au plus tard le 15 juin 2016. Le II de ce même article leur est applicable à compter du 1er janvier 2016.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 111, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 5 à 7
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéa 8
Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
« II. – La déclaration prévue au I s’effectue dans ...
III. – Alinéa 13, dernière phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. Je voudrais d’abord dire un mot de l’appréciation globale que je porte sur le dispositif de l’article 7.
Je persiste à considérer que l’approche retenue est globalement négative pour le devenir de l’assurance vie. Certes, le contrat « euro-croissance » mérite l’intérêt. Toutefois, à l’instant même où il est créé, on taxe les encours transformés dans les nouveaux produits à hauteur de 0,32 % de leur montant !
Par ailleurs, les conditions de versement des contributions sociales sont modifiées, en rendant celles-ci exigibles dès l’atteinte de la garantie, c’est-à-dire au terme de huit ans. Cela n’aura pas d’effet immédiat, mais nuira à la lisibilité du produit.
Ces deux dispositions, qui s’ajoutent au caractère composite des actifs que j’ai évoqué tout à l’heure, vont, me semble-t-il, limiter fortement l’intérêt de ce nouveau produit.
Mon amendement n° 111 concerne le fichier central des contrats d’assurance vie, le FICOVIE, que l’administration fiscale voudrait être autorisée à tenir.
Il s’agit, mes chers collègues, de ficher plus de 50 millions de contrats, avec obligation annuelle pour les assureurs de déclarer leur valeur et le montant des primes versées.
Bien entendu, la création de tout fichier pose la question de la proportionnalité entre l’ampleur du dispositif et l’objectif visé, comme on a pu le voir récemment avec le registre national des crédits aux particuliers, en d’autres termes le « fichier positif » dont on parle de longue date.
Je rappelle que le Conseil d’État avait émis de fortes objections quant au champ particulièrement étendu de ce dernier fichier, ce qui a conduit le Gouvernement à le retirer du projet de loi relatif à la consommation, avant d’introduire un dispositif amoindri dans la suite de la discussion parlementaire.
En l’espèce, le dispositif FICOVIE est encore plus large. Si son objectif, à savoir la lutte contre la fraude fiscale, est légitime et doit être encouragé, il est déjà atteint dans le domaine bancaire via des obligations bien plus légères, à travers le fichier national des comptes bancaires et assimilés, le FICOBA, qui se contente d’enregistrer les ouvertures et fermetures de comptes.
À mon sens, le FICOVIE, beaucoup plus détaillé, sans justification réelle, nécessitera des coûts de développement et de maintenance disproportionnés, tant pour les assureurs que pour l’État, ce qui pèsera sur l’équilibre financier des contrats.
M. le président. L’amendement n° 3, présenté par M. Marc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I.- Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
, lorsque ce montant est supérieur ou égal à 7 500 euros
II.- Alinéa 7
Compléter cet alinéa par les mots :
, lorsque ce montant ou cette valeur est supérieur ou égal à 7 500 euros
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à laisser hors du champ des obligations annuelles de déclaration des assureurs les contrats dont la valeur est inférieure à 7 500 euros, ce qui représente pratiquement 50 % des contrats d’assurance vie en France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 111 ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission demande à M. Marini de bien vouloir retirer cet amendement, car les obligations de déclaration qu’il vise à supprimer sont particulièrement utiles à la lutte contre la fraude fiscale.
Monsieur le président de la commission des finances, je suis sensible à l’argument de la proportionnalité, mais j’estime que cet objectif est satisfait, tout du moins en partie, avec l’amendement que je présente au nom de la commission des finances visant à ne soumettre à ces obligations que les contrats d’une valeur supérieure à 7 500 euros. Une telle mesure permet d’éliminer 50 % des contrats d’assurance vie, ce qui allégerait très sensiblement la tâche des sociétés d’assurance. Je vous suggère donc de vous rallier à l’amendement n° 3 de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Pierre Moscovici, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement n° 111, mais il est favorable à l’amendement n° 3.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’amendement n° 111.
Mme Nathalie Goulet. J’étais vice-présidente de la commission d’enquête sur l’évasion des capitaux et des actifs hors de France, dont Éric Bocquet était le rapporteur. Lors de la discussion parlementaire des 17 et 18 juillet derniers, nous avons présenté des amendements similaires à ceux dont nous débattons, visant à créer un fichier des contrats d’assurance vie, inspiré du fichier national des comptes bancaires et assimilés, le FICOBA.
En effet, lors des auditions menées par la commission d’enquête, il a été indiqué, à de très nombreuses reprises, que les contrats d’assurance vie servaient manifestement de support à un certain nombre d’opérations d’évasion fiscale. La disposition prévue dans le présent projet de loi de finances rectificative est donc extrêmement importante.
Je partage néanmoins l’avis de M. le rapporteur général, qui estime nécessaire de fixer le seuil faisant naître les obligations déclaratives à 7 500 euros, compte tenu du nombre de contrats visés par cette mesure. Je ne voterai donc pas l’amendement n° 111 et me rabattrai sur l’amendement n° 3 de la commission des finances.
Je rappelle que, à l’occasion de nos débats du 18 juillet dernier, M. Cazeneuve s’était engagé à ce que fichier soit mis en place. Je considère que cette disposition est absolument indispensable à la lutte que nous avons engagée contre l’évasion fiscale.
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.
M. Philippe Marini. Mes chers collègues, l’administration fiscale découvrirait-elle l’assurance vie ? Voilà qui est très surprenant ! N’y a-t-il jamais eu de contrôle fiscal en France jusqu’à ce jour ? L’administration fiscale ne dispose-t-elle pas de tous les moyens légaux pour connaître la composition des patrimoines sans ce fichier, que l’on présente pourtant comme salvateur ? Pour ma part, j’en doute beaucoup.
Je précise que, même si la suppression que je préconise était votée, le dispositif en vigueur continuerait de comporter une information portant sur les souscriptions et les dénouements de contrats.
Certes, les amendements nos 3 et 4 de la commission des finances permettraient, si j’ose dire, de limiter les contraintes, ou les dégâts, que l’adoption de cette disposition entraînerait. Ce sont des amendements de repli, que je voterai si mon amendement n’était pas adopté. Mais, sincèrement, comment peut-on envisager d’inscrire chaque année dans un fichier une telle masse d’opérations, tout un ensemble de valorisations qui évoluent sans cesse ? Nulle part je n’ai trouvé d’estimation du coût de cette mesure. Je ne dispose, en outre, d’aucune espèce d’indication sur le point de savoir si la CNIL a été ou sera consultée.
En d’autres termes, la question de la proportionnalité, que j’évoquais à l’instant, n’a trouvé, jusqu’ici, dans les documents préparatoires, aucun élément de réponse sérieux.
Tout ceci, naturellement, me conduit à maintenir l’amendement n° 111.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. La CNIL a forcément été consultée : la loi et une directive européenne l’exigent. Il serait donc intéressant de connaître son avis.
Par ailleurs, tout le monde le sait, monsieur le ministre, un reliquat d’assurance vie, représentant un montant de 4 milliards d’euros à 5 milliards d’euros, se perd, notamment, dans les successions difficiles. Les assureurs, naturellement, n’en parlent que très peu.
Le fichier dont nous discutons permettrait-il d’identifier les titulaires des contrats et de trouver des solutions conformes à ce que le droit devrait être dans notre pays ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre. Le problème des contrats en déshérence est sérieux. Une proposition de loi, déposée par le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, Christian Eckert, sera bientôt examinée. Elle a les faveurs du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.
M. Yann Gaillard. Les arguments des deux parties sont sérieux, ce qui semble indiquer que l’investigation n’est pas terminée.
Ce sujet devrait donc faire l’objet d’une enquête tout à fait particulière. Nous pourrions reprendre cette discussion une fois ses résultats connus.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’amendement n° 3.
Mme Nathalie Goulet. Je souhaitais simplement rebondir sur la question de M. Delattre à propos des contrats en déshérence.
Il est très bien que l’Assemblée nationale examine une proposition de loi sur cette question. Je rappelle simplement qu’Hervé Maurey en a déposé plusieurs sur le même thème, lequel, en outre, a déjà fait l’objet de débats dans cet hémicycle.
M. Philippe Marini. Mais ce n’est pas le sujet !
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote.
M. Philippe Marini. Je le répète, je voterai les amendements nos 3 et 4 de la commission des finances.
J’indique également que le dispositif dont nous parlons n’a rien à voir avec les contrats en déshérence. Ce sujet est un véritable cavalier, si j’ose dire, par rapport à la discussion de ces amendements ! La disposition qui nous occupe concerne la création d’un fichier fiscal, dont le coût, les conditions de répercussion sur les commissions à verser aux compagnies d’assurance et les conséquences en matière de libertés publiques n’apparaissent nulle part !
M. le président. La parole est à M. Nicolas Alfonsi, pour explication de vote.
M. Nicolas Alfonsi. Une observation me vient spontanément à l’esprit, qui pourrait, peut-être, concilier les deux positions.
J’ai voté contre l’amendement de M. Marini. Je retiens que le seuil de 7 500 euros, fixé par le dispositif de l’amendement n° 3, permet de réduire de moitié le nombre de contrats déclarés.
Mais, monsieur le rapporteur général, pourquoi retenir ce seuil de 7 500 euros ? Est-ce pour éviter des coûts trop importants ? Pourquoi ne pas retenir, par exemple, un seuil de 10 000 euros ? Quelle serait, avec un tel seuil, la proportion de contrats qui n’auraient plus à être déclarés ?