M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est caricatural !
Mme Annie David. En dépit des amendements que nous avions déposés, vous vous êtes refusés à confirmer par écrit que le demandeur d’emploi puisse expressément préciser l’ensemble des conditions d’emploi qu’il pourrait accepter, à commencer par la durée et le type de contrat.
La notion de projet personnalisé n’est à ce titre qu’un leurre, car, de personnalisé, il n’aura que le nom ! Sa durée réelle ne sera que de trois mois, puisque, à cette échéance, vous en prévoyez une révision automatique.
Nous aurions pu légitiment espérer que cette révision ne puisse résulter que de la demande expresse du demandeur d’emploi constatant que son projet personnalisé ne lui permet pas de retrouver un emploi. Mais encore aurait-il fallu considérer les demandeurs d’emploi comme des partenaires, victimes d’une logique économique.
Quant à la période de trois mois, elle paraît tout simplement irréaliste ! Le marché du travail est tel qu’il est très improbable, dans un tel délai, de retrouver un emploi de qualité, correspondant à sa formation, à ses compétences et avec la rémunération adéquate.
Passé ce délai, la nouvelle institution aura la charge d’orienter les demandeurs d’emploi non pas vers l’offre correspondant le plus à leurs aspirations et à leurs compétences, mais vers celle qui leur permettra l’accès à l’emploi le plus rapide.
Une fois encore, vous maniez la sanction avec talent, en organisant la dégressivité des droits autour de trois paliers.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez affirmé que la rémunération de ces demandeurs d’emploi ne serait pas inférieure au SMIC, mais cette déclaration de pur principe est en contradiction avec ce que ce projet de loi prévoit, à savoir une rémunération au niveau du revenu de remplacement.
Surtout, la dégressivité est un outil de plus dans votre politique de contrainte. Vous considérez, à tort, qu’en diminuant les droits et prétentions des chômeurs, leur retour à l’emploi sera plus précoce. Au moins votre attitude est-elle claire : l’existence du chômage tient au fait que les demandeurs d’emploi refusent de se réinsérer sous le prétexte que le système d’assistance est plus profitable que le retour à l’emploi.
En outre, estimant que la seconde cause du chômage tiendrait au coût de la main-d’œuvre, qui serait trop élevé, vous organisez la dégressivité, ce qui vous permet, de manière indirecte, de peser sur l’ensemble des salaires !
Finalement, vous ne faites que proposer aux salariés une forme de partage du chômage en multipliant les « petits boulots », donc le travail précaire. Vous réglez la question du chômage par le bas en diminuant les revenus et en augmentant la pauvreté.
Ces idées ont beau avoir été contredites par les évaluations des dispositifs d’exonération de cotisations sociales sur les bas salaires, vous continuez malgré tout à organiser un nouvel affaissement des salaires et des normes d’emploi.
Notre système de solidarité nationale, qui est lui-même assis sur les salaires, sera une victime collatérale de ce projet de loi. Des salaires plus bas, ce sont moins de cotisations pour les caisses de l’État et pour les organismes de solidarité. Vous aurez alors beau jeu de dénoncer la faiblesse de notre système de protection sociale, de poursuivre vos restrictions pour, in fine, imposer une réforme générale de la protection sociale, faisant la place belle aux assurances privées et à l’individualisation. Décidément, tout se tient !
Quant à la création d’un médiateur national prévue à l’article 1er bis issu des travaux de l’Assemblée nationale, que vous venez d’évoquer, monsieur le secrétaire d’État, elle ne peut nous satisfaire totalement.
Le groupe CRC avait proposé une commission de recours amiable afin de suivre l’exécution de ce projet de loi, s’agissant en particulier du projet personnalisé. Reconnaissez que notre proposition était plus ambitieuse que celle qui a été retenue par l’Assemblée nationale, notamment parce que nous privilégiions le collectif en prévoyant la présence des organisations syndicales au sein de cette commission, alors que vous vous en remettez à un médiateur plénipotentiaire. En outre, les missions qui lui sont conférées ne sont pas identiques à celles que nous proposions de lui attribuer.
Mais cela nous permet au moins de nous interroger sur les droits des demandeurs d’emploi, contreparties théoriques aux obligations que vous renforcez.
Demain, les salariés privés d’emploi ne pourront pas se retourner contre l’institution si celle-ci leur propose des offres d’emploi ne correspondant ni à leurs compétences ni à leur projet personnalisé. Pas de recours non plus contre les employeurs, qui disposeront toujours de la possibilité de se priver de la compétence et du savoir-faire du service public de l’emploi. L’accompagnement « sur mesure » que vous évoquiez, monsieur le secrétaire d’État, comme contrepartie aux nouveaux devoirs, s’avère bien creux !
L’amendement que nous avions présenté dans le but d’instaurer une obligation de transmission des offres d’emploi à la nouvelle institution ne remettait nullement en cause les règles européennes proscrivant le monopole public. Il avait pour seule vocation de rendre obligatoire la communication d’une offre d’emploi à la nouvelle institution, libre à l’employeur de maintenir sa collaboration avec le secteur privé s’il le souhaitait.
En ce sens, monsieur le secrétaire d’État, votre réponse n’est satisfaisante ni sur le fond ni sur la forme.
En effet, comment envisager des sanctions à l’encontre de demandeurs d’emploi qui ne sont pas informés de la totalité des offres disponibles sur le marché ?
En rejetant notre amendement, vous n’aviez qu’un objectif : ne pas empiéter sur le secteur privé, celui-là même avec lequel le secteur public devrait coopérer, dans une relation profondément inégalitaire : au privé, les jeunes diplômés, les salariés les plus aisément « reclassables », puisque tel est le terme employé par ces sociétés ; au public, les personnes les plus en difficulté, les plus éloignées du travail, les moins formées. Et ce alors même que, de l’aveu de tous, il est aujourd’hui impossible de mesurer l’efficacité du secteur privé par rapport au secteur public.
Comme nous l’avions compris avec la loi dite de modernisation du service public de l’emploi, la privatisation est en route !
Pour ce qui est des droits des demandeurs d’emploi, nous n’avions guère d’espoirs. Car, pour créer des droits, il fallait imposer des obligations aux entreprises. Or, on ne trouve rien de tel dans votre texte.
Nous avions d’autant moins d’espoirs que vous avez déconnecté artificiellement ce projet de loi de la future négociation sur la convention d’assurance chômage. Cela ne peut que nous inquiéter pour l’avenir. Nous redoutons que cette négociation soit, pour le patronat, l’occasion de durcir plus encore l’offre raisonnable d’emploi. Autant vous dire que les sénatrices et sénateurs communistes seront vigilants !
Enfin, je tiens à réaffirmer notre total désaccord avec la disposition instaurée à l’article 2 bis, sur la proposition de la majorité UMP. Je vous remercie d’ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, d’avoir noté que nous n’avions pas été en mesure d’en débattre.
L’article 2 bis organise la suppression des dispenses d’emploi pour les chômeurs de plus de cinquante-six ans. Il aurait été souhaitable d’évoquer cette question en séance publique.
L’application de cette disposition sera en effet lourde de conséquences pour les salariés licenciés en raison de leur âge, de leur présupposé manque de compétitivité ou de leur coût trop élevé. Car, la réalité dans notre pays, c’est que des milliers de nos concitoyennes et concitoyens sont chaque année licenciés parce qu’ils sont trop expérimentés, trop qualifiés et par conséquent trop chers ! Les dispenses visaient à prendre en compte cette réalité. Elles venaient pondérer la grande difficulté pour ces salariés de retrouver un emploi.
Mais de tout cela, votre gouvernement n’a cure, préférant l’approche comptable. Au final, vous faites payer à ces salariés le poids économique d’une gestion d’entreprise elle-même comptable et désengagée de toute responsabilité sociale. Et comment pourrait-il en être autrement, alors qu’aucune disposition n’empêche les employeurs les moins scrupuleux de licencier les salariés les plus âgés ?
Cette disposition aurait pu être discutée si vous aviez dans le même temps rétabli le dispositif prévu dans la loi Delalande, que vous avez abrogée. Mais telle n’est pas votre préoccupation, monsieur le secrétaire d’État. Au-delà de vos discours et de l’intitulé de ce projet de loi, vous n’êtes pas dans une logique de droits contreparties de devoirs.
Monsieur le secrétaire d’État, le plein-emploi est bien évidemment le souhait de toute politique ambitieuse, et il n’est pas hors de portée, au contraire. Or la voie néolibérale que vous persistez à emprunter n’est pas la bonne, puisque non seulement elle vous a conduit à perdre la course à la croissance mais, avec ce texte, elle façonne une société où l’emploi précaire et peu rémunéré deviendrait la norme !
Or une politique de plein-emploi doit nécessairement prendre en compte la conjoncture économique et sociale et s’affranchir de la vision archaïque et simpliste du marché du travail, vision dont ce texte est empreint. Cela implique nécessairement de ne pas réduire la politique de l’emploi à une vision purement quantitative.
Nous sommes persuadés que la clé pour résorber le chômage et relancer la croissance passe par l’augmentation des salaires. Et il n’est nul besoin d’agiter l’épouvantail de la compétitivité, car cette amélioration passe non pas par la baisse du coût du travail, mais par le relèvement des niveaux de formation, des capacités créatives des systèmes productifs et par l’investissement dans la recherche et le développement.
À l’instar du Gouvernement, nous aspirons au plein-emploi, mais pas à n’importe quel emploi, n’importe où et pour n’importe quel salaire !
Pour toutes ces raisons, vous comprendrez donc que les sénatrices et sénateurs communistes votent contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, étant appelé à se prononcer avant l’Assemblée nationale, le Sénat statue par un seul vote sur l’ensemble du texte.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :
Article 1er
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - L'article L. 5411-6 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art L. 5411-6. - Le demandeur d'emploi immédiatement disponible pour occuper un emploi est orienté et accompagné dans sa recherche d'emploi par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1. Il est tenu de participer à la définition et à l'actualisation du projet personnalisé d'accès à l'emploi mentionné à l'article L. 5411-6-1, d'accomplir des actes positifs et répétés de recherche d'emploi et d'accepter les offres raisonnables d'emploi telles que définies aux articles L. 5411-6-2 et L. 5411-6-3. »
II. - Après l'article L. 5411-6 du même code, sont insérés quatre articles L. 5411-6-1 à L. 5411-6-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 5411-6-1. - Un projet personnalisé d'accès à l'emploi est élaboré et actualisé conjointement par le demandeur d'emploi et l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 ou, lorsqu'une convention passée avec l'institution précitée le prévoit, un organisme participant au service public de l'emploi. Le projet personnalisé d'accès à l'emploi et ses actualisations sont alors transmis pour information à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1.
« Ce projet précise, en tenant compte de la formation du demandeur d'emploi, de ses qualifications, de ses connaissances et compétences acquises au cours de ses expériences professionnelles, de sa situation personnelle et familiale ainsi que de la situation du marché du travail local, la nature et les caractéristiques de l'emploi ou des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée et le niveau de salaire attendu.
« Le projet personnalisé d'accès à l'emploi retrace les actions que l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 s'engage à mettre en œuvre dans le cadre du service public de l'emploi, notamment en matière d'accompagnement personnalisé et, le cas échéant, de formation et d'aide à la mobilité.
« Art. L. 5411-6-2. - La nature et les caractéristiques de l'emploi ou des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée et le salaire attendu, tels que mentionnés dans le projet personnalisé d'accès à l'emploi, sont constitutifs de l'offre raisonnable d'emploi.
« Art. L. 5411-6-3. - Le projet personnalisé d'accès à l'emploi est actualisé périodiquement. Lors de cette actualisation, les éléments constitutifs de l'offre raisonnable d'emploi sont révisés notamment pour accroître les perspectives de retour à l'emploi.
« Lorsque le demandeur d'emploi est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi depuis plus de trois mois, est considérée comme raisonnable l'offre d'un emploi compatible avec ses qualifications et compétences professionnelles et rémunéré à au moins 95 % du salaire antérieurement perçu. Ce taux est porté à 85 % après six mois d'inscription. Après un an d'inscription, est considérée comme raisonnable l'offre d'un emploi compatible avec les qualifications et les compétences professionnelles du demandeur d'emploi et rémunéré au moins à hauteur du revenu de remplacement prévu à l'article L. 5421 - 1.
« Lorsque le demandeur d'emploi est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi depuis plus de six mois, est considérée comme raisonnable une offre d'emploi entraînant, à l'aller comme au retour, un temps de trajet en transport en commun, entre le domicile et le lieu de travail, d'une durée maximale d'une heure ou une distance à parcourir d'au plus trente kilomètres.
« Si le demandeur d'emploi suit une formation prévue dans son projet personnalisé d'accès à l'emploi, les durées mentionnées au présent article sont prorogées du temps de cette formation.
« Art. L. 5411-6-4. - Les dispositions de la présente section et du 2° de l'article L. 5412-1 ne peuvent obliger un demandeur d'emploi à accepter un niveau de salaire inférieur au salaire normalement pratiqué dans la région et pour la profession concernée. Elles s'appliquent sous réserve des autres dispositions légales et des stipulations conventionnelles en vigueur, notamment celles relatives au salaire minimum de croissance. Si le projet personnalisé d'accès à l'emploi prévoit que le ou les emplois recherchés sont à temps complet, le demandeur d'emploi ne peut être obligé d'accepter un emploi à temps partiel. »
Article 1er bis
(Texte de l'Assemblée nationale)
Après l'article L. 5312-12 du code du travail, il est inséré un article L. 5312-12-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5312-12-1. - Il est créé, au sein de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, un médiateur national dont la mission est de recevoir et de traiter les réclamations individuelles relatives au fonctionnement de cette institution, sans préjudice des voies de recours existantes. Le médiateur national, placé auprès du directeur général, coordonne l'activité de médiateurs régionaux, placés auprès de chaque directeur régional, qui reçoivent et traitent les réclamations dans le ressort territorial de la direction régionale. Les réclamations doivent avoir été précédées de démarches auprès des services concernés.
« Le médiateur national est le correspondant du Médiateur de la République.
« Il remet chaque année au conseil d'administration de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 un rapport dans lequel il formule les propositions qui lui paraissent de nature à améliorer le fonctionnement du service rendu aux usagers. Ce rapport est transmis au ministre en charge de l'emploi, au Conseil national de l'emploi mentionné à l'article L. 5112-1 et au Médiateur de la République.
« Les réclamations mettant en cause une administration, une collectivité territoriale, un établissement public ou tout autre organisme investi d'une mission de service public, autre que l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, sont transmises, en tant que de besoin, au Médiateur de la République, conformément à ses compétences définies par la loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 instituant un Médiateur de la République.
« La saisine du Médiateur de la République, dans son champ de compétences, met fin à la procédure de réclamation. »
Article 2
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
L'article L. 5412-1 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5412-1. - Est radiée de la liste des demandeurs d'emploi, dans des conditions déterminées par un décret en Conseil d'État, la personne qui :
« 1° Soit ne peut justifier de l'accomplissement d'actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi, de créer ou de reprendre une entreprise ;
« 2° Soit, sans motif légitime, refuse à deux reprises une offre raisonnable d'emploi mentionnée à l'article L. 5411-6-2 ;
« 3° Soit, sans motif légitime :
« aa) Refuse d'élaborer ou d'actualiser le projet personnalisé d'accès à l'emploi prévu à l'article L. 5411-6-1 ;
« a) Refuse de suivre une action de formation ou d'aide à la recherche d'emploi proposée par l'un des services ou organismes mentionnés à l'article L. 5311-2 et s'inscrivant dans le cadre du projet personnalisé d'accès à l'emploi ;
« b) Refuse de répondre à toute convocation des services et organismes mentionnés à l'article L. 5311-2 ou mandatés par ces services et organismes ;
« c) Refuse de se soumettre à une visite médicale auprès des services médicaux de main-d’œuvre destinée à vérifier son aptitude au travail ou à certains types d'emploi ;
« d) Refuse une proposition de contrat d'apprentissage ou de contrat de professionnalisation ;
« e) Refuse une action d'insertion ou une offre de contrat aidé prévues aux chapitres II et IV du titre III du livre Ier de la présente partie.
« 4° Suppression maintenue par la commission mixte paritaire.»
Article 2 bis
(Texte de l'Assemblée nationale)
I. - Le code du travail est ainsi modifié :
1° L'article L. 5411-8 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5411-8. - Les personnes inscrites comme demandeurs d'emploi qui ne peuvent bénéficier de la dispense de recherche d'emploi dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 5421-3 et âgées d'au moins cinquante-six ans et demi en 2009, d'au moins cinquante-huit ans en 2010 et d'au moins soixante ans en 2011 sont dispensées, à leur demande et à partir de ces âges, des obligations mentionnées à l'article L. 5411-6. » ;
2° Le deuxième alinéa de l'article L. 5421-3 est ainsi rédigé :
« Les personnes inscrites comme demandeurs d'emploi et bénéficiaires de l'allocation d'assurance mentionnée à l'article L. 5422-1, âgées d'au moins cinquante-huit ans en 2009, d'au moins cinquante-neuf ans en 2010 et d'au moins soixante ans en 2011, sont dispensées, à leur demande et à partir de ces âges, de la condition de recherche d'emploi. Les personnes inscrites comme demandeurs d'emploi, bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique mentionnée à l'article L. 5423-1, âgées d'au moins cinquante-six ans et demi en 2009, d'au moins cinquante-huit ans en 2010 et d'au moins soixante ans en 2011, sont dispensées, à leur demande et à partir de ces âges, de la condition de recherche d'emploi. »
II. - À compter du 1er janvier 2012, l'article L. 5411-8 du code du travail est abrogé et le deuxième alinéa de l'article L. 5421-3 du même code est supprimé.
III. - Toute personne bénéficiant d'une dispense de la condition de recherche d'emploi avant le 1er janvier 2012 continue à en bénéficier.
IV. - Avant le 30 juin 2011, le Gouvernement dépose au Parlement un rapport sur l'impact sur le retour à l'emploi des intéressés de la suppression progressive de la dispense de recherche d'emploi et, le cas échéant, au vu de ces éléments, sur l'opportunité d'un aménagement de la législation.
Article 2 ter
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - Après l'article L. 5412-1 du code du travail, il est inséré un article L. 5412-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5412-2. - Est radiée de la liste des demandeurs d'emploi, dans des conditions déterminées par un décret en Conseil d'État, la personne qui a fait de fausses déclarations pour être ou demeurer inscrite sur cette liste. »
II. - Après le mot : « aux », la fin du premier alinéa de l'article L. 5426-2 du même code est ainsi rédigée : « 1° à 3° de l'article L. 5412-1 et à l'article L. 5412-2. »
Article 3
(Texte de l'Assemblée nationale)
Jusqu'à la date de création de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 du code du travail et prévue par l'article 9 de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi, l'Agence nationale pour l'emploi se substitue à l'institution susmentionnée pour l'application de la présente loi.
Pour les personnes inscrites sur la liste des demandeurs d'emploi antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi, les délais fixés à l'article L. 5411-6-3 du même code sont décomptés à partir de la date où leur projet personnalisé d'accès à l'emploi est défini ou actualisé pour la première fois dans les conditions prévues aux articles L. 5411-6-1 et L. 5411-6-3 du même code.
M. le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à Mme Raymonde Le Texier, pour explication de vote.
Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, vous vous doutez bien que ce n’est pas la CMP de ce matin qui va modifier notre point de vue sur ce texte. Bien au contraire, les ajouts de l’Assemblée nationale concernant les travailleurs âgés, approuvés par la CMP, n’ont fait que renforcer le caractère injuste et cynique de ces mesures.
Mme Raymonde Le Texier. Tout comme notre rapporteur, je regrette que l’inutile déclaration d’urgence ne nous permette pas de débattre de ce point ici même. Car la suppression de la dispense de recherche d’emploi pour les travailleurs âgés n’est pas un détail : elle est révélatrice de la démarche du Gouvernement.
Nous aurions aimé, pour le moins, que cette suppression soit liée à une amélioration de leur situation sur le marché de l’emploi. Nous aurions aimé qu’une politique volontariste subordonne à l’emploi des seniors l’octroi d’aides aux entreprises et change le regard que porte le monde du travail sur ces salariés expérimentés.
Malheureusement, vous avez préféré nier la réalité en suggérant que les intéressés pourraient trouver un emploi s’ils s’en donnaient la peine. Est ainsi soigneusement occulté le fait que cette dispense a été mise en place en raison de l’impossibilité évidente pour les chômeurs âgés de trouver un emploi, et ce parce que les employeurs refusent de les embaucher : les entreprises ont même développé une politique active de licenciement des plus de cinquante et cinquante-cinq ans depuis qu’elles ne peuvent plus user et abuser des préretraites subventionnées.
Mais, plutôt que de mettre la pression sur les entreprises, le Gouvernement sacrifie ces hommes et ces femmes sur l’autel des économies de gestion.
Nous savons pourtant tous, dans cet hémicycle, que la loi n’est pas seulement un assemblage de mots : elle détermine les conditions d’existence de ceux qui sont directement concernés.
Imaginez quelle sera la situation de ces travailleurs âgés lorsque, du fait du recul de l’âge de la retraite, ils seront contraints d’aller de petits boulots en petits boulots pour conserver un minimum de droits, s’ils ne basculent pas directement dans le revenu minimum d’activité.
Alors que la situation des salariés seniors est directement liée aux politiques de recrutement des entreprises, celles-ci se dégagent de toute responsabilité et, avec la complicité active de ce gouvernement, en font payer le coût à l’ensemble de la collectivité.
L’article 2 bis s’inscrit d’ailleurs dans le droit fil de ce texte où les chômeurs sont toujours désignés coupables, mais jamais ceux qui les ont licenciés ; où leurs droits et leurs devoirs sont débattus, tandis qu’il n’est jamais question des obligations des entreprises.
Il est vrai que, comme tant d’autres, ce projet de loi a été conçu non pour venir à bout d’un véritable problème, mais pour être « raccord » avec les plans de communication d’un Président qui agite le fantasme de la fraude pour mieux s’attaquer aux protections sociales et aux droits de tous.
En annonçant la mise en place d’un « gigantesque plan pour lutter contre les fraudes aux allocations chômage », le Président accrédite l’idée que la fraude serait massive et porterait sur des montants considérables. Or, selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, les fraudeurs, et nous le savons bien ici, ne représentent que 2 % des demandeurs d’emploi et les fraudes portent, selon les évaluations, sur 0,54 % des sommes versées…
M. Guy Fischer. Voilà la vérité !
Mme Raymonde Le Texier. C’est dire s’il était urgent de mettre en place une politique de sanction massive accréditant l’idée que les chômeurs sont responsables de leur sort et se complaisent dans leur situation !
M. Guy Fischer. On casse une noisette avec un marteau-pilon !
Mme Raymonde Le Texier. Absolument !
D’une manière plus globale, monsieur le secrétaire d’État, le projet de loi ouvre, entre l’explicite et l’implicite, non pas une marge d’interprétation, mais un véritable espace de manipulation.
Quand vous parlez de projet personnalisé d’accès à l’emploi, on trouve cela intelligent… sous réserve de la formation des personnels de la structure qui sera concernée et du nombre de prises en charge par agent. Lorsque vous parlez d’emploi raisonnable, on trouve cela très bien… si l’emploi est vraiment raisonnable, c’est-à-dire s’il correspond aux qualifications et à l’expérience du salarié, et s’il est correctement rémunéré ; sinon, c’est une trappe à bas salaire que vous instituez.
En réalité, ce projet de loi montre que vous poursuivez, de manière implicite cette fois, trois objectifs : d’abord, faire baisser le nombre de chômeurs ; ensuite, faire baisser le coût du chômage, et ce quelles qu’en soient les conséquences pour les intéressés ; enfin – mais peut-être aurais-je dû commencer par là ! –, obliger les demandeurs d’emploi, sous la menace de sanctions financières draconiennes, à accepter non pas un emploi raisonnable, mais un emploi juste disponible, un de ces 500 000 emplois non pourvus de manière chronique tant les conditions de travail, de rémunération et de management y sont archaïques.
Entre l’esprit et la lettre de toutes vos lois sociales, on assiste à un travestissement du vocabulaire : avec vous, la « flexibilité » est l’autre nom de la servitude, le « respect du travail » devient une façon élégante de nommer la réhabilitation de l’exploitation, et, sous l’intitulé « Droits et devoirs des demandeurs d’emplois », vous consacrez une fois de plus le droit indéfiniment extensible du patronat sur les salariés.
Avec les textes qui, depuis des mois, se succèdent, et après le vote tout à l’heure, à la faveur de la nuit, du dispositif sur les 35 heures revues et corrigées, il n’y aura pour ainsi dire plus de code du travail, plus d’accès possible au monde du travail pour les juges, plus de jours fériés – véritable retour au xixe siècle –, plus de protection des salariés.
Vous êtes en train de créer une société de petits boulots et de travailleurs pauvres. Vous êtes en train de créer une société du plein-emploi précaire.
Monsieur le secrétaire d’État, les sénateurs et les sénatrices socialistes disent fermement non à la politique que vous mettez en place et fermement non à ce texte, qui n’en est que le énième avatar. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)