M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse argumentée, même si elle renforce mes inquiétudes.

Vous nous dites que le coût de la défiscalisation de TIPP pour 2010 s’élèvera à 620 millions d’euros et que la contribution carbone sur les biocarburants coûterait, elle, 200 millions d’euros, ce qui signifie que les filières qui devraient bénéficier d’un avantage économique de 620 millions d’euros verraient cet avantage réduit à 420 millions d’euros. Est-ce cela que l’on veut faire ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Non !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est une remise en cause des conditions économiques !

Vous nous dites que le coût de la dépense fiscale pour les biocarburants est de 620 millions d’euros – je pense que nous pouvons être d’accord sur ce chiffre – et que, par ailleurs, une exonération de la contribution carbone coûterait 200 millions d’euros à l’État, en creusant une niche dans ce nouvel impôt.

Si le coût de la mesure est évalué à 200 millions d’euros pour l’État, c’est bien qu’il s’agit, dans votre esprit, d’une dépense que les professionnels, c'est-à-dire les producteurs de biocarburant, n’auraient plus à faire. Et s’ils n’obtiennent pas l’exonération, ils devront dépenser 200 millions d’euros de plus, somme à déduire de l’avantage de 620 millions d’euros qui leur est accordé. L’avantage passerait donc de 620 millions d’euros à 420 millions d’euros.

Or les représentants des filières concernées nous expliquent qu’ils ont des investissements à assumer, qu’ils ont pris des engagements et qu’ils doivent respecter des plans de financement. Il ne leur est pas possible de s’adapter aussi vite à des fluctuations économiques aussi importantes, qui interviennent brutalement d’une année sur l’autre, de surcroît sans concertation avec les acteurs concernés.

Au demeurant, les 200 millions d’euros ne constituent-ils pas une estimation un peu forcée de la situation ? Ne font-ils pas référence à des objectifs d’incorporation totalement saturés ? On peut s’interroger. Ces 200 millions d’euros correspondent-ils à une exonération totale, alors que l’amendement n° I-442 vise seulement à instituer une exonération à proportion des gains de dioxyde de carbone ?

Madame la ministre, je vous crois lorsque vous évoquez ces chiffres, mais nous ne disposons pas des éléments de calcul. Nous n’avons donc pas été en mesure de croiser les données.

C'est la raison pour laquelle il me semble utile que le débat puisse se poursuivre quelques instants. Nous devrions écouter notre collègue Yves Détraigne avant que lui et les autres auteurs de l’amendement ne décident des suites à y donner.

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Je souscris totalement aux questions qui viennent d’être soulevées par M. le rapporteur général, après les explications apportées par Mme la ministre. Je souhaite simplement ajouter quelques interrogations complémentaires.

Madame la ministre, vous avez affirmé que ce prétendu « bénéfice » profiterait aux producteurs, c'est-à-dire aux pétroliers. Excusez-moi, mais, en l’occurrence, les pétroliers sont seulement les distributeurs, et non les producteurs, de biocarburants.

Pour être un peu malicieux, je dirai que les principaux producteurs de biocarburants sont des sociétés dépendant de coopératives agricoles. Or, samedi dernier, pour justifier votre opposition à un amendement déposé par M. le président de la commission des finances sur la fiscalisation de ces coopératives, vous nous avez expliqué que ces dernières bénéficiaient d’une fiscalité particulière car leur activité était le prolongement de l’activité agricole !

Par conséquent, ce prétendu « cadeau », qui consiste simplement à conserver le même niveau de fiscalisation et non à le réduire, ne bénéficierait pas aux pétroliers. Au demeurant, ces derniers sont loin d’être favorables aux biocarburants, qui font concurrence à leurs produits. D’ailleurs, la taxe générale sur les activités polluantes a été instituée pour le cas où les pétroliers ne respecteraient pas les obligations européennes d’incorporation de biocarburants.

Vous avez également affirmé que les bilans énergétiques des biocarburants étaient contestés. Or l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, a mené une étude qui vise précisément à clore les débats sur les conditions d’élaboration de ces bilans. Cette analyse du cycle de vie des biocarburants, qui est effectivement complexe, a été conduite sur la base de recommandations méthodologiques émises par la Commission européenne et d’un référentiel agréé par l’ADEME. Ses résultats ont été validés non seulement par le ministère chargé de l’industrie, qui, sauf erreur de ma part, dépend de Bercy, et par l’Institut français du pétrole. Ils ont été publiés le 9 octobre sur le site de l’ADEME, puis ont curieusement disparu cinq jours plus tard. Peut-être les conclusions dérangeaient-elles certains…

Effectivement, cela peut déranger de constater que les biocarburants ont un bon bilan sur le plan à la fois de la production énergétique et des émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, l’étude a révélé que la production d’une unité énergétique d’éthanol nécessitait 0,46 unité d’énergie non renouvelable, alors qu’il faut consommer 1,16 unité d’énergie non renouvelable pour produire un litre d’essence. L’éthanol représente donc un gain de 60 % en termes de consommation d’énergie. De même, l’étude a montré que les émissions de gaz à effet de serre par unité énergétique produite ressortaient à 32 grammes d’équivalent dioxyde de carbone par mégajoule d’éthanol. Si l’on compare ce chiffre aux 87,6 grammes d’équivalent dioxyde de carbone produits par l’essence, on constate un gain de 63 %.

Comme dit un adage populaire, qui veut noyer son chien l’accuse de la rage… Je suis désolé, madame la ministre, mais j’ai le sentiment que nous en sommes là aujourd’hui ! On cherche tous les arguments pour refuser le développement des biocarburants. Pourtant, ils sont plus créateurs d’emplois en France que la raffinerie.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je voudrais d’abord rendre hommage à Mme la ministre, parce que ce débat nous fait prendre la mesure de la tâche extrêmement délicate dont elle est chargée.

Il n’est pas évident de faire voter l’institution d’une contribution carbone. Nous le voyons bien, l’assiette reste large, mais, au fil des amendements, il faut multiplier les allégements, les exemptions… C’est donc un travail extrêmement délicat. On en vient à opposer les prélèvements sur les entreprises à ceux qui pèsent sur les ménages, comme s’il y avait un seul prélèvement sur les entreprises qui ne se traduise pas dans les prix demandés aux consommateurs.

À mon sens, nous aurions peut-être besoin d’une expertise complémentaire sur l’amendement n° I-442. Nous n’avons aucune raison de douter de l’argumentation développée par Mme la ministre. Toutefois, si chacun en était d'accord, peut-être pourrions-nous suspendre le vote sur cette disposition et nous donner rendez-vous lors du collectif budgétaire de fin d’année, c'est-à-dire vers le 16 ou le 17 décembre. Cela nous laisserait le temps de réunir les experts et de voir avec le Gouvernement comment construire un texte parfaitement opérant.

Autrement, je crains que nous ne finissions par adopter des positions un peu arbitraires et par avoir des remords à l’issue de ce vote. En outre, nous risquerions de tout perdre en commission mixte paritaire.

Peut-être le Gouvernement pourrait-il prendre un engagement en ce sens et nous donner rendez-vous pour la mi-décembre. (Mme la ministre acquiesce.)

M. le président. Monsieur Détraigne, que pensez-vous de la suggestion de M. le président de la commission ?

M. Yves Détraigne. Je retiens cette suggestion, monsieur le président, et je retire donc l’amendement.

M. le président. L'amendement n° I-442 est retiré.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le président, je souhaite bien entendu répondre favorablement à l’invitation qui m’a été adressée très aimablement par M. le président de la commission des finances. Je remercie également M. Détraigne d’avoir bien voulu se ranger à cette position.

Je prends effectivement l’engagement de retravailler sur le sujet pour vous apporter l’ensemble des éléments nécessaires sur les bénéficiaires, les mécanismes et les montants, afin de savoir ce qu’il en est. Je solliciterai également mes collègues Jean-Louis Borloo et Bruno Le Maire pour qu’ils participent au processus. Nous aurons ainsi une information complète du point de vue tant de l’agriculture que de l’écologie et de l’environnement.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, et M. Gérard César. Très bien !

M. le président. L'amendement n° I-258, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 17 de l’article 5, qui concerne une exonération partielle de la contribution carbone pour le transport routier.

Sur ce sujet, le Gouvernement a beaucoup hésité – n’est-ce pas, madame la ministre ? Au départ, vous vouliez exonérer totalement le transport routier de marchandises. Après moult hésitations, vous avez finalement décidé de soumettre les transporteurs routiers à la contribution carbone.

Vous prétendez ne pas manquer de cohérence. J’ignore si c’est vrai. En revanche, il est certain que vous ne manquez pas de constance. En effet, vous ne pouvez pas vous empêcher, à un moment ou à un autre, d’établir des régimes d’exonération ! En l’occurrence, vous proposez de rembourser les transporteurs routiers à hauteur de 36 % de la contribution carbone. En d’autres termes, les entreprises de transport routier ne paieront que 64 % de la contribution carbone. C’est surprenant…

Plutôt que de préparer ce secteur à passer le cap de la mutation énergétique à laquelle il va être obligé de se confronter et de lancer le débat au niveau européen en vue d’empêcher un dumping social et fiscal de la part des autres transporteurs européens, le Gouvernement préfère encore une fois faire un cadeau fiscal à une nouvelle catégorie professionnelle.

Certes, madame la ministre, vous vous êtes engagée à l’Assemblée nationale à limiter cette exonération partielle à quatre ans. Est-ce vraiment le cas ? Et, si oui, pourquoi ne pas l’inscrire dans la loi ?

Je le rappelle, le Président de la République a annoncé vouloir doubler la part modale du transport de fret ferroviaire dans le transport de fret global, ce qui est considérable. Aujourd'hui, la part du fret ferroviaire tend à régresser. Et ce n’est pas fini : je vous renvoie à la disparition du wagon isolé.

L’engagement de favoriser le fret ferroviaire par rapport au fret routier est-il toujours d’actualité ? Je pose cette question parce qu’on constate un recul à chaque fois qu’il s’agit de passer à l’acte… C’est le cas avec la contribution carbone. Nous devons avoir un débat approfondi sur les parts respectives du fret routier et du fret ferroviaire.

Tel est l’objet de cet amendement. Le transport routier ne doit pas être exonéré de la contribution carbone, même partiellement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. La commission souhaite en rester à l’équilibre qui a été trouvé à l’Assemblée nationale. La profession du transport routier est très diverse. Elle comporte de très nombreuses petites et moyennes entreprises…

M. Jacques Gautier. Exactement !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. … qui ont de faibles marges et sont confrontées à une concurrence exacerbée.

Le dispositif qui a été trouvé permet peut-être, au moins dans l’immédiat, de régler une partie des problèmes que la profession devra surmonter du fait de l’institution de cette contribution. Surtout, n’y touchons pas !

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. L’avis du Gouvernement est également défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Toutes ces exonérations font que la contribution carbone va finir par ressembler à la couche d’ozone : elle sera pleine de trous faits au fur et à mesure… (Sourires.) Tout le monde pourra ainsi passer au travers des mailles du filet !

Au moins, la France pourra aller à Copenhague en se prévalant de l’adoption de la contribution carbone par le Sénat, puis par l’Assemblée nationale, en arguant qu’il s’agit d’un bon concept. Mais un concept mal utilisé est-il un « bon concept » ? On peut se le demander !

Quoi qu’il en soit, nous voyons ce qu’est la conception de l’écologie de la majorité et du Gouvernement. Pour vous, l’écologie, c’est un peu un « passage obligé ». Comme les problèmes environnementaux sont très importants, vous vous sentez obligés de faire un peu d’écologie… Alors, vous saupoudrez. Vous prenez des idées un peu au hasard, mais sans les appliquer totalement. Nous le voyons bien en ce moment ; c’est même caractéristique.

Le fret ferroviaire est-il bon pour l’environnement ? Évidemment ! Bien sûr que oui ! C’est le moyen de transport le plus économe en émission de gaz carbonique ! Il faut donc favoriser le fret ferroviaire. Le Président de la République le dit, parce qu’il le sait.

Mais lorsqu’il s’agit de passer à l’acte en taxant le transport routier, qui est moins écologique, vous hésitez et vous déclarez qu’il faut maintenir l’équilibre de la société d’aujourd'hui. Ce n’est pas comme cela que nous ferons face aux enjeux.

Faire de l’écologie, c’est souligner que nous serons confrontés à un grave danger dans dix ou vingt ans. Et si nous ne prenons pas dès maintenant les mesures qui s’imposent, nous allons être face au danger, l’environnement risquant de se détériorer de manière catastrophique. Nous serons confrontés aux migrations climatiques et aux problèmes de mutation, et ne saurons y faire face.

Les saupoudrages que vous proposez, faits de petites mesures par-ci par-là, ne forment pas un projet politique. En procédant de la sorte, je vous le dis, nous sommes condamnés ; nous ne réussirons pas à changer la production, à être exemplaires et respectueux de l’environnement.

Copenhague ne sera qu’un coup de bluff destiné à faire croire que l’on prend des mesures ; mais l’action est saupoudrée et ne constitue en rien un vrai projet politique !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Je ne peux laisser passer cette intervention sans réagir.

Depuis le début de l’après-midi, nous examinons les amendements portant sur l’article 5, et le Gouvernement s’est résolument et systématiquement opposé à toutes les propositions tendant à creuser un « p’tit trou », un moyen trou, un gros trou, comme l’évoque une chanson célèbre.

Vous avez également entendu par la voix de Fabienne Keller un plaidoyer vibrant en faveur d’une contribution carbone qui soit forfaitaire, générale, et qui ne souffre pas d’exemptions, ici et là, multipliées au fur et à mesure de tel ou tel groupe, de telle ou telle catégorie, de tel ou tel cas particulier.

L’ambition du Gouvernement, et son audace aussi, comparée à ce qu’aurait été celle d’un autre candidat ou d’une autre candidate à l’élection présidentielle, a été précisément de mettre en place dans le droit français un nouveau régime fiscal applicable à une autre base et avec une autre logique. Nous sommes très clairement animés de la volonté de modifier les modes de production, de consommation et de taxation.

Soyons clairs. Vous parliez tout à l’heure d’écologie de droite et d’écologie de gauche. Il y a surtout des citoyens et une majorité responsables, ainsi qu’un Gouvernement qui s’engage et qui s’engagera également à Copenhague, comme vous le savez d’ailleurs très bien, monsieur le sénateur.

Le ministre de l’environnement mène actuellement une campagne ardente et permanente pour défendre les objectifs qui sont les nôtres à Copenhague. Ce n’est pas une tâche facile, et il s’y est engagé de manière extrêmement volontaire. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il n’est pas aujourd'hui à mes côtés au banc du Gouvernement.

En tout état de cause, croyez bien que le Gouvernement a à cœur de faire prévaloir de nouvelles logiques, seules susceptibles de nous permettre de sauvegarder un patrimoine collectif auquel nous sommes tous attachés.

M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote.

M. Jacques Muller. Je souhaite revenir sur l’argumentation qui a été développée par M. le rapporteur général sur le secteur du transport. Celui-ci serait constitué de nombreuses PME, etc. qui ne pourraient supporter la contribution carbone sans une exonération de 36 %.

Je veux simplement souligner – ma collègue Fabienne Keller ne me contredira pas sur ce point – que, au cours du Grenelle, le lobby des transporteurs routiers, faisant pression, a obtenu systématiquement des transpositions a minima des directives européennes. Et ça continue ici aujourd'hui ! Les lobbies exercent encore des pressions, et l’objectif climatique s’éloigne.

M. Philippe Marini, rapporteur général. On n’est pas là pour détruire des emplois !

M. Jacques Muller. Je voterai donc cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.

M. Thierry Foucaud. Je soutiens l’amendement qui a été présenté par notre collègue Jean Desessard.

Je souhaite reprendre les propos de Mme la ministre au sujet des « p’tits trous ». Plusieurs rapports d’information réalisés notamment par nos collègues de la Haute Assemblée concluent à la nécessaire maîtrise publique des transports et de l’énergie comme leviers décisifs pour la protection de l’environnement.

À l’inverse – et je reprends sur ce point une partie des propos de notre collègue Jean Desessard –, le fret ferroviaire est laminé depuis de nombreuses années par les plans de restructuration.

Il est à ce titre particulièrement éclairant de constater qu’aucun crédit n’est prévu pour le fret ferroviaire par le grand emprunt national. Le transport par rail nous inscrirait pourtant dans une perspective plus environnementale, plus écologique et moins polluante.

De nombreuses gares ont fermé, et la dernière loi ferroviaire prévoit même de permettre à RFF de se défaire des tronçons de réseau servant au transport de marchandises qui ne s’avéreraient pas assez rentables. Vous nous économisez les frais d’une démonstration !

Selon vous, nous ne devons pas nous inquiéter : le Gouvernement fait tout en faveur de l’écologie, nous avançons, et nous évitons les « p’tits trous » ! Mais si vous voulez éviter les « p’tits trous », madame la ministre, il faut que le Président de la République respecte ses engagements en matière de transport fluvial, notamment en fixant des dates jusqu’à 2020 !

Qu’il me soit permis de souligner à cette occasion que le Gouvernement a refusé de déclarer d’intérêt général l’activité de wagon isolé.

À l’inverse, les aides apportées au secteur routier sont de plus en plus importantes, qu’il s’agisse du remboursement d’une partie de la TIPP – nous l’avons vu – ou, aujourd’hui, de l’exonération de la contribution carbone pour les camions de plus de 7,5 tonnes.

Loin de permettre le nécessaire report modal, une telle disposition confère une nouvelle fois à la route un avantage concurrentiel déterminant. Vous vous faites le chantre de l’économie de marché, mais il faut également respecter la concurrence. En ce sens, le lobby routier est malheureusement un lobby qui pollue !

Telles sont les raisons pour lesquelles nous soutiendrons l’amendement des sénateurs Verts qui vise à supprimer le remboursement au transport routier de la contribution carbone par le biais d’une augmentation du remboursement de la TIPP.

Sans revenir plus avant sur les propos de mon collègue Jean Desessard, j’insiste sur le fait que les transporteurs bénéficieront à l’horizon de 2010 d’un remboursement de TIPP majoré de 1,60 euro par hectolitre, ce qui aggravera également la situation.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-258.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

Article 5 (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Discussion générale

6

Mises au point au sujet de votes

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Monsieur le président, lors du scrutin n° 90 du vendredi 20 novembre, portant sur les amendements de suppression de l’article 2 du projet de loi de finances pour 2010, M. Christian Gaudin a été considéré comme ne prenant pas part au vote, alors qu’il souhaitait voter contre ces amendements. M. Jean-Léonce Dupont souhaitait, en revanche, voter pour ces amendements de suppression.

Je souhaite donc que ces deux demandes de rectification soient prises en compte.

M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier.

M. Albéric de Montgolfier. Monsieur le président, lors du scrutin public n° 91 intervenu le samedi 21 novembre et portant sur l’amendement n° I-1 rectifié à l’article 2 du projet de loi de finances pour 2010, M. André Lardeux a été inscrit comme ayant voté pour, alors qu’il souhaitait s’abstenir. Je vous remercie par avance de prendre en compte cette mise au point.

M. le président. Mes chers collègues, acte vous est donné de ces mises au point au sujet de votes. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique du scrutin.

7

Article 5 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Première partie

Loi de finances pour 2010

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Article 5

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2010 adopté par l’Assemblée nationale.

Nous poursuivons l’examen de l’article 5.

Première partie
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Articles additionnels après l'article 5

Article 5 (suite)

M. le président. Au sein de l’article 5, nous en sommes parvenus à l’amendement n° I-416 rectifié, présenté par Mme Keller, M. Richert et Mme Sittler, et ainsi libellé :

Alinéa 17

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

C. - Le troisième alinéa de l’article 265 octies du même code est ainsi rédigé :

« - soit en appliquant au volume de gazole utilisé comme carburant dans des véhicules affectés à ce transport, acquis dans chaque région et dans la collectivité territoriale de Corse, la différence entre un montant et le tarif applicable au gazole en application de l’article 265. Ce montant est égal à 37,59 euros par hectolitre en 2010, 38,12 euros par hectolitre en 2011, 38,65 euros par hectolitre en 2012 et 39,19 euros par hectolitre à compter de 2013 ; ».

La parole est à Mme Fabienne Keller.

Mme Fabienne Keller. Cet amendement aborde la question du paiement de la taxe carbone par les transporteurs routiers. M. le rapporteur général nous a rappelé l’importance de l’équilibre trouvé par l’Assemblée nationale. Au cours de ce débat, madame la ministre, vous avez pris l’engagement que la réduction de 35 % de la taxe carbone, qui se traduit concrètement par une majoration du remboursement de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, serait progressivement résorbée en quatre ans.

Mon amendement tend à prendre immédiatement acte de cet engagement. Nous avons créé un certain nombre d’exonérations cet après-midi : il s’agit maintenant de faire preuve d’une plus grande vertu fiscale, monsieur le rapporteur général, en prévoyant tout de suite une lente extinction de ce dispositif. Il convient d’adresser un bon signal aux transporteurs pour qu’ils n’hésitent pas à acquérir dès maintenant des moteurs plus « vertueux » en termes d’émissions de gaz à effet de serre.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces « moteurs vertueux » ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, je ferai preuve de la plus grande modestie sur un tel sujet, car je ne connais strictement rien en matière de mécanique ; je viens d’ailleurs de le démontrer au cours de la réunion de commission dont nous sortons !

L’inspiration de Mme Keller est excellente, mais je crains, pour ma part, que cette mesure ne soit pas perçue comme il convient par la profession.

Si la dégressivité de l’avantage répond bien à l’annonce de Mme la ministre, peut-être faudra-t-il poursuivre une démarche de concertation avec la profession pour examiner l’évolution de la compétition intermodale et de la structure financière des entreprises de transport routier, notamment celles qui appartiennent au monde des PME, voire de la très petite entreprise ou de l’artisanat. Il me semble que les pouvoirs publics, au terme d’un tel examen concerté, peuvent être amenés à apporter d’autres types d’encouragement à ces professionnels. Il ne faudrait pas que ces derniers retirent d’une telle disposition le sentiment que leur rentabilité va inévitablement s’éroder dans les années à venir, ce qui pourrait assurément susciter quelques réactions de leur part !

Je serai naturellement heureux de prendre connaissance de l’avis du Gouvernement, mais la commission estime qu’il convient de ne pas s’affranchir de la plus grande prudence en la matière.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Le Gouvernement souhaite lui aussi être prudent, quoique déterminé, sur le calendrier de l’extinction de ce dispositif. Il souhaite cependant conserver une marge de flexibilité dans les négociations entamées sous l’autorité de mon collègue Dominique Bussereau avec l’ensemble de la profession, pour modifier un certain nombre de pratiques et de techniques. Il convient d’éviter que ces négociations ne se déroulent dans un cadre trop corseté, au point de supprimer toute marge de manœuvre.

Par ailleurs, je me permets de vous signaler une difficulté rédactionnelle, madame Keller : votre amendement en l’état s’appliquerait à la fois au transport de marchandises et au transport routier, c’est pourquoi je vous demande de bien vouloir le retirer ; à défaut, je serai au regret d’émettre un avis défavorable.

M. le président. Madame Keller, l'amendement n° I-416 rectifié est-il maintenu ?

Mme Fabienne Keller. Le transport routier est une forme de transport particulièrement génératrice d’externalités. Les conséquences sur la qualité de l’air, notamment le taux de poussières dans l’air, mais aussi sur l’accidentologie sont importantes.

L’application, en 2010, d’un taux réduit de contribution carbone permettant au secteur de s’ajuster constitue un geste très fort, qui n’est pas lié aux caractéristiques de cette forme de transport. Cet amendement a donc pour objet d’inscrire l’atténuation de ce geste dans la durée et dans le texte.

Cette proposition va dans le sens d’une fiscalité carbone transparente, qui remplit bien l’objectif de donner un signal à l’ensemble des acteurs pour les inciter à réduire les gaz à effet de serre. Ne pas la retenir reviendrait à donner un signal inverse.

Je ne sais quoi penser des négociations évoquées. Soit on dispose d’une contribution carbone qui s’applique à tous de la même manière et augmente de la même manière, auquel cas on sait ce que l’on fait ; soit on négocie et on ouvre la voie à toutes les niches. Or nous avons vu, tout à l’heure, que ces niches étaient multiples et que l’inventivité de tous les secteurs économiques pouvait conduire progressivement à perdre la substance de cette nouvelle forme de prélèvement.

Pour ces raisons, je maintiens cet amendement.