Article 46 bis
I. – Le I de l’article 72 D bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le c, il est inséré un d ainsi rédigé :
« d) Au titre de l’exercice de survenance d’un aléa d’origine économique lorsque la différence négative entre la moyenne des marges brutes d’exploitation des trois exercices précédents et la marge brute de l’exercice excède 10 % de cette moyenne. Un décret définit la marge brute d’exploitation. » ;
2° Au dernier alinéa, la référence : « c » est remplacée par la référence : « d ».
II. – Les pertes de recettes pour l’État sont compensées par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. L’amendement n° II-384, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« d. Au titre de l’exercice de survenance d’un aléa d’origine économique lorsque la différence positive entre la moyenne des valeurs ajoutées des trois exercices précédents et la valeur ajoutée de l’exercice, réalisée dans des conditions comparables, excède 10 % de cette moyenne, dans la limite de cette différence. Pour l’application du présent alinéa, la valeur ajoutée s’entend de la différence entre, d’une part, la somme, hors taxes, des ventes, des variations d’inventaire, de la production immobilisée et autoconsommée et des indemnités et subventions d’exploitation et, d’autre part, la somme, hors taxes et sous déduction des transferts de charges d’exploitation affectés, du coût d’achat des marchandises vendues et de la consommation de l’exercice en provenance de tiers. »
II. Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Il s’agit de préciser le dispositif, adopté à l’Assemblée nationale, élargissant aux aléas d’origine économique le champ de la déduction pour aléas des bénéfices agricoles, ou DPA, auparavant limité aux aléas climatiques, naturels ou sanitaires.
Selon la définition retenue par les députés, un aléa économique se caractérise par une chute de la marge brute d’exploitation de plus de 10 % par rapport à la moyenne constatée sur les trois dernières années.
Or le concept de marge brute d’exploitation n’est pas précisément défini. Il s’agit d’une notion d’analyse financière, et non pas comptable, ce qui rend sa mise en œuvre malaisée. Il sera difficile de la préciser dans le décret prévu par le texte de l’Assemblée nationale.
Il est donc proposé de caractériser l’aléa économique par une baisse supérieure à 10 % par rapport à la moyenne des trois exercices précédents de la valeur ajoutée, poste comptable parfaitement identifié, ce qui permet de prendre en compte à la fois la chute des cours des marchandises agricoles vendues ou la hausse des prix des intrants dans le processus de production.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission ne s’est pas prononcée sur cet amendement, mais elle a validé le dispositif de l’article 46 bis.
Cela étant, il paraît effectivement préférable de recourir à la notion comptable clairement identifiée de valeur ajoutée, la marge brute d’exploitation étant un concept d’analyse financière et non une donnée comptable incontestable.
Il serait toutefois utile que vous nous précisiez, monsieur le ministre, les conséquences concrètes qu’une telle substitution serait susceptible d’avoir sur le calcul de la variation des résultats des exploitants agricoles. Pouvons-nous considérer que le dispositif ainsi modifié sera d’une ampleur à peu près égale à celle de la mesure initiale ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. La valeur ajoutée étant une notion connue, la substitution proposée évitera des discussions, voire des conflits d’interprétation, entre l’administration fiscale et le monde agricole, ce qui est déjà positif. Les cours des marchandises agricoles et le coût des intrants seront pris en compte, ce qui correspond bien au périmètre d’un aléa économique.
Le Gouvernement s’était d’abord montré hésitant devant un tel dispositif et l’avait d’ailleurs refusé l’année dernière. Nous l’avons accepté cette année, car il répond aux intérêts de la profession agricole.
M. le président. Je mets aux voix l’article 46 bis, modifié.
(L’article 46 bis est adopté.)
Article 46 ter
À la première phrase du premier alinéa du I de l’article 200 undecies du code général des impôts, l’année : « 2009 » est remplacée par l’année : « 2012 ».
M. le président. L’amendement n° II-166, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 1 :
Remplacer l’année :
« 2012 »
par l’année :
« 2010 »
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le ministre, mes chers collègues, vous ne serez pas surpris que nous souhaitions appliquer les principes auxquels nous tenons !
En l’espèce, il s’agit de réduire la durée de prorogation du dispositif de crédit d’impôt en faveur des exploitants agricoles au titre des dépenses qu’ils ont engagées en vue d’assurer leur remplacement pendant leurs congés.
Ce dispositif, créé par la loi du 5 janvier 2006 d’orientation agricole, devait durer quatre ans et prendre fin au 31 décembre 2009. Au regard du succès qu’il a connu, l’Assemblée nationale a adopté un amendement portant article additionnel dont l’objet est de le reconduire pour une durée de trois ans.
Toutefois, il ne semble pas qu’une évaluation digne de ce nom ait été conduite et restituée au Parlement. C’est pourquoi la commission propose de limiter le renouvellement de ce crédit d’impôt à la seule année 2010, en espérant que ladite évaluation puisse être produite d’ici au 31 décembre de l’année prochaine, ce qui nous permettrait de statuer en toute connaissance de cause sur le renouvellement ou non d’un tel régime fiscal.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Compte tenu de l’avis que j’ai émis tout à l’heure sur d’autres dispositifs, je ne peux pas être défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel. Je comprends les raisons avancées par M. le rapporteur général, mais l’adoption de cet amendement reviendrait selon moi à adresser un bien mauvais signal à certaines catégories d’agriculteurs qui souffrent beaucoup en ce moment. Je pense aux éleveurs, et notamment aux éleveurs laitiers : les vaches devant être traites matin et soir, ils sont bien obligés d’engager un remplaçant s’ils veulent prendre des congés.
Alors que l’on vient de faire un cadeau de 3 milliards d’euros aux restaurateurs, les éleveurs ne méritent pas que l’on revienne sur la mesure prise en leur faveur par l’Assemblée nationale ! (M. Martial Bourquin applaudit.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 46 ter, modifié.
(L’article 46 ter est adopté.)
Articles additionnels après l’article 46 ter
M. le président. L’amendement n° II-259, présenté par M. Villiers, est ainsi libellé :
Après l’article 46 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans le I de l’article 69 du code général des impôts, le montant : « 76 300 euros » est remplacé par le montant : « 100 000 euros ».
II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits créés par les articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° II-211, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l’article 46 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 8 à 10 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat sont abrogés.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Lors de l’examen de la première partie du présent projet de loi de finances, nous avons eu l’occasion de constater que la préservation des inégalités de patrimoine avait encore quelques défenseurs, puisque la possibilité d’effectuer une donation en numéraire a été étendue aux contribuables âgés de moins de quatre-vingts ans.
Nous estimons pour notre part qu’il faut mettre un terme à ces procédures. En effet, les inégalités de patrimoine, plus encore que celles de revenus, sont au cœur des inégalités dans notre pays et se sont du reste sensiblement accrues, notamment dans la dernière période, ne serait-ce que parce que l’impôt épargne de plus en plus les revenus financiers ou du patrimoine. L’effet cumulatif a, bien sûr, joué à plein.
En outre, les inégalités de patrimoine ont été maintenues, sinon renforcées, par un certain nombre de dispositions, en particulier celles de la loi TEPA sur les successions et donations.
La loi TEPA, censée nous apporter croissance, audace, emploi et développement économique et social, n’a pas permis de nous éviter les effets de la crise financière de l’année 2008. Cela fait longtemps que les promesses de l’été 2007 se sont perdues dans les sables de la récession, avec la montée du chômage, les liquidations et fermetures d’entreprises…
Le nouveau régime des successions et des donations n’a pas contribué à la résolution des problèmes d’emploi et de logement. Il s’agit donc d’une déperdition de recettes fiscales pour l’État, sans effet concret sur la vie économique.
Nous serions d’ailleurs curieux de connaître les éventuelles retombées positives des mesures dont nous demandons aujourd’hui la suppression. Nous vous invitons donc, mes chers collègues, à adopter cet amendement, à moins que, faits et chiffres à l’appui, M. le ministre et M. le rapporteur général puissent nous apporter la preuve que l’aménagement du régime des donations a eu quelque effet sur la croissance et sur l’emploi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mes chers collègues, je ne crois pas me tromper en disant qu’un amendement identique a déjà été présenté, par les mêmes auteurs, lors de l’examen de la première partie du présent projet de loi de finances et qu’il a été rejeté par le Sénat après avoir recueilli un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
Je ne peux donc que vous renvoyer à nos débats antérieurs, tout en faisant remarquant que cet amendement, s’il était adopté, accroîtrait les recettes de l’État en 2010 et, partant, modifierait le solde : il n’a donc manifestement pas sa place en deuxième partie de la loi de finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il est irrecevable !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je rappellerai simplement certaines des dispositions que nous avons prises : suppression des droits de succession au profit du conjoint survivant ou du partenaire lié au défunt par un pacte civil de solidarité, ainsi que de certains frères et sœurs vivant ensemble ; augmentation du nombre d’abattements personnels, en posant le principe de leur actualisation annuelle ; instauration d’un abattement personnel pour les successions dévolues aux neveux et nièces ; exonération sous plafond des dons de sommes d’argent consentis au profit des enfants et petits-enfants. Et je pourrais en citer d’autres !
Je comprends assez mal que vous souhaitiez revenir sur de telles dispositions, monsieur Foucaud, car elles sont très populaires auprès des Français. Elles ont permis d’exonérer près de 95 % des successions, les très grosses successions étant exclues : elles s’inscrivent donc dans une logique d’équité, et nous pouvons nous honorer de les avoir prises.
M. le président. Monsieur Foucaud, il semble que cet amendement, ainsi que le suivant, soient irrecevables au regard des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances. Pouvez-vous le confirmer, monsieur le rapporteur général de la commission des finances ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Oui, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° II-211 est donc irrecevable, de même que l'amendement n° II-213, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, et ainsi libellé :
Après l'article 46 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 16 de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat est abrogé.
Article 47
À la cinquième colonne du tableau du a du III de l’article 1011 bis du code général des impôts, les tarifs pour l’année 2011 sont ainsi modifiés :
– 0 demeure 0 ;
– 0 devient 200 ;
– 200 devient 750 ;
– 750 demeure 750 ;
– 750 demeure 750 ;
– 750 devient 1 600 ;
– 1 600 demeure 1 600 ;
– 1 600 demeure 1 600 ;
– 1 600 devient 2 600 ;
– 2 600 demeure 2 600 ;
– 2 600 demeure 2 600.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, sur l’article.
M. Martial Bourquin. Comme je l’ai déjà dit mardi dernier à Mme Jouanno, les dispositifs fiscaux en faveur de la voiture « décarbonée » sont très utiles, si tant est qu’ils soient adaptés aux capacités de production industrielles et aux modalités de mise sur le marché.
Nous sommes nombreux, dans cette enceinte, à craindre que le syndrome des « juppettes » et des « balladurettes » ne se manifeste à nouveau et que la fin de la prime à la casse et du système de bonus-malus ne conduise à un effondrement du marché automobile.
Les aides à l’industrie automobile, via la prime à la casse et le bonus-malus, reposent notamment sur une contrepartie environnementale forte. Elles devaient, en effet, permettre à l’ensemble de la filière automobile d’effectuer une véritable mutation environnementale. Sinon, soyons-en conscients, les très importants moyens mobilisés en faveur de l’industrie automobile auront manqué une partie de leurs objectifs.
Or, aujourd’hui, je m’interroge sur l’opportunité d’anticiper le durcissement du dispositif de bonus-malus d’une année et sur les conséquences d’une telle mesure sur la structure du marché automobile.
Les deux principaux constructeurs automobiles français ont, en effet, calé un programme industriel de 2007 à 2012 pour produire des véhicules répondant à des objectifs environnementaux graduels. Par exemple, les voitures hybrides rechargeables sont attendues pour 2012, voire pour 2011 chez certains constructeurs.
Du fait de l’anticipation d’une année de l’abaissement des seuils d’émission de CO2, les constructeurs se trouveront en retard d’une année sur le nouveau calendrier industriel, qui a pourtant fait l’objet d’une concertation entre les différents acteurs.
Je me demande si vous avez bien pris en compte ce décalage, qui pourrait freiner les mutations environnementales de la filière automobile. Les économies qui seraient tirées de cette mesure d’anticipation valent-elles que l’on fragilise nos constructeurs, qui sont sur le point de sortir des voitures « décarbonées », notamment des véhicules hybrides ? Ne risque-t-on pas d’inciter à l’importation de véhicules qui répondront d’ores et déjà aux nouveaux critères ?
La question est très importante, car ce sont des bassins d’emploi entiers qui sont concernés par ces mesures. L’automobile représente environ 10 % de notre industrie. Elle est en pleine mutation, et une telle anticipation pourrait la fragiliser. Nous insistons fortement sur le fait que l’avancement du calendrier risque de mettre en difficulté nos constructeurs.
M. le président. L'amendement n° II-191 rectifié, présenté par MM. Cornu et du Luart, Mme Debré, M. Beaumont, Mme Lamure, MM. Alduy, Billard et Doligé, Mme B. Dupont, MM. del Picchia, B. Fournier, Belot et Vasselle, Mme Rozier, MM. Gilles, Revet et Houpert, Mme Mélot, MM. Haenel, de Legge, Pierre, Mayet, César, Duvernois, Bailly, Nègre, Dulait, Houel, Bizet, Chauveau, Lardeux, Milon et P. Dominati, Mme Papon, M. Laménie et Mmes Henneron, Sittler et Panis, est ainsi libellé :
Supprimer cet article
La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Le dispositif du bonus-malus a été institué à la fin de l'année 2007. Le barème du malus a été fixé par l'article 63 de la loi de finances rectificative pour 2007. Le barème du bonus a été déterminé par le décret n° 2007-1873 du 26 décembre 2007 instituant une aide à l'acquisition de véhicules propres.
L'article 47 du projet de loi de finances pour 2010 porte sur l'accélération de la montée en puissance du malus automobile à compter de 2011. Il anticipe en effet de 2012 à 2011 le relèvement du malus automobile.
Le Gouvernement envisage, par ailleurs, une révision à la baisse du bonus par une modification du décret du 26 décembre 2007.
Ces deux décisions remettent en cause le calendrier d'évolution du dispositif du bonus-malus jusqu'en 2012, sur lequel des engagements avaient été pris.
Une telle modification du calendrier serait néfaste pour l'industrie automobile, dont la sauvegarde a été assurée en 2009 par la prime à la casse et les mesures du pacte automobile mis en œuvre par le Gouvernement. Les constructeurs se sont, en effet, adaptés aux règles du jeu fixées en 2007.
Le présent amendement vise, en conséquence, à maintenir le calendrier d'évolution du malus initialement prévu. Les signataires de l’amendement estiment, par ailleurs, que le Gouvernement doit renoncer à la baisse du bonus envisagée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à supprimer l’article 47, qui prévoit, je le rappelle, une accélération de la montée en puissance du malus automobile en anticipant d’un an l’abaissement de cinq grammes de CO2 par kilomètre du seuil d’application du malus.
On peut certes admettre que cette accélération soit susceptible de perturber quelque peu la planification industrielle des constructeurs, mais je crois qu’il faut replacer cette mesure dans son contexte et en relativiser l’incidence sur l’industrie automobile.
D’abord, le dispositif du bonus-malus a un effet très positif sur le plan écologique et environnemental, puisque les émissions moyennes de CO2 ont considérablement baissé depuis près de deux ans. La contrepartie de ce dispositif, c’est qu’il coûte très cher sur le plan budgétaire. Il faut en avoir conscience !
Le déficit du compte de concours financiers « Avance au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres » s’est creusé : il devrait dépasser 520 millions d’euros en 2009. D’après les estimations du Gouvernement, l’anticipation d’une année de la baisse des seuils pourrait contribuer à ramener en 2011 ce déficit dans une fourchette comprise entre 17 millions et 153 millions d’euros, selon le niveau d’adaptation des constructeurs.
Ensuite, la mesure s’applique à tous les constructeurs : elle ne réduit donc pas l’éventail de choix pour les consommateurs. Je pense qu’elle pourrait même avantager quelque peu les constructeurs français, dans la mesure où les émissions moyennes des véhicules produits chez nous sont inférieures à celles des véhicules étrangers haut de gamme, qui seront davantage taxés.
Par ailleurs, pour les tranches d’émissions qui concernent davantage les modèles français, le surcoût sera de 200 ou de 550 euros. Je rappelle que ce montant est à rapporter à un coût d’achat généralement supérieur à 20 000 euros !
Enfin, les constructeurs, notamment français, ont montré en 2008 et en 2009 leur capacité à développer et à commercialiser très rapidement des modèles aux motorisations rénovées pour optimiser la consommation de carburant, réduire les émissions de CO2 et s’adapter à la demande de la clientèle.
Pour cela, les constructeurs ne doivent pas nécessairement concevoir de nouvelles motorisations, mais adapter celles qui existent en utilisant des technologies connues, ce qui ne requiert pas un délai de deux ans.
Au total, il faut soutenir le Gouvernement, qui s’est efforcé, au travers de l’article 47 du projet de loi de finances, de reprofiler de façon très modérée le dispositif du bonus-malus, dont l’efficacité, qui est prouvée, tient aussi à l’existence d’un malus : il ne saurait s’agir d’un système 100 % bonus ! Il convient que les constructeurs adaptent leur politique de motorisation. La mesure de l’article 47 est vraiment extrêmement modérée, et la commission souhaite donc vivement le retrait de l’amendement n° II-191 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Qu’ajouter aux brillants propos de M. le rapporteur général !
Le Gouvernement souhaite anticiper d’un an la seconde étape du durcissement du malus automobile. Dans le domaine automobile, deux dispositifs sont actuellement en vigueur : la prime à la casse, qui aura coûté 500 millions d’euros en 2009 et doit elle aussi évoluer en sifflet ; le bonus-malus, d’un coût identique.
En 2009, le Gouvernement a donc injecté 1 milliard d’euros pour soutenir le marché automobile, qui se tient bien, ce qui était très important pour l’économie française.
En 2010, le coût du bonus-malus doit se réduire à 100 millions d’euros selon les normes prévues et la répartition des achats de véhicules : les automobiles rejetant peu de CO2 représentent de 40 % à 45 % des ventes. Si nous reconduisions purement et simplement les mesures en vigueur, la facture du bonus-malus, compte tenu de l’évolution du marché, remonterait en 2011 à 340 millions d’euros.
Nous nous préoccupons nous aussi de la situation de l’industrie automobile, mais nous sommes également soucieux des finances publiques. En 2009, le Gouvernement a consacré à l’industrie automobile, outre 1 milliard d’euros au titre des deux dispositifs que je viens d’évoquer, 6 milliards d’euros de prêts ou d’avances remboursables aux constructeurs : ce n’est pas un hasard si le secteur automobile se porte bien en ce moment !
Dans ces conditions, une première solution consistait à baisser le montant du bonus, mais celui-ci n’aurait alors pas été suffisamment élevé pour être incitatif. Nous avons donc jugé préférable de proposer de durcir le malus par une anticipation au 1er janvier 2011 de l’abaissement des seuils d’émission de CO2. Comme l’a très bien dit M. le rapporteur général, cela laisse une marge d’adaptation aux constructeurs, avec lesquels nous en avons discuté.
M. le président. Monsieur Robert del Picchia, l’amendement n° II-191 rectifié est-il maintenu ?
M. Robert del Picchia. Monsieur le ministre, j’ai écouté avec attention vos arguments, ainsi que ceux de M le rapporteur général. Si, effectivement, le surcoût est de 200 ou de 550 euros, il vaut mieux favoriser les constructeurs français. Je retire donc l’amendement.
M. le président. L’amendement n° II-191 rectifié est retiré.
M. Martial Bourquin. Je le reprends, monsieur le président !
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° II-191 rectifié bis, présenté par M. Bourquin, et ainsi libellé :
Supprimer cet article
La parole est à M. Martial Bourquin.
M. Martial Bourquin. Un accord avait été passé entre le Gouvernement et les constructeurs. Ces derniers en ont observé les termes : pourquoi ne pas le respecter ?
Ce qui est en jeu, c’est l’avenir de dizaines de milliers de salariés, employés tant par les constructeurs que par les PME sous-traitantes. Vous avez affirmé, monsieur le ministre, que le secteur automobile se porte bien : ne crions pas victoire trop tôt ! Les aides mises en place continuent de produire leur effet, mais la situation reste encore très fragile.
Par ailleurs, dans la perspective du sommet de Copenhague, l’idée est de promouvoir l’achat de véhicules propres qui soient produits chez nous. Ma proposition est simple : respectons l’accord passé entre le Gouvernement et les constructeurs. On nous dit que le coût du dispositif est de 500 millions d’euros et que nous devons être attentifs à la situation des finances publiques : je trouve cet argument difficile à admettre, alors que le paquet fiscal coûte 14 milliards d’euros ! (M. le ministre lève les bras au ciel.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Pourquoi s’arrêter à 500 millions d’euros ? Pourquoi pas 1, 2 ou 3 milliards d’euros ?
M. Martial Bourquin. Monsieur Marini, je vous rappelle que nous allons voter un budget dont le déficit aura doublé !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ne l’aggravez donc pas !
M. Martial Bourquin. Avant de donner des leçons, regardez donc ce que vous faites !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous savons très bien ce que nous faisons.
M. Martial Bourquin. Savez-vous quelle est aujourd’hui la situation de la France et l’ampleur de ses déficits publics ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Oui, ne les aggravez pas davantage !
M. Martial Bourquin. Si vous n’êtes pas d’accord avec nos propositions, dites-le, mais ne les brocardez pas !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est vous qui ne cessez de brocarder la politique que nous défendons !
M. Martial Bourquin. Mes chers collègues, cet amendement se défend. Prenons garde à ce que nous allons voter, car, je vous l’assure, la situation de l’industrie automobile est beaucoup plus fragile qu’on ne le pense.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. La situation des équipementiers automobiles est un sujet très sensible, auquel nous devons, mes chers collègues, prêter toute notre attention. Semaine après semaine, nous entendons, à la radio, à la télévision, parler des difficultés des entreprises : le plus souvent, il s’agit de PME de ce secteur !
Comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, 6 milliards d’euros d’avances ont été accordés à PSA et à Renault. Certes ! Mais, le FMEA, le Fonds de modernisation des équipementiers automobiles, n’a été doté quant à lui que de 600 millions d’euros, une somme, nous l’avons dit à plusieurs reprises dans cette enceinte, notoirement insuffisante.
La plupart des entreprises de ce secteur, qui se comptent par dizaines dans tous nos départements, ne bénéficient d’aucune aide au titre du FMEA ou du Fonds stratégique d’investissement.
Ce que nous demandons, comme les trente-huit sénateurs et sénatrices de la majorité ayant signé l’amendement présenté par M. del Picchia, c’est bien sûr que tout soit fait pour protéger l’environnement, mais aussi que la parole de l’État soit respectée. En effet, M. Borloo s’était en particulier engagé sur un calendrier à l’égard de la filière automobile, laquelle s’est « calée » sur les échéances qui lui ont ainsi été fixées.
En reprenant l’amendement n° II-191 rectifié, nous demandons donc simplement le respect de ce calendrier, de manière à soutenir le secteur automobile, notamment pour protéger les dizaines de milliers d’emplois chez les équipementiers, qui sont beaucoup plus fragiles qu’on ne le pense.