M. le président. Avant de donner la parole aux représentants du Gouvernement, je tiens à indiquer qu’il nous faudra interrompre nos travaux à treize heures.

M. Jean Desessard. Il faut que les secrétaires d’État passent au haut débit ! (Sourires.)

M. le président. Ils auront droit, comme vous, à un litre d’huile d’olive provenant de la commune de Charleval, dont le conseil municipal suit nos débats depuis les tribunes ! (Nouveaux sourires et applaudissements.)

M. Luc Chatel, secrétaire d’État. Je m’en réjouis, monsieur le président !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, je répondrai rapidement à trois des sujets que vous avez évoqués et qui tiennent à cœur à l’ensemble des intervenants.

La première question est celle de la couverture du territoire en téléphonie mobile.

Je souhaite d’abord rappeler quelques chiffres sur la couverture du territoire français. Les réseaux mobiles de deuxième génération couvrent actuellement 99 % de la population française. La difficulté, c’est le 1 % restant, le dernier kilomètre – je le sais en tant qu’élu local rural –, et c’est également, comme M. Sido l’a rappelé, la comptabilisation des zones blanches, notamment l’intégration des communes associées au mode de calcul.

Un plan de couverture des zones blanches de la téléphonie mobile, auquel sont associés les opérateurs, l’ARCEP, les associations de collectivités et l’État, est en cours et doit permettre d’achever la couverture de tous les bourgs-centres d’ici à 2011.

La couverture des réseaux 3G est aujourd’hui de 70 %, et les opérateurs ont pris des engagements ambitieux allant jusqu’à 99 % de la population. Quand j’ai indiqué tout à l’heure qu’il ne s’agissait pas forcément de leur demander de prendre de nouveaux engagements, je voulais dire qu’il s’agissait plutôt de faire respecter les engagements précédents. Vous avez adopté des dispositions importantes dans le cadre de la loi de modernisation de l’économie, qui vont permettre à l’État et à l’ARCEP de prendre des sanctions et de les faire appliquer si des retards étaient constatés.

Par ailleurs, des dispositions ont été prises récemment pour faciliter les déploiements. Les opérateurs, qui l’ont souhaité, ont été autorisés à réutiliser leurs fréquences 2G, dont les propriétés physiques les rendent plus intéressantes pour la couverture du territoire, pour faire de la 3G.

Enfin, il est prévu que le nouvel opérateur – c’est important – bénéficiera pour une période de six ans d’une prestation d’itinérance sur les réseaux 2G des autres opérateurs dès lors que son réseau couvrira plus de 25 % de la population.

Cette prestation, qui sera temporaire, lui permettra d’offrir à ses clients, dès l’ouverture du réseau commercial et pendant une période limitée, un service complet. Elle vise à augmenter la concurrence à la hauteur de ce que nous attendons.

Le deuxième sujet que vous avez été nombreux à évoquer concerne les MVNO. Si nous débattons aujourd’hui d’un quatrième opérateur du réseau mobile, c’est parce que la concurrence n’a pas bien fonctionné et que les MVNO n’ont pas trouvé leur place et leur modèle économique dans le système actuel. Il convient donc d’y remédier.

Pour les deux lots non réservés à un nouvel entrant, l’amélioration des conditions faites aux MVNO fera partie de nos critères. La prise en compte, à côté du critère financier, d’un critère de concurrence, qui doit inciter à prendre des engagements forts à l’égard des MVNO, est le scénario sur lequel nous travaillons avec l’ARCEP. Il y a certes le prix, mais il faut également un critère destiné au développement des MVNO.

J’en viens enfin au dernier sujet évoqué ici : nous ferions un appel d’offres sur mesure pour un candidat.

M. Jean Desessard. Un candidat libre !

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, lors de la consultation publique menée par l’ARCEP, plusieurs opérateurs ont manifesté leur intérêt par rapport à cet appel d’offres.

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Comme il s’agit de données publiques, je peux les évoquer ici même (M. Jean Desessard. s’exclame.) : le groupe Bolloré, Altitude Telecom, le groupe Inquam se sont déclarés intéressés par l’éventualité d’une quatrième licence. Nous ne sommes donc pas à l’abri d’une surprise en la matière ! (Applaudissements sur les travées de lUMP et de l’Union centriste.)

M. Bruno Sido. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, compte tenu de la contrainte horaire, et en dépit de la grande qualité de ce débat, je me limiterai à quelques réponses très précises aux différentes questions soulevées.

Comme l’ont souligné Hervé Maurey, Pierre Hérisson, Raymond Vall et Odette Terrade, des problèmes existent en matière de couverture. Il y a plusieurs façons d’aborder le sujet. Tout d’abord, je vous confirme que, dès les prochaines semaines, des expérimentations vont être menées en matière de mutualisation des réseaux haut débit mobile ; nous en attendons beaucoup, et vous en serez bien entendu tenus étroitement informés.

Il faut également compléter la couverture en 2G. En effet, comme l’a souligné Hervé Maurey, il y a quelque indécence à parler du 3G alors que certains habitants n’ont pas encore le 2G. Il reste 364 communes à couvrir : 80 % seront couvertes d’ici à la fin 2010, et la totalité en 2011.

Cela dit, pour être complètement honnête, je dois admettre que notre système actuel et nos statistiques présentent deux insuffisances.

D’abord, les communes sont considérées comme couvertes dès lors que le centre-bourg dispose d’une couverture mobile, ce qui ne correspond pas forcément à la perception qu’en ont les habitants. On devrait donc pouvoir faire évoluer cette notion.

Ensuite, nous avons lancé un appel à candidatures pour la couverture des réseaux de communication, et les axes de transport prioritaires retenus l’ont été selon une définition qui semble quelque peu restrictive : on parle des autoroutes, des axes routiers principaux, avec un axe par liaison, reliant au sein de chaque département le chef-lieu de département aux chefs-lieux d’arrondissement, et les tronçons de route sur lesquels circulent en moyenne annuelle au moins 5 000 véhicules par jour.

Je lancerai rapidement une réflexion pour améliorer la couverture tant des communes situées en zones blanches que des axes de transport prioritaires, en tenant compte également des critères importants aux yeux de nos concitoyens.

Bruno Retailleau a souligné l’importance d’une harmonisation des fréquences du dividende numérique à l’échelon européen. Nous avançons vite sur ce point. La Finlande, la Suisse et le Royaume-Uni se sont alignés sur notre proposition. L’Allemagne y réfléchit. L’Irlande, les Pays-Bas et la Norvège ont lancé des études. Je vais à Barcelone lundi prochain, et j’espère que vous m’y accompagnerez : il nous reste à convaincre l’Espagne, qui n’est pas encore complètement sur la même ligne, mais nous y travaillons.

Enfin, je dirai quelques mots de la santé et des fréquences, sujet qui a été évoqué par nombre d’entre vous, notamment Pierre Hérisson, Jean Desessard, Michel Teston et Hervé Maurey. C’est un sujet complexe, les inquiétudes sur cette question allant croissant et étant parfois paradoxales : en effet, ce sont souvent les mêmes personnes qui, d’un côté, s’inquiètent d’un éventuel impact des ondes électromagnétiques sur leur santé et refusent l’installation d’une antenne à proximité de leur domicile et, d’un autre côté, sont très désireuses de disposer d’une couverture de qualité et d’accéder à de plus en plus de services nécessitant des infrastructures toujours plus nombreuses.

Les élus locaux sont aujourd’hui en première ligne et ne sont pas forcément bien armés face à ces inquiétudes. Ces dernières finissent par gagner les opérateurs eux-mêmes, lesquels se voient imposer des obligations de couverture auxquelles nous tenons fermement et que nous ferons appliquer – Luc Chatel l’a rappelé – et, en même temps, s’interrogent sur leurs capacités à y répondre.

Dans ce contexte, c’est le bon moment, me semble-t-il, pour réunir l’ensemble des acteurs concernés par ces sujets autour d’une table ronde : opérateurs de téléphonie, radiodiffuseurs, associations d’élus et de consommateurs, scientifiques. Puisque tout le monde est inquiet, il doit y avoir des voies de passage. J’ajoute que cela n’a jamais été fait. Des discussions bilatérales ont certes eu lieu à l’échelon national, entre les associations d’élus et les opérateurs, avec des chartes qui n’ont pas toujours été appliquées localement – nous le savons tous –, ou entre l’État et les associations environnementales ou les associations de consommateurs, nos concitoyens se tournant en définitive bien souvent vers les tribunaux.

La première réunion de cette table ronde, organisée par Roselyne Bachelot-Narquin et moi-même, dans l’esprit du Grenelle de l’environnement, pourrait avoir lieu le 19 mars prochain.

Plusieurs pistes peuvent déjà être envisagées.

Nous pourrions procéder à une comparaison internationale, car il n’y a pas de raison que les choses se passent mieux ailleurs ; il n’y a pas non plus de raison que les normes soient si différentes entre les États membres européens, même s’il y a malgré tout quelques explications à cet égard. Il faut donc pouvoir étudier les choses sereinement.

Une autre piste est la mutualisation des équipements, puisque la multiplication de ces derniers n’aide pas forcément à la sérénité sur ce sujet.

Jean Desessard proposait la création d’une nouvelle autorité ; pourquoi pas ? Nous pourrons en parler lors de cette table ronde. Je tiens cependant à souligner que des autorités existent déjà : la Fondation santé et radiofréquences, qui conduit des programmes de recherche sur ce sujet – elle est contestée sur différents points, mais elle existe – et l’Agence nationale des fréquences, qui effectue des mesures. C’est peut-être aussi par des évolutions à partir des autorités existantes que nous pourrons progresser.

Par ailleurs, des parlementaires seront conviés à cette table ronde, et j’espère que vous serez nombreux à vous joindre à ces travaux. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste. –M. Bruno Retailleau applaudit également.)

M. le président. Le débat est clos.

Acte est donné de la déclaration du Gouvernement, qui sera imprimée sous le numéro 208 et distribuée.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Roland du Luart.)

PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

3

Souhaits de bienvenue à une délégation polonaise

M. le président. Mes chers collègues, j’ai le plaisir et l’honneur de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d’une délégation polonaise comprenant, notamment, le vice-ministre de l’économie, le vice-maréchal du Sénat et le président du groupe d’amitié Pologne-France du Sénat de Pologne. (Mme le garde des sceaux, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)

Cette délégation est reçue au Sénat à l’invitation du groupe d’amitié sénatorial France-Pologne, présidé par notre collègue Yann Gaillard, en association avec le groupe de travail sur le « paquet énergie », présidé par notre collègue Ladislas Poniatowski.

Cette visite a, en effet, pour objet l’étude du système nucléaire civil français, le gouvernement polonais ayant annoncé récemment son intention de construire une ou deux centrales nucléaires.

Je formule le vœu que cette visite contribue, s’il en était besoin, aux relations anciennes d’amitié qui lient nos deux pays, engagés dans un destin commun au sein de l’Union européenne. (Applaudissements.)

4

Candidatures à une commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que la commission des affaires économiques m’a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats qu’elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion.

Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l’article 12 du règlement.

5

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour un rappel au règlement.

M. Daniel Raoul. Monsieur le président, notre collègue Bernard Frimat a fait hier soir un rappel au règlement dans lequel il demandait que soit pris l’engagement de n’afficher la liste des candidats à cette commission mixte paritaire qu’après la conférence des présidents qui doit se tenir ce soir.

Ce matin, n’ayant pas lu le compte rendu analytique de cette nuit, j’ai accepté, lors de la réunion de la commission des affaires économiques, la composition qui est affichée, mais il est clair que cette acceptation est assortie d’une condition : que la répartition des sièges au sein de la commission mixte paritaire intervienne pour la dernière fois selon cette procédure.

En effet, notre groupe demande l’application de la stricte représentation proportionnelle, ce qui conduirait à désigner quatre représentants de la majorité et trois de l’opposition : en claire, c’est essentiellement l’octroi d’un siège au groupe CRC-SPG qui est en jeu. Je n’ai donné mon accord que sous la réserve expresse que cet engagement soit pris pour le futur. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. Mon cher collègue, je vous donne acte de votre rappel au règlement qui reprend une observation émise, lors de la dernière réunion de la conférence des présidents, par M. Jean-Pierre Bel, président du groupe socialiste, et approuvée par Mme Catherine Tasca.

Comme vous le savez, la composition politique de la commission mixte paritaire repose sur un équilibre réservant cinq sièges à la majorité et deux à l’opposition, répartition qui date de 1981 et n’a jamais varié malgré l’évolution du rapport des forces politiques au sein du Sénat.

Comme M. le président du Sénat me l’a confirmé, un contact a été pris avec le président de l’Assemblée nationale pour engager une réflexion sur cette question.

Il nous faut attendre le résultat de la concertation avec le président de l’Assemblée nationale, étant entendu que les présidents des groupes et les présidents des commissions devront être associés à la recherche d’une solution qui tienne compte des effectifs des groupes dans les deux assemblées.

La réunion de la conférence des présidents qui aura lieu ce soir, à dix-huit heures, sera, si votre groupe le souhaite, l’occasion de revenir sur cette question pour l’approfondir.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous n’y manquerons pas !

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Si vous me le permettez, monsieur le président, je souhaiterais ajouter deux remarques.

Premièrement, je ne vois pas en quoi la réflexion de l’Assemblée nationale, dont la composition politique est différente de celle du Sénat devrait intervenir dans la décision que celui-ci prendra sur la composition de ses propres délégations aux commissions mixtes paritaires.

Deuxièmement, je sais que ce point doit être effectivement à l’ordre du jour de la conférence des présidents ; nous y tenons fermement. Nous considérons que le non-respect des engagements pris constituerait un casus belli dans le cadre de la révision en cours de notre règlement.

M. le président. Mon cher collègue, vous le savez, je suis un homme de paix !

Je voulais simplement vous rappeler qu’une négociation a été menée en 1981 entre les présidents des deux assemblées. Comme la commission mixte paritaire est un organe délibérant réunissant les deux assemblées, il est nécessaire qu’une discussion intervienne entre les deux présidents. Au demeurant, M. le président du Sénat sera tout à fait prêt, si M. Jean-Pierre Bel ou Mme Catherine Tasca le lui demandent, de répondre dans le détail à leurs questions.

La parole est à Mme Odette Terrade pour un rappel au règlement.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon rappel au règlement concerne l’organisation de nos travaux.

Membre de la commission des affaires économiques, j’aurais dû, comme l’ensemble des commissaires de cette commission permanente, auditionner dès la semaine dernière le secrétaire d’État chargé de l’outre-mer, M. Jégo, audition reportée à cet après-midi même avant d’être annulée.

Cette absence et la modification de l’emploi du temps qui en résulte sont parfaitement compréhensibles puisque, depuis plusieurs semaines, et sans que cela ait provoqué pour l’heure de réaction du Président de la République, pourtant si prompt à donner son avis sur toute question touchant notre pays, la population guadeloupéenne, avec ses organisations syndicales, ses élus et toutes ses forces vives, manifeste de façon déterminée son refus d’une situation sociale et économique devenue insupportable, qu’elle dénonce sous le mode d’ordre « Liyannaj kont pwofitasyon », qui signifie, en bon français, « ensemble contre l’exploitation outrancière ».

Que, face à cette situation, M. Jégo ait cru de son devoir de s’éclipser, dimanche soir, pour venir rendre compte à Paris de l’état de la situation, laissant en plan ses interlocuteurs locaux, et qu’il soit revenu ensuite, cette nuit, porteur de l’indifférence gouvernementale, ne change que peu de choses à l’affaire !

De notre point de vue, la prise en compte des fortes aspirations de cette population relève de la responsabilité gouvernementale, car le mouvement gagne aujourd’hui, pour des motifs identiques, la Martinique et la Guyane. Nous souhaitons donc que la situation soit envisagée autrement qu’en renvoyant dos à dos les partenaires sociaux.

Il est également évident que la représentation nationale sortirait grandie si s’engageait au plus tôt un véritable débat conduisant à des changements profonds des politiques suivies, politiques que nous n’osons qualifier de publiques en raison des limites d’ores et déjà dépassées de la défiscalisation à outrance, qui ne profite manifestement pas aux économies ni aux sociétés locales !

La France, par ses choix gouvernementaux, par l’intervention du Parlement, gagnerait à traiter, enfin, de manière juste et équitable les départements et collectivités d’outre-mer, en valorisant leurs atouts et en leur permettant de résoudre les difficultés qu’ils rencontrent.

Notre groupe est solidaire du puissant mouvement social en cours dans la Caraïbe, qui mérite bien autre chose que le coupable silence observé jusqu’à ce jour par le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. Ma chère collègue, acte vous est donné de votre rappel au règlement.

6

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : proposition de loi relative à l'exécution des décisions de justice et aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées
Article additionnel avant le chapitre 1er

Exécution des décisions de justice

Suite de la discussion et adoption des conclusions modifiées du rapport d’une commission

(Ordre du jour réservé)

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion des conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi, présentée par M. Laurent Béteille, relative à l’exécution des décisions de justice et aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées (nos 31,161).

Je rappelle que la discussion générale a été close lors de la dernière séance mensuelle réservée, le mercredi 20 janvier 2009.

Nous passons à la discussion des articles.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi relative à l'exécution des décisions de justice et aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées
Article 1er

Article additionnel avant le chapitre 1er

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Avant le chapitre 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Dans la première phrase de l'article 88 du code de procédure pénale, après les mots : « par ordonnance, », sont insérés les mots : « dans un délai de 30 jours, ».

II. - Après la première phrase de l'article 88 du code de procédure pénale, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « Le non-respect de ce délai entraînera la caducité de la plainte. ».

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Madame la ministre, j’ai bien conscience que cet amendement est légèrement décalé par rapport au texte qui nous est proposé, mais je voulais quand même profiter de ce débat sur l’exécution des décisions de justice pour attirer votre attention sur le problème des dépôts de plaintes, qui fait l’objet de mon amendement.

Actuellement, aucun délai contraignant n’est fixé au doyen des juges d’instruction pour rendre une ordonnance de consignation.

Prenons l’exemple d’une plainte déposée en avril 2007 ; l’ordonnance de consignation a été rendue le 1er juillet, une consignation a été payée le 1er août  et un juge d’instruction désigné le 1er octobre. Cela fait beaucoup de temps, madame la ministre, pour instruire un dossier, d’autant que notre société a souvent l’habitude de médiatiser terriblement les choses.

Donc, je pense qu’il n’est ni de l’intérêt de la victime ni de l’intérêt d’un coupable ou d’un prévenu éventuel qu’aucun délai ne soit assigné au doyen des juges d’instruction pour rendre l’ordonnance de consignation, qui va permettre d’engager réellement la procédure.

C'est pourquoi mon amendement - que j’avais déjà déposé, puis retiré - prévoit que le doyen des juges d’instruction disposera d’un délai de trente jours pour fixer la consignation. À défaut de respect de ce délai, la plainte sera considérée comme caduque.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Zocchetto, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. La question soulevée par Mme Goulet me paraît tout à fait importante. En effet, fixer un délai pour le versement de la consignation dans le cadre d’une constitution de partie civile est une disposition intéressante.

D’une part, cela protégerait les personnes qui sont éventuellement visées par la plainte, car il est souvent aisé d’en deviner l’identité, même quand la plainte est déposée contre X. D’autre part, cela renforcerait aussi les droits de la partie civile, car il n’y a rien de pire pour une partie civile que d’attendre éternellement que le juge veuille bien rendre l’ordonnance de consignation, qui va permettre d’engager l’examen du dossier.

Ce sujet mérite d’être étudié avec beaucoup d’attention. Néanmoins, il n’a pas échappé à Mme Goulet que cette proposition de loi ne traitait que du droit civil et de la procédure civile. Son amendement n’a donc pas place aujourd'hui dans nos débats.

Je me permets de vous suggérer, madame Goulet, de présenter de nouveau cet amendement lors de l’examen de la proposition de loi visant à simplifier le droit, qui devrait nous être transmise par l’Assemblée nationale au mois de mars. Donc, au nom de la commission, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame le sénateur, le Gouvernement n’est évidemment pas favorable à votre amendement, non pas sur le fond, mais sur la forme, dans la mesure où il n’a aucun lien avec le texte dont nous débattons cet après-midi. Je fais donc miens les arguments qui ont été développés par M. le rapporteur. J’ajoute que, depuis vingt ans, le code de procédure pénale a souvent fait l’objet d’ajustements sans que soit totalement remise à plat la procédure pénale. Dès lors, la réforme à venir du code pénal et du code de procédure pénale constitue une chance qu’il ne faut absolument pas manquer.

La commission présidée par l’avocat général Philippe Léger rendra un pré-rapport sur la réforme de l’instruction à la fin de février et le rapport définitif sur la réforme du code pénal et du code de procédure pénale au début de juin. Cela nous permettra de débattre de tous les sujets relatifs à la procédure pénale de manière à avoir une procédure pénale moderne, adaptée, équilibrée, proportionnée et respectueuse des droits de la victime mais aussi des droits de la défense.

Par conséquent, au-delà même du fait que cet amendement est sans lien avec le texte dont nous débattons cet après-midi, son adoption nous priverait d’un débat de fond au sein de la réforme du code de procédure pénale.

Je vous demande donc de bien vouloir le retirer.

M. le président. Madame Goulet, l'amendement n° 1 est-il maintenu ?

Mme Nathalie Goulet. Avant de le retirer, je souligne qu’il existe quand même un lien ténu entre les procédures d’exécution forcée des poursuites en diffamation et le débat qui nous occupe.

Cela étant, je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.

CHAPITRE I

FRAIS D'EXÉCUTION FORCÉE EN DROIT DE LA CONSOMMATION