Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nos collègues du groupe CRC devraient être sensibles à la proposition de Mme la ministre.
Tout le monde l’a souligné, une seule commune ne peut pas exercer un droit de veto et bloquer l’ensemble du dispositif. En cas de blocage, il faut effectivement être sûr que des voies de recours permettront de faire prévaloir la conciliation sur une imposition brutale sur un territoire.
Madame la ministre, je crois savoir pourquoi il n’y a pas beaucoup de conflits. Cela n’est pas simplement dû au fait que tout le monde est unanime quant à l’élaboration d’un PLUI. Nos collègues l’ont bien expliqué, des communes peuvent actuellement être entraînées « de force », parce qu’elles sont minoritaires, dans un PLUI. Même si le déclenchement du PLUI n’est pas obligatoire, certains présidents de collectivité en ont imposé un. Certaines communes, de tout bord politique, n’étaient pas d’accord pour en faire partie, mais elles y ont adhéré. Pourquoi ?
Dès lors que l’on peut sectoriser un PLUI,…
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Eh oui !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … les négociations engagées pour répondre aux intentions des uns et des autres permettent de parvenir plus facilement à des compromis d’intérêt général. C’est aussi pourquoi il n’y a pas d’uniformité dans le PLUI, à l’instar de ce qui se passe déjà dans la commune.
Nous avons tous été confrontés à la recherche d’un compromis dans une intercommunalité. En cas de blocage dans une commune, on cherche à en comprendre la nature. Sauf si le désaccord est rédhibitoire – il faut alors trouver une voie de conciliation –, la plupart du temps on sectorise de manière à trouver le compromis : chacun fait un pas. Gérard Collomb pourrait vous raconter comment, alors que dans certains endroits de son agglomération les gens ne voulaient mettre de logements sociaux, les délégués communautaires, toutes tendances politiques confondues, se sont mis d’accord pour trouver les bons compromis, en sectorisant, en préservant tel secteur, mais l’intérêt général a prévalu.
Chers amis du groupe CRC, je pense qu’il n’est pas possible de prévoir un tel verrou.
En revanche, vous avez pris l’engagement, madame la ministre, de ne pas rester in fine dans le flou dans le cas où une commune totalement en désaccord se verrait imposer sur son territoire la loi des autres sans conciliation, sans négociation, sans compromis. Cela va, me semble-t-il, dans la bonne direction. On pourra trouver, en deuxième lecture, les solutions techniques permettant de respecter l’esprit de conciliation que vous avez souligné.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. J’ai bien évidemment écouté avec attention les éléments d’information qui nous ont été apportés par Mme la ministre. J’ai également entendu ce que nous a dit Marie-Noëlle Lienemann sur la sectorisation.
Cependant, je tiens à faire remarquer que la sectorisation dépendra du choix de l’intercommunalité. C’est à elle qu’il reviendra de décider si elle accepte la sectorisation sur une partie du territoire. La question qui est la nôtre reste donc pendante.
Il faut être clair. À un moment, on peut être en intercommunalité sans avoir besoin d’un PLUI, si on a un bon schéma de cohérence territoriale.
Pour ce qui me concerne, je vis dans une intercommunalité qui n’a pas de PLUI, et cela fonctionne très bien. Nous venons d’élaborer un schéma de cohérence territoriale, qui fixe les grandes orientations générales sur un territoire qui est même plus grand que celui de notre intercommunalité. Au sein de l’intercommunalité, personne n’a envie d’un PLUI.
M. Gérard Cornu. Eh oui !
Mme Marie-France Beaufils. Et pourtant, on a un PLH, un plan local de l’habitat ! On est donc capable de travailler correctement.
Pour avoir vécu la mise en place du schéma de cohérence territoriale et avoir vu comment fonctionnait la démocratie au niveau local, je puis vous dire que la population n’est pas associée de la même façon dans un périmètre aussi grand que dans un plus petit, dans le cadre d’un PLU. Dès que l’on prend une aire plus grande, on ne peut pas discuter de la même manière avec les habitants du territoire, et ceux-ci ne s’associent plus et ne participent plus de la même façon à l’élaboration du plan local d’urbanisme, même s’il concerne leur intercommunalité.
Aujourd'hui, je vous le dis très clairement, accepter qu’un PLUI puisse être imposé à une commune qui l’aurait refusé, c’est perdre une vraie vie démocratique et c’est se préparer à la fin des communes ; je le ressens comme tel !
Mme Marie-France Beaufils. C’est ce que je ressens ! Je ne vais pas vous dire l’inverse ! Je ne vais pas vous dire que vous m’avez convaincue, si ce n’est pas le cas.
À vous entendre, madame la ministre, notre amendement n° 228 poserait problème. On pourrait en effet envisager d’accepter l’élaboration du PLUI avec la minorité de blocage proposée, mais acceptez alors notre amendement n° 229 qui prévoit que la commune a une possibilité de blocage dans l’acceptation du PLUI. Si une commune n’est pas d’accord après l’élaboration d’un PLUI et si on le lui impose, on aura, à terme, un problème.
Si vous êtes en désaccord à la fois avec l’amendement n° 228 et l’amendement n° 229, il nous sera difficile de vous suivre sur la conception du PLUI.
Aussi, je demande une suspension de séance, madame la présidente, pour avoir un échange avec Mme la ministre sur ce sujet, car les deux amendements sont très liés.
Mme la présidente. De combien de temps voulez-vous disposer ?
Mme Marie-France Beaufils. Dix ou quinze minutes, madame la présidente, car c’est un sujet important. On a dit qu’il s’agissait d’un sujet très politique : c’est le cas !
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à dix-huit heures vingt.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-huit heures vingt.)
Mme Mireille Schurch. Nous maintenons bien sûr notre point de vue en ce qui concerne le PLUI : nous voulons que les communes soient associées autant qu’il est possible à cette opération intercommunale.
M. Philippe Dallier. Mais…
Mme Mireille Schurch. Néanmoins, nous allons retirer notre amendement.
M. Philippe Dallier. On s’en serait douté !
Mme Mireille Schurch. Comme certains l’ont signalé, son adoption aurait permis qu’une seule commune puisse bloquer l’élaboration d’un PLU intercommunal.
Mme la présidente. L'amendement n° 228 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 27 rectifié quater.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour explication de vote sur l'amendement n° 623 rectifié.
M. Pierre Jarlier. Le transfert des secteurs sauvegardés risque de représenter un frein à l’urbanisme intercommunal, dans la mesure où les procédures qui leur sont applicables sont lourdes et nécessitent un suivi très important. Je tenais à souligner cette difficulté, parce que je pense que nous aurons l’occasion d’en débattre de nouveau. (Mme la ministre acquiesce.)
Mme la présidente. Nous en revenons maintenant au cours normal de la discussion au sein du titre IV, appelé par priorité.
Chapitre Ier (priorité)
Développement de la planification stratégique
Article 58 AA (priorité)
(Non modifié)
À la fin de la seconde phrase du troisième alinéa du V de l’article 19 de la loi n° 2010–788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, l’année : « 2016 » est remplacée par l’année : « 2017 ». – (Adopté.)
Article 58 A (priorité)
(Non modifié)
L’article L. 2124–18 du code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Du côté du val, les ouvrages, plantations, constructions, excavations et clôtures situés à moins de 19,50 mètres du pied des levées sont soumis à autorisation préfectorale. L’autorisation prescrit les mesures nécessaires pour assurer, en toutes circonstances, la sécurité des biens et des personnes, l’accès aux ouvrages de protection, leur entretien ou leur fonctionnement. » ;
2° Le troisième alinéa est supprimé. – (Adopté.)
Article 58 B (priorité)
(Non modifié)
Après le e de l’article L. 422-2 du code de l’urbanisme, il est inséré un f ainsi rédigé :
« f) Les ouvrages, constructions ou installations mentionnés à l’article L. 2124–18 du code général de la propriété des personnes publiques. » – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 58 B (priorité)
Mme la présidente. L'amendement n° 724 rectifié, présenté par MM. Labbé, Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 58 B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase de l’article L. 110 du code de l’urbanisme est complétée par les mots : « ainsi qu’à tendre vers un objectif de zéro artificialisation nette du territoire ».
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à introduire dans les règles générales d’utilisation du sol un objectif de zéro artificialisation nette du territoire à l’horizon de 2025, vers lequel les actions des collectivités territoriales devraient tendre. C’est un objectif exigeant, mais nécessaire !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Bérit-Débat, rapporteur. Que cet objectif puisse être atteint dans le délai proposé nous semble malheureusement assez irréaliste. L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Les auteurs de cet amendement proposent un bon objectif, destiné à maîtriser le foncier et à lutter contre l’artificialisation du territoire. Toutefois, même s’il est utile que chacune puisse contribuer à sa réalisation, l’enjeu dépasse chaque collectivité territoriale.
Cet objectif largement partagé, s’agissant en particulier de la lutte contre la disparition des terres agricoles, un certain nombre de dispositions législatives visent déjà à assurer sa réalisation ; il en sera question dans la suite du débat.
Je pense aussi qu’on peut entendre les arguments qui viennent d’être avancés par M. le rapporteur. Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Cet objectif à des implications importantes, sur lesquelles je désire insister. De fait, tendre vers un objectif de zéro artificialisation nette du territoire signifie que, si certains territoires sont artificialisés, d’autres devront être désartificialisés.
Ce principe m’inquiète beaucoup, car c’est évidemment dans les zones urbaines qu’on va artificialiser et dans les zones rurales qu’on va désartificialiser ! Comme Mme la ministre l’a signalé, un certain nombre d’amendements vont être examinés qui s’appuient sur le même constat. Pour ma part, je vote résolument contre cet amendement !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Le Corbusier avait conçu un projet pour la région parisienne, qui n’a jamais été réalisé : c’est heureux, car il ne prévoyait que des barres et du gazon !
Franchement, comment peut-on vouloir loger un plus grand nombre de personnes sans accroître l’artificialisation ? Sans doute, en construisant en hauteur et en entassant ; mais je ne suis pas persuadé que ce soit l’objectif de vie de nos concitoyens !
Ou alors, peut-être, en ne comptant pas les habitations sans fondations, les habitations mobiles qu’on nous promet d’édifier un peu partout. Il est vrai que, si elles sont biodégradables, on peut considérer qu’il n’y a pas eu d’artificialisation ; mais je ne crois pas que ce soient des chefs-d’œuvre d’urbanisme ! (Sourires.)
Mme la présidente. L’amendement n° 584 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, C. Bourquin, Chevènement, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l’article 58 B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est décidé un moratoire de 5 ans sur l’instauration de nouvelles normes techniques de construction et sur les règles d’urbanisme. Ce moratoire ne fait pas obstacle aux décisions visant à simplifier les normes existantes et la transposition de directives européennes.
Cet amendement n’est pas soutenu.