Article 4
(Texte de la commission mixte paritaire)
Dans le même chapitre III, il est inséré un article L. 133-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-3. - En cas de grève des enseignants d'une école maternelle ou élémentaire publique, les enfants scolarisés dans cette école bénéficient gratuitement, pendant le temps scolaire, d'un service d'accueil qui est organisé par l'État, sauf lorsque la commune en est chargée en application du quatrième alinéa de l'article L. 133-4. »
Article 5
(Texte de la commission mixte paritaire)
Dans le même chapitre III, il est inséré un article L. 133-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-4. - Dans le cas où un préavis de grève a été déposé dans les conditions prévues par l'article L. 2512-2 du code du travail et en vue de la mise en place d'un service d'accueil, toute personne exerçant des fonctions d'enseignement dans une école maternelle ou élémentaire publique déclare à l'autorité administrative, au moins quarante-huit heures, comprenant au moins un jour ouvré, avant de participer à la grève, son intention d'y prendre part.
« Dans le cadre de la négociation préalable prévue à l'article L. 133-2, l'État et la ou les organisations syndicales représentatives qui ont procédé à la notification prévue au II de ce même article peuvent s'entendre sur les modalités selon lesquelles ces déclarations préalables sont portées à la connaissance de l'autorité administrative. En tout état de cause, cette dernière doit être informée, au plus tard quarante-huit heures avant le début de la grève, du nombre, par école, des personnes ayant déclaré leur intention d'y participer.
« L'autorité administrative communique sans délai au maire, pour chaque école, le nombre de personnes ayant fait cette déclaration et exerçant dans la commune.
« La commune met en place le service d'accueil à destination des élèves d'une école maternelle ou élémentaire publique située sur son territoire lorsque le nombre des personnes qui ont déclaré leur intention de participer à la grève en application du premier alinéa est égal ou supérieur à 25 % du nombre de personnes qui exercent des fonctions d'enseignement dans cette école.
« Les familles sont informées des modalités d'organisation du service d'accueil par la commune et, le cas échéant, par les maires d'arrondissement.
« Pour les communes de Paris, Lyon et Marseille, le maire de la commune informe sans délai le président de la caisse des écoles de ces modalités. »
.................................................................................................
Article 7
(Texte de l'Assemblée nationale)
Dans le même chapitre III, il est inséré un article L. 133-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-6. - Pour la mise en œuvre du service prévu au quatrième alinéa de l'article L. 133-4, la commune peut accueillir les élèves dans les locaux des écoles maternelles et élémentaires publiques, y compris lorsque ceux-ci continuent d'être utilisés en partie pour les besoins de l'enseignement. »
Article 7 bis
(Texte de la commission mixte paritaire)
Dans le même chapitre III, il est inséré un article L. 133-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-7. - Le maire établit une liste des personnes susceptibles d'assurer le service d'accueil prévu à l'article L. 133-4 en veillant à ce qu'elles possèdent les qualités nécessaires pour accueillir et encadrer des enfants.
« Cette liste est transmise à l'autorité académique qui s'assure, par une vérification opérée dans les conditions prévues au 3° de l'article 706-53-7 du code de procédure pénale, que ces personnes, préalablement informées de la vérification, ne figurent pas dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes.
« Lorsque l'autorité académique est conduite à écarter certaines personnes de la liste, elle en informe le maire sans en divulguer les motifs.
« Cette liste est transmise pour information aux représentants des parents d'élèves élus au conseil d'école. Les personnes y figurant sont préalablement informées de cette transmission. »
Article 8
(Texte de la commission mixte paritaire)
Dans le même chapitre III, il est inséré un article L. 133-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-8. - L'État verse une compensation financière à chaque commune qui a mis en place le service d'accueil prévu au quatrième alinéa de l'article L. 133-4 au titre des dépenses exposées pour la rémunération des personnes chargées de cet accueil.
« Cette compensation est fonction du nombre d'élèves accueillis.
« Pour chaque journée de mise en œuvre du service d'accueil par la commune, la compensation ne peut être inférieure à un montant égal à neuf fois le salaire minimum de croissance horaire par enseignant ayant participé au mouvement de grève.
« Le montant et les modalités de versement et de réévaluation régulière de la compensation sont fixés par décret. Ce décret fixe également le montant minimal de la compensation versée à toute commune ayant organisé le service d'accueil.
« Le versement de cette compensation intervient au maximum trente-cinq jours après notification par le maire, à l'autorité académique ou à son représentant, des éléments nécessaires à son calcul. »
Article 8 bis
(Texte de la commission mixte paritaire)
Dans le même chapitre III, il est inséré un article L. 133-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-9. - La responsabilité administrative de l'État est substituée à celle de la commune dans tous les cas où celle-ci se trouve engagée en raison d'un fait dommageable commis ou subi par un élève du fait de l'organisation ou du fonctionnement du service d'accueil. L'État est alors subrogé aux droits de la commune, notamment pour exercer les actions récursoires qui lui sont ouvertes.
« Par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales, il appartient à l'État d'accorder sa protection au maire lorsque ce dernier fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits, n'ayant pas le caractère de faute détachable de l'exercice de ses fonctions, qui ont causé un dommage à un enfant dans le cadre de l'organisation ou du fonctionnement du service d'accueil. »
Article 9
(Texte de la commission mixte paritaire)
Dans le même chapitre III, il est inséré un article L. 133-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-10. - La commune peut confier par convention à une autre commune ou à un établissement public de coopération intercommunale l'organisation pour son compte du service d'accueil.
« Elle peut également confier par convention cette organisation à une caisse des écoles, à la demande expresse du président de celle-ci.
« Lorsque les compétences relatives au fonctionnement des écoles publiques ainsi qu'à l'accueil des enfants en dehors du temps scolaire ont été transférées à un établissement public de coopération intercommunale, celui-ci exerce de plein droit la compétence d'organisation du service d'accueil en application du quatrième alinéa de l'article L. 133-4. »
Article 9 bis A
(Texte de la commission mixte paritaire)
[Pour coordination]
Dans le même chapitre III, il est inséré une section II intitulée : « L'accueil des élèves des écoles maternelles et élémentaires privées sous contrat » et un article L. 133-11 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-11. - Un préavis de grève concernant les personnels enseignants des écoles maternelles et élémentaires privées sous contrat ne peut être déposé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives qu'à l'issue d'une négociation préalable entre ces organisations et l'État lorsque les revendications professionnelles qui motivent le préavis relèvent du pouvoir de décision de ce dernier. La négociation est soumise aux règles d'organisation et de déroulement fixées au II de l'article L. 133-2.
« Le III du même article est applicable aux préavis de grève déposés par les organisations syndicales mentionnées à l'alinéa précédent. »
Article 9 bis
(Texte de la commission mixte paritaire)
Dans la même section II, il est inséré un article L. 133-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 133-12. - L'organisme de gestion des écoles maternelles et élémentaires privées sous contrat est chargé de la mise en place du service d'accueil prévu à l'article L. 133-1 pour les élèves de ces écoles.
« Dans le cas où un préavis de grève a été déposé dans les conditions prévues par l'article L. 2512-2 du code du travail et en vue de la mise en place d'un service d'accueil, toute personne exerçant des fonctions d'enseignement dans une école maternelle ou élémentaire privée sous contrat déclare au chef d'établissement, au moins quarante-huit heures, comprenant au moins un jour ouvré, avant de participer à la grève, son intention d'y prendre part. Le chef d'établissement communique sans délai à l'organisme de gestion de l'école le nombre de personnes ayant fait cette déclaration. L'article L. 133-5 du présent code est applicable aux informations issues des déclarations individuelles.
« L'État verse une contribution financière à chaque organisme de gestion qui a mis en place le service d'accueil au titre des dépenses exposées pour la rémunération des personnes chargées de cet accueil, lorsque le nombre de personnes exerçant des fonctions d'enseignement dans chaque école qu'il gère et qui ont participé à la grève est égal ou supérieur à 25 % du nombre d'enseignants de l'école. Cette contribution est fonction du nombre d'élèves accueillis et du nombre effectif de grévistes. Son montant et les modalités de son versement et de sa réévaluation régulière sont fixés par décret. »
Article 9 ter
(Texte de la commission mixte paritaire)
L'application des articles L. 133-4 et L. 133-6 à L. 133-12 du code de l'éducation fait l'objet d'une évaluation présentée par le Gouvernement sous la forme d'un rapport déposé avant le 1er septembre 2009 sur le bureau des assemblées. Cette évaluation retrace notamment les difficultés matérielles rencontrées par les communes pour l'organisation du service d'accueil.
Article 10
(Texte de la commission mixte paritaire)
Les articles L. 133-1, L. 133-3 à L. 133-10 et L. 133-12 du code de l'éducation entrent en vigueur à compter de la publication du décret prévu à l'article L. 133-8 du même code et au plus tard le 1er septembre 2008.
M. le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.
M. Yves Détraigne. L’élaboration du présent texte ne me paraît pas avoir été très satisfaisante. Elle est emblématique d’un travail législatif résultant d’une décision à l’origine purement politique : d’abord, on annonce la décision ; ensuite, on étudie les modalités de sa mise en œuvre au sein des services ministériels ; enfin, on s’aperçoit que, dans bien des cas, elle pose plus de problèmes qu’elle n’en résout.
En l’occurrence, heureusement, le Sénat était là, notamment son rapporteur, Philippe Richert, un homme de terrain…
M. Alain Gournac. Pas seulement un homme de terrain !
M. Yves Détraigne. … connaissant les réalités de la vie communale. Il a su apporter, de même que l’Assemblée nationale et la commission mixte paritaire, un certain nombre d’améliorations au texte, qui étaient indispensables pour permettre aux maires de se l’approprier dans un climat relativement serein.
Il est également heureux, monsieur le ministre, que vous ayez entendu les observations qui montaient du terrain et accepté de préciser certaines dispositions, en indiquant en particulier que ce texte serait mis en œuvre avec souplesse et que la responsabilité des maires ne serait pas recherchée si des problèmes apparaissaient lors de l’application de ses dispositions.
Pour ces raisons, une grande majorité des membres du groupe de l’Union centriste-UDF votera les conclusions de la commission mixte paritaire.
MM. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles, et Alain Gournac. Très bien !
M. Yves Détraigne. Pour ma part, compte tenu des conditions détestables dans lesquelles ce texte a été élaboré, je m’abstiendrai. Je fais miens les propos tenus par Jean-Pierre Raffarin dans cette enceinte lors de la discussion générale, en première lecture, du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République : les Français ne veulent plus de textes préparés dans les cabinets ministériels. Or tel a bien été le cas du présent projet de loi. (M. Claude Biwer applaudit.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
(Le projet de loi est adopté. – Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq,
est reprise à vingt et une heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
7
Droits et devoirs des demandeurs d'emploi
Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux droits et aux devoirs des demandeurs d’emploi (n° 485).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, qui s’est réunie ce matin à l’Assemblée nationale pour élaborer un texte commun sur les dispositions du projet de loi restant en discussion, est parvenue à un accord. Elle a adopté six amendements, qui avaient surtout pour objet d’améliorer ou de préciser la rédaction du texte.
En ce qui concerne les critères de l’offre raisonnable d’emploi, la commission mixte paritaire a d’abord décidé que seules les formations prévues par le projet personnalisé d’accès à l’emploi auront pour effet de proroger les délais prévus pour réévaluer ces critères.
Elle a également indiqué que le critère relatif au temps de trajet en transports en commun, entre le domicile et le lieu de travail, doit s’appliquer au trajet aller comme au trajet retour.
Outre ces modifications très ponctuelles, la commission a longuement débattu de la disposition adoptée par l’Assemblée nationale tendant à supprimer progressivement, d’ici à 2012, la dispense de recherche d’emploi pour les seniors.
Créée en 1984, cette dispense de recherche d’emploi concerne actuellement 400 000 personnes de plus de cinquante-cinq ans, qui perçoivent, le cas échéant, leurs allocations chômage sans avoir l’obligation de rechercher un emploi.
Cela fait plusieurs années que la commission des affaires sociales demande la suppression de cette dispense ; j’avais moi-même défendu cette position, en 2006, dans le cadre du groupe de travail qu’avait mis en place Gérard Larcher pour réfléchir aux mesures de nature à soutenir l’emploi des seniors. On ne peut pas en effet prétendre encourager les seniors à rester dans l’emploi si l’on maintient, dans le même temps, un mécanisme qui a pour effet de les tenir à l’écart du marché du travail.
La suppression de la dispense de recherche d’emploi devrait être complétée, à l’automne, par des mesures destinées à inciter les chefs d’entreprise à garder leurs salariés les plus âgés. Trop souvent, les employeurs se séparent de ces salariés en tenant compte du seul coût du travail, sans apprécier à sa juste valeur leur apport en termes d’expérience et de transmission des savoirs.
Sur le fond, la mesure adoptée par l’Assemblée nationale ne nous pose donc pas de problème. Du point de vue de la procédure, en revanche, je dois exprimer un regret, partagé, je le crois, par les sénateurs de tous les groupes : en raison du recours à la procédure d’urgence, le Sénat n’a pas eu l’occasion de débattre en séance plénière de ce sujet important. Le recours à la procédure d’urgence est d’ailleurs assez fréquent sur les textes qui touchent à l’emploi ou au droit du travail. La mise en œuvre de la révision constitutionnelle adoptée lundi s’accompagnera, nous l’espérons, de nouvelles habitudes en la matière.
Sous cette réserve, qui ne remet pas en cause notre appréciation très positive sur l’ensemble du projet de loi, je vous invite, mes chers collègues, à approuver le texte élaboré par la commission mixte paritaire, qui permettra, d’une part, de mieux définir la notion d’offre raisonnable d’emploi, d’autre part, de compléter la transformation, en cours, du service public de l’emploi. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
M. Guy Fischer. Je suis admiratif devant tant de concision, monsieur le rapporteur !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur le président, monsieur le président de commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi relatif aux droits et aux devoirs des demandeurs d’emploi constitue une nouvelle et importante étape de la démarche engagée depuis plusieurs mois par le Gouvernement pour rénover le service public de l’emploi, étape marquée d’ores et déjà par la fusion de l’ANPE et des ASSEDIC.
L’enjeu est crucial. En effet, un service public de l’emploi efficace peut permettre à notre pays de réduire de près de un point son taux de chômage et, par conséquent, permettre à 200 000 ou 300 000 chômeurs de retrouver un emploi.
De ce point de vue, la France a un retard important à rattraper.
D’une part, l’existence de deux structures différenciées, l’ANPE et les ASSEDIC, faisait peser la complexité administrative sur les demandeurs d’emploi, pourtant en situation de fragilité. D’autre part, le traitement très administratif du chômage se fondait sur son indemnisation plutôt que sur l’accompagnement personnalisé, sur mesure, du demandeur d’emploi. Enfin, contrairement à tous les autres pays européens, quelle que soit la couleur politique de leur gouvernement, nous n’avions pas mis en place une véritable logique des droits et des devoirs.
Le projet de loi, qu’il plaira, le cas échéant, au Sénat de voter, engage un véritable changement de cap, et ce sur deux points inextricablement liés.
Son premier volet vise à mettre en place un véritable accompagnement personnalisé du demandeur d’emploi. Dès le premier entretien, il sera possible de définir avec la personne ce que sera son projet personnalisé d’accès à l’emploi, en fonction de son parcours, de sa qualification, de son lieu de vie, de son environnement familial et du territoire où il réside. Je sais que ces sujets sont chers au Sénat.
Le second volet de ce projet de loi vise à renforcer les droits et les devoirs des demandeurs d’emploi ainsi que l’engagement réciproque pris entre ceux-ci et le service public de l’emploi.
Devant le Sénat, je me suis engagé notamment à améliorer substantiellement les aides à la mobilité, sur lesquelles M. le rapporteur avait particulièrement mis l’accent. Je me suis également engagé à ce que les actions en matière d’accompagnement dans la lutte contre l’illettrisme puissent être opérationnelles en 2009. Enfin, les entreprises devront progressivement mieux répondre aux candidatures qu’elles reçoivent.
De manière globale, ces mesures doivent permettre de mettre fin à des pratiques parfois arbitraires, qui consistaient à prononcer des sanctions sans le moindre élément objectif. Ce projet de loi vise aussi à lutter plus efficacement contre les abus d’une minorité de demandeurs d’emploi. À cet égard, je veux être très clair : il ne s’agit en aucun cas de stigmatiser les demandeurs d’emploi, qui sont d’abord des personnes en situation difficile. Pour autant, il ne s’agit pas de se cacher derrière son petit doigt et de nier qu’une petite minorité profite du système d’assurance chômage sans y avoir droit. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Lors de nos débats, nous n’avons pas toujours été d’accord, ce qui est parfaitement légitime. Pour autant, j’ai beaucoup apprécié le caractère extrêmement constructif de nos échanges. Chacun a pu exprimer ses positions et expliciter ses conceptions, différentes selon les sensibilités politiques, comme il est naturel.
Finalement, plusieurs amendements ont été adoptés. Grâce à M. le rapporteur et, plus largement, à la commission des affaires sociales, dont le président, Nicolas About, a joué un rôle déterminant dans l’animation des débats, nous avons pu notamment clarifier ce qui est attendu de la part du demandeur d’emploi dans le cadre de l’élaboration de son projet professionnel.
Les périodes de formation seront dorénavant prises en compte. De même, aucun demandeur d’emploi ne pourra être contraint d’accepter un emploi à temps partiel. Nous ne voulons en aucun cas « acheter » une amélioration de l’emploi au prix d’une plus grande précarité ; en revanche, nous laissons la possibilité au demandeur d’emploi, s’il le souhaite, d’accepter un emploi à temps partiel.
Enfin, le projet de loi crée un médiateur national qui aura pour mission de s’assurer de l’efficacité du dispositif. Ce médiateur sera placé au sein du futur opérateur du service public de l’emploi issu de la fusion entre l’ANPE et les ASSEDIC. Donc, rassurez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, il ne s’agira pas d’une usine à gaz !
Enfin, monsieur le rapporteur, vous avez formulé un regret concernant la disposition relative à l’emploi des seniors. Je vous prie d’accepter mes excuses, et, comme vous, j’aurais souhaité que cette question puisse être débattue au Sénat, d’autant qu’il s’agit là d’un sujet auquel votre commission des affaires sociales s’est toujours beaucoup intéressée.
Afin que ce projet de loi puisse être applicable à compter du 1er janvier 2009, l’urgence avait été déclarée. C’est la raison pour laquelle le rapporteur pour l’Assemblée nationale, Marie-Christine Dalloz, a déposé un amendement relatif à la dispense de recherche d’emploi des seniors. Néanmoins, nous aurons l’occasion de débattre de l’ensemble du plan pour l’emploi de seniors à l’occasion de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous pourrons alors prendre en considération les contributions du Sénat. (Très bien ! sur les travées de l’UMP.)
Pour conclure, je voudrais esquisser deux réflexions sur ce que doit être notre approche en matière de politique sociale.
Une politique sociale moderne, s’agissant plus particulièrement de l’accompagnement des demandeurs d’emploi, doit impérativement faire du sur-mesure et, si je puis dire, de la dentelle. Une politique sociale moderne doit répondre aux nouvelles attentes et aux nouveaux défis de l’emploi ; on ne peut plus raisonner de façon administrative en adoptant une même approche, quelle que soit la diversité des parcours des uns et des autres. Pour être efficaces et justes, je le répète, nos politiques sociales doivent faire du sur-mesure. De ce point de vue, la mise en place d’un vrai parcours d’accompagnement personnalisé de retour à l’emploi sera déterminante.
Même si je sais que certains d’entre vous peuvent avoir une approche différente, je suis intimement convaincu que nous ne pourrons préserver un système de protection sociale généreux qu’à la condition que nous donnions des gages à l’ensemble de l’opinion publique de notre volonté de veiller à ce que l’argent dépensé au titre de la solidarité nationale fasse l’objet d’un juste contrôle. C’est aussi une question d’équité et de justice.
Je remercie le Sénat d’avoir contribué, avec le Gouvernement, à cette première entreprise. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme Annie David. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voici réunis en cette soirée du 23 juillet 2008, à vingt et une heures trente, pour examiner les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif aux droits et devoirs des demandeurs d’emploi.
Si j’insiste sur cette date et sur cette heure, c’est pour manifester mon mécontentement quant à l’organisation de nos travaux.
En effet, monsieur le secrétaire d’État, vous avez décidé, avec le Gouvernement, de déclarer l’urgence, qui plus est pendant la session extraordinaire, sur un texte qui aurait mérité deux lectures dans chacune de nos deux assemblées, nous avons pu le constater ce matin lors de la réunion de la commission mixte paritaire ! De nombreux points ont été soulevés et le président Méhaignerie a souhaité qu’un bilan de l’application de ce projet de loi soit fait par les deux rapporteurs dans un an. L’article 2 bis mérite à lui seul que nous engagions à nouveau le débat.
En outre, ce texte n’aurait pas dû voir le jour en dehors du calendrier social, qui inclut la négociation sur la nouvelle convention d’assurance chômage et qui doit prendre en compte les évolutions en matière de chômage. Je ne reviendrai pas sur tout ce que nous avons dénoncé lors de l’examen de ce projet de loi.
Comme vous l’avez rappelé voilà un instant, monsieur le secrétaire d’État, pour le Gouvernement, ce projet de loi est une étape importante dans la politique que vous mettez en œuvre : plus de flexibilité et moins de droits pour les salariés, en contrepartie d’une plus grande liberté et de profits accrus pour les entreprises !
Pourtant, je le rappelle, seul un demandeur d’emploi sur deux inscrits à l’ANPE est indemnisé. Force est de constater que la notion du « chômage volontaire » n’a guère de sens pour celles et ceux qui ne perçoivent pas d’indemnisation. Et pourtant, ces demandeurs d’emploi restent inscrits sur les listes de l’ANPE, malgré les contrôles et les pressions de plus en plus fortes dont ils sont l’objet. Cela montre bien leur volonté de travailler.
Des sanctions, des pressions, il en existait déjà, elles ont même été renforcées avec le décret no 2005-912 du 2 août 2005 qui avait introduit certaines modifications dans les critères de l’offre acceptable d’emploi.
Malgré la crise économique dans laquelle la France est durablement plongée, la généralisation de la précarité et du « précariat », cette forme de précarité appliquée aux salariés, vous partez du postulat idéologique selon lequel les demandeurs d’emploi ne veulent pas travailler et vous les rendez responsables de leur situation.
La désindustrialisation massive de notre pays et les délocalisations boursières devraient pourtant vous interpeller. Mais vous n’évoquez aucun de ces sujets, préférant renvoyer le chômage de masse à la responsabilité individuelle des salariés privés d’emploi.
Lors de nos débats, les sénatrices et sénateurs communistes ont tenté d’attirer l’attention du Gouvernement et de la majorité sénatoriale sur la notion de « responsabilité sociale de l’entreprise ». Autant dire que notre invitation à la réflexion est restée lettre morte. Ce qui vous importe, c’est moins d’engager un réel débat sur les droits et les devoirs des demandeurs d’emploi que d’obliger ces derniers à accepter n’importe quelle offre.
Et, de ce point de vue, vos ambitions sont claires : pour réduire le chômage d’ici à 2012, imposer la notion d’employabilité.
La réduction du chômage que vous voulez est tout artificielle, et vous le savez. D’une part, parce que l’évolution démographique est telle que, naturellement, le nombre des demandeurs d’emploi va diminuer. D’autre part, avec la notion d’employabilité, qui est au cœur de votre politique, vous pouvez vous dispenser, comme dans le présent texte, de proposer à chaque demandeur d’emploi un travail de qualité, correspondant à ses qualifications, assorti d’une juste rémunération et d’un rythme compatible avec sa vie familiale. Non, il n’est ici question que de faire correspondre la demande du marché avec des salariés corvéables et flexibles à merci ! Vous leur imposez une « occupation » qu’ils ne pourront refuser. Nous sommes donc très loin de la définition du travail qui nous est chère.
Mais le texte est également très éloigné de cette valeur travail dont vous vous faisiez l’écho durant la campagne pour l’élection présidentielle, car l’employabilité – mot bien barbare ! –, si elle satisfait aux exigences comptables d’un chômage à moins de 5 %, ne répond pas aux exigences sociales.