Mme la présidente. La parole est à M. Claude Dilain.
M. Claude Dilain. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen de ce texte, qui a été particulièrement étudié, discuté, amendé.
Comme vous l’avez justement fait remarquer vous-même, madame la ministre, certaines dispositions sont revenues en débat plusieurs fois, dans cet hémicycle ou en commission. Vous avez cité le cas d’amendements examinés à huit reprises !
Au terme de la discussion, nous aboutissons à un texte doublement équilibré.
D’une part, l’équilibre est assuré entre l’Assemblée nationale, et les différentes tendances qui s’y sont exprimées, et le Sénat. Grâce à la commission mixte paritaire et, ensuite, au « renvoi », si je puis dire, du texte au Gouvernement, la version finale satisfait beaucoup d’entre nous, un certain nombre de pierres d’achoppement ayant été supprimées.
D’autre part, l’équilibre est assuré en ce que le projet de loi allie des incitations pour construire le logement social et l’organisation d’une juste solidarité.
Le moment est historique, puisque l’on va mettre à disposition du foncier public à des prix décotés. Voilà tout de même un signal très important, à l’heure où, cela a été dit à plusieurs reprises, on se plaint de ne pas avoir suffisamment de foncier.
En même temps qu’il prévoit des incitations, le texte met en place, non pas, comme certains le disent, des pénalités ou des sanctions, mais l’organisation d’une juste solidarité en matière de logement social. On l’a vu, le droit au logement est un droit essentiel, inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Madame la ministre, ce texte constitue à nos yeux une étape importante et il est à mettre en perspective non seulement avec ce qui a déjà été fait, par exemple, sur la limitation des loyers, mais aussi avec ce qui va l’être. S’il n’y avait pas lieu, dans le cadre de ce projet de loi, d’évoquer un certain nombre de questions, celles-ci seront de nouveau débattues très bientôt, et c’est une bonne chose.
Il ne faut pas isoler le présent texte : c’est un maillon de toute la chaîne que vous avez commencé à construire depuis votre nomination au ministère. Vous n’en serez donc pas surprise, le groupe socialiste le votera avec enthousiasme. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Madame la ministre, nous n’avons pas présenté d’amendements et nous allons voter ce projet de loi conforme, bien que ce ne soit pas trop dans nos habitudes.
D’abord, vous avez eu la très bonne idée de débarrasser le texte initial de quelques bourgeonnements, auxquels nous étions quelque peu allergiques.
Ensuite, vous nous avez précisé que le projet de loi n’était que le premier étage d’une fusée que vous nous présenterez ultérieurement. Je persiste à le dire, comme d’autres avant moi, outre le problème posé par la mauvaise volonté affichée par un certain nombre de communes, il faut, pour améliorer notre production de logements sociaux, résoudre la question du financement et celle du foncier disponible.
Sur les problèmes financiers, je ne vous fais pas de dessin : nombreux sont les plans de financement qui, faute d’être équilibrés, ne sont pas véritablement sincères.
Par ailleurs, madame la ministre, je vous demande d’être attentive, dans la perspective de la prochaine loi sur le sujet, aux difficultés rencontrées par un certain nombre d’établissements publics fonciers régionaux, qui, tout en ayant finalement maintenant le même statut que les autres, n’ont pas les mêmes moyens. Je ne sais pas pourquoi, mais il semblerait que, du côté de Bercy, on sabote délibérément toute initiative en la matière.
Peut-être m’expliquera-t-on un jour pourquoi, alors que cela doit faire trois ou quatre fois que je dépose le même amendement, on me le retoque systématiquement, sans aucune raison. Si l’on ne donne pas les mêmes moyens aux établissements publics fonciers, notamment en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, confrontée, disons-le, à quelques problèmes en matière de foncier, on n’y arrivera pas. Voilà, le message est lancé.
Telles sont les raisons pour lesquelles, madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe RDSE votera ce texte, peut-être pas avec enthousiasme, mais avec espoir.
Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Lipietz.
Mme Hélène Lipietz. Madame la ministre, je vous voyais regarder avec angoisse Jean-Vincent Placé : il ne sera pas dit que, quand notre chef est aphone, le groupe Vert reste muet ! (Sourires.) Nous, écologistes, voterons le projet de loi avec d’autant plus de fierté que vous êtes issue de nos rangs.
M. Jean-Claude Lenoir. La raison n’est pas suffisante !
M. Gérard Longuet. Utile rappel !
Mme Hélène Lipietz. Il ne s’agit pas de loger les plus pauvres, comme semblent le penser les plus riches, qui habitent des communes où l’on se regarde entre soi, sans aucune mixité. Il s’agit de loger tous les habitants de France, parce que dormir dans une cabine téléphonique, comme on peut le voir actuellement sur le boulevard Saint-Michel, est un véritable scandale.
Bien que ce texte ne soit qu’une première étape, il illustre magnifiquement notre devise républicaine. Aujourd’hui, le mot à la mode est « solidarité ». C’est pourtant le triptyque « liberté, égalité, fraternité » qui constitue le socle même du projet de loi.
Il reste maintenant à peaufiner ce texte et, surtout, à faire en sorte que tous – État, promoteurs, communes, voisins, futurs locataires et hébergés – le fassent vivre. Si celui-ci répond à une urgence, il en faut maintenant un autre, pour le quotidien. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.
Je suis saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 72 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 314 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 158 |
Pour l’adoption | 177 |
Contre | 137 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
En conséquence, le Sénat a adopté définitivement le projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Cécile Duflot, ministre. Madame la présidente, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, j’espère vous retrouver très bientôt pour débattre d’un nouveau projet de loi. En attendant, je suis très heureuse que ce projet de loi, adopté en termes identiques par l’Assemblée nationale et par le Sénat, puisse être promulgué au tout début de l’année 2013 et mis en œuvre très rapidement.
Je voudrais vous remercier, monsieur Reichardt, pour avoir rendu hommage à la persistance de mes convictions et de mes positions. Ne vous inquiétez pas : celles-ci vont continuer ! Je me tiens devant vous pour défendre, en matière de logement, la politique d’un gouvernement qui souhaite non seulement qu’un toit soit un droit, mais également que nous soyons en situation de réguler les problèmes de logement par l’intervention de la puissance publique, seule à même de dégager cette question des logiques du marché qui ne permettent pas d’apporter une réponse satisfaisante.
Je remercie personnellement chacune et chacun des participants à ce débat, qui a été riche et fructueux. J’adresse mes remerciements tout particuliers à M. le président de la commission et à M. le rapporteur pour s’être autant investis dans leur travail lors des deux aventures qu’ont été les parcours de ces deux projets de loi, très semblables l’un à l’autre, je vous le concède.
J’ai été sensible aux remerciements de Mmes Schurch et Lipietz, comme à ceux de M. Dilain. J’ai entendu l’enthousiasme, certes mesuré de M. Collombat, mais j’ai noté tout l’espoir de son propos. Je serai très heureuse de pouvoir travailler avec vous sur l’ensemble de ces sujets : les établissements publics fonciers, plus largement la politique foncière, la réforme des lois de 1965, 1970 et 1989, bref, une refondation de la politique du logement et de l’urbanisme, sur laquelle comptent nombre d’élus locaux et, au-delà, beaucoup d’habitants de notre pays. Nous aurons également l’occasion de débattre autour de la loi « égalité des territoires ».
Cependant, en tout état de cause, – chacun se souvient de la loi SRU votée il y a douze ans et de ceux qui ont périodiquement essayé de la déshabiller – je pense qu’en matière d’égalité d’accès au logement, quand on crante un élément important, on ne fait plus marche arrière. Tout le monde convient qu’il est légitime de le maintenir. Donc, je souhaite les meilleurs succès à cette loi, désormais votée. Je souhaite qu’elle permette à tous nos concitoyennes et concitoyens qui en ont besoin de trouver, grâce à elle, un logement afin de pouvoir s’épanouir.
Je vous remercie tous très sincèrement, notamment vous, madame la présidente. Je vous souhaite à tous une très bonne soirée, une bonne continuité et vous dis : à très bientôt ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Je vous remercie, madame la ministre, pour vos paroles à l’attention de la séance.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Je voudrais remercier le groupe UMP, notamment Philippe Dallier, de nous avoir permis d’apporter quelques précisions et explications de texte concernant la distinction entre contributions, prélèvements et pénalités. J’espère que, cette fois, nos collègues auront compris toute la subtilité entre les termes. Cela méritait une double explication et je les remercie de nous avoir donné la possibilité de le faire.
Je souhaiterais remercier tout particulièrement Mme la ministre, qui a répondu très clairement à chacune des questions posées. Je remercie tous les collègues qui nous ont soutenus. M. le rapporteur mérite une mention toute particulière pour avoir été mis deux fois à l’épreuve et avoir conservé un calme tout à fait remarquable ! Merci enfin aux collaborateurs de la commission, et bonne année à tous ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
5
Candidatures à une commission mixte paritaire
Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre.
J’informe le Sénat que la commission des affaires économiques m’a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats qu’elle présente à cette commission mixte paritaire.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l’article 12 du règlement.
6
Loi de finances pour 2013
Rejet d’un projet de loi en nouvelle lecture
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, de finances pour 2013 (projet no 229, rapport n° 232).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.
Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur. Madame la présidente, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, j’ai failli dire chers collègues (Sourires.), mesdames, messieurs les sénatrices et sénateurs, le Sénat va examiner en nouvelle lecture le projet de loi de finances pour 2013.
Je voudrais vous rappeler le plus rapidement possible les trois priorités qui fondent l’action des pouvoirs publics, et singulièrement du Gouvernement, pour 2013 et que ce texte met en œuvre. J’évoquerai ensuite l’apport de l’Assemblée nationale et la reprise de certains amendements du Sénat.
Je rappelle les trois priorités de notre action : la sortie de la crise euro – première priorité européenne –, le redressement de nos finances publiques et l’amélioration de la compétitivité des entreprises.
Je commencerai par la sortie de crise de la zone euro. Depuis son entrée en fonction, le Gouvernement s’est mobilisé pour cette sortie de crise. En juin, l’adoption du Pacte européen pour la croissance et l’emploi a permis de compléter le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union européenne, au travers, notamment, d’une augmentation du capital de la Banque européenne d’investissement et de l’appel à la mobilisation des fonds structurels.
L’installation formelle du Mécanisme européen de stabilité, le MES, au mois d’octobre et la restructuration toute récente de la dette grecque consolident l’apaisement progressif des tensions sur les dettes souveraines en Europe. Le MES sera autorisé à recapitaliser directement les banques soumises à supervision commune. Le consensus trouvé la semaine dernière à Bruxelles sur ce dernier point constitue un nouveau jalon du redressement européen, qu’il ne faut pas sous-estimer.
Il me faut aussi évoquer l’accord passé avec nos partenaires pour tenter de régler le très douloureux dossier Dexia, dont nous avons hérité de nos prédécesseurs. Cet accord vous a été présenté dans le cadre du collectif budgétaire de fin d’année.
Ce projet de loi de finances porte, lui aussi, la marque de cette priorité européenne : un amendement, déjà adopté à l’Assemblée nationale la semaine dernière, vise à majorer le prélèvement sur recettes au bénéfice de l’Union européenne de 837 millions d’euros pour tenir compte du budget rectificatif 2012 qui vient d’être adopté au Parlement européen et sera décaissé en 2012. Ce budget rectificatif est porteur d’actions pour l’emploi, la croissance et l’innovation : 4,4 milliards d’euros sont mobilisés au profit des fonds structurels, 1 milliard d’euros en faveur du Fonds européen agricole et 600 millions d’euros au titre de la compétitivité.
Au regard de l’impératif du redressement des comptes que je vais évoquer, il faudra naturellement gager ce versement par des annulations de crédits d’autres missions sur 2013 afin d’assurer le respect de la norme « zéro valeur » sur un périmètre qui inclut les prélèvements sur recettes au bénéfice des collectivités locales et de l’Union européenne.
La deuxième priorité, c’est le redressement de nos finances publiques.
Cette politique de redressement est centrale dans le projet de loi de finances. L’effort à réaliser, nul ne le conteste, est important : 30 milliards d’euros doivent être trouvés dès 2013 pour permettre à la France de respecter les engagements pris vis-à-vis de nos partenaires.
La stratégie du Gouvernement est claire : combiner, d’une part, l’augmentation des recettes, indispensable pour permettre un ajustement à court terme et réalisée dans le cadre d’une réforme ambitieuse de notre structure de prélèvements obligatoires, qui vise à demander plus à ceux qui peuvent contribuer,…
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !
Mme Nicole Bricq, ministre. … et, d’autre part, la stricte maîtrise de la dépense. La norme « zéro valeur » sera respectée l’année prochaine, comme je l’ai indiqué, mais également pendant toute la durée de la mandature. Combiné aux 10 milliards d’euros d’économies complémentaires sur la dépense publique annoncées dans le cadre du financement du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ce respect de la norme « zéro valeur » pour l’État, de même que les efforts consentis par les opérateurs, les collectivités locales et la sécurité sociale, permettront une économie totale, en 2017, de 60 milliards d’euros.
Le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique, qui s’est réuni ce matin sous l’autorité du Premier ministre,…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. La nouvelle RGPP !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Mais oui !
Mme Nicole Bricq, ministre. … a fixé le cadre de travail, et la méthode : nous n’appliquerons pas de rabot aveugle sur les dépenses,...
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ah !
Mme Nicole Bricq, ministre. … nous privilégierons les réformes de structure, que vous avez si souvent appelées de vos vœux, monsieur le président de la commission des finances.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Tout à fait ! Ce sera un vrai plaisir...
Mme Nicole Bricq, ministre. Ces réformes seront mises en œuvre en concertation avec l’ensemble des acteurs impliqués, le Parlement, les agents et les usagers, ainsi que les citoyens. C’est une condition essentielle au succès de notre démarche, qui est fondamentalement différente de celle du précédent gouvernement.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Bien sûr...
Mme Nicole Bricq, ministre. La troisième priorité, c’est le renforcement de la compétitivité de notre économie.
Il s’agit, bien sûr, du projet de crédit d’impôt pour la compétitivité et pour l’emploi, dont vous avez débattu la semaine dernière lors de l’examen de la loi de finances rectificative, projet annoncé le 6 novembre et que le Gouvernement a souhaité mettre en œuvre avant la fin de l’année, afin que les entreprises puissent l’inscrire à leur bilan en 2013.
Tels sont les trois axes qui structurent la politique économique et budgétaire du Gouvernement.
Je souhaite également retracer les grandes lignes du débat parlementaire de ces dernières semaines pour ce qui concerne le projet de loi de finances.
La première lecture a permis d’enrichir le texte, tout en consolidant notre objectif de sérieux budgétaire. Le solde a ainsi été amélioré de près de 400 millions d’euros à l’Assemblée nationale, grâce notamment à plusieurs amendements renforçant la perspective de justice fiscale. Une première étape a également pu être franchie en matière de réforme des taxes affectées, en parallèle d’un plafonnement étendu des niches fiscales.
L’Assemblée nationale n’a pas fait que réduire les dépenses ou dégager des recettes : des mesures de croissance et de justice ont aussi été adoptées en faveur du logement, de la presse, ou encore au travers de la division par deux du droit acquitté lors d’une demande de titre de séjour.
Au Sénat, le rejet du texte a privé d’effets les amendements adoptés en première lecture.
Mme Michèle André. Eh oui !
Mme Nicole Bricq, ministre. Certains ont pu être repris par l’Assemblée nationale dans un autre cadre législatif : c’est le cas, notamment, de la réforme de la contribution foncière des entreprises, la CFE, mise en œuvre au travers du collectif budgétaire de fin d’année. D’autres ont été intégrés à ce projet de loi de finances lors de la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale et figurent donc dans le texte que vous vous apprêtez à examiner.
Permettez-moi d’en mentionner quelques-uns, sans que cette liste soit naturellement exhaustive : la puissance administrative maximale admise au titre du barème kilométrique a été relevée à 7 chevaux ; un prélèvement sur recette complémentaire viendra compenser la perte de recette pour les communes ayant déjà instauré une taxe d’habitation sur les logements vacants ; la modulation tarifaire de la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, pour les installations certifiées de stockage de déchets a été restaurée ; les délégations, concessions, contrats de partenariat et baux emphytéotiques seront exonérés de la mesure visant à limiter la déductibilité des charges financières, étant précisé que l’Assemblée nationale a choisi de limiter cette exonération aux seuls contrats conclus avant la promulgation de la loi de finances. Cette mesure a naturellement un coût : elle a été gagée par une augmentation de deux points du taux de la quote-part pour frais et charges au titre des plus-values sur cession de titres de participation, la trop fameuse « niche Copé ».
Cette nouvelle lecture sera l’occasion de réexaminer ensemble ces dispositions, qui témoignent de ce que le texte que nous vous présentons est le fruit du travail des deux assemblées. Le débat qui s’ouvre sera, je l’espère, l’occasion de poursuivre et d’achever l’élaboration de ce projet de budget, dans le respect de son équilibre d’ensemble, et avec le souci partagé par tous et souvent exprimé au Sénat, de part et d’autre de l’hémicycle, du redressement de nos comptes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Permettez-moi tout d’abord, madame la ministre, de me réjouir de votre présence parmi nous, vous qui avez animé durant des années nos débats budgétaires. Je me félicite de vous retrouver au banc du Gouvernement à l’occasion de l’examen du présent projet de loi de finances, dans un contexte un peu particulier.
La commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte commun sur le projet de loi de finances pour 2013 a échoué car il n’a pas semblé possible d’aboutir à une rédaction acceptable dans les mêmes termes par les deux assemblées.
Dès lors que le Sénat avait rejeté le projet de loi, c’est donc sur la base de son texte de première lecture, comportant 119 articles, que l’Assemblée nationale a statué en nouvelle lecture.
Elle a maintenu son texte de première lecture pour 68 articles et l’a modifié pour les 51 autres articles.
Pour ma part, je porte une appréciation positive sur le texte issu des débats de l’Assemblée nationale. Sur la première partie, l’essentiel des modifications apportées par le Sénat aux articles figurant dans le texte que lui avait transmis l’Assemblée nationale ont été reprises. Malheureusement, mais la procédure est ainsi, les articles additionnels que nous avions insérés n’ont pu connaître le même sort dans le projet de loi de finances !
Nous avons vu, vendredi et samedi, que certains de ces articles additionnels avaient été insérés par l’Assemblée nationale dans le projet de loi de finances rectificative pour 2012. C’est le cas de la transformation en crédit d’impôt de la réduction d’impôt applicable aux cotisations versées aux organisations syndicales et des modalités de fixation des bases minimum de CFE en 2012.
Sur la seconde partie, l’Assemblée nationale n’a pas pu retenir nos préconisations puisque nous n’en avons pas adopté.
Sur l’ensemble du texte, l’Assemblée nationale a par ailleurs adopté en nouvelle lecture un grand nombre de modifications qui, pour l’essentiel, sont soit des précisions utiles, soit des dispositions attendues.
J’avoue cependant partager l’étonnement manifesté ce matin en commission par plusieurs collègues s’agissant des modifications apportées à l’article 69 relatif aux modalités de répartition entre les départements du fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux, les DMTO, et du fonds de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE.
L’Assemblée nationale avait abondamment évoqué cette question. Les rapporteurs spéciaux de notre commission des finances y avaient beaucoup travaillé. Compte tenu du rejet du projet de loi de finances, nous avions introduit le débat dans le projet de loi de finances rectificative, mais comme il s’est trouvé au Sénat une majorité pour rejeter ce dernier texte, ces dispositions n’ont pas pu prospérer. C’est en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale que les modalités de répartition ont à nouveau été modifiées.
Après cette introduction, je vais m’efforcer de retracer les modifications apportées par l’Assemblée nationale, en commençant par les dispositions adoptées par le Sénat en première lecture – avant le rejet de la première partie et donc de l’ensemble du texte – que les députés ont jugé utile de reprendre.
À l’article 2, comme l’avait proposé la commission des finances, les plafonds des abattements d’impôt sur le revenu dont bénéficient les plus de 75 ans et les handicapés ont été revalorisés.
À l’article 4 ter, reprenant une initiative du groupe RDSE, l’Assemblée nationale a porté de 6 à 7 chevaux fiscaux le plafond du barème kilométrique dans le cadre du régime de la déduction des frais professionnels.
M. Yvon Collin. Très bien !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. À l’article 4 quater, le régime du crédit d’impôt PPRT – plan de prévention des risques technologiques – a été retouché comme nous l’avions suggéré.
À l’article 5, relatif à l’imposition des dividendes, la date limite de dépôt des demandes de dispense de paiement du prélèvement servant d’acompte a été repoussée du 31 octobre au 30 novembre, comme l’avait proposé notre collègue Roland du Luart.
À l’article 6, relatif à la fiscalité des plus-values de cession, des amendements de la commission des finances, du groupe socialiste et du groupe RDSE ont été repris.
À l’article 11, le prélèvement sur recettes au profit des communes qui perdront le bénéfice de la taxe d’habitation sur les logements vacants a été repris par les députés, qui l’ont toutefois inscrit dans l’enveloppe normée des concours de l’État aux collectivités territoriales.
Les collectivités locales seront ravies de constater que les modulations de TGAP sont maintenues puisque les députés ont finalement supprimé l’article 13 bis, comme un certain nombre d’entre nous l’avaient suggéré ici même.
À l’article 15, les députés, sur proposition du Gouvernement, ont repris notre amendement maintenant la déductibilité des charges financières au profit des contrats de partenariat public-privé, les PPP – nous avions longuement débattu de ce point dans cette enceinte –, aux concessions de service public ou aux baux emphytéotiques. Cependant, sur l’initiative de la commission des finances, ce régime a été limité aux contrats en cours.
À l’article 30, l’Assemblée nationale a maintenu notre demande de rapport sur les modalités de financement des logements des propriétaires aux revenus modestes, dans un contexte où le financement des missions sociales des sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif pour l’accession à la propriété, les SACICAP, pourrait être fragilisé par la situation du Crédit immobilier de France.
À l’article 39, sur proposition du Gouvernement, l’Assemblée nationale a majoré de 2 euros la hausse de la contribution à l’audiovisuel public, une disposition votée au Sénat.
À l’issue de cette énumération, il nous faut constater que toutes nos idées n’ont pas été reprises. C’est ainsi que l’abattement exceptionnel sur les plus-values de cessions immobilières est maintenu à 20 %, et non ramené à 15 %.
Au-delà de la reprise ou non de certains des amendements adoptés par le Sénat, l’Assemblée nationale a apporté de nouvelles modifications aux articles du projet de loi de finances.
Elle a précisé plusieurs dispositifs, et notamment le régime fiscal des plus-values de cession de valeurs mobilières et du plafonnement de l’impôt de solidarité sur la fortune.
Elle a aussi porté de 10 % à 12 % le taux de la quote-part pour frais et charges sur les plus-values de cession des titres de participation. Cette nouvelle réduction de la « niche Copé » a été réalisée pour financer le régime spécifique des PPP au regard de la déductibilité des charges financières prévue à l’article 15. Les députés ont d’ailleurs aussi maintenu la déductibilité intégrale pour les locations entre entreprises liées portant sur des biens immobiliers.
À l’article 19, les députés ont accepté ce que le Sénat avait refusé, c’est-à-dire le financement par les variables d’ajustement de l’enveloppe normée de la majoration de 25 millions d’euros de la dotation de solidarité urbaine.
À l’article 29 relatif aux taxes sur les titres délivrés aux étrangers, l’Assemblée nationale a adopté un amendement très proche d’un dispositif proposé par le groupe socialiste visant à ce que la taxe sur les titres délivrés aux étrangers soit acquittée lors de la délivrance du visa, et non lors de la demande.
À l’article 44, l’Assemblée nationale a majoré de 837 millions d’euros le montant du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne, ce qui explique l’essentiel de la dégradation du solde budgétaire de 1 milliard d’euros constatée en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale.
En seconde partie, l’Assemblée nationale a modifié sensiblement – j’ai évoqué ce point en introduction – les articles rattachés à la mission « Relations avec les collectivités territoriales », notamment l’article 68, pour maintenir le plafonnement de la contribution des communes au fonds de solidarité de la région Île-de-France à 10 % de leurs dépenses réelles de fonctionnement, mais aussi l’article 69. Alors qu’elle n’avait pas retouché ces dispositifs en première lecture, l’Assemblée nationale a modifié l’alimentation du fonds de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises des départements, en abandonnant le principe du flux cumulé auquel le Sénat était attaché, et a modifié les règles d’éligibilité au fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux, en complétant le critère du potentiel financier par un critère de revenu par habitant pondéré par la population.
Enfin, j’évoquerai l’article 66, qui est relatif à la garantie de l’État au Crédit immobilier de France, le CIF.
Ce sujet a beaucoup occupé la commission des finances depuis le début du mois d’octobre. J’ai présenté le 5 décembre dernier une synthèse des auditions auxquelles un groupe de travail a procédé.
Nous avons pris acte de la mise en extinction du Crédit immobilier de France dans sa forme actuelle, tout en souhaitant qu’il n’y ait pas de recul de l’accession sociale à la propriété dans notre pays. Nous avons émis le vœu que la fiscalité immobilière soit orientée en ce sens. Nous avons avancé l’idée d’une médiation de l’accession sociale, sur le modèle de la médiation du crédit. Nous avons souhaité une évaluation des conséquences de l’évolution des règles prudentielles applicables aux banques sur la distribution de prêts à l’habitat et de la pertinence de la mise en place d’un service d’intérêt économique général, au sens du droit communautaire, pour régir l’activité de prêt à l’accession sociale pour les ménages les plus modestes. Nous nous sommes également préoccupés de la situation des personnels et avons annoncé que, dans l’éventualité, qui semble se confirmer, où l’État demanderait à la Banque postale d’accroître son offre dans ce domaine, nous mettrions sur pied un comité de suivi qui entendrait, en tant que de besoin, l’ensemble des acteurs de ce secteur.
Pour sa part, l’Assemblée nationale a souhaité que le Gouvernement remette avant la fin du mois de mars un rapport sur « les résultats de l’examen de la situation du CIF ».
J’en ai terminé de ce bilan non exhaustif des votes de l’Assemblée nationale. Il m’a conduit à préconiser ce matin à la commission des finances l’adoption du texte issu de la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, compte tenu du stade de la navette auquel nous sommes parvenus et du fait que l’Assemblée nationale, qui a le dernier mot, a repris, lorsqu’elle était juridiquement en mesure de le faire, une part très significative de nos apports.
Pour conclure, je rappellerai avec gravité qu’il ne faut pas perdre de vue que ce projet de loi de finances est particulièrement exigeant, puisque sa mise en œuvre doit nous permettre, avec celle de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, de revenir sous le seuil de déficit de 3 % du PIB. Pour son premier projet de loi de finances initiale, ce gouvernement fait preuve d’un grand courage, qui commande notre soutien et force notre respect.
Toutefois, nous n’allons pas reprendre ici les débats de première lecture et je m’en tiendrai là, après avoir indiqué que la commission des finances, réunie ce matin, a appelé, à la majorité de ses membres présents, à rejeter l’ensemble du projet de loi.