Article 13
Dans un délai de trois mois suivant la publication des décrets prévus à l’article 12, l’autorité territoriale présente au comité technique compétent un rapport sur la situation des agents remplissant les conditions définies aux articles 10 et 11 ainsi qu’un programme pluriannuel d’accès à l’emploi titulaire. Ce programme détermine notamment, en fonction des besoins de la collectivité territoriale ou de l’établissement public intéressé et des objectifs de la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences, les cadres d’emplois ouverts aux recrutements réservés, le nombre d’emplois ouverts à chacun de ces recrutements et leur répartition entre les sessions successives de recrutement.
La présentation du rapport et du programme donne lieu à un avis du comité technique dans les conditions fixées par l’article 33 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée.
Le programme pluriannuel d’accès à l’emploi est soumis à l’approbation de l’organe délibérant de la collectivité ou de l’établissement puis mis en œuvre par décisions de l’autorité territoriale.
M. le président. L'amendement n° 77, présenté par M. Delahaye, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. L'article 13 organise la détermination des corps accessibles et du nombre des emplois ouverts au dispositif de titularisation dans chaque collectivité.
Il prescrit surtout à celles-ci de présenter un programme de titularisation non seulement devant les organes paritaires, mais aussi en conseil municipal.
Alors que les collectivités se voient déjà imposer nombre d’obligations et de textes, de nouveaux sont ajoutés…
M. Joël Guerriau. Eh oui !
M. Vincent Delahaye. … ce qui ne me plaît pas spécialement !
Il me semble qu’il pourrait suffire que l’autorité territoriale présente le programme pluriannuel aux organismes paritaires, sans délibération de l’organe délibérant de la collectivité.
M. Joël Guerriau. Absolument !
M. Vincent Delahaye. Ce projet de loi prévoit d’alourdir les charges des collectivités locales – 220 millions d'euros supplémentaires selon l’étude d’impact, alors que l’on nous a déjà demandé récemment de faire un effort à hauteur de 200 millions d'euros. Ce sont des sommes importantes. J’ai calculé que cela pouvait coûter 85 000 euros par an à ma commune.
Je demande donc la suppression de l’obligation de présenter ce programme pluriannuel à l’organe délibérant. À défaut, il conviendrait, a minima, de le compléter en y intégrant les projets de CDIsation des agents ayant renouvelé plusieurs fois des CDD.
Par ailleurs, puisqu’il est prévu que le programme tiendra compte de la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences, la GPEEC, et des besoins de la collectivité territoriale ou de l’établissement public intéressé, je souhaite que l’on précise également que la collectivité décide en fonction de ses capacités financières. En effet, il me semble important d’inscrire dans la loi que ce ne sont pas seulement les besoins d’effectifs et la GPEEC, mais aussi les capacités financières qui déterminent le programme pluriannuel d’accès à l’emploi titulaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Tasca, rapporteur. La commission émet un avis défavorable. En effet, le programme pluriannuel d’accès à l’emploi titulaire est destiné à organiser, dans chaque collectivité, la détermination des corps accessibles et du nombre des emplois ouverts au dispositif de titularisation sur la base des besoins recensés et des objectifs de la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences. Il planifiera également les sessions de recrutement sur les quatre années de validité du dispositif.
Ce programme permettra, d’une part, à la collectivité d’organiser la mise en œuvre du dispositif et, d’autre part, aux contractuels – c’est un point important – de connaître les opportunités d’intégration dès le lancement du dispositif.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Sauvadet, ministre. J’entends bien votre préoccupation, monsieur le sénateur Delahaye. Toutefois, j’émets un avis défavorable sur votre amendement, ou plutôt je vous propose de le retirer au profit d’un autre amendement, qui pourrait répondre à votre préoccupation.
Un dialogue social constructif existe au sein de chaque collectivité. Il est important que, dans le cadre du comité technique, l’autorité territoriale puisse débattre de la mise en œuvre du programme pluriannuel d’accès à l’emploi titulaire ; c’est le rôle d’un comité technique.
Le programme pluriannuel devra déterminer les cadres d’emplois ouverts aux recrutements réservés, le nombre d’emplois ouverts à chacun de ces recrutements et leur répartition entre les sessions successives de recrutement durant les quatre années. C’est l’esprit et la lettre du projet de loi.
Il me semble souhaitable que l’autorité territoriale puisse également présenter devant le comité technique, comme vous l’avez demandé, les prévisions sur quatre ans de transformation des contrats en cours en CDI. C’est l’objet de l’amendement que le Gouvernement déposera si vous retirez votre amendement, sur lequel Mme le rapporteur a, d’ailleurs, émis un avis défavorable
M. le président. Monsieur Delahaye, l'amendement n° 77 est-il maintenu ?
M. Vincent Delahaye. Votre proposition ne me satisfait pas totalement, monsieur le ministre, car l’article 13 crée bien une contrainte supplémentaire pour les collectivités territoriales.
Toutefois, j’accepte de retirer mon amendement. J’aimerais malgré tout que la référence aux capacités financières de la collectivité soit inscrite dans la loi. Vous ne m’avez pas répondu sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Sauvadet, ministre. Vous souhaitez qu’il soit précisé que la GPEEC tient compte des capacités financières de la collectivité. Mais comment pourrait-il en être autrement ? Je vous confirme que les capacités financières seront bien prises en considération.
En revanche, pour vous le dire franchement, aller plus loin entrerait en contradiction avec les libertés des administrations. Je n’irai donc pas au-delà.
M. le président. L'amendement n° 77 est retiré.
Je suis saisi de l'amendement n° 113, présenté par le Gouvernement, et qui est ainsi libellé :
Après le premier alinéa
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le programme pluriannuel peut mentionner également les prévisions sur quatre ans de transformation des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée conformément aux dispositions prévues aux articles 17 et 33 de la présente loi.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Il ne peut y avoir d’avis de la commission, puisque nous découvrons cet amendement à l’instant. À titre personnel, j’émets un avis favorable, car il vise à étendre l’effort de prévision et d’information des agents concernés. Je n’y vois que des avantages.
M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté.)
Article 14
I. – Pour la mise en œuvre du programme pluriannuel défini à l’article 13, l’accès à la fonction publique territoriale prévu à l’article 9 est organisé selon :
1° Des sélections professionnelles organisées conformément aux articles 15 et 16;
2° Des concours réservés ;
3° Des recrutements réservés sans concours pour l’accès au premier grade des cadres d’emplois de catégorie C accessibles sans concours.
Ces modes de recrutement sont fondés notamment sur la prise en compte des acquis de l’expérience professionnelle correspondant aux fonctions auxquelles destine le cadre d’emplois d’accueil sollicité par le candidat.
L’autorité territoriale, ou à sa demande, la commission mentionnée au troisième alinéa de l’article 15, s’assure que l’agent candidat ne se présente qu’au recrutement donnant accès aux cadres d’emplois dont les missions, déterminées par le statut particulier, correspondent à la nature et à la catégorie hiérarchique des fonctions qu’il a exercées pendant les quatre années de services précédant, soit la date de clôture des inscriptions du recrutement auquel il postule, soit le terme de son dernier contrat.
II. – Les agents titulaires de contrat à durée déterminée au 31 mars 2011 remplissant les conditions fixées aux articles 10 à 16 ne peuvent accéder qu’aux cadres d’emplois dont les missions, définies par leurs statuts particuliers, relèvent d’une catégorie hiérarchique, telle que définie à l’article 5 de la loi du 26 janvier 1984 précitée, équivalente à celle des fonctions qu’ils ont exercées pendant une durée de quatre ans en équivalent temps plein dans l’administration auprès de laquelle ils sont éligibles. L’ancienneté de quatre ans s’apprécie dans les conditions fixées au sixième alinéa de l’article 11.
Si les agents n’ont pas acquis auprès de cette administration quatre ans d’ancienneté dans des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique, ils peuvent accéder aux cadres d’emplois relevant de la catégorie dans laquelle ils ont exercé leurs fonctions le plus longtemps.
Si les agents ont acquis une ancienneté supérieure à quatre ans auprès de cette administration, l’ancienneté s’apprécie au regard des quatre années au niveau le plus élevé des fonctions exercées par l’agent.
III. – Les agents titulaires de contrat à durée indéterminée au 31 mars 2011 remplissant les conditions fixées aux articles 10 et 14 ne peuvent accéder qu’aux cadres d’emplois dont les missions, définies par leurs statuts particuliers, relèvent d’une catégorie hiérarchique, telle que définie à l’article 5 de la loi du 26 janvier 1984 précitée, équivalente à celle des fonctions qu’ils exercent à cette date.
IV. – Les concours réservés mentionnés au 2° suivent les dispositions régissant les concours prévus au cinquième alinéa de l’article 36 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 précitée et donnent lieu à l’établissement de listes d’aptitude classant par ordre alphabétique les candidats déclarés aptes par le jury. Les deuxième et quatrième alinéas de l’article 44 de la même loi leur sont applicables même si l’application de ces dispositions conduit à dépasser le délai défini à l’article 9.
Les agents candidats à l’intégration dans le premier grade des cadres d’emplois de catégorie C accessibles sans concours sont nommés par l’autorité territoriale, selon les modalités prévues dans le programme pluriannuel d’accès à l’emploi titulaire de la collectivité ou de l’établissement.
M. le président. L'amendement n° 51, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Après les mots :
exercées
insérer les mots :
soit au 31 mars 2011, soit
II. – Alinéa 7
Après les mots :
exercées
insérer les mots :
soit au 31 mars 2011, soit
III. – En conséquence, alinéas 8 et 9
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Depuis plusieurs années, la question de la précarité des agents non titulaires des collectivités territoriales fait débat. C’est la preuve de l’importance de la situation, mais également – il faut se l’avouer – de l’inefficacité partielle des précédents dispositifs de résorption de cette précarité.
On assiste d’ailleurs, au sein de la fonction publique territoriale, à l’émergence de similitudes avec le précariat qui se généralise dans le secteur privé. Par exemple, la précarité pèse plus lourdement sur les femmes, comme en témoignent les conclusions du rapport « La précarité dans la fonction publique territoriale » remis au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, qui l’a adopté à l’unanimité. On y apprend notamment que les femmes sont surreprésentées parmi les agents non titulaires : elles représentent 68 % des emplois permanents non titulaires, contre seulement 58 % des emplois titulaires.
On apprend également, à la lecture de ce rapport, que, en 2007, 37 % des emplois d’agents non titulaires correspondaient à un temps non complet. Cela signifie que 70 000 agents – sans doute plus aujourd’hui – étaient contraints au travail partiel, sans compter les 50 000 emplois d’assistants familiaux et maternels. À titre de comparaison, les temps non complets ne représentent que 13 % des emplois d’agents titulaires. La situation est malheureusement plus dramatique encore dans les départements et collectivités d’outre-mer ; je vous renvoie à l’intervention de notre collègue Paul Vergès.
Je regrette que ce projet de loi n’ait pas repris l’une des préconisations du rapport que je viens d’évoquer, alors qu’elle est pourtant essentielle dans la lutte contre la précarité des agents non titulaires des collectivités territoriales : la participation accrue des employeurs au financement de la protection sociale complémentaire de leurs agents. Celle-ci nous paraît indispensable dans la mesure où 78 % des agents des collectivités territoriales sont des agents de catégorie C, c'est-à-dire avec les revenus les plus bas. Une telle mesure permettrait de favoriser leur accès aux soins, dans un contexte marqué par l’amplification du mouvement de renoncement aux soins et de démutualisation pour des raisons financières.
Surtout, il nous appartient de tout faire pour que les agents contractuels puissent accéder à la titularisation ou, à défaut, à la CDIsation. C’est ce que nous proposons par le biais de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Nous avons déjà étudié cette question lors de l’examen des dispositions relatives à la fonction publique d'État. Le Sénat avait alors rejeté un amendement similaire. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Sauvadet, ministre. Avis défavorable également. Cet avis est cohérent avec celui que j’ai émis sur l’amendement n° 41.
J’ajoute que la version du projet de loi issue des travaux de la commission prévoit une prise en compte de l’ancienneté plus favorable aux agents : si un agent a acquis une ancienneté supérieure à quatre ans, l’ancienneté s’appréciera au regard des quatre années au niveau le plus élevé des fonctions exercées par l’agent.
M. le président. Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
Article 15
Les sélections professionnelles prévues au 1° de l’article 14 sont organisées pour leurs agents par les collectivités et établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 précitée. Ces collectivités et établissements peuvent, par convention, confier cette organisation au centre de gestion de leur ressort géographique.
La sélection professionnelle est confiée à une commission d’évaluation professionnelle, dans laquelle siège l’autorité territoriale ou la personne qu’elle désigne. La commission se compose en outre d’une personnalité qualifiée, qui préside la commission, désignée par le président du centre de gestion du ressort de la collectivité ou de l’établissement, et d’un fonctionnaire de la collectivité ou de l’établissement appartenant au moins à la catégorie hiérarchique, telle que définie à l’article 5 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 précitée, dont relève le cadre d’emplois auquel le recrutement donne accès. Ce dernier membre de la commission peut changer si la commission se prononce sur l’accès à des cadres d’emplois différents.
Lorsqu’une collectivité ou un établissement a confié l’organisation du recrutement au centre de gestion, celui-ci constitue une commission, présidée par le président du centre ou par la personne qu’il désigne, qui ne peut être l’autorité territoriale d’emploi. La commission se compose en outre d’une personnalité qualifiée désignée par le président du centre de gestion et d’un fonctionnaire de la collectivité ou de l’établissement appartenant au moins à la catégorie dont relève le cadre d’emplois auquel le recrutement donne accès. Ce dernier membre de la commission peut changer si la commission se prononce sur l’accès à des cadres d’emplois différents.
À défaut de fonctionnaire appartenant au moins à la catégorie dont relève le cadre d’emplois auquel le recrutement donne accès, la commission comprend un fonctionnaire issu d’une autre collectivité ou d’un autre établissement remplissant cette condition.
Les personnalités qualifiées mentionnées aux deuxième et troisième alinéas ne peuvent être un agent de la collectivité ou de l’établissement qui procède aux recrutements.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 65 rectifié est présenté par MM. C. Bourquin, Fortassin et Mézard, Mme Escoffier et MM. Alfonsi, Baylet, Collin, Plancade, Requier, Tropeano et Vall.
L'amendement n° 81 est présenté par MM. Delahaye et Namy.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2, deuxième phrase
Remplacer les mots :
le président du centre de gestion du ressort
par les mots :
l'autorité territoriale
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 65 rectifié.
M. Jacques Mézard. L’article 15 prévoit que les sélections professionnelles réalisées pour la titularisation des agents contractuels seront effectuées par les collectivités et établissements concernés, afin de préserver leur liberté d’administration et leur autonomie de gestion.
Dans la pratique, une commission d’évaluation professionnelle sera chargée d’organiser la sélection. Cette commission sera composée notamment d’une personnalité qualifiée, qui préside la commission, désignée par le président du centre de gestion, et d’un fonctionnaire de la collectivité ou de l’établissement.
Les sélections professionnelles pourront être confiées à un centre de gestion par convention, afin de faciliter leur organisation. Cependant, les collectivités territoriales et leurs établissements publics n’ont pas l’obligation de transférer cette compétence. Il serait donc plus cohérent que la personnalité qualifiée qui préside la commission soit désignée par l'autorité territoriale et non par le président du centre de gestion. Cette formulation permettrait de prendre en compte ces deux cas de figure.
Par ailleurs, l’alinéa 3 de l’article 15 prévoit le cas spécifique dans lequel la sélection est organisée par le centre de gestion.
Par conséquent, notre amendement ne vise qu’à rendre cohérente la rédaction de l’article.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour présenter l'amendement n° 81.
M. Vincent Delahaye. Cet amendement est identique à celui que vient de présenter M. Mézard, dont je partage la position : dès lors que c’est la collectivité elle-même qui assure la sélection professionnelle, pourquoi prévoir que la personnalité qualifiée présidant la commission d'évaluation professionnelle sera désignée par le président du centre de gestion ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Tasca, rapporteur. La commission d’évaluation professionnelle est appelée à se prononcer sur l’aptitude du candidat à exercer les missions du cadre d’emplois auquel donne accès la sélection professionnelle. Or la vérification de l’aptitude des candidats relève du pouvoir d’appréciation souverain de l’organe de sélection, lequel doit être unique, collégial, impartial et indépendant de l’autorité organisatrice du concours, selon un principe constant et ancien du droit des concours. Il s’agit d’une garantie fondamentale pour assurer le respect du principe de l’égalité entre les candidats, et on pourrait soupçonner l’autorité recruteur de ne pas totalement respecter ce principe. La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Sauvadet, ministre. Messieurs Mézard et Delahaye, je comprends les préoccupations que vous exprimez, mais il s’agit d’évaluation professionnelle en vue d’une titularisation.
J’ai relevé la convergence absolue entre les uns et les autres à propos des centres de gestion, qu’avec une parfaite unanimité vous souhaitez conforter, position dont M. le président de la commission s’est fait le talentueux avocat.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Non, l’avocat convaincu !
M. François Sauvadet, ministre. Je m’étonne donc que l’on puisse prôner le renforcement du rôle des centres de gestion et refuser dans le même temps que son président désigne la personnalité qualifiée qui préside la commission d’évaluation professionnelle, ce qui assure une forme d’impartialité.
J’attire d’ailleurs votre attention, monsieur Delahaye, sur le risque constitutionnel qu’entraînerait la rupture avec les principes d’impartialité et d’égal accès.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Eh oui !
M. François Sauvadet, ministre. Or j’ai observé que, tous, vous étiez de fervents partisans du respect de ces principes fondateurs du service public, qui découlent directement de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, laquelle a été reprise dans le Préambule de la Constitution de 1946, comme je l’ai déjà rappelé dans mon propos liminaire, et qu’il n’y avait pas là de motif de discorde.
Je crois, monsieur Delahaye, que nous sommes parvenus à un point d’équilibre.
D’abord, je rappelle que siège dans la commission d’évaluation « l’autorité territoriale ou la personne qu’elle désigne ».
Ensuite, je souligne qu’il s’agit de l’évaluation d’un parcours professionnel qui comporte une expérience professionnelle au cours de laquelle l’autorité territoriale aura pu apprécier l’engagement du candidat, puisque sont concernés des agents contractuels en poste depuis quatre ans au moins.
Franchement, si au bout de quatre ans il n’a pas été possible à l’autorité territoriale de remarquer les qualités professionnelles qui, une fois validées sur la base de critères assurant l’impartialité, permettront l’entrée dans la fonction publique d’un de ses agents contractuels, il y a de quoi s’interroger !
En conclusion, j’ai donc bien entendu les préoccupations que vous avez exprimées quant au rôle de l’exécutif, en particulier des maires, dans le choix des candidats, mais je vous demande de bien vouloir considérer que, au regard du principe d’impartialité auquel nous sommes tous attachés, nous sommes allés jusqu’où nous pouvions aller pour faire coïncider deux exigences, celle de la responsabilité de l’exécutif issu du suffrage universel mais aussi celle de l’exercice de la fonction publique au service du public, qui impose que l’impartialité et le refus du népotisme soient garantis.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Je ne suis pas convaincu et je continue à penser que l’on alourdit inutilement la procédure.
Un maire fait de l’évaluation professionnelle tous les jours ! Quand une personne travaille depuis plus de quatre ans dans sa collectivité, il connaît effectivement ses capacités professionnelles. Il est tout à fait capable de l’évaluer professionnellement et il n’a pas besoin de personnalités extérieures pour lui dire si cette personne est ou non capable de devenir titulaire dans un poste.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Il faut assurer l’égalité entre candidats !
M. Vincent Delahaye. Étant pour ma part plutôt favorable à l’allégement des procédures, je regrette que, sous couvert d’assurer l’impartialité, on alourdisse les modalités de la titularisation et je maintiens donc mon amendement.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. J’ai entendu le mot « népotisme » et perçu une espèce de suspicion tout à fait illégitime à l’égard des élus locaux. Tout cela est excessif.
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Non, il s’agit de principes de droit !
M. Jacques Mézard. Comme l’a dit M. Delahaye, nos collègues qui exercent une autorité locale ont les capacités nécessaires pour se former un avis.
J’ajoute qu’il n’est pas bon non plus d’opposer l’impartialité des centres de gestion à une partialité présumée des exécutifs des collectivités territoriales.
M. le président. La parole est à M le ministre.
M. François Sauvadet, ministre. Pour avoir exercé les fonctions de maire et pour être président de conseil général, je dirai d’abord que, de la sorte, les élus se garderont des procès ! (Rires.)
M. Yves Chastan. Eh oui !
Mme Catherine Tasca, rapporteur. Voilà !
M. François Sauvadet, ministre. Ensuite, c’est ce qui correspond à un engagement devant les syndicats, mais aussi à mes convictions profondes.
Il faut que nous trouvions le bon équilibre entre ce qui relève de l’évolution des carrières et ce qui tient à la relation entre l’employeur, qui exerce une mission particulière parce qu’il la tient, pour un temps donné, du suffrage universel, et celui qui exerce la mission de service public, lui aussi au service du public, et qui doit avoir apporté des garanties sur les conditions dans lesquelles il l’exerce.
Cet équilibre, je l’ai dit d’emblée et Mme le rapporteur l’a elle-même souligné dans son rapport, est difficile à trouver, mais c’est ce qui permettra à la fonction publique française de conserver une spécificité à laquelle nous sommes tous attachés.
Évidemment, on ne donne pas une liberté totale à l’employeur, car ce serait la remise en cause du statut, du modèle de la fonction publique « à la française ».
Notre objectif est donc de trouver le juste équilibre dans la rencontre, pour un temps, entre un employeur et une personne qui doit avoir une carrière, une évolution professionnelle, ce qui implique que des garanties soient données à celui qui s’engage, mais aussi à celui qui recrute.
J’ai la conviction profonde, monsieur Delahaye, cher collègue sénateur… (Exclamations amusées.)
M. Jean-Jacques Hyest. Serait-ce la marque d’une vocation ?
M. François Sauvadet, ministre. C’est vrai, je ne devrais pas dire « cher collègue », mais l’exercice de plusieurs fonctions locales, et non pas d’un mandat unique, constitue un enrichissement de l’expérience personnelle, y compris dans les fonctions gouvernementales ! Chacun en tirera des conclusions, pour demain ou après-demain ! (Sourires et exclamations.) En effet, François Rebsamen, pour qui j’ai de l’amitié, appréciera, lui qui est maire de Dijon, président de la communauté d’agglomération et président du groupe socialiste du Sénat. (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Vincent Placé. Allons, monsieur le ministre !