M. le président. L’amendement n° 141, présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - L’article 9-1 de la même loi est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l’écart entre le nombre de parlementaires de chaque sexe ayant déclaré se rattacher à ce parti ou groupement dépasse 2 % du nombre total de ces parlementaires, le montant de la seconde fraction qui lui est attribué en application des articles 8 et 9 est diminué d’un pourcentage égal à cet écart. »
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Cet amendement de repli, prenant en compte l’imprévisibilité des résultats de l’élection législative, tend à moduler le financement des partis au titre de la seconde fraction en fonction du pourcentage d’écart entre le nombre d’hommes et de femmes parlementaires rattachés à ce parti, à l’image de ce qui se pratique actuellement au titre de la première fraction du financement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Virginie Klès, rapporteur. Cette fraction d’aide est effectivement calculée sur le nombre de parlementaires, sénateurs et députés, qui se rattachent aux partis. C’est une donnée sur laquelle les partis n’ont aucun pouvoir. Fort heureusement, d’une certaine manière, car la démocratie implique un vote et, donc, un choix des électeurs. Pour ces raisons, il ne nous semble pas possible d’appliquer une sanction financière.
La commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Madame la sénatrice Cukierman, ce que vient de dire Mme la rapporteur est juste. J’irai même plus loin : la suppression de la seconde fraction de l’aide publique pourrait même être considérée comme contraire à l’expression du suffrage, puisque le parti n’est pas responsable du fait que les électeurs ont voté pour tel ou tel candidat. Une telle disposition viendrait sanctionner les résultats obtenus par un parti.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Si vous me le permettez à cette heure tardive, je vous répondrai, sur le ton de la boutade, que vous avez totalement raison : on ne peut pas prédire les résultats électoraux. Toutefois, si tel était réellement le cas, il n’y aurait pas tant de problèmes au moment des alliances et des répartitions de circonscriptions…
Certes, d’un point de vue éthique, on ne peut prédire les résultats. Reconnaissons néanmoins que cet exercice nous prend beaucoup de temps, chacun essayant malgré tout de les prédire et s’attachant à placer plutôt un homme ou plutôt une femme, selon que la prédiction est plus ou moins favorable.
Je maintiens les deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix l’article 18, modifié.
(L’article 18 est adopté.)
Chapitre II
Dispositions relatives à l’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sportives
Article additionnel avant l’article 19
M. le président. L’amendement n° 89 rectifié, présenté par Mme Tasca, M. Sueur, Mmes Blondin et Bonnefoy, M. Cornano, Mmes Génisson, Lepage et Meunier, M. Mohamed Soilihi, Mmes Printz, Rossignol et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Avant l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les établissements publics, les ordres professionnels, les organismes de sécurité sociale et mutualistes et les chambres consulaires assurent la parité dans leurs instances dirigeantes et en fixent les modalités pratiques d’application.
La parole est à Mme Catherine Tasca.
Mme Catherine Tasca. Cet amendement vise à imposer aux établissements publics, ordres professionnels, organismes de sécurité sociale et mutualistes ainsi qu’aux chambres consulaires d’assurer la parité au sein de leurs instances dirigeantes, afin de s’inscrire dans le mouvement général de cette loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Virginie Klès, rapporteur. Cet amendement est déjà en grande partie satisfait, soit par le droit en vigueur, soit par le projet de loi que nous sommes en train d’examiner, notamment pour ce qui concerne les réseaux consulaires et les établissements publics de l’État. Pour ce qui est des ordres professionnels, un amendement qui viendra plus tard en discussion les détaille et semble mieux rédigé d’un point de vue juridique.
Pour ces raisons, je vous demande de retirer votre amendement, ma chère collègue. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Sur le fond, nous partageons une même ambition, madame la sénatrice Tasca. Vous savez bien que nous visons le même objectif.
Sur la forme, notre texte traite déjà des organismes consulaires et des caisses de sécurité sociale et la loi du 12 mars 2012 traite des établissements publics. Quant aux ordres professionnels, ils font l’objet d’un amendement que nous examinerons ensuite.
D’un point de vue juridique et formel, votre amendement laisserait aux instances le soin de régler cette question de parité alors que nous estimons, quant à nous, que ce n’est pas à elles de prendre ces responsabilités, qu’il nous faut les leur imposer.
Sur la forme, je ne puis donc être favorable à votre amendement.
M. le président. Madame Tasca, l’amendement n° 89 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Tasca. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 89 rectifié est retiré.
Article 19
L’article L. 131-8 du code du sport est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Les statuts mentionnés au présent article favorisent la parité dans la ou les instances dirigeantes de la fédération dans les conditions prévues au présent II.
« 1. Lorsque la proportion de licenciés de chacun des deux sexes est supérieure ou égale à 25 %, les statuts prévoient les conditions dans lesquelles est garanti dans la ou les instances dirigeantes de la fédération que l’écart entre le nombre de membres de chaque sexe n’est pas supérieur à un.
« Par dérogation au premier alinéa du présent 1, ils peuvent prévoir, selon les fédérations et pour le premier renouvellement de l’instance ou des instances dirigeantes suivant la promulgation de la loi n° … du … pour l’égalité entre les femmes et les hommes, une proportion minimale de sièges définie par décret en Conseil d’État pour les personnes de chaque sexe, sans pouvoir être inférieure à 25 %.
« 2. Lorsque la proportion de licenciés d’un des deux sexes est inférieure à 25 %, les statuts prévoient les conditions dans lesquelles est garantie dans la ou les instances dirigeantes de la fédérations une proportion minimale de sièges pour les personnes de chaque sexe prenant en compte la répartition par sexe des licenciés, sans pouvoir être inférieure à 25 %. »
M. le président. L’amendement n° 116 rectifié, présenté par M. Mézard, Mme Laborde et MM. Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, Collin, Collombat, Fortassin, Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. L’article 19 introduit une disposition sur la parité au sein des instances dirigeantes des fédérations sportives.
Je regrette que cette disposition mette en place un système qui ne reflète pas la réalité, comme certaines fédérations sportives nous l’ont fait observer. Est-il justifié d’imposer la parité dans les instances dirigeantes de fédérations qui comptent une faible part de licenciées féminines ?
Par ailleurs, on peut regretter que cette disposition ne tienne pas compte de la spécificité du monde associatif, constitué de bénévoles qui n’auront pas forcément le temps de se consacrer à cette activité de direction.
C’est pourquoi nous souhaitons maintenir en place le système actuel qui prévoit une représentation de chaque sexe proportionnelle au nombre de licenciés, sans toutefois être inférieure à 25 %.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Virginie Klès, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position de la commission qui cherche à renforcer les règles de parité.
Par ailleurs, les deux amendements suivants assouplissent le dispositif prévu pour répondre aux contraintes rencontrées par certaines fédérations sportives.
Je demande donc le retrait de cet amendement. Dans la négative, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Le Gouvernement souhaite vraiment faire progresser la place des femmes dans les fédérations sportives. Il est, bien évidemment, opposé à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 106, présenté par Mme Blondin, au nom de la commission de la culture, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Après les mots :
instances dirigeantes
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
une proportion minimale de 40 % des sièges pour les personnes de chaque sexe.
La parole est à Mme Maryvonne Blondin, rapporteur pour avis.
Mme Maryvonne Blondin, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Je présenterai en même temps les amendements nos 106 et 107, si vous me le permettez, monsieur le président.
M. le président. J’appelle en discussion l’amendement n° 107, présenté par Mme Blondin, au nom de la commission de la culture, qui est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après le mot :
prévoir
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, pour le premier renouvellement de l’instance ou des instances dirigeantes suivant la promulgation de la loi n° … du … pour l’égalité entre les femmes et les hommes, que la proportion de membres au sein de l’instance ou des instances dirigeantes du sexe le moins représenté parmi les licenciés est au moins égale à sa proportion parmi les licenciés.
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Maryvonne Blondin, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Comme vient de le dire Mme la rapporteur, la parité dans les instances dirigeantes des fédérations sportives est l’objectif à atteindre. Il importe, tout d’abord, de favoriser la pratique sportive féminine, puis de faciliter l’accès des femmes à ces lieux de pouvoir que sont les fédérations sportives nationales. Mais, quand les femmes ne représentent que 30 % des pratiquantes d’une fédération, vouloir en imposer 50 % au sein des instances dirigeantes, c’est presque de la « super-parité ».
La commission de la culture a donc considéré que les mêmes objectifs, qu’il faut garder en tête, pouvaient être atteints avec un seuil minimal de 40 %. Tel est l’objet de l’amendement n° 106.
Quant à l’amendement n° 107, il ne faut pas se voiler la face : les fédérations rencontrent bien des difficultés à faire appliquer le droit actuel, qui impose de respecter la proportion de pratiquantes au sein des fédérations dans leurs instances dirigeantes, mais il est tout aussi évident qu’il faut faire la part de la mauvaise volonté.
Mme Laurence Cohen. Absolument !
Mme Maryvonne Blondin, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Pour siéger au comité directeur d’une fédération, il faut franchir des paliers – que l’on soit homme ou femme, d’ailleurs – : il faut d’abord être membre d’un club, puis membre de la ligue départementale et du bureau de la ligue pour pouvoir accéder, avec de la persévérance, au comité directeur de la fédération.
Il suffit de regarder la moyenne d’âge dans ces instances pour comprendre que le sujet n’est pas seulement celui de la parité mais aussi celui de la gouvernance. Un projet de loi sur la gouvernance du sport devrait bientôt traiter de ce sujet important. En attendant, il paraît plus sage de prévoir un court délai pour que les fédérations puissent appliquer, au prochain renouvellement, une parité proportionnelle au nombre de pratiquants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
Mme Virginie Klès, rapporteur. Comme la commission l’a expliqué précédemment, sans rien renier des objectifs visés par le projet de loi, les amendements nos 106 et 107 permettent d’en assouplir l’application et de la rendre un peu plus progressive. La commission a émis un avis favorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Madame Blondin, vous l’aurez compris, je suis très attachée à cet article. Il me semble absolument essentiel que nous réussissions à franchir un cap, même symbolique, en termes de représentation équilibrée au sein des fédérations sportives, quels que soient les sports, et en laissant évidemment à ces dernières une certaine souplesse en fonction du nombre de licenciés et de la proportion de licenciés des deux sexes.
La solution que vous proposez à l’amendement n° 106 me paraît constituer un compromis raisonnable parce qu’elle n’interdit pas la parité si une fédération veut la mettre en œuvre et permet d’atteindre un plancher qui me semble acceptable. C’est d’ailleurs le plancher qui est fixé, par exemple, pour les conseils d’administration des grandes entreprises ou des établissements publics. Je suis donc favorable à cet amendement, tout en précisant, mais vous l’avez vous-même indiqué, qu’il nous faut par ailleurs rester très vigilants et faire des plans de féminisation des leviers efficaces pour augmenter très substantiellement le nombre de licenciées si nous voulons que les choses évoluent.
En revanche, je m’opposerai avec beaucoup de fermeté à l’amendement n° 107, à moins que vous n’acceptiez de le rectifier. Je m’en explique.
Par cet amendement, vous proposez en quelque sorte de revenir à la règle de proportionnalité en vigueur, fixée par décret depuis 2004. Vous remarquerez d’ailleurs que cette disposition n’a pas beaucoup fait évoluer la situation… L’adoption de cet amendement aurait pour effet de revenir au droit existant, et ce au moins jusqu’en 2020. Vous imaginez à quel point cela nous freinerait pour la suite !
Afin de conserver un objectif relativement ambitieux, je vous suggère de compléter cet amendement par la mention : « sans pouvoir être inférieure à 25 % ». La fixation d’un plancher garantirait un progrès minimal dans la représentation des femmes : je veux vous dire que c’est possible, et partout !
Prenons la Fédération française de cyclisme – je sais quelles fédérations ont pu pousser votre porte et les arguments qu’elles ont donnés – qui compte 10,6 % de licenciées mais seulement un peu plus de 9 % de femmes dans le comité directeur. Avec la règle que je vous suggère, le comité directeur de la fédération comptera 25 % de femmes en 2016. C’est un très bel encouragement, par exemple, pour toutes celles qui ont revendiqué cet été un tour de France au féminin. Nous devons soutenir et accompagner de telles revendications.
Si vous acceptiez de rectifier votre amendement n° 107 en ce sens, madame le rapporteur pour avis, j’y serais favorable ; sinon, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Madame la rapporteur pour avis, acceptez-vous de rectifier ainsi votre amendement ?
Mme Maryvonne Blondin, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 107 rectifié, présenté par Mme Blondin, au nom de la commission de la culture, et ainsi libellé :
Alinéa 6
Après le mot :
prévoir
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, pour le premier renouvellement de l’instance ou des instances dirigeantes suivant la promulgation de la loi n° … du … pour l’égalité entre les femmes et les hommes, que la proportion de membres au sein de l’instance ou des instances dirigeantes du sexe le moins représenté parmi les licenciés est au moins égale à sa proportion parmi les licenciés sans pouvoir être inférieure à 25 %.
La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Avec les collègues de mon groupe, je me désole de constater que l’on essaie, une fois encore, d’assouplir la loi dans le domaine de la parité. Le texte que vous nous présentiez, madame la ministre, nous paraissait tout à fait satisfaisant en la matière.
Cependant, j’entends les arguments qui ont été avancés pour soutenir l’amendement n° 106 portant à 40 % la proportion minimale de chaque sexe, au lieu de la parité, et pour défendre l’amendement n° 107 rectifié avec un plancher de 25 %. Il faudrait pour le moins préciser, me semble-t-il, que ce plancher de 25 % ne s’applique qu’au premier renouvellement et qu’il devra passer à 40 % lors des renouvellements suivants.
En tout cas, il est dommage d’affaiblir le texte que vous nous avez présenté, madame la ministre. Pour ces raisons, notre groupe s’abstiendra sur ces deux amendements.
M. le président. La parole est à Mme Maryvonne Blondin, rapporteur pour avis.
Mme Maryvonne Blondin, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Je comprends votre position, ma chère collègue, et je tiens à vous rassurer : l’objectif affiché reste bien celui de la parité. Néanmoins, il convient de définir des paliers. Vous évoquez la nécessité d’appliquer une proportion de 40 % après le premier renouvellement, mais il s’agit d’un minimum. Nous avions même envisagé en commission de porter le seuil à 60 % dans l’amendement n° 106.
M. le président. Je mets aux voix l’article 19, modifié.
(L’article 19 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 19
M. le président. L’amendement n° 78 rectifié bis, présenté par Mmes Jouanno, Dini et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
En cas de non-respect des règles de la parité, les subventions du ministère sont réduites dans des conditions prévues par décret.
La parole est à Mme Chantal Jouanno.
Mme Chantal Jouanno. Cet amendement tend à compléter l’article 19 que nous venons d’adopter. Franchement, madame la ministre, n’hésitez pas à renforcer les obligations à l’égard des fédérations sportives, parce qu’elles n’ont pas beaucoup de leçons à donner aux politiques en termes de représentation des femmes ! En outre, les chiffres évoluent très peu dans le temps.
Nous avons toujours été très conciliants avec le monde du sport, parce que nous savons le poids qu’il peut avoir localement et sur le plan national, mais il est assez étonnant de constater la permanence des discours et des chiffres.
Actuellement, il est prévu de retirer l’agrément à une fédération qui ne respecterait pas ses obligations, ce qui signifie concrètement que celle-ci ne pourrait plus organiser de compétitions sportives. Cette procédure n’a quasiment jamais été utilisée, ou alors seulement à l’égard de toutes petites fédérations. Vous imaginez bien, par exemple, qu’aucun ministre ne retirera l’agrément à la Fédération française de football, qui n’est pourtant pas la plus exemplaire dans ce domaine !
C’est la raison pour laquelle j’ai proposé cet amendement – extrêmement mal rédigé, je le reconnais – visant à prévoir plutôt une sanction financière et à faire en sorte qu’en aucun cas une fédération ne puisse bénéficier des financements du ministère, voire de subventions publiques. Je doute en effet très fortement que nous puissions appliquer le principe du retrait d’un agrément.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Virginie Klès, rapporteur. Les obligations de parité sont tout justes introduites par l’article 19. Imposer d’ores et déjà des sanctions financières, de surcroît sans les assortir de conditions pour s’assurer qu’elles ne retombent pas sur de petits clubs associatifs qui font des efforts pour respecter la parité, me semble quelque peu excessif, en tout cas à ce stade.
Peut-être conviendrait-il soit de réécrire votre amendement pour le présenter en deuxième lecture, soit de prendre le temps de la réflexion afin de voir si la loi s’applique, dès lors qu’elle est assortie d’obligations chiffrées beaucoup plus précises qu’auparavant.
Quoi qu’il en soit, en l’état, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Madame la sénatrice, je comprends que vous vous demandiez comment nous allons nous assurer que les nouvelles règles que nous établissons vont être respectées.
À cet égard, je dispose de quelques éléments de réponse. Avec ma collègue en charge des sports, Valérie Fourneyron, nous avons fait le choix de recourir à la contractualisation avec les fédérations. Avant la fin de cette année, nous aurons revu l’ensemble des conventions d’objectifs et de moyens des fédérations pour que soient fixés de nouveaux objectifs, notamment en termes de places des femmes dans les instances dirigeantes.
Par ailleurs, nous mettons en place les plans de féminisation issus du groupe de travail « femmes et sports » que vous aviez installé lorsque vous étiez ministre des sports. Les présidents de fédération ont été informés que toutes les fédérations devront présenter un plan de féminisation dans le cadre des prochaines conventions d’objectifs 2014-2017. On y traite de la place des femmes dans les instances dirigeantes, fédérales et déconcentrées ; on y traite de la place des femmes dans les fonctions d’arbitrage et de jugement technique ainsi que dans l’encadrement technique, qu’il soit bénévole ou rémunéré.
Compte tenu de tous ces éléments, il doit être clair pour vous qu’aucune subvention pour le développement du sport féminin ne sera versée aux fédérations qui ne présentent pas de feuille de route pour féminiser leurs instances.
Telles sont les raisons pour lesquelles, à ce stade de la discussion, je vous suggère de retirer votre amendement ; à défaut, nous y serions défavorables.
M. le président. Madame Jouanno, l’amendement n° 78 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Chantal Jouanno. Je reprends mon explication. Quand j’étais ministre des sports, nous avions fixé un principe, qui a d’ailleurs été très vite enterré après mon départ. Je trouvais en effet étonnant de devoir payer des fédérations pour féminiser le sport. C’est dire à quel point on a peur des fédérations !
Il s’agissait juste d’inverser le principe, autrement dit que les fédérations ne reçoivent pas de subventions si elles ne féminisent pas leurs instances. Certes, cet amendement a été rédigé à la va-vite, je le reconnais, aussi vais-je le retirer. Cependant, madame la ministre, je vous invite vivement à y réfléchir, parce que je connais le rapport de forces avec le Comité national olympique et sportif français, le CNOSF, et les fédérations. Aujourd’hui, nous dépensons de l’argent public pour mettre en œuvre une obligation légale, et même constitutionnelle !
M. le président. L’amendement n° 78 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 170, présenté par Mme Klès, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 331-1 du code du sport est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elles veillent, dans chaque discipline, à assurer aux compétitions féminines et aux compétitions masculines les conditions d’une audience équivalente. »
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Virginie Klès, rapporteur. Cet amendement vise à redonner aux fédérations sportives des responsabilités importantes en matière de parité et d’éducation des jeunes. J’ai été troublée de m’apercevoir que, quel que soit le sport, l’idée était finalement passée dans les mœurs que les premières finales, les finales des perdants, les petites finales, celles des femmes, avaient lieu le samedi et la vraie finale, celle des hommes, le dimanche, jour de grande audience. On donne là, me semble-t-il, une image extrêmement négative du sport féminin, à l’inverse de ce que nous souhaitons instaurer au travers de ce projet de loi.
Selon nous, c’est aux fédérations sportives de veiller, chacune avec ses contraintes, dans la concertation, à assurer les conditions d’une audience équivalente pour les finales, qu’elles soient féminines ou masculines.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Madame la rapporteur, je comprends votre préoccupation de donner une responsabilité plus importante aux fédérations pour qu’elles assurent une audience plus forte aux sports féminins. Dans le même temps, je vois une limite à votre proposition, les fédérations n’étant pas les seules responsables des différences d’audience entre les sports féminins et masculins.
Par ailleurs, les conditions d’une bonne audience sont très difficiles à déterminer. La seule certitude que l’on puisse avoir en ce domaine est qu’il existe une appétence du public pour le sport féminin, comme on a pu le constater en 2011 avec la demi-finale de la coupe du monde de football féminin.
Cela ne veut pas dire qu’il ne faille rien attendre des fédérations, bien au contraire. Nous avons engagé un dialogue soutenu avec ces dernières sur la question de la médiatisation. Elles ont fait preuve de leur intérêt et incluent bien souvent, désormais, dans la négociation de leurs droits télévisuels, la nécessité pour les chaînes partenaires d’acheter des lots comprenant les droits du sport masculin et féminin, ainsi que ceux du handisport.
Pour revenir à votre amendement, je vous rappelle que l’article 16, adopté tout à l’heure par la Haute Assemblée, va donner plus de pouvoirs au CSA pour lutter contre les préjugés sexistes et les inégalités de traitement médiatique dans tous les domaines, y compris le sport. C’est ainsi, me semble-t-il que nous pourrons vraiment avancer.
De la même façon, dans le projet d’avenant 2013-2015 du contrat d’objectifs et de moyens de France Télévisions, le groupe d’audiovisuel public s’engage à promouvoir et accompagner les sports féminins sur ses antennes en intensifiant la couverture des compétitions féminines, mais aussi en leur accordant toute la place qu’elles méritent dans son offre de magazines et de reportages.
J’ajouterai un dernier élément important : comme vous le savez, nous avons décidé de revoir le décret dit « télévision sans frontières » – ou « TSF » – qui fixe la liste des compétitions sportives d’importance majeure devant être diffusées en accès non payant à la télévision. Très peu d’événements sportifs féminins figuraient dans cette liste, nous avons décidé d’en inclure davantage avant de transmettre le nouveau décret à la Commission européenne, puisqu’il s’agit de la transposition d’une directive communautaire.
L’ensemble de ces mesures nous permettra de bien avancer dans les prochains mois sur cette question de la médiatisation. Sous le bénéfice de ces éclairages, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.