M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il est clair que cela est fait pour inciter le bailleur à trouver au plus vite des solutions de relogement des occupants. Bien sûr, si les élus ne se mobilisent pas suffisamment, on peut arriver à des situations préjudiciables telles que celles que vous décrivez, y compris pour le ou les locataires encore en place. Car il est extrêmement désagréable, j’ai pu l’observer, d’être le locataire restant ou l’un des derniers locataires restants dans un immeuble qui est vide ou quasi vide !
M. Thierry Repentin. Absolument !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il faut donc que tout soit fait, avec les services sociaux, pour trouver le plus rapidement possible des possibilités de relogement.
Peut-être conviendra-t-il revoir ce dispositif mais, à ce stade, il me semble que vous suivre, monsieur Repentin, pourrait avoir des effets pervers.
Cela dit, je le confesse, la commission n’a pas pu se livrer à une étude exhaustive de cette question. Lors de l’examen d’un projet de loi de finances rectificative, nous sommes soumis à la contrainte de traiter de nombreux sujets simultanément. Si le Gouvernement dépose d’autres projets de loi de finances rectificative au cours de l’année 2010 – après tout, il faut le souhaiter : c’est un bon effet de la crise ! –, nous pourrons revenir sur ce sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Ne chargeons pas les projets de loi de finances rectificative à venir, monsieur le rapporteur général !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous, on est pour !
M. Éric Woerth, ministre. Eh bien, le Gouvernement, lui, est contre… cet amendement (Sourires.), pour une raison assez simple, qui a d’ailleurs été développée par M. le rapporteur général.
En fait, maintenir la taxe sur le foncier bâti dans ce genre de situation, c’est inciter les organismes qui décident de démolir un immeuble ou de réaliser des travaux importants à reloger le plus rapidement possible les locataires, c’est-à-dire à faire leur métier.
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.
M. Thierry Repentin. Il m’a semblé que M. le rapporteur général était prêt à convenir que ce sujet méritait réflexion, et il est vrai qu’il est complexe.
Je ne sais pas si M. Woerth est maire d’’une ville où des opérations de renouvellement urbain sont en cours…
M. Thierry Repentin. La conduite de telles opérations est très difficile. Il faut beaucoup de temps pour libérer des immeubles en vue de les démolir. Or, chacun le comprend, le maire ne peut pas délivrer une autorisation de démolition avant que l’immeuble soit entièrement vide.
Il arrive que certaines associations luttent bec et ongles, utilisent tous les moyens légaux pour s’opposer à la démolition. L’organisme d’HLM doit alors continuer à payer une taxe sur le foncier bâti pour des bâtiments qui sont quasiment vides. Il ne nous semble pas de bonne gestion que des organismes d’HLM supportent les conséquences d’une décision qui a été prise dans le cadre d’une politique de la ville.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, il me semble vraiment incongru d’assujettir un propriétaire à la taxe sur le foncier bâti alors que la libération complète de l’immeuble qu’il possède peut prendre des années – malheureusement – du fait, par exemple, de l’action d’associations locales.
M. le président. L'amendement n° 53, présenté par M. Repentin, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les troisième et quatrième alinéas de l'article 1461 du code général des impôts sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« 2° Les organismes d'habitation à loyer modéré mentionnés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, les sociétés anonymes de coordination entre les organismes d'habitation à loyer modéré mentionnées à l'article L. 423-1 du même code, ainsi que les sociétés ou organismes visés aux articles 239 ter et 239 quater du code général des impôts dès lors qu'ils sont constitués exclusivement par des organismes précités. »
II. - La perte de recettes pour les collectivités territoriales résultant de l'extension de l'exonération de cotisation foncière des entreprises, est compensée par la majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement, et corrélativement pour l'État par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Le code général des impôts exonère les organismes d’HLM de taxe professionnelle. Le projet de loi de finances pour 2010 prévoit de maintenir cette mesure d’exonération dans le cadre des nouvelles cotisations foncières des entreprises.
Il serait souhaitable d'étendre l’exonération aux organismes et structures qui regroupent les organismes d’HLM comme les « sociétés de coordination » entre organismes, les groupements d’intérêt économique, les GIE, ou les sociétés civiles de construction-vente.
En effet, sous l'impulsion des pouvoirs publics, les organismes d’HLM sont amenés à se regrouper au sein de structures communes pour la réalisation de certaines opérations, et il est important que des contraintes fiscales ne fassent pas obstacle à ces regroupements.
S'agissant des groupements d’intérêt économique, l'administration fiscale avait déjà admis, sous l'ancien régime de taxe professionnelle, que ceux-ci bénéficient de la même exonération que celle de leurs membres. Lors de la réforme adoptée voilà quelques jours, ce petit détail a peut-être échappé à la vigilance des services de l’administration fiscale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement tend à exonérer de cotisations foncières des entreprises les organismes et structures qui regroupent les organismes d’HLM, les GIE, les sociétés civiles de construction-vente ou les sociétés de coordination.
Lorsqu’il s’agit de sociétés transparentes comme les sociétés civiles ou les GIE, l’accessoire ne suit-il pas le principal ? On peut se poser la question.
Dans le régime de la taxe professionnelle, les GIE bénéficiaient de la même exonération que celle de leurs membres. A priori, à droit constant, cela doit se poursuivre. J’aurais souhaité que M. le ministre nous réponde sur ce point.
Je crois comprendre que l’intention de l’auteur de l’amendement est de conserver le droit constant.
M. Thierry Repentin. Absolument !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Or c’est bien la même volonté qui a animé la commission des finances lors de la réforme de la taxe professionnelle ; nous n’avons pas souhaité, sauf exception rarissime, aller au-delà du droit constant.
Si l’amendement de M. Repentin est nécessaire pour garantir le maintien du droit constant, je m’y rallierai volontiers, mais la commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est, donc, l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Nous sommes prêts à émettre un avis favorable sur cet amendement parce qu’il légalise la doctrine existante concernant les groupements d’intérêt économique. Par extension, on peut considérer que les sociétés anonymes de coordination et les sociétés civiles de construction-vente doivent bénéficier de la même exonération.
Cela étant, monsieur Repentin, votre amendement est entaché d’une coquille, si j’en crois la direction de la législation fiscale.
M. Thierry Repentin. Allons bon !
M. Éric Woerth, ministre. Il convient en effet de faire référence à l’article L. 423-1-1 du code de la construction et de l’habitation, non à son article L. 423-1.
En outre, nous souhaiterions que, après les mots : « des organismes précités », soient ajoutés les mots : « et si leurs activités sont identiques à celles de leurs membres », ce qui permettrait de lever toute ambiguïté.
Il va de soi que, si M. Repentin accepte de procéder à ces deux rectifications, le Gouvernement lèvera le gage.
M. le président. Monsieur Repentin, consentez-vous à rectifier votre amendement dans le sens suggéré par M. le ministre ?
M. Thierry Repentin. Oui, monsieur le président, et je confirme que, dans mon esprit, il s’agit bien de légiférer à droit constant.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 53 rectifié, qui est ainsi libellé :
Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 1461 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 2° est ainsi rédigé :
« 2° Les organismes d'habitations à loyer modéré mentionnés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, les sociétés anonymes de coordination entre les organismes d'habitation à loyer modéré mentionnées à l'article L. 423-1–1 du même code, ainsi que les sociétés ou organismes visés aux articles 239 ter et 239 quater du présent code dès lors qu'ils sont constitués exclusivement par des organismes précités et si leurs activités sont identiques à celles de leurs membres ; »
2° Le 3° est abrogé.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 11.
Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 83, présenté par M. Repentin, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le I de l'article 67 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les immeubles visés au 1er alinéa peuvent également faire l'objet de cessions à l'euro symbolique à un organisme d'habitations à loyer modéré visé à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation ou à une société d'économie mixte ayant pour objet statutaire la réalisation ou la gestion de logements lorsque le programme local de l'habitat prévu à l'article L. 302-1 du code de la construction et de l'habitation a mis en évidence des besoins en logements sociaux. » ;
2° La première phrase du troisième alinéa est complétée par les mots : « ou la réalisation de logements locatifs sociaux ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. J’ai déjà déposé cet amendement lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010 ; je le retire pour éviter un débat stérile.
M. le président. L’amendement n° 83 est retiré.
L'amendement n° 49, présenté par MM. Repentin et Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 323-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les services de l'État, les établissements publics de l'État autres qu'industriels et commerciaux, les collectivités territoriales et leurs établissements publics autres qu'industriels et commerciaux, l'obligation d'emploi de 6 % ne s'applique que sur la part des salariés administratifs et techniques. »
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Mes chers collègues, par cet amendement, je souhaiterais attirer votre attention – je m’adresse ici tout particulièrement à ceux d’entre vous qui sont chargés de la gestion d’un département – et celle du Gouvernement sur les inquiétudes légitimes manifestées par les services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, concernant la nécessité d’appliquer les dispositions relatives à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés dans la fonction publique territoriale à des métiers qui sont soumis à des conditions d’aptitude physique particulières.
Comme tous les autres employeurs publics, les SDIS occupant au moins vingt agents à temps plein sont assujettis au versement d’une contribution au Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique dans le cas où ils ne satisferaient pas à leurs obligations au regard de l’emploi de travailleurs handicapés. Or, eu égard à l’aptitude physique particulière requise pour les sapeurs-pompiers professionnels, il est manifeste que les SDIS sont malheureusement dans l’impossibilité d’atteindre le taux légal de 6 %. Par conséquent, les SDIS sont inévitablement obligés de verser cette contribution. Est-ce légitime ?
Bien entendu, ils peuvent s’acquitter partiellement de leur obligation d’emploi en réalisant certaines dépenses en faveur des personnes handicapées, notamment en signant des contrats de fourniture, de sous-traitance ou de prestations de service avec des entreprises adaptées.
Il reste que cette pénalité financière pèse fortement sur le budget des collectivités territoriales chargées de financer les SDIS que sont les communes, les intercommunalités et les départements.
Je tiens à préciser que ni l’armée ni les pompiers militaires, tels ceux de Paris ou de Marseille, ne sont, eux, soumis à l’obligation d’emploi de 6 %, alors que leurs missions sont identiques à celles de nos sapeurs-pompiers professionnels de province.
De même, il existe des exonérations pour les entreprises privées dont les activités nécessitent des conditions d’aptitude physique particulières.
Il ne s’agit pas ici de remettre en cause le bien-fondé de la loi du 11 février 2005 relative à la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui a étendu cette obligation à l’ensemble du secteur public. Il s’agit simplement de limiter cette obligation aux seuls services et personnels dont les activités permettent de remplir de tels objectifs d’embauche.
C’est pourquoi cet amendement tend à ce que cette obligation d’emploi de 6 % dans les SDIS pèse uniquement sur la part des salariés administratifs et techniques. Dès lors, en seraient exclus – cela nous semble logique ! – les sapeurs-pompiers professionnels, dont l’activité nécessite une aptitude physique particulière.
Au cas où M. About s’interrogerait sur la pertinence de cet amendement, je lui indique simplement que mon département, la Savoie, compte 409 sapeurs-pompiers professionnels ; sur les 90 personnels des services administratifs et techniques, 7 sont reconnus au titre de la loi de 2005. Pour remplir l’objectif des 6 %, il manque donc 22 postes sur la totalité des effectifs : multipliés par 14 000 euros, cela fait 300 000 euros, que nous déboursons en pure perte !
Et en Haute-Savoie, où l’on compte 565 sapeurs-pompiers professionnels, le déficit est de 42 agents, soit une pénalité de 600 000 euros, alors que ce déficit ne pourra jamais être comblé, même en affectant uniquement des personnes handicapées dans les services administratifs et techniques !
M. Nicolas About. Bien sûr !
M. Thierry Repentin. À un moment où les collectivités locales ont l’obligation d’être dynamiques et où les SDIS doivent réaliser des investissements importants, ces sommes seraient bien nécessaires, notamment pour acquérir du matériel.
J’appelle l’attention de la Haute Assemblée sur l’incongruité de cette obligation d’un pourcentage minimum de personnes handicapées dans un corps de professionnels où l’aptitude physique est le critère de recrutement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La question qui est soulevée est intéressante ; c’est d’ailleurs le propre des collectifs budgétaires de voir surgir des sujets extrêmement divers !
J’aurais tendance – je n’ai pas tous les éléments de réponse – à rapprocher le cas des sapeurs-pompiers opérationnels de celui des gardiens de la paix en uniforme ou d’autres catégories de personnels qui doivent, par définition, bénéficier de l’intégrité de leurs moyens physiques.
Je pense aussi – je vais peut-être vous choquer en disant cela – aux animateurs sportifs. Ils doivent par définition, lorsqu’ils encadrent des enfants, être en pleine possession de leurs moyens, aussi bien physiques qu’intellectuels, afin d’exercer au mieux les responsabilités qui sont les leurs.
Cet amendement, on le comprend, vise spécifiquement la situation des SDIS. Mais sur quelle assiette doit-on faire porter ces 6 % ? Si l’on exclut certaines catégories, on change la règle du jeu. On ne peut pas le faire, à mon sens, uniquement pour un seul métier, car, en observant différentes situations, on trouvera des cas de figure assez analogues.
À l’inverse, si l’on raisonne de cette manière, en prenant en compte les effectifs globaux d’une collectivité, dès lors que l’on ne peut évidemment pas affecter des personnes souffrant de handicap à certaines catégories d’emplois, le taux d’emploi dans les autres doit être plus élevé. Pour qu’un SDIS respecte la contrainte, il faut que la proportion des personnes répondant aux critères de la législation sur le handicap et affectées à un emploi administratif ou d’entretien soit beaucoup plus importante. Est-ce très raisonnable ? Je n’en suis pas certain.
En tout cas, peut-on aborder ce sujet grave en n’envisageant que la situation spécifique d’une catégorie particulière de personnel ? Je ne crois pas que nous soyons en droit de le faire.
Certains de mes collègues ont sans doute plus d’expérience que moi en la matière, et Nicolas About, qui a présidé la commission des affaires sociales et qui connaît bien cette problématique, pourrait sans doute utilement s’exprimer.
À ce stade, pour les raisons que je viens de m’efforcer de résumer, je ne peux émettre un avis favorable sur cet amendement, tout en reconnaissant que le problème posé est bien réel.
Un dialogue plus global devra être entamé sur la question de la discrimination positive, si j’ose m’exprimer ainsi, à l’égard des personnes handicapées.
M. Michel Charasse. Quelle horreur ! Ce n’est pas républicain !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il est, au contraire, selon moi, tout à fait respectable d’appliquer une discrimination positive en faveur des personnes handicapées. C’est ce que fait la législation en imposant le pourcentage que nous évoquons depuis tout à l’heure.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je ne sais pas si un SDIS doit, pour sa part stricte, respecter la proportion de 6 % ou si celle-ci s’applique en fait à un personnel plus large. Les agents des SDIS, qui relèvent des départements et des communes, peuvent-ils se confondre avec ceux du conseil général ? En tout cas, on ne peut pas « détricoter » ces 6 %, et ce n’est d’ailleurs pas ce que demande M. Repentin. En tout cas, il convient d’être très circonspect sur cette question.
Si des aménagements doivent être apportés au dispositif, il faut le faire en liaison avec les partenaires sociaux et éviter que cela soit considéré comme une provocation. Il s’agit en effet d’un domaine très sensible !
La fonction publique d’État obtient plutôt de bons scores s’agissant de l’emploi des personnes handicapées, car elle n’est pas très loin des 6 %, aux alentours de 4,8 % ou 5 %, en tout cas très au-dessus du taux atteint dans le secteur privé. Elle a valeur d’exemple et joue un rôle d’entraînement pour l’emploi de personnes handicapées.
Je précise à cet égard qu’une personne handicapée peut ne pas correspondre à un type de métier, mais être tout à fait capable d’exercer un autre type d’emploi. Il est difficile d’opérer des classifications, et je ne suis pas certain que ce soit très opportun.
Je veux bien que cela soit considéré comme un appel et que nous y réfléchissions avec la direction générale de la fonction publique. Il pourrait y avoir, par rapport à la situation des militaires par exemple, des incongruités rendant les choses plus difficiles et amenant certaines collectivités à cotiser au Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.
C’est pourquoi je sollicite le retrait de cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote.
Mme Michèle André. C’est un sujet difficile, mais je voudrais vous parler ici de mon expérience professionnelle.
J’ai dirigé un établissement pour enfants handicapés auditifs. Tous les professionnels dans ces métiers savent que certains types de handicaps ne permettent pas de travailler dans certains domaines. Par exemple, un adulte sourd ne peut travailler à l’accueil du public parce que son expression est difficile.
Dans les standards de nos mairies, nous avons eu à cœur de faire embaucher des personnes mal voyantes parce qu’elles pouvaient tout à fait s’exprimer, mais elles ne pouvaient pas conduire un véhicule automobile.
Dans les SDIS, l’un des critères majeurs de recrutement des sapeurs-pompiers, c’est l’aptitude physique. Lorsque les sapeurs-pompiers ont un accident grave, que ce soit au feu ou lors des déplacements, nous savons bien qu’ils ne peuvent plus travailler dans le service opérationnel. Ils ne monteront pas à la grande échelle, ils ne pourront plus faire certains soutiens. On les affecte souvent dans des services un peu différents, comme les services administratifs, techniques ou de soutien aux personnes.
Cela pose déjà des difficultés et l’on comprend pourquoi les marins-pompiers de Marseille ou les sapeurs-pompiers de Paris, qui sont des militaires, échappent à cette règle.
Mais les sapeurs-pompiers dans les SDIS de nos départements ont exactement la même obligation de capacité physique : monter en haut de la grande échelle pour sauver une personne, porter du matériel lourd pour entrer dans un milieu hostile ou difficile. Nous savons bien que l’aptitude physique est à la base de leur métier.
Monsieur le ministre, il faut étudier la question et ce n’est pas méconnaître le problème du handicap que d’exprimer une telle demande.
Mme Michèle André. Je pense au contraire qu’il faut permettre aux handicapés d’aller au bout de leurs capacités, mais il ne faut pas les mettre dans des situations impossibles. Or, avec le « politiquement correct » on peut les mener à l’échec. C’est de cela qu’il s’agit.
M. le président. La parole est à M. Nicolas About, pour explication de vote.
M. Nicolas About. Je partage la préoccupation de Thierry Repentin : il s’agit d’un véritable problème et quand on a rédigé la loi, on a surtout voulu réaffirmer un principe important. Vous n’êtes pas le premier à le transgresser, l’éducation nationale l’a déjà fait en considérant, par exemple, que les sommes dépensées au titre des auxiliaires de vie scolaire, les AVS, devaient venir en déduction des sommes dues par l’éducation nationale au Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.
Il faut étudier cette question avec soin et je souhaite que la commission des affaires sociales s’en saisisse de nouveau très rapidement.
Mme Michèle André. Il faut faire une évaluation.
M. Nicolas About. Ce n’est même pas une question d’évaluation car nous sommes tous, comme Thierry Repentin, parfaitement conscients qu’il existe des cas spécifiques où l’on ne peut pas appliquer cette mesure avec la même rigueur alors qu’on aurait pu l’appliquer dans l’éducation nationale.
Je m’engage personnellement, à travers mon groupe mais aussi ma fonction au sein de la commission, à faire réexaminer ce sujet pour que nous parvenions rapidement à trouver une solution autre qu’une simple compensation par la dotation globale. Je préfère que l’on trouve un autre mode de calcul.
M. le président. Monsieur Repentin, l’amendement n° 49 est-il maintenu ?
M. Thierry Repentin. Ce débat est intéressant.
Monsieur le président About, vous avez employé le terme « transgresser ». Je ne souhaite absolument pas transgresser la philosophie de la loi 2005, que nous épousons tous.
M. Nicolas About. Je parlais du calcul que nous avons mis en place.
M. Thierry Repentin. Dans l’application stricte de cette règle des 6 % pour les SDIS, il y a sans doute matière à réflexion et peut-être à faire bouger les curseurs, car le parallèle avec la profession de sapeurs-pompiers professionnels et la profession d’animateurs sportifs me semble un peu osé, monsieur le rapporteur général.
On envoie des hommes au feu, au secours en mer, en montagne, sur les routes. Il s’agit d’un corps très particulier. Les dispositions régissant les sapeurs-pompiers professionnels en province devraient, me semble-t-il, être les mêmes que celles qui s’appliquent à Paris ou à Marseille. (M. Nicolas About opine.)
Appliquer cette règle des 6 % à la totalité des personnels administratifs et techniques me paraît tout à fait défendable. Cependant, au-delà, faire chaque année un chèque de 300 000 euros en Savoie et de 600 000 euros en Haute-Savoie, c’est aussi se priver d’investissements en matière de défense contre l’incendie et de secours. Cette dépense pourrait être revue.
Compte tenu du débat qui vient d’avoir lieu et de l’engagement qui a été pris de le poursuivre, je retire cet amendement, lequel intéressera sans doute d’autres parlementaires. Je pense à ceux qui ont saisi le Gouvernement à ce sujet par la voie du Journal officiel. Je pense aussi à notre collègue Daniel Reiner, qui a posé une question orale sans débat ici même mardi dernier.
Je retire également l’amendement n° 50, qui avait pour objet d’accorder un délai de quelques années pour atteindre ces 6 % aux départements qui s’étant vus transférer des services de l’État qui ne respectaient pas cette obligation
M. le président. Les amendements nos 49 et 50 sont retirés.
L'amendement n° 50, présenté par MM. Repentin et Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 323-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les services de l'État transférés aux collectivités locales dans le cadre de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, les collectivités territoriales nouvellement compétentes ont un délai de 10 ans après le transfert effectif pour atteindre le niveau de 6 % d'obligation d'emploi de travailleurs handicapés. »
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a été retiré.
L'amendement n° 79, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement doit, dans un délai de six mois, fournir au Parlement un rapport dans lequel il exposera les modalités concrètes de la mise en place d'une taxe assurantielle sur les activités des banques, en fonction du risque qu'elles prennent sur les marchés financiers.
Cette taxe devra être en adéquation avec la proposition d'une taxe assurantielle pour les banques, faite par le Président du Fonds Monétaire International lors de la réunion du G20 Finances des 24 et 25 septembre 2009.
Le dispositif mis en place ne devra pas prévoir de compensation au moyen d'une baisse de la taxe sur les salaires acquittée par les banques.
La parole est à Mme Nicole Bricq.