M. le président. En conséquence, l'amendement n° 63 n'a plus d'objet.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Comme nous l’ont indiqué les juges des libertés et de la détention, lorsqu’une audience se déroule par visioconférence, si l’avocat se trouve auprès du magistrat, ce dernier se retire quelques minutes pour laisser l’avocat s’entretenir avec son « patient-client ». Cet entretien se déroule donc dans des conditions très rudimentaires, ce qui n’est pas satisfaisant.
L’objet de l’amendement no 15 est de remédier à cette situation. Cela dit, la commission des lois, consciente des difficultés qu’induirait cet amendement, s’il devait être adopté, a décidé de le retirer.
M. le président. L’amendement no 15 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 17.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote sur l’amendement no 64.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la secrétaire d’État, vos explications ne nous ont pas semblé satisfaisantes.
Selon vous, cette procédure restera exceptionnelle, puisque c’est le juge d’appel qui statue, ce que je ne conteste pas. Elle nous semble toutefois constituer une mise en cause des règles habituelles du droit et traduire, une nouvelle fois, une suspicion à l’égard du juge des libertés et de la détention, donc de la justice judiciaire. On ne voit en effet pas pourquoi le JLD, après deux expertises, n’aurait pas la capacité de statuer sur le maintien, ou non, de la décision d’hospitalisation. Il faut savoir ce que l’on veut, et c’est pourquoi nous avons déposé une demande de scrutin public.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 64, 139 et 467 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 208 :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 337 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 169 |
Pour l’adoption | 152 |
Contre | 185 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. J’ai émis tout à l’heure un avis défavorable sur l’amendement n° 11, qui vise à étendre au contrôle de plein droit la possibilité pour le juge de transformer une mesure d’hospitalisation complète en soins ambulatoires sans consentement. L’adoption de ce dispositif permettrait en effet au juge d’ordonner de tels soins ambulatoires sans être réellement en mesure d’apprécier le degré d’atteinte aux libertés qu’ils entraîneraient, le médecin n’établissant le protocole de soins que postérieurement à la décision du juge, ce qui me semble choquant.
Il revient au médecin de décider de la forme de la prise en charge et au juge de statuer sur le degré de liberté que celle-ci laisse au patient. Une décision judiciaire ne saurait avoir pour conséquence de donner à l’équipe médicale un blanc-seing pour mettre en œuvre une mesure dont le juge ne pourrait, par la suite, apprécier ni la nature ni les conséquences concrètes en termes de liberté.
Je rappelle en outre que l’exigence d’une continuité de soins a été prise en compte par l'Assemblée nationale.
Mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous avez précédemment adopté l’amendement n° 9, je me permets d’appeler votre attention sur l’amendement n° 11, qui contient une disposition similaire. Au demeurant, je vous annonce d’ores et déjà que le Gouvernement demandera une seconde délibération.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote sur l’amendement n° 11.
M. Alain Milon. Je souhaite abonder dans le sens de Mme la secrétaire d’État.
Chacun doit rester dans son domaine de compétence : les médecins sont là pour soigner et les juges pour protéger les libertés.
Si l’on permet au juge de se substituer au médecin, je ne sais pas où l’on va ! (MM. Alain Gournac et Claude Léonard applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Mes chers collègues, nous ne pouvons pas adopter une position sur l’amendement n° 9, puis une autre sur l’amendement n° 11 ! Ce serait comme si nous affirmions, dans un premier temps, qu’un fauteuil est rouge, puis, dans un deuxième temps, que celui-ci est subitement devenu vert …
Je signale d’ailleurs à Mme Berra et à M. Milon que la disposition proposée par la commission des lois est si saugrenue qu’elle figurait dans le projet de loi initial du Gouvernement et qu’elle avait également été retenue par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale. S’il est vrai que seuls les désorientés ne changent pas d’avis, je suis donc parfaitement rassuré sur ce point.
Je reconnais parfaitement au Gouvernement le droit de demander une seconde délibération. Mais celle-ci ne pourra intervenir qu’à la fin de nos débats. Si le Sénat se laisse alors convaincre par l’argumentation de Mme la secrétaire d’État et par notre collègue Alain Milon, je m’inclinerai très volontiers. En revanche, sauf à ce que nos travaux confinent à l’absurde, il me semble que nous devons pour l’heure voter de la même manière sur l’amendement n° 11 que sur l’amendement n° 9.
J’ajoute que, si nous donnions immédiatement raison à M. Milon et au Gouvernement, nous validerions le dispositif adopté par l’Assemblée nationale, qui permet de différer de quarante-huit heures la mainlevée d’une mesure d’hospitalisation complète, mesure que tous les juristes considèrent comme inconstitutionnelle.
La situation est donc légèrement plus complexe qu’on ne le prétend.
M. Jacky Le Menn. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. La disposition contenue dans l’amendement n° 11 reviendrait à superposer deux démarches : l’une concernant des détenus, à qui un juge pénal ordonne de suivre des soins ; l’autre ayant trait à un juge civil, qui statue sur des libertés.
Il me semble inopportun, dans un projet de loi dont l’objet est de prendre en charge les malades et de les soigner, de réaliser un amalgame entre les missions du juge pénal et celles du juge civil. Vous vous dites d’ailleurs vous-mêmes soucieux de ne pas trop judiciariser ce texte, monsieur le rapporteur pour avis.
Nous sommes ici dans une démarche de soins, lesquels incombent aux psychiatres et aux professionnels de santé, tandis que le juge est chargé d’arbitrer sur la privation de liberté qu’ils engendrent. Je le répète, nous ne sommes pas dans un contexte de suivi de mesures médicales ordonnées par le juge pénal à l’égard des détenus.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Je rejoins sur ce point l’argumentation de Mme la secrétaire d’État.
Toutefois, ne serait-ce que par la volonté du Conseil constitutionnel, qui s’impose à lui, le juge sera amené à se prononcer sur la situation d’hospitalisation complète. Il pourra ainsi, à l’instar du préfet, estimer qu’une telle mesure ne se justifie plus, sans pour autant juger qu’il convient de dispenser le patient de tout suivi médical.
Bien évidemment, il n’appartiendra nullement au juge de fixer le contenu des soins qui seront dispensés. En cas de non-respect du programme de soins, les amendements nos 9 et 11 visent simplement à ce que celui-ci se contente d’informer la personne qui avait provoqué l’hospitalisation, à savoir le préfet, s’il s’agit d’une hospitalisation d’office, ou la famille, s’il s’agit d’une hospitalisation à la demande d’un tiers.
Les deux dispositifs ont leur cohérence. Reste que nous avons en effet un différend de fond.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le juge civil n’a pas les moyens de vérifier, et encore moins de sanctionner, le non-respect du suivi des mesures médicales.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Il prévient, c’est tout !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Il ne bénéficie pas, comme le juge pénal, du concours des services d’insertion et de probation, qui contrôlent le respect des obligations de soins en cas de condamnation.
Nous sommes ici dans le cadre d’un suivi sanitaire, avec l’intervention d’un juge civil. Or il me semble que les dispositions contenues dans ces amendements reviendraient à accorder à ce dernier la possibilité de prononcer des soins sans consentement, ce qui reviendrait finalement à donner un blanc-seing à une équipe médicale. Cela n’est pas acceptable !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le problème, c’est que les soins sous contrainte constituent des mesures privatives de liberté, comme je l’ai indiqué à l’occasion de l’exception d’irrecevabilité que j’ai présentée sur ce texte.
Vous avez concédé que le juge des libertés et de la détention devait intervenir dans les quinze jours qui suivent le début d’une hospitalisation complète. En revanche, en ce qui concerne les soins ambulatoires sous contrainte, l’intervention du juge des libertés n’est pas prévue. Cela pose problème !
Vous prétendez que le juge civil n’a pas à intervenir en matière de soins. Pourtant, dans le cas d’une hospitalisation complète, le JLD se prononce sur la contrainte, après avis médical. Une procédure parallèle doit donc être prévue pour les soins ambulatoires sans consentement, qui constituent aussi une mesure privative de liberté.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais si, absolument !
Vous avez une conception bien limitée de la liberté, madame la secrétaire d’État. La personne qui se trouve dans cette situation est privée de sa liberté de refuser un soin, de même que de sa liberté d’aller et venir, qui est une liberté constitutionnelle.
M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour explication de vote.
Mme Christiane Demontès. Nous sommes là au cœur de la contradiction.
Depuis le début, nous dénonçons l’ambiguïté qui existe, dans ce texte, entre la question du soin dispensé à une personne malade et celle de la privation de liberté, sous prétexte que cette personne serait dangereuse.
Je rejoins l’argument de Mme Borvo Cohen-Seat : dès lors qu’une contrainte est exercée sur un malade, le lieu dans lequel il se trouve contraint devient un lieu de privation de liberté.
Comme M. Lecerf, je pense qu’il faut lever cette ambiguïté. Malheureusement, le droit prend le pas sur le soin et, si nous ne votons pas l’amendement n° 11, il est évident que le risque d’inconstitutionnalité réapparaît.
Je rappelle que le projet de loi trouve initialement sa source dans une décision du Conseil constitutionnel, même si le Gouvernement a par la suite choisi de lui adjoindre d’autres dispositions.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.
(L'amendement est adopté.)
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 460 rectifié et 488 n’ont plus d’objet.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Je souhaite revenir brièvement sur l’amendement n° 21.
Je n’ai rien contre le fait que le directeur de l’hôpital ou le préfet manifestent d’une manière ou d’une autre leur souhait de voir produire à l’appel un effet suspensif. Mais est-ce vraiment à la loi de leur souffler l’idée d’une mesure dérogatoire au droit commun ?
D’une part, cela ne sert strictement à rien – le parquet le demandera si nécessaire – ; d’autre part, je pense que ce n’est pas notre rôle de législateur.
M. Guy Fischer. Très bien !
M. Jacky Le Menn. Il a raison !
M. le président. L'amendement n° 56, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 61
1° Supprimer les mots :
, à bref délai,
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L'ordonnance du juge des libertés et de la détention est rendue dans un délai de douze jours à compter de l'enregistrement de la requête au greffe.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. L’intervention du juge des libertés et de la détention, imposée par la décision du Conseil constitutionnel, doit être pleinement efficace.
En l’occurrence – nous avons déjà eu l’occasion de le dire –, il nous apparaît très préjudiciable, pour la personne qui souhaiterait saisir ce juge, que le texte ne soit pas plus précis quant au délai dans lequel la décision sera rendue.
En d’autres termes, nous pensons que la loi devrait définir un délai limite clair, plutôt que la notion de « bref délai », dont la définition est trop vague, trop floue et trop imprécise.
Cet amendement vise donc à éclaircir cette disposition, en prenant comme référence un délai de douze jours.
Un tel délai est en cohérence avec plusieurs autres mesures similaires. On peut citer le cas du droit des étrangers en matière de rétention. En l’occurrence, deux décisions judiciaires sont requises en douze jours : la première, par le juge des libertés et de la détention ; la seconde, par le président du tribunal de grande instance.
Le second motif pour lequel nous présentons cet amendement est là encore un motif de cohérence. L’article R. 3211-9 du code de la santé publique, encadrant l’examen de la requête de sortie par le JLD décrit à l’article L. 3211-12 du même code, indique très clairement un délai maximum de douze jours.
Pour faire simple, le règlement précise ce que la loi ne prévoit pas. Le problème se pose avec le texte que nous étudions aujourd’hui, car plutôt que de reprendre la rédaction de l’article R. 3211-9 et de mentionner explicitement le délai de douze jours, le projet de loi n’indique qu’un « bref délai ».
En l’état, il s’agit d’un recul, dans la mesure où la réécriture complète de l’article L. 3211-12 remplacera le texte réglementaire.
Très honnêtement, mes chers collègues, quelle est la raison de ce recul ? En réalité, il est clair que l’on cherche à retarder le plus possible l’intervention du juge, dans les limites maximums de quinze jours admises par la décision du juge constitutionnel.
La portée pratique de la décision du juge est minorée par de nombreuses autres dispositions, prenant plus en considération le rôle du préfet que le rôle du juge, le rapporteur de la commission des lois a très bien décrit la situation. Mais après tout, si l’on regarde la rédaction de cet article 1er, nous ne sommes guère étonnés de constater que, même en matière de délai d’intervention du JLD, il y a un recul important en matière de droit des malades.
L’hospitalisation sans consentement étant une mesure privative de liberté qui ne peut s’étendre indéfiniment sans examen par le JLD, comme l’a confirmé le Conseil constitutionnel, nous pensons que le patient doit bénéficier de toutes les garanties juridiques nécessaires à la sauvegarde de ses libertés individuelles. En l’occurrence, assigner un délai maximum pour la décision du JLD est bien plus protecteur de ces libertés qu’une simple mention d’un « bref délai ». Bref délai dont on sait qu’il sera, dans la pratique, étendu systématiquement à quinze jours. De notre point de vue, il est donc opportun de suivre a minima l’état actuel du droit, qui prévoit l’examen de la requête dans le délai de douze jours.
Pour toutes ces raisons, le groupe CRC-SPG est très attaché à cet amendement n° 56.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Cet amendement vise à réduire les délais donnés au juge pour statuer.
La commission a émis un avis favorable, malgré l’avis du rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. La précision du délai est d’ordre réglementaire. D’ailleurs, le délai de douze jours que vous évoquez, monsieur Fischer, figure dans la partie réglementaire du code de la santé publique.
De la même manière, le projet de loi indiquera que cette précision devra être apportée dans le cadre des décrets.
M. Guy Fischer. On se méfie !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. La loi peut prévoir que le juge des libertés et de la détention est saisi dans de brefs délais. D’ailleurs, ces délais sont prévus dans un décret récent, conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Je souhaite confirmer et compléter les propos de Mme la secrétaire d’État sur un point.
Cet amendement est, me semble-t-il, satisfait par le droit en vigueur. Le décret du 20 mai 2010 – décret tout à fait récent – prévoit, dans le cadre du recours facultatif, un délai d’intervention du juge des libertés et de la détention dans les douze jours. Cela correspond donc à ce bref délai inscrit dans le projet de loi.
Non seulement l’amendement est satisfait, mais il est également incomplet par rapport au texte du décret, lequel prévoit l’hypothèse où une expertise a été demandée et où il faut dès lors porter le délai à vingt-cinq jours.
Par conséquent, si notre collègue Guy Fischer voulait bien retirer son amendement, nous y gagnerions.
M. le président. Monsieur Fischer, l'amendement n° 56 est-il maintenu ?
M. Guy Fischer. Je le retire, monsieur le président, mais nous vérifierons sur le terrain ce que nous ont dit Mme la secrétaire d’État et M. le rapporteur pour avis.
M. le président. L'amendement n° 56 est retiré.
L'amendement n° 118, présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 68
Après le mot :
parent
insérer les mots :
, la personne de confiance désignée par le patient conformément à l’article L. 1111-6
La parole est à Mme Christiane Demontès.
Mme Christiane Demontès. On ne nous a encore rien demandé, mais je le retire, monsieur le président. (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 118 est retiré.
L'amendement n° 119, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 69
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Le directeur de l'établissement de santé chaque fois qu'il constate un désaccord entre les certificats médicaux établis au titre du présent projet de loi, ou encore de l'avis établi par le collège visé au II de l'article L. 3211-9, d'une part, et les décisions prises par le représentant de l'État au titre des compétences conférées par le présent projet de loi, d'autre part. »
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Je ne retire rien, monsieur le président. (Sourires.)
Le présent projet de loi, on l’a dit et répété, comporte un déséquilibre manifeste entre une conception sanitaire et une approche sécuritaire des indications de soins sans consentement, ainsi que des modalités de soins à plein temps ou en ambulatoire. C’est bien la mission de l’autorité judiciaire que d’être en mesure d’éviter que des situations d’hospitalisation en psychiatrie ne perdurent, alors que le corps médical aurait conclu à l’absence d’indications d’hospitalisation, ou de prise en charge ambulatoire, au titre d’un besoin de soins psychiatriques.
Les établissements en santé mentale ne peuvent être transformés en « centres de rétention administrative » pour des personnes situées dans la ligne de mire des autorités en charge de l’ordre public. Rapprocher la maladie psychiatrique des différentes catégories de troubles à l’ordre public représente une véritable « régression » de civilisation, n’ayons pas peur du mot !
C’est pourquoi le présent amendement évoque une compétence liée du directeur de l’établissement à l’effet de saisir le juge pour toute discordance de position entre le corps médical et le représentant de l’État.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Cet amendement prévoit un recours au juge dans tous les cas de désaccord entre le psychiatre et le médecin.
La commission a émis un avis favorable, malgré les réserves du rapporteur, qui considère qu’il ne convient pas de judiciariser à l’excès la procédure.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 120, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 70, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
À cet effet, il est informé de toute décision d’admission en soins psychiatriques sans consentement.
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. J’espère avoir plus de chance avec cet amendement …
Nous militons, vous l’aurez compris, mes chers collègues, pour que cette réforme passe le gué du marais sécuritaire, en proposant d’étayer l’intervention du contrôle du juge, qui peut, selon le texte, se saisir d’office à tout moment, donc dès la phase d’hospitalisation.
Afin que le contrôle du juge devienne réalité et ne soit pas cantonné à une pétition de principe, nous proposons que celui-ci soit informé de toute décision d’admission en soins psychiatriques sans consentement. N’oublions pas que l’effectivité du droit de recours n’est pas assurée pour tous les malades avec la même attention et qu’il y a un risque certain, s’agissant de personnes fragiles, qu’il s’exerce en définitive assez peu. Il est vrai que le devenir des intéressés n’est pas facilité par l’accumulation des procédures.
Il est donc très important que tous moyens soient apportés au juge afin de faire jouer au droit son rôle de protection et, en premier lieu, d’apporter au juge les informations les plus opérantes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. La commission a émis, contre l’avis du rapporteur, un avis favorable sur cet amendement, qui prévoit une information du juge sur toute décision d’admission en soins sans consentement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Rendre le juge destinataire de toutes les décisions d’admission serait totalement inutile et contreproductif. Ces documents ne serviraient qu’à encombrer le greffe, …
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. C’est vrai !
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. … sans donner lieu à une ouverture de dossier, le maintien de l’intéressé pendant quinze jours en soins sans consentement étant loin d’être certain au moment d’une admission.
Par ailleurs, il ne faut pas complexifier davantage la nouvelle procédure qui doit être mise en œuvre assez rapidement.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 129 est présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 461 rectifié est présenté par M. Mézard, Mme Escoffier, MM. Collin, Alfonsi, Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 82, première phrase
Remplacer les mots :
six mois
par les mots :
trois mois
La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l’amendement n° 129.
Mme Raymonde Le Texier. Rappelons une nouvelle fois que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 26 novembre 2010, a déclaré inconstitutionnel l’article L. 337 du code de la santé publique, au motif qu’il portait atteinte à l’article 66 de la Constitution, en vertu duquel : « Nul ne peut être arbitrairement détenu. L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ».
Dans cette décision, était en cause la possibilité de maintenir l’hospitalisation sans consentement au-delà de quinze jours, sans intervention d’une juridiction de l’ordre judiciaire.
Afin d’être en conformité avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel, le Gouvernement a dû amender son projet de loi, prévoyant le contrôle systématique du bien-fondé des hospitalisations complètes sans consentement par le juge des libertés et de la détention, avant l’expiration d’un délai de quinze jours.
Par la suite, ce contrôle est renouvelé au terme de six mois, quand l’hospitalisation complète a été continue sur la période.
C’est là que le bât blesse. Eu égard aux atteintes portées à la liberté individuelle du malade, ce délai de six mois apparaît excessif et potentiellement contradictoire avec l’article 66 de la Constitution.
Rendez-vous compte ! En l’état, plus de cinq mois séparent ces deux contrôles ; ce laps de temps est beaucoup trop important et ne prend pas en compte la possibilité d’évolution favorable de la maladie.
Autrement dit, l’équilibre sur lequel repose l’approche politique de la psychiatrie est une nouvelle fois rompu ; la protection de la santé du patient et la sauvegarde de ses libertés fondamentales sont bafouées au profit de l’objectif de préservation de l’ordre public.
Or nous nous opposons à cela. Une personne souffrant de troubles psychiatriques doit avant tout être soignée et protégée ; cela signifie la respecter, la comprendre, l’encadrer, l’aider, être attentionné et, bien sûr, ne pas partir du postulat qu’elle est nécessairement une menace pour la société.
En procédant ainsi, vous allez tout simplement à l’encontre de la logique inhérente au soin. Vous préjugez et vous condamnez !
Songez que la personne atteinte de troubles mentaux n’est jamais coupable de sa maladie, elle est seulement victime. Qu’il y ait des considérations liées à l’ordre public, certes ; mais qu’elles ne priment pas sur la santé et les droits du patient !
Par conséquent, eu égard à ces différents éléments, nous demandons que le contrôle du bien-fondé des hospitalisations complètes sans consentement soit renouvelé par le juge des libertés et de la détention tous les trois mois. Il s’agit non seulement d’une garantie quant à la protection de la santé du malade, mais aussi d’une assurance de la préservation de ses droits fondamentaux.